Books by Pierre Charbonnier
Texte introductif du numéro 33 de Tracés, "Revenir à la terre ?"
Accès ouvert : http://traces.re... more Texte introductif du numéro 33 de Tracés, "Revenir à la terre ?"
Accès ouvert : http://traces.revues.org/6974
In a world that can appear to have been cosmologically unified by centuries of globalization, the... more In a world that can appear to have been cosmologically unified by centuries of globalization, the claim that anthropology’s most urgent mission is to expose heterogeneous ontologies has a confounding ring. It has been heard as a call for anthropology to untether its mode of inquiry from the “ground” of the field and enter the atmosphere of pure speculation often favored by contemporary philosophy. The injunction, however, is to make another, unfamiliar intellectual move, which is at once entirely concrete and acutely metaphysical: to intensify the descriptive powers of anthropology to the point of provoking a crisis in the concepts fundamental to the European philosophi- cal tradition, both within and outside the social sciences. Several generations of anthropologists assumed that they could account for the indifference of certain indigenous peoples to modern distinctions—between nature and cul- ture, thing and person, and humans and animals—but without questioning the validity of using those very categories to make the explanation. When anthropologists instead accepted that these partitions form merely one means of distributing beings among others—began trying to do justice to those other ways of making worlds—it exited the reassuring framework of scientific inquiry for the unstable terrain of ontological comparison.
Les relations de l’homme et de son organisation sociale au milieu naturel ont longtemps été étudi... more Les relations de l’homme et de son organisation sociale au milieu naturel ont longtemps été étudiées dans le cadre d’une opposition entre nature et société. Mais la crise écologique invite à nous interroger sur ce partage, et à revenir sur le sens de ce clivage. L’objectif de ce livre est d’éclairer les ambiguïtés du rapport à la nature des modernes, en relisant du point de vue de la nature cette histoire jalonnée par trois oeuvres, Les formes élémentaires de la vie religieuse de Durkheim, La pensée sauvage de Lévi-Strauss et Par-delà nature et culture de Philippe Descola.
Y a-t-il un paradoxe à parler de la nature comme d’un fait social ?
Quelle signification et quelle valeur accorder aux sociétés restées indifférentes au partage entre nature et société ? Quels concepts mobiliser aujourd’hui pour faire face à la transformation de nos rapports collectifs à la nature ? Alors que la nature est de plus en plus humanisée et que les affaires humaines doivent en retour toujours plus composer avec elle, le grand partage du naturel et du social semble perdre toute pertinence.
Séminaires by Pierre Charbonnier
Conférence donnée dans le cadre du séminaire de Philippe Descola au Collège de France, "Cosmopoli... more Conférence donnée dans le cadre du séminaire de Philippe Descola au Collège de France, "Cosmopolitiques de la territorialité". 02/02/17
J'essaie d'y montrer que les sociétés industrielles entretiennent un rapport double au territoire, clivé entre un paradigme politico-légal et un paradigme écologique-économique. Cette duplicité, cette ubiquité, parvient aujourd'hui à son terme sous l'effet du changement climatique.
L'enregistrement débute par une introduction de Ph. Descola, ma conférence commence à 18mn.
Il s'agira cette année d'approfondir le questionnement sur la place de la nature dans l'histoire ... more Il s'agira cette année d'approfondir le questionnement sur la place de la nature dans l'histoire de la pensée politique moderne, en se donnant pour point de départ les révolutions politiques et industrielles du XIXe siècle. En faisant de l'appropriation et de l'abondance les conditions matérielles de l'exercice de la liberté, ces révolutions ont donné aux rapports collectifs à la nature une orientation historique qu'il s'agit aujourd'hui de dépasser. Le développement d'une philosophie politique écologique correspond donc à une transformation de ces catégories de la rationalité sociale, qui est à l'œuvre dans diverses traditions actuelles. Nous nous intéresserons donc à la fois à la dynamique historique des médiations entre nature et société, mais aussi aux propositions contemporaines élaborées pour en montrer la contingence, les limites, l'injustice.
Nous développerons notamment cette année les questions relatives à l'appropriation de la terre, des espaces de vie, de leurs capacités productives, à la fois à partir de cas empiriques présents et passés, et d'élaborations théoriques issues de la philosophie politique.
Ce séminaire peut être validé par tous les étudiants, soit comme séminaire libre, soit à l'intérieur de la mention « Études politiques ».
