Le Spleen de Paris
4/5
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À propos de ce livre électronique
« Et, ivre de ma folie, le lui criai furieusement : « La vie en beau ! la vie en beau ! » Ces plaisanteries nerveuses ne sont pas sans péril, et on peut souvent les payer cher. Mais qu'importe l'éternité de la damnation à qui a trouvé dans une seconde l'infini de la jouissance ? » (Extrait de « Le Mauvais Vitrier »)
Charles Baudelaire
Charles Baudelaire, né le 9 avril 1821 à Paris, est l'un des poètes les plus influents et controversés de la poésie française. Connu pour son recueil révolutionnaire Les Fleurs du mal, Baudelaire a marqué le symbolisme par son exploration du spleen et de la modernité. Sa vie tumultueuse, marquée par des excès, des amours passionnées, et des luttes personnelles, a nourri une oeuvre où la beauté côtoie la mélancolie. Fils d'un ancien prêtre devenu fonctionnaire, Baudelaire a été profondément affecté par la mort prématurée de son père et le remariage de sa mère, ce qui a influencé sa vision du monde. Baudelaire a su capter l'essence de son époque, transformant ses expériences personnelles en une poésie intemporelle. Son influence sur la littérature classique est indéniable, faisant de lui un véritable chef-d'oeuvre de la poésie française. Ses écrits continuent d'inspirer de nouvelles générations, confirmant son statut d'icône littéraire. En plus de sa poésie, Baudelaire a également été un critique d'art perspicace, contribuant à l'émergence de l'art moderne. Il a défendu des artistes comme Eugène Delacroix et a été l'un des premiers à reconnaître le génie de Richard Wagner. Malgré les controverses et les procès pour immoralité auxquels il a dû faire face, Baudelaire a persévéré dans sa quête de l'idéal artistique, laissant derrière lui un héritage durable qui continue de résonner dans le monde littéraire et au-delà. Son exploration des thèmes de la beauté, de la déchéance, et de la rédemption, ainsi que son style unique, ont fait de lui une figure centrale du mouvement symboliste. Baudelaire est décédé à l'âge de 46 ans, laissant une empreinte indélébile sur la poésie et la culture mondiale.
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Avis sur Le Spleen de Paris
306 notations6 avis
- Évaluation : 4 sur 5 étoiles4/5I never really understood the appeal of Les Fleurs du Mal, but so many people love it that I started to feel bad. What was I missing? Along comes this book, Paris Spleen, which is full of prose poems made of equal parts humor, cynicism, and insight (and often all three within a paragraph). I like these poems because reading it, I feel like I have a sense of who Baudelaire might have been as a person...Plus, his humor is so odd: Soup and Clouds My adorable little minx was serving me supper; through the dining room's open window I was contemplating the shifting architectures God creates from vapour, those marvellous constructions of the evanescent. As I watched, I thought: "Those apparitions are nearly as beautiful as my sweet lady's eyes, the mad little green-eyed monster." Suddenly a violent fist landed in my back and I heard a charming, raw voice hysterical and brandy-damaged, the voice of my little darling, saying: "Get on with your bloody soup, cloud merchant."
- Évaluation : 5 sur 5 étoiles5/5Who among us has not dreamt, in moments of ambition, of the miracle of a poetic prose, musical without rhythm and rhyme, supple and staccato enough to adapt to the lyrical stirrings of the soul, the undulations of dreams, and sudden leaps of consciousness.
Contrary to popular belief, I had never read Baudelaire until now. I've trusted Walter Benjamin and lately Calasso to provide me with a well informed ethos about this central figure. There are many concerns that this is the literature of the young, to which I shout, absurd. This is the lettres of the Absolute, the eternally curious.
Below the bile, there is a hum of sensitivity. Behind the debris are the tears of the sensitive. Is it forgiving, likely not? There is a buzzing pulse at play, a hum and a forgiving glance. - Évaluation : 5 sur 5 étoiles5/5This is a good book for anyone new to Baudelaire or prose poems. Several great poems are included.
- Évaluation : 3 sur 5 étoiles3/5Korte schetsen, over eenzaamheid, oudworden. Soms sterk gelijkend op Poemeesterlijk observatievermogen, voorafspiegeling van de Maupassant, soms fijn, soms grof. Techniek van de onverwachte wending die het voorafgaande in een heel ander perspectief plaatst. Op het geniale af
- Évaluation : 5 sur 5 étoiles5/5One of the the earliest examples of prose poetry, Baudelaire's Paris Spleen is a tribute to the city of Paris and its pleasures: poetry, wine, women and the drunkenness brought about by these pursuits. Let's not forget Baudelaire's old pal Satan, he rears his head here more than once. Also present here is Baudelaire's witty political commentaries, presented in perhaps a more discernible form here than in The Flowers of Evil.Paris Spleen is not as consistent in regards to 'quality' (Rather a bad choice of words here, I do not want to mislead any ignorant reader into thinking Baudelaire is any less than great) or as urgent in tone as its more wide read predecessor. Overall though, this an indispensable for all students of poetry as well as those "moon-mad men." We couldn't forget them, now could we?
