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Légendes inventées et histoires presque vraies
Légendes inventées et histoires presque vraies
Légendes inventées et histoires presque vraies
Livre électronique154 pages2 heures

Légendes inventées et histoires presque vraies

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À propos de ce livre électronique

En plus d'histoires parfois humoristiques, parfois satiriques, il y en a aussi sur des sorcières, loups garous, fantômes et même sur le diable en personne...


Voici 12 histoires qui sont tirées de mon imagination, parfois par des anecdotes que quelqu’un m’a racontées un jour, par exemple comme dans « Le vieil homme sur le quai » quand j’avais entendu parler des pierres de l’ancien manoir qu’on avait utilisées pour construire le quai. Ou encore pour « L’eau du curé » quand on avait constaté que le cimetière avec le temps s’était beaucoup trop rapproché du puits du presbytère. D’autres fois, il s’agit de faits vécus par des gens de ma connaissance ou par moi-même.
Le tout transposé dans d’autres époques et d’autres lieux et agrémenté d’humour, de réflexion et de l’observation des travers et des qualités de mes contemporains.


Plongez dans ces 12 petites nouvelles pour en apprendre davantage sur les légendes du Québec !


À PROPOS DE L'AUTEURE


Née le 4 avril 1945 dans la région de Québec, Françoise Pascals a su dès l’âge de 4 ans qu’elle voulait faire sa vie dans le monde des arts. Influencée par les goûts de sa famille où la sculpture et la peinture étaient omniprésentes, elle commence à peindre vers l’âge de 14 ans. Elle étudie quelques années à l’École des Beaux-Arts de Québec et fait de la peinture sa carrière. Cependant, c’est également à un très jeune âge, dès qu’elle a su écrire, qu’elle s’est intéressée à cette pratique et a caressé l’idée d’écrire aussi un jour. Après maints essais et abandons, elle remet ce projet à plus tard.
Ce n’est qu’en 2018 que ce projet d’écriture commence à voir le jour. C’est un ami qui donne le coup d’envoi en lui demandant d’écrire deux ou trois lignes sur la provenance du nom de Lavaltrie. Deux ou trois lignes… quel ennui ! Inspirée par la thématique, elle en fait sa première histoire : « L’île des trois sorcières ». Et c’est ainsi que de peintre, Françoise Pascals devint écrivaine.




LangueFrançais
ÉditeurLo-Ély
Date de sortie20 janv. 2022
ISBN9782925030409
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    Aperçu du livre

    Légendes inventées et histoires presque vraies - Françoise Pascals

    L’ÎLE DES TROIS SORCIÈRES

    Cette histoire se passe dans mon village, là où le fleuve s’élargit pour aller se perdre en de nombreux méandres et finalement serpenter entre une multitude d’îles et d’îlots chargés d’histoire. C’était peut-être à une lointaine époque, mais comme chacun le sait, dans les récits, les époques ont tendance à s’accordéonner, à se télescoper, pour présenter de curieuses ressemblances.

    Ici vivaient trois sorcières, et bien qu’elles fissent de grands efforts pour garder leur secret, tout le monde, ou presque, se doutait de leur vraie nature. La plus jeune des trois se faisait appeler Alice. Elle avait l’apparence d’une charmante jeune fille, ce qui lui permettait d’échapper plus aisément aux soupçons, la beauté étant souvent trompeuse. Au premier coup d’œil, son visage paraissait charmant; son allure légère, sa taille fine et ses longues jambes faisaient frissonner plus d’un jouvenceau.

    Mais pour Napoléon Benoit, un vieux sage à sa manière, c’est-à-dire celle d’un homme simple et plein de bon sens, la vraie nature de la jeune fille ne faisait aucun doute. Malgré son grand âge, plus de 102 ans, il avait les yeux et les idées plus clairs que ceux des jeunes écervelés et des vieux beaux des alentours. Il avait bien vu que sous le joli nez arqué de la demoiselle se cachait le futur nez crochu. Que sous son petit menton un peu pointu se dissimulait le futur menton en galoche. Que le maquillage habile de ses yeux, celui qui scandalisait tant les commères du village, n’était là que pour masquer un regard fourbe et que sa mignonne petite bouche aux lèvres ourlées, d’un rose trop tendre, se tordait en un affreux rictus à l’amorce du moindre sourire. Mais pire encore, il connaissait son vrai prénom : Alice se nommait en réalité « Malice ». Bien des fois, il avait mis en garde les jeunes hommes des alentours, mais ceux-ci se moquaient du vieux et ce dernier se gardait bien d’insister par crainte d’être victime, tôt ou tard, d’un mauvais sort. Il projetait, en effet, vivre encore au moins un autre demi-siècle, bon pied bon œil, et ne voulait en aucun cas que ce projet fut interrompu prématurément.