Ce séminaire sera consacré à la lecture d'une série de textes classiques de la pensée politique... more Ce séminaire sera consacré à la lecture d'une série de textes classiques de la pensée politique moderne, qui tous mettent en jeu la question des rapports entre les communautés humaines et l'environnement naturel. Il s'agira, cette année, d'examiner comment les rapports collectifs au milieu ont pris une dimension politique, dans une phase allant des critiques de l’économie politique (à partir de la seconde moitié du XIXe) aux tentatives actuelles de reconfiguration du couple nature/société chez Ph. Descola ou B. Latour. On se demandera quel genre de gouvernement (des hommes et des choses) émerge dans une société où la "nature" a été inventée, et mise en position d’objet pour le savoir, mais aussi pour l’appropriation. On étudiera donc, à travers des textes, la formation d'un espace de controverses centré autour de l'idée de nature (et d’autres qui lui sont liées, comme économie, science, etc.), et à partir duquel la question de l'environnement a pris une forme politique.
La liste des ouvrages discutés sera la suivante : Durkheim et Mauss : "De quelques formes primitives de classification" (in Mauss, Essais de Sociologie) ; A.-G. Haudricourt : "Domestication des animaux, culture des plantes et traitement d'autrui" (in La technologie science humaine) ; Marx, Le Capital ; Polanyi, La Grande Transformation ; Leopold, Almanach d'un comté des sables ; Odum, Environment, power and society ; Latour, Politiques de la nature ; Descola, Par delà nature et culture ; Pomeranz, La grande divergence ; Guha et Martinez-Alier, Varieties of environmentalism.
Papers by Pierre Charbonnier
La situation politique de l'écologie interroge. Apparemment fixés depuis une génération sous la f... more La situation politique de l'écologie interroge. Apparemment fixés depuis une génération sous la forme d'un parti impliqué dans la représentation démocratique – Les Verts, puis EELV, le discours et le mouvement écologiques débordent pourtant largement ce cadre. De plus en plus marqué depuis les années 2000, le recours tous azimuts à des arguments environnementaux, que ce soit du côté du pouvoir ou des contestations, alimente la perplexité, et peut-être la confusion. Quelle politique est adéquate pour répondre à la vulnérabilité des milieux naturels ? Dans quelles coordonnées idéologiques l'exigence d'une limitation environnementale de l'activité économique, d'une responsabilité écologique des personnes et de l'Etat, peut-elle s'exprimer ? Et si l'écologie n'appartient à aucun parti, à aucune frange particulière du spectre politique, alors comment se repérer dans la variété des discours publics sur l'environnement ? Les essais qui suivent tentent de répondre à ces questions en interrogeant la façon dont les trois grands blocs idéologiques modernes principaux que sont le libéralisme, le conservatisme et le socialisme, intègrent dans leurs discours des éléments environnementaux, des éléments qui ont trait aux conditions physiques, biologiques et territoriales de l'existence collective.
L 'histoire peut-elle donner raison par elle-même à un mouvement politique ? Nous sommes fondés à... more L 'histoire peut-elle donner raison par elle-même à un mouvement politique ? Nous sommes fondés à nous poser la question, aujourd'hui plus qu'hier encore, au sujet de l'écologisme, puisque, en apparence au moins, les transformations de la planète, du vivant et du climat plaident d'elles-mêmes pour une réponse écologique. Ce serait en quelque sorte le monde lui-même qui appellerait à sa protection, la conjoncture matérielle, sociale et économique qui fournirait à la simple intuition le geste critique approprié. Malheureusement, il n'en est rien : les événements ne parlent pas dans le champ de la politique avec une voix suffisante et il reste nécessaire d'élaborer la pensée politique de l'écologie à l'intérieur de l'espace idéologique contemporain. Une vision optimiste des décennies écoulées pourrait suggérer que le mouvement de protection de l'environnement est à l'évidence l'incarnation d'une nouvelle rationalité politique vouée à s'imposer, dans les régions du monde les plus industrialisées comme dans celles qui atteignent plus tardivement ce que l'on appelle encore le « développement ». Comme nous avons vécu par le passé l'émergence des droits individuels et de l'égalité, puis de la protection sociale contre les dégâts de l'économie de marché et, plus tard, la décolonisation et l'égalité des sexes, l'écologie serait la pointe d'un mouvement dans lequel les sociétés identifient leurs pathologies les plus graves et y répondent – de façon imparfaite et partielle, certes. La cause de l'environnement correspondrait alors à une distanciation à l'égard de l'idéal de progrès, orientée vers un progrès redéfini, un freinage nécessaire de l'ordre économique autrefois réputé répondre sans failles aux besoins de la société.
