Livret Congrès Thèmes
Livret Congrès Thèmes
Livret Congrès Thèmes
6 au 9 juillet 2015
INALCO, Paris
Image de la couverture :
Photo de Jean-Pierre Dalbéra
Les arts de l’Islam (Musée des Arts Décoratifs, Paris), Carreau de frise aux fleurons rumi,
Turquie,
« Iznik », 1575-1580, céramique engobée, décor peint sous glaçure, Legs veuve Léonce Mahoû,
1929,
Inv 26684
Creative commons Attribution-NonCommercial-ShareAlike 2.0 Generic (CC BY-NC-SA 2.0)
Ces actes reprennent les résumés des ateliers tenus lors du Congrès, ainsi que le programme des
activités proposées.
Table des matières
Histoire
Politique et économie
Intellectuels islamiques : rapport aux autorités religieuses et stratégies de différenciation (Atelier 19) ............... 82
Responsable : Béatrice Garapon (IEP Bordeaux/Centre Emile Durkheim) ..................................................................... 82
Trajectoires militantes et engagements dans le monde arabe (Atelier 6) .................................................................. 84
Responsables : Erminia Chiara Calabrese (Université de Terragona), Valentina Napolitano (CHISM)......................... 84
État, nation, et communautés en Égypte : la révolution du 25 janvier et le peuple introuvable ? (Atelier 36) ..... 88
Responsable : Laure Guirguis (IMéRA, IREMAM, Université d'Aix-Marseille) ........................................................... 88
Le Kurdistan d’Irak : Un État sans le nom ? (Atelier 23) .......................................................................................... 94
Responsable : Dimitri Deschamps (Doctorant à l’EHESS-CETOBaC, Ifpo-Erbil) ........................................................ 94
La "décentralisation", un "refoulé" des Révolutions arabes ? Enjeux sociaux et identitaires
au cœur des reconfigurations territoriales des administrations publiques locales (Atelier 7) ................................. 96
Responsables : Jean-Philippe Bras (Université de Rouen), Aude Signoles (CHERPA, IEP Aix-en-Provence), ............ 96
Les institutions politiques, angle mort de l'analyse politique du monde musulman ? (Atelier 10) ....................... 102
Responsable : Hardy Mède Mohammed (CESSP, CERAPS)........................................................................................ 102
L'islam et l'économie : la fabrication de « l’esprit du capitalisme islamique » (Atelier 26) .................................. 104
Responsable : Dilek Yankaya (IREMAM) .................................................................................................................... 104
Religions au Moyen-Orient
Exégèse coranique et élaboration du savoir en islam : Langue, théologie et philosophie (Atelier 40) .................. 106
Responsable : Nadjet Zouggar (FMSH-Labex RESMED) ............................................................................................ 106
Lecture(s) du Coran. Le cas du Coran 3,7 (Atelier 41) ............................................................................................. 110
Responsable : Paul Neuenkirchen (EPHE) .................................................................................................................... 110
Le Prophète de l'islam au miroir de sa communauté (Atelier 18) ............................................................................ 112
Responsables : Rachida Chih (CETOBAC) et Stefan Reichmuth (Ruhr-Universität Bochum) .................................... 112
L'ésotérisme shi'ite, ses racines et ses prolongements (Atelier 5) ............................................................................. 116
Responsable : Mohammad-Ali Amir-Moezzi (Directeur d’études- EPHE/LEM) ......................................................... 116
Penser les reconfigurations de la distinction sunnites/chiites depuis les années 2000 (Atelier 15) ........................ 118
Responsables : Norig Neveu (IFPO), Khalyla Aude Coëffic (CHERPA) ..................................................................... 118
La magie et les sciences occultes dans le monde islamique (Atelier 31) ................................................................... 122
Responsable : Jean-Charles Coulon (BULAC) .............................................................................................................. 122
Le cimetière à la croisée des politiques : espace, État, religion (Atelier 3) .............................................................. 128
Responsable : Sepideh Parsapajouh (CéSor/IIAC-LAU) ............................................................................................... 128
Chrétiens d’Orient, nouvelles perspectives et nouvelles sources (Atelier 2) ........................................................... 134
Responsable, Audrey Dridi (Université Paris I, UMR 8167)......................................................................................... 134
Le déracinement des minorités dans le monde arabe contemporain :
le cas de l’Irak ; Approches littéraires et socio-historiques (Atelier 43) .................................................................. 138
Responsable : Sobhi Boustani (INALCO-CERMOM) .................................................................................................. 138
Islam et évolutions des pratiques historiographiques (Atelier 42) ........................................................................... 142
Responsable : Hela Ouardi (LEM) ................................................................................................................................. 142
Les décors de céramique architecturale en Islam : création, transfert et écriture des collections (Atelier 11) ... 144
Responsable : Vanessa Rose (Université Paris I Panthéon-Sorbonne et INHA-InVisu) ............................................... 144
Le patrimoine culturel au Moyen-Orient et en Afrique du Nord : acteurs, usages et enjeux (Atelier 8) ............. 146
Responsable : Stéphanie Anna Loddo (IRIS)................................................................................................................. 146
Villes et patrimoines du Maroc à l'Iran : nouvelles perspectives (Atelier 14)......................................................... 148
Responsable : Virginia Cochin-Cassola (École du Louvre, Université de Lorraine) .................................................... 148
Images, narrativités, identités. Ce que nous disent les arts plastiques des sociétés du Maghreb
et du Moyen-Orient (XIXe-XXIe siècle) (Atelier 30) ................................................................................................. 152
Responsables : Annabelle Boissier (LAMES, MMSH), Fanny Gillet (IMAF, EHESS), Alain Messaoudi
(CRHIA, Université de Nantes), Perin Emel Yavuz (CRAL-IISMM, EHESS) ............................................................ 152
Littérature de prison / Prisons et exils (Atelier 20) .................................................................................................... 156
Responsable : Brigitte Foulon (Université de Paris 3) ................................................................................................... 156
Introduction
Les révolutions arabes, les conflits au Moyen-Orient et les bouleversements actuels jusqu’en
France montrent l’importance de ces études et l’urgence qu’il y a à les soutenir.
Or les études françaises sur le Moyen-Orient et les mondes musulmans, contrairement aux
spécialistes de l’Asie ou de l’Afrique, n’organisaient plus de Congrès périodique depuis onze ans.
Les Congrès de l’association AFEMAM (Association française des études sur le monde arabe et
musulman, fondée en 1985) en tenaient lieu dans les années 1990, mais depuis 2004, aucune
entreprise collective n’avait été menée. La Convention du GIS a donc prévue la tenue de Congrès
qui réunissent le plus possible de chercheurs français travaillant sur le champ, afin de dresser un
état des lieux, permettant à la fois d’améliorer les liens scientifiques et les échanges entre
chercheurs, mais aussi de donner une visibilité à nos études auprès des journalistes, des pouvoirs
publics, et des personnes intéressées.
Le comité organisateur du premier Congrès du GIS Moyen-Orient et mondes musulmans, réuni
sur la base du volontariat parmi les membres du Conseil Scientifique, a été enrichi par la
participation active des trois associations de doctorants français : l’Association des doctorants en
sciences sociales sur les mondes musulmans modernes et contemporains (la Halqa), l’Association
des Doctorants en Histoire des mondes musulmans médiévaux (Diwan) et la Sorbonne
Association Monde Arabe et Hébraïque (Samah).
Pour favoriser les échanges entre chercheurs et améliorer la visibilité de nos études, le GIS a
organisé son premier Congrès à Paris les 7, 8 et 9 juillet 2015, après une conférence inaugurale le
soir du 6 juillet 2015. Ce Congrès qui a fait un état des lieux de la recherche française a réuni près
de 350 participants afin :
Des ateliers scientifiques ont présenté des recherches en cours en favorisant les débats entre
chercheurs. Le Congrès en réunissait 43, certains simples (une demi-journée), d’autres doubles
(toute la journée). Ces ateliers ont regroupé plus de 350 participants dont un public d’une centaine
de personnes. Le Congrès a ainsi mobilisé la communauté scientifique française et francophone :
les échanges entre spécialistes de différentes périodes (Moyen-Âge et époque contemporaine), de
différentes disciplines (par exemple : historiens et politologues) et de différentes aires
géographiques ou pays (Turquie, Iran, monde arabe,…) ont également accueilli de nombreux
collègues étrangers (environ 80).
Grâce à trois tables-rondes, des discussions ont été menées sur les rapports entre chercheurs et
autres intervenants de la connaissance sur le monde musulman :
• des journalistes spécialistes du Moyen-Orient, rencontre organisée par Azadeh Kian, co-
directrice du GIS Moyen-Orient, avec des journalistes spécialisés sur le Moyen-Orient :
Christophe Ayad, pour Le Monde ; Laurent Bonnefoy, chargé de recherche CNRS et chercheur
CERI ; Claude Guibal pour France Culture ; Pierre-Jean Luizard, historien, Jean Marcou,
professeur et directeur des relations internationales à l’IEP de Grenoble ; Jean-Pierre Perrin,
pour le quotidien Libération ; et Agnès Rotivel, pour La Croix.
• des bibliothécaires orientalistes, rencontre organisée par Sara Yontan (BnF) et animée par Éric
Vallet (Université Paris 1 Panthéon-Sorbonne), avec la participation de : Dominique Akhoun-
Schwarb (School of Oriental and African Studies (SOAS) ; Olivier Dubois (Maison
méditerranéenne des sciences de l’homme (MMSH) ; Francis Richard (Bibliothèque
universitaire des langues et civilisations (BULAC) ; Anaïs Salamon (Mc Gill) ; Philippe Vézie
(Institut français du Proche-Orient (IFPO) ; Sara Yontan (Bibliothèque nationale de France
(BnF).
• des responsables des institutions parisiennes, rencontre organisée par Bernard Heyberger
(EHESS) avec les institutions parisiennes de diffusion des connaissances sur l’islam avec Elsa
Jacquemin, Institut des Cultures d’Islam (ICI) ; Jean-Paul Chagnollaud, Institut de Recherche et
d'études Méditerranée Moyen-Orient (IREMMO) ; François Zabbal pour l’Institut du Monde
arabe (IMA) et l’Institut des études sur l’islam et les sociétés du monde musulman (IISMM)
représenté par Pascal Buresi.
Des manifestations culturelles ont été organisées autour du Moyen-Orient et des mondes
musulmans dans des lieux étroitement associés à nos études, la Bibliothèque nationale de France
(BNF), la Bibliothèque universitaire des langues et civilisations (BULAC), et l’Institut du Monde
Arabe (IMA) :
• un concert de musique andalouse par le chanteur marocain Rachid Ben Abdeslam et ses
musiciens, avec le programme du disque Chants d’Orient et d’Occident qui réunit des musiques
des trois cultures monothéistes qui cohabitèrent sur la Péninsule ibérique du VIIIème au XVème
siècles : romances espagnoles, textes amoureux arabes, mélodies séfarades. Ce concert a eu lieu
à l’Institut du Monde Arabe, haut lieu de la vie culturelle arabe à Paris.
• une soirée de récitation poétique organisée par Jean-Charles Coulon (BULAC) et Catherine
Mayeur-Jaouen (INALCO, GIS) et animée par Stéphane Sawas (INALCO). Avec la
participation de : Leili Anvar (persan), Farida Ait Ferroukh (kabyle), Etienne Naveau
(indonésien), Nathalie Bontemps et Golan Haji (arabe)
• une exposition TYPOGRAPHIAe ARABICAe sur la typographie arabe et turque au regard de
l’évolution technique aux XIX – XXIe siècles s’est tenue à la Bibliothèque universitaire des
langues et civilisations (BULAC) et dans la galerie de l’auditorium. Cette exposition a été
organisée par le Groupe de recherches sur les Arts Visuels du Monde Musulman, Maghreb et
Moyen-Orient 19e-21e siècles (ARVIMM)
• la projection d’un film turc issu des archives de la Bibliothèque nationale de France (BnF) Un
village anatolien, (1991), réalisé par Bige Berker. Ce film se base sur le livre éponyme de
Mahmout Makal (1950), paru dans la collection Terre humaine. Cette projection s’est tenue à la
Bibliothèque nationale de France. Cette projection fut organisée par Timour Muhidine
(INALCO) et par Sara Yontan (BnF).
Les revues du champ et les éditeurs concernés étaient également présents, pour vendre ou
présenter leurs ouvrages lors du Congrès.
Remerciements
Nous remercions vivement les membres des associations citées, le comité d’organisation et tous
les bénévoles qui ont bien voulu contribuer à la réussite de ce Congrès :
Pascal Buresi, IISMM
Jean-Charles Coulon, association Samah
Sylvie Denoix, UMR Orient & Méditerranée
Audrey Dridi, association Diwan
Béatrice Garapon, association Halqa
Frédéric Hitzel, CETOBAC
Augustin Jomier, association Halqa
Azadeh Kian, GIS Moyen-Orient et mondes musulmans
Catherine Mayeur-Jaouen, INALCO, GIS Moyen-Orient et mondes musulmans
Sabrina Mervin, CéSOR
Cyrielle Michineau, GIS Moyen-Orient et mondes musulmans
Philippe Pétriat, Université Paris 1 Panthéon-Sorbonne
Daniel de Smet, LEM
Élise Voguet, IRHT
Mercedes Volait, In Visu
Limor Yungman, association Diwan
Nous remercions particulièrement les collègues (Bernard Hourcade, président ; Marc Aymes,
trésorier ; Audrey Dridi, secrétaire) qui ont fondé l’association AGIS (les Amis du GIS) afin de
recueillir le montant des inscriptions lors du Congrès.
Nous remercions également tous nos soutiens : en tout premier lieu le CNRS suivi par les
différentes tutelles (Universités et Instituts d’études politiques), qui financent le GIS Moyen-
Orient et mondes musulmans, ainsi que le Centre d'analyse, de prévision et de stratégie et de la
Direction politique de l’Organisation internationale de la francophonie (OIF) dont les subventions
ont permis de financer la publication des ateliers choisis par ces deux institutions, l’Institut
national des langues et civilisations orientales (INALCO), le Centre de Recherches Moyen-Orient
Méditerranée (CERMOM), l’Institut d’études de l’Islam et des sociétés du monde musulman
(IISMM) et l’ERC IGAMWI « Imperial Government and Authority in Medieval Western Islam »
(UMR Orient et Méditerranée), la Bibliothèque nationale de France (BnF), la Bibliothèque
universitaire des langues et civilisations (BULAC), et l’Institut du Monde Arabe (IMA).
Atelier 1
Responsable : Jean-Charles Ducène (Directeur d’études, EPHE)
Intervenants : Jean-Louis Bacqué-Grammont, Ingrid Bejarano, Ana M. Cabo-González, Anna
Caiozzo, Hadrien Collet, Jean-Charles Ducène, Omayra Herrero Soto, Robin Seignobos
Résumé
Intervenants
Hadrien Collet, Institut des mondes africains (Imaf) / Université de Paris 1 Panthéon-Sorbonne
« Entre adab et récit de voyage : Ce que déconstruire la riḥla d’Ibn Baṭṭūta nous apprend
sur le bilād al-Sūdān. »
À travers l'exemple du bilād al-Sūdān, nous tâcherons de mettre en lumière ce qui fait la
spécificité du Tuḥfat al-naẓār fī ġarā’ib al-amṣār wa ʿajā’ib al-asfār d’Ibn Baṭṭūta. À la croisée de
la littérature des merveilles, de l’adab et de la relation de voyage, son récit doit désormais faire
l’objet d’une approche intertextuelle et d’histoire des textes.
Robin Seignobos, Université Paris-1 Panthéon-Sorbonne / Institut des mondes aficains (IMAF)
“Les merveilles dans le Kitāb aḫbār al-Nūba d’al-Uswānī (fin Xe siècle) : entre realia et
mirabilia »
Ibn Sulaym al-Uswānī, envoyé en Nubie entre 969-973, a laissé une relation fragmentaire de son
voyage. Sans un être un catalogue de merveilles, son récit accorde une place non négligeable à la
description de faits extraordinaires ou exotiques. Nous voudrions, en en examinant la nature,
clarifier leur fonction dans l’économie du récit.
Atelier 17
Responsable : Marianne Brisville (CIHAM / Université Lyon 2)
Intervenants : Nora Afif, Marianne Brisville, Kata Keresztely, Amandine Lefol Adwan, Farah
Makki, Tarek Oueslati, Ibrahim Shaddoud, Syrine Snoussi, Limor Yungman.
Coordinateurs de l’atelier : Marianne Brisville, Limor Yungman
Animateur : Bruno Laurioux
Résumé
Intervenants
Nora Afif, doctorante CHISCO/ MCSPP LEM, Université de Paris Ouest Nanterre-La Défense,
EPHE
« Des mets paradisiaques d’après les sources textuelles de l’Islam médiéval (VIIIe-
e
XIV siècle) »
La description coranique des délices paradisiaques a suscité, dès le VIIIe siècle, un grand intérêt
chez les auteurs médiévaux. Des érudits exégètes, des savants, des historiens, des commentateurs
et des théologiens ont ainsi décrit les mets composés de fruits, de viandes et de boissons, que les
hôtes des jardins de la félicité auront la joie de déguster à volonté.
Atelier 38
Responsable : Nessim Znaien (Université Paris I Panthéon Sorbonne, IRMC)
Intervenants : Mohammed Frini, Rached Lakhal, Ozge Samanci, Sophie-Anne Sauvegrain,
Nessim Znaien
Résumé
Notre atelier se propose de poser les bases d'une réflexion sur les mutations des modèles
alimentaires entre le XVIIIème siècle et le XXIème siècle dans les mondes musulmans de la
Méditerranée. Entre ces deux moments, la révolution des transports, la naissance des industries
agro-alimentaires et la colonisation européenne, ont eu des impacts certains sur les sociétés
étudiées. Les modèles alimentaires ont pu se diversifier et évoluer de multiples manières au cours
de ces siècles.
Tout d'abord, de nouveaux produits ont été introduits, non sans faire l'objet parfois de
certaines résistances (comme dans le cas de l'alcool ou de l'huile d'olive). Ces produits ont pu être
réadaptés par les sociétés selon les cultures locales, en étant par exemple associés à certains
moments, comme les fêtes religieuses ou familiales. La notion de métissage des pratiques
alimentaires pourra ici être utilement mobilisée. Ensuite, ce sont les manières de tables elles-
mêmes, et la sociabilité de l'alimentation, qui ont pu évoluer, en lien avec celle de la dichotomie
espace public/espace privé si importante dans le monde arabe. Les modes de cuisine et de
distribution de l'alimentation ont également pu être touchés, avec la naissance et le développement
des cafés comme un des points centraux de notre atelier. C'est donc par un aspect de la culture
matérielle, l'alimentation, que nous pouvons tenter de comprendre une partie des conséquences de
la mondialisation moderne sur les sociétés du monde arabe.
Intervenants
Atelier 25
Responsables : Christian Müller (IRHT) et Élise Voguet (IRHT)
Intervenants : Lahcen Daaif, Nicolas Michel, Christian Müller, Élise Voguet
Résumé
Ces dernières années ont été marquées par le développement d’études sur le droit - droit –entendu
dans son sens le plus général de règles régissant les rapports entre les hommes en collectivité-
dans les sociétés musulmanes du moyen-âge et de l’époque moderne.
Ces travaux, qui s’appuient sur des corpus renouvelés regroupant des types de documentation
différents (actes légaux, compilations de jurisprudence, mais aussi recueils de biographies, textes
hagiographiques …) et mettent en place de nouveaux outils (bases de données notamment)
participent à un renouvellement des approches.
Une problématique commune semble les relier les uns aux autres : qu’ils parlent de pluralisme
juridique, de relations entre normes et pratiques ou encore de normativités multiples, ils remettent
les sociétés au cœur de leurs interrogations. Comment le droit s’exerce-t-il dans les sociétés
musulmanes ?
Cet atelier sera l’occasion de présenter différentes approches et de confronter les résultats de ces
expériences diverses.
Intervenants
Atelier 33
Responsables : Marie-Odile Rousset (Université Lyon 2 / GREMMO) et Dominique
Valérian (Université Lumière-Lyon 2 – CIHAM)
Intervenants : Cyrille Aillet, Marie-Odile Rousset, Dominique Valérian, Abbès Zouache
Résumé
Les espaces de marges sont souvent considérés dans leur seule relation à un centre rayonnant,
qu’ils en subissent réellement l’influence ou au contraire qu’ils soient un lieu de résistance à une
intégration complète, nécessairement pensée comme un échec du centre. Mais ce modèle centre-
périphérie, porté par une vision impériale de l’espace, outre son manque de nuances, empêche de
penser les dynamiques propres à ces espaces de marges – qu’elles se situent aux frontières des
Etats ou à l’intérieur, dans des zones peu ou mal intégrées. L’objectif de cet atelier est d’inverser
la perspective, dans le contexte de l’Islam médiéval, en proposant plusieurs éclairages, en Orient
comme en Occident, et en croisant les approches d’historiens et d’archéologues. Il s’agit de voir
dans quelle mesure ces marges ont pu constituer des pôles d’impulsion qui peuvent aussi être
efficients, soit à une échelle autre que celle du territoire contrôlé par le pouvoir souverain, soit
pour certains groupes qui peuvent développer leur propre appréhension et construction de
l’espace. Dans le cas des zones frontalières en particulier, il convient d’envisager la question dans
le cadre d’un espace large, qui permet le développement de réseaux qui débordent des
constructions politiques, et dans lesquels ces marges occupent une place au contraire centrale.
L’atelier, qui s’appuiera sur une réflexion historiographique, aura en outre comme objectif de
mieux définir ces marges, à la fois par l’analyse du discours des textes médiévaux et par la
définition de critères et de marqueurs pertinents.
Intervenants
Au-delà du colonial. Une autre histoire du Maghreb par le pré- et le post- colonial
Atelier 9
Responsable : M'hamed Oualdi (Université de Princeton, INALCO)
Intervenants: Yassir Benhima, Isabelle Grangaud, Augustin Jomier, Annick Lacroix, M'hamed
Oualdi, Malika Rahal, Ismail Warscheid
Résumé
Intervenants
Atelier 39
Responsable : Claudine Piaton (InVisu)
Intervenants : Nabila Chérif, François Dumasy, Isabelle Grangaud, Thierry Lochard, Claudine
Piaton
Discutant pressenti : Nicolas Michel, IFAO, Le Caire
Résumé
Durant les premières années de l’occupation française de l’Algérie, la ville d’Alger fut, selon les
témoins de l’époque, l’objet d’importantes transformations architecturales et urbaines
(démolitions, réalignement de rues, etc.) ainsi que de considérables mutations foncières imposées
par l’occupant. La spéculation effrénée à laquelle se livraient les nouveaux propriétaires et la
détérioration rapide des immeubles qu’elle a générées furent aussi dénoncées par ces
contemporains.
Ni la réalité des démolitions opérées durant les premières décennies de l’occupation, ni la nature
et la fréquence des transactions foncières et ses acteurs n’ont cependant été précisément étudiées
et, dans l’ensemble, les travaux existants sont restés dispersés. L’objectif de l’atelier est de réunir
des historiens et des historiens de l’architecture, spécialistes de l’époque ottomane ou de l’époque
coloniale, en vue de croiser les approches, les perspectives et les sources mobilisées, susceptibles
d’apporter un nouvel éclairage sur la société urbaine algéroise du milieu du XIXe siècle.
Nous chercherons ainsi, à partir d’études de cas, à réévaluer d’une part le contexte et les rapports
de force et d’autre part, le séquençage, les mécanismes et les acteurs des transformations urbaines
dans la ville entre 1830 et 1880, à partir des archives de l’administration coloniale, du « fonds
ottoman », du cadastre de 1868 conservé à Alger, des plans d’alignement des rues et du repérage
sur le terrain de l’architecture de cette période encore conservée.
Intervenants
Atelier 37
Responsable : Emmanuel Szurek (Université de Princeton)
Intervenants : Sadia Agsous, Charlotte Courreye, Laurence Gautier, Catherine Miller, Iris Seri-
Hersch, Emmanuel Szurek
Résumé
Intervenants
Atelier 24
Responsable : Erdal Kaynar (CETOBAC)
Intervenants : Eyal Ginio, Erdal Kaynar, Özgür Türesay
Discutants : Vincent Duclert (EHESS), Anne-Laure Dupont (Université Paris IV)
Résumé :
Si les retentissements de l’Affaire Dreyfus en dehors de la France ont été l’objet de nombreuses
études scientifiques, sa perception et son impact dans l’Empire ottoman n’ont pas encore été
véritablement appréhendés. Il ne s’agit pas là d’une lacune historiographique propre aux études
sur l’Affaire elle-même : le sujet reste également inexploré dans l’historiographie ottomane. Il
existe pourtant nombre d’indices montrant que l’Affaire a été suivie de très près dans le monde
ottoman. Cet atelier thématique propose de réfléchir sur l’impact de l’Affaire auprès des
« intellectuels » ottomans. Il étudiera comment la référence à l’Affaire pouvait prendre des sens
différents dans le contexte de l’Empire ottoman en fonction des conditions politiques et sociales
particulières de différents groupes et communautés ottomans. L’atelier proposera également une
interrogation sur le caractère transnational des développements ayant rendu possible le
déroulement de l’Affaire, et plus généralement sur la nature globale de la « naissance » des
intellectuels au tournant du siècle.
