Vocation de Gedeon
Vocation de Gedeon
Vocation de Gedeon
Le Guerrier Ardu
Kaslik
2012-2013
1-Introduction
1
Lorsque le père Naffah, professeur de l’atelier de l’Ecriture Sainte, a commencé à écrire les travaux
concernant les vocations des personnages dans la Bible, j’ai pensé à une idée : je veux choisir la
vocation d’une personne que je ne connais pas dans la Bible. De cette manière, je n’aurais pas des
préjugés et des présuppositions avant de commencer le travail qui serait tout à fait nouveau pour moi.
Lorsque le père Naffah a écrit le nom de Gédéon je m’ai posé les questions suivantes : qui est Gédéon et
qu’est ce que ça veut dire la toison de Gédéon et quel est son rapport avec la naissance du christ ?
En plus en lisant les chapitres 6,7et 8 qui concernent Gédéon, j’étais surpris par le nombre de signes
demandés à Dieu et je m’ai posé la question suivante : comment Dieu a accepté de collaborer avec un
homme si douteux et sceptique comme Gédéon ? Toutes ces questions m’ont poussé à étudier cette
vocation. Commençons par étudier la vocation de Gédéon selon la méthode de la forme finale du texte.
L'Ange de Yahvé vint et s'assit sous le térébinthe d'Ophra, qui appartenait à Yoash d'Abiézer.
Gédéon, son fils, battait le blé dans le pressoir pour le soustraire à Madiân, et l'Ange de
Yahvé lui apparut: "Yahvé avec toi, lui dit-il, vaillant guerrier!"Gédéon lui répondit: "Je t'en
prie, mon Seigneur! Si Yahvé est avec nous, d'où vient tout ce qui nous arrive? Où sont tous
ces prodiges que nous racontent nos pères quand ils disent: Yahvé ne nous a-t-il pas fait
monter d'Egypte? Et maintenant Yahvé nous a abandonnés, il nous a livrés au pouvoir de
Madiân..."Alors Yahvé se tourna vers lui et lui dit: "Va avec la force qui t'anime et tu
sauveras Israël de la main de Madiân. N'est-ce pas moi qui t'envoie?" "Pardon --, mon
Seigneur! lui répondit Gédéon, comment sauverais-je Israël? Mon clan est le plus pauvre en
Manassé et moi, je suis le dernier dans la maison de mon père."Yahvé lui répondit: "Je serai
avec toi et tu battras Madiân comme si c'était un seul homme."Gédéon lui dit: "Si j'ai trouvé
grâce à tes yeux, donne-moi un signe que c'est toi qui me parles. Ne t'éloigne pas d'ici, je te
prie, jusqu'à ce que je revienne vers toi. Je t'apporterai mon offrande et je la déposerai devant
toi." Et il répondit: "Je resterai jusqu'à ton retour."Gédéon s'en alla, il prépara un chevreau, et
avec une mesure de farine il fit des pains sans levain. Il mit la viande dans une corbeille et le
jus dans un pot, puis il lui apporta le tout sous le térébinthe. Comme il s'approchait, l'Ange de
Yahvé lui dit: "Prends la viande et les pains sans levain, pose-les sur ce rocher et répands le
jus." Et Gédéon fit ainsi. Alors l'Ange de Yahvé étendit l'extrémité du bâton qu'il tenait à la
main et il toucha la viande et les pains sans levain. Le feu jaillit du roc, il dévora la viande et
les pains sans levain. L’Ange de Yahvé disparut à ses yeux. Alors Gédéon vit que c'était
2
l'Ange de Yahvé et il dit: "Hélas! Mon Seigneur Yahvé! C'est donc que j'ai vu l'Ange de
Yahvé face à face?"Yahvé lui répondit: "Que la paix soit avec toi! Ne crains rien: tu ne
mourras pas."Gédéon éleva en cet endroit un autel à Yahvé et il le nomma Yahvé-Paix. Cet
autel est encore aujourd'hui à Ophra d'Abiézer.
I. Forme du texte
1. Délimitation
Le texte de la vocation de Gédéon dans le livre des Juges commence en 6 :11 puisqu’il y a les
changements suivants :
-Changement au niveau du lieu dans Jg 6 :1-10 le lieu est Israël(en général).Tandis que en Jg 6 :11 le
lieu est précis : « sous le térébinthe d’Ophra ».On passe donc d’un lieu général : Israël à un lieu
particulier spécifique : sous le térébinthe d’Ophra.
-Changement au niveau du sujet dans Jg 6 :7-10, Yahvé promet le peuple d’intervenir pour le sauver
des Madianistes grâce à un prophète. Tandis que à partir de Jg 6 :11, le sujet c’est l’apparition de l’Ange
de Yahvé à Gédéon.
-Changement au niveau des personnes dans Jg 6 :7-10, les personnes concernés sont : le peuple juif
et Yahvé tandis que à partir de Jg 6 :11, les personnes sont l’Ange de Yahvé, Yahvé et Gédéon.
-Changement de style dans Jg 6 :1-10, on parle de la situation des fils d’Israël au niveau économique
et moral (style historique narrative).Tandis que à partir de Jg 6 :11, il s’agit d’une vocation (un
discours).
-Changement au niveau du temps On a su cela grâce à l’expression suivante : « il arriva que pendant
cette nuit là »Juges6 :25.
-Changement au niveau du sujet dans Jg 6 :24, c’est Gédéon qui fait l’action : il bâtit à Yahvé un
autel .Tandis que dans Jg 6 :25, c’est Yahvé qui fait l’action : il ordonne Gédéon à prendre le taureau de
son père.
2-Auteur
3
Selon F.Vigouroux1, le livre des Juges est formé grâce à 2 groupes d’histoires: l’un
racontant les épisodes de guerre de Jéhovah d’un style populaire (J), l’autre traçant d’une
manière continue l’histoire religieuse de Josué à Samuel (E).Ils ont été soudés par le premier
rédacteur de façon à former l’histoire des cinq grands Juges écrite dans un but moral pour
montrer le secours donne par Dieu à son peuple. Un second rédacteur deutéronomiste a
accentué cette leçon en l’appliquant à tout Israël et en ajoutant l’histoire d’Othoniel et celle
des petits Juges. Puis quand on fit entrer le livre des Juges dans la série des ouvrages qui
racontaient l’histoire complète d’Israël, un dernier rédacteur, l’auteur inspiré de tout le livre
actuel a mis en avant une préface qui traçait le tableau en général de la situation au début de
cette période historique qui se situe entre la mort de Josué et la Royauté en Israël. En un mot,
c'est la rédaction deutéronomiste qui a assemblé les récits en donnant au livre sa trame
narrative systématique. Les appendices ont été ajoutés pendant ou après l'exil.
