Séminaire, conférence et échanges sur
l’art en réseau et les nouvelles
technologies de diffusion en ligne.
Mercredi 21 septembre 2016
Gratuit – De 10h à 17h
Château des Ducs de Bretagne
Le propos que nous souhaitons développer se situe dans les rapports physiques et les relations au
virtuel. En effet une nouvelle ère de création artistique est apparue depuis plusieurs décennies.
Quels en sont les enjeux ? quels en sont les outils de compréhension, théoriques et pratiques ?
Les axes de recherches se trouvent tout à la fois :
Dans la corporalité avec les notions de présence, d’espace, de distance, de puissance sonore, de
projection, de performance…, dans les échanges de data, ou encore dans le contrôle à distance…Et
enfin dans l’effacement de certaines frontières notamment entre public et artistes avec la
participation, les ateliers, les échanges, les démonstrations et l’interaction.
Organisé par Apo33/MaP - dans le cadre du NEAR - Nantes Electronic Art Rencontre II
En collaboration avec L’Ecole des Beaux Arts de Nantes Métropole et le soutien du Dicream – CNC.
Avec : Shelly Knotts, Thierry Besche, Julien Rabin, Marinos Koutsomichalis, Jenny Pickett,
Julien Ottavi, Mathieu Chamagne, Don Foresta, Romain Papion, Anthoniy Valchev.
Entretiens dans le cadre de la préparation du séminaire
➢ Thierry Besche
Pouvez-vous vous présenter et nous donner des éléments sur vos projets de
recherches et/ou de créations?
J'ai fondé et dirigé le GMEA, centre national de création musicale d'Albi. Dans ce cadre, j'ai mené,
entre autres, une politique dont le fondement même était le lien entre recherche et création. J'ai quitté
le GMEA fin 2015.
Je poursuis mon engagement de créateur au sein de l'association "J'écoute sans répit" et je
coordonne Passerelle Arts Sciences Technologies.
Passerelle réunit des acteurs universitaires, artistes, associations, entreprises qui souhaitent
développer des relations et des actions entre arts, sciences et technologies. Au-delà de son travail sur
la région Occitanie, la volonté est aussi de faire émerger à Albi un espace applicatif adossé à une
structure mixte de recherche.
Les projets en cours : Médiation arts-sciences, expérimentation de dissémination en réseau, unité
mixte de recherche, MAP-Passerelle : un espace expérimental de création en réseau, etc.
Plus d'info sur document de présentation à télécharger sur le site : www.passerelle-arts-sciences.net
Passerelle fait partie du réseau TRAS Transversale des réseaux arts sciences : www.reseau-tras.org
Quelle est votre approche du streaming, de vos liens et pratiques utilisant le réseau ?
Dans ces actions, Passerelle s'engage pour développer le projet MAP-MARCEL France en Occitanie.
Il s'agit de créer une plateforme de création en réseau haut-débit, mais il nous semble avant tout que
la véritable question est celle de se donner les moyens de pouvoir imaginer et explorer de nouveaux
dispositifs. Dispositifs qui soient en capacité de permettre un réel partage des paramètres en réseau
et haute qualité. En disposer, c'est agrandir les capacités d'invention pour les "écritures" artistiques et
forger un renouvellement des attitudes ; c'est aussi expérimenter les possibilités de "penser" les
enjeux qui en découlent, y compris sociétaux.
Selon vous, que représente le streaming dans les sphères artistiques et, au delà,
comment cette technique/technologie est-elle abordée dans la recherche scientifique
ou la création?
La question n'est pas qu'une possibilité technique en chasse une autre, mais plutot qu'au-delà du
streaming, l'apparition de ces modes de relations, comme, par exemple, celle d'être réactif et actif au
sein d'une mise en réseau permanente, bouleverse considérablement notre présence au monde.
En ce sens, c'est une question qui relève tout autant de la sphère artistique - je veux dire que les
artistes doivent s'approprier - que de la sphère scientifique ; mais il faut impérativement créer les
dynamiques transversales pour que dans un aller-retour constant entre recherche et création, les
trouvailles, découvertes, expérimentations, appropriations... puissent enrichir les possibles, permettre
de nouvelles façons de représenter sous forme sensible, notre monde en perpétuel mouvement.
Comment en êtes-vous arrivé à utiliser les réseaux et internet dans votre pratique?
Quelle est la genèse de cette relation? Qu’est ce que cette technologie a apporté dans
votre relation au monde, à la création et à la vision que vous avez de l’art et de la
recherche?
En tant que directeur du GMEA, dont le coeur de l'ouvrage - historiquement et de mon point de vue est l'alliage fécond entre l'évolution des technologies, la recherche et l'expérimentation, puis la
création qui en résulte, j'ai eu la chance de vivre le passage de l'analogique au numérique. Cela fait
donc très longtemps que je me suis investi dans ces sujets.