L'héritage de l'anthropologie structurale en France semble avoir fait l'objet d'un partage entre ... more L'héritage de l'anthropologie structurale en France semble avoir fait l'objet d'un partage entre au moins trois domaines et problèmes distincts : la différence des sexes, investie par Françoise Héritier, la différence des classes, investie par Maurice Godelier, et la différence entre nature et culture, investie par Philippe Descola notamment dans son ouvrage principal à ce jour, Par-delà nature et culture. Chacun de ces trois programmes de recherches s'est développé en exploitant en quelque sorte un point aveugle du structuralisme de Lévi-Strauss, en suggérant que ce qui apparaissait chez lui comme un ensemble de variables dans une combinatoire abstraite constitue en réalité des points de cristallisation de la dynamique sociale. De ce point de vue, Descola partage avec Héritier et Godelier l'ambition explicite de poursuivre sur un terrain politique l'oeuvre de leur maître commun, puisque l'écologie apparaît comme l'horizon critique de son travail, tout comme l'inégalité des sexes et la domination étaient parallèlement mis en question chez ses collègues anthropologues. L'ouvrage renoue au début des années 2000 avec un style théorique délaissé par l'anthropologie sociale, à savoir la synthèse comparative de grande ampleur. Il couronne ainsi la trilogie qui compose le canon de la profession d'anthropologue, puisque l'auteur avait publié en 1986 une monographie issue de son travail de terrain chez les Achuar d'Amazonie, La nature domestique, poursuivie ensuite en 1993 avec Les lances du crépuscule, récit ethnographique à la première personne. D'un point de vue d'histoire des institutions scientifiques, Ph. Descola apparaît donc comme un classique perdu au milieu des contestations postmodernes de l'autorité ethnologique, mais il présente également un visage plus conforme à la conjoncture épistémologique. En effet, l'ouvrage se situe pleinement dans le contexte des remaniements du couple nature-culture initiés par la sociologie des sciences de Bruno Latour ou de Donna Haraway, et il s'est singularisé dans le paysage intellectuel du moment en introduisant l'usage anthropologique du concept d'ontologie, promis à une postérité importante et disputée. À l'origine de ce livre se trouve l'indifférence totale affichée par les Achuar, le groupe jivaro du piémont andin qu'il étudie à partir des années 1970, au partage intuitif que nous opérons entre d'un côté des personnes humaines capables d'interaction symbolique et de l'autre des choses naturelles simplement prises dans les déterminations physiques aveugles. L'écologie symbolique des Achuar distribue en effet les propriétés de la personne de façon plus libérale que dans le contexte moderne, puisque les plantes cultivées par les femmes dans les jardins et les proies chassées par les hommes, par exemple, entretiennent avec leurs alter ego humains des relations de parenté ou encore de réciprocité guerrière et prédatrice. C'est la notion d'animisme, reprise de Tylor, qui est choisie pour qualifier ce système de relations. Le pouvoir heuristique de l'animisme amazonien tient à l'inversion qu'il effectue par rapport à l'organisation moderne (dite naturaliste par Descola) des rapports au monde.
Este artículo investiga el trabajo y el pensamiento del economista Joan Martínez Alier. Se trata ... more Este artículo investiga el trabajo y el pensamiento del economista Joan Martínez Alier. Se trata de un intento por desarrollar la principal idea defendida en El ecologismo de los pobres: el modo de desarrollo capitalis-ta y la economía de mercado no solo causaron la autonomización de la economía frente a la sociedad, sino que también desconectaron la eco-nomía de las regulaciones metabólicas elementales de nuestro planeta. Según Martínez Alier, la economía ecológica y la sociología medioam-biental deberían, pues, encontrar un campo analítico y político común. Aquí, tratamos de comprender las implicaciones epistemológicas y po-líticas de esa tesis fundamental.
ABSTRACT This paper investigates the work and thinking of economist Joan Mar-tinez Alier. It is an attempt to develop the main idea advocated in The Environmentalism of the Poor: the capitalist mode of development and the market-oriented economy not only caused the autonomization of the economy from society, but also disconnected the economy from the basic planetary metabolic regulations. According to Martinez Alier, ecological economics and environmental sociology should then find a common analytical and political ground. Here, we try to understand the epistemological and political implications of this fundamental thesis.
Tracés, 2017
OPENACCESS ONLINE PAPER : http://traces.revues.org/7071
Redécouvrir la terre est une explorati... more OPENACCESS ONLINE PAPER : http://traces.revues.org/7071
Redécouvrir la terre est une exploration spéculative des enjeux politiques et conceptuels liés au rôle que jouent le sol et le territoire, dans la redéfinition de nos cadres d’appréhension du présent. Ce texte confronte les points de vue de trois philosophes, Pierre Charbonnier, Bruno Latour et Baptiste Morizot. Le dialogue part d’une tension qui traverse l’actualité politique : il nous faut d’une certaine manière réinvestir la terre face à l’abandon que représente la modernisation industrielle et ses dégâts, mais il nous faut aussi résister à l’émergence d’un conservatisme localiste, focalisé sur l’assignation au sol comme source d’identité. À partir de ce constat, les auteurs proposent des pistes pour reconstruire une pensée et une sensibilité politiques adéquates à la conjonction actuelle entre l’explosion des inégalités et l’horizon du changement climatique.
