B4 Bampoky
B4 Bampoky
B4 Bampoky
Résumé Abstract
Ce travail de recherche s’inscrit ainsi dans une perspective de recherche doctrinale en vue de
contribuer à l’amélioration de la normalisation comptable OHADA dont le processus, selon
bien des experts-comptables autochtones, est loin d’être aboutie. Compte tenu du fait que les
différentes réformes ont vu le jour au Sénégal qui regorge de toutes les formes de structures
comptables que l’on retrouve ailleurs, et qui abrite la BCEAO ayant commandité la création
du SYSCOA, l’école panafricaine de formation à l’expertise comptable (CESAG), nous
choisissons ce pays pour mettre en lumière la perception et les attentes des parties prenantes
(institutionnelles et professionnelles) de la normalisation comptable en cours.
Le cadre conceptuel qui sous-tend cette investigation est d’abord élucidé (1). La
problématique et la méthodologie de la recherche sont par la suite clarifiées (2). Il s’en suit la
présentation des résultats de la recherche (3) puis leur discussion (4).
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L’une des premières préoccupations d’une normalisation comptable est la construction d’un
cadre conceptuel comptable compatible. Les difficultés de normalisation comptable africaine
résultent du fait que le modèle comptable en place relève du modèle continentale qui, selon
Platet-Pierrot (2009), correspond principalement au mode de gouvernance de l’entreprise
qualifié de partenarial, et où l’Etat régit d’abord le processus de réglementation et ensuite les
besoins d’une diversité des parties prenantes. On comprend alors pourquoi au sein de
l’OHADA, en l’absence d’un normalisateur légitime bâti par les Etats, il s’agit plus d’une
réglementation que d’une normalisation comptable. Mais la volonté de prendre en compte les
réalités du terrain ont conduit à l’adoption par le SYSCOHADA du postulat de la
prééminence de la réalité économique sur l’apparence juridique. Le système comptable en
vigueur intègre alors quelques principes du modèle anglo-saxon. Quant au modèle anglo-
saxon pur, on n’est plus dans une logique de reddition des comptes, mais plutôt, d’après
Staubus (1961), dans une optique de transmission d’une information qui aide les actionnaires
et les investisseurs à optimiser l’allocation de leurs ressources. Dans ce modèle, la prévision
est une préoccupation majeure, et c’est cela qui justifie l’emploi du principe de la « juste
valeur » et des méthodes de calcul ou d’évaluation actuarielles. L’obligation de créer un cadre
conceptuel afin de produire des normes compatibles à ce dernier et adaptées à
l’environnement devient ainsi une nécessité pour des systèmes comptables à la croisée des
chemins comme celui de l’OHADA.
Trop peu de travaux sont toutefois consacrés à la normalisation comptable dans la zone
OHADA. Ceux-ci, en général, relèvent le problème de fiabilité de l’information comptable
publiée en appelant à une réforme institutionnelle (Mballa Atangana, 2016 ; Feudjo, 2010 ;
Bampoky, 2013 ; Mbengue, 2018). Il est évident que puisqu’il s’agit d’une information issue
des pratiques comptables normées, les problèmes de qualité renvoient au système de
normalisation en place dont il faut voir la légitimité dans tous ses aspects.
