Anatolia Antiqua
Revue internationale d'archéologie anatolienne
XXIV | 2016
Varia
La basilique civile de Nysa du Méandre
Serdar Hakan Öztaner
Édition électronique
URL : http://journals.openedition.org/anatoliaantiqua/389
DOI : 10.4000/anatoliaantiqua.389
Éditeur
IFEA
Édition imprimée
Date de publication : 1 mai 2016
Pagination : 311-320
ISBN : 9782362450648
ISSN : 1018-1946
Référence électronique
Serdar Hakan Öztaner, « La basilique civile de Nysa du Méandre », Anatolia Antiqua [En ligne], XXIV |
2016, mis en ligne le 11 décembre 2018, consulté le 16 février 2021. URL : http://
journals.openedition.org/anatoliaantiqua/389 ; DOI : https://doi.org/10.4000/anatoliaantiqua.389
Anatolia Antiqua
TABLE DES MATIERES
Ergul KODAS,
Le surmodelage du crâne au Néolithique au Proche-Orient : techniques de surmodelage et
expérimentations
1
Isabella CANEVA et Eric JEAN,
Mersin-Yumuktepe : une mise au point sur les derniers travaux
13
Turan EFE et Bérengère PERELLO,
Second Millenium site distribution and pottery of Inland Northwestern Anatolia
35
Antoine PEREZ,
Amida 6 : Antiochos IV, le ‟Hanigalbat” et la Sophène
91
Ergün LAFLI et Hadrien BRU,
Inscriptions et monuments funéraires gréco-romains d’Anatolie occidentale
103
Oğuz TEKİN et Aliye EROL-ÖZDİZBAY,
Coins from Allianoi excavations: Campaign of 2001
117
Nuran ŞAHİN,
Etude iconographique des monnaies autonomes frappées par Colophon-sur-Mer :
nouveaux acquis
147
Vera SAUER,
Konventionelle Individualität. Zur Münzprägung nordanatolischer Städte in der römischen
Kaiserzeit
163
Oğuz TEKİN,
Balance weights in the collection of the Anatolian Civilizations Museum in Ankara
211
CHRONIQUES DES TRAVAUX ARCHEOLOGIQUES EN TURQUIE 2015
Çiğdem MANER,
Preliminary report on the third season of the Konya-Ereğli Survey (KEYAR) 2015
225
Dominique BEYER, Isabelle CHALIER et Françoise KIRNER,
Rapport préliminaire sur les travaux de la mission archéologique de Zeyve Höyük-Porsuk 2015
253
Sami PATACI et Ergün LAFLI,
Field surveys in Ardahan in 2015
281
Jean-Charles MORETTI avec la collaboration de Nicolas BRESCH, Isabel BONORA,
Jean-Jacques MALMARY et Olivier RISS,
Claros, le temple d’Apollon : travaux réalisés en 2015
299
Serdar Hakan ÖZTANER,
La basilique civile de Nysa du Méandre
311
Abuzer KIZIL, Koray KONUK, Patrice BRUN, Laurent CAPDETREY, Raymond DESCAT,
Pierre FROHLICH, Didier LAROCHE, Enora LE QUERE, Francis PROST, Baptiste VERGNAUD,
Eurômos : rapport préliminaire sur les travaux réalisés en 2015
321
O. HENRY et E. ANDERSON, Chr. BOST, Ö. ÇAKMAKLI, F. CEDERLING, A. COMMITO,
M. CORMIER-HUGUET, A. COUTELAS, A. DOLEA, D. ERGENÇ, A. FRECCERO,
A. FREJMAN, P. LEBOUTEILLER, F. LESGUER, D. LÖWENBORG, V. LUNGU,
Fr. MARCHAND-BEAULIEU, A. SITZ, P. DE STAEBLER, B. VERGNAUD,
Labraunda 2015
339
Anatolia Antiqua XXIII (2016), p. 311-320
Serdar Hakan ÖZTANER*
LA BASILIQUE CIVILE DE NYSA DU MEANDRE
Le bâtiment sujet de cet article se trouve à Nysa
du Méandre, actuellement aux frontières de Sultanhisar/Aydın, et se situe au Sud-Est du théâtre vers le
bouleuterion (Gerontikon) et l’agora (Fig. 1). C’est
en 1994, lors de l’élargissement de la route moderne
conduisant au village de Kavaklı, que le bâtiment a
été découvert. Ont été alors mis au jour un chapiteau
figuré ainsi que des éléments architecturaux supposés
appartenir à une basilique civile1.
Les caractéristiques de l’édifice et ses fonctions
architecturales ont, par la suite, été confirmées par
les investigations scientifiques conduites sur le bâtiment lui-même et sur ses abords entre 2012 et 20152.
