Le livre d'Esther: Une exégèse en images
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À propos de ce livre électronique
Christophe Stener
Christophe Stener, auteur de plusieurs livres d'histoire de l'art associant exégèse biblique et histoire générale, notamment sur le Livre d'Esther, DREYFUS et Judas Iscariot, enseigne à l'Université Catholique de l'Ouest.
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Aperçu du livre
Le livre d'Esther - Christophe Stener
Œuvres reproduites en couverture
Première
La Bible hystoriaus, ou Les hystoires escolastres », de PIERRE LE MANGEUR, traduction de GUIART DES MOULINS, 1301-1400, Bibliothèque nationale de France, Manuscrits Français 161, f. 271
https://gallica.bnf.fr/ark:/12148/btv1b52509465p/f545.image.r=161%20161
Sur une même image, on voit Esther dénoncer au roi Assuérus Haman attablé, et Haman crucifié. La crucifixion plus rarement représentée que la pendaison d’Haman sera source de violence antisémite au Moyen-Age provoquée par la représentation en effigie d’Haman lors de la célébration du Purim, représentation considérée comme une figuration sacrilège de la Passion.
Dernière
Bible hébraïque, France du Nord, 1277, British Library
http://www.bl.uk/IllImages/BLCD/mid/c774/c7740-02.jpg
Intercession d’Esther qui touche le sceptre royal. La composition de cette enluminure d’une Bible en hébreu est très directement inspirée de l’iconographie chrétienne des audiences royales.
Table des matières
Avertissement au lecteur
Introduction
Summary
Méthodologie
Exégèse
Iconographie
Sémantique
Références croisées
Glossaire
Table des illustrations
Exégèse
Le Livre d’Esther, un palimpseste
Sources
Exégèse hébraïque
Manuscrits du Livre d’Esther
Version hébraïque et version grecque
Classement du texte
Structure du texte
Auteur
Datation
Canons - Autorité religieuse du Livre d’Esther
Le contexte historique
Le Livre d’Esther, une histoire non l’Histoire
Suse – Chouchan (Bible)
L’Histoire, de Nabuchodonosor à Artaxerxès
Xerxès 1er dit le Grand
Artaxerxés 1er (465-424)
Des divinités païennes omniprésentes dans le récit biblique
Etymologie du mot Purim
La véritable histoire des Juifs, arrière-plan du conte biblique
Le livre d’Esther
Introduction
Les protagonistes
Inspirations du Livre d’Esther
Mythologies et religions de Mésopotamie
Inspiration biblique
Interprétations du récit
La victoire du monothéisme hébraïque sur les cultes mésopotamiens
Une tragicomédie profane
La victoire du monothéisme juif sur le paganisme
Roman de la diaspora et apologue sioniste
Le décret d’extermination, châtiment divin
Festins, repas et jeûne dans le Livre d’Esther
Le Livre d’Esther, roman nationaliste
Astrologie, Pur-Sort et sortilège, paganisme et monothéisme
Exégèse
Iconographie
Le Purim perpétue cette tradition
L’astrologie, une passion juive héritée de la déportation à Babylone
L’astronomie juive au Moyen-Age
Les Tablettes des Destins
Numérologie dans le Livre d’Esther : le chiffre sept
Le sept
Le sept dans la culture hébraïque
Le sept dans le Livre d’Esther
Salomon dans le récit d’Esther
Le trône du roi Salomon
La rencontre entre Salomon et la reine de Saba
Lecture antisémite du Livre d’Esther
Introduction
La version grecque du Livre d’Esther, portrait à charge du peuple hébreu
Le Purim, provocation anti chrétienne
Exégèse chrétienne antisémite : [
La Shoah : Hitler, der Haman des Hamans
Eretz Israël face à ses ennemis, la perpétuation de la menace
Butin et rapine dans le Livre d’Esther
Les trésors volés au Temple
Le festin du roi
Le paiement du pogrom
Le butin des massacres des ennemis des Juifs
Les impôts
Marranes et conversos
Le Livre d’Esther inspirateur de libelles nationalistes
Nationalisme hébreu
Nationalisme flamand
Esther au secours des indiens d’Amérique
Politique anglaise
Iconographie du Livre d’Esther
Le songe de Mardochée
Suse
Ahasuerus trônant
Banquet d’Ahasuerus
Festin de la reine Vashti
Iconographie
Analyse
Refus de la reine Vashti de se produire devant les invités du roi
Répudiation et bannissement de la reine Vashti
Exécution de la reine Vashti
Nudité de la reine Vashti
Intrigue de sérail
Morale de la chute de Vashti
Interprétation religieuse
Esther, vierge juive
Mardochée veille sur le bien-être d’Esther au harem
Esther au harem
Présentation au Roi, coup de foudre
La seconde rafle
Couronnement d’Esther
Mariage d’Esther avec le roi Ahasuerus
Le festin d’Esther, un repas d’épousailles
Le complot des eunuques révélé par Mardochée
Elévation de Haman
Dédain de Mardochée
Tirage au sort de la date du pogrom
Haman convainc le roi d’ordonner l’extermination des Juifs
Désespoir de Mardochée
Présage des trois écoliers à Mardochée
Déploration des Juifs
Mardochée appelé par Esther à se rhabiller
Mardochée révèle à Esther le décret de massacre du peuple juif et lui demande d’intercéder auprès du Roi
Esther bouleversée
Mardochée fait jeûner les enfants
Songe de Mardochée, le serpent
Hésitations d’Esther à braver l’interdit royal interdisant sous peine de mort de paraître sans convocation royale
Esther appelle les Juifs au jeûne
Prières d’Esther et de Mardochée
Prière de Mardochée
Prière d’Esther
Pamoison d’Esther
Toilette d’Esther
Hésitation d’Esther à la porte du Palais du roi
Intercession de la reine auprès du roi
Intercession d’Esther – Haman pendu
Le roi autorise Esther à parler
Iconographie
Le sceptre d’or
Esther invite le Roi à un dîner le lendemain
Premier banquet d’Esther
La femme d’Haman suggère de faire pendre Mordecai
Haman conduit (de force) au banquet d’Esther
Insomniaque, le roi se fait lire les Annales de son règne
Le Roi donne l’ordre à Haman d’honorer Mordecai
Les enfants et l’omer
Aman rase et lave Mardochée
Le triomphe de Mardochée
La bévue de la fille d’Haman
Aman abattu
Aman contraint de se rendre au festin d’Esther
La Reine dénonce Haman au roi Assuerus
Supplication d’Haman
Aman violentant Esther
Colère du roi et condamnation d’Haman
Châtiment d’Haman
Le roi donne les biens d’Haman à Esther
Mardochée se présente devant le roi
Le roi donne son sceau à Mardochée
Le Roi donne pouvoir à Mardochée et Esther de révoquer l’édit de massacre des Juifs et de se venger
Triomphe de Mardochée et des Juifs
Vengeance des Juifs et célébration
Pendaison des dix fils d’Haman
Lettres de Purim
Fête de Purim
Mardochée, second du royaume ou nouveau roi de Perse
Coffres de mariage
Les coffres de mariage de Sandro Botticelli et Filipino Lippi (1470)
Marco del Buono Giamberti (1402–1489 Florence)
Vitraux de la Sainte-Chapelle de Paris
Art juif
Qu’est-ce qu’un art juif ?
Chronologie de l’art juif
Esther, une exception à l’aniconisme hébraïque du Tanakh
Rouleau d’Esther
Etuis de megilot
Ketouba (contrats de mariage)
Me’ah-Berachot, un livre de prière miniature
Le Purim
Une étymologie incertaine
Purim de Mardochée ou Fête d’Esther
Le Purim, fête juive ou fête païenne judaïsée ?