4
Si les problèmes de la pertinence des nombres comptables et du recadrage du cadre
conceptuel comptable dans le contexte de l’OHADA demeurent (Ngantchou, 2008 et 2013 ;
Mballa Atangana, 2016 ; Mbengue, 2018), ils s’amplifient avec les effets induits de
l’économie numérique. La normalisation comptable se complexifie avec l’intelligence
artificielle véhiculée par la transition numérique. Les travaux ne manquent pas sur la question,
notamment sur l’impact de la technologie sur les pratiques comptables normées (Bampoky et
Wade, 2017) avec un bouleversement du calendrier comptable appelant au recadrage de la
normalisation comptable en vigueur. Dans cette mouvance, le métier de comptable change
dans la mesure où la maîtrise de la technologie est de rigueur. Corrélativement, des risques
apparaissent notamment par rapport à la dématérialisation, la multiplicité des sources, le
stockage et la rapidité du traitement de l’information financière. Beaucoup de travaux en
contexte américain sont consacrés à l’impact du numérique sur les systèmes financiers,
l’efficience des marchés et sur la normalisation financière, notamment l’adaptation des
normes IFRS à la nouvelle donne (Markelevich & al, 2015 ; Ly, 2012 ; Cong & al, 2014 ; Li
& Nwaeze, 2015 ; Lugo, 2017, etc.). Dans ce sillage, on a en contexte français les travaux de
Teller et al. (2016), de Teubner (1993), etc. Si peu de travaux sont notés en France sur la
question, ils sont quasi-inexistants en Afrique, à part une ébauche faite sur les fondamentaux
d’une transformation digitale pour les entreprises africaines (Bampoky, 2017). En effet, dans
une situation de chrono-compétition, les entreprises africaines sont exclues des transactions
qui se font à temps réel sur les grandes places financières internationales. La comptabilité
OHADA doit s’adapter à ce contexte et être à même de fournir également des informations à
temps réel pour l’effectivité des arbitrages nécessaires.
Il ressort ainsi de tous les travaux liés à l’objet de cette recherche que les nouveaux chantiers
de la normalisation résident dans l’adéquation entre l’intelligence artificielle et l’intelligence
naturelle (impact de la révolution numérique ou digitale sur les pratiques comptables
normées), la réduction de l’écart entre la valeur du livre et la valeur du marché (capacité du
système comptable à fournir aux tiers des informations à temps réel), et la comptabilisation de
l’immatériel (règles et méthodes consensuelles d’évaluation de l’invisible et de l’incertain).
Ces chantiers posent le problème de la « juste valeur » qui alimente des débats dans le
processus de la normalisation comptable OHADA en cours. Pour pallier ces problèmes, une
démarche d’ensemble cohérente doit être établie au sein de l’OHADA. Pour élucider et
discuter cette démarche en se fondant sur les travaux illustrant les conditions de mise en place
d’un système de normalisation de qualité, les questions et la méthodologie de cette recherche
méritent d’abord d’être précisées.
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Le bon déroulement du processus de normalisation comptable OHADA devra ainsi reposer
sur un certain nombre de piliers qu’il convient de questionner. Le premier questionnement
est : comment doit produire les normes de comptabilisation des flux financiers ? Cette
interrogation renvoie à la nature du normalisateur ou système de normalisation à mettre en
place. Il convient d’étudier la pertinence de la démarche des organes intervenant dans la
normalisation comptable OHADA. Ensuite, le deuxième questionnement est lié à la
codification des informations suivant les standards compatibles avec les exigences des
marchés locaux et internationaux. La question suivante doit alors trouver de réponse : quelle
nomenclature ou classement des données comptables ? Cette question conduit à réaliser des
enquêtes auprès des utilisateurs de la norme comptable OHADA pour cerner leurs attentes.
Enfin, le problème de l’élaboration des comptes individuels ou de groupes, de l’effectivité du
reporting, … est au cœur du processus de normalisation comptable en cours. Alors se pose la
question de « Comment rendre compte ? ». On s’est intéressé dans la réponse à cette question,
au-delà de l’analyse du processus d’élaboration et de validation des états financiers en vigueur
et leur pertinence, à la nécessaire adéquation entre l’intelligence artificielle et l’intelligence
naturelle, à la réduction de l’écart entre la valeur du livre et la valeur du marché, à la façon de
comptabiliser l’immatériel dont les méthodes font débat, à l’ouverture aux normes
internationales IFRS. Ici également, les enquêtes sont envisagées auprès des utilisateurs de la
norme technique OHADA.
Le tableau ci-après récapitule les différentes structures auprès desquelles les entrevues sont
réalisées, la nature de leur activité, la propriété de leur capital ou leur affiliation et les
personnes rencontrées.
