Domaine Prive PDF
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profit de l’investissement
L’Etat s’est engagé sur plusieurs créneaux de développement dont notamment le lancement d’une
nouvelle stratégie de développement socio-économique qui reposent sur plusieurs secteurs clés
s’articulant autour d’un certain nombre de programmes et de plans phares sectoriels empreints
d’une politique volontariste des pouvoirs publics.
Il s’agit entre autres ; du Plan « Maroc vert » pour la relance de l’agriculture marocaine, du Pacte
national pour l’émergence industrielle (horizon 2015), du Plan énergétique (horizon 2020), de la
stratégie nationale pour le développement de la compétitivité et de la logistique (horizon 2015),
du « Plan Azur » pour le développement du tourisme (vision 2020), du « Plan Halieutis »
(Horizon 2020), de la vision 2015 pour l’artisanat, du « Plan Rawaj » (horizon 2020), du
Programme d’urgence pour l’éducation (Horizon 2012), de la stratégie « Maroc Innovation », de
la stratégie de la santé (horizon 2012), etc.
Pour accompagner ces politiques sectorielles, entre 2002 et 2013, 150.000 Ha ont été mobilisés
au profit d’investissements publics Set privés et ayant touché divers secteurs d’activité dont
95.000 Ha, pour la mise en œuvre du plan Maroc vert au titre de trois tranches du partenariat
agricole public/privé et 65.000 Ha pour accompagner les projets d’infrastructure et soutenir
diverses stratégies sectorielles pour un investissement global projeté de près de 253 Md DH et
199.000 emplois à créer. 45% de la superficie mobilisée, durant cette période, a touché le secteur
des énergies renouvelables, 23% pour l’habitat, 20% pour le tourisme et 8% pour l’industrie.
En 2014, près de 5.080 Ha, hors partenariat public-privé agricole1, ont été mobilisés pour la
réalisation de 194 projets devant drainer un investissement de l’ordre de 21,2 MdDH et la création
à terme de 23.846 emplois. Les projets examinés dans le cadre du régime conventionné ont
concerné 56% (2.843 Ha) de la superficie mobilisé et 49% (9,547 MdDH) des investissements
projetés. Pour la gestion déconcentrée des investissements, 96% des projets approuvés ont
mobilisé 44% (1.062 Ha) des superficies et 51% (9.930 MdDH) des investissements à drainer.
Dans le cadre de son programme annuel de 2015, la Cour des comptes a effectué une mission de
contrôle de la gestion de la direction des domaines de l’Etat relevant du Ministère de l’Economie
et des finances ayant concerné la mobilisation du domaine privé de l’Etat au profit de
l’investissement. La Cour des comptes a relevé les dysfonctionnements compromettants la
mobilisation du foncier de l’Etat et qui concernent des carences d’ordre juridique et structurel et
des carences de gestion lié à la planification, la programmation, la mobilisation et la valorisation
1
Dans le cadre du partenariat public-privé agricole, initié à partir de 2005, une superficie de plus de 99.000 Ha a été mobilisée pour
600 projets pour un montant prévisionnel d’investissements projetés s’élevant à près de 19 MdDH et 47.515 emplois à créer.
1
Les bailleurs de fonds2 accordent aussi, une attention particulière au foncier en tant que critère clé
pour l’évaluation et l’appréciation de l’environnement des affaires.
Conscient de cette importance du foncier, les pouvoirs publics ont engagé des réformes
successives, pour améliorer le dispositif juridique dédié à l’encouragement de l’investissement,
qui se sont déroulées principalement en quatre étapes. La première qui s’est déroulée jusqu’en
1996, a connu l’instauration des codes d’investissement sectoriels. Cependant, ces codes n’ont
pas prévu des mesures incitatives en mesure d’ériger le foncier en tant que facteur déterminant
dans l’acte d’investir.
De plus, la multiplicité et la prépondérance des dispositions fiscales, à connotation sectorielle, a
eu pour conséquence le manque de cohérence et de corrélation entre les incitations fiscales
prévues et les effets escomptés de l’encouragement des investissements.
A partir de 1996, et en raison des limites précitées, une charte de l’investissement3 a été instituée
en remplacement des codes d’investissement sectoriels, à l’exception du secteur agricole. Cette
charte a lancé les premiers jalons d’incitations foncières. Les mesures prévues, ont concerné
essentiellement, les aides foncières directes et la constitution d’une réserve foncière destinée aux
projets d’investissement et la définition de la participation de l’Etat pour l’acquisition et
l’équipement des terrains nécessaires à ces investissements.
