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La miséricorde selon sainte Thérèse d'Avila

La miséricorde selon sainte Thérèse d’Avila « Vous savez bien, Vous, mon Dieu, qu’au milieu de toutes mes misères je n’ai jamais cessé de reconnaître la grandeur de votre pouvoir et de votre miséricorde. » (Quatrième Exclamation) e thème de la miséricorde divine traverse toute la vie et l’œuvre de sainte Thérèse d’Avila. « Le livre des miséricordes de Dieu » : c’est d’ailleurs ainsi que la sainte appelle son Autobiographie. Elle en donnera elle-même la raison dans une de ses lettres. À don Pedro Castro y Nero, chanoine d’Avila, à qui elle avait confié le manuscrit de sa Vie pour qu’il l’examine, elle écrivait, après qu’il l’eut rassurée sur son contenu : « Quelle merveille que la miséricorde de Dieu ! Voilà qu’à la vue de toutes les infidélités de ma vie, vous vous sentez porté au bien, et ce n’est pas sans raison, puisque vous me voyez échappée à l’enfer que j’ai mérité à juste titre depuis longtemps ; aussi, j’ai intitulé cet écrit : Le livre des miséricordes de Dieu 1. » À sa nièce Mère Marie-Baptiste, prieure à Valladolid, elle écrit : « J’ai été très contente que ces livres [la Vie et Le Chemin de perfection] n’aient pas été brûlés. […] Ce que je veux, c’est la gloire de mon Seigneur, c’est qu’il y en ait beaucoup à le louer. Je voudrais aussi, cela est certain, que l’on connût ma misère 2. » L L’abîme de la misère appelle l’abîme de la miséricorde. C’est parce que sainte Thérèse a connu mieux que quiconque la profondeur de sa misère, qu’elle a pu chanter comme nul autre la miséricorde de Dieu, et devenir elle-même un exemple vivant de miséricorde. « Cette pauvre pécheresse, ce misérable ver de terre » Sur une page de son bréviaire, la sainte avait marqué ainsi la date de sa naissance : « Mercredi 29 mars 1515, fête de saint Bertold, de l’Ordre du Carmel, à cinq heures du matin, est née Teresa de Jesús, la pecadora ». Et nous savons comment elle prendra congé de ses filles sur son lit de mort : « Pardonnez-moi le mauvais exemple que je vous ai donné, ne prenez pas modèle sur moi qui ai été la plus grande pécheresse du monde. » Les premières pages de sa Vie, qui tiennent lieu de prologue, veulent en donner le ton : Je conjure, pour l’amour de Dieu, celui qui lira cet écrit, de ne point perdre de vue que ma vie a été très infidèle, et que, parmi les saints qui se sont convertis au Seigneur, je n’en ai trouvé aucun qui puisse me servir de consolation. Je constate, en effet, qu’une fois appelés de Dieu, ils ne l’offensaient plus. Pour moi, au contraire, non seulement je devenais plus infidèle, mais je m’étudiais, ce semble, à 1 Lettre 405 du 19 novembre 1581 (nous citons les lettres d’après l’édition du père Grégoire de Saint-Joseph, o. c. d., Paris, Cerf, 1939). 2 Lettre 84 du 28 août 1575. 1 LA MISÉRICORDE SELON SAINTE THÉRÈSE D’AVILA résister aux faveurs que Sa Majesté m’accordait. Je craignais d’être obligée de servir Dieu avec plus de courage, et je comprenais par ailleurs l’impuissance où j’étais de le payer tant soit peu de retour. Qu’il soit béni à jamais de m’avoir attendue si longtemps ! « Mes si grands péchés », « mon ingratitude », « les innombrables infidélités de ma vie », « ma malice si profonde », « cette créature si coupable, si abjecte, si faible, si misérable et si vile », « cette pauvre femme pécheresse », « ce misérable ver de terre »… sont des expressions qui reviennent fréquemment sous sa plume. Venant d’une si grande sainte, dont les confesseurs ont pu affirmer lors de son procès de canonisation être certains qu’elle n’avait jamais commis de péché mortel, une telle insistance a de quoi surprendre. On aurait tort toutefois de sourire et de n’y voir que pieuse exagération ou concession à quelque genre littéraire. La Madre avait un trop