Instauration de la Fête d’Esther
Purim et Purims
Célébration du Purim d’Esther
Adloyada et carnaval
Purim et autres fêtes juives
Objets de Purim
Purim et antisémitisme
Art juif contemporain (XXe-XXIe siècles)
Littérature
Littérature hébraïque
Littérature maranne
Littérature chrétienne
Bande-Dessinée
Filmographie
Dessin animé
Musicologie
Haendel,
Reynaldo Hahn
Influence de l’art religieux chrétien sur l’iconographie juive du livre d’Esther
Le Messie des megilot
Problématique
Onomastique
L’espérance juive du Messie
Le Messie dans le texte d’Esther
Esther, la fin de l’histoire prophétique
Messianité et serviteur souffrant dans la théologie chrétienne
Le Christ, Messie
Le Messie dans le Coran
Le Sionisme soutenu par les évangélistes britanniques au XIXe siècle
Syncrétisme du Livre d’Esher
Une onomastique signifiante
Syncrétisme des cultes perses, juifs et chrétiens
Tableau de la correspondance symbolique persejudaïque-chrétienne
Esther dans le catholicisme
Théologie christique du Livre d’Esther
Esther, instrument de l’intercession divine
La Prière d’Esther
Psaume 22 (21) , dit Psaume de David, dit Psaume du serviteur souffrant
La controverse judéo-chrétienne autour du Psaume 22
Le jeune d’Esther
Haman incarnation de Satan, Esther, préfiguration de Marie
Programme iconographique
Gibet et crucifixion
Iconographie christologique d’Esther
Glorification d’Esther par Véronèse
Le diable et Esther
Prosélytisme chrétien et antisémitisme
Musique chrétienne inspirée par le Livre d’Esther
Iconographie orthodoxe
Hitler, le nouvel Haman ?
Evocation du Purim par les chefs nazis
Exterminations nazies à l’occasion du Purim
Attentats antisémites à l’occasion du Purim
Théâtre juif
Le Livre d’Esther, une prédiction ?
Le sens occulte des trois jours de vengeance des hébreux
Le Livre d’Esther, un Code ?
Table des œuvres référencées
Bibliographie
Glossaire
Index des mots clés
Avertissement au lecteur
« Que le lecteur soit prévenu : s’il rencontre une explication contraire à une autre, ou à celle qu’il connaît, qu’il ne s’en offusque pas ni qu’il ne s’en formalise. Car c’est le but de ce livre : recueillir et rassembler toutes les opinions des commentateurs, même les plus contradictoires pour que tout le peuple d’Israël soit en harmonie. » Nous faisons nôtre cet avertissement du rabbin Rafael Hiya-Pontremoli en introduction à son Meam Loez. ¹ Le recueil des Légendes juives de Louis Guinzberg ² abonde également en interprétations parfois contradictoires. Le lecteur sera peut-être dérouté par l’imagination et la subtilité de la glose judaïque, surpris des constructions de celle chrétienne tant le Livre d’Esther est un roman à clef dont celle religieuse n’est pas la plus obvie. La richesse et la diversité de l’iconographie du récit vétérotestamentaire illustre cette richesse du sens religieux mais aussi des lectures politiques et parfois fort profanes données au texte.
Cet ouvrage est disponible en format papier mais il est recommandé de privilégier le format électronique, les œuvres n’étant pas reproduites dans le corps du texte mais visualisables par lien hypertexte pointant sur divers sites internet. Ce choix respectueux des droits de reproduction permet en particulier de visualiser en pleine page et parfois avec des zooms des enluminures, des megilot, des tableaux , pour cetaines œuvres, de consulter leurs notices muséales.
¹ PONTREMOLI Rafael Hija, Meam Loez, Livre d’Esther, Smyrne, 1864, trad. Verdier, 1997
² GUINZBERG Louis, Légendes des Juifs, tome VI, Cerf, 2006
Introduction
Le Livre d’Esther ne fut admis au canon judaïque qu’avec hésitation car le nom de Dieu est absent de la version admise par les massorètes, celle que retint un Luther fort critique. Dieu est cité dans la version dite « grecque » qu’intégra à son canon l’Eglise catholique, malgré les réserves initiales des Pères de l’Eglise, avant qu’Esther ne fut revendiquée comme figure préfigurant Marie. Récit profondément religieux pour ceux qui y voient la main de Dieu caché, le texte est entendu comme un simple conte oriental par des lecteurs profanes. Des leaders nationalistes, pas uniquement juifs, mais aussi hollandais, britanniques en firent une apologue politique. Le texte vétérotestamentaire autorise ainsi toutes sortes de lectures plus complémentaires qu’exclusives. Nulle surprise donc que l’iconographie du conte biblique dont le premier exemple est une fresque de la synagogue de Doura-Europos du IVe s. inspire encore aujourd’hui des artistes contemporains. La littérature, de la plus édifiante à la plus distractive, s’est emparé de l’intrigue du roi perse amoureux d’une belle Juive. Les adaptations cinématographiques en forme de péplums ou de films saint-sulpiciens abondent.
Le Livre d’Esther fait, depuis près de deux millénaires, l’objet d’une immense herméneutique : commentaires et surcommentaires rabbiniques, abondante glose chrétienne, interprétations profanes, politiques mais aussi religieuses, pour ne pas dire détournements, marquées par l’actualité politique. Le rabbin Rafael Hiya-Pontremoli en rédigeant son Meam Loez à Smyrne à la fin du XIXe siècle eut l’ambition de rassembler l’interprétation midrashique pour l’édification de ses coreligionnaires ; il dut bien reconnaître, ce dont le lecteur se rendra compte, que certaines explications sont parfois très subtiles, voire byzantines, parfois complémentaires parfois contradictoires. Il n’est pas de notre ambition de trancher de ce dédale herméneutique mais d’en éclairer l’iconographie du Livre d’Esther dont le sens resterait hermétique sans ce concours.
La controverse sur le Psaume 22 (21) est un des sommets de la controverse, de la rivalité théologique entre l’Eglise et la Synagogue. L’Eglise chrétienne voulut en faire une démonstration de la victoire de la Nouvelle Alliance sur l’Ancienne tandis que les rabbins dénièrent pied à pied cette appropriation du personnage d’Esther comme figure prémariale. Exaltation du ,nationalisme hébreu, le Livre d’Esther, et spécifiquement la fête de Purim qu’il institue, suscitèrent des sentiments antisémites. La controverse ne fut pas que théologique, elle a inspiré des pogroms.
L’ambition de cet ouvrage est de restituer la prolixité de cette recherche du sens du Livre d’Esther en éclairant l’immense iconographie (nous avons rassemblé plus de mille œuvres inspirées par l’Ecriture dont plus de sept cents référencées ici) par la citation de textes bibliques, de commentaires de rabbins et de théologiens chrétiens mais aussi par une mise en perspective historique car le récit d’Esther, s’il n’est pas l’Histoire, n’est pas qu’une histoire, un conte. C’est une fiction romanesque mais ancrée dans l’histoire du royaume achéménide et celle des royaumes sumériens et babyloniens, histoires connues de son auteur, un de ces Juifs exilés en terre païenne par Nabuchodonosor.