La troisième étape a été marquée par l’octroi d’avantages fiscaux au profit des promoteurs
immobiliers4 et d’une contribution financière directe accordée par le fonds Hassan II pour le
développement économique et social revêtant, au choix du promoteur, d’une participation soit au
coût d’acquisition du terrain, soit au coût de construction des bâtiments.
A partir de 2002, les pouvoirs publics ont instauré la gestion déconcentrée de l’investissement.
Désormais, la vente du foncier est autorisée par les Walis de régions pour la réalisation de projets
d’investissement, dont le montant est inférieur à 200 MDH. Ces prérogatives5 ayant concerné au
départ les secteurs industriel, agro-industriel, minier, touristique, artisanal et d’habitat ont été
étendues aux secteurs de l’enseignement et de la formation, de l’Energie et de la Santé.
Non définition du domaine privé et de son régime juridique et non maitrise
de son portefeuille
Le législateur marocain n’a pas donné de définition juridique précise du domaine privé de l’Etat
et du régime juridique qui lui est applicable. En revanche, il est communément admis que ce
domaine est constitué d’une part, d’immeubles qui ne font pas partie du domaine public régi par
le Dahir du 1er Juillet 1914 et d’autre part, d’immeubles non soumis à des régimes particuliers du
droit foncier marocain tels les Habous, le domaine forestier et les terres collectives.
En effet, cette définition négative admise par défaut, a pour corollaire la difficulté de maîtrise de
l’assiette foncière du domaine privé de l’Etat, sa nature, ses fonctions et ses procédures de gestion
et de valorisation et la garantie des droits et des obligations de l’Etat en tant que propriétaire ainsi
que le régime juridique qui lui est applicable.
Par ailleurs, l’absence d'une connaissance précise des immeubles domaniaux et la non-maîtrise
du portefeuille foncier mobilisable reste un l’obstacle majeur pour une valorisation optimale du
foncier de l’Etat. Jusqu’à présent, les pouvoirs publics n’ont pas encore procédé à un recensement
exhaustif de ce patrimoine foncier.
2
Pour l’indice de la facilité d’accès à l’immobilier, le Maroc est classé en 75ème place sur 189 économies évaluées dans le rapport
"Doing Business" de 2015 contre la 168ème place parmi 185 pays en 2013.
3
Dahir n°1.95.213 du 8 novembre 1995 portant promulgation de la loi-cadre n°18.95 formant charte de l’investissement entrée en
vigueur en janvier 1996. (B.O n°4336 du 6 décembre 1995).
4
Dahir n°1.85.100 du 17 Août 1985 portant promulgation de la loi n°15.85 instituant des mesures d’encouragement aux
investissements immobiliers ; Dahir n°1.88.19 du 4 mai 1988 portant promulgation de la loi n°07.88 modifiant la loi n°15.85
instituant des mesures d’encouragement aux investissements immobiliers.
5
En vertu des Décrets n°2.09.471 et n°2.13.909 des 8 décembre 2009 et 23 mai 2014, modifiant et complétant l’article 82 du Décret
Royal portant règlement général de la comptabilité publique.
2
De plus, l’outil de recensement patrimonial fait défaut. Des dysfonctionnements existent entre le
portefeuille foncier de l’Etat et le patrimoine affecté ou mis à disposition au profit des organismes
publics et celui provenant de procédures particulières de récupération ou d’incorporation
(Confiscations, terres récupérées de la colonisation, successions en déshérence, terrains sans
maître, etc.).
Structure foncière hétéroclite et non achèvement de l’assainissement de la
situation juridique
En 2014, le patrimoine foncier géré par la Direction des domaines de l’Etat est estimé à 1.703.677
Ha, pour une valeur d’ouverture inscrite au bilan comptable de l’Etat de l’ordre de 567 MdDH.
Par nature de sommier, 69% (136 MdDH) de ce patrimoine foncier est situé en milieu rural, 23%
(128 MdDH) dans le périmètre suburbain et 8% (303 MdDH) dans le périmètre urbain.
De plus, la structure foncière hétéroclite du domaine privé de l’Etat de par son origine historique
de propriété complique davantage la mobilisation foncière. En effet, ce patrimoine foncier est
constitué de plusieurs catégories d’immeubles aussi différents les uns des autres par leurs natures
que par les procédures de leur assainissement.