Le pari de ce dossier consiste à montrer que l’opération critique à l’œuvre dans le mouvement des... more Le pari de ce dossier consiste à montrer que l’opération critique à l’œuvre dans le mouvement des biens communs reste à la fois mal connue et inaboutie, en raison de certaines difficultés théoriques et de malentendus historiques. S’il y a lieu de passer par une tradition étrangère pour concevoir cette locution devenue passe-partout, ce n’est pourtant pas parce qu’elle devrait être reconduite à une origine lointaine dans laquelle sa signification serait enfermée, mais parce qu’au cours de ses voyages, la pensée du commun s’est fixée dans un espace politique et théorique original, qui a contribué à l’enrichir. Or cet espace est l’Italie, et plus précisément l’Italie au tournant du xxi e siècle, où la volonté de reprendre en main une trajectoire historique déjà largement déterminée par la soumission de l’État au credo libéral s’est exprimée d’une façon sans doute plus claire que nulle part ailleurs. Dès lors que l’on entend les biens communs comme beni comuni, une résonance singulière apparaît, que l’on voudrait faire entendre dans les textes réunis dans ce dossier
Face à l’urgence environnementale, faut-il revenir à l’idée de nature, et rompre avec l’imaginair... more Face à l’urgence environnementale, faut-il revenir à l’idée de nature, et rompre avec l’imaginaire moderniste selon lequel l’homme peut avoir un contrôle total sur elle ? Faut-il, comme le préconise F. Neyrat, en finir avec le « constructivisme » ? Rien n’est moins sûr.
Nous voudrions montrer ici que, au-delà des choix techniques, l’anthropocène nous oblige en effet... more Nous voudrions montrer ici que, au-delà des choix techniques, l’anthropocène nous oblige en effet à reposer la question de la démocratie. Ce concept, qui exprime l’ambition qu’a la société d’exercer une prise sur elle-même et sur son avenir, accorde une valeur fondamentale à l’autonomie du corps collectif et à sa volonté. Mais on a trop souvent tendance à négliger le fait qu’une politique démocratique est aussi celle qui se montre capable de réagir à des événements, et notamment ceux qui touchent les rapports qui se nouent entre la société et son milieu matériel : le jeu politique articule ainsi la société, le pouvoir et la nature, et cette dernière est toujours susceptible d’imprimer aux deux premiers des mouvements qu’ils doivent absorber, traduire politiquement. C’est ce que montre de façon remarquable l’irruption de l’anthropocène, qui nous contraint à repenser la relation entre ces trois termes.
Ce numéro de Tracés est le deuxième de la série Traduire et introduire, initiée en 2014, qui se d... more Ce numéro de Tracés est le deuxième de la série Traduire et introduire, initiée en 2014, qui se donne pour objectif de faire connaître des travaux et des champs de réflexion qui nous semblent avoir fait l’objet d’une réception partielle ou insuffisante dans l’espace scientifique français. Comme le volume précédent, ce numéro est construit autour de la traduction de textes de chercheurs étrangers, sélectionnés par la revue pour leur caractère emblématique de ces réceptions manquées. Chacun des deux dossiers qui suivent accompagne
ces traductions d’un ensemble d’articles originaux qui les contextualisent et en explicitent les enjeux. C’est ainsi l’occasion non seulement de porter un éclairage sur les questions soulevées par ces textes et les traditions intellectuelles dans lesquelles ils s’inscrivent, mais aussi de mener une démarche réflexive sur les passerelles entre ces traditions. En ce sens, il s’agit de contribuer à la mise en relation de travaux et de chercheurs, en offrant toutefois un espace de discussion qui ne soit pas contraint par la nécessité de suivre l’actualité des parutions ou de répondre à une exigence thématique.
Discussion et critique de l'ouvrage de S. Donaldson et W. Kymlicka, Zoopolis. Cet article défend ... more Discussion et critique de l'ouvrage de S. Donaldson et W. Kymlicka, Zoopolis. Cet article défend une position pour laquelle le problème politique des animaux ne se limite pas à l'ambition de leur conférer des droits modelés sur la construction liébrale des droits humains.