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Nom de la Nature de l’activité Propriété du capital Personnes
structure ou affiliation rencontrées
BCEAO Banque Centrale de 8 pays de l’UEMOA Agents de la Direction
l’UEMOA des Statistiques gérant la
Centrale des Bilans
Conseil National de Organe local de État du Sénégal 3 membres permanents
Comptabilité du normalisation comptable
Sénégal
Groupe SONATEL Téléphonie Sénégal, France et privés Chef Comptable
locaux et étrangers
SN-HLM Aménagement Sénégal Chef Comptable
immobilier
SENELEC Production d’électricité Sénégal Chef Comptable
Sénégalaise Des Eaux Fourniture d’eau potable Concessionnaire appartenant Chef Comptable
(SDE) à Saur International (France)
Senegal Protection & Assurance maritime Groupe anglais Chef Comptable
Indemnity (P & I)
Cabinet GARECGO Expertise comptable Privé sénégalais Chef de cabinet
Les utilisateurs de la normalisation comptable OHADA sont judicieusement choisis parmi les
plus représentatifs dans les différents secteurs de l’économie sénégalaise, et susceptibles de
fournir des informations recherchées. Le nombre final de chaque catégorie d’utilisateurs
résulte d’un constat d’une saturation des réponses. Tous les organes intervenant dans la
normalisation comptable sont pris. Le choix de se restreindre au terrain sénégalais procède du
fait qu’aucun pays membre de l’OHADA n’a d’institutions qu’on ne retrouve pas au Sénégal.
De plus, le Sénégal abrite des sièges des principales institutions intervenant dans la
normalisation ainsi que les cabinets des consultants désignés pour réformer le SYSCOHADA.
Les différentes questions débattues sont fournies en annexe. Dans la série de questions posées,
il y en a qui sont le plus destinées aux instances de normalisation qu’aux utilisateurs de la
normalisation comptables OHADA. Au cours des entretiens, l’accent n’est pas trop mis sur
celles-ci quand on est face des utilisateurs. L’enquête a démarré en février 2016 et s’est
achevée en avril 2018 par des enquêtes auprès des institutions intervenant dans la
normalisation Comptable OHADA. Les verbatim recueillis par prise de note sont étudiés
manuellement et classés par nature en utilisant une codification simple (V1, V2, V3, …), et
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par répondant de chaque structure enquêtée (V1a, V1b, …). Avant de quitter l’interviewé, une
lecture des notes prises lui est faite suivie de la signature d’une petite attestation d’authenticité
par ce dernier.
3. Résultats de la recherche
La normalisation, d’après Capron (2007), est le pilier de tout le système comptable, car « elle
doit non seulement offrir une certaine rationalité apportant des gages de sérieux et de rigueur
aux évaluations, mais elle fournit aux auditeurs légaux les bases à partir desquelles ils
pourront fonder leur jugement sur la qualité de l'information comptable délivrée aux tiers »
(p. 4). Ainsi la qualité de la normalisation comptable OHADA réside dans les gains de
satisfaction qu’elle offre à ses utilisateurs sur le terrain. Les points de vue sont appréhendés
différemment entre les professionnels de la comptabilité eux-mêmes, et entre ces derniers et
les représentants des organes intervenant dans la normalisation comptable OHADA.
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des flux économiques. Le Professionnel R. T. annonce : « On est toujours confronté à un
problème d’adaptation du plan SYSCOHADA à nos opérations de prestations de services
responsables, et cela suscite parfois de longs débats entre comptables pour le choix des
schémas de comptabilisation qui semblent les mieux appropriés » (V2b). Le comptable de
l’entreprise « Senegal P & I », avancent les arguments suivants : « On ne voit pas trop l’utilité
du compte « 486 – Créances sur cessions de titres de placements » créé pour enregistrer les
ventes de titres de placement qui procèdent, chez l’acquéreur, des opérations de gestion de la
trésorerie positive ou des opérations au comptant » (propos d’A. D. G.) (V2c). Les opérations
de spéculation boursières sont quasi-inexistantes dans les bourses locales, et d’ailleurs, nos
comptabilités sont créées pour fournir principalement des statistiques macroéconomiques et
non pour alimenter les marchés financiers. La détention de stocks d’options n’existe pas
encore pour de telles créances. Il s’agissait d’une prévision du plan SYSCOA corrélativement
à la création de la Bourse Régionale de Valeurs Mobilières (BRVM) de l’UEMOA. Les autres
pays de l’OHADA n’ont jusque-là pas de bourse, à part les très petits marchés financiers
camerounais (Douala Stock Exchange qui jusqu’en 2018 n’affiche que 3 cotations
d’entreprises) et gabonais. Ceci apparait comme une exagération dans le cadre conceptuel du
SYSCOA qui lui-même est importé, car d’après Pintaux (2002), il mérite l’attention car
intégrant les dernières évolutions de la doctrine comptable notamment l’IASB 5.