Passons maintenant à l’auteur de la vocation de Gédéon. Selon la Bible de Jérusalem, la longue histoire
de Gédéon rassemble plusieurs traditions de la tribu de Manassé, que le rédacteur deutéronomiste du
livre a déjà trouvées réunies et qu’il a retouchées. En plus, Walter Richter distingue divers éléments de
tradition repris par deux rédacteurs postérieurs avant d’être intégrés dans l’action deutéronomiste du
livre.
Il s’agit à l’origine de deus récits plus ou moins parallèles : le premier comprenant v11a, v18-19 et v21-
24 rapporterait la fondation d’un sanctuaire avec un autel sous un chêne. Dans ce récit, Gédéon aurait la
fonction de médiateur entre la divinité qui lui est apparue et les fidèles. Le deuxieme récit comprenait
v11b-v17 et rapporterait la vocation de Gédéon comme chef militaire avec des éléments charismatiques.
Les deux sont imbriqués l’un dans l’autre avec une remarquable habileté2.
Ce texte a comme but d’insister sur la fidélité de Yahvé d’Israël et l’émotion de Yahvé au cri des
Israelites opprimés.
D’autres exégètes comme Abadie3 et Martin4 préfèrent diviser ce texte en deux récits : l’un centre sur
l’appel (v.11-16) et l’autre sur l’offrande (v.17-23) au service d’une étiologie : « Gédéon éleva en cet
1
F.YIGOUROUX, « Juges », in: Dictionnaire de la Bible, tome III, Librairie Letouzey et Ané, Paris, 1922,
1846.
2
Alberto J.SOGGIN, Le livre des Juges, Commentaire de l’Ancien Testament Vb, Labor et Fides, Genève,
1981,105.
3
Philippe ABADIE, Des héros peu ordinaires, Lectio Divina 243, cerf, Paris, 2011,80.
4
James MARTIN, The book of Judges, The Cambridge Bible commentary, Cambridge University Press, USA,
1975, 83.
4
endroit un autel à Yahvé et il le nomma Yahvé-Paix. Cet autel est encore aujourd'hui à Ophra
d'Abiézer » (v.24).De ce fait, Gibert5 suppose qu’il existait a un moment ou un autre 2 traditions sur
Gédéon, l’une sur sa vocation, l’autre dont le récit de l’offrande à l’Ange nous conserverait la trace et ce
dernier est privé d’introduction et de conclusion.
3-Date
Il faut supposer tout d’abord une période de transmission orale. Les plus anciens récits du livre des
Juges sont des traditions conservées par les clans et les tribus au sujet de glorieux ancêtres ayant défrayé
la chronique. Comme tous les récits de ce type, ceux-ci ont fini par s'amplifier au fil des siècles.
Ensuite, il semble que des traditions locales, populaires et primitives, marquées du cananéen, aient été
revues et corrigés corrige pour rendre ce texte sacral et religieux. 6 Ainsi, les deux premières traditions
élohiste et jehoviste sont écrites à l’époque de David. Puis un rédacteur iahviste de l’époque d’Ezéchias
vers 722 a revu et corrigé, Enfin, l’auteur deutéronomiste a écrit après la promulgation du Deutéronome
en 621.La dernière rédaction pourrait être donc placée au temps d’Esdras avec le retour de l’exil 7.
Ainsi, notre texte fait partie de l’histoire du Deutéronome, qui comprend les livres de Josué, des Juges,
de Samuel et des Rois et semble avoir été écrit vers le sixième siècle A.C., environ cinq cents ans après
les événements rapportés ici. Disons enfin que la portée du livre des Juges c’est de la mort de Josué au
prophète Samuel, soit environ 350 ans. Gédéon aurait vécu, selon les chercheurs, vers 1084 avant l’ère
chrétienne8.
4-Genre littéraire
5
Pierre GIBERT, Vérité historique et esprit historien, Initiations, Cerf, Paris, 1990,57.
6
Jean STREINMANN, Les Juges, Connaitre la Bible, Desclée de Brouwer, Paris, 1960, 61.
7
L.MONLOUBOU, F.M.Du BUIT, « Juges », in Dictionnaire biblique universel, Desclée, Paris, 1984, 406.
8
Claude VIGEE / Victor MALKA, Treize inconnus de la Bible, Spiritualités Vivantes, Albin Michel, Paris,
1996,191.
5
La plupart des exégètes comme Martin9, Boling10 et Vaux11 sont d’accord sur le fait que l’histoire de
Gédéon fut mise en relation avec la légende du sanctuaire d’Ophra et cette liaison n’est pas primitive.
Selon Gibert12, ni le sanctuaire d’Ophra ni l’autel d’YHWH ne doivent être certainement liés à Gédéon.
Tout cela pour Gibert a comme but de construire un genre littéraire et un cycle propre à Gédéon. En
d’autres termes, le récit de vocation se serait trouvé accolé au récit qui nourrissait désormais l’étiologie
de l’autel d’Ophra13.En comparant le v11 et v.24 le rapport et l’inclusion de l’autel d’Ophra est bien
claire et nette. A partir de cela, pour Soggin14et Boling15, le genre littéraire de ce texte c’est une légende
cultuelle d’un sanctuaire. La vocation de Dieu à Gédéon donne l’esprit sacré et religieux à cette légende
du sanctuaire. Disons brièvement la définition d’une légende. Selon le petit Larousse, c’est un récit à
caractère merveilleux, où les faits historiques sont transformés par l’imagination populaire ou par
l’invention poétique16.Par suite, la légende se base sur quelque chose de réel et elle a comme sujet
principal l’homme lui-même17.
5. Contexte historique
a) Contexte lointain
La guerre était, dans l'ancien Orient, une réalité permanente. A chaque retour d'année, les Rois se “
mettaient en campagne ” (2 S 2, 1). Les dieux des polythéistes se livraient aussi la guerre entre eux
et même si Israël coupa court à de telles croyances, elle n'en conserva pas moins l'image d'un Dieu
combattant 18(Ps 74, 13-15 ; Ps 89, 10 et 11).
Depuis l'Alliance sinaïtique, Israël a dû conquérir la patrie que Dieu lui avait donnée (Ex, 23, 27-
9
James MARTIN, The book of Judges, The Cambridge Bible commentary, Cambridge University Press, USA,
1975, 83.
10
Robert BOLING, Judges, 6A, the Anchor Bible, Doubleday, USA, 1975, 130.
11
R. de VAUX, Histoire Ancienne d’Israël la période des Juges, Etudes Bibliques, Librairie Lecoffre, Paris,
1973,119.