    Chez les deux autres, les tantes de la jeune Alice, la nature de sorcière était bien plus apparente. La plus âgée, Monique, dont le vrai prénom était « Panique », ressemblait à un vieil arbrisseau mort, desséché, noirci et tordu. Bossue, elle avait le teint olivâtre, toujours grincheuse et incapable de la moindre amabilité et du moindre sourire. L’autre, « Mifiel », se faisant appeler Michelle, tentait de cacher sa vraie nature sous une apparence bon enfant ainsi que sous une masse imposante de chairs molles tremblotantes au moindre pas. Mais tous au village savaient à quel point elle abaissait son entourage, s’attribuant tous les mérites de ceux qui avaient fait le travail à sa place et combien de fois, par ses propos et ses prétentions, en avait-elle blessé plus d’un. D’ailleurs, faire le mal, n’est-ce pas là l’apanage de toutes les sorcières?

    Donc, ce jour-là, la grande fête des moissons se préparait au village. Il y aurait évidemment une messe accompagnée des bénédictions d’usage, d’interminables et ennuyeux discours propres à faire perdre patience aux moins impatients, d’un bazar, de jeux et d’un souper communautaire suivi, dans la soirée, d’un grand bal. On danserait au son des violons et des cuillères, mais bien sûr, sans dépasser la mi-nuit. Monsieur le curé, dans son sermon, avait bien mis toute la pétulante jeunesse en garde, car d’après ses préceptes, tout débordement était souvent propice aux œuvres du diable et à toutes ses tentations.

    La longue expérience de nos trois sorcières, quant à assurer la protection de leurs exécrables personnes, leur fut alors très utile pour trouver des excuses dans le but de manquer messe et bénédictions. Les sorcières ne pouvant fréquenter une église et approcher l’eau bénite sans encourir de grands risques, Malice, consciente de la compassion que les villageois manifestaient à l’égard des vieilles personnes, n’eut à prétendre qu’une de ses tantes avait éprouvé un vague malaise au moment du départ et que l’événement les avait empêchées d’arriver à temps pour y assister.

    Malice, revêtue de ses plus beaux atours, avait donc passé la journée en minaudage auprès des jeunes hommes autant que des plus âgés. Soulevant parfois légèrement jupe et jupons, laissant paraître une délicate cheville, un mollet joliment tourné, déplaçant son châle et sa capeline pour exposer, discrètement, un peu de nuque ou de poitrine, au grand émoi de ces messieurs et au grand scandale de ces dames, qui, abreuvées de leçons de bonne conduite depuis leur plus jeune âge et enclines à savourer les turpitudes de leurs contemporains, ne pouvaient voir là qu’une jeune fille aux mœurs légères.

    Le soir venu, alors que le bal battait son plein dans la salle paroissiale, on entendit un grand bruit de sabots. Lancé dans un galop infernal qui se termina en un grincement aigu des fers sur le gravier de la route, c’était le jeune Athanase Hervieux qui, comme à son habitude, croyait fermement, de même que ses semblables, se faire ainsi remarquer avantageusement des jeunes filles présentes par son allure et sa monture. Or, tout au contraire, ces dernières le trouvèrent sot et prétentieux bien qu’il fût assurément le plus charmant et le plus riche garçon du village. Malheureusement pour lui, la seule à le trouver intéressant fut la jolie Alice, et ce n’était certes pas dans le but qu’il espérait.

    Athanase était très beau et le savait, allant même jusqu’à s’en vanter. Il prenait un soin jaloux de ses cheveux d’un brun doré et bouclés à souhait de même qu’à son teint plus que parfait, ni trop pâle, ni trop sombre. On le voyait toujours fraîchement rasé et revêtu des habits les plus élégants et les plus coûteux, poussant parfois jusqu’à une excentricité flamboyante, mais pas toujours du meilleur goût. Certains prétendaient même qu’il avait plusieurs fois fait peindre son portrait par un artiste de la grand-ville.

    Dans les sacoches de sa monture, Athanase avait apporté de quoi pimenter le bal. Quelques bouteilles de rhum et un sachet de ces herbes aux effets bizarres que lui vendait un jeune Indien quelque part sur la rive sud du fleuve. Tout cela au grand dam de Monsieur le Curé quand, par malheur, il en avait connaissance. Mais ce soir-là, hélas, ce dernier, un homme déjà fort âgé, avait dû se coucher tôt, épuisé par cette longue journée de fête, et avait laissé sa tâche de surveillance à son bedeau. Ce dernier avait parfois tendance à abuser des bonnes choses, surtout de celles que son oncle concoctait dans un alambic protégé des regards indiscrets, dans une cabane au fond des bois.