Par exemple, je me souviens, dans les années 90, de l'arrivée des premières lignes "numéris" qui
offraient la possibilité de faire circuler par une ligne téléphonique du son échantilloné en 44Khertz; et
je me souviens surtout avec 3, 4 autres partenaires, et le Centre Beaubourg, de l'expérience première
d'un téléconcert qui réunissait différents groupes de chanteurs dans diverses villes de France pour un
concert collectif annoncé en temps réel... et qui se termina avec des retards et boucles en tous sens
car les connexions satellitaires nous avaient divisé les capacités de circulations des données qui nous
ramenaient alors à une qualité en dessous du téléphone ! Il fallait bien commencer par essuyer les
plâtres ... comme beaucoup alors les essuyèrent.
Dans cette période de très nombreuses performances, des concerts en réseau, etc. ont été
expérimentés.
Beaucoup d'envies, de désirs, le besoin d'expérimenter ces technologies du numérique, mais
combien d'espoirs perdus dans les méandres techniques... pas de temps réel qualitatif possible, et
aujourd'hui, de par la mainmise des fournisseurs sur ce sujet, nous en sommes au même stade....
Il est urgent de se réapproprier cette question pour enfin disposer de technologies capables d'offrir
aux artistes, aux chercheurs, à tous aussi bien entendu, les moyens de créer, d'inventer des formes
artistiques intermédia qui nous "parlent", en se confrontant à l'usage des évolutions technologiques, à
la mutation dans laquelle nous sommes actuellement plongés.
Côté recherche et applications, dans mon travail professionnel, la pratique des réseaux et d'internet a
complètement modifié m'a façon d'appréhender ma relation au monde. Nous, et la société en général,
sommes entrés dans une formidable période de changement de paradigme, de modèle qui nous
oblige à modifier notre façon de "penser" et donc de vivre notre quotidien dans le monde. C'est une
révolution à laquelle il est difficile d'échapper, non ?
Comment voyez-vous l’évolution des pratiques artistiques et de la recherche depuis
une vingtaine d’années, sur les réseaux à travers l’évolution des technologies ? Quels
en sont les avantages et quels en sont les problèmes pratiques et théoriques? Et enfin,
à votre avis, quels en sont les développements futurs?
J'ai du mal à répondre à cette immense question en quelques lignes... mes réponses aux questions
précédentes apportent si ce n'est des réponses, au moins l'état d'esprit qui m'anime sur la façon
d'aborder le futur… immédiat.
Quelles sont, pour vous, les oeuvres et les recherches les plus marquantes dans le
domaine de la création en réseau?
Il y a actuellement au Centre d'Art le LAIT à Albi, une exposition du couple les Valzukas qui ont été
parmi les premiers artistes à utiliser le numérique comme vecteur de leur création, en particulier avec
l'image et le son.
C'est impressionnant lorsque l'on voit des oeuvres du tout début de l'exploration de ces démarches,
comme "tout" en terme d'écriture, est déjà "là".
De même qu'il est intéressant, avec le recul du temps, de constater que les oeuvres d'un grand
nombre d'artistes comme (dans ceux qui me viennent à l'esprit...) Nam June Paik, Bill Viola ou
encore Laurie Anderson, mais aussi Xenakis ou stockhausen et bien d'autres encores, forment les
premiers éléments d'une "grammaire" plus vaste en devenir. "Grammaire" issue des dispositifs alors
explorés dont l'invention qui en jaillit, semble avoir lancé des perches dont le sillage reste présent.
Peu à peu une histoire apparaît, et l'observer sous l'angle du réseau, de l'intermédia,
que
l'aujourd'hui explore, c'est donner corps au futur proche pour qu'arrivent de façon significative des
oeuvres marquantes et caractéristiques de la création en réseau. Nous en sommes aux
balbutiements.
Y a t-il des questions et des idées que vous souhaiteriez proposer au débat concernant
la recherche de création en réseau et des pratiques artistiques utilisant l’internet?
L'ensemble de mes réponses est à renverser ou à prolonger de telle sorte que la rapidité lacunaire de
celles-ci, liée à l'exercice de l'interview, forment en conclusion quelques questions potentielles.
➢
Marinos Koutsomichalis
Over the years my approach and the overall direction of my career have changed significantly. These
days my research/artistic interests comprise hypermediacy, technological mediation, material
exploration, posthumanism, distributed cognition, and computational aesthetics.