12
Pierre GIBERT, Vérité historique et esprit historien, Initiations, Cerf, Paris, 1990,206.
13
Pierre GIBERT, Vérité historique et esprit historien, Initiations, Cerf, Paris, 1990,57.
14
Alberto J.SOGGIN, Le livre des Juges, Commentaire de l’Ancien Testament Vb, Labor et Fides, Genève,
1981,117.
15
Robert BOLING, Judges, 6A, the Anchor Bible, Doubleday, USA, 1975, 134.
16
Série de collaborateurs, Le petit Larousse, Larousse, Paris, 2010, 582.
17
Joseph Naffah, Cours du pentateuque et livres historiques, Université Saint Esprit Kaslik, 2012-2013.
18
Cf. L. MONLOUBOU L, F.M.Du BUIT, « GUERRE », in : Dictionnaire Biblique universel, Desclée, Paris,
1984, p.300.
6
33). C'est ainsi que, dans l'Ancien Testament, les guerres nationales d'Israël, qui sont en même
temps les “ guerres de Yahvé ”, sont globalement justes (Dt 7,3-4 ; 7, I). Bien plus, elles permettent
l'avènement du règne de Yahvé. Cause d'Israël et cause de Yahvé se superposent donc, autant dans
le cas de guerres offensives (Nb, 21,21-25 ; Dt 2,26-3,17 ; Js 6-12) que dans celui de guerres
défensives (Nb 31 ; Jg 3-12 ; 15,11-17 ; 28-30 ; 8 ; 10). La victoire remportée est alors politique et
religieuse (Ps 2 ; 45 ; 4 ; 60,7-14 ; 110).
Mais les combats de Yahvé ne sont pas réductibles aux combats d'Israël dans l'Ancien Testament.
Yahvé lutte personnellement contre l'Egypte par exemple en la frappant de prodiges de toutes sortes
(Ex 3, 20). Les Psaumes rappellent d'ailleurs que les hommes combattent mais que Dieu seul donne
la victoire (Ps118, 10-14 ; 121, 2 ; 124).
De plus, Yahvé lutte contre les ennemis de son peuple mais, plus généralement, contre les pécheurs.
Or il se trouve qu'Israël pèche et devient donc parfois l'ennemi de Yahvé19. L'histoire du peuple élu
est marquée par toute une série de revers militaires qui sont compris par les prophètes comme
autant de punitions divines dirigées contre son peuple à cause de son péché (Is, I, 4-9 ; Jr 4, 5-5,
17 ; 6 ; Is 5, 26-30). A travers ces événements, Israël comprend que la guerre est fondamentalement
un mal. Mal qui est absent des promesses touchant à la fin des temps qui se terminent par une
merveilleuse vision de paix universelle. Dieu considère le peuple d’Israël comme son épouse qu’il
l’aime et essaye de l’éloigner des autres dieux.20
En définitive, même si l'assaut des forces ennemies peut prendre l'aspect d'assauts militaires païens
contre Jérusalem (Za 14,1-3 ; Jd 1-7), le combat dont il est question dans l'apocalypse de Daniel par
exemple est avant tout spirituel, il oppose Dieu et Satan. Dans ses révoltes militaires contre
l'oppression, Israël se sait donc engagée dans une lutte plus haute dont la victoire dépend de Dieu
seul (2 Mac 15, 22-24 ; Jd 9). Cette perspective débouche naturellement sur le combat céleste que
remporteront tous ceux qui auront soutenu les justes (Ps 35, 1) et combattu l'iniquité (Sg 5, 17-23),
le terme étant le règne de Dieu sur la Terre suivi par une paix éternelle à laquelle auront part tous
les justes. (Dn 12, 1 ; Sg 4, 7-9 ; 5, 15).
Dans le nouveau testament, « la guerre » ou le combat de Jésus est uniquement spirituel, il n'est pas
de ce monde (Lc, 22, 50 ; Jn 18, 38) et il répugne à l'emploi de la force, serait-ce à des fins
19 ّ جوزفCf
16 ،)2003(3> بيبليا، حروب هللا في سفر القضاة،قزي
16،)2003(4 بيبليا، الحرب المق ّدسة في سفر القضاة روح الرب يحارب الظالمين، دانيال عيّوشCf
20
7
défensives (Mt 26, 52 ; Jn18, 11). L'ennemi est Satan que le Christ a définitivement vaincu parla
Croix21.
Mais en dépit de l'ordre spirituel dans lequel s'inscrit la grandeur de l'Eglise, les chrétiens sont en
butte, à la fois individuellement et collectivement, à un monde haineux (Jn 15, 18-21) et violent
(Mt 11, 12). Et même si l'Ennemi, c'est-à-dire Satan, est spirituel, ses alliés peuvent se manifester
sous des formes temporelles, telle la Rome impériale, cette nouvelle Babylone (Ap 12, 17-13,10 ;
17).
Il n'en reste pas moins que les armes chrétiennes sont essentiellement spirituel. Il s'agit des vertus (I
Ti 5, 8 : Eph 6, 11) et, par-dessus tout, de la Foi (I Jn 2, 14 ; 4, 4 ; 5, 4). Si le monde triomphe, en
tuant et en persécutant les chrétiens (Ap 11, 7-10), ce n'est qu'en apparence. Grâce à la Résurrection
du Christ en effet, une telle défaite s'inverse en victoire. (Ap 12, 11 ; 14, 1-5)
Dans une perspective eschatologique, nous vivons “ les derniers temps ” - inaugurés par Jésus - qui
sont marqués par une lutte entre le Christ et l'Antéchrist. Les guerres humaines révèlent les
oppositions internes auxquelles est vouée l'humanité pécheresse dans la mesure où elle n'accueille
pas la Paix du Christ. Mais bien qu'une lutte doive être menée ici-bas et pour l'instant, l'Apocalypse
nous rappelle que la Victoire finale du Bien ne sera remportée que par le Christ lui-même, quand il
paraîtra dans sa Gloire pour triompher de Satan22. (Ap 19, 11-26 ; 21 ; Mt 24, 30). C'est une telle
vision de victoire finale qui fonde la constance et la confiance des saints (Ap 12, 10), résolument
située par-delà le temps.23
b) Contexte prochain
21
Cf William KLASSEN,”War” In: Anchor Bible, VI, Eerdamns, Doubleday, New York, 1992,870.
22
Cf.Bauernfeind, « War »in: Theological Dictionary of the New Testament, VI, Eerdamns, USA, 1968, 513.
23
Henri CAZELLES et Pierre GRELOT, « Guerre », dans : Vocabulaire de théologie biblique, Les éditions du
Cerf, Paris, 1970, p1255.