Récit biblique étrange donc que le lecteur agnostique peut lire comme un conte oriental mais où le croyant voit Dieu partout, un Dieu caché certes mais un deus ex machina dont Esther l’héroïne ne serait que l’instrument. Les multiples rebondissements du récit, parfois dramatique (l’édiction de l’édit de pogrom), parfois drôlatique (Haman l’orgueilleux et farouchement antisémite obligé de tenir la bride du cheval de Mardochée promené en triomphe dans les rues de Suse), violent (la vengeance terrible des Juifs qui tuent deux fois les dix fils d’Haman) mais aussi fort érotique (le roi Assuerus est obsédé par la beauté d’Esther), ont inspiré les artistes depuis deux millénaires. Les plus grands artistes chrétiens, Botticelli, Véronèse, Rembrandt, et tant d’autres, ont peint ces épisodes. La megila Esther fait exception au regard de l’aniconisme hébraïque : les fresques du IVe s. de la synagogue de Doura Europos, les bibles hébraïques du Moyen-Age enluminés, les rouleaux de prière à usage privé richement décorés, tout un art de célébration de Purim constituent un riche patrimoine iconographique.
Notre propos est d’accompagner la découverte de ces centaines d’œuvres par la citation de l’Ecriture dans ses deux versions, la massorétique, celle hébraïque retenu par le canon judaïque et par Luther, et la grecque, celle des églises chrétiennes catholique, orthodoxe et d’Orient. Les références à l’exégèse biblique et à l’extraordinairement riche interprétation midrashique sont appelées pour éclairer le sens des représentations et aussi pour expliquer des images inspirées par ces enrichissements talmudiques.
Le chapitre introductif Exégèse étudie les origines du texte, ses diverses versions, sa réception par les religions du Livre tandis qu’un chapitre Histoire montrera à quel point, le récit, une fiction écrite par un Juif de la diaspora restée vivre en Perse quelques temps après que le peuple hébreu ait été libéré par Cyrus, est imprégné de la culture babylonienne. Nous avons ainsi identifié le personnage historique ayant inspiré Haman. Le fait d’avoir emprunté au Panthéon suméro-babylonien, perse par adoption, les noms des deux protagonistes Mardochée et Esther manifestement dérivés des deux plus grands dieux : Mardouk et Ishtar fait pour nombre d’exégètes scandale. Dans le chapitre Syncrétisme nous donnons le sens religieux de cette onomastique, onomastique si difficultueuse en première lecture que l’exégèse tant judaïque que chrétienne a esquivé depuis deux mille ans d’expliquer pourquoi les deux héros juifs portent le nom de dieux mésopotamiens. L’iconographie est présentée en suivant chronologiquement le texte biblique avec des synthèses relatives à l’influence réciproque de l’art juif et de l’art chrétien, sur la numérologie, les interprétations politiques. Les objets de Purim ainsi que l’art Juif contemporain sont étudiés en tant que tels. La littérature dérivée du Livre, en particulier l’Esther de Jean Racine, mais aussi les œuvres cinématographiques et musicales sont présentées. Au total, c’est une sorte de Dictionnaire d’Esther et de son iconographie qui est présentée ici au lecteur.
Figure 1 - Esther en majesté - Maroc - XIXe s. MAHJ
Esther en majesté - Maroc - XIXe s. MAHJ
Cette représentation, selon nous d’inspiration marrane, montre
Esther désignée par le doigt de dieu (ou un yad ?) et le Triomphe
de Mardochée dans un style judéo-chrétien.
Summary
The Book of Esther, the megila Esher (the scroll of Esther) was not easilily canonized by the Jewish worship, It was cautiously accepted by the Fathers of the Church, and reluctantly by Luther. It is quite a strange biblical story that the agnostic reader can read as an oriental tale but where the believers see God everywhere, a hidden God, a deus ex machina of which Esther the heroine is instrumental. The many twists of the story, sometimes dramatic (the edict of the pogrom), sometimes funny (Haman the proud and fiercely anti-Semitic holding the bridle of Jewish Mordecai's horse walking in triumph in the streets of Susa), violent (the terrible revenge of the Jews who kill twice the ten sons of Haman and exterminate thousands of Gentiles, quite erotic (King Ahasuerus is obsessed by the beauty of Esther), have inspired artists for two millennia. The greatest Christian artists, notably Botticelli, Veronese, Rembrandt, have painted Esther episodes. The IVth century Doura Europos frescoes, the illuminated Hebrew bibles of the Middle Ages, the private worship decorated prayer scrolls, Purim art are the exception to Hebrew aniconism.
This book is a journey in Jewish, Christian and Islamic works of art illustrating the Bible story. The two versions, the Masoretic, the Hebrew version retained by the Judaic and Reformed canon, as well as the Greek one admitted by the Catholic, Orthodox and Eastern Christian churches are quoted . Christian exegesis and the flourishing two millenia old rabbinic comments and Jewish legends illuminate the meanings of so many representations of the Book of Esther.
Exegesis chapter discuss the origins of the text, its various versions, its reception by the monotheist religions. Old Mesopotamia and Persia history research demonstrate that, if the biblical scripture is a fiction by a Jew of the diaspora living in Persia some time later after the Hebrew people were liberated by Cyrus. The story is not the history but is full of historic references to historic events and persons. In this book we reveal who was the historic personage who inspired Haman. We explain why Mordekaï is named from Mardouk and Esther from Ishtar.
Jewish literature, Middle-Age novels and plays as well as Purim shpil are introduced. Christian literature notably Esther tragedy by Racine and Proust’ « Rachel quand du Seigneur » personnage are explained. Music and movies have been inspired by the book of Esther.
Jewish and Christian exegesis and art competed and influenced each other. Esther is claimed as a Virgin Mary annonciation. Jewish middle-age art, marrano one also, used Christian models to show Esther. Alba Bible is an surprising example of midrashic inspiration of a Catholic sponsored Bible .
More than 700 art works are eBook hypertext (url) linkedto let reader wathch them full page as well as all consult references.
Méthodologie
Exégèse
Les
citations du Livre d’Esther
de cet ouvrage sont celles de la Traduction Œcuménique de la Bible (TOB) ³ dans les deux versions, massorétique (M.) et grecque (G.), ainsi qu’incidemment celle d’ André Chouraqui (C.) ⁴ . Le lecteur peut retrouver la version intégrale de ces traductions sur les sites référencés en notes. Les citations du Coran sont dans la traduction de Malek Chebel aux éditions Fayard, Le livre de poche.
Iconographie
Les œuvres d’art ne sont pas reproduites dans cet ouvrage pour respecter les droits éventuels associés mais sont consultables en ligne en cliquant sur le lien hypertexte. Il est donc recommandé de consulter de préférence à cette fin la version électronique de cet ouvrage qui comporte les liens hypertexte (url) permettant de les visualiser sur internet par un simple double clic. Une table rassemble l’ensemble des œuvres.
Sémantique
Les mots en langue étrangère sont signalés en italiques. Un glossaire figure en fin d’ouvrage.
Certains noms font l’objet de plusieurs orthographes admises : Ishtar, Istar,… Mardouk, Marduk,… Ahasuérus, Assuérus,… Esther, Estèr,… Mardochée, Mordekaï,… Haman, Aman,… Vashti, Washti,… Nous avons conservé dans les citations l’orthographe de l’auteur et pour ce qui nous concerne, privilégié pour la facilité de lecture et de référencement de l’index : Ishtar, Mardouk, Assuérus, Esther, Mardochée, Haman, Vashti.
Le Livre d’Esther est, dans le culte judaïque, comme tous les livres saints, écrit ou imprimé sur un rouleau en hébreu une megila (s) megilot (pl). L’orthographe française en varie : méguila, meguila, méguilat, méguillah, megila… Nous retenons pour l’indexation megila conservant l’orthographe des auteurs cités.