- Évaluation : 5 sur 5 étoiles5/5heavy and elastic honeybrown hair. you can almost hear it?!
Aperçu du livre
Le Spleen de Paris - Charles Baudelaire
Le plus grand soin a été apporté à la mise au point de ce livre numérique de la collection Candide & Cyrano, afin d’assurer une qualité éditoriale et un confort de lecture optimaux.
Malgré ce souci constant, il se peut que subsistent d’éventuelles coquilles ou erreurs. Les éditeurs seraient infiniment reconnaissants envers leurs lectrices et lecteurs attentifs s’ils avaient l’amabilité de signaler ces imperfections à l’adresse [email protected].
Le Spleen de Paris
Charles Baudelaire
À Arsène Houssaye
Mon cher ami, je vous envoie un petit ouvrage dont on ne pourrait pas dire, sans injustice, qu'il n'a ni queue ni tête, puisque tout, au contraire, y est à la fois tête et queue, alternativement et réciproquement. Considérez, je vous prie, quelles admirables commodités cette combinaison nous offre à tous, à vous, à moi et au lecteur. Nous pouvons couper où nous voulons, moi ma rêverie, vous le manuscrit, le lecteur sa lecture ; car je ne suspends pas la volonté rétive de celui-ci au fil interminable d'une intrigue superflue. Enlevez une vertèbre, et les deux morceaux de cette tortueuse fantaisie se rejoindront sans peine. Hachez-la en nombreux fragments, et vous verrez que chacun peut exister à part. Dans l'espérance que quelques-uns de ces tronçons seront assez vivants pour vous plaire et vous amuser, j'ose vous dédier le serpent tout entier.
J'ai une petite confession à vous faire. C'est en feuilletant, pour la vingtième fois au moins, le fameux Gaspard de la Nuit, d'Aloysius Bertrand (un livre connu de vous, de moi et de quelques-uns de nos amis, n'a-t-il pas tous les droits à être appelé fameux ??) que l'idée m'est venue de tenter quelque chose d'analogue, et d'appliquer à la description de la vie moderne, ou plutôt d'une vie moderne et plus abstraite, le procédé qu'il avait appliqué à la peinture de la vie ancienne, si étrangement pittoresque.
Quel est celui de nous qui n'a pas, dans ses jours d'ambition, rêvé le miracle d'une prose poétique, musicale sans rythme et sans rime, assez souple et assez heurtée pour s'adapter aux mouvements lyriques de l'âme, aux ondulations de la rêverie, aux soubresauts de la conscience ? C'est surtout de la fréquentation des villes énormes, c'est du croisement de leurs innombrables rapports que naît cet idéal obsédant. Vous-même, mon cher ami, n'avez-vous pas tenté de traduire en une chanson le cri strident du Vitrier, et d'exprimer dans une prose lyrique toutes les désolantes suggestions que ce cri envoie jusqu'aux mansardes, à travers les plus hautes brumes de la rue ? Mais, pour dire le vrai, je crains que ma jalousie ne m'ait pas porté bonheur. Sitôt que j'eus commencé le travail, je m'aperçus que non seulement je restais bien loin de mon mystérieux et brillant modèle, mais encore que je faisais quelque chose (si cela peut s'appeler quelque chose) de singulièrement différent, accident dont tout autre que moi s'enorgueillirait sans doute, mais qui ne peut qu'humilier profondément un esprit qui regarde comme le plus grand honneur du poète d'accomplir juste ce qu'il a projeté de faire.
Votre bien affectionné,
C. B.
Le Spleen de Paris
I
L'Étranger
« Qui aimes-tu le mieux, homme énigmatique, dis ? ton père, ta mère, ta sœur ou ton frère ? – Je n'ai ni père, ni mère, ni sœur, ni frère.
– Tes amis ?
– Vous vous servez là d'une parole dont le sens m'est resté jusqu'à ce jour inconnu.
– Ta patrie ?
– J'ignore sous quelle latitude elle est située.
– La beauté ?
– Je l'aimerais volontiers, déesse et immortelle.
– L'or ?
– Je le hais comme vous haïssez Dieu.
– Eh ! qu'aimes-tu donc, extraordinaire étranger ?
– J'aime les nuages... les nuages qui passent... là-bas... là-bas... les merveilleux nuages ! »
II
Le Désespoir de la vieille
La petite vieille ratatinée se sentit toute réjouie en voyant ce joli enfant à qui chacun faisait fête, à qui tout le monde voulait plaire ; ce joli être, si fragile comme elle, la petite vieille, et, comme elle aussi, sans dents et sans cheveux.