Ce patrimoine foncier comprend essentiellement des immeubles anciennement domaniaux, des
terres récupérées de la colonisation dans le cadre du Dahir du 2 mars 1973, des délimitations
administratives homologuées et en cours, des terres récupérées dans le cadre du Dahir du 26
Septembre 1963 et des confiscations dans le cadre du Dahir du 1958 soit respectivement près
42%, 22%, 14,02%, 8,45% et 3% de la superficie totale.
Par ailleurs, la mobilisation du domaine privé de l’Etat est contrainte par le non achèvement de
l’assainissement de sa situation juridique. En effet, l’analyse de l’effort d’immatriculation, fait
montre qu’un peu plus de sa moitié 53% (890.916 Ha) est immatriculée. Les immeubles en cours
d’immatriculation constituent près de 41% (694.276 Ha), mais bloqués, depuis plusieurs années,
au niveau des différentes phases de la procédure d’immatriculation foncière (phases de dépôt des
réquisitions, de bornage, de levé et d’établissement des titres fonciers). Le reste, 6% (105.903 Ha)
n’est pas encore immatriculé.
Absence d’une politique foncière et d’une structure dédiée à l’observation et
à la connaissance des marchés fonciers
En l’absence d’une politique foncière, l’essentiel de l’action foncière de l’Etat se limite aux
opérations de cession, d’acquisition, d’affectation et de location en réaction aux besoins
instantanés exprimés par les investisseurs alors que ces opérations devraient être la résultante
d’une planification stratégique de développement économique et social permettant d’une part une
utilisation rationnelle de la ressource foncière et d’autre part une mise en harmonie et une
convergence des politiques publiques sectorielles. En effet, les instruments de l’action foncière
sont entachés de nombreux dysfonctionnements ne permettant aucunement de répondre aux
normes de valorisation et de gestion rationnelle du patrimoine foncier.
En outre, et en raison de la léthargie et l’amenuisement de la réserve foncière, la cherté des prix
du foncier, la complexité et la lourdeur des procédures d’élaboration des documents d’urbanisme
et l’augmentation de la demande en foncier, le domaine privé de l’Etat ne peut pas à lui seul
satisfaire cette demande. Les services gestionnaires sont souvent amenés à mobiliser des terrains
relevant d’autres statuts fonciers ; domaine public, domaine forestier, terres « Guich » et terres
collectives.
Cependant, cet effort de mobilisation bute sur les contraintes juridiques liées à ces terrains
caractérisés principalement par leur inaliénabilité, leur imprescriptibilité et leur non soumission à
l’expropriation pour cause d’utilité publique. Souvent, ces contraintes sont contournées en
recourant aux dispositions dérogatoires spécifiques à chaque statut foncier.
3
Au niveau des outils d’observation et de connaissance des marchés fonciers et immobiliers, les
structures dédiées à l’observation et le suivi de l’évolution du foncier sont fragmentaires (Bank
Al-Maghrib et l’Agence nationale de la conservation foncière, du cadastre et de la cartographie,
le département de l’Habitat et de l’urbanisme, la Direction générale des impôts, les notaires, les
adouls et les agents immobiliers, etc.
De plus, l’accès et l’exploitation des informations relatives aux transactions foncières et des
indices des prix des biens immobiliers restent tributaires de la mise en place d’un système
informatique de gestion auprès des acteurs intervenant dans l’action foncière.
Cette situation dénote d’un manque de synergie de ces acteurs et l’absence d’un observatoire
foncier et immobilier pour consolider les efforts déployés par ces structures. L’observation
foncière, a pour objectif de produire des données statistiques ou cartographiques concourant à une
connaissance plus au moins précises des territoires. Cette observation a pour but, non seulement,
de faire partager les informations, mais également d'évaluer les décisions passées afin d’anticiper
et de préparer celles futures.
Absence d’évaluation et de programmation pluriannuelle des besoins en
foncier
Au niveau de l’évaluation et la programmation pluriannuelle des besoins et leur traduction
effective dans les documents d’urbanisme, on note une carence en matière de coordination et de
visibilité en amont, entre la Direction des domaines de l’Etat et les départements ministériels
concernés pour cerner leurs besoins projetés en foncier à moyen et long terme entérinée à travers
une programmation pluriannuelle.