My projects revolve around a wide range of materials/methodologies such as various programming
languages, light, modular synthesizers, micro-controllers, algorithms, DIWO (Do-It-With-Other)
Strategies, environmental sound, etc. Besides my explicit exploratory, research-driven, materialist and
hypermedia approach to art-making, the most persistent theme in my work is my quest for selferasure ? for the eliminating myself in and through the materials/methodologies/media particular
projects revolve around. I have attempting such a self-erasure in all sorts of ways, employing
sophisticated computational systems and algorithms (such as ? Music for generalised Weierstrass
function, finite state automata, context-free Lindenmayer system & phase modulated blue light ?
which I will present live in Elextropixel and which revolves around a very complex algorithm that
permutes on its own without being able to essentially control it), zeroing in on found
sounds/objects/imagery, exploring the possibility of machine aesthetics, interrogating all sorts of
analogue and hybrid sound-generating systems in unconventional ways and by means of DIWO
production workshops (such as Neural r(E)volution which will also take place in this year electropixel).
All in all my work is meant as a way to explore media, material and methodologies and, more
importantly, the way they (re-)establish condition and selfhood. In that sense, I intend my artistic
approach as a post-scientific and post-philosophical way to study and to pragmatically practice new
kinds of techno-scientifically constituted cognition. in line with my materialist and hypermedia
approach, I strive for contextual and geographical diversity in my career: I regularly collaborate with
and present my work in all sorts of institutions (from academies, to research centres, to galleries, to
museums, to underground venues, to scientific conferences, to churches, to industrial spaces)
throughout the world so that I renew the materials/methodologies I work with and so that I open-up
myself and my practice to all sorts of invaluable external feedback.
Can you present yourself and the elements of your research projects and / or
creations?
I am an artist, researcher and creative technologist working with a wide range of media, materials and
technologies. My research interests comprise hypermediacy, posthumanism, distributed cognition,
computational aesthetics and DIWO (Do It With Others). The most persistent themes in my artistic
corpus are self-erasure and the post-self. I consciously strive for contextual and geographical disparity
so that the working tactics, materials and technologies my projects revolve around are everrenovated.
What do you think streaming media represents for artistic circles and beyond that how
is this technique / technology being dealt with through scientific research or
creativity? What is your approach to streaming, your links and practices using the
network?
Streaming media exemplify those particular kinds of dislocation, disembodiment, hybridity and
fragmentation that seem to be prioritised in the (post-)digital era of pervasive computing and
ubiquitous networking. Streaming is very relevant to a number of disciplines such as computer
science, networking technologies, media studies, cybernetics, social anthropology and new kinds
materialist philosophies. Yet, in my opinion, the ways in which digital media, in general, and streaming
media, in particular, extend, distribute, hybridise and (hyper)mediate human cognisance have not
been sufficiently studied from those scientific disciplines relevant to human cognition, e.g. cognitive
psychology and neuroscience.
Contemporary trains of thought regarding the material-driven extracranial nature of the human mind
have been mostly driven by archaeology (of the mind) and do not zero in on contemporary technoscientific culture. Scientists should join media artists in their quest for interrogating the contemporary
techno-scientifically produced mind.
Over the last few years networking has become important in my own work which largely revolves
around hybrid, distributed or decentralised systems the last few years. There are two main relevant
traits in my practice : a. sophisticated systems revolving around computer algorithms, data, artificial
intelligence and material affordances, intending to articulating emergent computational/machine
aesthetics of some sort and b. DIWO practices, hacking and workshopping, so that I transcend
selfhood by means of socially empowered collective creation and audience participation. All in all, in
my work I often seek to articular emergent cybernetic aesthetics, be them for algorithmic systems or
for ad hoc micro-societies or for both.
How did you come to use the Internet and networks in your practice? What is the origin
of this relationship?
My practice has gone through various phases and has revolved around a series of disparate foci
before it become explicit that my primary interests are hypermediacy-i.e. the tendency of certain
media/practices to foreground their own constituents - and the post-self-initially in terms of selferasure and, subsequently, in terms of cybernetic entanglement to broader meta-systems. My interest
in hypermediacy led me to experiment with all kinds of different media including the network, both as a
metaphor and as a concrete technology. My interest in self-erasure led me to experiment with ways in
which I can eliminate myself (and possibly other’s selves) within broader networks in favour of some
emergent system.
Has this technology shaped your relationship to the world, to creativity and the vision
you have of your art and research? If so how ?
It has help me realise the post-human condition as a radically different way to be in the world-one
which is already practiced since at least decades, albeit very rarely accounted for in every-day culture
in all ideological, political, religious, philosophical and aesthetic respects. It has also helped realise
that the cybernetic embodiment of information advertised by such technologies is a false promise in
that it actually accentuates those (often dislocated) processes of embodiment according to which we
come to access streaming content. Accordingly, I am becoming more and more interested in how
exactly those processes can be embodied and, therefore, in how they can be foregrounded within an
artistic content.
How do you view the evolution of the last twenty years of artistic practices and
network research by means of the evolution of technology? What are advantages or
disadvantages do these technologies in both theory and practice? And what, in your
opinion, are the future developments ?