Intervenants
Atelier 27
Responsable : Benoît Pouget (IEP Aix-en-Provence/ CHERPA)
Intervenants : Philippe Bourmaud, Walter Bruyère-Ostells, Francisco Javier Martinez, Benoît
Pouget, Isabelle Renaudet, Salvatore Speziale
Résumé
Intervenants
Atelier 21
Responsable : Manon-Nour Tannous (Collège de France, Université Paris II)
Intervenants : François Ceccaldi, Guillemette Crouzet, Matthieu Rey, Valérie Stiegler, Manon-
Nour Tannous
Résumé
Si les pays du Moyen Orient font régulièrement l’objet d’une couverture de presse en tant
que zones hautement stratégiques, ils demeurent à la marge des recherches en relations
internationales. Objet d’un traitement par « crise », ils ne reçoivent d’attention nécessaire que
dans l’immédiateté de l’événement pour ensuite être délaissés, rompant ainsi le récit analytique
sur leur trajectoire historique.
L’enjeu du présent atelier sera donc d’éclairer par des contributions inédites, et à partir de
sources jamais exploitées, les inflexions connues par la trajectoire de l’Orient arabe auprès des
grandes puissances sur les cinquante dernières années. Il s’agira ainsi de saisir la manière dont de
nouveaux acteurs prennent la suite ou s’intègrent à des traditions anciennes. Cette perspective doit
nous conduire non à ignorer l’importance des puissances américaines et soviétiques (puis russes),
mais à déplacer la focale sur d’autres puissances agissantes. En effet, bien que les États du Moyen
Orient soient traditionnellement qualifiés de création européenne, il ressort de la littérature une
large absence du traitement de l’Europe comme acteur collectif dans les relations à l’Orient arabe.
La particularité de cet acteur tient à ce que ses membres disposent d’une parole distincte. Dès lors,
en se focalisant sur la France, il est possible de faire dialoguer autour des relations bilatérales, les
liens particuliers entretenus avec l’Orient arabe. En revisitant la « chose arabe » comme l’a
qualifiée le Professeur Henry Laurens, il s’agira de préciser les contours et les spécificités des
politiques européennes et françaises à l’adresse des Etats arabes.
Les contributions s’orienteront sur des crises permettant de saisir la mise en place d’une
configuration de puissances autour d’un Etat arabe. Elles caractériseront ainsi la notion de crise,
en tant qu’accélérateur de l’histoire, ou bien simple reflet d’une transformation des relations, et ce
selon plusieurs dimensions (les arènes de la négociations, les contraintes engendrées par la crise,
la capacité d’action).
Intervenants
Atelier 32
Responsables : Anaïs Salamon (Bibliothèque des Études Islamiques, Université McGill)
et Dyala Hamzah (Université de Montréal)
Intervenants : Emily Cottrell, René-Vincent du Grandlaunay, Elizabeth Kassab, Ilham Khuri-
Makdisi, Henri Lauzière, Michael Marx, Ute Pietruschka
Résumé
Depuis une quinzaine d’années, les humanités numériques occupent un espace croissant sur les
serveurs de bibliothèques et dans le quotidien des chercheurs et chercheuses. Au point qu’il est
devenu difficile, y compris pour les professionnel-le-s de l’information, de connaître toutes les
initiatives de numérisation de documents originaires du Monde arabe.
La première partie de l’atelier sera ainsi consacrée à un bilan des projets achevés ou en cours, sur
la numérisation de manuscrits arabes. Alors qu’en Europe la production de livres manuscrits a
décliné dès l’introduction de l’imprimerie, au XVIe siècle, dans le monde arabe elle s’est
perpétuée jusqu’au début du XXe siècle. De sorte qu’il est encore aujourd’hui difficile, même
pour des spécialistes, d’évaluer l’ampleur2 du patrimoine hérité de quatorze siècles (VIIe-XXe
siècles) de production ininterrompue. Au cours des quinze dernières années, ces manuscrits arabes
ont suscité de très nombreux projets de numérisation de grande envergure3, initiés par des
chercheurs et chercheuses et/ou par des professionnel-le-s de l’information. Comment cette
« dématérialisation » massive de la production manuscrite influence-t-elle la production des
savoirs historiques ?
1
Voir, entre autres, Andras Riedlmayer à propos de la destruction massive et systématique du patrimoine musulman écrit en Bosnie-
Herzégovine (1992-1995) et au Kosovar (1999) ; le projet numérisation des manuscrits de Tombouctou par l’Institut national des sciences
appliquées (INSA) et l’École Normale Supérieure (ENS) de Lyon qui a débuté en 2009 ; Geoffrey Roper à propos des manuscrits arabes en
Irak http://www.muslimheritage.com/article/fate-manuscripts-iraq-and-elsewhere
2
Article de Christine Jungen à propos de « la collecte du `patrimoine arabe et islamique` » dans la Revue d’anthropologie des connaissances,
2013/4, vol. 7, no 4.
3
Voir, par exemple, Robert Wisnovsky, « The Post-classical Islamic Philosophy Database Initiative (PIPDI) », Université McGill ; The
Islamic Heritage Project (IHP), Université Harvard ; al-Maktaba al-shamila (shamela.ws) et l’article que Qais Atef lui consacre dans les
Carnets de l’IFPO, 30.01.2011 ; le projet AMEEL de l’Université Yale (manuscrits, dictionnaires et revues académiques arabes
contemporaines).
Intervenants
4
Le Centre pour la documentation du patrimoine culturel et naturel (CULTNAT- Bibliotheca Alexandrina), numérise le patrimoine de la
musique arabe (19e-20e siècles) depuis 2005. Quant au Fonds Arabe pour l’Image, il collectionne et conserve la culture photographique du
Moyen-Orient et du Maghreb : à ce jour, il compte 75.000 images (débutant en 1860) à son actif.
5
Le projet chronologique Jara’id d’A. Mestyan.
6
La numérisation en PDF d’al-Manar, par K. Yasushi et al. (Université de Tokyo)
7
La numérisation beaucoup plus performante d’al-Manar par la société égyptienne MAS, quant à elle, présente des interventions formelles
préjudiciables dans sa conception.
8
K. Yasushi, Y. Ibish, Y. Khuri , sur l’index d’al-Manar.
9
D. Glass sur al-Muqtataf, A.-L. Dupont sur al-Hilal et Zaydan.
Elizabeth Kassab, Mellon visiting professor at the Cogut Centre for the Humanities at Brown
University in Rhode Island, USA
« The significance of making the Nahda literature digitally accessible for scholars of
contemporary Arab thought »
The Nahda has been a very significant reference for contemporary Arab thought. Contemporary
Arab thinkers have been referring to it as an inspiring/distorting moment of modern Arab thought
that needs to be addressed for the sake of dealing with the current cultural and intellectual issues
of the Arab world. Referred to as a set of mind, a certain approach, a general Zeitgeist, a set of
fundamental questions, a certain positioning of the intellectual vis-à-vis the people and vis-à-vis
power, or a mixture of all the above, the Nahda occupies a central place in contemporary
discussions. The issues of enlightenment, reform, liberation, westernization, traditionalization,
modernization it has been associated with remain to this day at the heart of Arab debates. Hence,
any facilitation of the access to that body of literature is significant not only for scholars of the
Nahda itself, but also to those of us who study contemporary Arab thought. This applies to the
monographs as well as the periodicals that document the debates of that era. For instance, the
whole question of the alleged failure of the Nahda as enlightenment has been a recurring question
in the discussions of post-1967 Arab thought. Was the term “enlightenment” (tanwir) used in the
Nahda body of literature? If yes, in what sense? An appropriate search engine would immensely
enhance the possibility of tracing the notion of tanwir in that literature and exploring its various
connotations, if found. This is one example among numerous others that show the great scholarly
help that a well thought-out search engine could provide to the study of modern Arab thought.
books first serialized in the pages of periodicals). I will also try to map the various routes and
figures involved in the translations, as well as analyze how they were translated. What topics,
authors and texts were deemed most interesting, between the two languages? What got lost in the
translations? What changed? How were certain key concepts translated? To what extent can we
talk of a shared set of leading ideas, discourses and concepts between the two linguistic spaces?
What do translations tell us about ideology –about Ottomanism and political identification? What
are some of the trends detected in these translations and how closely related are they to political
developments? 1908 is surely a turning point –but how so, and to what extent? Some of the issues
I will explore are: the challenges presented by “unequal” digitization, between Ottoman
periodicals and their Arabic counterparts (the former having been much more systematically and
comprehensively digitized); and by uneven or unreliable searchabilty tools. At the same time,
digitization has allowed us easier access to ‘minor’ periodicals, and with it, the possibility to
explore relations between so-called ‘minor’ and major periodicals, and to further our
understanding of what constituted a canon for reform at an imperial scale.
« nommé », comme le proposait le savant Bagdadien Ibn Muǧāhid (m. 936) - connu sous le nom
de « sept lectures canoniques » en vigueur aujourd'hui - peut être décrit comme résultat d’un
processus historique. Outre que la discussion des deux voies de transmission (écrite et
littéraire/orale), un modèle d’une édition critique du texte coranique sera proposée.
Atelier 16.1
Responsable : Delphine Pagès-El Karoui (INALCO/URMIS)
Intervenants : Hassan Boubakri, Kamel Doraï, Paola Gandolfi, Thibaut Jaulin, Delphine Pagès-El
Karoui
Discutante : Marie-Antoinette Hily
Résumé
Cet atelier interdisciplinaire et transversal se propose de présenter des contributions issues d’un
numéro spécial de la Revue Européenne des Migrations Internationales (REMI), à paraître en
septembre 2015, coordonné par Hassan Boubakri, Marie-Antoinette Hily et Delphine Pagès-El
Karoui. Il s’agira d’analyser les articulations et les interactions identifiées entre les « révolutions »
arabes et les migrations. Quatre axes peuvent être dégagés pour démêler l’écheveau compliqué de
ces relations : quels sont les impacts de ces bouleversements politiques sur la reconfiguration des
systèmes migratoires nationaux, régionaux et même interrégionaux (Afrique subsaharienne/rive
sud de la Méditerranée/Europe) ? En quoi les migrations ont-elles pu jouer un rôle structurant
dans le déclenchement des mouvements de contestation ? Quelles sont les formes d’engagement
des diasporas arabes dans les processus révolutionnaires ? Comment les politiques migratoires
sont-elles remodelées, tant dans les pays touchés par les soulèvements que dans ceux, comme
dans le Golfe, qui cherchent à les éviter à tout prix ?
Intervenants
Atelier 16.2
Responsables : Elif Aksaz (IFEA, CESSP-CSE), Jean-François Pérouse (IFEA)
Intervenants : Elif Aksaz, Mohamed Berriane, Hassan Boubakri, Kamel Doraï, Delphine Pagès-El
Karoui, Paul Tabar
Correspondants du projet : Kamel Doraï (CNRS, IFPO), Dominique Marchetti (CNRS, CJB),
Hasnia-Sonia Missaoui (Université Toulouse Le Mirail, IRMC), Delphine Pagès-El Karoui
(INALCO, URMIS)
Résumé
L’atelier rendra compte de l’état d’avancement d’un projet de recherche porté par l’IFEA
en collaboration avec quatre autres IFRE (le CJB, l’IFPO, l’IRMC et le CEDEJ), soutenu par le
GIS MOMM dans le cadre d’une réponse à son appel à projet 2015 intitulée « 80 ans de sciences
sociales de l’émigration dans les pays du Sud et de l’Est de la Méditerranée : constructions
nationales, effets de domination et dynamiques transnationales ». À partir de l’hypothèse d’une
dépendance des interrogations savantes à l’égard des interrogations publiques qui ont été
différemment formulées selon les contextes migratoires, le projet vise à créer un réseau
transdisciplinaire de chercheurs pour examiner les analyses de l’émigration produites par les
sciences sociales des pays dans lesquels ces IFRE sont implantés. La démarche est à la fois
réflexive et comparative et porte sur la période des années 1930 aux années 2000. Les
correspondants du projet, c’est-à-dire des chercheurs rattachés aux IFRE, joueront le rôle
d’intermédiaires en établissant des contacts avec des chercheurs locaux qui ont étudié
l’émigration et qui interviendront à l’atelier. Les communications s’appuieront sur la première
version des articles en vue d’une publication dans une revue ou dans un ouvrage collectif. La
participation à l’atelier permettra aux collègues de retravailler leurs articles à partir des réactions
du public.
Intervenants
Atelier 22
Responsable : Azadeh Kian (université Paris 7 Diderot / LCSP-CEDREF)
Intervenantes : Lucia Direnberger, Elif Gozdaşoğlu Kucukalioğlu, Azadeh Kian, Fakhera
Moussavi, Asli Telserin
Résumé
Intervenants
réalisé dans le domaine culturel, les romans jouent un rôle important en termes de représentation
des limites imaginaires. Ils fonctionnent comme des moyens à travers lesquels la différence
culturelle est exprimée. Il est possible de dire que le lien entre la formation nationale et le roman
n’ est pas accidentelle. Le roman peut être utilisé comme un lieu où de différents problèmes et
contradictoires sont débattues à travers la représentation de certaines figures imaginaires.
Le but de mon intervention est d'examiner la construction des femmes comme sujets de genre
nationale dans les romans de la période pré-républicaine (ottomane-turque) et la période
républicaine (1908-1938) en me concentrant sur les images de femmes. Je voudrais analyser la
formation de genre de l’identité nationale. En examinant les images des femmes dans les romans,
mon objectif est d'identifier certaines caractéristiques spécifiques du nationalisme turc.
liens familiaux. L’importance de ces réseaux ne laisse pas place à la constitution d’un « état
moderne » fondé sur une légitimité démocratique qui dépasserait les antagonismes ethniques et
tribaux. Un gouvernement qui voudrait en adopter la forme courrait le risque de n’être plus en
prise avec la réalité de la société. Dans un tel contexte, l’élite politique et le gouvernement
considèrent que le rôle du genre est à la fois mobilisateur et éclairant sur la nature des obstacles
rencontrés.
La société afghane survalorise les valeurs attribuées au masculin au travers du pouvoir
patriarcal et tribal, avec le rôle tenu par les seigneurs de guerre. En même temps, un des thèmes
susceptibles d’être fédérateur est le refus du sort réservé aux femmes. Ainsi pour une
reconstruction de l’état-nation, la situation des femmes était un thème positif et largement partagé,
capable de dépasser les clivages familiaux, tribaux et ethniques. L’élite politique a appris que la
question de l’égalité et le droit des femmes pouvaient être un outil efficace de transformation de la
société et de construction d’une nouvelle nation. De plus, son discours à la fois critique sur la
société traditionnelle et patriarcale et favorable aux droits de l’homme et à l’entrée dans un
processus de démocratisation.
Cette « politique de genre » planifiée par le gouvernement et encouragée par les
intellectuels politiques et par les organisations internationales pour faire avancer le
développement de l’état-nation n’a pas rencontré un grand succès. Car elle a, en fait, exacerbé les
tensions et montré les contradictions entre traditions et modernisme, patriarcat et valeurs
masculines d’un côté, démocratisation et valeurs féminines de l’autre, faute d’avoir réussi à
mobiliser le peuple, dans toutes ses composantes, pour une transformation progressive mais
profonde en faveur de la construction d’un Etat-nation.
Atelier 28
Responsable : Meriem Rodary (EHESS, LAS)
Intervenants : Salima Amari, Meriam Cheikh, Nasima Moujoud, Meriem Rodary
Résumé
La « féminité » au Maghreb a longtemps été, et reste encore trop souvent, perçue comme figée,
intemporelle, et indivisible. Cette représentation, qui reste vivante y compris dans les écrits de
sciences sociales, découle d'une vision binaire et orientaliste de ces sociétés, perçues comme
représentant « l’Autre » de l’Occident. Sont ainsi privilégiés les thèmes ou objets de recherche qui
sont censés illustrer cette altérité absolue.10 Cette pensée binaire ainsi que l’assignation à l’islam,
perçu comme « trait distinctif » de ces sociétés, sont encore plus accentuées concernant les
femmes. De « la femme musulmane » aux « femmes en islam », c’est ainsi à travers le prisme de
la religion qu’a souvent été évoquée la problématique du genre dans les sociétés maghrébines11,
gommant la diversité et la mixité des références culturelles de ces sociétés, de même que les
variations temporelles, politiques et de classes. Dans cet atelier, nous souhaitons explorer les
manières dont des modèles de féminités distincts sont produits, reproduits, transformés ou
réinventés,12 selon les périodes historiques, les configurations politiques, ainsi que la classe, au
Maghreb. Nous nous situerons ainsi dans la lignée des recherches qui se développent ces dernières
années sur les changements sociaux dans cette région, notamment dans le domaine du genre.13
Cette question sera abordée dans des champs aussi variés que les expériences de travail, la
sexualité, le rapport à l'espace, ou encore les modes de vie, et une attention particulière sera portée
à sa dimension historique et sociale.
Intervenants
10
Pour une critique de cette approche, voir Ferrié, Jean-Noël, 1991, « Vers une anthropologie déconstructiviste des sociétés musulmanes du
Maghreb », Peuples méditerranéens, janvier-juin : 229-246.
11
Jusqu’à récemment les études sur « les femmes » au Maghreb ont en effet peu questionné les catégories issues de la colonisation et leurs
effets sur les femmes des pays colonisés, et les ont au contraire souvent repris à leur compte. Voir Abu-Lughod, Lila1998, « Feminist
longings and postcolonial conditions », in L. Abu-Lughod (éd.), Remaking women : feminism and modernity in the Middle-East, Princeton,
Princeton University Press : 3-31 ; Hatem, Mervat, 1993, « Toward a critique of modernization : narrative and Middle East women studies »,
Arab Studies Quaterly, 15, no. 2 : 117-22. ; R. Lewis & S. Mills (éd.), 1998, Feminist postcolonial theory : a reader, Edinburgh, Edinburgh
University Press : 542-566.
12
Le Renard, Amélie, 2011, Femmes et espaces publics en Arabie Saoudite, Paris, Dalloz : 8.
13
Voir notamment les travaux des chercheur-e-s du GreGam (Groupe de Recherches et d'études sur le Genre au
Maroc) : http://gregam.hypotheses.org/
14
« Maitresses de cérémonies », figures centrales des cérémonies de mariage, qui officient également dans les autres cérémonies liées aux
rites de passage.
Atelier 4
Responsables : Anna Poujeau (CéSOR), Isabelle Rivoal (LESC)
Intervenants : Kinda Chaib, Fanny Debarre, Roula Nabulsi Anna Poujeau, Isabelle Rivoal,
Romain Simenel
Discutante session du matin : Emma Aubin-Boltanski
Discutante session de l’après-midi : Stéphanie Latte Abdallah
Résumé
À partir des années 1970, les recherches en sciences sociales dans les mondes arabe et musulman
ont pris en considération la place des femmes en mettant l’accent sur les relations de genre
asymétriques et les rapports de pouvoir défavorables dans lesquelles celles-ci sont prises. Souvent
décrites comme faisant parties d’un monde essentiellement masculin et comme ne pouvant pas
échapper aux politiques de l’honneur dont elles constituent à la fois l’objet et l’enjeu, les femmes
ont ensuite été au centre de recherches de type gender. Selon ce point de vue, celles-ci
posséderaient des capacités d’agir (agency) propres. Acteurs de la modernité, elles sont capables de
s’aménager un rôle particulier dans l’espace public ou encore élaborer une piété proprement
féminine.
La critique majeure que l’on peut adresser à ces derniers travaux est qu’ils ont fini par perdre de
vue les femmes ordinaires et peu visibles dans l’espace public : celles qui continuent d’endosser
des rôles traditionnels et qui peinent à sortir des logiques lignagères et communautaires. Pourtant
ce sont très souvent ces femmes-là que nous rencontrons sur le terrain ainsi que celles qui souvent
bien malgré elles se retrouvent dans des situations à la fois stigmatisées et banales : célibataires ou
sans descendance, veuves élevant seules leurs enfants, filles-mères, épouses abandonnées, etc.
Cet atelier propose de s’intéresser à ces femmes qui, peu visibles dans l’espace public et loin
d’incarner une féminité idéale, mettent pourtant en abîme les positions sociales, religieuses et
politiques des uns et des autres y compris de celles et ceux qui occupent le devant de la scène
sociale et politique. De par la banalité de leur situation et de leur quotidien, ces femmes interrogent
et défient la place qu’elles occupent dans la société tout en s’érigeant en une critique de celle-ci.
C’est donc bien en prenant le contre-pied des analyses forgées à partir d’une réflexion sur les
multi-modernités aujourd’hui dans les sociétés arabes et musulmanes que nous engageons une
réflexion pluridisciplinaire sur les façons qu’ont ces femmes ordinaires de s’inscrire dans des
temporalités quotidiennes et de faire face à des avenirs parfois incertains.
Intervenants
En m’appuyant sur des entretiens et des observations, je tâcherais de dégager l’articulation entre
« être » femme de martyr et « faire » en femme de martyr.
En croisant avec les dires et faires des mères, dont le rapport au défunt est d’une autre nature, il
sera possible d’affiner le propos. Les mères ou les femmes de « martyrs combattants » s’ancrent
dans des logiques communautaires dont le lien est réaffirmé avec la mort de leur époux ou de leur
fils comme c’est le cas à chaque nouveau décès. Dans une routine commémorative, la mort d’un
combattant rappelle la mort de tous les combattants, comme j’ai pu le constater à nouveau lors de
l’enterrement d’un combattant en septembre 2014, où des femmes défilaient avec le portrait de
leur fils, tombé quelques mois plus tôt. Elles sont ainsi les garantes de l’ordre social, affirmant le
lien entre les combattants et la « société de la résistance ».
ces femmes, la possibilité de s’installer en Europe en tant que réfugié est un moyen
d’émancipation ainsi qu’une façon de redéfinir leur positionnement dans leurs relations de parenté
avec leurs enfants, leur conjoint et le reste de leur famille resté en Syrie.
Atelier 35
Responsable : Frédérique Fogel (CNRS LESC)
Intervenants : Azita Bathaïe, Sophie Blanchy, Juliette Cleuziou, Frédérique Fogel, Sophie Roche
Résumé
Les recherches présentées ont pour point commun une approche par le genre des relations de
parenté et des configurations familiales. Les terrains sont situés dans des sociétés musulmanes ou
auprès de musulmans, dans des contextes variés où des changements importants sont observables,
en corrélation avec des mobilités géographiques, sociales et culturelles.
L’approche du changement social par le genre permet d’envisager les nouveaux statuts des
femmes : leur mobilisation dans la gestion des conflits locaux (S. Blanchy), leurs positions
matrimoniales et généalogiques en contexte migratoire, dans les pays de départ (J. Cleuziou) et
d’arrivée, en considérant la dimension juridique (F. Fogel), l’accès à la sphère publique du travail
salarié (A. Bathaie), et plus généralement, la politique du genre (S. Roche) constituent des
occasions de négocier des relations de genre souvent marquées par un fort contrôle des aînés ou
des hommes, et fournissent aux femmes les conditions nouvelles d’une réflexion sur leur capacité
et leur manière d’agir.
Cette approche permet également de saisir les paradoxes d’une modernité (véhiculée notamment
par les militant.e.s des droits humains, les ONG) qui promeut l’émancipation féminine mais
questionne aussi les fondements sociaux de la place des femmes dans la famille (notamment les
rôles de fille, d’épouse, de mère), et les représentations qui y sont associées. Dans des contextes
d’incertitude politique et socio-économique, les tensions entre travail domestique et travail salarié,
entre attente et mobilité, entre désir de sécurité et celui d’émancipation, les trajectoires féminines
sont également modelées par les rapports de classe et d’ethnicité. Notre démarche,
fondamentalement comparative, vise à saisir la complexité des relations de genre dans
leurs reconfigurations culturelles particulières, d’une part, et dans leur dimension globale, de
l’autre.