8
Il est la suite normale du livre de Josué auquel il se trouve étroitement lié par ces mots : «
Après la mort de Josué ». Le titre du livre « shophetim » est dû aux 12 hommes qui se
levèrent à l’appel de Dieu, à une exception près, pour délivrer Israël dans la période de
violence, de désunion et de décadence qui suivit la mort de Josué.24
Le livre tire son nom « Shophetim » du verbe « shaphat » « juger » au sens de « prendre
une décision ».D’autres passages ont la forme d’un titre « shophet »,« juge » (2/16-17-19
jamais ailleurs) qui désigne moins un homme apte à rendre la justice qu'un chef habilité à
« décider », à conduire les destinées d'un clan, d'une tribu voire d'un ensemble tribal.
L'origine du terme est probablement cananéenne, et on le retrouve aussi en Moab (Amos
2/3). Le livre présente une succession de douze juges, que l'on répartit 25traditionnellement
en deux groupes : Six d'entre eux (Shamgar, Tola, Yaïr, et Abdôn) n'ont droit qu'à un
court passage, centrée sur une fonction de gouvernement. C'est surtout leur appartenance
tribale qui est indiquée (sauf pour Shamgar). On les appelle parfois « petits Juges ». Six
autres (Otniel, Éhoud, Baraq, Gédéon, Jephté et Samson) font l'objet d'un récit plus
développé qui met en scène leurs exploits guerriers, et les circonstances dans lesquelles ils
ont sauvé Israël; on les appelle parfois « grands Juges »26. A côté du verbe shaphat, il faut
aussi tenir compte d'un autre verbe tout aussi essentiel: « yasha » « sauver » (3/31
Shamgar; 6/15 Gédéon; 10/1 Tola), et de son participe « moshia», « sauveur » (3/9 Otniel;
3/15 Éhoud). Ce double vocabulaire permet de distinguer « juges » et « sauveurs »;
distinction d'autant plus importante que le verbe shaphat est absent de toute l'histoire de
Gédéon!
Dans la période des Juges, chaque tribu en Israël a instaure son système .Un Juge c’est un
chef de type socio religieux .C’est une référence pour le peuple .Il est choisi d’une
manière normale. Il se caractérise par sa sagesse, sa morale surtout familiale et par son
zèle religieux. Cet homme doit être riche signe de la bénédiction de Dieu pour pouvoir
améliorer la vie des gens.27
Ce livre n’est pas destiné à flatter l’orgueil israélite ; mais à montrer les interventions de
Dieu en faveur de son peuple. Le véritable héros du livre, est Dieu ! Dans sa miséricorde,
Dieu l’a toujours retiré son peuple de l’état misérable où le plongeaient ses péchés
24
. - 2)2003(3 بيبليا،االفتتاحيّة، أيوب شهوانCf
25
. - 7،)2003(4 بيبليا، سفر القضاة سفر الخالص، بولس الفغاليCf
26
. - 2)2003(4 بيبليا،االفتتاحيّة، أيوب شهوانCf
27
Cf. Père Joseph Naffah, Cours du pentateuque et livres historiques, Université Saint Esprit Kaslik, 2012-
2013.
9
jusqu’au moment où Israël rebelle a réclamé un roi « comme il y en a chez toutes les
nations »28.
Ces juges, en hébreu « sophètes » jouaient le rôle de généraux libérateurs pour affranchir
du joug de l’oppresseur puis rétablissaient la justice, l’ordre moral et religieux.
Le projet théologique des livres des juges est de la sorte dans tous les chapitres du livre :
1-Péché du peuple : il suit un autre « dieu »
2-Punition de Dieu : le peuple de Dieu est dominé et opprimé par un autre peuple
3 -La demande du pardon du peuple à Dieu
4-Dieu le pardonne, lui donne un sauveur qui va le sauver de la domination des autres
peuples29
5-Retour de la tombée du peuple dans le péché30.
C’est ce projet qui se répète même dans le cycle de Gédéon.
c) Contexte immédiat
Tout d’abord faisons le rapport entre le texte de la vocation de Gédéon Jg (6:11-24) et le texte
qui le précède. Le texte de Juges6 :1-10 vient comme :
1-Une introduction l’auteur nous met dans le contexte : Israël opprimés par les Madianistes à
cause de son péché. Après les cris du peuple, Dieu le promet un sauveur. Donc, le texte de
Juges6 :1-10 met un cadre pour le cycle de Gédéon.
2-Cause de ce qui vient Le peuple a péché. La conséquence sera l’envoi d’un « prophète »qui
sera Gédéon
Faisons maintenant le rapport entre le texte de la vocation et l’épreuve de la toison et la
campagne de Gédéon.
Tout d’abord si on étudie bien la vocation de Gédéon, on remarque que les signes demandes
par ce dernier ne sont pas logiques par rapport à la vocation de l’ange. 31C’est pourquoi
Soggin préfère relier ce texte à l’épreuve de la toison (Jg 6 :36-40) qui sera la preuve
spécifique et claire de la vocation de guerre demande par Dieu. Ce qui prouve cela c’est les
28
Cf. L. MONLOUBOU L, F.M.Du BUIT, « JUGES (LIVRE DES) », in : Dictionnaire Biblique universel,
Desclée, Paris, 1984, p.406.
29
. 12، )2003(3 بيبليا، )19-11:2 البرنامج الالهوتي لسفر القضاة (قض، جوزف نفّاعCf
30
. 55 ،)2003(3> بيبليا،المفاتيح الالهوتيّة لقراءة سفر القضاة، أنطوان مخائيلCf
31
Pierre GIBERT, Vérité historique et esprit historien, Initiations, Cerf, Paris, 1990,61.
10
versets 36 et 37 : « Gédéon dit à Dieu: "Si vraiment tu veux délivrer Israël par ma main,
comme tu l'as dit.
Voici que j'étends sur l'aire une toison de laine: s'il y a de la rosée seulement sur la toison et
que le sol reste sec, alors je saurai que tu délivreras Israël par ma main, comme tu l'as dit."32
D’autre part, on remarque le texte qui suit la vocation de Gédéon parle de la destruction du
temple de Baal. Ici on demande la question : quel est la vocation de Gédéon : combattre les
Madianistes ou Baal ? On sent ici une confusion. La réponse est bien claire : dans les versets 11
à 24 c’est une guerre pour la terre, tandis que du verset 25 à 32 c’est une guerre pour Dieu. Or
l’une présuppose l’autre car c’est Dieu qui donne la terre et qui sauve. En plus, avec les
textes de l’épreuve de la toison et la campagne de guerre de Gédéon, les choses deviennent
claires : Gédéon est appelé à sauver son peuple des Madianistes. Par conséquent, ce qui manque
dans la vocation de Gédéon qui est l’envoi de la personne appelé est réalisé et accompli au
début du chapitre 7 avec le début de la conquête de Gédéon. Enfin, disons qu’on ne peut pas
comprendre la vocation de Gédéon qu’en étudiant tout le chapitre 6 car on ne parle pas d’une
mais des vocations de Gédéon qui sont complémentaires.33
II-Composition du texte
32
Claude VIGEE / Victor MALKA, Treize inconnus de la Bible, Spiritualités Vivantes, Albin Michel, Paris,
1996,193.