Dans l’essai philosophique qui conclut La Grande Transformation, « La liberté dans une société... more Dans l’essai philosophique qui conclut La Grande Transformation, « La liberté dans une société complexe », Karl Polanyi évoque une série de mesures que devraient prendre les nations industrielles pour protéger la nature contre les effets de sa marchandisation. Il évoque ainsi le renouveau des exploitations rurales et des coopératives, l’exclusion des ressources de base des logiques de marché, la création de parcs et de réserves naturelles, et plus largement l’idée d’une prise en charge collective des espaces et des richesses1. Tous ces éléments indiquent que l’encadrement de la nature doit être selon lui placé sous la tutelle d’institutions véritablement politiques, par opposition aux mécanismes économiques, c'est-à- dire d’institutions qui parviennent à traduire le fait que l’attachement collectif au monde extérieur est irréductible au mobile du gain2. Si cette idée et ces propositions sont aujourd’hui largement débattues par l’écologie politique, on s’en tiendra ici à la place qu’elles occupent dans un ouvrage qui se veut à la fois une histoire politique de l’économie moderne, et une contribution à la pensée socialiste. Il s’agira ainsi de montrer que la protection des rapports à la nature est pour Polanyi irréductible aux mesures par lesquelles la société se protège « elle-même », via le travail et la monnaie, et que la question de la terre, du milieu, tient une place centrale dans la critique de l’utopie libérale.
Annales. Histoire, Sciences Sociales, 2017
Cet article vise à éclairer l’émergence du concept d'Anthropocène dans les sciences sociales ... more Cet article vise à éclairer l’émergence du concept d'Anthropocène dans les sciences sociales et la philosophie contemporaines. Il inscrit cette notion dans le contexte assez large d'une crise de ces savoirs, désormais confrontés à la nécessité de considérer le changement climatique global à la fois comme un socle empirique et comme un horizon politique incontournable. Cette réflexion repose sur une hypothèse : l'organisation des savoirs relatifs aux relations entre modernité et nature a été profondément bouleversée dans la dernière décennie, et les concepts sur lesquels reposaient ces savoirs, le risque et la limite, ont dû être réaménagés. En effet, concevoir le présent à travers le concept d'Anthropocène suppose que la rationalité du risque, c'est-à-dire la suspension de l'autonomie politique moderne, et l'idée d'une limitation fondamentale du développement matériel ne peuvent plus être dissociées. Cette hypothèse permet d'envisager la configuration épistémologique dans laquelle nous nous trouvons et d'en discuter quelques aspects.
English
A Genealogy of the Anthropocene: The End of Risk and Limits This article aims to shed light on the emergence of the Anthropocene as a concept within the social sciences and philosophy. It frames this evolution in the wider context of a crisis of knowledge, confronted with the need to consider global climate change as both an empirical bedrock and an inescapable political horizon. The central hypothesis is that the organization of our knowledge about the relationships between modernity and nature has undergone a profound shift over the last decade, necessitating a reconfiguration of the two main concepts on which this knowledge relied: risk and limits. To consider the present situation through the concept of the Anthropocene is to imply that risk rationality (i.e., the suspension of modern political autonomy) and the notion of a fundamental limitation of material development can no longer be considered separately. In the final part of the article, this hypothesis makes it possible to discuss some aspects of our current epistemological configuration.
Ecologie & Politique, n°50, mars 2015
Résumé – Cet article entend revenir sur la pensée et l’œuvre de Jacques Ellul, pour dépas- se... more Résumé – Cet article entend revenir sur la pensée et l’œuvre de Jacques Ellul, pour dépas- ser la réception dominante qui en est faite actuellement en France, et qui le présente comme un prophète négligé de l’écologie politique. L’hypothèse principale qui dirige cette réflexion est la suivante : Ellul a orchestré une confrontation intellectuelle entre la pensée politique moderne et la défense de la société contre la technique. Dans cette confronta- tion, la modernité est conçue comme responsable d’une désintégration de la société dont la technique est sortie victorieuse. En revenant sur le contexte dans lequel Ellul a mené ses réflexions, mais aussi sur l’histoire singulière des relations entre nature et politique en France, on tente de jeter un nouvel éclairage sur cette pensée et ses paradoxes. L’idée principale qui ressort de cette étude est qu’Ellul témoigne des ambiguïtés de l’écologisme contemporain, qui ne s’est pas complètement départi d’un certain naturalisme politique, auquel on peut opposer une approche sociologique des rapports collectifs à la nature.
Mots Clés – Nature, modernité, technique, conservatisme, écologie.
Abstract – This paper addresses the thought of Jacques Ellul, and attempts to overcome the way that it is currently understood by most French academics, who present this thinker as a neglected prophet of political ecology. It shows how Ellul orchestrated a confronta- tion between modern political thought and the defense of society against technology. In this confrontation, modernity is conceived as being responsible for the decay of society, which results in the reign of technology. Through an examination of the context of Ellul’s reflections, and an assessment of the singular history of the relationships between politics and nature in 20th century France, we try to shed a new light on these ideas and their paradoxes. This study highlights how Ellul illustrates the ambiguities of the contemporary French environmentalism, which never really confronted the consequences of his own political naturalism. A sociological approach to the collective relationships with nature could be an alternative to these views.
Keywords – Nature, modernity, technology, conservatism, ecology.