La mobilisation du foncier souffre aussi des carences de planification liée aux contraintes
imposées par les documents d’urbanisme. Les pouvoirs publics sont, alors, loin de pouvoir
engager une politique foncière d’anticipation sur l’expansion future des villes et des
agglomérations urbaines et la satisfaction des besoins en foncier au profit de l’investissement et
ce, afin de garantir la mise à disposition et la constitution de réserves foncières suffisantes
capables de répondre aux besoins des investisseurs.
En effet, la mobilisation du foncier matérialisée dans les documents d’urbanisme, donne plus de
visibilité pour les investisseurs publics et privés en matière d’aménagement du territoire selon une
démarche consensuelle et une planification concertée afin de définir les besoins prévisionnels
globaux en foncier pour les équipements publics, ainsi que pour les investissements productifs.
Cette mobilisation permet aussi une compétence liée pour les gestionnaires publics, à part
quelques opérations exceptionnelles qui peuvent être tolérées pour des raisons d’intérêt général
justifiées.
Absence d’instrument d’optimisation de l’allocation du foncier mobilisé
La mobilisation du foncier est aussi contrainte par l’absence d’instrument d’optimisation de
l’allocation du foncier mobilisé moyennant l’élaboration de référentiels sectoriels de normes
d’affectation des superficies par nature spécifique de projets d’investissement (Industrie,
tourisme, habitat, services administratifs, etc.). Cette normalisation aura pour finalité d’éviter la
mobilisation de superficie surdimensionnée par rapport à la portée des projets à réaliser.
L’évolution croissante du prix du foncier découle essentiellement des rigidités imposées par la
réduction effective de l’offre, de l’insuffisance de terrains réellement viabilisés et de l’absence
d’instruments de régulation du marché foncier à part le droit de préemption de l’Etat et la taxe sur
les terrains non bâtis.
En effet, les raisons qui sont à l’origine de cette réduction concernent les limites dictées par la
réglementation urbanistique en termes de mobilisation de l’assiette foncière et d’occupation du
sol et l’établissement des plans d’aménagement, aux difficultés de la procédure
d’immatriculation. A ces contraintes, s’ajoute une économie de rente et de spéculation foncière
qui oriente le marché immobilier en fonction des plus-values projetées plutôt que de la production
4
et du rendement à réaliser et ce, du fait que certains propriétaires détiennent le foncier en tant
qu’une valeur de placement sûre.
Non-évaluation des incitations foncières accordées sur les prix de vente
Une autre carence entachant la valorisation du foncier est la non-évaluation des incitations
foncières en tant qu’effort de participation et de contribution accordé par l’Etat à l’instar des
dépenses fiscales. Ces dépenses ont été évaluées en 2015 à près de 32 MdDH dont le secteur
immobilier s’accapare à lui seul 22,1% (7,093 MdDH) contre 21,58% (7,427 MdDH) de
l’ensemble des dépenses fiscales évaluées en 2014 à 34,407 MdDH.
En effet, avec le passage d’une comptabilité budgétaire à une comptabilité patrimoniale et
l’établissement du plan comptable de l’Etat, la fixation de prix de cession inférieurs aux prix du
marché ne peut aucunement être justifiée par des considérations subjectives d’incitation et
d’encouragement de l’acte d’investir, sinon elle aurait pour conséquence de brader le domaine
privé de l’Etat. La baisse et la décote accordées sur les prix de cession devront être comptabilisées
en tant que dépense foncière et ce, pour assurer la transparence financière du budget général de
l’Etat et la rationalisation de la gestion et de l’allocation des ressources.
Absence d’outils de reconstitution de la réserve foncière
La mobilisation du foncier public souffre de l’absence d’outils de reconstitution de la réserve
foncière contraintes par la lenteur et la lourdeur des procédures d’acquisition (à l’amiable et par
voie d’expropriation) aux fins d’investissement et les limites éprouvées du droit de préemption,
seul moyen permis par la législation foncière.
L’Etat fait valoir le droit de préemption uniquement pour des considérations fiscales et jouer le
rôle de la dissuasion pour redresser les prix de vente lorsqu’elle estime que le montant déclaré
dans le contrat de vente est inférieur à la valeur vénale du bien. Ce droit peut créer, alors, des
insécurités juridiques dans la mesure où il intervient postérieurement à la signature de l’acte de
vente. L’acquéreur peut être lésé puisqu’il ne pourra prétendre à récupérer que le montant déclaré
dans le contrat de vente.