33
Cf. Alberto J.SOGGIN, Le livre des Juges, Commentaire de l’Ancien Testament Vb, Labor et Fides, Genève,
1981,116.
34
Philippe ABADIE, Des héros peu ordinaires, Lectio Divina 243, cerf, Paris, 2011,83.
11
8-Demande d’un signe : v17-v18
Certains exégètes pensent que la construction de l’autel dans le verset 24 est le départ mais le plus
probable c’est que tout le parcours et la vie de Gédéon était le départ. Cependant pour être précis,
on peut dire que le départ commence dans le chapitre 7 lors du début de la campagne de guerre de
Gédéon contre les Madianistes à l’ouest du Jourdain35.
III-Etude sémantique
-Jg 6,11 « L'Ange de Yahvé, le térébinthe d'Ophra, Madiân »
L'Ange de Yahvé
On remarque dans tout ce texte de la vocation l’incertitude de la désignation du héro
surnaturel dans le cours du récit. Tantôt c’est l’Ange de YHWH (6 :11, 12, 21,22), voir Ange
d’Elohim (6 :20) et tantôt YHWH (6 :14, 16,23).La question qui se pose : est-il possible de
rendre compte de cette double désignation ?
Il est relativement traditionnel de la part des commentateurs de ne voir là qu’un effet soit de
l’art narratif usant des synonymes ou d’expression équivalentes, soit de la distanciation sacral
d’un Israël soucieux de respecter la transcendance de Dieu en place duquel il verrait plus
aisément son Ange, ou encore des points de repères pour fonder le caractère composite du
récit dans des traditions différentes. De ce fait, à la fin du récit, Gédéon lui-même témoignera
de sa terreur devant le divin(6,22).36 Pour Soggin37, l’ange qui est « le messager de YHWH »
est un être interchangeable avec YHWH qui lui est identique et n’existe pas de façon séparée
35
Cf. Alberto J.SOGGIN, Le livre des Juges, Commentaire de l’Ancien Testament Vb, Labor et Fides, Genève,
1981,116-118.
36
Pierre GIBERT, Vérité historique et esprit historien, Initiations, Cerf, Paris, 1990,45.
37
Cf. Alberto J.SOGGIN, Le livre des Juges, Commentaire de l’Ancien Testament Vb, Labor et Fides, Genève,
1981,102.
12
puisqu’il en est l’apparition visible38.L’apparition de l’Ange est une expression biblique d’une
apparition divine qui exprime l’intervention directe de Dieu39.
Le térébinthe d’Ophra d’Abiezer c’est un arbre majestueux40 saint comme le palmier de
Deborah (Jg 4 :5).Elle se trouve dans la terre du clan de la tribu de Manassé et elle est loin de
11km du nord Beth –Shéân.41Disons ici que ce sanctuaire n’est pas pour Dieu mais pour le
Dieu païen Baal.42
Gédéon Son nom signifie celui qui abat, le coupeur, le tailleur43. Remarquons ici que le héros
surnaturel et le héros humain ne sont pas directement mis en relation comme il se fait
habituellement dans les récits de vocation. Ceci crée une sorte d’incertitude pour un moment
dans l’esprit du lecteur quand au destinataire de l’apparition. 44Notons aussi que Gédéon aura
un surnom relie a sa vocation Jerubball (v6 :32) qui signifie celui qui signifie s’en prenne à
Baal.
Madian Selon Gn25 :24, Madian est un fils d’Abraham et de sa seconde épouse Qetura.Il est
l’ancêtre d’une tribu de marchands caravaniers (Is60 :6) qui selon Gn37, acheta Joseph de ses
frères (v28) et le revendit en Egypte (v36).Madian est présenté la plupart des temps comme
adversaire d’Israël (Nb 25 :6-18) même si Moise trouva refuge en terre de Madian et épousa
Cipora selon le livre d’Exode. L’exploit de Gédéon contre Madian devient proverbial, connu
en Israël comme « le jour de Madian » (Is 9 :3 ; 10 :26).45Ces bédouins attendent le temps de
la récolte et attaque Israël pour la voler d’où on comprend le comportement de Gédéon qui
essaye de soustraire la récolte aux brigands.46
38
Yahvé avec toi ce salut est très fréquent dans la Bible comme signe de bénédiction de Dieu
(ex Lc1 :28).En terme de vocation, ce salut signifie que le prophète était choisi de sa tribu et il
est devenu dans le monde de Dieu et sous sa protection qui sera toujours présent avec 49lui (Jg
2 :18).Cependant Gédéon va comprendre ce salut comme une réalité : que Dieu est avec eux.
Guerrier Cette parole de l’Ange nous fait penser à la parole de l’un des serviteurs de Saul à
propos de David : « j’ai vu un fils de Jessé, le Bethléemite : il sait jouer, et c’est un vaillant
guerrier .Il parle avec discernement. C’est un bel homme et Yahvé est avec lui. »
(1S 16 :18).50La ressemblance avec David ce n’est pas seulement qu’il est guerrier mais aussi
qu’il est sous la présence de Dieu. A partir de ce verset on peut comprendre la mission de
Gédéon : être le guerrier de Dieu. Remarquons ici la contradiction entre l’attitude de Gédéon
qui bat le blé de peur des Madianistes et l’appellation de Dieu de guerrier : un chef
charismatique.51
Jg 6, 13 « Nous, d’où vient tout ce qui nous arrive »
Nous Pourquoi Gédéon utilise le nous ? D’une part, la réalité de l’oppression subie par Israël
et non pas seulement lui. D’autre part, le souvenir de la sortie d’Egypte : ce dernier point est
manifestement en écho de l’intervention du prophète (juges 6 :8) de l’intervention du
cycle52 .Mais le point le plus important, c’est l’esprit communautaire de Gédéon : il pense aux
fils de son pays, il a une ardeur envers ses frères53.
D’où vient tout ce qui nous arrive-t-il y a deux avis envers cette parole de Gédéon :
certains exégètes disent que ce verset montre l’esprit sceptique 54 de Gédéon qui lamente. En
47
Alberto J.SOGGIN, Le livre des Juges, Commentaire de l’Ancien Testament Vb, Labor et Fides, Genève,
1981,103.