Heureusement, dans la version du Plan Comptable de l’OHADA entré en vigueur en 2018, le
compte 486 est supprimé de façon plus ou moins insidieuse. L’usage de ce compte a pour
origine le SYSCOA dont les concepteurs furent l’équipe de l’Institut National des Techniques
Economiques et Comptables (INTEC) du Conservatoire National des Arts et Métiers
(CNAM). Cette équipe, sollicitée en 1994 par la BCEAO, était dirigée par un ancien Directeur
de l’INTEC, le Professeur Claude Pérochon. Ceci conforte les propos de Douvier Pedrosa
(2010) qui soutient que « la proclamation de l’indépendance des pays d’Afrique a laissé aux
africains une doctrine d’inspiration française » (p. 11/138). Même si on peut se féliciter du
fait que ce système créé dispose d’un cadre conceptuel, ce qu’il faut c’est sa compatibilité
avec le champ d’application de modèle comptable. C’est toute la relève que doivent savoir
assurer les africains en matière de normalisation comptable.
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pratique du reporting se fait mensuellement vers la maison mère sur la base d’une plateforme
dédiée, puisque nous utilisons le Progiciel de Gestion Intégré SAP » (V1d). Dans tous les cas,
nous signale-t-on, les données comptables sont retraitées et adaptées aux comptes de la
maison mère avant d’être ventilées. Les adaptations remettent sans doute en cause le principe
de la pertinence partagée de l’information comptable qui laisse entrevoir plusieurs
interprétations différentes des flux économiques. En analysant les discours recueillis des
filiales comme Total et « P & I », il ressort que les problèmes de reporting existent mais
n’apparaissent pas ingérables, car les comptes sociaux sont consolidés selon les règles du pays
de la société mère avec une autre codification de regroupement et les normes internationales
applicables. Cependant, c’est le contraire, lorsque la maison mère d’une entreprise
internationale se situe dans l’OHADA, qui laisse apparaître des problèmes de reporting
parfois embarrassants. L’un des grands chantiers de la normalisation comptable OHADA
réside alors dans la construction d’une nomenclature comptable s’ouvrant aux activités
étrangères et non le contraire, dans la mesure où l’avantage est que la comptabilité puisse
suivre et encourager la promotion de l’investissement étranger, notamment dans la facilitation
des règles de détermination et de rapatriement du profit.
Si bien des professionnels estiment que l’une des solutions aux problèmes que doit apporter la
normalisation comptable est l’ouverture aux normes IFRS, d’autres comme A. G. pensent que
« l’adoption des IFRS requiert une mise à niveau de façon permanente. Or, on n’a pas
l’infrastructure qu’il faut pour suivre le rythme des changements dans le cadre des IFRS. On
est simplement en phase de convergence en essayant d’optimiser quelques éléments du cadre
conceptuel des IFRS » (V1e).
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compétition. Pour ces divers problèmes, il y a lieu de cerner la situation des organes de
normalisation comptable en place.
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une réussite, c’est qu’il a été commandité par la BCEAO qui a investi des ressources
nécessaires.