Intervenants
Sophie Roche, JRG, Karl Jaspers Centre, Ruprecht Karls University of Heidelberg
«Famille patriarcale, migration et sociabilité féminine dans les recherches en Asie centrale»
(Empêchée : sa communication a été utilisée dans la discussion de l’Atelier)
Jusqu’à récemment, le monde des femmes en Asie centrale était enquêté par des chercheurs
masculins russes qui n’y avaient pas accès : dans leur représentation de la famille, les femmes,
soumises, devaient être libérées. Pendant la période soviétique, les femmes ont occupé les rôles
les plus divers, dans une libération sociale du genre sans libération sexuelle. Après la Deuxième
guerre mondiale, du fait du déséquilibre démographique entre les sexes, les femmes assuraient
seules la survie de la famille et le futur de leurs enfants. Depuis l’Indépendance du Tadjikistan, les
hommes émigrent pour le travail. Une fois de plus, les femmes se retrouvent au centre du foyer,
mais l’État qui célèbre la maternité ne leur accorde aucune aide. La famille patriarcale, urbaine,
demeure le seul modèle de référence des chercheurs. Et les femmes elles-mêmes, dans l’interview
ethnographique, se présentent non comme actrices mais en tant que victimes des circonstances.
Cependant, une culture féminine, indépendante, s’est développée. Les hommes émigrés
pourvoient aux dépenses des femmes qui organisent la vie de la famille. Alors que des chercheurs
russes voyaient dans « la femme d’Asie centrale une sauvage sans culture, prédestinée à
l’esclavage », les femmes tadjikes considèrent « les femmes russes qui travaillent comme des
victimes d’une société qui leur a pris l’honneur d’être femme puisqu’elle sont obligées de trouver
de l’argent, et de s’occuper des enfants, du mari et des parents ». Les points de vue se modifient
lorsque des femmes tadjikes rejoignent leurs époux en Russie.
En croisant mes observations ethnographiques avec des récits de vie, des journaux intimes, je
favorise une autre approche de la féminité et des sociabilités féminines, et je montre que la
féminité est situationnelle, et le genre, relationnel. Ma proposition est qu’il n’est pas seulement
question de genre, de classe ou d’appartenance de groupe, mais d’une combinaison de « savoir
appris » (learned knowledge), d’intuition et de capacité de réagir à des situations en se
représentant comme victime, héroïne, femme d’honneur, patronne, poétesse, etc.
Atelier 12
Responsables : Assaf Dahdah (Aix-Marseille Université /Telemme), Hala Abou Zaki
(EHESS/IIAC- LAU)
Intervenants : Hala Abou-Zaki, Michel Agier, Assaf Dahdah, Nicolas Puig
Résumé
Dans le cadre de cet atelier, nous proposons d’étudier les modes d’insertion des populations
migrantes au Liban et la façon dont elles ouvrent ou modifient des espaces sociaux et révèlent les
transformations à l’œuvre. A partir d’une approche empirique qui donne voix à différents acteurs
– populations migrantes et établies – du quartier de Sabra et des camps de réfugiés palestiniens de
Chatila et Mar Elias, nous exposerons les formes d’interactions et de transactions observées et
relevées dans les espaces privés et publics pluralistes. Il s’agira d’interroger le rapport entre
visibilité, nouvelles diversités et production de discours et de représentations. Nous souhaitons
ainsi contribuer à une meilleure compréhension des logiques sociales, spatiales, relationnelles,
économiques, culturelles et politiques induites par des contextes de coprésence dans les secteurs
paupérisés de Beyrouth. La place de l’étranger et les enjeux liés à la migration invitent in fine à
repenser les effets de la mondialisation et de la crise sur une capitale du Moyen-Orient à partir de
ses marges.
Intervenants
Atelier 29
Responsables : Hala Abou Zaki (EHESS/IIAC-LAU), Véronique Bontemps (EHESS-
CNRS/IIAC-LAU), Philippe Bourmaud (Lyon III/LARHRA), Nada Nader (Paris
III/INALCO)
Intervenants : Hala Abou-Zaki, Sergio Bianchi, Véronique Bontemps, Clio Chaveneau, Claire
Gallien, Antoine Garrault, Thomas Richard, Baptiste Sellier
Résumé
Cet atelier se propose d’explorer les articulations entre les frontières et les mobilités (objets qui
ont mobilisé depuis plusieurs années l'attention des chercheurs) d’une part, et les inégalités dans
les sociétés palestiniennes des Territoires occupés, d’Israël/Palestine, des communautés de
réfugiés comme de la diaspora, d’autre part. Il s’agira de se pencher sur les formes multiples de
contraintes imposées aux circulations palestiniennes à des échelles diverses, et sur les
négociations et dépassements des dispositifs frontaliers par les Palestiniens. Nous réfléchirons par
ailleurs à la manière dont contraintes de circulation, frontières territoriales et frontières de statut
renforcent ou reconduisent des inégalités sociales, voire en créent de nouvelles. Contestations et
transgressions des frontières, entre expérience quotidienne vécue et motif fictionnel, cristallisent
invariablement des enjeux sociaux et économiques. Une partie des communications abordera la
façon dont écrivains et artistes vivent et représentent ces frontières, qu’ils s’en accommodent ou
qu’ils tentent de reconfigurer l’espace, et les inégalités induites par la distribution des savoir-faire,
artistiques ou artisanaux. Les communications aborderont également la question des différentiels
de statuts existant à l’intérieur des sociétés palestiniennes ainsi que d’autres types d’acteurs
agissant dans les espaces israélo-palestiniens. Elles tenteront ainsi d’articuler la question de
l’occupation et des politiques des États hôtes à la manière dont s’organisent les inégalités sociales,
ainsi que les mobilisations mises en œuvre dans des espaces géographiquement et statutairement
fragmentés. On cherchera de la sorte à montrer une multiplicité de ruptures significatives
superposées à la grande césure de 1948, ainsi que les continuités des hiérarchies sociales et des
trajectoires individuelles.
Intervenants
9h30-10h30
Hala Abou Zaki, EHESS/IIAC-LAU
Véronique Bontemps, EHESS-CNRS/IIAC-LAU
« Familles dispersées, réseaux familiaux dans différents « territoires palestiniens » »
Cette communication s’intéressera aux trajectoires et mobilités de deux familles palestiniennes, à
partir, respectivement, de Naplouse en Cisjordanie et du camp de Chatila au Liban. Il s’agira de
voir comment dans de tels contextes sociopolitiques et juridiques ayant chacun leurs spécificités,
la famille se recompose au-delà des frontières territoriales et des frontières de statut.
11h-12h
Antoine Garrault, Université Paris-Est Créteil/ Lipha/UPEC
« La résistance populaire contre l'occupation territoriale en Cisjordanie dans le contexte de
l'après seconde intifada : Territorialités en compétition et divisions spatiales du mouvement.
L'exemple de Bab el-Shams comme transgression des frontières imposées. »
Mon étude a pour objectif de réfléchir sur une étude de cas de mobilisation palestinienne qui veut
mettre fin aux divisions spatiales et aux politiques d'occupation territoriale en Palestine. Cette
action prend la forme d'une opération de spatialisation de la lutte contre la colonisation territoriale
en Cisjordanie par la création d'un village palestinien dans la zone E1, proche de Jérusalem, zone
convoitée par Israël.
13h30-15h30
Claire Gallien, Université Montpellier 3
« Minding the Gazan Border in Contemporary Palestinian Art and Fiction »
This paper focuses on the Gazan border as reflected in contemporary literature in Arabic and in
English. I would like to suggest that writers mind (about) the borders and further contend that they
do it differently according to locations, routes, and languages. This paper reflects on what the
Palestinian border does to their art and on how their artistic endeavours reflect, transgress,
redefine the Gazan border and Palestinian national identity.
Atelier 13
Responsable : Matthieu Cimino (CERI/Sciences Po)
Intervenants : Matthieu Cimino, Claudia de Martino, Adoram Schneidleder, Jihane Sfeir, Emilia
Stoduto, Guillaume Vareilles
Discutant : Daniel Meier
Résumé
Cet atelier interdisciplinaire entend approcher l’histoire migratoire des espaces israélo-
palestiniens à la marge, par l’étude de la « seconde vie » (Gottman, 1938) de la frontière, celle du
symbole et de la représentation. Quelles sont les articulations entre frontière, territoire(s) et
identité(s) ? Comment les migrants perçoivent-ils l’objet-frontière, lorsque celle-ci est franchie
pour fuir un territoire ou, au contraire, pour s’y installer ? La frontière peut-elle être un lieu
d’engagement ?
Cet atelier souhaite mobiliser de nombreux champs disciplinaires, et notamment l’histoire, la
science politique, l’anthropologie et la sociologie. Il entend ouvrir la voie à une réflexion
historiographique sur la période mandataire franco-britannique en Palestine, mais également au-
delà.
Pour cela, ce groupe de réflexion s’appuiera sur de la littérature grise, mémoires, témoignage ou
revues alternatives, ainsi que sur les parcours individuels d’acteurs vivant et pratiquant les
frontières, qu’elles soient matérielles (séparation entre territoires britannique et français, frontière
« disjonctée » de 1948, etc.) ou symboliques (définition de l’altérité entre différents acteurs).
L’objectif est également d’explorer la frontière dans toutes ses subjectivités, à travers l’imaginaire
qu’elle véhicule, et de proposer un regard nouveau sur ce concept à la polysémie parfois
déroutante.
Intervenants
Atelier 34
Responsables : Emma Aubin-Boltanski (CéSOR), Cécile Boëx (CéSOR)
Intervenants : Mariela Elizabeth Acunà, Laure Assaf, Emma Aubin-Boltanski, Cécile Boëx, Dima
de Clerck, Laurent Damesin, Mariangela Gasparotto, Lorraine Guénée, Ece Zerman
Discutante matin : Christine Jungen (anthropologue, CNRS, LESC)
Discutant après-midi : Franck Mermier (Anthropologue, CNRS, IIAC, LAU)
Résumé
Dans les mondes arabes et musulmans, le salon désigne un espace hybride dont les fonctions
sociales ont profondément évolué au cours du XXe siècle. Inclus au sein de l’espace domestique
ou séparé de celui-ci, il constitue un lieu de représentation dont l’acteur principal est une famille
(plus ou moins élargie selon les situations) ou un individu (une figure religieuse et/ou politique ;
masculine ou féminine). Si de nombreux travaux se sont penchés sur les différentes formes de
« salon » en tant qu’institutions productrices et régulatrices d’ordres sociaux et politiques,
l’objectif de cet atelier est d’interroger cet espace composite comme scène de l’ordre et du
désordre. Afin de mieux saisir les évolutions historiques qui le façonnent, il s’agira plus
spécifiquement d’examiner les manières d’investir cet espace comme lieu de projection
d’identités culturelles, politiques et religieuses selon des contextes ordinaires ou extraordinaires.
Dans ce cadre, nous interrogerons les modalités concrètes de transformation du « salon » :
d’espace domestique en espace public (religieux et politiques) et inversement. Ceci nous conduira
à examiner avec une attention particulière les rôles et la circulation différenciés des hommes et
des femmes au sein de ce lieu singulier.
Intervenants
Atelier 19
Responsable : Béatrice Garapon (IEP Bordeaux/Centre Emile Durkheim)
Intervenants : Margot Dazey, Sebastian Elsässer, Béatrice Garapon, Aymon Kreil, Giedre
Sabaseviciute
Résumé
L’objet de cet atelier est de s’interroger sur le rôle social de l’intellectuel islamique. Dans la
mesure où désigner un tel comme « intellectuel » ou disputer cette qualification à un tel d’autre
relève des luttes de concurrence du champ, quelles stratégies déploient-ils pour justifier leur
autorité et se différencier de leurs concurrents : le corps des oulémas et celui des intellectuels
musulmans désignés comme « laïcs » ou « modernistes » ?
Le souci de différentiation semble en effet orienter des stratégies de l’identification du soi
adoptées par des intellectuels islamiques. Elles peuvent s’exprimer par une appropriation des
attributs extérieurs visibles, comme la mise en scène d’une trajectoire spirituelle et d’un parcours
personnel ou la préférence pour une appellation du soi, comme en Egypte où la désignation de
« penseur islamique » (al-mufakkir al-islâmî) tend à s’imposer au détriment de « l’intellectuel »
(al-muthaqqaf), jugé excessivement connoté à gauche. Il peut s’agir en outre des stratégies
argumentatives déployées pour souligner la différence des intellectuels islamiques par rapport aux
oulémas d’une part, et aux intellectuels « séculiers » d’autre part. La prétention à la scientificité
contre le savoir jurisprudentiel des oulémas, ou la revendication d’authenticité contre
« l’occidentalisme » (istigrâb) des intellectuels laïcs participent aux mécanismes de distanciation
et d’établissement des frontières symboliques et/ou institutionnelles. En dernier lieu, il peut s’agir
de la mobilisation de ressources médiatiques spécifiques et du choix des modes d’énonciation et
de communication avec le public : le recours au format de talk-show, sites d’internet, revues,
conférences.
Pour faire parler cette problématique et complexifier des catégories encore trop rigides, un large
éventail d’interventions tant sur le plan chronologique que géographique est proposé - l’Egypte, la
Turquie et la France étant désignées comme terrains privilégiés d’investigation. Il s’agira tout
d’abord de s’interroger sur les conditions historiques ayant rendu possible l’émergence de la
figure de l’intellectuel islamique et la différentiation du savoir dont il se revendique, comme « la
littérature islamique » ou « l’éducation islamique ». Le type d’autorité sur lequel cette figure se
base ainsi que les répertoires religieux qu’elle utilise nous amènera à réfléchir sur ses fonctions :
guidance religieuse ? Vulgarisation ? Débat théologique ? Le cas des intellectuels islamiques en
Europe offre un éclairage supplémentaire sur sa fonction, en raison des logiques concurrentielles
qui traversent le champ intellectuel vis-à-vis des décideurs publics. Enfin, l’étude des
positionnements contradictoires et des alliances changeantes nouées tantôt avec des oulémas
qu’avec les intellectuels laïcs lors des controverses mettra en lumière leur positionnement difficile
dans un entre-deux.
Intervenants
Atelier 6
Responsables : Erminia Chiara Calabrese (Université de Terragona), Valentina
Napolitano (CHISM)
Intervenants : Amin Allal, Erminia Chiara Calabrese, Pénélope Larzillière, Stéphanie Latte
Abdallah, Valentina Napolitano
Résumé
L’essentiel de la production scientifique sur le militantisme dans le monde arabe a privilégié une
échelle d’analyse méso-politique se focalisant sur les organisations de militance (partis,
mouvements nationalistes, ONG, associations, syndicats, etc.), sur leurs idéologies et stratégies de
mobilisation, et portant seulement une faible attention sur leurs militants. Cela s’explique d’une
part, par un accès difficile aux terrains de recherche, où les enquêtes se déroulent souvent au sein
d’organisations semi-clandestines, agissant en situation de conflit où sous régime autoritaire ; et
renvoie d’autre part à un décalage persistant entre sciences sociales et area studies (Bennani-
Chraïbi, Fillieule 2003). Si plusieurs travaux sont récemment parus afin de combler ce vide
(Favier 2004, Bennani-Chraïbi 2008, Mazaeff 2012, Larzillière 2013, Latte-Abdallah 2009,
Rougier 2004, Calabrese 2014), l’étude des trajectoires militantes dans cette aire géographique
demeure un sujet peu exploré.
Cet atelier propose ainsi de porter des regards croisés sur les trajectoires des militants au sein de
plusieurs réalités politiques (Liban, Jordanie, Syrie, Tunisie), chacune avec ses propres
opportunités et contraintes. Prenant inspiration de l’approche interactionniste ayant marqué les
plus récents travaux français en sociologie des engagements et des mobilisations (Fillieule 2001 ;
Sawicki, Siméant 2009) cet atelier fait des militants le point de départ de l’analyse pour ensuite
remonter vers les organisations et les contextes macro-politiques au sein desquelles s’inscrivent
leurs trajectoires. Pour ce faire nous proposons ici de porter attention aux processus de
socialisation, aux conditions du passage à l’acte, aux différentes formes d’investissement militant
et leur évolutions dans le temps, ainsi qu’aux processus de reconversion et désengagement. Cet
atelier cherchera dans une perspective comparatiste à dégager les spécificités et les points
communs entre les différents terrains de recherche analysés.
Les exposés présentés au cours de cet atelier s’inscrivent dans les suivants axes de réflexion :
- S’engager sous contrainte : l’idée de contrainte, qu’elle soit représentée par le fait de s’engager
dans un régime politique répressif, une situation de conflit, d’exil, ou bien d’injustice sociale,
paraît au cœur des processus d’engagements dans cette aire géographique. Nous souhaitons donc
interroger dans quelle mesure différents types de contraintes pèsent sur les choix et pratiques
militantes.
- Modalités de l’engagement : il s’agira ici d’interroger la manière dont se fait l’engagement et
comment différents degrés d’investissement peuvent coexister au sein d’une même organisation
de militance. Il s'agira de voir dans quelle mesure l'engagement imprègne par ses sociabilités le
quotidien des militants et devient dans certains cas un véritable de mode de vie.
- La mise en sens : il s’agira de s’intéresser à la manière dont les militants attribuent une
signification à leurs engagements, interprètent les idéologies et contribuent à façonner la cause au
nom de laquelle ils s’engagent.
- Engagement et générations : nous interrogerons la manière dont la question générationnelle
peut être une clé de lecture pour comprendre l’évolution du militantisme.
Intervenants
Amin Allal, Docteur en Science Politique, CNRS, CERAPS, UMR 8026, WAFAW ERC
« Comment on devient insurgé/e en Tunisie et comment on tente de rester révolutionnaire...
ou pas »
À partir d’une étude, débutée en 2006, de trajectoires d’engagement protestataire de différents
profils d’agents sociaux dans la région de Gafsa et dans le grand Tunis, cette communication
ambitionne de restituer les ressorts à la fois individuels et configurationnels du basculement dans
la pratique protestataire. Quels sont les motifs de l’entrée en action ? Quelles en sont les routines?
Et in fine quels sont les principaux freins à l’institutionnalisation de l’action collective.
Bibliographie
ALLAL, Amin et PIERRET, Thomas (Dir.), 2013, Devenir révolutionnaires. Au cœur des
révoltes arabes, Paris, Armand Colin/Recherches.
CALABRESE, Erminia. Militer au Hezbollah dans la banlieue sud de Beyrouth (2005-2011),
thèse de doctorat, Tarragone, 2014.
FAVIER, Agnes. Logiques de l’engagement et modes de contestation au Liban: genèse et
éclatement d’une génération de militants intellectuels (1958-1975), thèse de doctorat, Aix en
Provence, 2004
MAZAEFF, Chantal « L’action des Forces libanaises à Aïn el-Remanné », in Franck Mermier et
Sabrina Mervin (dir.), Leaders et partisans au Liban, Éditions Karthala-IFPO-IISMM, 2012, p.
279.
BENNANI-CHRAÏBI, Mounia. « « Hommes d'affaires » versus « profs de fac ». La notabilisation
parlementaire d'un parti de militants au Maroc », Revue internationale de politique comparée, 2/
2008 (Vol. 15), p. 205-219.
BENNANI-CHRAÏBI, Mounia ; FILLIEULE, Olivier, « Appelle d’air(e) », Résistances et
protestations dans les sociétés musulmanes, Paris, Presses de Sciences Po « Académique», 2003,
pp. 17-42.
FILLIEULE, Olivier. « Propositions pour une analyse processuelle de l'engagement individuel »
Post scriptum, Revue française de science politique, 2001/1 (Vol. 51), p. 199-215.
LARZILLIERE, Pénélope, La Jordanie contestataire. Militants islamistes, nationalistes et
communistes, Actes Sud, 2013.
LATTE ABDALLAH, Stéphanie. 2009. « Vers un féminisme politique hors frontières au Proche-
Orient. Regard sur les mobilisations en Jordanie (années 1950-années 2000) », Vingtième siècle,
n° 103(3): p. 177-195.
ROUGIER, Bernard, Le Jihad au quotidien, PUF, Paris, 2004
SAWICKI, Frédéric, SIMEANT, Johanna. « Décloisonner la sociologie de l’engagement militant.
Note critique sur quelques tendances récentes des travaux français », Sociologie du travail, Paris,
2009.
Atelier 36
Responsable : Laure Guirguis (IMéRA, IREMAM, Université d'Aix-Marseille)
Intervenants : Chiara Diana, Laure Guirguis, Gaétan du Roy, Clément Steuer
Résumé
Pourquoi aujourd’hui proposer d’amorcer la discussion à partir d’une notion contestée ? Une
notion dont l’opérationnalité à titre d’outil conceptuel semble nulle : non seulement elle
désigne un sujet collectif aux contours imprécis, mais ses usages et mésusages sont tels qu’elle
ne peut plus signifier qu’à être surdéterminée par un adjectif ou par un complément de nom, ou,
sous sa forme adjectivale, accolée à un substantif. Pourquoi ? Et de quoi au juste voulons-nous
parler ?
Ce vocable, pourtant, le peuple, al-sha’b, les acteurs des révolutions arabes l’ont imposée : ils
n’ont pas procédé simplement à une énonciation, ni même à un énoncé performatif, les
révolutions arabes ont, pendant un bref moment d’enthousiasme, consisté en l’apparition de ce
peuple, l’apparition physique de ce peuple, de ce que, à la suite de Weber, je nommerai une
communauté émotionnelle, l’apparition de ces peuples, dans leur unité et dans leur
hétérogénéité, dans leur pluralité.
Parler du peuple, c’est prendre au sérieux le moment 2011, même si, depuis 2011, l’enthousiasme
et l’espoir ont cédé la place à la lassitude, au désespoir, et à la haine, à la fureur et à la destruction,
à la répression et à la suspicion.
Pour qui connaît la société égyptienne, sur laquelle nous concentrons l’attention dans cet
atelier, un processus révolutionnaire a bien été amorcé en 2011, un processus suspendu, ou
mis en veille (Hassabo). Il y a eu processus révolutionnaire dans la mesure où ce qui était en
jeu n’était pas simplement la chutte du régime mais l’exigence de justice, une revendication
d’ordre éthique qui s’élève à partir de l’expérience partagée de l’injustice et de la douleur
(physique, l’expérience de la torture). Et si processus révolutionnaire il y a eu c’est dans la
mesure où ce soulèvement a signalé et accéléré de profondes mutations sociales et
symboliques. Ou, en d’autres termes, l’expérience de 2011 marque l’avènement de nouvelles
subjectivités politiques, d’un nouveau rapport au politique et au pouvoir. 2011, sans doute a
laissé des traces, toutes, peut-être, n’ont pas été effacées. Qu’en adviendra-t-il ?
Partant de là, comment, nous, à titre d’analystes, pouvons-nous tenter de saisir ce « peuple »
? Nous allons nous intéresser à plusieurs figures et modalités d’expression de ce peuple, donc
à des modes de représentation politique autre que la représentation-mandat résultant des
procédures démocratiques. Nous voudrions mettre en exergue, à la fois le caractère
hétérogène, la pluralité, la rivalité, et la conflictualité qui composent le « peuple », mais
également pointer ce moment d’exceptionnalité qu’est l’événement révolutionnaire : il acquiert
le statut de norme à la laquelle tous les acteurs se réfèrent, même et surtout les acteurs
contre-révolutionnaires. Le peuple nommerait alors ce moment d’exception de figuration et
d’affirmation d’un collectif, sous des formes diverses, plurielles, mais en référence à idéal de
justice commune et en partant d’une expérience émotionnelle partagée.
N’y aurait-il de peuple que dans le cadre d’une lutte émancipatrice, d’un processus
révolutionnaire, en dehors desquels le peuple (re) deviendrait une entité neutre, désincarnée ?
N’y aurait-il de peuple que manquant (Balibar) ?
Ce peuple introuvable, Rosanvallon, écrit Didi Hubermann, ne s’est peut-être pas donné les
moyens de le trouver. Rosanvallon ouvre sa réflexion à partir de trois peuples imaginaires : le
peuple-émotion, le peuple-nation, le peuple- opinion. Plus ou moins directement, cet atelier
proposera des éléments de critique au moins des deux premières notions. Partons de la
première, le peuple-émotion, une émotion qui, pour Rosanvallon, apparaît anhistorique.
Contre les Tarde et Lebon et contre une interprétation simpliste du texte freudien, plusieurs
historiens et philosophes se sont atachés à repenser le rôle de l’émotion, et son historicité,
dans les processus de transformations sociales et politiques et dans la formation de
communauté (Lefèbvre, Farge, Foucault, Rancière, Wahnich…).