Références croisées
Les développements appelant la lecture de plusieurs chapitres de l’ouvrage sont référencés par des renvois par lien hypertexte au sein du texte surlignés.
Glossaire
Un glossaire des mots en langue étrangère figure en annexe.
Table des illustrations
L’ensemble des œuvres référencées par lien ou citation dans l’ouvrage figurent dans une table des illustrations qui sont conultables en accès direct par lien hypertexte dans la version électronique de ce livre. Parmi les très nombreuses reproductions de cet ouvrage, un florilège dont le plus ancien codex du Livre d’Esther déchiffré récemment dans les manuscrits de la Qumran, site près de la Mer morte :
Figure 2 - Manuscrit de Qumran – Esther – Fragment – 2e s. av. J.-C.
Manuscrit de Qumran – Esther – Fragment – 2e s. av. J.-C.⁵
Figure 3 - Bible de Rabula, Syrie, VIe s.
Bible de Rabula, Syrie, VIe s.
Figure 4 - Bible, 1109, Dijon, Bibl. mun., ms 14, fol. 122v.
Bible, 1109, Dijon, Bibl. mun., ms 14, fol. 122v. ⁶
Figure 5 - Esther with correction The Bodleian Libraries, The University of Oxford, 1201 – 1225
Esther with correction MS. Bodley Or. 46, fol. 129a, 129b The Bodleian Libraries, The University of Oxford Date: 1201 – 1225 ⁷
Figure 6 - Bible de Gutemberg, Livre d’Esther, 1455, The Morgan Library
Bible de Gutemberg, Livre d’Esther, 1455, The Morgan Library
Figure 7 - Bible historiale de Jean Bondol et Pierre Comestor, XIVe s. Festin d'Esther
Bible historiale de Jean Bondol et Pierre Comestor, XIVe s. Festin d'Esther ref 2.18
Figure 8 - Bible d’Utrecht, 1430, Le livre d'Esther
Bible d’Utrecht, 1430, Le livre d'Esther XE Bible d’Utrecht, 1430, Le livre d'Esther
Figure 9 - Rembrandt van Rijn, Willem Ruyter, ca. 1635, Rijksmuseum
Willem Ruyter als oosterse vorst, Rembrandt van Rijn, ca. 1635 - ca. 1640
Ce tableau intitulé de manière erronée « Assuerus assis » par un excellent auteur ⁸ représente en réalité selon la notice du Rijksmuseum l’acteur Willem Ruyter ce qui illustre la difficulté parfois de titrer certaines œuvres : festin de Vashti ou d’Esther, Esther ou Vashti à la porte du palais, première ou seconde lettre de Purim, intercession d’Esther ou rencontre entre la reine de Saba et le roi Salomon… Il existe ainsi plusieurs représentations de l’acteur Willemn Ruyter par Rembrandt qui lui servit de modèle pour représenter aussi bien Saint Augustin qu’Assuerus.... ⁹
³ Traduction Œcuménique de la Bible https://lire.la-bible.net/
⁴ André CHOURAQUI, La Bible http://nachouraqui.tripod.com/id91.htm
⁵ Rabbi Asher Tov-Lev, Newly Deciphered Qumran Scroll Revealed to Be Megillat Esther, https://thetorah.com/newly-deciphered-qumran-scroll-revealed-to-be-megillat-esther/
⁶ TRIVELLONE Alessia, triomphe d’esther, ambiguïté d’assuérus église et royauté à cîteaux sous l’abbatiat d’étienne harding , CNRS UMR 5594 ARTeHIS Université de Bourgogne, Dijon, https://www.brepolsonline.net/doi/pdf/10.1484/J.RM.5.101202
⁷ BRACKMAN Eli Rabbi, Books of Esther, Manuscripts at Oxford, Oxford University Chabad Society Feb. 2018
⁸ CARRUTHERS Jo, Esther in the centuries, Blackwell publishing, 2008, Plate 2
⁹ https://www.pubhist.com/w34022, https://www.pubhist.com/w9626
Exégèse
Le Livre d’Esther, un palimpseste
On peut qualifier le Livre d’Esther de palimpseste, le texte initial ayant été, selon les exégètes, soit réduit soit enrichi de passages à connotation religieuse. Des incohérences dénotent cette longue transmission dont la plus flagrante est que le roi perse soit ainsi désigné comme Ahasuerus (Xerxès) dans la version hébraïque mais comme Artaxerxés, son fils, dans la version grecque. La datation de l’ouvrage est incertaine. Son-ses auteur(s) sont l’objet de controverses. La découverte récente d’un fragment du Livre d’Esther dans les manuscrits de Qumran apporte une pièce nouvelle et importante à l’étude de l’Ecriture.
Sources
Nous présentons les sources bibliques selon un ordre chronologique.
L’original, un probable Proto-Livre d’Esther du IVe s. avant J.-C. perdu
En termes de sources, il existe deux sources du livre d’Esther, une source écrite en hébreu, dite hébraïque ou massorétique – que nous citons dans cet ouvrage comme « M. » -, et celle rédigée en grec intégrée au canon catholique et référencé par nous « G. ». Certains exégètes identifient dans le texte la trace d’une source plus ancienne, celle d’un « proto-Esther ». Cette hypothèse a été renforcée par la découverte de fragments du Livre d’Esther dans les manuscrits de Qumran, antérieurs à la version établie par les massorètes, car ces fragments comportent des passages religieux. ¹⁰ « Il s’avère que le texte hébreu constitue, en réalité, la réécriture d’un texte plus ancien, le proto-Esther, qu’il est possible de reconstituer à partir d’une des deux formes grecques du livre. » ¹¹ ¹² La datation de ce texte initial disparu est incertaine.
L’hypothèse historiciste d’une rédaction par Mardochée, personnage ayant réellement existé, est rejetée par l’exégèse moderne mais on figure encore dans des encyclopédies fondamentalistes en ligne qui reprennent les affirmations jusqu’au XIXe siècle de certains théologiens.
Le canon judaïque fut établi par la Grande Assemblée à partir probablement d’un original en araméen. Signalons d’ores et déjà qu’une part significative du midrash raisonne à partir non seulement de la version massorétique mais aussi de celle grecque bien que non canonique. Selon Origène c’est cette version originale qui aurait été traduite par Theodotion au IIe s. et qui avait été consultée au 1er s. par Flavius Josèphe pour rédiger le chapitre XVI de ses Antiquités juives qui fait fond sur une version manifestement composite du texte. ¹³
L’hypothèse d’un « proto-Esther » est contestée par certains exégètes. Les commentateurs juifs considèrent habituellement les passages grecs comme des adjonctions tardives : « Les additions ont été probablement faites à l’époque des Maccabées par le peuple hébreu qui espérait une libération rapide par l’intervention divine. Leur objet est principalement de suppléer à l’absence de références religieuses dans le livre canonique » ¹⁴ .
Le midrash propose une autre explication à l’absence de référence au nom de Dieu : les passages religieux évoquant le nom de Dieu auraient été oblitérés par les massorètes pour éviter que le nom de YHWH soit profané par des non Juifs qui auraient pu accéder au Livre puisque rédigé en un pays païen, la Perse.
Manuscrit de Qumran (IIe s. avant J.-C.)
On a longtemps cru le Livre d’Esther absent des manuscrits d’époque proto-massorétiques découverts à Qumran jusqu’au déchiffrement très récent d’un fragment désigné « 10QEsth » qui est, à date, le plus ancien codex d’Esther connu. Ce fragment semble bien dérivé du Livre d’Esther. Ce codex était jusqu’alors illisible car taché de vin dont l’analyse chimique moderne suggère une pratique du Purim par la communauté religieuse. Non seulement ce codex serait celui du Livre d’Esther mais lu lors d’un repas de Purim, il aurait été rendu jusqu’à aujourd’hui illisible par le renversement d’une coupe de vin rituel ! ¹⁵
Source hébraïque massorétique (1er jusqu’au VIIe-Xe s.)