Multiplicité des intervenants et procédures de cession ne répondant plus aux
exigences des investisseurs
La procédure de cession est contrainte par la multiplicité de ces intervenants qui ne portent pas le
même intérêt de l’importance du foncier dans l’acte d’investir dans l’économie nationale. En effet,
des structures organiques et des structures d’accompagnement chargées du contrôle et du suivi
interviennent dans l’acte d’investir. La multiplicité de ces acteurs a vidé le principe du guichet
unique de tout son sens et a égaré sa symbolique et son efficacité de l’objectif initial pour lequel
il a été créé.
Pour les structures organiques, celles-ci comprennent essentiellement, les walis de régions et les
gouverneurs, les centres régionaux d'investissement, les conseils régionaux et les conseils
communaux, le fonds Hassan II pour le développement économique et social, l’Agence marocaine
de développement des investissements, l’Agence nationale de la conservation foncière, de la
cartographie et du cadastre, les agences urbaines, la Direction régionale de l’habitat et la Direction
des domaines de l’Etat et ses services déconcentrés.
Concernant les structures d’accompagnement, celles-ci sont constituées par les commissions
régionales d’investissement, la commission interministérielle des investissements, les
commissions administratives d’expertise, le comité technique de préparation et de suivi, les
commissions locales de constats de valorisation, la commission interministérielle chargée de
l’aménagement du territoire du littoral, les commissions de dérogations accordées en matière
d’urbanisme, les commissions régionales chargées de certaines opérations foncières, les
commissions d’attribution des lots dans les zones industrielles et les commissions des zones
touristiques.
5
Par ailleurs, la procédure adoptée pour la mobilisation du foncier repose encore sur des
instruments qui ne sont plus en phase de répondre dans la célérité requise aux exigences des
investisseurs. La procédure de cession reste marquée par sa complexité et sa lourdeur soit au
niveau des acteurs impliqués dans le circuit de la vente et la performance de traitement des
dossiers d’investissement, soit au niveau du suivi et de contrôle des valorisations contractuelles.
Complexité et lourdeur de la procédure de cession
La procédure de cession se déroulant généralement en plusieurs étapes est suffisamment longue
car celle-ci nécessite un délai minimum de traitement de 250 jours entre le dépôt des dossiers
relatifs aux projets d’investissement et l’achèvement des travaux afférents au constat des
formalités préliminaires sans compter les délais supplémentaires engendrés par l’intervention
d’autres partenaires dans la procédure notamment les commissions ad hoc.
Certes, la transmission des demandes déposées par les investisseurs nécessite un délai maximum
de 20 jours à compter de la date de sa réception, l’étude des projets d’investissement par le centre
régional d’investissement 30 jours, l’étude effectuée par le comité technique de préparation et de
suivi 30 jours, l’étape de la cession du foncier domanial 80 jours et le constat des formalités
préliminaires 90 jours.
Par ailleurs, cette procédure s’allongerait davantage si l’on comptabilise le délai nécessaire à
l’achèvement des travaux de la commission chargée du constat de valorisation qui a lieu pour
chaque période de six mois répartie sur la durée de valorisation du projet d’investissement.
Dysfonctionnements en matière de fixation des prix de vente
La procédure de cession reste entachée de certains dysfonctionnements de gestion, relatifs
essentiellement à la fixation des prix de vente. En effet, la circulaire du Premier ministre n°209
du 26 Juin 1976 règlementant la commission administrative d’expertise commission n’a pas
donné de définition précise de l’expertise et de sa portée juridique. Aussi, cette commission ne
dispose pas d’un règlement clarifiant son mode de fonctionnement et les modalités de prise de
décision et de vote. Par ailleurs, elle n’a pas préconisé les mesures à prendre en cas d’objections
formulées par l’un de ses membres sur le prix proposé.
L’évaluation correcte de la valeur d’une propriété foncière devrait être basée sur des critères
objectifs qui tiennent en compte des éléments matériels (Superficie, contenances, situation
géographique, emplacement, état général, qualité du sol, nature du relief, infrastructures, etc.) et
des moyens juridiques (Immeuble immatriculé ou en cours d’immatriculation, aménagements
disponibles, situation par rapport à documents d’urbanisme, etc.).
Or, cette commission se base souvent sur les prix révélés par au plus trois transactions
immobilières, effectuées pour certains biens fonciers voisins ou limitrophes à l’immeuble objet
de cession. L’analyse des prix retenus récemment montre que ceux-ci ne reflètent pas
généralement la réalité du marché immobilier. La valeur des terrains objet de cession sont parfois
en dessous des prix des postes de comparaison.