48
Pierre GIBERT, Vérité historique et esprit historien, Initiations, Cerf, Paris, 1990,42.
49
.34)2003(3 بيبليا،دعوة جدعون، ماري لويز شهوان، Cf.
50
James MARTIN, The book of Judges, The Cambridge Bible commentary, Cambridge University Press, USA,
1975, 84.
51
Philipe ABADIE, Le livre des Juges, cahiers Evangile, Cerf, Paris, 3(2003), 22.
52
James MARTIN, The book of Judges, The Cambridge Bible commentary, Cambridge University Press,
USA,1975, 84,
53
. بولس52،)2003(3> بيبليا،جدعون و األدب اليهوديّ القديم، الفغاليCf.
54
Claude VIGEE / Victor MALKA, Treize inconnus de la Bible, Spiritualités Vivantes, Albin Michel, Paris,
1996,192.
14
plus, la formule bi adoni est une manière courtoise (d’inferieur à supérieur) mais ferme de
manifester le désaccord de Gédéon55. D’autres exégètes pensent que Gédéon n’a pas perdu sa
foi en Dieu mais il lui reproche qui vient de son amour 56. Ce qui prouve cela c’est que
Gédéon ne nie pas les œuvres magnifiques de Dieu envers ses ancêtres mais il ne comprenne
pas la volonté de Dieu. C’est la lamentation d’un homme croyant qui souffre : ceci est
comparé à Job et surtout à Jérémie (1 :1-8).D’autre exégètes faient référence au credo
d’Israël : Lorsque Yahvé ton Dieu t'aura conduit au pays qu'il a juré à tes pères, Abraham,
Isaac et Jacob, de te donner, aux villes grandes et prospères que tu n'as pas bâties, aux
maisons pleines de toutes sortes de biens, maisons que tu n'as pas remplies, aux puits que tu
n'as pas creusés, aux vignes et aux oliviers que tu n'as pas plantés, lors donc que tu auras
mangé et que tu te seras rassasié,
12 garde-toi d'oublier Yahvé qui t'a fait sortir du pays d'Egypte, de la maison de servitude (Dt
6 :10-12). D’autres disent que c’est un cliché cultuel qu’on utilise même au Liban صباح الخير
لوين في خير؟
Jg 6, 14
Ici on doit étudier ce verset en entier vu son importance dans ce récit. C’est la mission confiée
de Dieu à Gédéon. Tout d’abord, on remarque le passage de sujet Ange de Yahvé à Yahvé lui-
même. Ceci est conforme avec la prophétie de Malachie (Mal 3 :1) : «Voici que je vais
envoyer mon messager, pour qu'il fraye un chemin devant moi ».L’ange de Yahvé a préparé à
la venue de Yahvé pour annoncer la mission confiée à Gédéon57.
Passons maintenant à « Va avec la force qui t'anime et tu sauveras Israël de la main de
Madiân ». Les exégètes58 préfère la traduction « avec la force de celui qui », c’est-à-dire la
force de Gédéon serait d’origine divine. 59Il semble que Dieu a été content de la réponse de
Gédéon qui montre son cœur pur. C’est pourquoi Yahvé s’est tourné vers lui pour l’utiliser
comme moyen du salut pour sauver son peuple 60. D’une autre manière, il lui dit : « je veux
55
Alberto J.SOGGIN, Le livre des Juges, Commentaire de l’Ancien Testament Vb, Labor et Fides, Genève,
1981,104.
56
.35 )2003(3 بيبليا،دعوة جدعون، ماري لويز شهوان، Cf
57
Robert BOLING, Judges, 6A, the Anchor Bible, Doubleday, USA, 1975, 131.
58
Robert BOLING, Judges, 6A, the Anchor Bible, Doubleday, USA, 1975, 131.
59
Alberto J.SOGGIN, Le livre des Juges, Commentaire de l’Ancien Testament Vb, Labor et Fides, Genève,
1981,104.
60
Philippe ABADIE, Des héros peu ordinaires, Lectio Divina 243, cerf, Paris, 2011,83.
15
travailler avec toi comme j’ai travaille avec tes pères. » : ceci vient comme réponse à la
question de Gédéon au v.12.
Jg 6, 15 « Mon Seigneur, plus pauvre le dernier »
Mon Seigneur c’est encore adoni et non adonai : Gédéon n’a pas encore reconnu son
interlocuteur. Quoi qu’il en soit, le discours du messager est plein d’allusions et de sous
entendus, éléments tendant à susciter chez Gédéon des soupçons sur la véritable identité de
son interlocuteur ; c’est pourquoi au v.17b il demande un signe qui l’aide à faire taire tous ses
doutes.61
Plus pauvre, le dernier La réponse de Gédéon semble comme une objection, refus face à la
mission de Yahvé. Elle ressemble à la réponse de Moise en exode (3 :11) : "Qui suis-je pour
aller trouver Pharaon et faire sortir d'Egypte les Israélites? ».C’est la réponse de Saul aussi
au livre de Samuel (1S 9 :21) « "Ne suis-je pas un Benjaminite, la plus petite des tribus
d'Israël, et ma famille n'est-elle pas la moindre de toutes celles de la tribu de Benjamin?
Pourquoi me dire de telles paroles?" En autre, c’est presque la réponse de Jérémie en Jérémie
1 :6 «"Ah! Seigneur Yahvé, vraiment, je ne sais pas parler, car je suis un enfant!"Enfin la
réponse de Gédéon est surtout semblable à la situation de David (voir 1S 16 :1-13). C’est la
petitesse et la faiblesse et la modestie de son clan qui poussent Gédéon à refuser le projet de
Dieu. Cette réponse rejoint donc une tradition des livres historiques et prophétiques.
Jg 6, 16 Je serais avec toi
C’est une nouvelle parole divine qui balaie l’objection et garantit et insiste sur le succès de la
mission confiée62.
Jg 6, 17 Un signe
Gédéon demande un signe pour calmer ses soupçons et ses doutes : qui me parle ? Est ce
vraiment Dieu ? Cette demande ne montre pas le manque de foi mais le besoin de l’homme
de savoir si c’est Dieu vraiment qui l’appelle ou non. N’est ce pas cela ce qu’a demandé
Moise en exode 4 :1-9 (transformer le bâton en serpent)63 et Achaz en Isaïe 7 :10-
11 : « Yahvé parla encore à Achaz en disant: Demande un signe à Yahvé ton Dieu, au fond,
dans le shéol, ou vers les hauteurs, au-dessus ».D’autres exégètes pensent que Gédéon
61
Alberto J.SOGGIN, Le livre des Juges, Commentaire de l’Ancien Testament Vb, Labor et Fides, Genève,
1981,104.