Toutes les théories sociales et politiques livrent ou suggèrent une histoire à partir de laquelle... more Toutes les théories sociales et politiques livrent ou suggèrent une histoire à partir de laquelle concevoir lʼordre, les équilibres, ou les formes de justice quʼelles cherchent à décrire et à valoriser. Etat de nature et contrat, lutte des classes, évolutionnisme, toutes ces théories partagent ce schéma, celui dʼune rétrojection de la rationalité politique quʼils instaurent dans un passé plus ou moins fictif -comme si la saisie dʼun présent devait être mise en relief à partir dʼune histoire possible. Je mʼintéresse ici à deux de ces histoires possibles et rétrospectives, dont je ne questionne pas le statut de scientificité ou de véracité, mais plutôt le fait quʼelles organisent toutes deux une relation étroite entre nature et sacré -entre la relation collective à une extériorité non humaine et lʼinscription dans ces rapports dʼune réalité dʼexception, protégée. La première de ces histoires est celle de lʼécologie, de lʼenvironnementalisme. Nous la connaissons tous, elle met en scène un double mouvement au cours duquel la nature est dʼabord devenue objet, pour être ensuite redéfinie par exclusion à lʼégard du statut dʼobjet. Ce seraient dʼabord les liens entre les hommes, et eux seuls, qui ont fait lʼobjet dʼune moralisation, cʼest pour eux quʼauraient été définies nos catégories morales et politiques fondamentales, et cela pendant une séquence anthropologique et politique qui semble avoir dû rejeter le non humain dans une condition de neutralité morale. Ensuite, et en dépit de lʼapparente logique dʼun système qui définit la valeur de certains êtres par une mise en relief
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Books by Pierre Charbonnier
Accès ouvert : http://traces.revues.org/6974
Y a-t-il un paradoxe à parler de la nature comme d’un fait social ?
Quelle signification et quelle valeur accorder aux sociétés restées indifférentes au partage entre nature et société ? Quels concepts mobiliser aujourd’hui pour faire face à la transformation de nos rapports collectifs à la nature ? Alors que la nature est de plus en plus humanisée et que les affaires humaines doivent en retour toujours plus composer avec elle, le grand partage du naturel et du social semble perdre toute pertinence.
Séminaires by Pierre Charbonnier
J'essaie d'y montrer que les sociétés industrielles entretiennent un rapport double au territoire, clivé entre un paradigme politico-légal et un paradigme écologique-économique. Cette duplicité, cette ubiquité, parvient aujourd'hui à son terme sous l'effet du changement climatique.
L'enregistrement débute par une introduction de Ph. Descola, ma conférence commence à 18mn.
Nous développerons notamment cette année les questions relatives à l'appropriation de la terre, des espaces de vie, de leurs capacités productives, à la fois à partir de cas empiriques présents et passés, et d'élaborations théoriques issues de la philosophie politique.
Ce séminaire peut être validé par tous les étudiants, soit comme séminaire libre, soit à l'intérieur de la mention « Études politiques ».
La liste des ouvrages discutés sera la suivante : Durkheim et Mauss : "De quelques formes primitives de classification" (in Mauss, Essais de Sociologie) ; A.-G. Haudricourt : "Domestication des animaux, culture des plantes et traitement d'autrui" (in La technologie science humaine) ; Marx, Le Capital ; Polanyi, La Grande Transformation ; Leopold, Almanach d'un comté des sables ; Odum, Environment, power and society ; Latour, Politiques de la nature ; Descola, Par delà nature et culture ; Pomeranz, La grande divergence ; Guha et Martinez-Alier, Varieties of environmentalism.
Papers by Pierre Charbonnier
ABSTRACT This paper investigates the work and thinking of economist Joan Mar-tinez Alier. It is an attempt to develop the main idea advocated in The Environmentalism of the Poor: the capitalist mode of development and the market-oriented economy not only caused the autonomization of the economy from society, but also disconnected the economy from the basic planetary metabolic regulations. According to Martinez Alier, ecological economics and environmental sociology should then find a common analytical and political ground. Here, we try to understand the epistemological and political implications of this fundamental thesis.