    Athanase fit une entrée remarquée dans la salle, tous les yeux se tournant vers lui sauf, à sa grande stupéfaction, ceux de la belle Alice qui, par jeu, fit mine de ne pas le remarquer. Quoi de plus choquant, mais aussi de plus attirant pour un jeune homme d’un tel orgueil? Le piège d’Alice fonctionnait à merveille puisque le jeune étourdi, s’y jetant tête baissée, s’adressa à elle avant toute autre, usant des platitudes habituelles en usage chez ceux de son espèce.

    — Bonsoir, jolie Demoiselle, qu’est-ce qu’une belle fille comme vous peut-elle bien faire dans un endroit pareil? Est-il possible de s’y amuser vraiment quand tant d’yeux soupçonneux nous épient? 

    Détournant à peine le regard dans sa direction, Alice ne fit qu’esquisser un léger sourire, mi-moqueur mi-aguichant. Ce qui n’eut pour effet que d’encourager les efforts de séduction du jeune homme.

    — N’accepterez-vous pas, cher ange, de danser avec l’homme le plus séduisant du village?

    Minaudant de plus belle, Alice déclara :

    — Hélas, je ne l’ai point encore aperçu, répondit-elle avec un sourire troublant.

    Alice était une fine experte quant aux jeux de séduction, car est-il de meilleure réplique pour motiver un jeune vaniteux?

    — Je me présente à votre charmante personne : Athanase Hervieux, le plus jeune et fortuné héritier des alentours. Puis-je connaître quel nom porte une aussi charmante créature que vous ? 

    S’approchant tout près de lui, frôlant son oreille de façon presque indécente, celle-ci lui répondit enfin dans un murmure :

    — Alice, Alice Girard.

    — Et cette Alice m’accordera-t-elle la prochaine danse?

    — Oui, répondit-elle d’un air faussement timide.

    Pendant ce premier tour de piste au rythme endiablé qu’Alice avait accordé au jeune homme, la diablesse ne fit que jeter des regards insistants vers les autres jeunes hommes qui les lui rendaient bien. Évidemment, la manœuvre visait à piquer l’orgueil d’Athanase.

    Mais à la danse suivante, notre Alice, d’un air détaché, accepta l’invitation d’un autre jeune homme qui la reluquait depuis plusieurs minutes, laissant le pauvre Athanase tout pantelant de jalousie. Sa vanité piquée au plus vif.

    Pendant que sa désirée dansait joyeusement avec un autre, le laissant même la serrer de plus près, au-delà de la décence admise par Monsieur le Curé, Athanase fit mine de s’intéresser à une autre jeune fille. Hélas, son manège resta sans effet sur Alice, la démone ayant, bien sûr, vu juste dans son jeu. Elle poussa même l’audace jusqu’à accepter l’invitation d’un troisième jeune homme, au grand dam du soupirant négligé.

    Mais la fine mouche ne voulait surtout pas pousser l’impatience de son gibier jusqu’à la rupture. Elle se mit donc à regarder dans sa direction en poussant de petits bâillements discrets, comme pour lui faire sentir que son actuel partenaire était d’un ennui mortel. D’ailleurs, elle avait usé de quelque mystérieux maléfice afin que ce dernier se montre de la plus invraisemblable gaucherie, s’enfargeant dans la jupe de sa partenaire, ratant deux pas par-ci, trois pas par-là, heurtant les autres danseurs. Grâce à quoi Athanase se gonflait de fierté.

    Il invita donc l’habile marionnettiste pour une autre danse, que cette dernière, sentant sa prise bien assurée, accepta volontiers.

    Ils dansèrent ensemble pendant encore plusieurs gigues, valses, gavottes et rigodons. Il ne se gênait pas pour serrer la belle tout contre lui dès que le rythme de la musique en cours s’y prêtait. Soudain, il lui susurra à l’oreille :

    — Allons dehors, la lune est pleine, le ciel est clair et l’air du soir y est doux. Nous y serons mieux pour bavarder loin des oreilles indiscrètes et des regards réprobateurs. Il me plairait aussi de vous faire voir la belle monture dont je suis l’heureux propriétaire.

    Comme tous deux atteignaient la sortie, il ajouta :

    — Si vous le voulez, j’ai ici,

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