D’autre part, le prix de vente ne doit pas dépasser 10% du coût prévisionnel global du projet
d’investissement. Si le prix excède ce seuil, l’investisseur doit revoir le montage financier de son
projet par l’augmentation de son coût global d’investissement, ou bien réduire la superficie
demandée, sinon, la vente ne peut avoir lieu. Or, dans certains cas, cette disposition n’est pas
respectée.
Insuffisance du système de suivi et de contrôle des valorisations
contractuelles
La gouvernance du foncier reste marquée par l’insuffisance du suivi des valorisations à travers
un système de reporting et un tableau de bord permettant le pilotage de l’action foncière à travers
une évaluation périodique de l’efficacité et de l’impact des réalisations apportées en termes
d’investissements effectifs, d’amélioration de la valeur ajoutée et de création d’emplois.
6
Cette carence se manifeste d’une part au niveau de l’accomplissement des formalités
préliminaires pour l’enregistrement et l’inscription du foncier mobilisé, l’établissement des
dossiers technique et l’obtention des autorisations nécessaires, et d’autre part au niveau du
contrôle post affectation pour le constat des réalisations effectives des projets d’investissement
en respect des obligations du cessionnaire stipulées dans le cahier des charges annexé à l’acte de
vente.
Tergiversation pour l’adoption de nouveaux instruments de valorisation du
foncier
La cession du foncier brut disponible est un mode de valorisation intéressant, car il procure au
Trésor public des recettes dans l’immédiat, mais n’assure aucunement leur pérennité à moyen et
long terme. De plus, avec l’amenuisement de l’assiette foncière mobilisable, la Direction des
domaines de l’Etat ne pourrait pas satisfaire les demandes croissantes en foncier. Il est alors
opportun pour les personnes publiques d’œuvrer pour de nouveaux instruments entrepreneurials
pour la cession du foncier tels le partenariat public/privé et les baux emphytéotiques de longue
durée.
Cette option offre un double intérêt, d’une part, ils permettent aux bénéficiaires de réaliser leurs
investissements, sans avoir à mobiliser une partie importante de leurs sources de financement
dans l'acquisition du terrain, et d’autre part, elle assure à l’Etat propriétaire, la faculté de conserver
son foncier.
Dans la perspective de modernisation des outils de la mobilisation du domaine privé de
l’Etat, la Cour des comptes propose des recommandations et des pistes d’amélioration en
mesure d’inciter le dépositaire du foncier privé de l’Etat à la définition d’orientations pour
la mise en œuvre d’une politique foncière s’inscrivant dans le cadre d’une stratégie globale
et intégrée de dynamisation du tissu productif. Cette stratégie aura pour objectifs la
mobilisation et la rationalisation du patrimoine foncier de l’Etat valorisé en tant que
ressource et érigée en tant que levier stratégique de développement à travers la mise en
place de nouveaux outils de gestion et de valorisation et des instruments de bonne
gouvernance.
Dans ce cadre, la Cour des comptes recommande ce qui suit :
- En matière des contraintes liées à la mobilisation du domaine privé de l’Etat :
- élaborer un code domanial pour la définition du domaine privé de l’Etat, du régime
juridique qui lui est applicable et des procédures de sa gestion, des instruments de
sa valorisation et des outils de sa protection ;
- procéder à un recensement exhaustif du patrimoine domanial pour une meilleure
connaissance et maîtrise du portefeuille mobilisable ;
- déployer plus d’efforts pour l’immatriculation de l’ensemble des immeubles
domaniaux.
- En matière de l’appréciation des outils de l’action foncière :
- instaurer un système d’évaluation des dépenses foncières pour la mise en relief de
l’effort d’incitation à l’investissement consenti par l’Etat dans ce domaine ;
- réformer la charte de l’investissement dans le sens de l’intégration de la composante
foncière dans le cadre des mesure incitatives à l’investissement ;
- mettre en place un cadre dédié à l’observation et au suivi des marchés fonciers et
immobiliers ;
- établir des normes d’allocation rationnelle du foncier domanial en fonction des
secteurs d’activité, de la dimension et de la portée des projets d’investissement ;
7
- mettre en place un système d’information dédié à la gestion du foncier domanial ;
- mettre en œuvre une programmation pluriannuelle des besoins en foncier
domanial ;
- impliquer le ministère des Finances lors de l’élaboration des documents
d’urbanisme ;
- réfléchir sur la mise en place de nouveaux instruments juridiques, techniques et
financiers pour la reconstitution de la réserve foncière s’inscrivant dans une
démarche prospective de mobilisation des terrains.