Nous retiendrons en particulier les connexions entre émotion et éthique, émotion et religion/foi.
C’est dans cette perspective que j’aborde la question du martyr. Plus qu’un « choc moral » qui
joue le rôle de facteur déclenchant dans les mobilisations (Traini), le corps du martyr, ou
son image donne corps à une émotion transindividuelle à partir de laquelle s’élève une
revendication éthique. Nous avons en mémoire les figures de Mohamed Bou’azizi (Tunisie), du
très jeune Hamza (Syrie) et de Khaled Said (Egypte) qui ont catalysé et cristallisé la colère, lui
ont donné corps et visibilité. Non seulement le sentiment d’injustice est l’une des « causes »
dans un processus multicausal, mais la justice comme exigence éthique qui rassemble est
constitutive de la formation d’un « peuple ». Le processus révolutionnaire implique,
véritablement, formation d’un peuple contre l’Etat. En ce sens, peuple, ce terme neutre, qui
suivant les usages et les situations peut revêtir des connotations péjoratives, peut aussi signifier
une lutte émancipatrice.
L’un des modes privilégié de figuration du peuple : le charisme et le martyr, pour autant que l’on
définisse le charisme comme un processus d’incarnation d’une émotion transindividuelle dans
une image. Incarnation : cette figure devient visible d’abord dans un corps : du corps du leader
au corps du martyr, un même processus est à l’œuvre. Les martyrs de la révolution incarnent le
peuple soulevé contre l’État-police, et leurs figures s’inscrivent dans diverses stratégies
d’occupation de l’espace (re-Mohamed Mahmoud) contre les forces développées policières et
militaires qui tentent de reprendre le contrôle de l’espace urbain et de la production du sens, et de
la mémoire.
Les figures des martyrs de la révolution égyptienne ont inspiré une littérature abondante déjà.
L’apparition d’enfants martyrs reste peu étudiée. Or l’exposition d’enfants et adolescents,
martyrs ou candidats au martyre, au cœur des violences urbaines de la scène révolutionnaire
égyptienne, marque une inflexion notable du registre symbolique et contestataire. La
dynamique révolutionnaire s’est également déployée dans diverses actions d’occupation de
l’espace et d’exposition de figures du « peuple », une pluralité souvent conflictuelle. Les
interventions religieuses/communautaires dans l’espace public se sont multipliées. En revanche,
ce « peuple » a échoué à investir l’appareil institutionnel. Formée dans l’objectif de garantir la
présence des revendications révolutionnaires dans la campagne législative, la coalition électorale
al-ṯawra mustamira (« La révolution continue »), par exemple, n’a recueilli que 2,8% des voix.
Pourtant, sa composition mettait en scène l'unité de la jeunesse égyptienne et du mouvement
révolutionnaire par-delà les divergences idéologiques.
Doit-on en conclure que le processus révolutionnaire suspendu le 3 juillet 2013 n’a pour ainsi
dire pas eu lieu ? Ou repère-t-on la lente maturation de nouveaux modes de subjectivation et
l’émergence de sujets politiques, corrélatives d’un changement des régimes de visibilité, ainsi que
des rapports au temps et à l’histoire ?
Chiara Diana a concentré l’attention sur une figure peu étudiée du martyr : celle des enfants-
martyrs.
Elle propose de la sorte d’élargir le champ d’application des notions de peuple et de martyr
aux enfants et à l’enfance. En adoptant une approche sociologique structurelle de l’enfance,
elle entend relier, à l’échelle macro, les manifestations empiriques de l’enfance et des enfants à
leur contexte et aux mécanismes qui déterminent ces manifestations. Les interactions sociales
avec les adultes jouent un rôle fondamental dans la formation du développement cognitif
des enfants. Et, dès le plus jeune âge, les enfants se font une idée de la notion de
citoyenneté et adoptent des attitudes politiques, comme l’a démontré Annick Percheron (1974 ;
1978).
La figure du martyr incarne un collectif qui se constitue dans le combat contre un élément
hostile, par la violence et l’autosacrifice. Les révolutions arabes ont suscité la formation d’un
nouveau modèle de martyr : la production de images de martyrs passe de l’État au citoyen,
les portraits des martyrs sont personnalisés grâce aux informations disponibles sur leur vie
Représenter le peuple dans la rue ou dans les urnes ? Le dilemme de la participation des
révolutionnaires aux éléction législatives de 2011
travail politique et le travail révolutionnaire que beaucoup de ses candidats et de ses supports
menaient parallèlement. En effet, dix jours avant le début des élections, des affrontements
meurtriers éclataient au Caire entre la police et les manifestants, et duraient plus d'une semaine.
Les candidats révolutionnaires ont alors officiellement suspendu leur campagne. Entre les deux
tours de la deuxième étape, les affrontements reprennent, cette fois-ci entre les manifestants et
l'armée. Cette situation a détourné une partie des efforts de la coalition de la bataille électorale,
et a conduit nombre de ses partisans à refuser de voter, considérant que des élections
organisées par le CSFA étaient illégitimes. Enfin, si le pouvoir militaire était le principal
adversaire des révolutionnaires dans les rues, les partisans de ce dernier représentaient alors
dans les urnes une menace bien moindre que les islamistes. Beaucoup d'électeurs ont ainsi pensé
qu'il était plus urgent de défendre la sécularisation de l'État par leur vote, plutôt que les objectifs
de la révolution, dont les adversaires déclarés (les anciens du PND) étaient en passe d'être
balayés par les islamistes. Le Bloc égyptien a donc bénéficié d'un phénomène de vote utile au
détriment des révolutionnaires.
Les courants révolutionnaires n’ont pas réussi à intégrer les institutions gouvernementales, ni
inventé un discours nouveau qui se substitue à l’ancien. La révolution a brisé les barrières de la
peur, mais n’a pas brisé le cercle vicieux de l’identitaire qui permet de reproduire ces régimes
de la peur. Par identitaire, je désigne un principe et une logique discursive, symbolique et
pratique consistant à se définir par circonscription d’un autre considéré comme ennemi :
ennemi intérieur ou extérieur, défini suivant des critères religieux, communautaires, nationaux,
genrés etc.
Précisément, la contre-révolution s’est empressée de réinstaurer le cercle vicieux de
l’identitaire dans lequel la révolution avait brièvement créé une brèche. Et les révolutionnaires
eux-mêmes se sont embourbés dans l’identitaire, dont l’appartenance religieuse est un cas de
figure, bien que le religieux et la foi ne se réduisent pas à la question de l’identité.
Dans ces interventions, nous avons pu observer cette ambivalence des discours et des pratiques,
entre le désir de créer un universel, des valeurs de justice, et l’incapacité à sortir de la logique
identitaire sous ses formes diverses.
Clément Steuer
2015-2017, chercheur au CEDEJ (Le Caire), direction du pôle "politiques publiques et
gouvernance". Chercheur à l'Institut oriental de l'Académie des sciences de République tchèque
(depuis 2013).
Thèmes de recherche :
Partis politiques et systèmes partisans, mouvements sociaux, politique comparée.
Publications
(dir. ) 2013. « Les élections de la révolution » Égypte/Monde arabe
2012. Le Wasat sous Moubarak, Fondation Varenne.
Laure Guirguis
Chercheuse associée à l’IREMAM (Institut de recherches et d’études sur le monde arabe et
musulman), Aix en Provence (2014-2016), et au CESPRA, Paris (Septembre 2015-2018).
2016. Chercheuse à l’Orient-Institut, Beyrouth.
2015. Chercheuse en résidence, IMéRA-AMU.
2012-2014. Chercheuse post-doctorante, bénéficiaire d’une bourse BANTING CRSH,
Département de science politique, Université de Montréal.
Publications :
2014. Égypte et contre-révolution, Montréal-Paris, Presses de l’Université de Laval-Hermann.
2012. Les Coptes d’Égypte. Violences communautaires et transformations politiques (2005-
2012), Paris, Karthala.
Atelier 23
Responsable : Dimitri Deschamps (Doctorant à l’EHESS-CETOBaC, Ifpo-Erbil)
Intervenants : Yohanan Benhaim, Dimitri Deschamps, Boris James, Cyril Roussel
Résumé :
Depuis la fin de la guerre du Golfe en 1991, favorisée par le retrait subséquent des fonctionnaires
de l’administration de S. Hussein puis par sa reconnaissance officielle au sein de la nouvelle
Constitution de 2005, la région kurde d’Irak s’est progressivement dotée de nombreux attributs
étatiques. Dorénavant souvent qualifié de « quasi-État », le récent Gouvernement régional kurde
(le « GRK », ou aussi « KRG » de son acronyme anglais) fait régulièrement mention d’une
possible indépendance prochaine.
Alors que Max Weber définit l’Etat comme une « communauté humaine qui, dans les limites d'un
territoire déterminé […] revendique avec succès pour son propre compte le monopole de la
violence physique légitime » (Le Savant et le Politique), nous examinerons dans quelle mesure
cette définition s’applique à la région autonome kurde d’Irak. Une analyse de la société kurde
irakienne et de sa structure permettra aux intervenants, de cultures académiques diverses (histoire,
géographie et science politique), d’ouvrir une discussion quant à la nature actuelle de la Région :
le Kurdistan d’Irak serait-il de facto un État, à qui seul le nom ferait défaut ?
Au cours de cet atelier, des axes de réflexion aussi variés que complémentaires, tels que le
contrôle des territoires et des populations, l’organisation et la gestion des flux de richesse, la
régulation des migrations et du transit des marchandises, l’entretien de relations avec les États
étrangers et la création d’un discours national permettront de s’interroger sur l’entité politique que
constitue le GRK ainsi que sur son inscription dans le cadre d’une souveraineté de plus en plus
marquée, où le rôle du gouvernement central irakien ne semble plus s’apparenter qu’à une simple
curatelle.
Intervenants
« Les manuels scolaires du Kurdistan d’Irak : écrire une histoire nationale kurde ou
kurdistanienne ? »
Depuis 1998, l’intervention de l’Etat central irakien dans les programmes d’Histoire au Kurdistan
d’Irak a été oblitérée. La zone autonome kurde qui devint après l’invasion américaine et le
renversement du Baath en 2003 le Gouvernement Régional du Kurdistan d’Irak (GRK), a mis en
place un enseignement de l’Histoire entièrement dispensé en kurde soranî jusqu’à la fin du
secondaire. L’étude des manuels scolaires utilisés au GRK sera l’occasion de mettre en exergue
les stratégies de production d’un nouveau discours national kurde et d’en révéler les ressors. Il
s’agira d’identifier les différentes traditions historiographiques sur l’histoire des Kurdes
émergeant de ces programmes (tradition arabo-islamique, orientalisme etc.). Nous tenterons
également de percevoir le cadre de représentation dans lequel ces manuels et leurs auteurs tentent
d’inscrire, les Kurdes de manière générale (1), le territoire du GRK (2) et les minorités
kurdistaniennes (i.e. habitant sur le territoire du GRK) kurdes et non-kurdes (3).
Atelier 7
Responsables : Jean-Philippe Bras (Université de Rouen), Aude Signoles (CHERPA,
IEP Aix-en-Provence),
Intervenants : Layla Baamara, Sarah Ben Nefissa, Jean-Philippe Bras, Sophie de Ruffray,
Déborah Perez, Aude Signoles
Résumé
La « décentralisation » fait partie des modalités de changement promues par les bailleurs de fonds
internationaux dans les pays du monde arabe pour, à la fois, dégrossir les administrations
centrales tentaculaires des Etats de la région et ouvrir le jeu politique local dans le sens d’une
démocratisation des régimes. Depuis le milieu des années 1990 et, plus encore, durant la décennie
2000, elle constitue l’un des pans majeurs des programmes de réforme des administrations
publiques locales dans la région. En tant que figure rhétorique, mais aussi instrument et modèle
d’action publique porté de l’extérieur, elle a été très largement retravaillée à l’aune des contextes
institutionnels et politiques et des conjonctures socio-économiques dans lesquelles elle a circulé,
et selon les acteurs publics (centraux, régionaux et locaux) qui s’en sont emparés. Partout, elle a
suscité des débats et controverses – que ce soit sur l’opportunité de la réforme, sur ses modalités
de mise en œuvre, sur les échelles de pouvoir à privilégier, sur les voies d’accès au pouvoir et
ressources de légitimité locale, sur la production des biens collectifs et services publics, ou encore
sur l’implication et la participation citoyennes. Les mobilisations autour des projets de
développement local ont ainsi été fort nombreuses - qu’il s’agisse de défendre une certaine vision
de la décentralisation (contre une autre) ou de protester contre les disparités d’investissement et
d’attention portées par le pouvoir central (et les bailleurs de fonds internationaux) sur les
périphéries du territoire national ou les populations en marge. Par conséquent, au bout d’une
décennie de réformes, le bilan de la « décentralisation » a plutôt fait ressortir les chemins
différenciés pris par celles-ci localement.
L’enjeu est désormais de savoir comment, dans le contexte mouvant des « printemps arabes » et
d’appels à une transformation de l’organisation des pouvoirs, les dirigeants politiques et cadres
des administrations centrales et locales (re)considèrent la problématique de la « décentralisation ».
Dans quelles mesures celle-ci est-elle à l’ordre du jour des débats politiques et profite-t-elle de la
libération de la parole publique ?
On s’attachera, dans un premier temps, à saisir les relations entre les mobilisations politiques et
le « territoire », à travers leur déploiement territorial (où et dans quel séquençage ?), les
identifications territoriales mobilisées (nationales, transnationales, régionales, locales,
segmentaires…), et les revendications territoriales avancées (statutaires, sur l’autonomie locale,
ou d’allocations, sur la répartition des budgets publics, le déploiement des services publics et les
stratégies de développement local). Il s’agira également d’apprécier la manière dont le jeu
politique local a été modifié par ces mobilisations Quelles ont été les cibles -le pouvoir d’Etat, au
niveau central et au niveau local ; le pouvoir local, édiles et administrations locales- et les
formes de la contestation ? A-t-on vu émerger localement de nouvelles figures et notabilités ou
mouvements collectifs à la faveur de ces « moments » révolutionnaires ou réformistes, qui ont pu
être marqués par des périodes de vacance du pouvoir, et d’auto-organisation des populations ?
Dans un second temps, seront considérés les effets de ces mobilisations et les réponses des États
à la crise politique dans sa dimension territoriale. Les réponses ont pu être d’urgence dans les
scénarios de rupture, par la mise en place d’instances locales transitoires et de mesures de
restauration négociée de la présence locale de l’Etat. Puis elles ont consisté en des opérations de
relégitimation du pouvoir politique, par des réaménagements d’ampleur variable des textes
constitutionnels et l’organisation d’élections, pour le moment nationales. Il s’agit d’apprécier ici
dans quelle mesure ces opérations ont marqué (ou non) la montée de la question territoriale dans
l’agenda politique. Quelle a été l’ampleur des modifications constitutionnelles relatives aux
chapitres concernant la forme de l’Etat, la décentralisation et les collectivités territoriales ? Et quel
agenda législatif dans la dynamique des réformes constitutionnelles ? Que nous disent les
processus électoraux organisés depuis 2011 sur l’évolution des relations entre les populations et
les territoires ? Il s’agira encore d’identifier les acteurs qui portent la revendication territoriale.
Quels sont les partis et associations qui s’emparent de la cause de la « décentralisation » ? En
quels termes et dans quelles arènes celle-ci est-elle promue ? Comment les acteurs de la
coopération internationale se positionnent-ils dans cette nouvelle donne ? Quelles modifications
sont-elles d’ors et déjà repérables dans les pratiques de pouvoir, notamment par l’implication des
populations dans la décision locale, ou sur le plan opérationnel, par le redéploiement territorial
des instruments et des moyens de l’action publique ? Comment se met en place le processus de la
réforme, son accompagnement administratif, et sa grammaire, dans l’élaboration de nouveaux
maillages territoriaux ? Répondre à ces questions, c’est apprécier la manière dont les rapports
centre/périphéries jusque-là en vigueur sont « travaillés » par les processus politiques des
printemps arabes.
L’atelier vise à contribuer à un premier état des travaux sur la question, sans ambition exhaustive,
en présentant des recherches en cours ou achevées. Il sera l’occasion, en s’appuyant sur le
croisement des disciplines ici mobilisées (principalement droit, géographie, science politique,
sociologie) d’esquisser des hypothèses qui auront vocation à alimenter une réflexion collective en
vue de la constitution d’un dossier pour un prochain numéro de la revue L’Année du Maghreb.
L’ensemble des intervenants de ce panel devront mettre l’accent sur le caractère empirique de leur
travail de recherche, pour une durée d’intervention d’une vingtaine de minutes.
Intervenants
2015 viennent d'être reportées... Quels sont donc les relais entre les populations locales et les
autorités administratives ces dernières années en Egypte? Quels sont les profils des acteurs qui
assurent la médiation ? Qui relaient, et comment, les mobilisations pour l’accès aux services et
équipements publics ?
C’est l’occasion de mettre en regard deux découpages régionaux : les 6 régions de planifications
héritées du schéma national d'aménagement du territoire de 1985, qui séparent clairement le
littoral de l'intérieur et les 5 régions proposées par le Livre blanc qui au contraire cherchent à les
relier. Cette mise en regard passe par une analyse de cohésion territoriale, en examinant les
recompositions induites par chaque maillage en termes de redistribution horizontale et verticale
des inégalités de développement régional. Nous appliquons ici la méthode d'analyse territoriale
multiscalaire des inégalités, en prenant comme variable l'indicateur composite de développement
territorial mis au point par les économistes pour préparer la réforme des aides régionales. Cela se
fait également par une analyse des dynamiques d'intégration territoriale en examinant les soldes
migratoires intranationaux mais aussi internationaux des délégations au cours de la décennie
précédente (1994-2004) afin d'examiner si les nouveaux découpages régionaux sont susceptibles
ou non de contrecarrer les processus d'exode rural et surtout d'exode de la main d'œuvre la plus
qualifiée de l'intérieur vers le littoral ou Tunis. Il s'agit en particulier de s'interroger sur les
différentiels d'attraction des populations les plus alphabétisées qui semble constituer un facteur
majeur de reproduction des inégalités régionales à long terme.
Les cadres politiques ou administratifs ne peuvent pas s'affranchir complètement des espaces
vécus des habitants et tout particulièrement lorsque ce qui est en jeu est le découpage de région
définies comme « le premier niveau d'organisation en dessous de celui de l'Etat ». Il convient
alors de rappeler ce que le géographe Amor Belhedi a publié, quelques années avant la révolution
tunisienne : un texte prémonitoire intitulé Territoires, appartenance et identification. Quelques
réflexions à partir du cas tunisien dans lequel il écrit : « Le développement régional implique la
présence d’un ancrage territorial dans la région qui constitue un espace de vie et un espace
d’action pour les acteurs régionaux au point de devenir un espace identitaire et un espace de
projection future à la fois ». Les gouvernements issus de la révolution du Jasmin sont conscients
du fait que la conception d’un nouveau projet territorial ne saurait se réaliser sans une démarche
consensuelle dépassant les solidarités tribales ou régionalistes. D’autant plus que depuis le début
de la révolution, face au relâchement de l’autorité de l’Etat, de nombreuses villes et localités
rurales ont été épisodiquement secouées par des troubles liés à de conflits tribaux et claniques. Ce
scénario s’est réalisé dans le bassin minier, à Sidi Bouzid à Sbeitla et récemment à Gafsa. Ces
remous latents, souvent étouffés sous les régimes de Bourguiba et de Ben Ali, ont retrouvé de leur
vigueur après la révolution. Ainsi, la population de Makhtar, fière de son histoire millénaire
(Makhtaris), n’a jamais accepté le rattachement à Siliana qui abrite le siège du gouvernorat (un
petit centre créé en 1910) et voulait que leur ville soit le chef-lieu du gouvernorat. De même,
Mezzouna à la périphérie de la plaine de Sfax voulait se détacher du gouvernorat de Sidi Bouzid
pour réintégrer celui de Sfax.
Dans le cadre d'un programme de coopération scientifique intégré entre la France et la Tunisie,
nous avons lancé une enquête auprès d’étudiants de géographie pour étudier la façon dont ils
conçoivent le découpage de leur pays en régions. Notre proposition ne vise pas à apporter de
résultats définitifs mais plutôt à discuter les hypothèses et méthodes qui seront mises en œuvre.
Schématiquement, nous considérons que deux pistes de recherche complémentaires doivent être
envisagées pour interpréter les résultats d'une enquête où il est demandé aux étudiants de procéder
au découpage de leur pays en régions clairement identifiées par une frontière et un nom. La
première exploration des enquêtes consiste à établir un lien entre les différentes unités
administratives proposées pour composer des régions. On observe ensuite les graphes qui se
composent selon le degré d’association des mêmes lieux par un nombre plus ou moins important
d’étudiants. On superpose ainsi les graphes d'unités spatiales élémentaires que des étudiants ont
reliées en les regroupant dans une même région puis on fait varier la forme du graphe de relations
pour faire apparaître les noyaux les plus forts mais aussi les espaces intermédiaires qui
appartiennent simultanément à deux noyaux et forment des ponts (liens faibles). On repère
également la situation intermédiaire de gouvernorats qui servent d'articulateurs territoriaux. La
deuxième exploration s’attache à une analyse des frontières et des discontinuités produites. On
superpose les découpages produits par les étudiants afin de repérer les limites qui ont été déclarées
le plus fréquemment comme ligne de séparation de deux régions. On peut alors apprécier leur
coïncidence avec les limites de régions antérieures mais aussi mettre en valeur des zones de
fracture caractérisées par la récurrence de petites limites différentes proposées par des minorités
d'étudiants. Ces premières investigations soulèvent des questions sur la manière dont les
populations enquêtées ont été amenées à tracer les limites des entités régionales. On pourrait
proposer une démarche alternative à celle qui privilégie les liens et les frontières : par exemple le
fait de commencer par définir les centres, les capitales régionales puis de délimiter la région qui
lui correspond. Au-delà, il s’agit de mettre en regard ces représentations des régions tunisiennes
avec les cartographies des critères de régionalisation « objectifs » car c’est la mise en évidence de
leurs différences qui conduit aux arbitrages du pouvoir.
Atelier 10
Responsable : Hardy Mède Mohammed (CESSP, CERAPS)
Intervenants : Nathalie Bernard-Maugiron, Bernard Hourcade, Hardy Mède Mohammed, Déborah
Perez, Matthieu Rey
Résumé
Cet atelier thématique se propose d’organiser un échange critique et interdisciplinaire autour des
approches qui ont jalonnés, ces dernières décennies, l’analyse des processus et des institutions
politiques dans le « monde musulman », en interrogeant les modèles explicatifs essentiellement
centrés sur les ressorts culturels ou religieux de l’action politique. Notre démarche vise à banaliser
et désenclaver le champ d’étude moyen-oriental, en recourant à des outils conceptuels et des
approches théoriques à vocation universelle (E.Picard). Un tel projet impose une prise de distance
avec certaines approches homogénéisantes et normatives qui postulent la spécificité politique de
cette aire pour expliquer les tendances à l’autoritarisme, sans s’interroger sur l’historicité des
différents régimes politiques de la région. Cette vision uniformisante fait perdre de vue la variété
des dynamiques institutionnelles qui traversent ces différents Etats. D’autant plus que les
institutions constitutives des régimes politiques (parlement, gouvernement, présidence, assemblée
constituante…) sont rarement utilisées comme clé de lecture des rapports de pouvoir qui
s’exercent dans ces Etats. Cet atelier cherche justement à combler ce vide en déplaçant l’angle
d’analyse vers les institutions politiques pour questionner, à partir de matériaux empiriques
originaux, leur rôle et leur place dans le jeu politique.
Intervenants
quatre décennies montre que le majles, tout en restant dans la norme idéologique, s’il ne reflète
pas exactement la société iranienne, et ne réussit pas à imposer ses vues, met en évidence les
rapports de force et débats de fond, ce qui explique en grande partie de la stabilité de la
République islamique et sa capacité d’adaptation.
Atelier 26
Responsable : Dilek Yankaya (IREMAM)
Intervenants : Mohamed-Ali Adraoui, Florence Bergeaud-Blackler, Raphaëlle Chevrillon–
Guibert, Musa Sroor
Coordinateurs de l’atelier : Hicham Benaissa, Frédéric Coste, Dilek Yankaya
Organisation de l’atelier :
Chaque intervenant aura 20 minutes pour présenter son travail. Les interventions seront discutées
individuellement par les coordinateurs de l’atelier avant d’être soumises au débat.