Cette source, reconnue par la religion hébraïque et le culte réformé est basée sur le texte fixé à la fin du 1er s. par les massorètes. Initié par les Soferim dès avant la période macchabéenne (1er s.) puis poursuivi par les Massorètes, le canon hébraïque fut établi entre le VIIe et le Xe s. ¹⁶ ¹⁷ probablement sur la base d’un original en araméen ¹⁸.
Vetus latina (IIe s. et au-delà)
La Vetus latina, traduction en latin à partir des textes grecs, est aujourd’hui écartée au bénéfice des traductions à partir des originaux écrits en hébreu (AT) partiellement en araméen (AT tardif) et grec (NT).
Source grecque : la Septante (~ IIIe avant J.-C.)
La Septante, traduction supposée établie par soixante-douze juifs à la demande de Ptolémée II pour sa fameuse bibliothèque d’Alexandrie, fut rejetée par le judaïsme rabbinique, notamment lors de l’Académie de Yabneh (~ 70-80) ¹⁹. La Septante servit de base à la traduction de Jérôme (Vulgate) ainsi qu’aux versions coptes, arméniennes et éthiopiennes (en langue guèze) ²⁰ du texte. La datation de la Septante est incertaine - 385 avant J.-C ²¹ -270 avant J.-C. ²² Une date encore plus récente (100 avant J.-C.) est parfois défendue. ²³
L’origine des ajouts grecs à la version massorétique, traduction d’un original hébreu et/ou araméen plus ancien, le proto-Livre d’Esther, ou invention des rédacteurs de la Septante, reste une question ouverte.
Flavius Josèphe 1er S.
Flavius Josèphe (37-100) reprend dans ses Antiquités judaïques pour l’essentiel la version hébraïque mais fait avec quelques emprunts à la version grecque, désignant ainsi le roi comme Artaxerxés et intégrant également des aggadot. La grande réputation de cette version dans la culture occidentale classique et son syncrétisme ont servi de passage thématique obligé de l’iconographie occidentale. ²⁴ ²⁵
Figure 10 - Flavius Josèphe, Les antiquités judaïques
Antiquités judaïques
Vulgate, traduction latine de Jérôme Ve s.
Les imprécisions de la Vetus latina conduisent Jérôme de Stridon (390-405) à établir une nouvelle traduction en latin, la Vulgate, à partir des textes hébreux pour l’AT et depuis le texte grec pour le NT. ²⁶ C’est cette version que Gutemberg imprimera en 1454 : Incipit d’Esther de l’exemplaire de la Bibliothèque Morgan.
Figure 11 - Bible, Incipit d'Esther, Morgan library
Incipit d’Esther de l’exemplaire de la Bibliothèque Morgan
L’entreprise de Jérôme fut en son temps accueillie avec réticence par saint Augustin qui lui écrivit : « Quant à ton entreprise de traduction en langue latine des Saintes Ecritures du canon… il faudrait que tu fasses ressortir ce qui sépare la traduction de celle des Septante dont l’autorité est, plus que toute autre, à considérer. Quant au texte hébreu, je ne puis assez m’étonner de ce qu’y puisse se trouver quoi que ce soit qui ait pu échapper à tant de traducteurs si versés en cette langue », allusion transparente à la traduction d’Origène. ²⁷
« Par rapport au texte hébraïque canonique, la Vulgate présente six adjonctions :
Vulg. 11,2-12,8 : des morceaux préliminaires relatant comment Mardochée sauva la vie du roi Artaxerxés
Vulg. 13,1-7 : l’édit d’Artaxerxés ordonnant le massacre des Juifs
Vulg. 13,8 – 14-19 : la prière de Mardochée et la prière d’Esther
Vulg. 15,1-6 : l’entrée d’Esther au péril de sa vie
Vulg. 16,1-24 : le deuxième édit d’Artaxerxés dénonçant Aman et sauvant les Juifs
Vulg. 10,4 – 11,1 : l’interprétation du rêve de Mardochée » ²⁸
Haggadah (glose rabbinique)
Introduction
Le Livre d’Esther est commenté par plusieurs
ouvrages haggadiques que nous référençons dans le corps de cet ouvrage. Citons :
Les Talmud
Le Talmud de Babylone (VIe s.) intègre un commentaire
d’Esther : La Megila 12 a-b
Le Talmud de Jérusalem (VII-Ve s.)
Deux targounim
Le Targum rishon (le premier) (700)
Le Targum scheni (le second) (900)
Midrash
Midrash Rabbah d’Esther dit également Esther Rabba qui
intègre les deux targounim (XVIe s.)
Midrash Pirke de Rabbi Eliezer
Midrash Leqah Tob
Midrash Ben Abba Gouryôn (Xe s.)
Panim Aherim
La Bibliothèque d’Oxford conserve une remarquable collection de manuscrits de commentaires du Livre d’Esther reproduits et remarquablement commentés par le Rabbi Eli Brackman ²⁹ : 1. Thomas Bodley’s Book of Esther with correction 2. Aggad’ta d’Megilta – Midrash Abba Gorion 3. Rashi commentary on Esther 4. Etz Chaim – Laws of Megillah 5. Maimonides’ Mishneh Torah – Laws of Megillah 6. Gersonides commentary on Esther 7. Abraham Saba and Isaac Arama
Tosefta et Gemara
³⁰
La Gemara du Talmud de Babylone contient en 7,a des commentaires sur l’origine du Purim dont il est dit qu’à l’origine c’était simplement une fête locale à Suse et qui fait part des hésitations des rabbins à introduire le Livre d’Esther dans le canon et les raisons qui le firent finalement admettre ainsi que sur la traduction commandée par soixante-douze anciens, qui, chacun travaillant dans une maison séparée, aboutirent à une traduction identique à l’exception de quelques passages. Les pages 10b à 17a forment un commentaire midrashique haggadique du Livre d’Esther.
La Gemara du Talmud de Jérusalem mentionne des festivités lors du mois d’Adar comparables au Purim qui incluaient le jour de Trajan (12 Nidar) et le jour de Nicanor (13 Nidar).
Targoumim (~ 700 et 900)
Il existe deux targounim (traduction en araméen de l’original hébraïque) du Livre d’Esther. Le premier targum rishon datant de 700, le second targum scheni rédigé en 900 environ ³¹ . Ces deux targounim réécrivent le récit avec des enrichissements tirés notamment du Jossipon ³² ainsi que de passages de la version grecque ; ces targounim incluent ainsi le rêve de Mardochée, pourtant non canonique pour les hébreux. Le targoum scheni (second targoum) comporte également le récit d’une rencontre entre le roi Salomon et la reine de Sabba « qui voit le roi commander une armée impressionnante d'animaux, d'oiseaux et d'esprits démoniaques comme ses sujets » ³³ récit proche de celui de la sourate 27 du Coran. Les deux Targounim d’Esther ont été composés très probablement en Palestine au vu de l’araméen employé. La datation des Targounim ne fait pas consensus entre exégètes ³⁴
Midrash (XVIe s.)
