FRF Follereau Petite Bio
FRF Follereau Petite Bio
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de la France
Trouver le nerf de la guerre Il est, également, l’un des premiers à s’être préoc-
cupé de la pérennité de son action. Il ne veut pas
C onsidéré alors comme un utopiste - à l’époque la d’une « initiative qui, née dans des circonstances
particulières, disparaîtra avec celles-ci. Mais [d’]une Eveilleur de conscience
oeuvre. Une oeuvre qu’il faut bâtir pour toute la Terre
et pour des siècles… il y aura toujours… des mal- Raoul F ollereau a toujours encouragé les participa-
heureux à secourir, des malades à soigner, des petits tions actives et suscité des engagements massifs en
enfants pauvres à élever. » : structurée par André faveur d’une conscience morale universelle. C ette
Récipon, l’initiative individuelle devient une œ uvre. « citoyenneté est un appel à l’imagination et à la
Nous avons ouvert des yeux et des coeurs qui ne recherche de solutions originales pour des problè-
peuvent plus oublier. Le mouvement est irréversible ». mes insolubles en apparence : « Tant qu’il y aura sur
la terre un innocent qui aura faim, qui aura froid, ou
Collecter - coordonner - contrôler qui sera persécuté ; tant qu’il y aura sur la terre une
famine évitable ou une prison arbitraire, ni vous, ni
Raoul F ollereau est encore à l’origine de la plupart moi nous n’aurons le droit de nous taire, ni de nous
des associations européennes qui luttent contre la reposer ».
lèpre : une « véritable union européenne » de l’aide
aux lépreux d’abord en Europe, puis au-delà. C ette Une oeuvre universelle
coordination, unique, fonde sa réussite sur l’efficaci-
té de la collecte de fonds et de la gestion, la compé- L’espérance est la clé de son engagement et le mes-
tence de commissions médicales où siègent les plus sage qu’il adresse tout particulièrement aux jeunes «
grands spécialistes internationaux, le dynamisme de de droite, de gauche… qu’importe ! ». C ’est à eux
représentants permanents sur le terrain qui veillent à qu’il confie son œ uvre, au soir de son existence rem-
la bonne utilisation des fonds, et sur une logistique plie de son mieux « mais qui demeurera inachevée »
adaptée. Le développement d’associations africai- : « Le trésor que je vous laisse, c’est le bien que je
nes est l’un des faits importants des dernières n’ai pas fait, que j’aurais voulu faire, et que vous
années de vie de Raoul F ollereau. ferez après moi ».
pour notre temps Destiné à une action qui mobilisa le monde, Raoul
F ollereau part de la poésie et de la défense des
valeurs attachées à notre patrimoine culturel. Aimer-
« J’ai tenté, dans une vie d’homme, Agir, les deux verbes ont rythmé toute sa vie.
de mettre en pratique ce que j’avance. C onciliant sentiment et efficacité, l’intellectuel est
Car aimer sans agir, cela ne signifie rien. devenu un homme d’action : « Les murs sont tom-
Comprenez-vous ? » bés. L’amour a vaincu. », diront les médecins, en
Raoul Follereau reconnaissant le rôle de celui qui osa renverser les
tabous et mettre fin à l’ignorance et à la lâcheté, en
donnant un statut aux malades de la lèpre.
Le monde entier connaît l’œuvre de Raoul Follereau En 1927, il fonde la Ligue d’Union latine avec son
contre la lèpre ; le monde entier connaît la générosité organe, un journal qui s’appelle L’ O euvre latine.
enthousiaste avec laquelle il mena ce combat et en fit C ertes, cette nouvelle fondation continue en un
un triomphe. On sait moins ce qui précéda et le pré- sens l’oeuvre amorcée dan la Jeune Académie : on
para à cette action… trouve dans ce journal des publications de poèmes
Q uand on découvre ces débuts, on peut d’abord ; il y aura aussi, à côté de ce journal, des publica-
être surpris. C ar cet homme d’action est parti de la tions de recueils de poèmes. En 5 ans, il édite 150
poésie et d’une défense des valeurs attachées à volumes de 100 poètes différents. D’ailleurs, Raoul
notre patrimoine culturel. Mais, à y regarder de plus F ollereau écrit aussi pour le théâtre ; il a des pièces
près, on découvre entre ces moments divers de la jouées parfois avec un grand succès (Petite Poupée
vie de Raoul F ollereau une continuité qui me semble a eu mille représentations) ; il s’adresse donc direc-
profondément émouvante… C ette continuité de fait tement à un large public.