Résumé
Les études sur les rapports entre islam et économie relèvent principalement de la sociologie
wébérienne dans laquelle l’observation de l’islam sert d’instrument de comparaison pour
confirmer la spécificité de la modernisation occidentale (Weber, 2003). Ainsi, la littérature
classique a surtout mis en avant les contraintes de la religion et de la culture islamiques sur les
doxas de la rationalité et de l’objectivité qui définissent le champ économique moderne. Or, la
thèse de l’incompatibilité de l’islam avec le développement du capitalisme a été critiquée grâce
aux études qui traitent de l’influence économique de la religion dans son historicité et sa
contextualité (Rodinson, 1966 ; Turner, 1974). La réaffirmation identitaire islamique prendrait
alors de nouvelles formes en lien avec l'ascension sociale de nouveaux groupes pieux, leur
mobilisation collective et leur rapport spécifique à la politique.
Cette session thématique vise à s’interroger sur la catégorie de « nouvel esprit du capitalisme
islamique » et sur les dynamiques en cours de sa fabrication comme cadre d’action,
d’interprétation et de justification. Dans une approche transversale, et à partir de divers cas
d’étude, nous vous invitons à cette réflexion collective sur les nouvelles modalités d’articulation
du rapport au religieux avec l’activité économique générant ainsi de nouvelles pratiques de l’islam
qui investissent en retour l’activité économique et la rationalité instrumentale de nouvelles
symboliques.
Intervenants
d’autre part.
Références citées :
RODINSON, Maxime. Islam et capitalisme. Paris : Seuil, 1966.
TURNER, Bryan S. Weber and Islam. London and Boston : Routlegde & Kegan Paul, 1974.
WEBER, Max, L’Ethique protestante et l’esprit du capitalisme, Paris, Gallimard, 2003.
Atelier 40
Responsable : Nadjet Zouggar (FMSH-Labex RESMED)
Intervenants : Anne-Sylvie Boisliveau, Stephen Burge, Ahmed Oulddali, Nadjet Zouggar
Résumé
Toutes les sciences religieuses islamiques reposent sur le Coran ou s’y rapportent par le
commentaire coranique. Selon la spécialité des commentateurs, les différentes exégèses sont
marquées par des explications d’ordre linguistique, notamment philologiques et grammaticales,
mais aussi d’ordre théologique, mystique et parfois même philosophique.
Ainsi donc, ces différentes sciences sont mises à contribution pour la compréhension du texte
coranique, alors même que le Coran y tient le rôle de source majeure. En nous focalisant sur cette
circularité qui est propre à toute connaissance fondée sur la tradition, nous souhaitons explorer le
rapport d’échange et de réciprocité qui caractérise la relation de l’exégèse coranique aux autres
disciplines religieuses. L’intérêt d’une telle démarche étant de contribuer à la mise en lumière des
fondements épistémologiques de l’élaboration du savoir en islam.
Réunissant des islamologues de différents horizons, cet atelier fera intervenir deux spécialistes des
études coraniques et trois spécialistes de théologie et de philosophie islamiques, ceci afin de
décloisonner et de croiser leurs approches dans l’objectif d’élargir la perspective et de renouveler
les connaissances dans le domaine du savoir coranique.
Intervenants
Researchers have often suggested that tafsîr exerted an influence over lexicography; however, this
cannot be maintained since there are too many lexicographers who show little interest in the
Qurʾân as a source of linguistic meaning. In general, exegetes and lexicographers have greatly
different hermeneutic approaches to the definition of words. For exegetes, meaning is contextual
to the verse in question, but, to the contrary, a lexicographer seeks to explore and record all the
diverse meanings that a word can have. The differences in approaches to lexicology between
lexicographers and exegetes exist because of their differing theological understandings of
language and the divergent approach to the establishment of the meaning of words.
exégètes sunnites tels Ibn Kathîr (1301-1373) et al-Suyûtî (1445-1505) et s’est imposée à partir du
XXème siècle comme l’une des principales écoles d’exégèse de l’islam sunnite.
Dans notre présentation nous mettrons au jour, d’une part, les aspects saillants de la critique d’Ibn
Taymiyya contre l’herméneutique rationaliste du Coran et d’autre part, l’argumentation élaborée
par cet auteur en justification de son littéralisme.
Atelier 41
Responsable : Paul Neuenkirchen (EPHE)
Intervenants : Mehdi Azaiez, Steven Duarte, Farès Gillon, Géraldine Jenvrin, Paul Neuenkirchen
Animateur de l’atelier : Pierre Lory
Résumé
Un des versets du Coran qui a sans nul doute fait couler le plus d’encre est le septième de la
troisième sourate :
C’est Lui qui a fait descendre sur toi l’Écriture. En celle-ci sont des aya confirmées qui sont
l’essence de l’Écriture, tandis que d’autres sont équivoques. Ceux au cœur de qui est une obliquité
suivent ce qui est équivoque, dans l’Écriture, par recherche du trouble et recherche de
l’interprétation [de ces aya]. [Mais] l’interprétation de ces aya n’est connue que d’Allah, et ceux
enracinés en la Science déclarent : « Nous croyons à cela. Tout émane de notre Seigneur. Ne
s’amendent que ceux doués d’esprit » (traduction Régis Blachère).
Les exégètes musulmans comme les orientalistes se sont longuement penchés sur les différentes
parties qui la composent. C’est le cas de l’expression umm al-kitāb qui a notamment donné lieu à
de riches commentaires métaphysiques, du crux interpretum autour de la paire d’adjectifs
muḥkamāt et mutašābihāt qualifiant les « versets/signes » (āyāt) et constituant à la fois l’un des
fondements de l’herméneutique coranique et l’une des bases principales de déduction des versets
législatifs, ou encore de l’ambigüité syntaxique de la phrase wa-mā yaʿlamu taʾwīlahu illā Llāh
wa-l-rāsiẖūn fī l-ʿilm yaqūlūna… qui pose in fine la question de qui peut avoir accès à la
compréhension du Coran.
L’atelier thématique que nous souhaitons constituer autour de ce long et important verset du
Coran aura pour ambition de faire un tour d’horizon des différentes compréhensions qu’en ont pu
avoir non seulement les exégètes musulmans sunnites comme shiites à travers les époques, que
leurs commentaires soient mystiques, juridiques, etc., mais aussi les chercheurs occidentaux
depuis le 19ème siècle jusqu’à nos jours. Nous aurons ainsi l’occasion de constater combien le
Coran est un livre vivant, ouvert à toutes les interprétations et que celles-ci sont encore loin d’être
closes.
Intervenants
Steven Duarte, docteur en islamologie (EPHE) - agrégé d'arabe (Université Paris 13 Nord)
« De quelques auteurs contemporains et leur réappropriation de Coran 3, 7 »
À travers une sélection de trois auteurs contemporains, un réformiste coraniste syrien
(Muḥammad Šaḥrūr), un réformiste conservateur suisse (Tariq Ramadan) et une féministe post-
moderniste tunisienne (Olfa Youssef), je tenterai de présenter la reconfiguration que chacun opère
du verset coranique en question en regard de leur vision du monde et des Textes fondateurs.
Atelier 18
Responsables : Rachida Chih (CETOBAC) et Stefan Reichmuth (Ruhr-Universität
Bochum)
Intervenants : Nelly Amri, Gianfranco Bria, Francesco Chiabotti, Rachida Chih, Denis Gril, Pierre
Lory, Stefan Reichmuth, Jean-Jacques Thibon
Résumé
Cet atelier présentera une recherche collective visant à étudier dans le temps et l’espace les
diverses expressions et manifestations du statut du Prophète de l’islam et de la vénération dont il
est l’objet, les débats auxquels celle-ci a donné lieu et leurs incidences historiques et sociétales. Il
s’agira donc de revisiter les textes fondateurs de l’islam, de suivre le développement de la
littérature célébrant les mérites du Prophète et de sa famille, de préciser le statut que les juristes,
les théologiens et les philosophes assignent au Prophète, de suivre dans la littérature doctrinale du
chi’isme et du soufisme l’affirmation simultanée de l’humanité du Prophète et de sa réalité
transcendante, ainsi que son prolongement dans l’imamologie et l’hagiologie. Il consistera à
mettre en relation la formulation des doctrines avec l’extension des pratiques de dévotion, comme
“la prière sur le Prophète“. La commémoration de la naissance du Prophète ou de son ascension
céleste s’inscrit dans le même mouvement. La poésie et le chant ont été également un mode
privilégié de l’expression de la doctrine et de l’amour du Prophète. C’est là un champ
d’investigation assez peu exploré qui concerne toutes les langues et les cultures du monde
musulman. Quelle est la place de l’image dans la représentation du Prophète et de ses successeurs.
Quelle conception se font les simples croyants du Prophète, en terre d’islam et d’immigration ?
Que savent-ils de lui et comment expriment-ils leur attachement à lui ? Quelles représentations du
Prophète diffusent aujourd’hui les mass-médias et Internet ? Vers quelles conceptions et attitudes
les internautes sont-ils orientés ? Une telle recherche couvre donc tout le champ des disciplines
concernées par l’étude du monde arabe et musulman, dans toute son extension, des origines à nos
jours. Seuls certains aspects de cette recherche pourront être présentés, mais l’atelier vise avant
tout à établir un contact et un dialogue avec tout ceux qu’elle pourrait intéresser et qui pourraient
contribuer à l’ouvrir aux sciences sociales.
L’atelier sera dirigé par Rachida Chih, CETOBAC et Stefan Reichmuth (Ruhr-Universität
Bochum). Autres intervenants : Nelly Amri, Université de la Manouba, Tunis, Francesco
Chiabotti, Aix-Marseille Université, Denis Gril, Aix-Marseille Université, Pierre Lory, EPHE,
Jean-Jacques Thibon, Université Blaise Pascal, Clermont-Ferrand.
Intervenants :
première de ces visions est la ru’yâ du cheikh ‘Abd al-Rahmân b. Makhlûf al-Tha‘âlibî (m.
873/1468 ou 875/1470), mufassir (commentateur du Coran), faqîh mâlikite et soufi ; la deuxième
vision est attribuée à ‘Abd al-Salâm al-Asmar al-Faytûrî (m. 981/1573), le fondateur de la voie
‘Arûsiyya-Salâmiyya, dont un récit primitif nous a été conservé par son hagiographe Karîm al-
Dîn al-Baramûnî al-Misrâtî (m. ap. 998/1590) dans sa Rawdat al-azhâr wa munyat al-sâdât al-
akhyâr fî manâqib Sîdî ‘Abd al-Salâm b. Salîm al-Tarâbulsî rédigée v. 999/1591. A la différence
de ces deux visions, typiques des récits d’ascension céleste du visionnaire, émaillées
« d’évènements », de visions et de dialogues, la troisième ru’yâ, attribuée au saint kairouanais
Abû l-Qâsim al-Misrâtî (m. 932/1526) surnommé « l’homme au manteau » (Sâhib al-dirbâla), est
un récit de « fondation » et d’investiture ; rédigé v. 1024/1615, il est dû à Jamâl al-Dîn
Muhammad al-Misrâtî (m. ap. 1035/1626), l’arrière petit-neveu du cheikh et son hagiographe.
À travers les Tabaqāt al-sūfiyya de Sulamī (m. 412/1021) pris comme un miroir des doctrines et
des pratiques du début du soufisme, je m’interroge sur le contenu du terme sunna et sur les raisons
de la référence à la sunna. J’ai ainsi repéré les expressions de ittibā‘ al-sunna et de ’ittibā‘ al-
nabī, parfois aussi l’usage du terme iqtiḍā’, sans être pour l’instant arrivé à cerner précisément la
différence qu’il pouvait y avoir entre ces deux termes.
Cela débouche sur une question plus générale : Qu’est-ce que la sunna pour les premiers maîtres
soufis ? Qu’est-ce qui les distingue de l’usage qu’en font les théologiens ou les juristes. Comment,
à travers les siècles, le contenu de ce terme et son usage varient ?
Pour résumer les premières observations :
Dans les Ṭabaqāt al-ṣūfiyya, pour les maîtres soufis de cette période qui va du 2e au 4e siècle,
revendiquer la conformité à la sunna, permet au soufisme de s’inscrire dans une tradition
orthodoxe en cours de constitution et de ce fait sunna se terme se trouve souvent opposé à bid‘a
(l’innovation en matière religieuse), comme dans les autres sciences, le fiqh ou la théologie en
particulier. On est plutôt là dans une rhétorique argumentative. Mais l’Ittibā‘ al-sunna reste une
notion relativement vague et polémique, qui semble liée à des pratiques externes, voire même
sociales (comme le gain licite : kasb). Suivre la sunna, c’est un comportement avec ce monde et
les biens de ce monde, mais pas une voie spirituelle. D’où le fait que la sunna n’apparaisse pas
comme liée à la personne du Prophète mais plutôt aux normes sur lesquelles les premiers
membres de la communauté musulmane sont tombés d’accord. Par contre, apparaissent des
enseignements qui lient la voie spirituelle à l’imitation de la personne du Prophète. Quelques
jalons sont identifiables : Ḏū l-Nūn, Ǧunayd, Ibn ‘Aṭā’ et Abū ‘Uṯmān (al-Ḥīrī) en particulier. Et
donc une nouvelle formulation apparaît qui n’est pas le concept d’ittibā‘ al-sunna mais d’ ittibā‘
al-nabī ou d’ iqtidā’, liée à l’amour de sa personne comme seule voie de salut, car cet amour est
l’unique moyen de réaliser cette imitation totalisante, la sequela prophetae. Sulamī en proposant à
l’aspirant comme modèle les états du Prophète, ses vertus et ses règles de comportement (ādāb) se
focalise également sur sa personne, avant même d’évoquer la sunna qui semble dès lors cantonnée
à des aspects extérieurs. On perçoit ici l’émergence de quelques éléments destinés à jouer un rôle
fondamental dans l’ittibā‘ al-nabī dans la doctrine initiatique d’Ibn ‘Arabī.
Atelier 5
Responsable : Mohammad-Ali Amir-Moezzi (Directeur d’études- EPHE/LEM)
Intervenants : Mohammad-Ali Amir-Moezzi, Jean-Charles Coulon, Orkhan Mir-Kasimov, Daniel
de Smet, Mathieu Terrier, Jan Van Reeth
Résumé
L’ésotérisme shi’ite a pour centre de gravité le couple ẓāhir /bāṭin. Cette dialectique de l’apparent
et du caché, héritée de la tradition néoplatonicienne et surtout de la Gnose, se trouve à la base des
principales doctrines du shi’isme ésotérique : vision dualiste du monde, doctrines
émanationnistes, opposition entre les gens de la connaissance et ceux de l’ignorance, la nature
salvatrice de la connaissance et du Guide qui la détient, le double niveau des Ecritures…Il est vrai
que la terre natale du shi’isme a été l’Irak. Province centrale de l’empire perse des Sassanides
avant l’islam, cette région et ses villes ont été le siège de nombreuses traditions intellectuelles et
spirituelles tardo-antiques : divers mouvements judéo-chrétiens, manichéens, gnostiques…
traditions encore vivantes plusieurs siècles après l’avènement de l’islam.
Les interventions porteront aussi bien sur certaines doctrines au sein du shi’isme (toutes tendances
confondues) que sur leurs sources éventuelles dans les traditions tardo-antiques, ainsi que sur
leurs prolongements à travers divers courants de pensée en terres d’islam.
En amont, seront examinées « les racines » : les traditions néoplatoniciennes, gnostiques,
manichéennes,…ou les courants herméneutiques (Philon d’Alexandrie, Justin, Origène, Arius,
etc.) ou encore les hétérodoxies judéo-chrétiennes, évidemment en relation avec le shi’isme.
En aval, seront étudiés « les prolongements » : courants « hétérodoxes » entre soufisme et
shi’isme, les sciences occultes, les pensées philosophiques.
Intervenants
Atelier 15
Responsables : Norig Neveu (IFPO), Khalyla Aude Coëffic (CHERPA)
Intervenants : Mariam Abou Zahab, Claire Beaugrand, Michel Boivin, Géraldine Chatelard, Aude
Khalila Coëffic, Deniz Kosulu, Laurence Louër, Sabrina Mervin, Nassima Neggaz, Norig Neveu
Discutante matin : Sabrina Mervin (CNRS CéSOR)
Discutante après-midi : Laurence Louër (CERI)
Résumé
Cet atelier part du constat que la distinction sunnites/chiites est utilisée pas différents acteurs afin
d’exprimer une opposition politique, une distinction sociale ou une différence de dogme religieux
dans différentes régions des mondes musulmans (Liban, Irak, Iran, Pakistan, Jordanie, etc).
Partant de ce constat empirique, l’objectif de cet atelier est d’engager une étude comparée de la
reconfiguration de cette distinction, à partir des travaux de chercheurs spécialistes de différents
terrains des mondes musulmans et confrontés à cette opposition.
Après la guerre en Irak de 2003 et en réponse au concept de « croissant chiite », proposant une
nouvelle lecture géopolitique du Moyen-Orient, des recherches se sont consacrées à l’étude du
transnationalisme chiite. Préférant l’expression de « mondes chiites »15, ces études concluent que
ce transnationalisme et le poids de l’Iran n’empêchent ni les constructions identitaires nationales,
ni l’intégration des communautés dans les États dont elles relèvent. Cependant, les discours sur le
« péril chiite » ou l’hégémonie iranienne ont produit des effets et ont donné un cadre dans lequel
se sont exprimés des rivalités et des phénomènes de concurrences.
En s’appuyant sur un matériau ethnographique, les intervenants s’attacheront à décrire les
interactions entre sunnites et chiites dans différents lieux ou situations et dans un contexte de
recompositions régionales au sein duquel les mobilités de populations (réfugiés, pèlerins,
touristes, migrations de travail, etc.) ainsi que les flux financiers ou d’idées prennent de l'ampleur
et se transforment, mais également où des modèles de bien-être matériel se diffusent. Les
distinctions identitaires n’empêchent donc pas de s’approprier les manières de faire des « autres »,
les limites de ces circulations d’idées ou de pratiques doivent cependant être interrogées. Il faudra
alors s’intéresser tant à ce qui circule qu’à ce qui ne circule pas. Repenser la distinction suppose
de revenir sur ce que recouvrent les notions mêmes de chiites et sunnites qui peuvent, au-delà de
l’appartenance confessionnelle toucher à des obédiences politiques, des relations transnationales,
etc... Cela suppose également de mettre en lumière les pratiques sociales qu’implique cette
distinction, dans leur diversité. Aussi, bien qu’exprimée en termes d’appartenances primordiales,
il faut appréhender la reconfiguration en cours de la distinction par les acteurs dans sa complexité.
15
MERVIN Sabrina, Les mondes chiites et l’Iran, Paris, Karthala, 2007; LOUËR Laurence, « Déconstruire le croissant chiite », Revue
internationale et stratégique, 2009/4, n°76, p. 45-54 ; LOUËR Laurence, Chiisme et politique au Moyen-Orient. Iran, Irak, Liban,
monarchies du Golfe, Paris, Autrement, 2008.
Programme de l’atelier
9h 30- 9h50 : Introduction Norig Neveu (Ifpo), Khalila Aude Coëffic (CHERPA/IREMAM)
9h 50- 10h10 : Nassima Neggaz, Middle East Institute, National University of Singapore
« Mémoire et identité communautaire : la reconstruction des identités sunnite et chiite en
Irak après 2003 »
Cette étude examine la reconstruction, depuis 2003 en Irak, des identités sunnite et chiite. Après
avoir défini ces changements, l’analyse met en avant le rôle joué par les discours politisés en
provenance d’Arabie Saoudite visant à recréer une mémoire sunnite basée sur une relecture de
l’histoire islamique et sur le principe de victimisation des sunnites face à un monde chiite traitre et
malveillant.
Les organisatrices du panel tiennent à remercier Géraldine Chatelard et Mariam Abou Zahab qui
n’ont malheureusement pas pu assister au congrès du GIS pour l’attention qu’elles ont portée à
cet atelier.
Atelier 31
Responsable : Jean-Charles Coulon (BULAC)
Intervenants : Philippe Beaujard, Anna Caiozzo, Jean-Charles Coulon, Jean-Charles Ducène,
Alain Epelboin, Pierre Lory, Anne Regourd, Jonas Sibony, Francesco Zappa
Résumé
16
Extrait du projet de convention de création du groupement d'intérêt scientifique (GIS) « Moyen-Orient et mondes musulmans » (10 février
2013).
Programme de l’atelier
• Le rôle des djinns dans le salut des humains, par Pierre Lory (EPHE)
Les djinns sont cités abondamment dans le Coran et dans le hadith, où ils apparaissent
principalement comme des tentations vers l’idolâtrie, la magie et la divination. Tous ne sont
toutefois pas transgresseurs ou pervers. Certains pourraient-ils même devenir des auxiliaires utiles
dans la voie du salut ? Le rôle religieux des djinns apparaît en tout cas moins marginal qu’il n’y
paraît parfois.
•
10h30-11h : pause café
•
•
12h00-13h30 : pause déjeuner
•
17
Voir Anne Regourd, « Arabic documents from the Cairo Geniza in the David Kaufmann Collection in the Library of the Hungarian
Academy of Sciences—Budapest », Journal of Islamic Manuscripts, 3/2 (2012), p. 1-19 ; « Ǧāḥiẓiana. Addition à l’essai d’inventaire de
l’œuvre ǧāḥiẓienne : le Kitāb al-fityān retrouvé ? », Arabica, 60/1-2 (2013), p. 106-130.
13h30-14h40
Modératrice : Anna Caiozzo
• Un côté caché du marché libraire islamique malien : des manuels pour petits magiciens
autodidactes , par Francesco Zappa (Université d'Aix-Marseille/IREMAM)
Cette communication se penchera sur une littérature mineure, circulant depuis quelques
années dans les librairies islamiques de Bamako, qui met à la disposition du grand public des
techniques magiques souvent élémentaires, puisées à des répertoires divers. On se focalisera
notamment sur les stratégies par lesquelles ces publications essayent de contourner la méfiance,
voire les anathèmes dont ces pratiques font l’objet dans une sphère publique marquée par la
présence de plus en plus affichée des courants d’inspiration wahhabite.
• Bénédictions et malédictions dans les parlers arabes des juifs du Maghreb, par Jonas
Sibony (Inalco)
Les formules de bénédiction et de malédiction utilisées dans les différents parlers arabe
des juifs du Maghreb empruntent largement au fond maghrébin commun. Pourtant, elles sont
aussi le reflet de la pluralité culturelle et cultuelle de la région en s'inspirant d'éléments culturels
particulièrement juifs ou en piochant dans les lexiques hébraïque, araméen ou judéo-espagnol.
Quatrième panel : La magie islamique et les échanges culturels autour de l’Océan Indien
14h40-15h30
Modératrice : Anna Caiozzo
18
Alain Epelboin et Constant Hamès, Collection ALEP : amulettes et objets magiques collectés dans les ordures (Mbebess Joal, Mbour,
Sénégal, Afrique, Europe) 1983-2014. Catalogue multimédia de l'exposition 2014 IMA Tourcoing "Arts secrets : les écritures talismaniques
d'Afrique de l'Ouest", 788 pages, 130 Mo.
Hārūn al-Rašīd (786-809). Son existence est sujette à caution. Pourtant, le traité qu’on lui attribue
est parfois mentionné au Moyen Âge comme un ouvrage essentiel de l’initiation aux sciences
occultes. Nous présenterons donc ce texte inédit et sa tradition manuscrite.
Atelier 3
Responsable : Sepideh Parsapajouh (CéSor/IIAC-LAU)
Intervenants : Kinda Chaib, Dima de Clerck, Galila El Kadi, Michelangelo Giampaoli, Augustin
Jomier, Sepideh Parsapajouh, Pascale Philifert, Renaud Soler, Mathieu Terrier, Jean-Pierre Van
Staëvel
Résumé
Les territoires dédiés aux morts, « inscrits dans l’espace–temps d’une existence alternative, à la
fois matérielle et imaginaire » (Urbain, 2010), ont toujours et partout été objets de débats et de
transformations. Dans les sociétés musulmanes et du Moyen Orient, tout en étant très différents
d’un pays à l’autre, ils occupent une place cruciale, au point de rencontre des différentes
politiques (N. Vatin, S. Yerasimos, 2001, M. Davie, 2007, N. Picaudou et al. 2013). Trois
conditions déterminent le fait du cimetière dans les sociétés musulmanes :
- L’urbain. La croissance urbaine importante dans le processus de modernisation génère de
nouvelles problématiques dans l’existence des cimetières : la gestion d’un espace raréfié,
l’augmentation de la valeur du terrain, l’administration de la mortalité. Ceci peut
s’illustrer par des exemples divers : la décision de fermer aux nouveaux morts d’anciens
cimetières intra-muros ; la réappropriation de ces cimetières comme lieu de vie
; l’éradication de certains cimetières ; la construction de vastes terrains extra-muros, leur
extension, leur accessibilité et leur visibilité, etc.