Et elle s'approcha de lui, voulant lui faire des risettes et des mines agréables.
Mais l'enfant épouvanté se débattait sous les caresses de la bonne femme décrépite, et remplissait la maison de ses glapissements.
Alors la bonne vieille se retira dans sa solitude éternelle, et elle pleurait dans un coin, se disant : « Ah ! pour nous, malheureuses vieilles femelles, l'âge est passé de plaire, même aux innocents ; et nous faisons horreur aux petits enfants que nous voulons aimer ! »
III
Le Confiteor de l'artiste
Que les fins de journées d'automne sont pénétrantes ! Ah ! pénétrantes jusqu'à la douleur ! car il est de certaines sensations délicieuses dont le vague n'exclut pas l'intensité ; et il n'est pas de pointe plus acérée que celle de l'Infini.
Grand délice que celui de noyer son regard dans l'immensité du ciel et de la mer ! Solitude, silence, incomparable chasteté de l'azur ! une petite voile frissonnante à l'horizon, et qui par sa petitesse et son isolement imite mon irrémédiable existence, mélodie monotone de la houle, toutes ces choses pensent par moi, ou je pense par elles (car dans la grandeur de la rêverie, le moi se perd vite !) ; elles pensent, dis-je, mais musicalement et pittoresquement, sans arguties, sans syllogismes, sans déductions.
Toutefois, ces pensées, qu'elles sortent de moi ou s'élancent des choses, deviennent bientôt trop intenses. L'énergie dans la volupté crée un malaise et une souffrance positive. Mes nerfs trop tendus ne donnent plus que des vibrations criardes et douloureuses.
Et maintenant la profondeur du ciel me consterne ; sa limpidité m'exaspère. L'insensibilité de la mer, l'immuabilité du spectacle, me révoltent... Ah ! faut-il éternellement souffrir, ou fuir éternellement le beau ? Nature, enchanteresse sans pitié, rivale toujours victorieuse, laisse-moi ! Cesse de tenter mes désirs et mon orgueil ! L'étude du beau est un duel où l'artiste crie de frayeur avant d'être vaincu.
IV
Un plaisant
C'était l'explosion du nouvel an : chaos de boue et de neige, traversé de mille carrosses, étincelant de joujoux et de bonbons, grouillant de cupidités et de désespoirs, délire officiel d'une grande ville fait pour troubler le cerveau du solitaire le plus fort.
Au milieu de ce tohu-bohu et de ce vacarme, un âne trottait vivement, harcelé par un malotru armé d'un fouet.
Comme l'âne allait tourner l'angle d'un trottoir, un beau monsieur ganté, verni, cruellement cravaté et emprisonné dans des habits tout neufs, s'inclina cérémonieusement devant l'humble bête, et lui dit, en ôtant son chapeau : « Je vous la souhaite bonne et heureuse ! » puis se retourna vers je ne sais quels camarades avec un air de fatuité, comme pour les prier d'ajouter leur approbation à son contentement.
L'âne ne vit pas ce beau plaisant, et continua de courir avec zèle où l'appelait son devoir.
Pour moi, je fus pris subitement d'une incommensurable rage contre ce magnifique imbécile, qui me parut concentrer en lui tout l'esprit de la France.
V
La Chambre double
Une chambre qui ressemble à une rêverie, une chambre véritablement spirituelle, où l'atmosphère stagnante est légèrement teintée de rose et de bleu.
L'âme y prend un bain de paresse, aromatisé par le regret et le désir. – C'est quelque chose de crépusculaire, de bleuâtre et de rosâtre ; un rêve de volupté pendant une éclipse.
Les meubles ont des formes allongées, prostrées, alanguies. Les meubles ont l'air de rêver ; on les dirait doués d'une vie somnambulique, comme le végétal et le minéral. Les étoffes parlent une langue muette, comme les fleurs, comme les ciels, comme les soleils couchants.
Sur les murs, nulle abomination artistique. Relativement au rêve pur, à l'impression non analysée, l'art défini, l'art positif est un blasphème. Ici, tout a la suffisante clarté et la délicieuse obscurité de l'harmonie.
Une senteur infinitésimale du choix le plus exquis, à laquelle se mêle une très légère humidité, nage dans cette atmosphère, où l'esprit sommeillant est bercé par des sensations de serre chaude.
La mousseline pleut abondamment devant les fenêtres et devant le lit ; elle s'épanche en cascades neigeuses. Sur ce lit est couchée l'Idole, la souveraine des rêves. Mais comment est-elle ici ? Qui l'a amenée ? quel pouvoir magique l'a installée