L’ouverture d’une route sur une largeur de 4,85 m,
en traversant la partie est de l’édifice, a détruit,
après observation, l’angle nord-est du mur externe
du bâtiment (Fig. 2), tandis que les fouilles ont
permis de constater que le réservoir des sanitaires
modernes, situé au Nord et construit à l’intérieur de
l’édifice sur des éléments architecturaux, a détruit
une partie du mur nord externe de celui-ci (Fig. 3).
DESCRIPTION
Les murs extérieurs ont une épaisseur d’environ
1,2 m et sont construits de mortier de chaux et de
moellons selon la technique de l’opus incertum. La
longueur du mur ouest est mesurée à 14,85 m à
l’extérieur et à 13,6 m à l’intérieur. L’extrémité sud
du mur ouest a été construite avec de grands blocs
de conglomérat, et sa hauteur, constituée de trois
rangées in situ, est de 2,2 m (Fig. 4). Dans le même
temps et toujours dans le même axe, le mur est de
l’édifice, qui se trouve au bord de la route moderne,
est également, à une de ses extrémités constitué de
blocs de conglomérat. La longueur du mur nord est
de 23 m à l’extérieur et de 20,4 m à l’intérieur. Ce-
pendant, la route moderne passant sur l’édifice n’a
permis d’observer sa longueur que sur 15,5 m. Dans
la partie est du mur nord, à 12 m de l’angle interne
nord-ouest, a été mise au jour une ouverture correspondant à une porte de 1,50 m de large. Cette
ouverture a été ultérieurement condamnée par un
mur de moellons composé de matériaux de réemploi
comprenant notamment le pied d’un kline en forme
de tête de panthère et une base en marbre.
Les murs précédemment mentionnés forment
un espace rectangulaire de 20,4 x 13,6 m. Le stylobate
est conservé dans la partie sud. Sur ce stylobate,
mis au jour sur 15,56 m de long, la présence d’éléments architecturaux (17 blocs en marbre) appartenant
à des piliers suggère que l’édifice s’ouvrait vers le
Sud. A l’Ouest du stylobate, a été découvert, in situ,
une base de pilier latéral (1,09 x 0,60 m de largeur
et 0,33 m de hauteur) adossée à l’extrémité du mur
ouest (Fig. 4-5). Ce pilier latéral situant 3,94 m à
l’Est compte deux bases de piliers in situ (1,12 x
1,99 m de largeur, 0,39 m de hauteur) espacées de
7,04 m (Fig. 5). Nos recherches ont permis de
constater que ces deux bases supportaient deux
piliers composés chacun de quatre blocs de marbre
(soit huit blocs au total) et mesuraient avec leur
bases 5,13 m. (Fig. 11). Nous avons déduit de l’emplacement des blocs des piliers que ces derniers
étaient tombés vers le Nord à la suite d’un tremblement
de terre, à l’exception du bloc in situ de la première
rangée de piliers à l’Est (Fig. 6). Sur la base du
pilier latéral ouest se trouve toujours un bloc de
marbre in situ dont manque la partie supérieure
(0,92 x 0,48 m de largeur, 1,26 m de hauteur conservée). A l’Est, l’autre pilier latéral comprenait un
bloc de marbre qui mesure 0,92 x 0,48 m de largeur
et 2,44 m de hauteur intacte et qui a été retrouvé à
25 m au Nord-Est de l’édifice. Les traces laissées
*) Université d’Ankara, Faculté des Lettres et d’Histoire-Géographie, Département d’archéologie, Section d’archéologie classique.
1) Idil 1999 : 51.
2) Les fouilles de Nysa en 2012-2015 ont été dirigées par S.H. Öztaner, Doç. Dr., sous la direction du Musée d’Aydın.
312
SERDAR HAKAN ÖZTANER
Fig. 1 : Plan de Nysa du Méandre (2014).
LA BASILIQUE CIVILE DE NYSA DU MEANDRE
Fig. 2 : Plan de la place du forum de Nysa.
313
314
SERDAR HAKAN ÖZTANER
Fig. 3 : Vue de la basilique civile vers le Sud-Ouest (2012).
Fig. 4 : L’extremité du mur ouest et le
pilier latéral ouest.
sur le bloc par l’utilisation d’engin de construction
montrent que ce dernier a été arraché et traîné au
moment de la construction de la route moderne.
Le chapiteau pilastre (0,80 x 0,49 m de largeur à
la base, 0,46 m de hauteur intacte), que nous avons
trouvé près du pilier est, peut appartenir au pilier
latéral est. Le long des bases des trois faces de ce
chapiteau on retrouve un ornement de kymation ionique. Au-dessus de cette rangée d’ornements on
3) Öztaner 2012 : 167-187.
