La Céramique italienne : marques et monogrammes
Par Fernand de Mély
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La Céramique italienne - Fernand de Mély
Fernand de Mély
La Céramique italienne : marques et monogrammes
Publié par Good Press, 2022
EAN 4064066306038
Table des matières
INTRODUCTION.
PISE.
ÉCOLE MÉTAURIENNE.
CASTEL-DURANTE
PESARO
URBINO
GUBBIO
GUALDO
FORLI
DERUTA
CAFFAGIOLO
ÉCOLE DES ABRUZZES
FAENZA
TRÉVISE
FERRARE
VENISE
SIENNE
FABRIANO
RIMINI
BASSANO
LENOVE, PRÈS BASSANO
MONTE-LUPO,
PADOUE
VITERBE.
TURIN
VÉRONE
FLORENCE
BOLOGNE
GÊNES.
SAVONE
CHANDIANA
CORNARI
PAVIE
SAN QUIRIGO
DOCCIA
MILAN
LODI
VINEUF
MARQUES
DES PRINCIPALES COLLECTIONS.
00003.jpgSIGLES ET MONOGRAMMES.
INTRODUCTION.
Table des matières
L’étude de la céramique italienne est tout particulièrement pleine d’intérêt.
C’est qu’en suivant attentivement les différentes phases par lesquelles elle passe successivement, on y retrouve toujours l’art; soit qu’il s’applique à charmer l’œil par le contraste des couleurs, pour orner, ce qu’à l’époque de la renaissance on appelle les crédences, soit que plus tard il allie à ce premier mouvement artistique la science du dessin et de la composition: et alors se produisent ces chefs-d’œuvre que nous admirons et qui placent si haut dans l’histoire de l’art ces majoliques italiennes si justement estimées par notre époque.
Ce qui vient encore ajouter un mérite incontestable aux produits des grandes manufactures italiennes, c’est qu’il n’en est pas de ces plats merveilleux, de ces aiguières gracieuses, de ces vases savamment étudiés, comme des faïences françaises, les Rouen, les Nevers, les Moustiers. Ces dernières ne peuvent réellement trouver place que dans les véritables collections; il faut être essentiellement amateur, je dirai même connaisseur, pour aimer nos produits nationaux.
Il en est tout autrement des majoliques italiennes.
Du moment où l’on sent l’art, où on le comprend — et c’est là une des gloires de notre époque d’avoir une moyenne d’appréciation assez élevée pour saisir presque toutes ces nuances — il est impossible de ne pas s’arrêter quelques instants devant une majolique italienne. Malgré soi, ces rudesses de ton, cette chaleur de coloris, qui s’harmonisent si complètement, ce dessin, parfois si correct qu’il en arrive à pouvoir lutter sans trop de désavantage avec les cartons des grands maîtres, vous frappent et vous attachent.
Rien d’étonnant à cela.
Les grands artistes du quinzième et du seizième siècle ne se contentent pas d’embrasser une seule branche de l’art. Peinture, sculpture, architecture, ils les réunissent et brillent également dans chacune de ces spécialités. Ne voyons-nous pas Léonard de Vinci, ce génie universel, laissant de côté son pinceau pour diriger la canalisation de la Lombardie, Michel-Ange, peignant la chapelle Sixtine après en avoir conçu et exécuté le plan, sculptant son Moïse et défendant Florence.
Puis, au milieu de cette pléiade d’artistes, nous trouvons les Jules II, les Léon X, les ducs d’Urbin, de Ferrare, les Médicis, réunissant autour d’eux dans leurs cours ces gloires éclatantes, les dirigeant, et excitant par leur haute protection ce souffle divin qui passe sur l’Italie.
Et tous, admirant cette nouvelle branche de l’art qui vient de prendre naissance, la céramique, soutiennent ses premiers efforts, l’encouragent par leur munificence et, après avoir fondé de nouvelles manufactures, ouvrent les portes de leurs palais à ces produits merveilleux, dont la Perse et la Chine avaient jusqu’alors conservé le secret.
Non contents des premiers essais, qui montrent, dès les premiers pas, à quelle hauteur peut s’élever l’art de la majolique, ils demandent aux grands maîtres de la peinture, des cartons, des dessins, pour couvrir de délicates arabesques les vases qu’ils font exécuter. Ce ne sont plus de modestes potiers, de simples mouleurs de terre qui suivent leur inspiration. Ils trouvent leurs modèles dans les fouilles; Titien, Raphaël surveillent les nouvelles formes et ils arrivent, une fois l’aiguière finie, à pouvoir lutter avec les pièces délicates qui sortent des mains de Benvenuto Cellini.
Quand nous étudierons chaque pays, en citant les noms célèbres qui ont contribué à faire de Gubbio, d’Urbino, de Ferrare, des centres incomparables, nous rappellerons qu’ici, on trouve un vase incontestablement dessiné par Raphaël, que là, nous rencontrons l’inspiration de Titien, et toujours, planant au-dessus de tous, les grands princes d’Italie, qui n’hésitent pas à récompenser, même par des titres de noblesse, les vaillants artistes qui, peu à peu, par un travail persévérant, parviennent à des résultats pour ainsi dire inespérés.
La fabrication de la majolique italienne se divise en deux catégories bien distinctes.