An advantage-disadvantage opposition is mostly relevant in the case of those artistic/scientific
practices seeking to articulate well-specified content. I am more interested in hypermedia practices
that zero in on the very media, materials and technologies involved. From such a stance, what is
important is not so much the evolution of technology per se, but the evolution of the ways we engage
with it-be it for new or for existent media.
Unfortunately, art and research milieux often draw upon the broader historical traditions/constancies
of their respective disciplines rather than upon technological progress in-itself. That said, it is very
optimistic that over these last two decades both artists and researchers become more and more
aware of the limitations of their disciplines and they occasionally work out-of-the box drawing upon the
properties of the very materials and technologies of interest. Research-through-design, practice-led
research and reflexive and networked DIWO practices are bold examples of such a strand.
The current technological foci in networking are the IoT and ambient intelligence. While the latter can
easily find their place within existent artistic discourse, it is a unique challenge for both artists,
designers and science practitioners to rather invest in the radically distributed, decentralised and
hybrid paradigm such technologies suggest. Such a turn will most likely cause the traditional
‘hylomorphic’ dichotomies of the past (object-subject, content-form, artist-audience, productionexhibition, etc) to collapse, channeling existent artistic trends in unique ways and, hopefully, raising
new kinds of aesthetic concerns.
What do you see as are the most significant artworks and research in the field of
networked creation?
As far as critical theory is concerned : Bruno Latour’s Actor-Network-Theory, Niklas Luhmann work on
cybernetics and in the nature of communication, Lambros Malafouris’ Theory of Material Engagement
and his research on agency and the archaeology of the mind.
As far as technology is concerned, ‘Design Patterns : Elements of Reusable Object-Oriented
Software’ by the so-called Gang of Four has been a very important book that laid out the foundation of
a whole new way of networked-based and networked-oriented kind of thinking amongst coders and
computer-scientists—one which has, in my opinion, profoundly affected the contemporary common
thought, at least amongst creative technologists, to transcend the data-conta-algorithm opposition that
bounded programmers’ thought for decades. More than simply been a technical book, it implicitly
proposes a view of the world as a hybrid nexus of various kinds of beings that interact with one
another in all sorts of ways, in somewhat Latour-ean fashion.
As far as art is concerned: Nince Inch Nails’ ‘Ghost I-IV’ project-albeit I am not really fond of it the
music, it does celebrate DIWO, UGC-driven practices, hybridity and decentralisation in the most
straightforward way, blurring the line between audience and artist, amateur and professional, listening
and composing for good. Then, John Richard’s broader ‘dirty electronics’ practice, especially those
particular projects that revolve around workshopping and audience participation, again blurring the
line between the artist and the audience but suggesting a completely different kind of corporeality and
off-line networking. To boot, Stelarc has raised a number of concerns about tele-corporeality and
networked embodiment (rather than disembodiment) in a number of works-primarily when allowing the
audience to remotely control his body.
Are there any questions and ideas that you would bring to the debate and to the
question of research in a network creation and artistic practices using the Internet?
For me the most important aspect of networking, in general, are emergent autopoiesis and the
question of the post-self. If we understand the human mind as emergent, hybrid and established on
top of complex interactions with the physical/material world-as contemporary trains of thoughts seems
to suggest-then what kinds of minds are established in the era of ubiquitous networking and pervasive
computing ? And what kinds of emergent meta-minds are established when individual minds are
brought together into interactive multimedia meshes that transcend physical presence, linguistic
restrictions, gender specification and a series of other accounts that have traditionally defined
personal identity ? How (im)possible is it for us to understand such emergent meta-minds and how
promising is a transcendental self-elimination within such a post-self ?
➢
Don Foresta
Don Foresta est un artiste chercheur et un théoricien de l’art qui utilise les nouvelles technologies
comme outil créatif. Il est spécialiste en art et en sciences et a publié principalement “Mondes
Multiples” en Français en 1991. Il vient d’achever une seconde édition en Anglais.
Il est chercheur associé à la London School of Economics et était précédemment professeur à l’Ecole
Nationale des Arts Décoratifs et à l’Ecole Nationale d’Arts – Paris/Cergy.
Il a travaillé pendant 25 ans à développer le réseau en tant qu’outil artistique et coordonne à présent
un réseau à très haut débit (MARCEL) voué à l’expérimentation artistique, éducative et culturelle. Il
débuta ce réseau alors qu’il était invité comme artiste/professeur au Studio du Fresnoy à Lille et l’a
complété dans le cadre d’une recherche à la Wimbledon School of Art à Londres.
MARCEL a maintenant 150 membres dans 22 pays, dont 40 sont connectés en permanence par une
plateforme de multicasting.