grand amour de la vérité 3, elle affectionnait trop la franchise et la simplicité, elle avait bien trop horreur de toute espèce de comédie ou de simagrée, enfin, elle nous a laissé de trop fines réflexions sur la vraie et la fausse humilité 4, pour tomber, lorsqu’elle se décrit elle-même, dans l’outrance. Ses vertus, la sainte n’hésite d’ailleurs pas au besoin à les reconnaître : « Je n’aurais jamais voulu être pour quiconque une occasion d’offenser Dieu » ; « pour rien au monde je ne me résoudrais à quoi que ce soit qui offensât Dieu gravement » ; « j’avais une horreur naturelle des choses déshonnêtes ». Décrivant sa vie avant sa « conversion », elle dresse d’elle-même un portrait que pourraient envier bien des gens du monde et même bien des religieux : Toute mauvaise que j’étais, j’apportais quelque soin à servir Dieu ; j’évitais certaines fautes que le monde, je le vois, compte pour rien et commet avec facilité ; j’endurais de graves infirmités avec cette grande patience que me donnait le Seigneur ; je n’étais point portée au murmure ; je ne disais de mal de personne ; je n’aurais jamais pu, ce me semble, vouloir du mal à qui que ce soit ; je n’étais point atteinte de la convoitise ; je ne me souviens pas d’avoir jamais eu des sentiments d’envie, ou du moins je n’ai pas offensé gravement notre Seigneur sur ce point ; il y avait encore en moi quelques autres dispositions de ce genre. Enfin, toute mauvaise que j’étais, je me tenais le plus possible dans la crainte de Dieu […] 5. Mais alors, qu’avait donc Thérèse d’Avila de si grave à se reprocher ? On a pu dire que « concrètement, tout se résume à un problème de parloir 6. » Les nombreuses amitiés, les conversations trop « mondaines », superficielles (même s’il y était souvent question de Dieu), qu’elle entretenait, étaient pour elle source de dissipation. Ces relations étaient dangereuses, non pour sa vertu, mais pour son recueillement. Elles tenaient trop de place. Or Dieu voulait toute la place dans le cœur de cette carmélite. Teresa de Ahumada devait devenir Teresa de Jesús. 3 Cf. CARMEL DE VIENNE, « Sainte Thérèse et la vérité », in Carmel, 1952, pp. 66-76. Dans une lettre adressée à la prieure et aux religieuses de Séville, la sainte n’hésite pas à reprendre une sœur quelque peu emphatique dans ses expressions : « La Sœur Hiéronyme signe sa lettre “fumier” (muladar). Dieu veuille que cette humilité ne soit pas seulement en paroles ! » (Lettre 309 de janvier 1580). 4 Cf. Vie, ch. 30. 5 Vie, ch. 32. Cf. aussi ch. 7 : « Voici pourquoi on ne me croyait pas aussi mauvaise que je l’étais. On me voyait, malgré mon jeune âge et des occasions nombreuses, me retirer souvent dans la solitude pour m’y livrer à la prière et à de longues lectures. Je parlais habituellement à Dieu ; j’étais heureuse de faire peindre l’image de Notre-Seigneur en beaucoup d’endroits du monastère ; j’avais un oratoire que j’ornais de ce qui pouvait porter à la dévotion, je ne disais jamais de mal de personne. On remarquait encore en moi d’autres choses de ce genre qui avaient les apparences de la vertu. » 6 Pierre-Marie SALINGARDES, o. c. d., « Misère et miséricorde. L’hymne de Thérèse d’Avila », in Carmel, 1979, p. 147. 2 LA MISÉRICORDE SELON SAINTE THÉRÈSE D’AVILA On sait que cela prit du temps. Comme l’a parfaitement résumé le père Salingardes dans un bel article : « Dieu attendait Thérèse, et Thérèse faisait attendre Dieu. Telle était la miséricorde de l’un, et telle la misère de l’autre. L’excès de la douleur de Thérèse au souvenir de ses fautes ne paraît plus disproportionné à l’exiguïté de celles-ci, dès lors qu’on les situe à ce niveau 7. » Sainte Thérèse de Lisieux a pu dire que dès l’âge de quatre ans, elle n’avait jamais rien refusé à Dieu. Il en faudra dix fois plus à Thérèse d’Avila. Son drame se joue là. Ne le minimisons