« Dans le Talmud de Jérusalem (Traité megila) nous lisons : il y a lieu d’expliquer l’histoire d’Esther de manière midrashique » ³⁵
Figure 12 - Midrash Rabba Esther, 1566, BNF
Midrash Rabbah Esther, BNF, 1566
Figure 13 - Midrash Esther, Yémen, 1596, British Library
Midrash Esther, Yémen, BL, 1596
Le Livre d’Esther est un des dix midrash haggadiques dits Midrash Rabba « Grand Midrash » ³⁶ dont les plus anciennes éditions datent du XVIe s. ³⁷ telle celle conservé à la BNF ³⁸ ³⁹ Les targounim sont intégrés dans le Midrash Meguillat Esther, désigné également comme Esther Rabba ⁴⁰, qui s’inspirent également d’un « riche matériau haggadique fourni par les commentaires sur le rouleau d'Esther, lu depuis la période la plus ancienne dans les cérémonies publiques de Pourim ». ⁴¹ Le Midrash autorise une lecture ésotérique du Livre d’Esther ⁴². Outre le Midrash Esther Rabba, il existe le Midrash Pirke de Rabbi Eliezer, le Midrash Leqah Tob ainsi qu’un Midrash Ben Abba Gouryôn (Xe s.) dont la datation, postérieure ou antérieure, à celle du Midrash Esther Rabba fait débat. ⁴³ ⁴⁴ Il faut citer en outre le Panim Aherim. ⁴⁵
L’iconographie du Livre d’Esther s’est nourrie de la confluence de l’exégèse, de la glose rabbinique, d’interprétations kabbalistiques, de légendes diverses car « au Moyen-Age, quand il n’y avait pas de texte imprimé et quand peu de gens avaient la possibilité de lire, la Bible était transmise aux masses moins sous sa forme textuelle que dans des élaborations fleuries des prédications et de l’homélie » ⁴⁶. Sur l’importance du récit autour d’Esther dans la culture juive sépharade cf. le livre de VASSAS Claudine, Esther Le nom voilé. ⁴⁷
Josippon (IX-Xe s.)
Attribué à Joseph ben Gorion ou Josèphe Gorionides, le Jossipon, écrit en Italie entre le IXe et le Xe siècle le Sefer Josippon est une histoire des Juifs depuis la destruction de Babylone (539 av. J.-C) jusqu’à la chute de l’Etat juif (70). Cet ouvrage connut une grande renommée avec la première édition (Mantoue 1476) soit antérieurement à l’édition des premières Bible hébraïque (Venise 1517 – Bomberg 1525). Le Josippon repris par la Chronique de Jerahmel contient des passages des apocryphes notamment les prières d’Esther et de Mardochée. ⁴⁸
Ouvrages de synthèse des sources haggadiques
On trouve une compilation de ces interprétations dans le Meam Loez rédigé à la fin du XIXe s. par le rabbin Rafael Hiya PONTREMOLI, à Smyrne, en 1864 ainsi que dans le dernier tome, tome VI, de Les Légendes des Juifs rédigé entre 1909 et 1938 par Louis GUINZBERG. Nous citons et référençons amplement ces deux ouvrages ainsi que le Midrash Rabba Esther dans nos commentaires iconographiques.
Exégèse hébraïque
« Dans la culture juive, le livre d’Esther a toujours revêtu une grande importance … centre de la liturgie de la fête de Purim … considéré comme un modèle de comportement ainsi qu’une source de réconfort et d’inspiration dans les époques d’expulsions et de persécutions … le livre donne une description précise et colorée de la vie de cour et du rôle du courtisan juif en vue d’empêcher la ruine de son peuple … » ⁴⁹ Les commentaires et sur-commentaires du Livre d’Esther font florès ce qui s’explique parce qu’avec le Pentateuque, les Rouleaux étaient les livres les plus lus à la synagogue.
Sources et inspirations
L’exégèse hébraïque du Livre d’Esther est immense et diverse, marquée par « la culture, la société et l’expérience de l’exégète médiéval » note Barry Dov Walfish ⁵⁰. C’est vrai de toute l’interprétation du Livre comme le montre le sens de Dieu caché et le syncrétisme que lui donnèrent les marranes puis les azkhénases cf. Art juif, Esther en majesté ou la récupération par le nationalisme flamand. « La tragédie de l’expulsion d’Espagne en 1492 eut un impact très puissant sur les exégètes qui la vécurent comme Abraham Saba (XV-XVIe s.) et Zacharie ben Josué ben Saruk (XVe s.) » ⁵¹
Les commentaires hébraïques puisent « dans la littérature midrashique … le Livre de Josippon lequel encore qu’écrit en Italie au Xe s. était universellement attribué à Flavius Josèphe et donc considéré au Moyen Age comme une source historique authentique, la Kabbale, ainsi que des sources non juives empruntées à la philosophie, à la littérature scientifique, aux sciences profanes et spécialement aux œuvres d’Aristote et surtout à l’Ethique à Nicomaque. Ajoutons l’étude de la rhétorique ainsi que de l’astrologie ». ⁵² La gématrie est utilisée abondamment par le Meam Loez cf. son chapitre conclusif : « Sachez que le nombre de versets de cette Megila est de 166 comme le nombre de mots de la paracha de va-yavo’ Amaleq, plus ceux de zakhor « ‘et ‘acher lekha Amaleq. … Nous serons délivrés de nos adversaires (Ps. 136,24) » ⁵³ Cf. L’astrologie, une passion juive héritée de la déportation à Babylone
Sur-commentaires
⁵⁴
Figure 14 - Commentaires sur le Livre d'Esther, 1201, Bibliothèque Bodléiane
Commentaires sur le Livre d’Esther, 1201, Manuscrit, Bibliothèque Bodléiane,
Deux mille ans de commentaires sur le Livre d’Esther titre justement une belle exposition de l’Université d’Oxford ⁵⁵ Le midrash fait l’objet de sur-commentaires depuis le Moyen-Age. Nous ne citerons que les plus célèbres sachant que la glose rabbinique sur le Livre d’Esther est immense et toujours très active comme en témoignent les très nombreux commentaires en ligne sur internet notamment le détail des prescriptions présidant à la célébration de Purim.
Saddya Gaon (882-942) auteur du Tasfir (mot arabe pour commentaire) de la Torah et d’un commentaire du Livre d’Esther intitulé Le Livre de la convivialité en exil ⁵⁶
Figure 15 - Saddya Gaon, Xe s.Tafsir
Tasfir
Rabbi Salomon fils d'Isaac le Français plus connu sous les noms de Rachi, Rabbi Salomo et Salomon de Troyes, est né à Troyes (France) (1040-1105) ⁵⁷ Les commentaires de Rachi font l’objet d’éditions modernes et sont encore très référencés aujourd’hui sur certains blogs. ⁵⁸
Figure 16 - Commentaires de Rashi
Commentaires de Rashi sur le Livre d’Esther
Joseph ben Simeon Qara (1065-1135) disciple (?) de Rashi
Samuel ben Meir (1080-1157) « Rashi fixait une motivation théologique à son commentaire : il voulait démontrer l’existence de la Providence et de la justice divine dans les événements humains … Contrairement à Rashi qui incorporait à ses commentaires beaucoup de matériel midrashique, Joseph ben Simeon Qara et Samuel ben Meir suivent plutôt la méthode dite du peshat cherchant à comprendre les versets dans leur contexte sans recourir aux interprétations midrashiques, méthode qui avait donné lieu à des interprétations trop libres ». ⁵⁹
Abraham Ibn Ezra (1089-1164) rabbin andalou qui ouvre ses commentaires sur des realia, sur la vie de cour ⁶⁰ est salué par Spinoza dans sans son Traité théologico-politique (1670) comme un esprit libre car, ayant sous-entendu que la Torah n’a pas été écrite par Moïse, il le reconnut comme un de ses précurseurs dans la critique textuelle. ⁶¹
Figure 17 - Ibn Ezrah Avraham ben Me'ir, Commentaires, XIIe s.