62
James MARTIN, The book of Judges, The Cambridge Bible commentary, Cambridge University Press, USA,
1975, 84.
63
.36)2003(3 بيبليا،دعوة جدعون، ماري لويز شهوان، Cf
16
comme Moise prend les commandes : c’est lui qui donne des ordres64.Disons enfin que
Gédéon recherche la sécurité intérieure et extérieure déjà perdue à cause des Madianistes.
Jg 6, 18
Dans ce verset, il y a quelque chose d’important : le signe demande ne semble pas compatible
avec la vocation. Ce signe n’a comme but que de connaitre l’identité du destinateur qu’il ne
connait pas jusqu'à maintenant (puisqu’il dit mon offrande et non pas l’offrande de
Dieu).Ceci montre que le signe de la vocation c’est la toison de laine au verset 36.C’est
pourquoi certains exégètes considèrent ce verset comme additionnel entre l’appel de Gédéon
et l’histoire de la construction de l’autel.65
Jg 6, 19
Les exégètes66 sont d’accord sur le fait que la quantité (de quelques dizaines de litres) est
disproportionnée pour un repas de deux personnes67.
Juges 6, 20 Le rocher
Il est peut être sacré utilisé pour le rituel et il a des sorties où le sang des offrandes coulent. Il
peut symboliser Dieu dans certains cas : Ps18 :3 ; Ps 28 :1.
Juges 6, 21 « Le feu jaillit du roc, L’Ange de Yahvé disparut à ses yeux. »
Le feu jaillit du roc Ce verset nous fait référence au chant archaïque de Moise au
Deutéronome 32 :27 «Alors il dira: Où sont leurs dieux, rocher où ils cherchaient
refuge »68.En plus, ce pain que Gédéon a présenté à l’ange, le feu divin l’a transformé en
holocauste comme le sacrifice de Manoah (Jg13 :15-16) et le sacrifice du carmel d’Elie
(1R18 :38).Et puisque le feu symbolise la vie et Dieu 69 donc Dieu est présent il est là avec lui,
il a accepté son offrande70 et il lui a donné ce dont il a besoin pour commencer sa vocation.
Puisque Dieu est présent dans ce lieu, Gédéon peut bâtir un autel comme l’a fait auparavant
Jacob après une vision (Gn 33 :20) « et il y érigea un autel, qu'il nomma El, Dieu d'Israël.»
L’Ange de Yahvé disparut à ses yeux la mission de l’Ange a terminé : le signe donné
permet la confrontation et la relation directe entre Dieu et Gédéon.71Par l’acceptation divine
64
Robert BOLING, Judges, 6A, the Anchor Bible, Doubleday, USA, 1975, 132.
65
James MARTIN, The book of Judges, The Cambridge Bible commentary, Cambridge University Press, USA,
1975, 85.
66
Robert BOLING, Judges, 6A, the Anchor Bible, Doubleday, USA, 1975, 133
67
Alberto J.SOGGIN, Le livre des Juges, Commentaire de l’Ancien Testament Vb, Labor et Fides, Genève,
1981,104.
68
Robert BOLING, Judges, 6A, the Anchor Bible, Doubleday, USA, 1975, 133.
69
Joseph Naffah, Cours du pentateuque et livres historiques, Université Saint Esprit Kaslik, 2012-2013.
70
.36 )2003(3 بيبليا،دعوة جدعون، ماري لويز شهوان، Cf
71
Robert BOLING, Judges, 6A, the Anchor Bible, Doubleday, USA, 1975, 133.
17
de son offrande, Gédéon a compris maintenant que c’est Dieu lui-même qui se révèle. Tout
cela : les rochers, le feu et la disparition de l’Ange permettent à Gédéon de reconnaitre le
caractère divin de l’apparition.
Jg 6, 22 J’ai vu l'Ange de Yahvé face à face
Tout d’abord notons quelque chose d’étrange : comment il parle à Yahvé qu’il a vu l’Ange de
Yahvé et il a peur de mourir ? Ne Faut-il pas qu’il fasse le contraire ? Pourquoi ne sente t-il
pas à Dieu la même impression terrifiante que son Ange ?72Ceci prouve qu’on ne peut pas
différencier entre Dieu et l’Ange.
Parlons maintenant du face à face, dans l’ancien testament, il y avait une idée très
prépondérante que personne ne peut voir Dieu et restait en vie. 73C’est le même sentiment de
Jacob en Gn32 :31, de Isaïe en Is 6 :5, de Manoah et sa femme en Jg13 :22 et même Moise
Ex33 :20 et le peuple juif en Ex 19 :20.74
Juges 6, 23
"Elle fait référence au verset 12 « l'Ange de Yahvé lui apparut: "Yahvé avec toi, lui dit-il,
vaillant guerrier!" ».C’est le message de Dieu : je suis avec toi je veux ton salut et le salut du
peuple et non pas vous punir. L’amour de Dieu se manifeste : son salut est réel et il va être
concrétise par Gédéon. Entre v.12 et v.23 un seul message de Dieu qui a conduit à la
conversion totale de Gédéon de pessimiste, sceptique et insécurisé à un sentiment de sécurité,
de foi et de confiance en lui. Dieu rassure l’homme 75. Dieu est le Dieu des vivants et non des
morts donc pas de peur.
Juges 6, 24 « Un autel à Yahvé et il le nomma Yahvé-Paix ; encore aujourd'hui à Ophra
d'Abiézer»
Un autel à Yahvé et il le nomma Yahvé-Paix
Puisque Dieu est présent dans ce lieu, Gédéon peut bâtir un autel comme l’a fait auparavant
Jacob après une vision (Gn 33 :20) « et il y érigea un autel, qu'il nomma "El, Dieu
d'Israël." .Même Abraham Gn12 :7-8 et Isaac Gn26 :25 ont fait cela. Donc c’est une tradition
patriarcale76. La question qui se pose : pourquoi ce nom pour l’autel ?ceci est conforme avec
le verset 23 « Que la paix soit avec toi! » Gédéon bâtit cet autel comme un signe de
72
Pierre GIBERT, Vérité historique et esprit historien, Initiations, Cerf, Paris, 1990,53.
73
. 36 )2003(3 بيبليا،دعوة جدعون، ماري لويز شهوان،
74
James MARTIN, The book of Judges, The Cambridge Bible commentary, Cambridge University Press, USA,
1975, 85.
75
Alberto J.SOGGIN, Le livre des Juges, Commentaire de l’Ancien Testament Vb, Labor et Fides, Genève,
1981,105.
76
James MARTIN, The book of Judges, The Cambridge Bible commentary, Cambridge University Press,
USA, 1975, 86.