4) Bingöl 1992 : 418-423.
observe, au centre et sur les côtés, des motifs de
feuille d’acanthe. Entre les feuilles d’acanthe, les
kaulis, les hélix ainsi que des rinceaux de feuilles
sont représentés symétriquement. Les volutes sont
cassées (Fig. 7). Le chapiteau pilastre de l’autre
pilier latéral ouest n’existe plus.
On a constaté que les piliers centraux est et
ouest étaient surmontés de chapiteaux figurés
(Fig. 8-11). D’après nos recherches le chapiteau figuré
(1,82 m x 1,45 x 0,70 m de hauteur) mis au jour près
du pilier aurait été découvert en 1994 (Fig. 9), ce
dernier devait surmontait le pilier est. Quant aux
autres fragments des chapiteaux figurés, ils appartiennent au pilier ouest. La composition de ces deux
chapiteaux figurés peut être comprise, malgré le coin
endommagé du chapiteau du pilier est, et ce à partir
de l’observation du chapiteau ouest. (Fig. 10).
Ainsi, au-dessus d’un rang de feuilles d’acanthe,
on observe sur les faces avant des petits côtés des
chapiteaux, le monstre marin Scylla avec ses pattes
de chien au centre, et sur les extrémités un triton
jeune, et un plus âgé, avec leur buste humain et leur
queue de poisson. Les espaces vides sont occupés par
des motifs figurant des poissons. Sur les longs côtés,
des Néréides évoluent sur des queues de triton et, à
l’arrière-plan, des Eros chevauchent des dauphins.
Ces chapiteaux figurés ressortissent au même
type iconographique que l’on observe sur ceux de la
basilique civile de Magnésie du Méandre3 et que
l’on désigne sous le nom de ‟chapiteau Scylla”4.
Nous pouvons suggérer que ces deux chapiteaux
sont l’œuvre du même atelier de sculpture.
LA BASILIQUE CIVILE DE NYSA DU MEANDRE
Fig. 5 : Les piliers (vue vers l’Est).
Fig. 6 : Le pilier situé à l’Est.
315
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SERDAR HAKAN ÖZTANER
Fig. 7 : Le chapiteau pilastre.
Fig. 8 : Vue de la basilique en 2014 après anastylose.
Fig. 9 : Le chapiteau figuré du pilier est.
LA BASILIQUE CIVILE DE NYSA DU MEANDRE
317
Fig. 10 : Le chapiteau figuré du pilier ouest.
Fig. 11 : Restitution de la façade de la basilique civile.
Lors des fouilles, parmi les éléments architecturaux
de l’édifice, et qui en représentent un groupe
important, 15 claveaux appartenant à trois arcs surmontés par quatre piliers ont été retrouvés. Ces
piliers se composaient de quatre rangées de blocs
que coiffaient les chapiteaux figurés. Ils supportaient
l’arc central dont nous mesurons le diamètre à 7,3 m,
et se situaient à environ 5,8 m de hauteur. D’après
la restitution proposée, la clé de l’arc central se
serait élevée à une hauteur de 9,4 m. Les chapiteaux
de pilastre, sur les faces arrières des piliers centraux
est et ouest et les piliers latéraux, portaient les arcs
latéraux de 4,16 m de diamètre. Toujours d’après la
restitution, les arcs latéraux se tenaient au niveau de
3,23 m et s’élevaient jusqu’à 5,3 m (Fig. 11).
DATATION
Les éléments et les ornements architecturaux
(comme les feuilles d’acanthe) de l’édifice, ainsi
que leurs caractéristiques, montrent qu’ils appartiennent à la seconde moitié du deuxième siècle de
318
SERDAR HAKAN ÖZTANER
notre ère. A été mis au jour le pavement en marbre
de l’édifice qui est partiellement conservé. A 0,30 m
au-dessus de ce pavement, une couche brûlée a été
observée : elle contient des blocs de marbre transformé
en calcaire et un nombre important de clous en
bronze. Cette couche correspond à l’effondrement
du toit de l’édifice consécutif à un grand incendie
(Fig. 6). Cependant, une couche d’environ 0,50 à
0,60 m de débris de terre retrouvée immédiatement
au-dessus de la couche brûlée, nous laisse supposer
que l’écroulement des blocs de l’édifice est intervenu
longtemps après l’incendie.
La position des éléments architecturaux de l’édifice indique un important séisme avec une direction
Nord-Sud ayant entraîné l’écroulement des blocs
vers le Nord. Pour le moment il n’a pas été possible
de déterminer l’année du séisme car les céramiques
retrouvées dans les couches archéologiques n’ont
pas subi de datation stratigraphique.