Ses premiers échanges en ligne en 1981 ont été mis en place entre le Center for Advanced Visual
Studies au MIT et l’American Center à Paris où il était directeur du programme Media Art. Il était l’un
des commissaires de la 42e Biennale de Venise en 1986. Il y a construit un des premiers réseaux
informatiques entre artistes qu’il a continué à faire évoluer au fil de la transformation des technologies.
Don Foresta est diplômé de l’Université de Buffalo, la Johns Hopkins School of Advanced
International Studies et docteur à la Sorbonne en Sciences de l’Information. Il est à la fois Américain
et Français et a été nommé « Chevalier de l’Ordre des Arts et des Lettres » par le Ministre de la
Culture.
Pouvez vous présenter et nous donner des éléments sur vos projets de recherches et/
ou de créations?
MARCEL - réseau international de personnes qui veulent utiliser le réseau très haut-débit pour la
création artistique.
MaP-MARCEL-France, projet de créer le projet en France avec une plate-forme dédiée à l'art.
Quelle est votre approche du streaming, de vos liens et pratiques utilisant le réseau ?
A ce jour le streaming est limité techniquement.
Ce qu’il m’intéresse le plus c’est la création
interactive en temps réel entre plusieurs sites, un espace multimédia, une synthèse de toutes les
disciplines artistiques dans un art total. Le rêve artistique depuis toujours : Il faut retrouver l’espace
de la caverne mais connecté.
Selon vous, que représente le streaming dans les sphères artistiques et au delà
comment cette technique/technologie est-elle abordée dans la recherche scientifique
ou dans la création?
Il faut pousser les scientifiques (la technologie) dans la direction qu’il nous faut.
L’évolution
technologique doit être dirigée par les besoins artistiques.
Comment en êtes vous arrivé à utiliser les réseaux et internet dans votre pratique ?
Quelle est la genèse de cette relation ? Qu’est ce que cette technologie a apporté dans
votre relation au monde, à la création et la vision que vous avez de l’art et de la
recherche?
Qu’est-ce que je peux dire ? c’est ma vie depuis 1981 !.
Comment voyez l’évolution depuis une vingtaine d’années des pratiques artistiques et
des recherches sur les réseaux à travers l’évolution des technologies? Quels sont
leurs avantages et leurs problèmes pratiques et théoriques ? Et à votre avis, quels en
sont les développements futurs ?
Ca bouge mais ce n’est pas encore suffisant. Il nous faut des outils et des labos partout, connectés et
collaborants.
Quelles sont, pour vous, les oeuvres et les recherches les plus marquantes dans le
domaine de la création en réseau?
J’ai vu des petits aperçus mais jamais rien de ce que je rêve. Encore une fois, nous sommes
esclaves de la technologie et il faut surmonter ça.
Y a t-il des questions ou des idées que vous souhaiteriez proposer au débat
concernant les problématiques de la recherche sur la création en réseau et les
pratiques artistiques utilisant l’internet?
Il faut fabriquer les outils dont nous avons besoin et les labos pour la création artistique en ligne.
Nous allons créer un nouveau médium de communication pour la société par l’impulse artistique et
non pas par et pour le fric.
Je voudrais signaler un problème fondamental : nous sommes bloqués par les industries IT et toutes
les instances gouvernementales qui les écoutent parce qu’ils n’ont pas encore trouvé un moyen de
gagner l’argent avec le multicast, donc ils le cachent.
On doit trouver un réponse à ce blocage.
➢
Tim Shaw & John Bowers
Can you present yourself and the elements of your research projects and / or
creations?
Tim Shaw has worked internationally as a professional composer, performer, sound designer and
researcher. His practice incorporates diverse approaches to sound capture and processing, and
includes creating immersive and site responsive sonic installations.
His compositional methods include field recordings, synthesized sounds and live electronics, providing
a wide scope for creative diversity. At the heart of his work lies a concern with the auditory reflection
and mirroring of real world environments through sound and technology.
He is currently studying a PhD in Digital Media at Culture Lab alongside managing Newcastle based
record label Triptik. Collaboration plays a central role in his approach, he has been lucky enough to
make artistic work with many people including Chris Watson, John Bowers and Sébastien Piquemal.
Tim has presented work in various international venues including Café OTO, NIME, NK Projekt, The
Wired Lab, CTM, The Pacitti Company, New Media Scotland, Abandon Normal Devices and FACT
Liverpool.
John Bowers works with modular synthesisers, home-brew electronics, and reconstructions of
antique image and sound-making devices, alongside contemporary digital technology. He makes
performance environments which combine sound, image and gesture at a fundamental material level.
He has performed at festivals including Electropixel Nantes, Piksel Bergen, BEAM Uxbridge and Spill
Ipswich, and toured with the Rambert Dance Company performing David Tudor’s music to Merce
Cunningham’s Rainforest. Amongst many collaborations, he works with Sten-Olof Hellström and in the
noise drone band Tonesucker.