- Le religieux. D’un côté, ces sociétés sont imprégnées de croyances et de préceptes
religieux résistant aux règles qu’une modernité séculière pourrait vouloir imposer au
cimetière comme au reste de la ville. Un enjeu important dans le sort de ces lieux est le
tabou frappant le rapport avec la mort et le cadavre, entrainant de strictes exigences dans
la préparation du corps à l’inhumation, l’interdiction de la crémation, l’obligation
d’inhumer en terre, les contraintes concernant l’exhumation et la réutilisation des caveaux,
etc. D’un autre côté, les sociétés musulmanes sont les théâtres de tensions entre les
prescriptions juridiques relativement stables et les pratiques mouvantes des rites
funéraires, différentes d’un pays ou d’une région à l’autre.
- Le politique. De grands conflits ont généré au pays du Moyen-Orient de nombreuses
vagues de victimes (Iran, Irak, Israël-Palestine, Liban, Afghanistan, Pakistan, Syrie, etc.).
Les conflits et interactions entre acteurs sociaux (citoyens, communautés, Etats) créent de
nouveaux enjeux relatifs au « comment mourir », au statut des victimes auprès des
vivants (des héros ou des damnés de ces conflits), entrainant la sacralisation des corps des
uns (C. Mayeur-Jaouen, 2002, F. Khosrokhavar, 2002) et la banalisation de la mort des
autres. Par ailleurs, on assiste à la rationalisation de la mortalité dans le cadre des
« biopolitiques » des Etats modernes (Foucault, 1976). On observe ainsi une politisation
des tombeaux et des cimetières, objets de revendications chez les uns et de négations chez
les autres.
Si comme l’écrit Jean-Pierre Albert « la mort est par excellence le lieu de l’emprise du politique
sur les hommes », les cimetières qui sont ses lieux de « sédentarisation ou de départ » (Urbain,
2010), constituent au Moyen-Orient tout un champ potentiellement révélateur des rapports entre
l’État, le religieux et les acteurs ordinaires. Dans ce contexte, nous invitons tous les spécialistes de
ce champ à réfléchir autour de la place, du rôle, et des enjeux du cimetière. Des réflexions autour
de différentes thématiques pourraient être abordées dans cet atelier : le cimetière comme objet
d’administration ; le cimetière comme lieu de construction ou de déconstruction de la mémoire ;
le cimetière comme lieu de rencontre : la ziârat (visite pieuse), promesse de reja’t (retours),
d’expression (esthétique, textuelle, etc.), de discours ou de dialogue ; le cimetière et la place de la
diversité religieuse, etc
Intervenants
Programme de l’atelier
11h Pascale Philifert (Université Paris Ouest Nanterre, LAVUE/Mosaïques) Cimetières et ville à
Salé (Maroc) : une relation rompue ?
11h20 Michelangelo Giampaoli (IPLURES - São Paulo – Università degli Studi di Perugia) Nos
morts, on les enterre ici. Une ethnographie du cimetière musulman de Guarulhos (São Paulo).
13h30 Mathieu Terrier (EPHE, LEM) Entre les vivants et les morts : les significations de la
tombe en islam spirituel
Débat : 14h10-14h20
Président de séance : Michelangelo Giampaoli (IPLURES - São Paulo – Università degli Studi
di Perugia)
Débat : 15h20-15h50
Atelier 2
Responsable, Audrey Dridi (Université Paris I, UMR 8167)
Intervenants : Julien Auber De Lapierre, Mathilde Boudier, Simon Brelaud, Audrey Dridi,
Séverine Gabry-Thienpont, Bernard Heyberger, Gaétan du Roy, Chantal Verdeil
Résumé
La question des chrétiens d’Orient n’est pas nouvelle dans l’historiographie et a donné lieu à de
nombreux travaux depuis une trentaine d’année. Initialement sujet de prédilection des
ecclésiastiques et des diplomates – comme le montrera Bernard Heyberger (DR, EHESS/EPHE)
dans l’introduction de cet atelier – cette thématique a progressivement suscité l’intérêt de
chercheurs de différents horizons, sans que, toutefois, leur analyse ne dépasse la perspective
strictement religieuse. Depuis une dizaine années, ce champ d’étude a été profondément
renouvelé par des études empruntant des approches variées (culturelles, sociales, juridiques etc).
Cet atelier s’inscrit dans ce tournant historiographique : huit chercheurs, parmi lesquels des
historiens antiquisants, médiévistes, contemporanéistes, mais aussi un historien de l’art et une
ethnomusicologue, se proposent de contribuer au renouvellement des connaissances sur les
chrétiens d’Orient, à travers trois axes principaux :
Une première session, consacrée aux structures et aux dynamiques des Églises d’Orient,
s’organisera autour de deux interventions. La première, proposée par Mathilde Boudier
(doctorante, Paris 1), étudiera un manuscrit inédit contenant un échange de lettres entre deux
dignitaires de l’Église melkite au IXe siècle. La seconde, que présentera Chantal Verdeil (MCF,
Inalco), interrogera les transformations dans la formation du clergé oriental aux XIXe et XXe
siècles.
Une deuxième session sera constituée de trois contributions sur la religion copte aujourd’hui,
envisagée à travers différents prismes. Severine Gabry-Thienpont (post-doctorante, CREM-
LESC) s’intéressera à la piété populaire copte à travers son analyse d’un chant de louange
chrétien en langue arabe. Julien Auber De Lapierre (doctorant, EPHE), étudiera des icônes coptes
d’époque ottomane, non pas sous l’angle artistique, mais du point de vue du mécénat. Gaetan Du
Roy (chercheur, LaRHis) interviendra sur les usages contemporains du genre hagiographique chez
les Coptes à travers une étude à la fois historique, anthropologique et philologique.
Une dernière session posera le problème de la paucité voire de l’absence de sources
contemporaines pour écrire l’histoire de certaines périodes. Dans son étude sur les chrétiens de
Mésopotamie à l’époque sassanide, Simon Brelaud (doctorant, Paris 4) montrera que les sources
médiévales et l’archéologie permettent de pallier le manque de sources contemporaines. Audrey
Dridi (doctorante, Paris 1) envisagera les chrétiens d’Égypte au début de l’époque islamique à
travers une documentation papyrologique copte encore méconnue et sous-exploitée.
Intervenants
Atelier 43
Responsable : Sobhi Boustani (INALCO-CERMOM)
Intervenants : Sadia Agsous, Tania Al Saadi, Sobhi Boustani, Bernard Heyberger, Aline
Schlaepfer
Résumé
Les crises et les évènements que traverse le Monde arabe depuis la première moitié du XXe siècle
ne cessent de modifier le paysage démographique dans la région. Si les guerres israélo-arabes ont
mis fin à une longue présence des communautés juives dans les pays arabes, les mouvements
récents ont eu pour conséquences une déstabilisation institutionnelle et sociale ainsi qu’une
montée spectaculaire du communautarisme. Cette mutation sociale, sous ses différents aspects,
est, en grande partie, récupérée par des fractions religieuses intégristes et extrémistes. Ce chaos a
certes provoqué l’exclusion de différents groupes sociaux, cependant les minorités, et
particulièrement les minorités religieuses, se sont trouvées fortement marginalisées, et ce malgré
leur enracinement millénaire dans ces sociétés.
Notre objectif est d’analyser le cas de l’Irak moderne et du déracinement des communautés juive
et chrétienne. Outre les émeutes communautaires qui ont précédé la création de l’État d’Israël en
1948, l’Irak subi depuis deux ou trois décennies des bouleversements majeurs dus aux trois
guerres dites « guerres du Golfe » qui ont conduit à deux interventions politiques et militaires
étrangères.
L’atelier a comme objectif d’étudier les minorités juive et chrétienne d’Irak depuis une approche
pluridisciplinaire, qui combine histoire, sociologie et littérature. D’une part, il s’agira de
comprendre l’histoire et le statut de ces communautés religieuses et les raisons de l’échec de leur
intégration dans le processus de modernisation de l’Irak contemporain. D’autre part, le volet
littéraire s’emploie à mettre en valeur des textes littéraires produits par des écrivains issus de ces
minorités en Irak et en Exil.
Intervenants
prend forme en 1921, les influences britanniques, puis allemandes à partir de la fin des années
1930, complètent enfin ce processus complexe d’élaboration d’une identité collective chez les
juifs d’Irak.
Le rapport – parfois extrêmement ambigu – entre religion (din) et nation (millet puis umma), ne
saurait être saisi sans tenir compte de la concomitance de toutes ces influences. Cette contribution
se propose d’examiner les textes produits par et sur la communauté juive de Bagdad entre la
révolution jeune turque (1908) et leur départ en masse, en 1951. Ce survol critique des sources
permettra de proposer une nouvelle lecture des fondements de la notion moderne de communauté
(ta’ifa) non musulmane au sein de l’État irakien.
Atelier 42
Responsable : Hela Ouardi (LEM)
Intervenants : Soufiane Al Karjousli, Cécile Khalifa, Hela Ouardi
Résumé
L’objet de cet atelier sera d’essayer d’apporter plus de lumière sur l’évolution des pratiques
historiographiques concernant l’Islam. Ainsi, à travers trois communications, nous nous
intéresserons (par ordre chronologique) à la postériorité historiographique du fameux échange
entre Saladin et Guy de Lusignan, avant d’essayer de sonder l’influence des sources latines dans
les pratiques historiographiques arabo-musulmanes médiévales, et enfin nous pencher sur
l’évolution des approches que les orientalistes de langue française ont eu du Coran, du XVIIe
siècle à nos jours.
Intervenants
Atelier 11
Responsable : Vanessa Rose (Université Paris I Panthéon-Sorbonne et INHA-InVisu)
Intervenants : Clara Ilham Alvarez Dopico, Elodie Baillot, Mélisande Bizoirre, Lucile Martinet,
Vanessa Rose
Résumé
Notre atelier sur le thème « Les décors de céramique architecturale en Islam: création, transfert et
écriture des collections » mettra en lumière cet objet céramique propre aux arts de l’Islam.
Chaque participante proposera l’étude d’un corpus particulier issu d’une région du monde
islamique, en étudiera ses caractéristiques, puis questionnera sa patrimonialisation. En partant des
céramiques architecturales du IXe siècle au Moyen-Orient, en rejoignant l’Asie Centrale des
Timourides et la Perse qajare, puis les carreaux Qallaline de Tunisie et les collections de
céramique architecturale hispano-mauresque, notre voyage nous mènera à travers les siècles et les
grandes régions du monde islamique. Les interventions de cet atelier seront centrées sur leurs
origines, leurs contextes de création, leurs techniques, leur découverte, leur collecte, l’intérêt que
suscitent ces artefacts et leur présentation. La céramique architecturale sera au cœur d’une
discussion qui questionnera la patrimonialisation de ces objets et l’écriture de l’histoire de cette
technique caractéristique de l’art islamique. L'étude de son nouveau contexte, au prisme de
l'histoire du goût et de l'intérêt nouveau pour les arts de l'Islam sera abordée et permettra
également de comparer le traitement de ces objets issus de contextes géographiques et historiques
variés.
Intervenants
Atelier 8
Responsable : Stéphanie Anna Loddo (IRIS)
Intervenants : Virginia Cochin-Cassola, Stéphanie Anna Loddo, Irène Maffi, Maud Moussi, Maho
Sebiane
Résumé
Qu’il soit matériel ou immatériel le patrimoine fait l’objet d’une intense production culturelle
dans les sociétés du Moyen-Orient contemporain et d’une instrumentalisation, parfois violente
dans les zones en situation de conflit. Les processus de patrimonialisation engagent des acteurs
dans des pratiques qui transforment des objets, des espaces, des traditions ou encore des savoirs
en patrimoine devant être valorisé et préservé. Ces processus reflètent les intérêts et
représentations d’acteurs agissant à différentes échelles du social, du politique et de
l’économique. Outil de définition et de compétition identitaire, de légitimation politique ou encore
de développement économique, l’objet patrimonial participe à des définitions locales, nationales
et internationales de la relation que tissent les sociétés entre passé, présent et futur. Le patrimoine
peut donc être compris comme une construction qui répond à des besoins et des enjeux sociaux,
identitaires et politiques du présent.
L’objectif de cet atelier est d’interroger à partir d’approches disciplinaires variées, les processus
de patrimonialisation à l’œuvre dans diverses dimensions du patrimoine (muséal, archéologique,
musical, ethnographique...). Selon quelles modalités les objets patrimoniaux sont-ils produits,
conservés et légitimés ? Comment sont-ils utilisés, interprétés, et instrumentalisés ? Quels sont les
acteurs intervenant dans le champ patrimonial, leurs pratiques et leurs discours ? A partir de ces
questionnements, nous nous attacherons à mettre en valeur les enjeux sociaux, politiques et
identitaires impliqués dans les processus de patrimonialisation.
Intervenants
Atelier 14
Responsable : Virginia Cochin-Cassola (École du Louvre, Université de Lorraine)
Intervenants : Sultan Almutery, Mohsen Ben Hadj Salem, Virginia Cochin-Cassola, Solène Klein,
Saena Sadighiyan, Maho Sebiane
Résumé
L’actualité récente relative aux destructions des patrimoines bâtis (Syrie, Irak), aux pillages des
musées et sites archéologiques (Egypte, Syrie), mais également à la rénovation ou à la
construction de musées (Algérie, Tunisie, Maroc, Arabie saoudite, Emirats arabes unis) et à
l’inscription de nouveaux sites au Patrimoine mondial de l’Unesco (Quartier historique de
Djeddah en Arabie saoudite) amène à continuellement redéfinir la place des patrimoines matériels
et immatériels au Maghreb et au Moyen-Orient. Les villes, porteuses de la mémoire de ces
patrimoines, apparaissent alors comme des lieux incontournables, territoires de nouvelles
perspectives muséologiques et patrimoniales.
L’objectif de cet atelier est de mettre en regard les diverses politiques patrimoniales et
muséologiques qui ont lieu dans les villes du Maghreb et du Moyen-Orient et d’en dégager les
principales tendances à partir de plusieurs entrées méthodologiques : recherches théoriques,
recherches-actions, tentatives opérationnelles. Processus et résultats doivent aider à cerner les
transformations du sens du patrimoine qui sont au cœur de mutations sociales, politiques et
économiques grandissantes.
Session #1 :
Territoires, villes, patrimoines : construction et processus
Une première définition de la ville sur laquelle nous nous alignons dans le cadre de cet atelier est
celle développée dans l’œuvre magistrale d’Henri Lefebvre, à savoir la dialectique
tridimensionnelle de la ville. Celle-ci est alors non seulement un espace perçu, mais également un
espace vécu et un espace conçu, avec une spatialité singulière, et un sens historique et un sens
social particuliers, régulièrement repris par Nasser Fakouhi, anthropologue iranien. La ville
comme lieu d'une mise en ordre et en scène de la société par des autorités politiques, est créée,
organisée et détruite par des volontés publiques et privées. Ces volontés parfois individuelles ou
collectives, parfois raisons d’Etat, définissent et forment l'espace-temps des citoyens, des
différents mouvements d'hommes, d'information et de biens qui sillonnent ce territoire particulier.
Le prisme de la ville paraît être un point d'entrée pertinent dans l'étude des patrimoines matériels
et immatériels au Maghreb et au Moyen-Orient. Ces patrimoines sont définis tour à tour comme
« tout objet ou ensemble, matériel ou immatériel, reconnu et approprié collectivement pour leur
valeur de témoignage et de mémoire historique » (Arpin), irrémédiablement liés à l’idée de perte
ou de disparition potentielle (Babelon et Chastel), et sont sous-tendus par des interventions
concertées de marquage et de signalisation, en d’autres termes, le résultat d’une patrimonialisation
(Davallon). Ils transitent par les cœurs des agglomérations, qui sont à la fois les poumons de
l’action publique, les vitrines des Etats pour la promotion du tourisme et de l'économie
notamment à travers les musées nationaux, les lieux de mémoire d'événements passés comme
contemporains, en somme les territoires privilégiés des stratégies politiques contemporaines.
Pour aborder ces questions transversales, des méthodologies diverses et complémentaires seront
introduites dans le cadre de cet atelier, afin de sensibiliser les participants et auditeurs à la fois aux
problématiques urbaines comme patrimoniales avec comme sujet d’étude, et non plus comme
objet d’étude : la ville. L’intentionnalité de cet atelier est donc volontairement transdisciplinaire,
et notre libre parti pris méthodologique est clairement assumé : au fil des présentations de cet
atelier sera déployé un éventail de méthodologies différentes, et de champs disciplinaires
complémentaires tels que l’architecture, l’histoire et l’histoire de l’art, la muséologie, la
sociologie, l'anthropologie, l'ethnographie, l'urbanisme, l'économie ou la géographie.
L’objectif de cet atelier est donc moins de présenter les politiques patrimoniales de la région, que
de proposer des moyens et méthodes divers et parfois peu classiques pour les identifier et les
analyser dans leur contexte, pour comprendre comment ces politiques patrimoniales influent sur la
production culturelle de l’espace, en dépassant les amalgames médiatiques suite notamment aux
trafics d’objets archéologiques et aux dernières destructions de sites historiques au sein et à
l’extérieur des villes.
Enfin et surtout, il s’agit d'opérer un déplacement du regard de l’Occident à l’Orient, selon les
termes de l'historien de l'art Hans Belting, qui sont également ceux de l'urbaniste Ananya Roy
lorsqu'elle parle de « seeing from the South / 3rd-worlding the West ». Déplacer nécessairement et
volontairement le regard afin d’empêcher les analyses extra-territoriales, la modélisation et plus
généralement l'analyse des phénomènes à partir de modèles prédéfinis et préconçus dans un
ailleurs, déconnectés des réalités singulières locales, et les amalgames des différences existantes
dans cette région.
Session #2 :
Territoires, collections, appartenances : le cas de l’Egypte et de l’Iran
Atelier 30
Responsables : Annabelle Boissier (LAMES, MMSH), Fanny Gillet (IMAF, EHESS),
Alain Messaoudi (CRHIA, Université de Nantes), Perin Emel Yavuz (CRAL-IISMM,
EHESS)
Intervenants : Victoria Ambrosini Chenivesse, Mathilde Chèvre, Rime Fetnan, Marion Lagrange,
Alia Nakhli, Claudia Polledri, Aya Sakkal
Résumé
L’analyse des œuvres plastiques élaborées par des artistes modernes et contemporains dans les
sociétés du Maghreb et du Moyen Orient depuis le XIXe siècle, de leurs formes, mais aussi des
conditions de leur production et des modalités de leur réception, reste aujourd’hui un domaine
relativement peu exploré, malgré les perspectives qu’elle ouvre pour comprendre ces sociétés. La
lecture de ces œuvres permet de saisir des discours révélateurs du rapport que les acteurs sociaux
entretiennent avec leur passé et leur présent.
Nous proposons dans cet atelier d’explorer cette question à travers l’idée, issue de la sémiologie
visuelle, que l’image s’appréhende sur le modèle du texte, « dans la mesure où ses constituants (et
leur distribution dans l’espace de la représentation), sollicite[nt] de la part du spectateur une série
d’ajustements [propres à] la lecture ». Considérer l’œuvre d’art comme un texte plastique porteur
de narrativité, utilisant des procédés proprement iconiques et/ou textuels, permet d’y déchiffrer
des définitions de soi par rapport à une altérité, d’y voir un véhicule d’affirmations identitaires,
qu’elles se situent à une échelle collective, en termes d’identité nationale ou culturelle, ou à une
échelle individuelle – et ce en particulier depuis un tournant postmoderne qui marque une volonté
d’émancipation vis-à-vis des grands récits. Cet atelier à vocation interdisciplinaire, qui prend en
considération la particularité de configurations narratives et discursives, veut ainsi porter attention
à la manière dont l’art contribue à l’écriture de l’histoire.
• Quels sont le rôle et la place de la production symbolique dans la construction de
l’histoire ? Comment contribuent-elle à construire ou à transmettre une culture déterminée
? Quel est leur rôle dans les constructions identitaires ?
• Quelles sont les mutations engendrées par le développement des techniques de diffusion et
des pratiques de l’écriture sur la production et la réception des images ? Comment les
œuvres et les artistes font-ils dialoguer une tradition fondée sur l’oralité avec le champ
iconique ?
• Comment les artistes contribuent-ils à identifier les enjeux liés à la langue et à l’écriture,
leur histoire et leurs usages, dans leurs différents niveaux de registre et de diffusion ?
Parallèlement, comment utilisent-ils l’écriture dans leurs œuvres ?
Ces questionnements s’inscrivent dans une perspective pluridisciplinaire (histoire, histoire de
l’art, sociologie, anthropologie, esthétique, etc.). Ils se fondent autant sur la manière dont les
œuvres ont un pouvoir de transmission que sur leur interprétation, c’est-à-dire sur la manière dont
elles donnent à comprendre leur contexte de production.
2- Imageries populaires
Atelier 20
Responsable : Brigitte Foulon (Université de Paris 3)
Intervenants : Brigitte Foulon, Rania Samara, Rima Sleiman, Asja Zaino
Résumé
Cet atelier se propose d’initialiser une exploration de l’écriture de la prison telle que celle-ci
apparaît dans les œuvres littéraires arabes médiévales, modernes et contemporaines, en tentant de
mettre en lumière, en particulier, les éléments de rupture et de continuité se manifestant sur le
plan synchronique. Constate-t-on, par exemple, une stabilité quant à « imaginaire de
l’incarcération » ? Décèle-t-on une continuité dans les thématiques, entre révolte, colère,
résignation, désespoir, sentiment d’injustice, dénonciation de l’arbitraire, rêves ou tentatives
d’évasion ? Quid de l’évolution du rapport entre le prisonnier et les responsables de
l’incarcération, autrement dit, la plupart du temps, entre le lettré et le pouvoir en place ?
Chaque participant proposera une communication d’une vingtaine de minutes axée sur son champ
de recherches. Les communications seront suivies d’une discussion.
Intervenants
Rania Samara, Université de Damas et de la Sorbonne nouvelle Paris III, Traductrice littéraire
« Le roman de prison dans la littérature arabe »
Sur la scène arabe, la répression est devenue un phénomène notoire, généralisé et permanent. Des
milliers d’écrivains, de penseurs et d’artistes ont subi cette répression, ont traversé l’épreuve de la
prison et de la torture et ont vécu à l’ombre des poursuites et de la terreur. Aussi, il n’est pas
étonnant que la bibliothèque arabe de la seconde moitié du 20e siècle soit inondée par une énorme
quantité d’œuvres de création reflétant ce phénomène qui, du Golfe à l’Océan, constitue
désormais une nouvelle catégorie : la littérature de prison.
Cette production se distingue par une grande diversité d’auteurs : écrivains et poètes de carrière
ou non, politiciens devenus écrivains, écrivains détenus. Riche, multiple, variée, cette production
possède ses propres caractéristiques dans le fond et dans la forme. Bien des noms d’écrivains plus
ou moins illustres pourraient figurer dans cette galerie, chacun présentant ses propres aveux,
contant une anecdote personnelle ou apportant un témoignage dont la conclusion demeure
commune : la prison est l’empreinte inavouable, inoubliable.
représentation de ces deux thématiques de l’exil et de la prison ainsi que l’évolution qu’elles ont
connue au sein de l’œuvre du poète palestinien.
Y Z
Yankaya, Dilek ___________________ 104 Zabbal, François _________________ 9, 186
Yavuz, Perin Emel _____________ 152, 153 Zaino, Asja ___________________ 156, 157
Yontan, Sara ___ 9, 188, 189, 190, 191, 192 Zappa, Francesco ______________ 122, 125
Yungman, Limor ________________ 18, 20 Zerman, Ece ____________________ 78, 80
Znaien, Nessim __________________ 22, 23
Zouache, Abbès _________________ 26, 27
Zouggar, Nadjet _______________ 106, 107
Du 6 au 9
juillet 2015
Jean-Pierre Dalbéra
CONTACTS :
[email protected]
[email protected]
Inalco
DÉTAILS ET PROGRAMME : 65, rue des Grands Moulins
http://majlis-remomm.fr 75013 PARIS
RÉCITATION DE POÉSIE
chroniqueuse au Monde des religions.