pas. Car la droiture et la magnanimité de Thérèse ne faisaient qu’accroître son tourment. Par bien des aspects, elle semblait une religieuse exemplaire. Ses vertus non feintes, ses indéniables qualités de cœur et d’intelligence, ne pouvaient pas ne pas attirer l’attention et les louanges. Qui n’aurait recherché la compagnie d’une religieuse si aimable ? Mais la carmélite souffrait intérieurement de ce décalage entre cette opinion qu’on avait d’elle-même et ce qu’elle savait être son peu de correspondance à la grâce : « Elle voit en elle ce que les autres ne sauraient voir. Elle seule sait ce que le Seigneur lui demande, et ce qu’elle ne lui donne point. Elle est certes au dehors une bonne religieuse, et elle est perçue comme telle ; mais elle n’est pas la sainte qu’il lui est demandé d’être, et qu’elle a tout pour devenir. Elle n’est pas ce que l’on croit qu’elle est 8. » Dieu appelle chacun à un certain degré de sainteté et lui donne pour l’atteindre les grâces proportionnées. Il y a un grand danger pour une âme à ne pas répondre avec toute la générosité à cet appel 9. Très tôt, Thérèse d’Avila a reçu des marques insignes de la faveur divine, notamment dans l’oraison. Lorsqu’enfin elle se donna toute à Dieu, comment n’aurait-elle pas regardé rétrospectivement avec sévérité et douleur un passé fait d’atermoiements et de résistances à la grâce ? Alors, « la plus petite bavure est insupportable au regard, la moindre fausse note blesse au cœur. La lenteur dans l’amour devient un affront à l’Amour et déclenche des larmes amères. Tout ce qui retient d’“être ce que Dieu veut que nous soyons” devient chose grave 10. » La sainte ellemême a bien expliqué comment la perception du péché et la crainte de le commettre, loin de diminuer, croissent à mesure que l’on progresse dans la vie spirituelle : La douleur des péchés commis croît en effet d’autant plus dans une âme qu’elle reçoit davantage de notre Dieu. […] Cette douleur ne cessera pas. […] L’âme arrivée dans cet état 11 ne considère point le châtiment qu’elle doit subir pour ses péchés, mais cette noire ingratitude qu’elle a eue envers celui à qui elle est si redevable et qui mérite tant d’être glorifié. […] Elle est épouvantée d’avoir eu tant de témérité ; elle gémit de son peu de respect envers lui ; elle voit qu’elle est tombée dans une folie tellement étrange qu’elle ne cesse jamais de la déplorer, quand elle considère qu’elle a préféré des objets si vils à une si haute majesté. Je connais une personne qui désirait la mort non seulement pour voir Dieu, mais encore pour ne plus éprouver la peine si constante de lui avoir montré tant 7 Pierre-Marie SALINGARDES, art. cit, p. 148. Pour une juste compréhension des sentiments éprouvés par la sainte dans la considération de ses fautes, on se reportera à Olivier LEROY, Sainte Thérèse d’Avila. Biographie spirituelle, coll. « Les études carmélitaines », Paris, Desclée De Brouwer, 1962, ch. I : « La pécheresse », pp. 25-39. 8 Pierre-Marie SALINGARDES, art. cit., p. 150. 9 Le père Domingo Báñez, grand théologien dominicain, qui fut six ans le confesseur de la sainte, observe, dans l’approbation qu’il fit du manuscrit de la Vida, qu’« il y a des âmes, qui pressées par Dieu d’entrer dans le chemin de la perfection, si elles cessent d’être ferventes, ne peuvent garder le juste milieu et tombent dans l’extrême du péché. » N’était-ce pas précisément le risque que courait sainte Thérèse ? 10 Pierre-Marie SALINGARDES, art. cit., p. 149. 11 Nous sommes dans les « sixièmes demeures », au sommet de la vie mystique. 