La première, la plus ancienne, c’est celle que Passeri appelle la demi-majolique. Le potier recouvre l’argile d’une mince engobe de terre blanche, sur cette légère couche l’artiste trace le dessin. Pesaro, Deruta, dans les premiers essais de leur fabrication, ont employé ce mode de faire; Passeri, qui, malgré son enthousiasme pour sa patrie, nous donne cependant parfois des détails intéressants, perdus au milieu de ses erreurs, prétend que c’est à l’aide de ce procédé que Pesaro découvrit ses magnifiques reflets nacrés et parvint à sa réputation. Mais depuis longtemps la question a été tranchée dans le sens contraire.
Deruta, Gubbio, Caffagiolo, nous montrent les merveilles que peut donner le talent sur la véritable majolique, qui forme la deuxième catégorie et que nous rencontrons le plus souvent. Ici le sujet est peint sur la terre naturelle, puis cuit au grand feu. L’émail stannifère, les couleurs du décor se fondent ensemble, et lui donnent une harmonie de tons incomparables. C’est le procédé encore employé de nos jours par certains imitateurs des maîtres de la renaissance.
Heureusement pour nous, malgré l’habileté de leurs procédés, il est facile de distinguer leurs produits de ceux des artistes anciens, et quand ils copient les M° Giorgio, les Fontana, les Xanto, ils arrivent à peine à la hauteur des maîtres de la décadence, c’est-à-dire de la fin du seizième et du dix-septième siècle.
Quand nous avons dit plus haut que c’était un souffle divin qui passait sur l’Italie, nous ne croyons pas avoir exagéré. Un siècle et demi ne s’écoule pas, en effet, sans que nous voyons décliner rapidement les fabriques et leurs produits. Les grands maîtres, en mourant, semblent emporter avec eux, dans la tombe, les secrets de leur art; ils laissent à peine quelques élèves et si une nouvelle école se forme, celle des Patanazzi à Urbino, c’est le dernier éclat d’un feu qui va s’éteindre. Tout disparaît en même temps, et les couleurs brillantes, qui chez certains artistes viennent habilement relever un dessin parfois moins magistral, et les cartons eux-mêmes, qui se modifient profondément. Au lieu de rester artiste, le potier devient commerçant, et de ce moment date cette décadence si prompte, qui mettra plus de temps à atteindre la peinture.
Les grands protecteurs des céramistes ont disparu en même temps. Les Guidobaldo, les Médicis, les ducs de Ferrare, ont laissé la place à des successeurs moins artistes, et, avec le commencement du dix-septième, nous arrivons à la simple production commerciale. A Rome, pourtant, nous retrouvons encore Savino et Simone qui, vers 1605, tentent de relever l’école d’Urbino, mais si leur dessin conserve encore une certaine fermeté, leur coloris est loin de leurs visées artistiques. Seule, l’école des Abruzzes avec les Grue tente de soutenir l’art qui s’en va; mais on sent, malgré les solides leçons puisées dans l’école d’Urbino, à leur faire, plutôt qu’à leur coloris, que le moment approche, où l’Italie ne pourra plus tenir en Europe, le sceptre de la céramique.
Les origines de la majolique italienne sont assez obscurés. Le goût et le secret de cet art nouveau, pour l’Italie, vient-il, comme le prétendent certains auteurs, de l’Espagne, où, dès le treizième siècle, la fabrication moresque était assez avancée pour que Jacques Ier d’Aragon, s’emparant de Valence, crût devoir protéger, par une charte spéciale, les potiers mores de Xativa, ou de l’Orient latin? En tous cas, ce que nous en savons, c’est que Pise fut un des centres primitifs de la fabrication italienne. Cela résulte de cette citation d’Ercolano. «Ses faïences (de Valence) sont si belles et si élégantes, qu’en échange des faïences que nous envoie l’Italie DE PISE, nous expédions des vaisseaux chargés de celles de Manissès. » (Jacquemart.)
Donc il y avait ÉCHANGE avec l’Espagne. Malgré les beaux produits hispano-moresques, on estimait assez à Valence, — le grand centre céramique — les majoliques italiennes pour les mettre en parallèle avec celles de Manissès; ainsi les deux fabriques travaillaient en même temps et nous devons rechercher d’un autre côté la filiation des produits italiens.
Pour nous, elles ont une autre origine.
M. François Lenormant, dans son voyage à travers l’Apulie et la Lucanie, nous parle des baccini, employés dans la décoration des églises, par les architectes italiens, dès le onzième siècle. A ce propos, il nous signale les constatations qu’il a faites à l’église de Lucéra, et c’est aux habitants de cette ville, instruits par les colons orientaux, qu’il faudrait attribuer, d’après lui, la création des ateliers dont les produits devaient se répandre plus tard dans toute l’Italie. Plus loin, il mentionne le chaînon géographique qui relierait les travaux de Lucéra avec ceux de Pesaro, travaux ORIGINAIRES DE L’ORIENT.
Ici nous approchons de la vérité. Mais c’est à Pise surtout qu’il faut étudier la majolique italienne dans ses débuts, parce que, là, nous retrouvons des traces matérielles d’une industrie certainement originaire de l’Orient.
Malheureusement les savants italiens n’ont pas encore apporté grande attention aux premières pièces que nous trouvons en Italie. Pourtant il serait intéressant, même au point de vue de la civilisation européenne, de refaire l’histoire de ses débuts en Italie: et si les archives de Pise ne nous ont fourni aucun document dans la période de ses rapports avec l’Orient