compte cependant moins que la continuité intérieure De même il y aura, organisées par la Ligue d’Union
d’un dévouement au cours duquel il n’a cessé de se Latine, des conférences, il y aura des pièces de
préparer et de s’armer pour la grande cause théâtre, il y aura des concerts avec des
qu’il devait servir avec tant d’éclat. exposés les précédant : toute une
activité qui élargit le premier dessein
Une âme qui se cherche ; mais il y a aussi dorénavant une
doctrine précise qui s’est élaborée.
L a p o é sie vie nt d ’ a b ord ; elle vie nt O n en trouve le contenu dans une
tout d e suit e . R a oul F ollere a u n’ a v ait célèbre conférence qu’il a donnée en
p a s vingt a ns q u a n d il fon d a e n 1920 1930 à la Sorbonne où il évoque tou-
la J e un e A c a d é mie ; et, a ujourd ’hui, le tes les valeurs que représente notre
m e m bre d e la vieille A c a d é mie s e civilisation.
plaît à s alu er c ett e cré ation d e
q u elq u e s a d ole s c e nts â g é s d e Du métissage à l’esprit latin
16 à 17 a ns. C ett e cré ation
ét ait d e stin é e à faire c onn aît- Les études gréco-latines comp-
re l’o e uvre d e s p o èt e s ; et tent b e auc oup p our R a oul
lui-m ê m e ét ait un p o èt e . Il F ollere au puisqu’il fond e un
a v ait d éjà c o m p o s é d e s Institut d’Union Latine pour la
p o è m e s n o m bre u x e t allait rénovation d es étud es clas-
c ontinu er - d e s p o è m e s d ’ a - siques. Il a conscience de ce
m our, p our c elle q ui d e v ait être la qu’elles apportent et il le dit avec
c o m p a gn e d e tout e s a vie et q u’il fermeté. Il va jusqu'à déclarer ces
a v ait aim é e alors q u’ils n e c o m p - études nécessaires et indispensables.
t aie nt à e ux d e ux q u e tre nt e a ns, D’autres l’ont dit ou le diront : les défen-
m ais a ussi d ’ a utre s p o è m e s […] où l’on voit ses de ces études peuvent venir de divers bords […]
un e â m e q ui s e c h erc h e et e x prim e d éjà , d e Et j’aime que tant de voix s’entendent pour montrer
fa ç on in c ert ain e , m ais trè s fort e , son b e soin les valeurs qui ont trouvé dans les premiers textes
d ’ a b solu. J’ ai lu plusie urs d e c e s re c u eils, j’ ai p u de notre civilisation, que j’appellerais européenne,
y voir c ett e ins piration lyriq u e s a ns d out e et c h a - une formule initiale et un élan valable pour toujours.
le ure us e , m ais si sin c ère q u’ elle sonn e souv e nt Raoul F ollereau, en effet, est de ceux qui ont cons-
c o m m e un e c onfid e n c e . J’y ai vu p araître c e s cience que ces études apportent non seulement la
a ng e s - l’ a ng e a ux c h e v e ux bla n c s ou l’ a ng e noir clarté de l’esprit, mais une réelle formation pour l’in-
- q ui c ons eille nt, et lui q ui s e re b elle c ontre le s dividu et pour la société. La latinité est, dit-il héritiè-
a vis in q uiét a nts. « M ais fa ut-il é c out er le s a ng e s re et continuatrice des civilisations antiques. «
? ». D’ailleurs, qu’était-ce donc que la race latine, sinon
J’y ai vu a ussi c ett e att e nt e d ’un d e stin q ui s erait déjà la résultante intellectuelle, et physique aussi,
le sie n. « R elè v e -toi et att e n d s p our fix er ton d e s- d’influences et de métissages grecs et peut-être
tin : d a ns le ciel in c onnu, d e s étoile s c ons pire nt même égyptiens ? Il n’y a plus de race latine, nous
». sommes tous des métis. Mais il y a un esprit latin ».