3 LA MISÉRICORDE SELON SAINTE THÉRÈSE D’AVILA d’ingratitude quand elle en avait toujours été comblée de tant de faveurs et devait en recevoir tant d’autres. Il lui semblait qu’aucune créature n’avait commis autant d’iniquités qu’elle ; et elle était persuadée qu’on ne trouverait aucune personne à qui Dieu eut montré tant de patience et accordé tant de faveurs. […] cette peine ne trouve aucun adoucissement dans la pensée que Notre Seigneur a déjà pardonné nos péchés et les a oubliés ; elle augmente au contraire, à la vue de sa bonté si grande et des faveurs qu’il accorde à une âme qui n’a mérité que l’enfer. À mon avis cette pensée dut causer un cruel martyre à saint Pierre et à la Madeleine 12. Saint Pierre et sainte Madeleine : deux saints qu’elle chérissait particulièrement 13, comme saint Augustin 14, autre grand converti : « Les saints que le Seigneur a retirés du péché pour les amener à la perfection étaient pour moi un sujet de consolation très vive 15. » Eux aussi s’étaient montrés infidèles, eux aussi avaient fait attendre Dieu. Aussi différents qu’aient pu être leurs passés respectifs, comment sainte Thérèse ne se serait-elle pas reconnue dans ces convertis ? La prise de conscience de sa misère culminera pour Thérèse dans sa terrible vision de l’enfer : « Je compris bien que c’était une grande grâce et que le Seigneur voulait me faire voir de mes propres yeux l’abîme d’où sa miséricorde m’avait délivrée 16 » ; et dans celle de l’âme en état de péché mortel : « J’ai vu à quel juste titre l’enfer est mérité par un seul péché mortel. On ne saurait, en effet, comprendre la gravité d’un tel acte commis en présence d’une si haute Majesté et l’opposition qu’il y a entre des choses de cette sorte et sa nature. Cela montre aussi sa miséricorde, puisqu’il sait que nous connaissons ces vérités, et qu’il daigne cependant nous supporter 17. » De fait, l’expérience de sa misère est inséparable de celle de la miséricorde divine, cette miséricorde dont sainte Thérèse ne cessera plus de chanter les merveilles. « Chanter les louanges de cette Majesté qui m’a supportée si longtemps » Car la Madre n’est pas femme à se lamenter en vain. Si elle s’étend sur ses misères, c’est pour faire ressortir par contraste la Bonté divine, c’est pour redonner espérance aux pécheurs : « Ce que Dieu a fait pour moi, il peut le faire pour vous », semble-t-elle leur dire. Que ces malheureux fassent donc comme elle : « Dès lors que je ne puis faire que mon passé n’ait pas eu lieu, mon seul remède est de recourir à cette divine miséricorde, de mettre ma confiance dans les mérites de son Fils et de Le Château de l’âme, VIes demeures, ch. 7. La dévotion thérésienne envers sainte Marie-Madeleine mériterait à elle seule un article entier. Une dévotion qui n’était pas exempte d’une « sainte jalousie », qui fut d’ailleurs récompensée. Yépès (Vie de la sainte, I, 19) raconte que la Madre portait une grande envie à l’amour que notre Seigneur avait eu pour Marie-Madeleine. Or, un jour de la fête de cette sainte, notre Seigneur lui dit : « J’ai eu celle-ci pour amante durant mon séjour sur terre ; c’est toi qui l’es maintenant que je suis au Ciel. » Tous les ans, il lui renouvelait cette faveur le jour de la fête de sainte Madeleine. Sainte Thérèse y fait ça et là discrètement allusion : « Le jour de la fête de sainte Madeleine, le Seigneur vint de nouveau m’accorder la grâce qu’il m’avait faite à Tolède, en me choisissant pour remplacer une personne absente. » (Sixième relation spirituelle). 14 On sait l’impression que fit sur elle la lecture des Confessions. 15 Vie, ch. 9. 16 Vie, ch. 32. 17 Vie, ch. 40. 