Ses travaux portent essentiellement sur la littérature classique persane
et l’écriture féminine contemporaine. Elle prépare actuellement une
anthologie de la poésie des Femmes afghanes : Le cri des femmes afghanes,
à paraître en mars aux éditions Bruno Doucey
CONTACTS :
Jean-Charles Coulon : [email protected]
Récitation de poésie
Catherine Mayeur-Jaouen : [email protected]
Inalco
Cyrielle Michineau : [email protected]
Auditorium de l’Inalco
DÉTAILS ET PROGRAMME :
programme : http://majlis-remomm.fr 65, rue des Grands Moulins
75013 PARIS
Golan Haji
Golan Haji, poète et traducteur né en 1977 à
Amouda, petite ville kurde du nord de la Syrie,
Golan Haji a étudié la médecine à l’université de
Damas, et s’est spécialisé en histopathologie.
Il a exercé la médecine jusqu’en 2009, puis s’est
consacré aux activités littéraires.
En 2009-2010, il a enseigné la récitation et
l’analyse de textes théâtraux à l’institut « Teatro
» de Damas, principalement autour de travaux de
Brecht, Shakespeare, et Saadallah Wannous.
Il a reçu en 2004 le prix Mohammed Al Maghout pour son premier recueil de poèmes
« Il appela dans les ténèbres ». Son deuxième recueil : « Il y a quelqu’un qui voit en
toi un monstre », est paru lors de l’évènement « Damas, capitale de la culture » en
2008. Son troisième recueil : L’automne, ici, enchante et grandit, est paru en Italie en
édition bilingue aux éditions Il Sirente en 2013.
Un prochain travail en prose, rédigé à partir d’entretiens avec des femmes impliquées
dans la révolution syrienne, est à paraître à Beyrouth aux éditions Al Saqi.
Il traduit en arabe la littérature anglaise, écossaise et américaine. En plus d’un grand
nombre de traductions pour la presse et les revues littéraires arabes, il a traduit les
auteurs suivants : Mark Strand (2002), Alfred Hitchcock (2005), Robert Louis Stevenson
(2008), Dan Wylie (2010) et Alberto Manguel (à paraître).
Actuellement, Golan Haji habite à Paris. Il écrit régulièrement dans la presse arabe,
particulièrement pour le supplément culturel du journal Al Arabi al Jadid.
Nathalie Bontemps
Nathalie Bontemps est née en 1977 à Paris.
En 1999 elle s’installe à Marseille, où elle
poursuit des études d’arabe et écrit ses
deux premiers livres : Les HLM maritimes
et Hôtel coup de soleil, publiés aux éditions
P’tits Papiers en 2005 et 2008. En 2003 elle
s’installe à Damas pour y continuer ses
Étienne Naveau
Étienne Naveau a reçu une formation en
philosophie, avant de se consacrer à la
littérature indonésienne. Depuis 2003, il
est maître de conférences en langue et
littérature indonésiennes à l’Inalco. Il est
également traducteur. Membre du CERLOM,
il est notamment l’auteur de :
La foule, c’est le mensonge (Kierkegaard),
Pleins Feux, Nantes, 2002.
La mort n’est rien pour nous (Épicure),
Pleins Feux, Nantes, 2008.
Djenar Maesa Ayu, A travers les glaces, (trad. E. Naveau), coll.du Banian,
2011.
« Le propre des textes autobiographiques indonésiens », in F.-J. Ruggiu
(dir.), Les usages des écrits du for privé, Peter Lang, 2013, p. 77-107 et «
Les parcours autobiographiques d’Ajip Rosidi », E. Lozerand (dir.), Drôles
d’individus, Klincksieck, 2014, p. 467-483.
« La littérature indonésienne » avec E. Clavé et M. Zaini-Lajoubert, in
R. Madinier (dir.), L’Indonésie contemporaine, Les Indes savantes (à
paraître)
Choix de poèmes bilingues, Horison, Jakarta,
2015 et Eka Kurniawan, L’homme-tigre, Sabine Wespieser, 2015
Haji Hassan Mustapa (1852-1930), qui s’inspira de la Wujudiyyah. Ajip Rosidi est revenu
depuis à une forme d’islam qu’il juge plus orthodoxe. Comme de nombreux Indonésiens, il
a composé des poèmes à l’occasion de son pèlerinage mecquois
2 - Les cavaliers de lumière (hommage aux victimes du Printemps noir en Kabylie) : extraits
du montage poétique du même titre avec et pour certains blessés venus se soigner en
France en 2001.
Le «Printemps noir» est le nom donné aux émeutes qui ont éclaté en Kabylie (nord de
l’Algérie), après l’assassinat d’un des leurs (Massinissa Guermah) dans une gendarmerie,
et leur répression par l’armée algérienne entre avril 2001 et avril 2002. Le nombre de
morts parmi les manifestants s’élève à 126 et le nombre de blessés à plus de 5000 dont un
certain nombre sont restés handicapés à vie.
Les cavaliers de lumière est un spectacle en français écrit par Farida AÏT FERROUKH qui
raconte, écrit-elle, «l’histoire douloureuse d’une pousse guerrière qui livre combat au feu
avec la pierre. Une mémoire contée en chants et en poésie contre l’oubli, contre le déni.»
3 - Chant mystique berbère de Kabylie intitulé «Tizi» : Ancien chant spirituel, transmis de
génération en génération et exécuté lors des hadra - célébration collective ayant lieu
le jeudi soir où se mêlent chants, musiques et danses de transes rituelles - dans les
zaouïas et certains lieux sacrés. Ce chant célèbre deux saints dont Cheikh Mohand (voir
supra) et un de ses contemporains (Cheikh Arab) ainsi que le parcours de tout initié et son
cheminement dans la voie mystique. Le refrain, lui, loue les errants spirituels (ssiyaha) et
les fous mystiques (lbudala) tout en invoquant le Prophète.
Stéphane Sawas
Stéphane Sawas est professeur des universités à l’INALCO, directeur du CERLOM et chargé
de cours à l’ENS. Ses travaux de recherche et de traduction portent principalement sur
la Grèce moderne et contemporaine. Il est l’auteur de l’anthologie Le Conseil de la
cloche et autres nouvelles grecques (éd. Rue d’Ulm, 2e éd. 2015, Médaille d’Or 2013 de
la Société Grecque des Traducteurs Littéraires).
Récitation de poésie
Inalco
CONTACTS :
Jean-Charles Coulon : [email protected]
Catherine Mayeur-Jaouen : [email protected]
Cyrielle Michineau : [email protected]
DÉTAILS ET PROGRAMME :
programme : http://majlis-remomm.fr
Mercredi 8
juillet 2015
à 19h00
« EL JARDIN OSCURO »
CHANTS D’ORIENT ET D’OCCIDENT
ET
Participants
Lachrimae consort
Philippe Foulon : direction musicale
Rachid Ben Abdeslam : Contre-ténor
Jasser Haj Youssef : violon oriental et viole d’amour
Joshua Lévitt : ney
Yacir Rami : oud
Benjamin Bédouin : cornet à bouquin, cornet muet
Philippe Foulon : lyra viol 1, vihuela
Sergio Barcellona : lyra viol 2
Philippe Le Corf : violone d’amour
Emer Buckley : épinette
Pierre Rigopoulos : percussions
vocale, le son est doux, plaisant à l’oreille, subtil, et toujours en harmonie avec le texte,
dont la poésie tantôt simple, tantôt savante, vise à toucher l’auditeur au plus profond.
Ce concert présente une variété de pièces arabes, mozarabes et espagnoles qui
Programme du concert
Liste des pièces et des instruments
Paroles
Tres Morillas
Muhieddine Ibn ‘Arabî naquit à Murcie en 1165 et mourut à Damas en 1240, il est une des
Paroles
Amchi Ya Rassoul (langue arabe)
Dans ce poème chanté principalement au Maroc, le poète se languit de la séparation et s’efforce
de la réduire en envoyant des messagers secrets à sa bien aimée Amchi ya rassoul, chant en zajal,
mi- savant mi- populaire, est tiré de Insiraf Qudam Jadid. C’est probablement le morceau le plus
populaire de toute la musique arabo-andalouse. Souvent chanté en chœur, il est ici proposé dans une
version pour soliste.
Messager accours vers mon bien –aimé
Par la grâce des pactes et des souhaits
Dites-lui que son absence a trop duré
Que des distances nous ont séparés ! Que Dieu puisse t’exaucer !
Le désir de nous retrouver
Dès lors, ennemis et jaloux seront bravés,
L’absence, quelle que soit sa durée
Le retour ne saurait tarder.
Réservé et si distant
Et accepte de me délaisser
Pourquoi es-tu si cruel ? Mes ennemis me narguent
Allons prier Dieu
Car c’est une heure heureuse
Paroles
Una matika de ruda : romance
Ce chant de mariage sépharade compte parmi les plus connus et les plus anciens (Andalousie, XIIe
siècle). Il se retrouve avec de nombreuses variations mélodiques dans presque toutes les colonies
sépharades; mais un élément de base reste immuable : la rue – une plante réputée écarter le
La , est une ce chant judéo espagnol, accompagné d’un double ensemble instrumental,
propose une sonorité mixte qui ancre ce chant dans la tradition arabo-andalouse et juive.
Au mois de Mars
Et mon âme s’assombrit
Par mal d’amour
Jeudi
9 juillet 2015
À 18h30
UN VILLAGE ANATOLIEN
Mahmut Makal, né en 1930, est un jeune instituteur qui
rassemble en 1950 les notes envoyées depuis deux ans à la
Projection organisée par
Timour Muhidine (INALCO) et titre d’Un village anatolien en 1963 dans la collection « Terre
Sara Yontan (BnF) Humaine ») qui va instiller le trouble jusque dans les plus
Film présenté par hautes sphères du gouvernement turc. Qui est donc l’auteur
Bige Berker de cette critique radicale de l’arriération des campagnes ?
Que penser du regard impitoyable et naturaliste de ce
villageois devenu enseignant ?
Au début des années 1990, la réalisatrice turco-belge
Bige Berker choisit d’interroger Mahmut Makal (il a alors
Bibliothèque
Dans le petit auditorium de la nationale de France
Bibliothèque nationale de France Quai François Mauriac, 75013 Paris
Gratuit avec inscription préalable obligatoire.
a formé 1308 institutrices et 15943 instituteurs en quatorze ans dont des écrivains et
penseurs connus.
Demirci (ou Demirdji)
Varl k
Revue littéraire et artistique qui continue de paraître sous le même titre sans
interruption depuis 1933. Elle a donné une grande place aux débats d’idées, à la
traduction de la littérature occidentale, aux débuts des courants littéraires turcs et
a publié ses écrits dans cette revue avant de les réunir dans un ouvrage deux ans
plus tard.
«onbe
BnF – Site François Mitterrand – Magasin [2004-6834 (1, 1933 –1011, 1991) et [4-Z-11915
(1012 -]
des classiques du cinéma turc des derniers trois quarts du 20e siècle, en dehors des stars
parviennent jusqu’à nos salles, comme Nuri Bilge Ceylan, ou des documentaires touristiques,
la Turquie en France, nous nous efforçons d’acquérir des documentaires traitant de l’histoire,
de la civilisation et des arts, notamment ceux produits pour la télévision turque, tout en
Contacts
Timour Muhidine (INALCO) : [email protected]
Sara Yontan (BnF) : [email protected]
Communiqué
TYPOGRAPHIAe ARABICAe
Du 15 juin au 8 août 2015
BULAC et galerie du Pôle des langues et civilisations 65 Rue des Grands Moulins, 75013
Paris
La Bibliothèque universitaire des langues et civilisations (BULAC), l’École des hautes études en sociales
(EHESS), le Groupement d'intérêt scientifique (GIS) Moyen-Orient et mondes musulmans, l’Institut
d’études de l’Islam et des sociétés du monde musulman (IISMM) et l'Institut national des langues et
civilisations orientales (INALCO) se sont associés pour organiser l’exposition TYPOGRAPHIAe ARABICAe
qui se tiendra, du 15 juin au 8 août 2015, dans la galerie du Pôle des langues et civilisations et les
salles de lecture de la BULAC.
La typographie de la lettre arabe, ce qui fait la matière même du texte, mérite d’être observée en elle-
même. La typographie, à l’instar de la calligraphie, possède une esthétique propre et une beauté
rigoureuse et précise que l’exposition TYPOGRAPHIAe ARABICAe se propose de mettre en lumière.
Cette exposition veut sensibiliser un large public à la vitalité de la création typographique actuelle des
pays d’écriture arabe, entre le Maroc et l’Iran, en s’inscrivant dans une perspective historique, en
particulier depuis le développement de l’imprimerie. Son objectif est de contribuer à rendre plus
visible un champ de la création encore méconnu malgré son dynamisme et son affirmation récente.
En partant du présent, dans la galerie du Pôle des langues et des civilisations, l’exposition propose au
visiteur de découvrir les travaux d’artistes, de graphistes et de typographes contemporains, en
mettant notamment à l’honneur Reza Abedini (Beyrouth) , c-album (Paris), Nadine Chahine (Francfort),
Mourad Krinah (Alger), Naji El Mir (Paris), Marco Maione (Paris), Iman Raad (New York), Bahia Shehab (Le
Caire) et Fenna Zamouri (Bruxelles). Le travail de ces créateurs traduit la réflexion actuelle autour de la
lettre arabe et l’innovation graphique qu’ils y apportent.
Cette partie contemporaine de l’exposition se poursuit dans les espaces de la BULAC, au rez-de-
chaussée de la bibliothèque où le parcours, en remontant le temps, dévoile au regard du visiteur une
sélection d’affiches produites dans les années 1970 et 1980. Simples et peu coûteuses à réaliser, elles
témoignent d'une période d’engagements politiques souvent marqués par le conflit israélo-
palestinien. D'une grande inventivité graphique, elles retiennent le regard par leur puissance
narrative et leurs couleurs.
« Moyen-Orient 1918-2015 :
de l’effondrement de l’Empire à l’effondrement des sociétés »
Docteur en histoire (EHESS, 1992) et en sciences politiques (IEP de Paris, 1994), Hamit
Bozarslan est directeur d‘études à l’EHESS. Auteur de plusieurs ouvrages sur la question kurde et
l’histoire de la Turquie, il s’est intéressé, au cours des dernières années, à la sociologie historique
et politique du Moyen-Orient. Il est l’auteur, notamment, d’Une histoire de la violence au Moyen-
Orient (Paris, La Découverte, 2008, traduit en espagnol en en turc, traduction arabe en cours),
Sociologie politique du Moyen-Orient (Paris, La Découverte, Khaldûn (Paris, CNRS Éditions,
2014) et Révolution et état de violence : Moyen-Orient 2011-2015, Paris, CNRS Éditions, 2015).
Hier dans sa conférence inaugurale Hamit Bozarslan nous a présenté un exposé magistral
et une analyse brillante de ce qu'il a appelé les trois cycles de changements majeurs de la région
du Proche et du Moyen-Orient en particulier des mondes arabes depuis le démembrement de
l'empire ottoman, brossant aussi le portrait des conflits et destructions actuelles. Mais peut on
comprendre les bouleversements récents et en cours, y compris les révolutions arabes et leurs
ondes de chocs, sans prendre en compte les interventions étrangères notamment américaines
depuis 2001 lorsque au lendemain des attentats du 11 septembre l’administration Bush a tenté
d’inventer une nouvelle géographie, "le Grand Moyen-Orient", qui comprendrait les pays arabes,
le Pakistan, l’Afghanistan, l’Iran, la Turquie et Israël.
Comment analyser et comprendre la naissance d'al Qaida et plus tard du groupe "Etat
islamique" Daech sans prendre en compte les jeux des grandes puissances internationales et leurs
alliées régionales?
Pour analyser les raisons de la disparition progressive des frontières qui délimitaient,
certes de façon arbitraire, des Etats-nations ou ce que Pierre Jean Luizard appelle l'échec des
Etats, il est certes crucial de prendre en compte le concept khaldounien du jeu des assabiyya c'est
à dire des groupes claniques ou tribaux qui confisque la citoyenneté. Seulement, cette disparition
annoncée n'est elle pas aussi l'une des conséquences des interventions étrangères soviétiques,
américaines, britanniques, françaises en Afghanistan, en Irak, en Libye qui ont provoqué
l'effondrement des Etats au-delà de celui des régimes de Saadam Hussein ou de Kaddafi?
Notons qu'une autre conséquence des interventions américaines en Afghanistan et en Irak
est d'avoir débarrassé le régime iranien de deux de ces principaux ennemis. Cela a aussi permis
de consolider l'implication de l'Iran dans des conflits régionaux (en Irak, en Syrie et au Liban) et
de favoriser son retour en tant que puissance régionale à l'issue des négociations sur le nucléaire
cherchant la part du pouvoir que ce pays a exercé dans l'histoire, pour reprendre Ibn Khaldoun.
L'Arabie saoudite et Israël, ces deux alliés des Etats-Unis et de la France, redoutent ce
retour en force de l'Iran 36 ans après la révolution, qu'ils qualifient de "menace iranienne"
dénonçant ses "visées hégémoniques". Face à ce retour programmé, le Conseil de Coopération du
Golfe s’affirme de plus en plus sur le plan économique, politique mais aussi militaire.
Cette rencontre tente d’examiner les types de connaissances qui sont produites par des
chercheurs et des journalistes spécialisés. Quels sont les similitudes et les différences entre leur
travail de terrain et leur vécu sur celui-ci ainsi que leurs analyses; quelles sont les références
qu’ils mobilisent, et comment la question de la temporalité est abordée.
Les intervenants
Christophe Ayad, chef du service international du journal Le Monde, Lauréat du prix Albert
Londres en 2004. Il a publié en 2002 une Géopolitique de l'Égypte aux Éditions Complexe et
Egypte c'est le rêve, 2010.
Laurent Bonnefoy, chargé de recherche CNRS, chercheur CERI. Mouvements sociaux dans la
péninsule arabique - Scène politique yéménite. - Salafism in Yemen. Transnationalism and
Religious Identity, Londres/New York, Hurst/Columbia University Press, 2011. -Jeunesses
arabes. Du Maroc au Yémen : loisirs, cultures et politiques (en co-direction avec Myriam
Catusse), Paris, La Découverte, 2013.
Claude Guibal, grande reporter, elle a été corresponante de la radio France en Egypte pendant
15 ans. Elle est actuellement cheffe du service étranger de la rédaction de France Culture. Elle a
publié L'Egypte de Tahrir : anatomie d'une révolution, Seuil, 2011.
Jean-Pierre Perrin, est grand reporter au quotidien Libération. Il est aussi écrivain.
En 2002, il publie Jours de poussière : choses vues en Afghanistan qui a remporté le grand prix
des lectrices de Elle 2003 dans la catégorie Documents. En 2003, il fait paraître Les Rolling
Stones sont à Bagdad : Irak, dans les coulisses d'une guerre racontant la Guerre d’Irak et la fin du
régime de Saddam Hussein et La mort est ma servante sur la Syrie, 2013, Fayard.
Agnès Rotivel, Grande reporter au quotidien La Croix, elle est notamment spécialiste des
minorités religieuses et a publié entre autre une série d’articles de reportages sur les minorités
religieuses en Iran, en Irak ou en Syrie.
Organisée par Bernard Heyberger (EHESS) entre les organismes parisiens de diffusion de la
connaissance sur le monde musulman :
Pascal Buresi, Institut d’études de l’Islam et des sociétés du monde musulman (IISMM),
Jean-Paul Chagnollaud, Institut de Recherche et d’Etudes Méditerranée et Moyen Orient
(IREMMO),
Elsa Jacquemin, Institut des Cultures d’Islam (ICI),
François Zabbal, Institut du Monde Arabe (IMA)
L’utilité de la recherche sur les mondes musulmans ne paraît pas toujours évidente à l‘opinion
publique ou à la classe politique. Les chercheurs eux-mêmes peuvent parfois revendiquer une
certaine inutilité de leur travail. Car produire du savoir, ce n’est pas la même chose qu’être dans
l’action et dans le pouvoir. Le temps des médias, de la politique et de l’opinion publique n’est pas
celui de la recherche, et les questionnaires des uns et des autres ne coïncident que rarement. Cela
ne se passe pas toujours bien, mais cette interaction est nécessaire.
A cela il faut ajouter que depuis le 7 janvier 2015, la conjoncture a changé, car les événements ont
mis en lumière le besoin de connaître et de répondre aux idées simplistes soit des extrémistes
islamistes, soit des islamophobes. Mais il se peut que cet engouement pour la recherche retombe
prochainement.
Entre les chercheurs et le « grand public » existent des relais, notamment des institutions qui ont
dans leur mission de diffuser du savoir sur le monde musulman, et qui, depuis le 7 janvier, sont
spécialement sollicités par les responsables politiques ou administratifs et par les médias.
Cette table ronde organisée et animée par Bernard Heyberger, ancien directeur de l’Institut
d’études de l’Islam et de sociétés des mondes musulmans, historien, directeur d’études à l’EHESS
et à l’EPHE, a réuni des responsables et représentants de quatre de ces relais parisiens,
représentant des structures très différentes par leur statut, leurs moyens et leur mode d’action,
mais ayant tous les quatre cette mission de diffuser des connaissances, d’instaurer le débat sur des
questions concernant les musulmans et l’islam.
L’Institut du monde arabe (IMA ) était représenté par François Zabbal, un des responsables de
l’animation culturelle à l’IMA. Rédacteur en chef de la revue de l’IMA Qantara et animateur des
cafés littéraires, il a longtemps animé les jeudis de l’IMA, rendez-vous qui donnent la parole à
des intellectuels et des universitaires. Mais les activités de l’IMA sont protéiformes, et beaucoup
de chercheurs ont eu l’occasion d’y intervenir .
L’Institut des cultures de l’Islam (ICI) était représenté par sa directrice, Elsa Jacquemin. Il s’agit
d’une institution plus récente que l’IMA, visant son intégration dans un quartier, le XVIIIe
arrondissement, et portée sur l’action artistique, donc sans doute moins connue dans la
communauté académique.
L’Institut de Recherche et d’étude sur la Méditerranée et le Moyen Orient (IREMMO ) était
représenté par Jean-Paul Chagnollaud, universitaire, professeur de sciences politiques, directeur
de revue, et directeur de l’IREMMO. Il s’agit d’une structure associative loi 1901, qui axe son
activité sur le partage des connaissances et le débat portant sur la Méditerranée et le Moyen-
Orient
L’Institut d’études de l’Islam et des sociétés du monde musulman (IISMM) était représenté par
Pascal Buresi, son directeur, Directeur de recherche au CNRS et Directeur d’études à l’EHESS,
historien médiéviste. L’IISMM a été fondé en 1999 avec un rattachement à l’EHESS. Parmi ses
missions figure la diffusion du savoir sur le monde musulman, en rapport étroit avec la recherche.
Chacun a présenté rapidement son institution. Il est évident qu’entre l’IMA et son budget de 12
millions d’Euros annuels sans compter le mécénat, et l’IISMM (60 000 Euros annuels mis à part
les frais de personnel et les locaux), la capacité d’action n’est pas la même. Mais ce n’est pas
qu’une question de budget : avec 200 000 Euros annuels (qui payent le personnel), l’IREMMO,
institution modeste, dispose d’une capacité d’action plus grande que l’IISMM parce que la
structure associative confère une souplesse que l’appartenance à un organisme universitaire
comme l’EHESS n’autorise pas. Alors que la vocation politique de l’IMA et de l’ICI est évidente,
avec un lien étroit avec la diplomatie française dans le premier cas, avec la Ville de Paris et les
instances municipales du 18e arrondissement de Paris dans le second, l’IISMM bénéficie de
l’autonomie de la structure universitaire, mais court le risque de se fait oublier par les sphères du
pouvoir. L’IREMMO pour sa part s’est constitué sur l’idée de décloisonner le monde
universitaire, en l’associant à ceux de la diplomatie et de la presse.
La définition du champ de connaissance visé varie aussi d’une institution à l’autre. Ainsi, l’IMA
se consacre au « monde arabe », ce qui exclut d’emblée l’Iran, qui proteste par exemple lorsqu’il
est question des « sciences arabes ». Tandis que l’IISMM s’enorgueillit d’avoir contribué, depuis
sa fondation, à faire sortir la représentation de l’islam en France du cadre strictement arabe, en
l’ouvrant sur le monde turc, et au-delà, sur les islams asiatiques. A partir de l’affaire du voile
islamique (1989), la question s’est posée aussi, pour l’IMA (institution la plus ancienne des
quatre), de sa prise en compte de l’immigration arabe en Europe et des questions que l’islam pose
à la société française. L’ICI est confronté à la très grande diversité de la population du quartier, et
donc à des islams, connectés aux Etats-Unis et/ou à Dakar, à Rabat et/ou à Istanbul.