Ibn Ezrah Avraham ben Me'ir, Commentaires sur Esther, Vatican, XIIe s.
La prolifération des commentaires du Livre d’Esther oblige des auteurs comme Joseph Ibn Kaspi (1280-1340), Isaac ben Joseph ha-Kohen (XIV-XVe s.), Levi ben Gershom dit Gersonide (1288-1344) à justifier leur entreprise par une originalité revendiquée. ⁶²
Bahya ben Asher (1255-1340) analyse le Livre d’Esther selon la méthode exégétique « PaRDeS qui renvoie aux quatre modes de la connaissance : peshat, le sens littéral – remez, l’interprétation philosophique ou allégorique, derash, interprétation midrashique ou homolytique, sod, interprétation mystique. ⁶³
Manuscrits du Livre d’Esther
Hormis un fragment des Manuscrits de Qumran (Mer Morte), les manuscrits le plus anciens du Livre d’Esther sont les codex sinateicus et vaticanus, pour les versions en langue grecque, el les codex d’Alep et de Léningrad, pour la version hébraïque.
Manuscrit de la Mer morte( IIe s. avant J.-C.)
Figure 18 - Manuscrit de Qumran – Esther – Fragment –2e s. av. J.-C.
Manuscrit de Qumran – Esther – Fragment – 2e s. av. J.-C. ⁶⁴
Un fragment des manuscrits de la Mer Morte, Qumram, narre des événements se déroulant à la cour d’un roi de Perse qui pourrait être inspiré du Livre d’Esther mais le sens général reste peu clair. ⁶⁵ ⁶⁶
Codex en langue grecque (IVe s.)
Le codex sinateicus (IVe s.) ⁶⁷ et le Codex vaticanus de la même époque, tous deux reprenant le texte de la Septante contiennent le Livre d’Esther extrait du sinateicus :
Figure 19 - Codex Sinateicus, Esther, IVe s.
Livre d’Esther (extrait 1,20)
Codex hébraïques (X-XIe s.)
Le Codex d’Alep (910-920) ⁶⁸ ⁶⁹ et le Codex de Léningrad (1010) ⁷⁰ ⁷¹ sont les bases de la version massorétique canonique actuelle.
Figure 20 - Codex d'Alep, 910
Codex d’Alep
Figure 21 - Codex de Léningrad, 1010
Codex de Léningrad
La bibliothèque John Rylands de Manchester conserve des fragments de codex du Livre d’Esther non encore datés ( ?) , découverts dans la guenizah de la synagogue Ben Ezra du Caire reconstruite au IXe s. L’essentiel des dépôts d’écrits datent des Xe-XIIIe s. ⁷²
Figure 22 - Codex du Livre d'Esther, Bibliothèque John Rylands
Codex du Livre d’Esther
Version hébraïque et version grecque
Des intentions différentes ?
Le livre d’Esther est un conte oriental dont la morale, la victoire du peuple juif sur ses ennemis grâce à une fille d’Israël, lui valut, malgré son ton fort profane dans le texte massorétique, d’être intégré au canon juif. La version deutérocanonique (grecque) dont certains exégètes pensent qu’elle est peut-être plus fidèle à un texte initial (proto-Esther) est également une parabole à l’usage de la diaspora juive mais Dieu-YHWH y est invoqué, c’est lui qui agit explicitement et non caché comme dans la version hébraïque.
Source hébraïque et source grecque
« Le plus ancien manuscrit hébreu du livre d'Esther date du XIe s. En plus du texte massorétique, on dispose de deux versions en grec. La première, dit « Texte Bêta », est celle qui figure dans la Septante. Il s'agit d'une traduction libre d'un texte hébreu qui comporte à la fois des additions et des omissions par rapport au texte massorétique. Les additions A, C et D sont vraisemblablement la traduction d'un original écrit dans une langue sémitique, l'hébreu ou l'araméen. Les additions B et E sont des compositions originales en grec. Le Texte Bêta se termine par un colophon qui indique que le texte a été traduit par un certain Lysimaque de Jérusalem ⁷³ et amené en Égypte par un lévite du nom de Dosithée. La seconde version grecque est le « Texte Alpha », autrefois attribué à Lucien d’Antioche. Son récit est plus court que celui du texte massorétique. Sa relation avec le Texte Bêta et le texte massorétique est discutée. Par rapport au Texte Bêta, il contient aussi les additions qu'il lui emprunte probablement. Pour ce qui est des passages communs avec le texte massorétique, il peut s'agir soit d'une révision du Texte Bêta, soit d'une traduction basée sur un texte hébreu différent de celui qui a servi de base au texte Bêta. » ⁷⁴ Cette notice de Wikipédia n’est pas actualisée de la traduction du manuscrit de Qumran.
Episodes et ajouts de la version grecque
« Songe de Mardochée » et « Complot contre le roi » (début)
« Édit d'Artaxerxés » (ap. 3, 13)
« Mardochée à Esther » (ap. 4, 8)
« Prière de Mardochée » et « Prière d'Esther » (ap. 4, 17)
« Rencontre d'Esther et du roi » (ap. 5, 5)
« Nouvel édit d'Artaxerxés » (ap. 8, 12)
« Explication du songe de Mardochée » (ap. 10, 3)
« Conclusion de la version grecque ».
Codification A – D
Carey Moore estime que les additions B et E visent à renforcer l’apparence d’historicité du récit, celle D à le rendre plus dramatique, les A, F et C à en faire un récit religieux. ⁷⁵
Les invocations religieuses de l’Esther grecque
Une fois éveillé, Mardochée, qui avait vu ce songe et ce que Dieu avait décidé de faire, garda cela dans son cœur et, jusqu’à la nuit, il eut le désir de le comprendre par tous les moyens. G. 1, A, Le songe de Mardochée Et Mardochée disait : « C’est de Dieu que ces événements sont venus » G., 10, Explication du songe de Mardochée
La version grecque comporte trois invocations religieuses appelant à l’intercession divine :
- Songe de Mardochée
- Prière de Mardochée
- Prière d’Esther
Ces invocations fondent les interprétations apologétiques de l’Eglise catholique.
L’iconographie juive du Moyen-Age ainsi que certains commentaires rabbiniques montrent une connaissance de la Vulgate par les auteurs malgré son rejet par le culte judaïque. La pamoison d’Esther, absente de la version massorétique, est ainsi commentée par le midrash.
Haman eunuque ou Grand vizir ?
Le septième jour, le roi était gai ; il dit alors à Haman, Bazân, Tharra, Bôrazè, Zatholtha, Abataza et Tharaba –les sept eunuques au service du roi Artaxerxés – de faire venir la reine devant lui pour la faire trôner, la ceindre du diadème et montrer aux ministres et aux nations sa beauté ; c’est qu’elle était belle ! G. 1,10-11
Le septième jour, le roi était gai, à cause du vin. Il dit à Mehoumân, Bizta, Harbona, Bigta et Avagta, Zétar et Karkas – les sept eunuques au service du roi Xerxès de faire venir Vasti la reine, devant le roi, avec le diadème royal, pour montrer aux peuples et aux ministres sa beauté : c’est qu’elle était belle à regarder ! M. 1,10
L’épisode de la convocation par le roi de la reine Vashti à venir s’exhiber devant ses convives cite sept eunuques mais avec des noms d’opérette différents. Haman figure dans la liste de la version grecque. L’hypothèse qu’Haman ait été un des eunuques de la cour royale et non un dignitaire perse n’est pas incohérente avec la nature comploteuse et envieuse du personnage mais la version hébraïque en fait pour les besoins de la filiation de ce récit fort tardif de l’AT avec d’autres épisodes de l’AT un descendant de l’Amalek qui avait attaqué traitreusement les Juifs lors de l’exode. Cette discordance textuelle et hypothèse d’un Haman eunuque et non pas Grand Vizir n’est pas relevé par la littérature exégétique.