Most recently, in collaboration with Tim Shaw, John has been formulating strategies for 'Pubic Making'
- making work in public, with the public - at specially selected sites of psychogeographic salience or in
relation to notable historical events.
This has included Interglacial/Erratics (with the Pacitti Company, Ipswich, UK), SoundLines (with
FACT, Liverpool, UK), Salient/Re-Entrant (as part of the Fort Process festival, Newhaven Fort, UK)
and War Workings (as part of Tyne and Wear Archives and Museum's WW1 commemoration
programme, Decoded, Newcastle, UK). John Bowers works in Culture Lab and Fine Art, Newcastle
University, where he directs research on Digital Cultures.
What do you think streaming media represents for artistic circles and beyond that how
is this technique / technology being dealt with through scientific research or
creativity? What is your approach to streaming, your links and practices using the
network?
I have worked on a piece Murmurate with Sebastien Piquemal which involves using peoples phones
to play sound through. Though this isn't strictly streaming, it has some interesting parallels. The
network the phones connect to becomes a site specific entity, set up for the duration of the
performance and then taken down. We once performed it on a very remote rock in rural Scotland.
Taking the network to unexpected places. I am also interested in networked latency as a creative
material and how this informs composition.
For NEAR I will be exploring the city of Nantes with situationist style instructions from John Bowers
who will be remotely communicating with me. All of my journeys will be streamed into the installation
space. For the performance we will use this material to create an imagined re-mapping of Nantes.
How did you come to use the Internet and networks in your practice? What is the origin
of this relationship?
Networks are everywhere and have ancient origins, the Internet adds a new and interesting dimension
to this.
Has this technology shaped your relationship to the world, to creativity and the vision
you have of your art and research? If so how?
Creativity is appropriating the material around you to create opportunities to view the world differently.
➢
Julien Rabin
Julien Rabin suit un cursus de musique et musicologie à l’Université Rennes 2 avant de se spécialiser
dans le domaine des musiques électroacoustiques et de l’informatique musicale au sein d’un Master
Arts et Technologies Numériques.
De 2010 à 2016, il est chargé de recherche et de développement informatique au GMEA – Centre
National de Création Musicale d’Albi-Tarn et coordinateur des chantiers d’expérimentation artistique
menés dans le cadre du projet ANR OSSIA – Open Scenario System for Interactive Application
(2012-2015).
Développant aujourd’hui en freelance des outils pour la création, il est également membre de
l’Association Française d’Informatique Musicale. Il coordonne par ailleurs le comité de pilotage des
Journées d’Informatique Musicale.
Pouvez-vous vous présenter et nous donner des éléments sur vos projets de
recherches et/ou de créations?
J'ai suivi un cursus de musique et musicologie à l’Université Rennes 2 au cours duquel je me suis
spécialisé dans le domaine des musiques électroacoustiques et de l’informatique musicale au sein
d’un Master Arts et Technologies Numériques. De 2010 à 2016, j'ai occupé le poste de chargé de
recherche et développements informatiques au GMEA – Centre National de Création Musicale d’AlbiTarn.
Dans ce cadre, j'ai eu en charge la réalisation des dispositifs informatiques mis en œuvre dans les
projets de création, que ce soit en spectacle vivant ou dans des installations intermédias.
Ces dispositifs ont principalement mis en jeu l'écriture de l'espace - sonore plus particulièrement par le biais de différents outils de spatialisation et l'écriture d'interactions (systèmes de captation et
mappings avancés).
J'ai également eu en charge la coordination des chantiers d’expérimentation artistique menés dans le
cadre du projet ANR OSSIA – Open Scenario System for Interactive Application (2012-2015).
Outre l'application des outils développés dans le cadre de ce projet de recherche, cette mission avait
comme objectif de faire interface entre les cas d'utilisation en situation de création avec la partie plus
fondamentale
- c'est-à-dire, hors temps et contraintes de production -
du projet de recherche:
validation des spécifications, débug, mettre à jour les besoins, etc.
Je poursuis aujourd'hui en freelance le développement des outils au service de la création et de
l'écriture du son et de l'interaction.
Enfin, je suis impliqué depuis de nombreuses années dans le projet de framework Open source
Jamoma, auprès d'autres artistes, autant comme utilisateur que développeur de l'implémentation du
framework dans l'environnement Max.
Quelle est votre approche du streaming, de vos liens et pratiques utilisant le réseau?
Dans le projet Jamoma aussi bien que dans les réalisations artistiques qui nourrissent les
développements, l'utilisation du réseau a été jusqu'à aujourd'hui assez spécifique. Celle-ci n'a pas été
envisagée du point de vue de la diffusion des contenus-même (audio ou vidéo) mais du point de vue
de leur contrôle à distance.