FONCTION DE L’EDIFICE
Nous n’avons rencontré aucune trace appartenant
à des éléments architecturaux lors des sondages effectués, sur 4 m, le long des axes des piliers. Cependant, en 2013, les recherches géophysiques réalisées
sur le périmètre de la terrasse où l’édifice prend
place, dans sa zone nord-est, ont permis d’obtenir
des résultats importants qui laissent supposer que
l’édifice s’allongeait vers le Sud avec une rangée de
colonnade. De plus, le long des côtés sud et ouest
de cette terrasse, les résultats géophysiques laissent
supposer que des murs entouraient celle-ci. En
conséquence c’est un forum, d’environ 70 x 80 m
de dimensions, que nous avons proposé de restituer
et dans lequel l’édifice occupait le côté est
(Fig. 12).
En 2013 d’autres résultats archéologiques o
nt confirmé la présence de ce forum. Une structure
d’environ 66 m au Sud des piliers a été mise au jour,
ainsi qu’une porte monumentale de 23 m de long
qui permettait d’accéder à la zone du forum supposé5.
Cette porte monumentale est placée sur la voie principale de Nysa, voie que nous avons appelée ‟Plateia-Rue 1”6 (Fig. 12-13). Celle-ci, ainsi mise au
jour du côté est de la ville, avait été supposée être,
lors des fouilles précédentes, à l’Ouest de la cité. A
Nysa les voies mises au jour sont en général pavées
de pierres de conglomérat, ce qui n’est pas le cas de
la partie est où se situe la porte monumentale
composée de dalles en calcaire. La partie de la voie
côté est, est composée de colonnades de 9,5 m de
largeur, elle passe par le centre de la cité, part du
pont romain central et continue vers l’Est en délimitant
le côté sud de la zone du forum.
D’après les données obtenues en fouilles, les recherches géophysiques et les caractéristiques architecturales de l’édifice, nous pouvons dire que nous
sommes en présence d’une basilique civile qui se
situe sur le long côté du forum. Son architecture et
les chapiteaux figurés qui l’ornaient sont semblables
à ceux de la basilique civile de Magnésie du Méandre,
ce qui va bien dans le sens de l’identification d’une
basilique civile pour le bâtiment de Nysa.
Les basiliques civiles7 de l’époque romaine se
situent généralement au centre des villes, liées directement au forum. Ce sont des bâtiments juridiques8
et commerciaux conçus pour abriter des conditions
météorologiques. Elles sont allongées et présentent
habituellement un plan à trois nefs séparées par
deux rangées de colonnes.
Nous supposons être dans ce cas de figure avec
l’édifice de Nysa, c’est-à-dire en présence d’une basilique civile avec un tribunal au Nord (20 x 15 m).
Ajoutons que de la même façon, en Anatolie occidentale, à Ephèse9, à Smyrne10, à Hiérapolis11, à
Xanthos12, à Cremna13, à Aspendos14 les basiliques
civiles se situent, comme la basilique de Nysa,
inscrite dans ce même modèle appelé “stoa basilique”,
le long côté des fora.
S.H.Ö.
5) Öztaner 2014 : 225-245.
6) Kadıoğlu 2011 : 108 ; 2014. Öztaner : 2014 : 225-245.
7) Pour les basiliques civiles Boëthius et Ward-Perkins 1970 : 127-131 ; Crema 1959 : 167-171, 370-375, 515-521 ; Gros 1994 :
612-616 ; Gros 1996 : 235-261 ; Ginouvès 1994 : 207-216 ; Müller 1937 : 250-261.
8) David 1983 : 219-241.
9) Alzinger 1974 ; Fossel-Peschl 1982.
10) Naumann et Kantar 1950 : 69-114.
11) Andria et Rossignani 2012 : 127-152.
12) Cavalier 2012 : 189-199.
13) Mitchell 1989 : 229-245.
14) Balty 1991 : 411-412 ; Lanckoronski 1890 : 96-98.
LA BASILIQUE CIVILE DE NYSA DU MEANDRE
Fig. 12 : Vue aerienne de la place du forum.
Fig. 13 : Porte monumentale du forum.
319
320
SERDAR HAKAN ÖZTANER
BIBLIOGRAPHIE
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Öztaner, S.H., Akdoğu, A.E.N. et Gökalp, Ö.N.,
2014 : “Nysa Ad Maeandrum’daki Yeni Bulgular Üzerine
Bir Değerlendirme”, in Aşkit, Ç., Kalaycıoğulları, S.,
Kayapınar, R., Üstünel Keyinci, C. et Öztürk, R. (éds.),
In Memoriam Filiz Öktem, A.Ü. DTCF, Ankara : 225245.