4. Discussion
Le droit comptable en vigueur dans l’OHADA confirme les propos de certains professionnels,
notamment un essai de converger vers normes IFRS laissant bien des zones d’ombre. En effet,
l’article 8 de l’Acte Uniforme de l’OHADA relatif au Droit Comptable et à l’Information
Financière établit que « les entités dont les titres sont inscrits à une bourse de valeurs et celles
qui sollicitent un financement dans le cadre d’un appel public à l’épargne, doivent établir et
présenter les états financiers annuels selon les normes internationales d’informations
financières appelées normes IFRS… », en sus des états financiers annuels obligatoires pour
toutes entreprises à savoir le bilan, le compte de résultat, le tableau des flux de trésorerie et les
notes annexes. Cet article précise que « les états financiers établis selon les normes IFRS sont
destinés exclusivement aux marchés financiers ». Mais pour ce qui concerne l’application de
la « juste valeur », les méthodes actuarielles de faisabilité réelles ne sont pas bien explicitées
ni illustrées de façon exhaustive, laissant l’utilisateur sur sa faim. S’il est avéré qu’un
problème de fiabilité des nombres comptables se pose, on peut se demander par quel moyen
l’on parviendrait ex post à vérifier ou à être certain de la qualité des états financiers présentés
selon les normes IFRS. On peut également se demander si pour les entités qui doivent
présenter les états financiers selon les normes IFRS, il n’y a pas risque d’écart trop important
entre la valeur du livre et la valeur réelle du marché. Le cadre conceptuel du SYSCOHADA
est encore là interpelé.
L’article 35 de l’Acte Uniforme relatif au Droit Comptable offre plus de gages de sécurité et
de fiabilité quant à la production de l’information financière. Cet article prescrit : « La
méthode d’évaluation des éléments inscrits en comptabilité est fondée sur les conventions du
coût historique, de prudence et l’hypothèse de base de continuité d’exploitation ». Pourtant le
SYSCOHADA dans sa version originale (SYSCOA) prend en compte la doctrine comptable
liée aux IFRS en restant très réaliste car se limitant à la comptabilisation d’un actif comme un
bien contrôlé par l’entreprise. La valeur du livre est le coût historique, c’est-à-dire la somme
des dépenses effectuées pour l’acquisition du bien. Là, à tous les points de vue, on ne voit
comment un comptable de l’OHADA déterminerait autrement le coût du bien. La
normalisation comptable ne peut alors représenter un « effet mode ». Elle ne doit pas créer
une réalité, mais elle doit être le reflet d’une réalité. Il advient que le principal problème de la
normalisation comptable OHADA est d’abord celui de la nomenclature comptable
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garantissant l’image fidèle de la comptabilité à l’ensemble des flux économiques qui
caractérisent la vie des entreprises. Ce problème de l’image fidèle a conduit les réviseurs de la
réglementation en cours à introduire par exemple l’approche par composants en ce qui
concerne l’amortissement technique des biens. La réglementation reste cependant trop lourde
et sujette à plusieurs interprétations pour ce qui concerne les actifs immatériels, puisque l’on a
cherché à s’inspirer des normes IFRS tout en tenant compte des spécificités du contexte de
l’OHADA. En effet, dans le chapitre 2 consacré aux brevets, licences, marques, logiciels, sites
internet et d’autres droits similaires, l’Acte Uniforme dispose : « Les dispositions du présent
chapitre s’inspirent des traitements préconisés par les normes comptables internationales,
notamment : la norme comptable internationale IAS 38 « Immobilisations incorporelles » et
les amendements successifs à cette norme (date de publication : 31 mars 2004) ; la norme
comptable internationale IFRS 15 « Produits des activités ordinaires tirés des contrats
conclus avec des clients » (date de publication : 28 mai 2014) ». Le cadre conceptuel du
SYSCOHADA n’a pas encore fait l’objet d’une étude rigoureuse pour permettre de mettre en
place des principes simples valables en tout temps, en tout lieu et en toute situation. C’est ce
fit remarquer un professionnel dans le verbatim (V4b). Les raisons à cela sont également
visibles dans cette disposition de l’Acte Uniforme toujours en ce qui concerne les actifs
immatériels : « La durée d’amortissement comptable d’un logiciel à usage commercial doit
être déterminée en fonction de sa capacité à répondre aux besoins de la clientèle et non aux
besoins propres de l’entité ». Voilà une autre ambigüité certaine qui laisse le professionnel
dans l’embarras. Par ailleurs, quelle que soit la méthode utilisée, la valeur résiduelle d’un
actif, déterminée ex ante, reste une estimation que la réalité peut infirmer. Le problème de la
normalisation OHADA est ensuite lié au fait qu’on ne dispose pas dans les faits d’un
normalisateur, c’est pourquoi biens des professionnels préfèrent le concept de réglementation
à la place de celui de normalisation.