Redécouvrir la terre est une exploration spéculative des enjeux politiques et conceptuels liés au rôle que jouent le sol et le territoire, dans la redéfinition de nos cadres d’appréhension du présent. Ce texte confronte les points de vue de trois philosophes, Pierre Charbonnier, Bruno Latour et Baptiste Morizot. Le dialogue part d’une tension qui traverse l’actualité politique : il nous faut d’une certaine manière réinvestir la terre face à l’abandon que représente la modernisation industrielle et ses dégâts, mais il nous faut aussi résister à l’émergence d’un conservatisme localiste, focalisé sur l’assignation au sol comme source d’identité. À partir de ce constat, les auteurs proposent des pistes pour reconstruire une pensée et une sensibilité politiques adéquates à la conjonction actuelle entre l’explosion des inégalités et l’horizon du changement climatique.
ces traductions d’un ensemble d’articles originaux qui les contextualisent et en explicitent les enjeux. C’est ainsi l’occasion non seulement de porter un éclairage sur les questions soulevées par ces textes et les traditions intellectuelles dans lesquelles ils s’inscrivent, mais aussi de mener une démarche réflexive sur les passerelles entre ces traditions. En ce sens, il s’agit de contribuer à la mise en relation de travaux et de chercheurs, en offrant toutefois un espace de discussion qui ne soit pas contraint par la nécessité de suivre l’actualité des parutions ou de répondre à une exigence thématique.
English
A Genealogy of the Anthropocene: The End of Risk and Limits This article aims to shed light on the emergence of the Anthropocene as a concept within the social sciences and philosophy. It frames this evolution in the wider context of a crisis of knowledge, confronted with the need to consider global climate change as both an empirical bedrock and an inescapable political horizon. The central hypothesis is that the organization of our knowledge about the relationships between modernity and nature has undergone a profound shift over the last decade, necessitating a reconfiguration of the two main concepts on which this knowledge relied: risk and limits. To consider the present situation through the concept of the Anthropocene is to imply that risk rationality (i.e., the suspension of modern political autonomy) and the notion of a fundamental limitation of material development can no longer be considered separately. In the final part of the article, this hypothesis makes it possible to discuss some aspects of our current epistemological configuration.
Mots Clés – Nature, modernité, technique, conservatisme, écologie.
Abstract – This paper addresses the thought of Jacques Ellul, and attempts to overcome the way that it is currently understood by most French academics, who present this thinker as a neglected prophet of political ecology. It shows how Ellul orchestrated a confronta- tion between modern political thought and the defense of society against technology. In this confrontation, modernity is conceived as being responsible for the decay of society, which results in the reign of technology. Through an examination of the context of Ellul’s reflections, and an assessment of the singular history of the relationships between politics and nature in 20th century France, we try to shed a new light on these ideas and their paradoxes. This study highlights how Ellul illustrates the ambiguities of the contemporary French environmentalism, which never really confronted the consequences of his own political naturalism. A sociological approach to the collective relationships with nature could be an alternative to these views.
Keywords – Nature, modernity, technology, conservatism, ecology.
Accès ouvert : http://traces.revues.org/6974
Y a-t-il un paradoxe à parler de la nature comme d’un fait social ?
Quelle signification et quelle valeur accorder aux sociétés restées indifférentes au partage entre nature et société ? Quels concepts mobiliser aujourd’hui pour faire face à la transformation de nos rapports collectifs à la nature ? Alors que la nature est de plus en plus humanisée et que les affaires humaines doivent en retour toujours plus composer avec elle, le grand partage du naturel et du social semble perdre toute pertinence.
J'essaie d'y montrer que les sociétés industrielles entretiennent un rapport double au territoire, clivé entre un paradigme politico-légal et un paradigme écologique-économique. Cette duplicité, cette ubiquité, parvient aujourd'hui à son terme sous l'effet du changement climatique.
L'enregistrement débute par une introduction de Ph. Descola, ma conférence commence à 18mn.
Nous développerons notamment cette année les questions relatives à l'appropriation de la terre, des espaces de vie, de leurs capacités productives, à la fois à partir de cas empiriques présents et passés, et d'élaborations théoriques issues de la philosophie politique.
Ce séminaire peut être validé par tous les étudiants, soit comme séminaire libre, soit à l'intérieur de la mention « Études politiques ».
La liste des ouvrages discutés sera la suivante : Durkheim et Mauss : "De quelques formes primitives de classification" (in Mauss, Essais de Sociologie) ; A.-G. Haudricourt : "Domestication des animaux, culture des plantes et traitement d'autrui" (in La technologie science humaine) ; Marx, Le Capital ; Polanyi, La Grande Transformation ; Leopold, Almanach d'un comté des sables ; Odum, Environment, power and society ; Latour, Politiques de la nature ; Descola, Par delà nature et culture ; Pomeranz, La grande divergence ; Guha et Martinez-Alier, Varieties of environmentalism.
ABSTRACT This paper investigates the work and thinking of economist Joan Mar-tinez Alier. It is an attempt to develop the main idea advocated in The Environmentalism of the Poor: the capitalist mode of development and the market-oriented economy not only caused the autonomization of the economy from society, but also disconnected the economy from the basic planetary metabolic regulations. According to Martinez Alier, ecological economics and environmental sociology should then find a common analytical and political ground. Here, we try to understand the epistemological and political implications of this fundamental thesis.