D a ns d e t els t e xt e s, on voit la forc e int érie ure q ui Et il aime à citer les témoignages disant qu’en elle le
s e pré p are et l’ a m our q ui pre n d c ons cie n c e d e raisonnement, l’imagination et la sensibilité se déve-
s e s e xig e n c e s. M ais e n m ê m e t e m p s, il fa ut loppent parallèlement. Dans ce cas l’oeuvre littérai-
re c onn aître d a ns c e s p u blic ations p o étiq u e s le re peut donc devenir formation morale. En somme,
d é sir d ’ aid er et d e p art a g er. E t surtout il p u blie ces études jouent un rôle contre ce « mal du siècle
le s a utre s et c h erc h e à le s faire c onn aître . N ’ a -t- » d’une société « sans idéal, vouée à des dieux tri-
il p a s é crit plus t ard : « P ersonn e n’ a le droit d ’ ê - stes : science, progrès, humanité. » C ette crise, je
tre h e ure ux tout s e ul » ? M ais, bie ntôt, c e d é sir crois est loin d’être dominée aujourd’hui.
d ’ aid er pre n d un e form e nouv elle .
De l’intellectuel à l’homme d’action sans encombre à Santiago. A l’arrivée, toujours
aussi calme, Mermoz dira au jeune couple : « Moi
[…] F ollereau remplit la tâche que tentent à leur tour aussi, j’ai eu peur et j’ai eu froid. Le courage c’est
de remplir les Directions des relations culturelles ou d’avoir peur mais de marcher quand même. » Une
bien de la francophonie. Il s’occupe de tous les pays règle que, comme Mermoz, Raoul Follereau fera
[…] Partout il s’intéresse à la création de collèges sienne toute sa vie. »
[…] Partout il fonde des bibliothèques de livres fran-
çais. Et c’est une joie de le voir, dès novembre 1931, Raoul Follereau - Hier et aujourd’hui, par Etienne
célébrer la création de 32 bibliothèques publiques et Thévenin - Ed. Fayard - Extraits.
gratuites où se sont accumulés 25 000 volumes et
c ela continuera : d’autres bibliothè ques seront Une rencontre fortuite
créées, malgré les difficultés, à coup d’obstination
et de générosité : « Il faut les créer : nous les crée- En dix ou quinze ans, le poète est devenu un
rons ! C e qui nous paraissait impossible sera fait ». homme d’action. Il manque encore à cette action un
Et cette fierté peut sonner haut, car cela effectivement but précis et déterminé auquel consacrer de telles
a été fait. Dans cette action menée au nom de l’idéal, ressources intérieures. Et là encore j’aime marquer
on reconnaît toute la ferveur de celui […] qui dorénavant la continuité. C ’est parce qu'il avait été envoyé en
répétait inlassablement autour de lui les mots de paix et Argentine, en partie par le G ouvernement français et
de joie. J’avoue que j’aimerais qu’en notre monde d’au- par l’Alliance française, pour s’occuper des ques-
jourd’hui des voix s’élèvent parfois pour faire rayonner tions que je viens d’évoquer, que ces qualités sont
à nouveau de tels mots et de telles ferveurs. apparues, qu’un journal argentin, La N acion, l’a
chargé d’une enquête sur le travail du Père de
Au-dessus des Andes avec Mermoz F oucauld. Avec son enthousiasme habituel, il se
lançait dans cette affaire : ce qui l’a amené à de
Il faut se représenter toute la volonté, tout le besoin nouveaux voyages en Afrique cette fois. […] Or,
de donner qui a animé cette action. Il faut se repré- c’est dans un des voyages consacrés au Père de
senter F ollereau traversant ces pays ; par exemple, F ouc auld que, en 1936, aux environs d e
on le voit, une certaine fois, partir de Rio de Janeiro Tamanrasset, Raoul F ollereau fit une rencontre déci-
sive qu’il a lui-même racontée : à l’occasion d’une
panne de voiture, il rencontra les victimes du pire
crime contre ces valeurs qu’il avait si passionné-
ment défendues, les plus malheureux, les plus reje-
tés de tous - les lépreux. A partir de ce moment-là,
sa vie leur a été consacrée.