Les quatre institutions se retrouvent autour de leurs formes d’action et, en partie, du public visé :
conférences publiques et débats, expositions, formation continue à destination des entreprises, des
administrations et des particuliers. Les expositions de l’IMA sont prestigieuses, mais presque
toujours déficitaires. Celles de l’ICI constituent le cœur de son activité, la diffusion visuelle
d’œuvres artistiques étant un de ses principaux moyens d’action. Le public visé est dans les quatre
institutions en grande partie composé d’un milieu instruit (et assez âgé) consommateur de biens
culturels, la question de gagner d’autres publics se posant à tous. Mais dans le cas de l’ICI, son
implantation dans un quartier populaire à forte composition musulmane lui offre une opportunité
d’échange et de mixité plus grande. La structure des locaux, qui associe les espaces culturels de
l’ICI à une mosquée gérée par une association en fait un laboratoire exceptionnel.
Les cours de langue arabe rencontrent un grand succès, aussi bien à l’ICI qu’à l’IMA, compensant
sans doute la frilosité de l’offre de l’Education nationale dans ce domaine. Mais à l’ICI, il y a
aussi une demande pour d’autres langues, notamment africaines. L’IISMM a une importante
activité de formation continue à destination des administrations publiques (police, justice,
enseignement), tandis que l’IREMMO adresse ses formations davantage aux militants associatifs
et aux particuliers. Le monde de l’entreprise paraît difficile à atteindre par la formation continue.
Dans l’ensemble, tous les universitaires engagés dans des programmes de formation et de
diffusion s’en réjouissent, et estiment l’expérience extrêmement fructueuse, notamment par
l’ouverture qu’elle leur offre en direction de la « société civile ». Les questions du public à la fin
de la table ronde ont en particulier montré l’intérêt des jeunes chercheurs pour ce type d’activités,
sur lesquelles ils manquaient généralement d’informations. Des questions concrètes, comme la
possibilité d’accueillir des doctorants en alternance avec des contrats spécifiques, dans ces
institutions, ont été posées.
Table-ronde Bibliothèque
Le Moyen-Orient et les mondes musulmans en bibliothèque(s) :
collecter comment et pour qui ?
de 16h00 à 18h00
Organisée par Sara Yontan (BnF) et animée par Éric Vallet (Université Paris 1 Panthéon-
Sorbonne)
Dominique Akhoun-Schwarb (School of Oriental and African Studies (SOAS),
Olivier Dubois (Maison méditerranéenne des sciences de l’homme (MMSH),
Francis Richard (Bibliothèque universitaire des langues et civilisations (BULAC),
Anaïs Salamon (Mc GILL),
Philippe Vézie (Institut français du Proche-Orient (IFPO),
Sara Yontan (Bibliothèque nationale de France (BnF).
Compte rendu compilé par Eric Vallet, avec la collaboration de Juliette Honvault (CNRS,
IREMAM).
1. Présentation de la table-ronde19
Héritières pour certaines d’une histoire prestigieuse, les bibliothèques françaises contenant
des fonds spécialisés sur le Moyen-Orient et les mondes musulmans sont à l’image de l’ensemble
du champ, à la fois fortement déséquilibrées dans leur répartition, au profit de Paris intra-muros,
et éclatées. Les dernières décennies ont certes été marquées depuis les années 1980 par plusieurs
projets d’envergure comme la constitution de la médiathèque de la Maison méditerranéenne des
Sciences de l’Homme (MMSH) à Aix-en-Provence, de la bibliothèque de la Maison de l’Orient et
de la Méditerranée (MOM) ou de la bibliothèque Diderot à Lyon, d’une grande bibliothèque
généraliste à l’Institut du monde arabe, ou récemment encore la création de la BULAC, qui
rassemble les fonds de diverses bibliothèques parisiennes jusque-là dispersées, et demain le grand
équipement documentaire du campus Condorcet à Aubervilliers.
Ces entreprises, qui mêlent à la fois des préoccupations scientifiques souvent ambitieuses,
et un souci de rationalisation des ressources dans des contextes budgétaires très contraints, n’ont
pas empêché le développement de certaines tendances préoccupantes : la raréfaction des
bibliothécaires spécialisés, la faiblesse des achats effectués en langues vernaculaires (arabe, turc,
persan), la déshérence de certains domaines (droit, économie, islamologie) que ne viennent pas
pallier la multiplication, souvent désordonnée, des ressources électroniques.
Dans le sillage du Livre blanc des études françaises sur le Moyen-Orient et les mondes
musulmans qui a dressé un premier état des lieux rapide des bibliothèques, en le résumant par la
formule choc “des héritages très riches, des moyens dérisoires”, une grande table-ronde a été
organisée à la Bibliothèque nationale de France lors du congrès du GIS Moyen-Orient et mondes
musulmans, avec pour but d’engager une large discussion sur la situation et l’avenir des
bibliothèques et médiathèques françaises détenant des fonds spécialisés dans notre domaine, en
s’intéressant en particulier à quatre questions, qui se recoupent en grande partie :
19
Texte rédigé par Eric Vallet et Sara Yontan pour l’appel à contribution de la table-ronde.
Ces questions s’adressaient d’abord aux 6 professionnels de bibliothèque qui ont pris la parole à la
table-ronde et qui représentaient la diversité d’institutions ayant des fonds spécialisés dans le
domaine du Groupement d’intérêt scientifique (GIS), avant un débat avec les usagers, c'est-à-dire
les chercheurs, les enseignants et les étudiants présents dans l’assistance.
Sara Yontan a présenté tout d’abord, à partir de quelques diapositives, l’organisation des
collections portant sur le Moyen-Orient et les mondes musulmans à la BnF, réparties entre
départements spécialisés et départements thématiques pour les documents en langues
vernaculaires. Elle a présenté également les divers modes d’entrée de tous les supports dans toutes
les langues.
20
Nous tenons à remercier Sara Yontan pour la mise à disposition de ses diapositives et la relecture du texte.
Le personnel spécialisé (4 pour l’arabe, 2 pour le turc, 1,5 pour l’hébreu) est rattaché aux
département des Manuscrits et département Littérature et art qui conservent la majorité des
documents en provenance des pays du Moyen-Orient.
Sara Yontan a ensuite donné des repères historiques sur la généalogie des fonds du Proche Orient
en rappelant la vocation encyclopédique de la BnF et l’étendue de ses collections, tout en mettant
en regard les ordres de grandeur relatifs aux aires culturelles et linguistiques de la région (2 diapos
suivantes) :
Enfin, Sara Yontan a passé rapidement en revue les principaux supports de la visibilité des
collections en arabe, turc, persan et hébreu :
• Faiblesse des budgets pour les langues orientales ; difficultés liées à la veille
documentaire notamment pour l’arabe et problèmes relatifs au choix et à la formation du
personnel qualifié spécialisé ;
• Valorisation limitée à des collections « remarquables».
Sara Yontan a terminé par attirer l’attention sur fait qu’il n’y avait plus d’acquisitions en persan à
la BnF depuis plus dix ans et que le service des Littératures orientales avait été absorbé dans un
nouveau groupement intitulé « Littératures du monde » en 2014.
3. BULAC
Intervention de Francis Richard, directeur scientifique de la Bulac jusqu’en 2014.
Cette intervention s’est plus particulièrement concentrée sur la question des fonds relatifs au
monde iranien dans les bibliothèques françaises. Les principales collections se trouvent à Paris, à
la BnF (2600 manuscrits persans) et à la BULAC, qui centralise depuis 2011 des fonds d’origine
diverses. La BULAC compte 43 000 ouvrages et revues, dont 37 000 ouvrages en magasin, et
acquiert environ 300 titres/an, par l’intermédiaire d’une librairie qui s’approvisionne à la Foire du
Livre de Téhéran, principale source de repérage des ouvrages et d’achats, que vient compléter le
dépouillement des sources bibliographiques. La collaboration avec l’Institut français de
recherches en Iran (IFRI), auparavant importante pour le repérage des ouvrages, est en sommeil
depuis un certain temps. Il n’y a plus de collaboration avec Tachkent, puisque la bibliothèque de
l’IFEAC (aujourd’hui en caisses à l’Ambassade de France à Tachkent) a fermé. À ces achats
viennent s’ajouter des dons de spécialistes ou legs (par exemple, le don récent de la bibliothèque
de R. Lazard à la BULAC, ou du fonds de la BN iranienne).
En dépit de l’enrichissement continu du fonds, il faut noter les limites de cette politique
d’acquisition pour l’édition en dehors de l’Iran : ce qui paraît en Afghanistan ne fait l’objet
d’aucune collecte et il n’y a pas de catalogage des livres pashtous ; dans le cas du Tadjikistan, la
collecte n’est pas systématique. La politique d’acquisition est en revanche plus systématique pour
l’Inde et le Pakistan.
Quelques problèmes structurels à noter pour l’accès aux publications :
-‐ L’éparpillement de l’édition dans le monde iranien ;
-‐ La disparition des bibliographies nationales ;
-‐ Les faibles tirages des ouvrages : il est d’autant plus difficile d’identifier les ouvrages
qu’ils disparaissent rapidement du marché ;
-‐ La grande volatilité de l’édition numérique.
Par ailleurs se pose la question des limites disciplinaires de l’acquisition (question de la politique
documentaire de la BULAC). Actuellement, la couverture s’étend à la langue et la philologie, à la
littérature et à l’histoire. Dans l’idéal, il faudrait développer tous les domaines, même l’histoire de
l’art, le cinéma, les arts populaires et la musique. Fournir la documentation pour les programmes
de recherche et les doctorats en cours est un autre défi à relever.
En ce qui concerne le catalogage, il est presque complet en persan, mais beaucoup de dons n’ont
pas encore été traités.
Enfin, Francis Richard a formulé le souhait que le signalement des nouvelles acquisitions en ligne
soit amélioré, et que le partage documentaire soit affiné à l’échelle européenne, avec les
bibliothèques spécialisées britanniques, allemandes et anglaises.
4. Médiathèque de la MMSH
Intervention d’Olivier Dubois, Responsable de la bibliothèque et du Département Monde
occidental et études thématiques à la médiathèque de la MMSH Aix-en-Provence21.
Olivier Dubois a commencé par présenter la médiathèque de la MMSH : 150 000 volumes de
monographies, dont 45 000 en arabe, 7 000 heures de ressources sonores numérisées, plus de
100 000 photos et des archives de chercheurs de renom... dans un environnement documentaire
exceptionnel : à la MMSH elle-même, deux autres pôles documentaires, la Bibliothèque
d’Antiquité d’Aix, avec quelque 50 000 volumes, 1 000 collections de périodiques et la
Bibliothèque de Préhistoire, avec beaucoup moins de volumes (une dizaine de milliers), mais un
énorme travail de dépouillement des revues spécialisées. A côté de cela, il faut mentionner la
Bibliothèque universitaire possède un CADIST sur la colonisation française et l’Empire ottoman ;
les archives d’Outre-Mer qui ont une bibliothèque de 120 000 volumes ainsi que des archives
extrêmement importantes pour les collègues d’Algérie ; la Chambre de commerce et d’industrie
de Marseille qui a un patrimoine très important d’archives commerciales et de photos portant sur
les relations de Marseille avec la Méditerranée. On voit donc que l’ensemble Aix-Marseille
représente un pôle ayant une vraie profondeur documentaire quand on travaille sur le monde arabe
et musulman.
21
Nous tenons à remercier Olivier Dubois qui a envoyé les notes préparatoires de son intervention, largement
reprises ici.
Plutôt que de parler du problème de la conservation des collections, Olivier Dubois a souhaité
insister sur celui de leur continuité. En effet, il est évident qu’avec la réorientation des priorités
des tutelles (CNRS et Universités) vers le numérique, la médiathèque de la MMSH a comme tout
le monde des problèmes de stockage, problèmes qui deviennent criants, et préjudiciables au bon
fonctionnement du fait du travail supplémentaire qu’ils occasionnent. Les ressources numériques
ne sont que très rarement des occasions de récupération de place, puisque se pose la
problématique de la pérennité de leurs données : le doute sur la pérennité peut venir de pratiques
commerciales encore mal gérées (arrêter un abonnement peut équivaloir à perdre l’accès aux
années pour lesquelles la médiathèque avait payé), mais également à des fournisseurs (centres de
recherche par exemple) susceptibles de disparaître, sans parler des problèmes de format et autres
bien sûr… La publication papier était acquise ; l’accès aux ressources numériques peut être très
facilement perdu. Et l’on sait le caractère essentiel pour la recherche d’une collection de
périodique complète par exemple…
Olivier Dubois a souligné également qu’il fallait faire attention à ne pas conditionner les
acquisitions au fait que la place devienne rare : la perte de dynamique peut signifier à terme l’arrêt
de mort d’une bibliothèque de recherche ; et ce type d’« autocensure » n’a jamais contribué à
mobiliser les tutelles sur les problèmes des bibliothèques, puisque cela laisserait entendre que les
bibliothèques pourraient résoudre les problèmes en acquérant de moins en moins d’ouvrages.
22
Nous tenons à remercier Dominique Akhoun-Schwarb qui a envoyé les notes préparatoires de son
intervention, largement reprises ici.
Fondée en 1917 en collectant des fonds anciens (à partir des 5 bibliothèques universitaires de
Grande-Bretagne), la bibliothèque de la SOAS vise avant tout à répondre aux besoins de la
recherche. Sur un fond d’1,3 millions des ouvrages, les collections portant sur le Moyen-Orient et
l’Islam représentent 12 %, soit environ 150 000 ouvrages, dont de nombreux ouvrages dans les
langues vernaculaires enseignées à la SOAS.
Dominique Akhoun-Schwarb a évoqué en introduction la réflexion en cours à la SOAS, sur les
idéologies sous-jacentes à la constitution des collections au cours de l’histoire du XXe siècle. Le
bibliothécaire ne peut éviter de se poser la question de la représentation de l’autre, des peuples et
des cultures du Moyen-Orient et de réfléchir sur ses effets dans l’orientation des acquisitions et du
classement des livres.Elle a rappelé la tenue, en février 2012, du colloque annuel du consortium
des Etudes Africaines et Asiatiques (Consortium for African and Asian Studies (CAAS)), où des
chercheurs et enseignants de toute l’Europe - y inclus de nombreux intervenants de l’INALCO- se
sont penchés sur la question de la représentation de l’Autre dans les médias, cinémas et langues de
l’Afrique et de l’Asie (Making a Difference: Representing/Constructing the Other in
Asian/African Media, Cinema and Languages, 16-18/02/2012, SOAS, Université de Londres.
Résumés des interventions disponibles en ligne :
https://www.soas.ac.uk/centresoffice/events/making-a-difference/file74103.pdf).
Plus récemment, en juin 2014, la SOAS a invité son personnel à participer à une séminaire2 sur
les questions de races, de racisme et de la représentation de soi-même et de l’autre, au niveau
individuel et institutionnel, dans l’optique de bousculer les idées reçues et non-critiquées, de
révéler les biais inconscients et d’introduire plus de compréhension entre collègues et envers le
public d’étudiants et de chercheurs internationaux (Re-presenting SOAS : an event discussing
representation, race and racism. Facilitated by Professor Gus John and Professor Ann Phoenix.
SOAS, University of London, 06/06/2014). Cette initiative a rencontré un grand succès. Ce
séminaire a notamment permis à Dominique Akhoun-Schwarb de mieux mettre en contexte
l’histoire des collections de la SOAS portant sur ou provenant du Moyen-Orient et des mondes
musulmans. Elle a rappelé la devise de la SOAS « Knowledge is power », et sa charge ambigüe :
de quel savoir parle-t-on ? Et comment et sur qui s’exerce ce
pouvoir acquis par cette connaissance ?
Pendant ses vingt-cinq premières années, la SOAS a eu pour mission l’enseignement et la
recherche sur les sujets classiques de l’orientalisme, principalement l’histoire, les langues, les
littératures et les religions des trois grandes traditions de l’Inde, de la Chine et de l’Islam. Les
collections moyen-orientales accumulées durant la période allant de 1916 à 1949 (date à laquelle
fut créé le département d’anthropologie, suivi en 1963 par le département d’économie et de
politique), reflètent les études orientalistes classiques qui étaient poursuivies alors à la SOAS, la
littérature critique étant dominée par les orientalistes occidentaux.
En entrant dans l’ère postcoloniale, les acquisitions en bibliothèque de la SOAS se sont tournées
plus franchement vers littérature secondaire en langue vernaculaire, les orientalistes occidentaux
ne détenant plus le monopole de la parole et de l’éxégèse de la culture des pays du moyen-Orient.
Ce mouvement s’accentue de nos jours avec l’apparition de collections de matériaux éphémères
(posters ; blogs ; etc.), certaines bibliothèques tentant de capturer les productions les plus
immédiates et les moins distendues possibles par le filtre eurocentrique.
Les éditeurs au Moyen-Orient commencent par ailleurs à envisager les bibliothèques européennes
comme marché potentiel : il ne s’agit plus seulement de fournir les mêmes livres distribués dans
leur pays de publication - sur demande des bibliothèques européennes - mais de devancer et
d’adapter leur offre au public particulier des universités européennes. Mais ce n’est pas encore
gagné : beaucoup de dialogue est encore nécessaire pour harmoniser les attentes des uns et des
autres. Les plateformes telles que le colloque annuel du MELCom International permet à ces
différents acteurs de se rencontrer et échanger d’égal à égal l’état des attentes et des espoirs de
part et d’autre.
La sélection et l’acquisition des ouvrages (1500 titres / an pour le MO) suit des processus très
différents au Royaume-Uni, puisqu’il n’y a pas d’obligation de passer par un marché public. Mais
peu de ressources humaines (1 personne spécialisée) et pas de participation aux foires du livre. Il
existe une Collection Development Policy (charte documentaire) mise en place en 2011, et révisée
continuellement selon les nouveaux cours et nouveaux chercheurs. Les suggestions d’achat
viennent beaucoup des chercheurs eux-mêmes (50% des étudiants viennent de l’étranger, qui sont
sollicités, comme les chercheurs), de la veille documentaire (listes des fournisseurs, « alertes »
éditeurs, blogs littéraires , carnets scientifiques, site de revues des livres et thèses qui permet de «
suivre » un chercheur intéressant et ses publications, listes de discussions académiques
(Adabiyat ; Sociology of Islam ; Centrasia, etc.) et échanges de trouvailles sur Twitter et
Facebook et autres réseaux sociaux qui souvent permettent d’autres trouvailles inopinées).et des
listes bibliographiques utilisées dans les cours. Dominique Akhoun-Schwarb a souligné l’aide
précieuse que représentent les suggestions des étudiants et chercheurs pour l’acquisition éclairée
d’ouvrages de qualité, avec une priorité aux ouvrages à teneur académique. La section dont elle
s’occupe recouvrant plus de 110 langues et dialectes, et la publication éditoriale dans les pays du
Moyen-Orient ayant connu une énorme expansion, la sélection des ouvrages ne pourrait se faire
sans cet apport.
Pour Dominique Akhoun-Schwarb, cette collaboration permanente entre étudiants, chercheurs et
bibliothécaires est une façon de rejoindre la devise de la SOAS, mais en lui donnant un sens plus
socratique : knowledge is power, la connaissance c’est le pouvoir, et en l’occurrence se connaitre
soi-même est le vecteur fondamental à toute démarche d’indépendance intellectuelle et conduit
notre pouvoir d’agir pour le mieux.Pour elle, le rôle de la bibliothèque est de donner les moyens
aux étudiants et chercheurs d’éclairer toutes les facettes de leur histoire afin de pouvoir se diriger
de manière le mieux informée possible vers leurs propres conclusions.
Jusqu’à présent les collections en langues vernaculaires ont bénéficié de budgets relativement
importants. Les études sur l’aire moyen-orientale attiraient suffisamment d’étudiants pour justifier
une généreuse allocation budgétaire. Toutefois, une évolution notable s’est produite au cours des
derniières années, avec la baisse croissante du nombre d’étudiants entreprenant des études de
langues conjointement avec leurs études d’économie, de droit, d’histoire ou de sciences des
religions sur cette aire géographique, et donc demandant des ouvrages dans ces langues
vernaculaires. Cette tendance a été contrecarrée ces dernières deux années par la remise en place
de modules de langue obligatoires. En tant que bibliothèque de recherche nationale, et pour
répondre aux besoins de ses enseignants –chercheurs, la bibliothèque de la SOAS a toutefois
continué d’acquérir les ouvrages dans ces langues. Outre les difficultés de sélection, rendues
difficiles par le boom éditorial, la bibliothèque a dû faire face à un énorme problème de place :
depuis la fin des années 1990, la biblio est pleine et 1/4 de ses collections en libre-accès ont dû
être relogées dans un dépôt. Ce qui ne devait être qu’une solution temporaire s’est transformé en
situation pérenne. L’accent est donc mis sur le désherbage (horrible gros mot pour le
collectionneur qui veille au fond de chaque bibliothécaire), et la priorité accordée au format
électronique sur les imprimés. Ceci est particulièrement vrai pour les exemplaires multiples et les
périodiques en langue anglaise. En raison de la faiblesse de ressources électroniques (ebooks, e-
périodiques) en langues moyen-orientales, il reste impératif d’acquérir ces titres sur format papier
malgré le manque de place.
De fait, une question importante actuellement porte sur l’acquisition des ressources électroniques
en langues vernaculaires (notamment arabe ou persan, comme al-Manhal ou Dâr al-ma‘rifa) :
l’offre est limitée à cause de difficultés techniques (licences d’utilisation, encodage des langues),
mais aussi de problèmes liés au respect de la propriété intellectuelle. Plus largement, la pertinence
des ressources offertes, d’abord destinées aux étudiants du Moyen-Orient reste à prouver.
Concernant la visibilité et l’accessibilité des collections, Dominique Akhoun-Schwarb a souligné
le fait que la majorité des collections de la bibliothèque de la SOAS soient en accès libre pouvait
donner l’illusion d’une grande visibilité. Il existe en vérité de nombreuses zones d’ombres : trois
collections sont particulièrement peu visibles :
1) les collections plus anciennes (antérieures l’aménagement de la bibliothèque dans ses locaux
actuels à Russell Square en 1973) : environ 15 à 25% de ces collections ne peuvent être
découverts qu’au travers du catalogue sur fiches cartonnées numérisées. En raison de la faiblesse
de la reconnaissance optique de caractères utilisée lors de leur numérisation, la recherche n’est
vraiment efficace que sur auteur ou titre de périodique.
2) Les arriérés de catalogage, en grande partie accumulés à cause de la masse des dons reçus et du
manque relatif de moyen humains pour les traiter, surtout si les dons sont en langues
« mineures ».
3) Les collections de manuscrits (environ 2 800) ne figuraient jusqu’à récemment que sur
catalogue de fiches papier. Ils sont en passe d’être intégrés dans le catalogue en ligne de la section
Archives et Collections Spéciales. Les manuscrits moyen-orientaux (de langue arabe, persane et
turque) sont toutefois mieux repérables puisqu’ils sont en passe d’être tous recensés dans le
catalogue national des manuscrits en écriture arabe Fihrist.
Philippe Vézie a souligné en particulier les contraintes liées au caractère multi-site de l’IFPO, très
dépendant du contexte politique dans la région. Au cours de ses fonctions entre 2009 et 2015, il a
ainsi dû fermer la bibliothèque de l’IFPO Damas en juillet 2011, tout en développant de nouvelles
collections dans les antennes anciennes de Beyrouth et Amman, ou nouvelles de Jérusalem (400
ouvrages) et Irbil (1 000 ouvrages).
L’IFPO acquiert chaque année 2000 ouvrages environ, mais un certain nombre de ces ouvrages
sont acquis en trois exemplaires pour les différentes bibliothèques. Les acquisitions se font par
achat auprès d’un libraire partenaire de la médiathèque ; sur les foires du Livre du Caire et de
Beyrouth ; ainsi que dans le cadre de la politique d’échange, qui représente entre 25 et 30 % des
acquisitions).
Philippe Vézie a conclu son intervention en évoquant le projet de développement d’une
cartothèque numérique (12 000 cartes), en collaboration avec la MOM de Lyon.
8. Débat
Un bref débat a suivi ces différentes interventions. Il a porté notamment sur les instruments
permettant l’acquisition des ouvrages (les bibliographies nationales étaient rarement exhaustives
autrefois) ; sur les modes d’interrogation des catalogues de bibliothèques (en arabe ou en
translittération ?) ; sur les problèmes de formation des usagers ; sur les délais de mise à
disposition des ouvrages nouvellement acquis.