- En matière de la cession pour investissement :
- réformer les procédures de cession du domaine privé de l’Etat en vue de les rendre
adaptées aux besoins et aux exigences des investisseurs ;
- réfléchir sur l’instauration de nouveaux modes de cession du foncier domanial ;
- réformer les procédures régissant l’exercice des attributions de la commission
administrative d’expertise ;
- améliorer le système de suivi et de contrôle pour l’accomplissement des formalités
préliminaires de pré-valorisation et des constats de valorisation.
8
II. Réponse du Ministre de l’économie et des finances
(Texte intégral)
Non définition du domaine privé de l’Etat
La direction des domaines de l’Etat a procédé à travers son plan d’action stratégique à
l’élaboration d’un projet de code domanial répondant dans sa majeure partie aux observations
formulées par les magistrats de la Cour des comptes.
Ce projet, déposé actuellement au secrétariat général du Gouvernement, a pour objectifs la
définition du domaine privé de l’Etat, l’éclaircissement de sa situation juridique et la
modernisation et la simplification des règles juridiques et des procédures relatives à sa gestion
ainsi que la mise place des mécanismes de sa protection et de son conservation.
Le projet de code a procédé au recueil et à la codification des textes législatifs et réglementaires
relatifs au domaine privé de l’Etat en disposant clairement que sa participation est primordiale
pour la réalisation de l’intérêt générale et que chaque opération foncière le concernant doit
avoir lieu dans le cadre d’une gestion dynamique de ce portefeuille.
Le projet de code définit le domaine privé de l’Etat en tant qu’ensemble de biens et de droits
fonciers ou mobiliers qui lui appartiennent en vertu d’un texte juridique ou un arrêt définitif ou
celles qui lui reviennent des dons, des legs, des transactions immobilières et les terres vacantes
sans maîtres.
Structure foncière hétéroclite et non achèvement de l’assainissement de la
situation juridique
La direction des domaines de l’Etat a déployé des efforts pour la maîtrise d’une manière précise
du portefeuille foncier de l’Etat. Cette direction a procédé en collaboration avec l’Agence
nationale de la conservation foncière au rapprochement et à la conformité des données
disponibles chez cette dernière avec les informations contenues dans la base de données
détenues par cette direction. La vérification des informations entamée par cette direction vise
l’attente d’une conformité globale entre les bases de données des deux parties et l’instauration
d’un système dynamique d’actualisation.
Ainsi, cette opération a abouti à l’actualisation de 3.487 titres fonciers d’une superficie ayant
atteint 13.454 hectares.
Parallèlement à cette opération, cette direction procède à l’actualisation de la base de données
relative à la gestion du domaine privé de l’Etat à travers l’insertion des dossiers de gestion
(cessions, locations, affectations, acquisitions, etc.) et l’extraction des documents et des pièces
de référence (Décisions, contrats, procès-verbaux, etc.) des applications informatiques ce qui
permet d’avoir des informations actualisées et précises concernant la situation actuelle du
foncier.
Aussi, la direction a procédé à l’accélération du rythme d’immatriculation foncière de ces biens
à travers la conclusion d’un accord avec l’Agence nationale de la conservation foncière et la
conclusion de marchés avec des bureaux spécialisés pour la réalisation des opérations de
cadastre et de levé topographique. Cette direction coordonne aussi avec les différents
partenaires (direction des affaires rurales concernant les terres des collectivités ethniques, le
Haut-commissariat aux eaux et forêts et le Ministère de l’Equipement et du transport) pour
l’assainissement de la situation des immeubles objets d’oppositions réciproques entre les
parties.
9
Les réalisations enregistrées durant la période de 2010 à 2016 peuvent être illustrées comme
suit :
- Etablissement des titres fonciers pour une superficie de 197.737 hectares ;
- Dépôt des réquisitions d’immatriculation pour une superficie de 187.497 hectares.
2010 2016
Evolution
Situation Superficie Superficie
% % (En %)
(En Ha) (En Ha)
Titres fonciers 772.639 51 970.430 52 26
Réquisitions
605.517 40 792.014 42 31
d’immatriculation
Immeubles non
134.210 9 107.902 6 -20
immatriculés
Total 1.512.420 100 1.870.346 100 24
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relevant du secteur public et privé, et ce pour leur permettre de réaliser des projets capables de
créer de la richesse et d’assurer des emplois.