Dans le processus de normalisation enclenché, une épuration du droit comptable doit être
opérée par identification, justification et élimination des imperfections signalées par la
recherche doctrinale. Dans cette perspective, les apports du numérique ou du digital doivent
être bien repérés en vue de l’amélioration de la qualité de l’information comptable et de sa
divulgation. En fonction des besoins réels des parties prenantes de l’information comptable,
les adaptations au plan de la normalisation doivent suivre. Le rôle d’un normalisateur
comptable légitime est de parvenir à la fois à commanditer une recherche doctrinale en son
sein ou en s’appuyant sur des sociétés savantes ou des organisations professionnelles (appels à
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projets) et à faire évoluer la norme comptable en l’adaptant aux avatars de l’environnement
économique.
Dans le SYSCOHADA, le débat de fond est qu’il va être très difficile de disposer d’une
information comptable sincère, régulière et exhaustive pour la reddition des comptes et en
même temps destinée à aider les investisseurs pour l’allocation optimale de leurs ressources.
Cet état de fait est la conséquence des velléités de mise en place de deux types d’états
financiers : les uns pour les marchés financiers et les autres pour la reddition des comptes. Si
la comptabilité analytique, qui dispose de techniques permettant une meilleure évaluation des
biens et la connaissance des conditions d’explication, a été l’une des innovations majeures du
Plan Comptable français de 1982, la confection des états financiers destinés aux marchés
financiers devrait être appréhendée sous son angle dans le contexte de l’OHADA. On sait
qu’après retraitement et enrichissement des informations en provenance de la comptabilité
financière, on peut en comptabilité de gestion arriver à une information utile pour la prise de
décisions. Dans le contexte d’ouverture de l’OHADA aux normes IFRS, la normalisation
comptable OHADA doit faire jouer à la comptabilité de gestion le rôle qui est le sien afin de
lever toute équivoque dans la production et la divulgation de l’information comptable.
Conclusion
La nomenclature Comptable en vigueur dans l’espace OHADA doit être adaptée davantage
aux réalités économiques du moment (intégration de nouveaux flux économiques liés au
numérique) et aux contingences spécifiques au contexte en attribuant à la comptabilité
financière son rôle classique de production d’une information dont la qualité est garantie par
des normes et qui est destinée à la reddition des comptes et aux statistiques
macroéconomiques. Ensuite la production de l’information financière destinée au
management et aux arbitrages dans le processus d’investissement, et qui peut servir dans la
communication internationale doit être du ressort de la comptabilité de gestion ou analytique
d’exploitation. C’est dans le cadre d’une comptabilité de gestion que l’on opérer, suivant des
techniques beaucoup plus fluides, des corrections et des enrichissements de l’information
financière. En effet, la convention du coût historique est pertinente pour la reddition des
comptes, tandis que la « juste valeur » est pertinente pour nourrir des choix d’investissement.
C’est cette dichotomie qui semble ne pas être mise en évidence par les concepteurs du
SYSCOHADA.
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personnages techniquement les plus représentatifs, c’est-à-dire dont l’expertise en
comptabilité, en droit comptable et dans la recherche doctrinale est avérée. Au niveau de la
Commission de Normalisation Comptable de l’OHADA (CNC/OHADA), un collège des
délégués des CNC doit prendre forme, et on doit aller résolument vers la création d’un
normalisateur de type ANC en France.
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UEMOA (1996), Système Comptable Ouest Africain – Plan Comptable Général des
Entreprises, Editions Foucher, 831 pages.
UEMOA (1997), Système Comptable Ouest Africain – Guide d’application, Editions Foucher,
671 pages.
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Annexe :
GUIDE D’ENTRETIEN
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