L'un des objectifs du projet Jamoma est de proposer une interface entre les différents environnements
informatiques d'un projet via différents protocoles. On peut citer par exemple le protocole
expérimental Minuit qui offre un système de requêtes entre applications.
Au-delà de l'aspect technique, il s'agit bien de permettre l'écriture de comportements entre les outils et
les médias qu'ils régissent : écriture du son en lien à la lumière, écriture de la vidéo par des actions au
plateau, etc.
Si le framework permet l'échange de données sur le réseau, il a été testé de manière locale (sur un
ordinateur unique hébergeant différentes applications, ou sur plusieurs ordinateurs)
Selon vous, que représente le streaming dans les sphères artistiques et au delà
comment cette technique/technologie est-elle abordée dans la recherche scientifique
ou la création?
Comme c'est probablement le cas avec toute technologie, si la recherche scientifique et la recherche
artistique peuvent se conduire au sein d'un même contexte ou projet, les enjeux sont bien différents.
Concernant le streaming, la recherche scientifique porte probablement essentiellement sur la qualité
et la robustesse des flux transmis. De ce point de vue, une impasse technologique est à solutionner.
En revanche, ce verrou n'est pas une condition de la recherche artistique en soi, qui comme avec
n'importe quelle technologie, s'en empare, interroge ses limitations, les détourne, etc. Gageons
qu'avec les avancées scientifiques de cette technologie, artistes et auteurs poseront des questions
artistiques renouvelées ou inédites.
Comment en êtes vous arrivé à utiliser le réseau et internet dans votre pratique?
Quelle est la genèse de cette relation? Qu’est ce que cette technologie a apporté dans
votre relation au monde, à la création et la vision que vous avez de l’art et de la
recherche?
Au-delà d'une utilisation pratique, quotidienne et omniprésente éprouvée par chacun, quel que soit
son domaine, l'expérience du travail en réseau s'est forgée par la nécessité artistique de penser et
mettre en œuvre des relations complexes entre différents médias. Ce besoin a ainsi guidé recherches
et développements informatiques d'outils.
Enfin, de manière pratique, cette expérience du réseau s'est aussi éprouvée dans le projet Jamoma
qui réunit des acteurs de différents pays : France, Norvège, États-Unis. Une telle initiative n'aurait
probablement pas pu se tenir à si large échelle - tout au moins dans la durée - le projet existe depuis
2005 - sans l'aide précieuse de l'usage d'internet et des communautés d'acteurs qu'il participe à faire
échanger.
Comment voyez l’évolution depuis une vingtaine d’années des pratiques artistiques et
de recherche sur les réseaux à travers l’évolution des technologies? Quels sont leurs
avantages et quels sont les problèmes pratiques et théoriques ? Enfin, comment
envisagez-vous les développement futurs ?
Au-delà des questions de la qualité de transmission des flux, de nombreuses questions pratiques
demeurent à explorer.
Si, par exemple, dans le cas du spectacle vivant, il est possible d’envisager de diffuser, sur le plan
technique, un flux audio ou vidéo, qu'en est-il des conditions d'élaboration de ce contenu ?
Si l'on peut envisager produire et contrôler l'espace sonore d'un lieu A depuis un lieu B, comment
appréhender et prendre connaissance de l'identité de ce point A, en saisir les caractéristiques qui vont
nourrir la création depuis ce point B ? La question du streaming n'est sans doute pas tant de diffuser
un résultat sonore ou visuel que de diffuser ses contextes et conditions d'élaboration.
Quelles sont, pour vous, les oeuvres et les recherches les plus marquantes dans le
domaine de la création en réseau?
Plutôt que chercher la réalisation la plus marquante, je pourrais prendre un exemple récent,
particulièrement intéressant quant aux détournements des limitations technologiques à des fins
artistiques.
Le projet est celui d'Égrégore, projet artistique et logiciel de concert à distance.
Plutôt que se heurter aux limitations qualitatives du streaming, le projet est envisagé ici comme un
logiciel téléchargeable par des spectateurs. Ce dernier peut être utilisé par eux comme tout outil
logiciel. En revanche, il peut également être piloté à distance par l'artiste (Nicolas Montgermont), lors
de concerts. Chaque spectateur a alors localement son instrument, joué à distance par le musicien.
http://nimon.org/egregore_source.php
Y a t-il des questions et idées que vous souhaiteriez amener au débat et à la question
de la recherche de création en réseau et des pratiques artistiques utilisant l’internet?
De manière générale, il me semble qu'une attention particulière doit être portée sur la distinction entre
un objet sonore ou visuel produit et son contrôle
➢
Anthoniy Val
Pouvez-vous vous présenter et nous donner des éléments sur vos projets de
recherches et/ou de créations?