Le prix de vente et fixé, en vertu des dispositions de l’article 82 de la loi sur la comptabilité
publique, par la commission administrative d’expertise présidée par le Gouverneur de la
province.
Pour l’amélioration du cadre réglementaire de l’expertise foncière, un accord a été signé avec
la direction générale des impôts ayant à :
- la délimitation des compétences des différents intervenants dans l’opération
d’expertise foncière ;
- la normalisation et l’amélioration de la méthodologie poursuivie pour la fixation de la
valeur vénale des immeubles domaniaux à travers une fiche modèle qui illustre les
caractéristiques du foncier et ses spécificités ;
- l’adoption des postes de comparaison fournies par des services d’enregistrements.
Absence d’outils de reconstitution de la réserve foncière
Les acquisitions foncières de l’Etat doivent répondre aux besoins exprimés par les différents
secteurs.
Et pour éviter les risques d’occupations des immeubles et des biens de l’Etat par les tiers et le
gel des fonds publics à long terme en l’absence d’une vision d’ensemble sur les besoins
prévisionnels en fonciers il faut procéder à :
- L’élaboration d’une vision globale sur les disponibilités foncières en collaboration
avec l’ensemble des intervenants et les acteurs et particulièrement ceux chargés de la
gestion des autres immeubles publics ;
- L’adoption d’une programmation pluriannuelle pour la détermination des besoins
globaux en foncier nécessaires à la réalisation des équipements publics et des
investissements productifs en affectant ces besoins en fonction des années et des
régions ;
- L’attribution d’affectations appropriées aux acquisitions foncières, lors de
l’élaboration des schémas d’urbanisme et des plans d’aménagements ;
- L’initiation d’une réflexion sur le modèle économique adéquat pour le financement
des acquisitions du foncier de l’Etat et de renforcement des moyens des sa protection.
Insuffisance du système de suivi et de contrôle des valorisations
contractuelles
Les opérations de cessions du foncier de l’Etat sont soumises aux dispositions du cahier des
charges qui fixe les conditions de réalisation et de résiliation. Le suivi des valorisations est
assuré par une commission locale présidée par le Wali de la Région.
Pour le renforcement des mécanismes de suivi, une commission interministérielle pour l’étude
des projets d’investissement en difficulté de réalisation recensés pour permettre à ladite
commission de prendre la décision adéquate (trouver des solutions aux difficultés
administratives, octroyer un délai supplémentaire à l’investisseur ou résilier le contrat et la
récupération du foncier cédé).
Dans ce cadre, des immeubles ont été récupérés d’une superficie totale dépassant 2.000
hectares. Aussi, le cahier des charges a été révisé pour garantir un équilibre qui assure la
protection et l’égalité des droits et des obligations tant pour l’Etat que pour l’investisseur.
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Par ailleurs, le projet de loi relatif à l’investissement abrogeant la loi cadre n°95.18 portant code
d’investissement a renforcé ces mesures à travers ce qui suit :
- L’instauration de la commission chargée de l’étude et de l’évaluation des projets au
niveau central, régional et locale ;
- Le renforcement des mécanismes de suivi des projets d’investissement et la veille sur
la transparence de ce processus ;
De surcroît, la circulaire du Chef du Gouvernement du 5 septembre 2012 a incité l’Agence
marocaine pour le développement des investissements pour l’analyse des intérêts non encore
recouvrées des investissements ayant reçus un accord comparativement aux avantages et aux
incitations octroyés d’ordre fiscales, douanières et foncières.
Tergiversation pour l’adoption de nouveaux instruments de valorisation
du foncier
Pour garantir une utilisation optimale de son patrimoine foncier, la direction des domaines a
adopté un modèle économique axé sur :
- La location au lieu de la vente surtout pour les projets d’investissement nécessitant une
assiette foncière conséquente d’une superficie importante située à la périphérie
urbaine, ce qui permet à moyen et à long terme de récupérer ces terrains et de les
mobiliser de nouveau au profit des équipements publics et de l’investissement
productif ;
- La participation en nature dans le capital pour les grands projets d’investissement (à
titre d’exemple : le pôle urbain de Mazagan en partenariat avec l’Office chérifien des
phosphates).
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