Redécouvrir la terre est une exploration spéculative des enjeux politiques et conceptuels liés au rôle que jouent le sol et le territoire, dans la redéfinition de nos cadres d’appréhension du présent. Ce texte confronte les points de vue de trois philosophes, Pierre Charbonnier, Bruno Latour et Baptiste Morizot. Le dialogue part d’une tension qui traverse l’actualité politique : il nous faut d’une certaine manière réinvestir la terre face à l’abandon que représente la modernisation industrielle et ses dégâts, mais il nous faut aussi résister à l’émergence d’un conservatisme localiste, focalisé sur l’assignation au sol comme source d’identité. À partir de ce constat, les auteurs proposent des pistes pour reconstruire une pensée et une sensibilité politiques adéquates à la conjonction actuelle entre l’explosion des inégalités et l’horizon du changement climatique.
ces traductions d’un ensemble d’articles originaux qui les contextualisent et en explicitent les enjeux. C’est ainsi l’occasion non seulement de porter un éclairage sur les questions soulevées par ces textes et les traditions intellectuelles dans lesquelles ils s’inscrivent, mais aussi de mener une démarche réflexive sur les passerelles entre ces traditions. En ce sens, il s’agit de contribuer à la mise en relation de travaux et de chercheurs, en offrant toutefois un espace de discussion qui ne soit pas contraint par la nécessité de suivre l’actualité des parutions ou de répondre à une exigence thématique.
English
A Genealogy of the Anthropocene: The End of Risk and Limits This article aims to shed light on the emergence of the Anthropocene as a concept within the social sciences and philosophy. It frames this evolution in the wider context of a crisis of knowledge, confronted with the need to consider global climate change as both an empirical bedrock and an inescapable political horizon. The central hypothesis is that the organization of our knowledge about the relationships between modernity and nature has undergone a profound shift over the last decade, necessitating a reconfiguration of the two main concepts on which this knowledge relied: risk and limits. To consider the present situation through the concept of the Anthropocene is to imply that risk rationality (i.e., the suspension of modern political autonomy) and the notion of a fundamental limitation of material development can no longer be considered separately. In the final part of the article, this hypothesis makes it possible to discuss some aspects of our current epistemological configuration.
Mots Clés – Nature, modernité, technique, conservatisme, écologie.
Abstract – This paper addresses the thought of Jacques Ellul, and attempts to overcome the way that it is currently understood by most French academics, who present this thinker as a neglected prophet of political ecology. It shows how Ellul orchestrated a confronta- tion between modern political thought and the defense of society against technology. In this confrontation, modernity is conceived as being responsible for the decay of society, which results in the reign of technology. Through an examination of the context of Ellul’s reflections, and an assessment of the singular history of the relationships between politics and nature in 20th century France, we try to shed a new light on these ideas and their paradoxes. This study highlights how Ellul illustrates the ambiguities of the contemporary French environmentalism, which never really confronted the consequences of his own political naturalism. A sociological approach to the collective relationships with nature could be an alternative to these views.
Keywords – Nature, modernity, technology, conservatism, ecology.
Mots clés
Société, Nature, Anthropologie, Environnement, Écologie.
Abstract
Anthropology and philosophy share a common interest in the idea of nature. Both of them address the value of this fundamental element of the Western conceptual framework and the general signification of the alleged great divide between nature and society, or culture. Over this common interrogation they are also facing the same issues and paradoxes. Nevertheless anthropology benefits from its comparative approach, which brings to knowledge different cosmological patterns, some of them dealing without the very idea of nature. This thesis is an historical and critical exploration of some key classical anthropological theories of the collective relationships with natural environment. Namely, the Durkheimian school of social sciences, the structural anthropology of Claude Lévi-Strauss and his followers, and the present day anthropology of nature, which constitutes the main line of French social anthropology. The core hypothesis of this work is that social anthropology is intimately linked to the theoretical acknowledgment of the role played by the idea of nature in our historical dynamics. What we usually call modernity, and in what sense it differs from other social formations, are major anthropological concerns. These questions lead to a critical examination of the ecological thought from an anthropological point of view. If environmental philosophy is in a sense a way out of modern naturalism, which terms and conditions are required to make it possible and legitimate ?
Keywords
Society, Nature, Anthropology, Environment, Ecology.
Il s'agit d'une lecture de "Carbon Democracy", de Timothy Mitchell, qui situe et discute son apport à une compréhension du capitalisme centrée sur les processus matériels, techniques et écologiques.
Date limite d'envoi des propositions de contribution : 1er octobre 2016 Date limite d'envoi des articles : 1er décembre 2016
1er et 3e mercredis du mois de 15 h à 18 h (EHESS, salle 6, 105 bd Raspail 75006 Paris), du 16 janvier 2019 au 19 juin 2019.