18
reconnaissance à Dieu qu’il a parle à Dieu il a resté en vie 77. La deuxieme raison c’est surtout
un signe de confession de sa foi en Dieu qui est présent en ce lieu : Dieu est la paix et
donnera la paix à tous ceux qui l’obéissaient. D’autre part, ce salut de Dieu n’est pas un
simple salut mais une grâce de Dieu qui remplit l’intérieur de Gédéon et lui donne une vie
nouvelle .Ceci s’est rendu visible par la construction de l’autel.
Encore aujourd'hui à Ophra d'Abiézer Le terme encore aujourd’hui est en général le signe
d’une légende étiologique.78Cet indice prouve de plus en plus le genre littéraire de ce texte. En
plus cette dernière partie du verset 24 est en rapport direct avec le v.11 concernant l’autel
d’Ophra. Donc on peut parler d’une certaine inclusion qui n’est pas en rapport direct avec le
cycle de Gédéon.79Ce rapport prouve aussi la distinction entre deux textes : celui de l’appel
(v.11b-v17) et celui en rapport avec l’autel v.11a, v18-24 déjà motionné en étudiant l’auteur
de ce récit.
Synthèse Théologique
2-Nous : Ce qui m’a impressionné dans la vocation de Gédéon c’est qu’il a pensé à ses
compatriotes avant de penser à soi même. N’est-ce pas cela doit être le fondement de toute ma
vocation : penser au salut et à la joie des autres avant de penser et chercher sa joie ?est ce que
j’ai l’ardeur au salut des autres comme Gédéon et Elie ? Dieu ne choisit-il pas celui qui
comme Moise a un cœur simple, net et enflammé pour le secours de ses frères ?
3-Guerrier: j’ai longtemps médité à propos de la question suivante : Dieu m’invite à être
guerrier contre le mal, le péché et l’injustice, est ce que je suis conscient de cela ? En plus, est
ce que je crois que Dieu peut travailler en moi, l’homme faible et pécheur, pour me
77
36)2003(3 بيبليا،دعوة جدعون، ماري لويز شهوان،Cf
78
Alberto J.SOGGIN, Le livre des Juges, Commentaire de l’Ancien Testament Vb, Labor et Fides, Genève,
1981,105.
79
Robert BOLING, Judges, 6A, the Anchor Bible, Doubleday, USA, 1975, 134.
19
transformer en un guerrier ?Est –ce que je fais des compromis et je deviens un lâche ?Qui est
ma référence : Dieu ou l’homme ?Je suis le guerrier de qui : Dieu, les hommes ou mes
désirs ?
5-L’humilité devant Dieu et les hommes 81 : Ceci se manifeste surtout à la fin du cycle de
Gédéon .Apres sa victoire surprenante, le peuple lui propose la royauté mais il refuse. Pour
lui, Dieu est le seul Roi. Il sait très bien qu’il n’est qu’un moyen et un instrument dans les
mains de Dieu pour le salut de son peuple.
6-Croire en la puissance de Dieu : Disons tout d’abord que Dieu regarde le cœur de l’homme
et non pas les apparences comme le fait les hommes. Comme David, Gédéon est le « moins »
et le « plus petit » mais avec Dieu il sera « le plus » et « le plus fort ».Dieu ne regardes pas la
faiblesse et l’imperfection de celui qui est appelé car il va lui donner la force pour réaliser la
mission demandée. Dieu regarde le cœur : est ce qu’il pur, net, simple et ouvert à Dieu et aux
autres ?
20
Il passe du peuple d’Israël à qui est advenue la loi divine, et dut semblable à la toison qui
seule reçut la rosée, aux nations païennes qui furent d’abord sans «ondée» jusqu’à
l’acceptation de la foi. Elles furent inondes, tandis que le peuple d’Israël était à sec parce qu’il
n’a pas cru à l’évangile. En un mot, la toison qui est un symbole de l’Église: Le peuple
d’Israël reçoit d’abord la rosée; puis toutes les nations païennes.
Pour d’autres exégètes, la toison symbolise la Vierge Marie. Elle est différente de tous les
humains. Elle est la tout pure. Elle enfanta tout en état vierge. Elle reçut le bonheur du ciel,
dans sa perfection quand elle y monta corps et âme. Pour cela elle se distingue de ce qui est
autour d’elle comme la toison par rapport au terrain qui l’entoure. Celle qui est unique dans sa
conception comme dans son assomption, sera unique dans son rapport à Jésus-Christ. Elle lui
donnera une chair de sa chair. Elle commença par recevoir les dons du salut, qui bientôt se
déverseront sur la terre entière. Pour cela, elle aura une place unique dans le cœur de Dieu.
Elle sera le chemin par où passe toute grâce après avoir conçu celui par qui sont venues à
nous... «La grâce et la vérité» (Jn 1,17).
Bibliographie:
ABADIE Philippe, Des héros peu ordinaires, Lectio Divina 243, cerf, Paris, 2011.
21
Origène, Homélie sur les Juges, sources chrétienne 389, Les éditions de Cerf, Paris, 1993.
SOGGIN J.Alberto, Le livre des Juges, Commentaire de l’Ancien Testament Vb, Labor et
Fides, Genève, 1981.
STREINMANN Jean, Les Juges, Connaitre la Bible, Desclée de Brouwer, Paris, 1960.
VAUX R. (de), Histoire Ancienne d’Israël la période des Juges, Etudes Bibliques, Librairie
Lecoffre, Paris, 1973.
ABADIE Philipe, Le livre des Juges, cahiers Evangile 125, Cerf, Paris, 3(2003), 20-27.
MONLOUBOU L, BUIT F.M. (du), « JUGES (LIVRE DES) », in : Dictionnaire Biblique
universel, Desclée, Paris, 1984, p.406-408.
Dictionnaire français :
MARTIN James, The book of Judges, The Cambridge Bible commentary, Cambridge
University Press, USA, 1975.
KLASSEN William, “War” in: Anchor Bible, VI (ET le dictionnaire contient VI volumes),
Eerdamns, Doubleday, New York, 1992, 867-870.
Naffah Joseph, Cours du pentateuque et livres historiques, Université Saint Esprit Kaslik,
2012-2013.
المراجع في اللغة العربيّة:
الكتب:
المقاالت:
23
.شهوان ماري لويز ،دعوة جدعون ،بيبليا37-33،)2003(3
.عيّوش دانيال ،الحرب المق ّدسة في سفر القضاة روح الرب يحارب الظالمين ،بيبليا17-14، )2003(4
الفغالي بولس ،جدعون مخلّص شعبه في تفسير االباء ،بيبليا. 67-63 ،)2003(3
24