La pamoison d’Esther
Après avoir franchi toutes les portes, elle se tint devant le roi. Lui, il était assis sur son trône royal, revêtu de tous les atours de ses solennelles apparitions, tout couvert d’or et de pierres précieuses ; il inspirait une grande terreur. / Il leva alors son visage que la gloire enflammait, et, au comble de la fureur, il jeta un regard. La reine s’effondra ; dans son état de faiblesse, elle changea de couleur et inclina sa tête sur celle de la demoiselle d’honneur qui la précédait. G. D, Esther chez le roi v.6&7
L’épisode de l’évanouissement de la reine Esther n’est présent que dans la version grecque. Négligé voire écarté (?) par les artistes du au Moyen-Age qui figurent les seuls épisodes du couronnement de la reine, du triomphe de Mardochée, de la parution audacieuse de la reine ou encore de l’exécution d’Haman, cette pamoison fort suggestive fut abondamment illustrée à partir de la Renaissance. Elle fit alors florès chez les peintres baroques pour son motif propice à des effets dramatiques et suggestifs pour imposer, dans l’esprit de la Contre-Réforme, un passage rejeté par l’Eglise réformée. Bien que le midrash la commente, l’iconographie des megilot montre l’intercession conformément à la version massorétique comme une audience royale.
Classement du texte
Selon les cultes, le Livre d’Esther est classé différemment dans les Bibles et s’insère ainsi :
Le Tanakh range le Livre d’Esther au sein des Ketouvim, les Autres Ecrits ou Hagiographiques, qui forment la troisième partie, le T de Tanakh, après la Torah (La Loi, le Pentateuque), les Nev’im (Les Prophètes). Au sein des Ketouvim, Le Livre d’Esther est le cinquième des Hamech Megilot, les cinq rouleaux : Cantique des Cantiques, Ruth, Les Lamentations, l’Ecclésiaste, Esther. Ils sont suivis des Autres Livres historiques Daniel, Esdras, Néhémie, Livre des Chroniques.
Le texte débute par la lettre waw qui signifie « et » ce qui indique que le texte se plaçait dans une série. Le classement de la Bible hébraïque serait donc moins logique que celui de la Septante ou de la Vulgate selon certains exégètes chrétiens. ⁷⁶
Structure du texte
Sommaire de l’Ecriture
Selon les traductions, qui intègrent ou non les passages grecs du Livre d’Esther, le texte est structuré différemment. Nous reprenons dans cet ouvrage la Traduction Œcuménique de la Bible (TOB) dans sa version canonique référencée « M. » (pour massorétique) ** et deutérocanonique *** référencée « G. » (pour grecque) ⁷⁷ ainsi incidemment que la traduction d’André Chouraqui * ⁷⁸ ⁷⁹
Pour faciliter la lecture comparée, nous proposons ce sommaire des trois versions précitées :
Texte hébreu Ajouts grecs Texte grec
Chapitre 0. Le rêve de Mordekhaï - Le complot découvert *
Chapitre A. ***
Chapitre 1. Un festin - La répudiation de Vashti *
Chapitre 1.v.1 ***
Chapitre 1. La disgrâce de Vashti **
Chapitre 2.v.1 ***
Chapitre 2. Mordekhaï et Èstér - Èstér au harem - La reine Èstér - Le complot *
Chapitre 2. La montée d’Esther **
Chapitre 3. L’oppresseur des lehoudîm - La lettre *
Chapitre 3. Haman et les Juifs **
Chapitre 3.v.1 ***
Chapitre B. ***
Chapitre 4. Une clameur amère - Souviens-toi - Mordekhaï prie - Èstér prie *
Chapitre 4 Esther et son peuple **
Chapitre 4. V.1 et Chap. C Chap. D ***
Chapitre 5. Le sceptre d’or *
Chapitre 5. Esther chez le Roi. Le gibet pour Mardochée **
Chapitre 6. Le vêtement royal *
Chapitre 6. L’honneur de Mardochée **
Chapitre 7. Quelle est ta demande ? La pendaison de Hamân *
Chapitre 7. La chute d’Haman **
Chapitre 8. La bague du roi Le texte de la lettre *
Chapitre 8. Annulation des mesures antijuives **
Chapitre 9. La vengeance La fête de Pourîm *
Chapitre 9. Exécution des ennemis. Institution de la fête **
Chapitre 10. Mordekhaï est grand - Explication du rêve *
Chapitre 10. Conclusion**
Structure romanesque
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Le Livre d’Esther peut être lu de manière profane comme un conte oriental à suspense soutenant l’attention du lecteur par force rebondissements inattendus, comme un récit nationaliste exaltant la sauvegarde du peuple hébreu par une héroïne, Esther, ou comme un texte religieux où la main de Dieu est partout mais cachée. Ces lectures ne sont pas exclusives mais sont autant de sens, les deux premiers exotérique, le dernier ésotérique.
Remarquablement agencée l’intrigue s’organise comme un chiasme ou plutôt de trois chiasmes selon la sensibilité du lecteur.
Chiasme romanesque : l’insomnie du roi
Figure 23 - Doré Gustave, Lecture des annales par le roi Assuérus
Gustave Doré, Le roi Assuerus se fait lire les annales de son règne
Le point de bascule du chiasme est l’insomnie du roi qui le conduit à se faire lire les annales de son règne :
A Prologue : introduction à la cour du roi perse
B Premier décret du roi à propos des femmes
C Conflit entre Aman et Mardochée
D Insomnie du roi
C’ Triomphe de Mardochée sur Aman
B’ Second décret du roi à propos des Juifs
A’ Épilogue : Situation stable à la cour du roi perse
La tradition talmudique ne s’est pas trompée sur l’importance de cet épisode en imaginant que la lecture en ait été faite par l’un des fils d’Haman dont les tentatives pour sauter la narration du complot découvert par l’ennemi de leur père Haman furent rendues vaines par l’intervention d’un ange.
Chiasme nationaliste : le triomphe de Mardochée
Figure 24 – Rembrandt, Le triomphe de Mardochée
Rembrandt, Le triomphe de Mardochée
Le point de renversement du sort du peuple hébreu en est le Triomphe de Mardochée :
A Grandeur d’Assuérus
B Trois banquets pour les Perses
C Esther cache son origine, on pense que c’est une païenne
D Aman est nommé favori du roi
E Promulgation d’un édit contre les Juifs
F Échange de paroles fatidiques entre Mardochée et Esther
G Premier banquet entre Assuérus, Aman et Esther
H Zeresh et ses amis conseillent Aman : le Juif sera vaincu
Procession royale de Mardochée
H’ Ses amis et Zeresh conseillent Aman : le Juif sera vainqueur
G’ Deuxième banquet entre Assuérus, Aman et Esther
F’ Échange de paroles fatidiques entre Assuérus et Esther
E’ Promulgation d’un édit pour les Juifs
D’ Mardochée est nommé favori du roi
C’ Des païens se convertissent au judaïsme
B’ Trois banquets pour les Juifs
A’ Grandeur d’Assuérus et de Mardochée
L’improbable retournement du sort se