Jeune créateur interdisciplinaire et actuellement doctorant en Arts Plastiques (laboratoire LARASEPPIA, l’Université Toulouse Jean Jaurès), je mène des recherches sur les figures bio médiatiques
d’incorporation du corps organique, autrement dit, je m’interroge sur les nouvelles figures du corps
biologique créées par les nouvelles technologies (notamment les biotechnologies). Cependant, ma
pratique, à la fois artistique et discursive, s’appuie sur la transversalité arts – sciences – technologies.
Pour citer quelques créations :
1)
« Transcorpus », installation sensorielle (2015)
Dans sa réalisation, je m’intéressais à l’appréhension du corps par le toucher en m’appuyant sur le
postulat du phénoménologue Maurice Merleau-Ponty : « toucher c’est se toucher ».
Il s’agit d’un dispositif qui donne l’occasion au spectateur de jouer avec son intime, avec les aspects
de la sensorialité relatifs à la perception de son propre corps. “Transcorpus” vise à proposer à son
utilisateur d’interagir non pas avec une machine, mais a contrario, avec lui-même.
À l’aide d’un capteur de données bioacoustiques – en effet, la matière plastique principale que j’ai
travaillée sont les sons mécano myographiques – des sonorités mécaniques produites lors de la
contraction des muscles ainsi que le frottement des tissus musculaires, l’interacteur est invité à
supprimer, par le toucher et la caresse, les contours de sa forme organique en convertissant sa
perception extéroceptive en perception proprioceptive.
2)
« In Vitro », installation (2016)
Ce dispositif vise à déplier le corps biomoléculaire tout en ayant recours à son code source biologique
qu’est l’ADN.
L’installation questionne la possibilité d’appliquer au corps organique des procédés que nous
connaissons en nouveaux médias – décodage, transcodage, encodage, reprogrammation, etc. – et
étudier alors le corps « décodé », le corps « transcodé », le corps « reprogrammé ».
Tout comme un organisme vivant,” In Vitro” a son propre code génétique – une séquence d’ADN. In
Vitro est un corps « transcodé » et réincorporé dans un nouveau corps. Il a sa propre organicité qu’il
expose ; une organicité différente de la nôtre, qui obéit à d’autres lois de la physique et notamment
celles de l’électromagnétisme.
C’est un corps affecté. Car tout comme notre ADN s’adapte à son environnement par diverses
mutations, celle du dispositif fait de même. En effet, nous les spectateurs, nous prenons une place
importante dans cet environnement et causons nous-mêmes, par notre seule présence, des
mutations dans le code génétique d’In Vitro. De telle manière In Vitro n’est plus ce corps réincorporé
originel, mais devient un corps nouveau original et autonome. Toutefois, ces mutations ne se
manifestent pas uniquement visuellement, mais aussi au niveau sonore. C’est alors un corps affectant
qui crée son environnement, son paysage (sonore).
Quelle est votre approche du streaming, de vos liens et pratiques utilisant le réseau?
Menant une recherche/une thèse en Arts Plastiques, spécialité Création numérique, j’exerce un
regard critique sur les nouvelle technologies, et sur le réseau.
M’appuyant sur la notion de biomedia (processus dans lequel des procédés et des comportements
biologiques sont informatiquement traduits ou même recontextualisés), je fais une comparaison entre
le réseau informatique, d’un côté, et le réseau biologique, de l’autre.
C’est en effet une approche qui permet de comprendre, d’une certaine manière, par la suite,
l’approche cybernétique qui est portée sur le corps par les biotechnologies.
Selon vous, que représente le streaming dans les sphères artistiques et au delà
comment cette technique/technologie est-elle abordée dans la recherche scientifique
ou la création ?
Comment en êtes vous arrivé à utiliser le réseau et internet dans votre pratique?
Quelle est la genèse de cette relation? Qu’est ce que cette technologie a apporté dans
votre relation au monde, à la création et la vision que vous avez de l’art et de la
recherche ?
L’utilisation du réseau dans ma pratique est faite de manière purement philosophique. En effet, je
questionne le corps dans un système de rhizome, i.e. dans un système où tous ses éléments ne sont
plus soumis à aucune organisation hiérarchique, pour pouvoir « étudier » le potentiel de chacun de
ces éléments corporels isolés et en interaction.
Comment voyez-vous l’évolution, depuis une vingtaine d’années, des pratiques
artistiques et de la recherche sur les réseaux à travers l’évolution des technologies ?
Quels en sont les avantages et les problèmes pratiques et théoriques ? Et quels sont,
à votre avis, les développement futurs?
Quelles sont, pour vous, les oeuvres et les recherches les plus marquantes dans le
domaine de la création en réseau?
[Réponse sentimentale] Pour moi, l’œuvre la plus marquante utilisant le réseau c’est :
« Listening Post », Mark Hansen & Ben Rubin (2001)