12 13 4 LA MISÉRICORDE SELON SAINTE THÉRÈSE D’AVILA la Vierge, sa Mère, dont, tout indigne que je suis, je porte l’habit 18. » « La miséricorde ne manque jamais à ceux qui espèrent en lui 19. » « De sa miséricorde, je n’ai jamais douté ; de moi, souvent 20. » Aussi presse-t-elle les pécheurs de suivre son exemple, de recourir, pendant qu’il est encore temps, à la miséricorde : « Je le dis pour la consolation des âmes faibles comme la mienne, afin qu’elles ne désespèrent jamais et qu’elles ne cessent point d’avoir confiance en la miséricorde de Dieu. Viendraient-elles à tomber après avoir été élevées bien haut, qu’elles ne se découragent point, si elles ne veulent se perdre entièrement ; car les larmes peuvent tout obtenir, et une eau en attire une autre 21. » L’eau de nos larmes attire l’eau de la miséricorde. Si sainte Thérèse recommande aux âmes, quel que soit leur avancement spirituel, de toujours garder le souvenir de leurs péchés 22, elle ne fait jamais de notre misère un objet de contemplation en soi. Ce serait prendre le risque de nous détourner de notre devoir, en particulier de l’oraison, laquelle n’est pas une introspection morbide, mais d’abord « ce commerce intime d’amitié où l’on s’entretient seul à seul avec ce Dieu dont on se sait aimé23 ». Plus d’une fois, la Madre met en garde contre cette tentation diabolique du désespoir, à laquelle elle faillit succomber un temps : Gardons-nous bien aussi, mes filles, de certaines humilités que nous suggère le démon. Il nous jette dans les plus vives inquiétudes en nous représentant la gravité de nos péchés. C’est là un des points sur lesquels il trouble les âmes de beaucoup de manières. […] Il peut arriver que le sentiment si profond de votre misère soit parfois un acte d’humilité, une vertu véritable ; mais parfois aussi ce peut être une très grave tentation. […] À mon avis, le démon voudrait nous faire croire que nous avons de l’humilité et, s’il le pouvait, nous amener en échange à perdre toute confiance en Dieu. Lorsque vous vous trouverez dans cette épreuve, détournez le plus possible la pensée de cette considération de votre misère, et fixez-la sur la miséricorde de Dieu, sur l’amour qu’il nous porte et les souffrances qu’il a endurées pour nous 24. La confiance dans la miséricorde divine devient ainsi la marque de l’humilité vraie, laquelle ne trouble pas, mais donne au contraire, avec la componction, une grande paix. L’âme qui possède [la vraie humilité] reconnaît, j’en conviens, son néant, elle gémit de la misère où elle se trouve, elle considère les sentiments de sa malice qui sont très vifs, aussi vifs même que je l’ai dit, et qu’elle éprouve en toute vérité ; mais elle n’a ni trouble, ni inquiétude, ni ténèbres, ni sécheresses. […] Elle gémit d’avoir offensé Dieu, mais elle se sent dilatée par sa miséricorde. La lumière qui l’inonde la porte non seulement à se confondre elle-même, mais aussi à chanter les louanges de cette Majesté qui l’a supportée si longtemps 25. Le Château de l’âme, IIIes demeures, ch. 1. Le Château de l’âme, VIes demeures, ch. 1. 20 Vie, ch. 8. 21 Vie, ch. 19. 22 Cf. Le Château de l’âme, VIes demeures, ch. 7. 23 Vie, ch. 8. 24 Le Chemin de la perfection, ch. 39. 25 Vie, ch. 30. 18 19 5 LA MISÉRICORDE SELON SAINTE THÉRÈSE D’AVILA L’âme ainsi « dilatée » est rendue plus apte au service de Dieu et du prochain, plus fidèle à ses devoirs, plus persévérante surtout dans l’oraison. Elle redouble d’efforts : « N’allons pas nous imaginer que tout est fait parce que nous aurons beaucoup pleuré. Mettons généreusement la main à l’œuvre […] 26. » Chez sainte Thérèse, l’abandon à la miséricorde divine n’est jamais prétexte à en abuser. Entre désespoir et présomption, entre rigorisme et quiétisme, la Madre montre à ses filles la ligne de crête du vrai abandon. Celui-ci naît de la conscience de notre misère, laquelle est inséparable d’un sens aigu de la gravité du péché et de la justice divine. Les Exclamations, dont on a pu dire qu’elles sont un hymne à la miséricorde de Dieu, ne cessent de rappeler aussi, en termes extrêmement clairs, les exigences de sa justice : Vous savez bien, ô mon Roi, combien cela me tourmente de les voir si oublieux des grands tourments qu’ils endureront pour toute l’éternité, s’ils ne reviennent pas à Vous. Oh ! vous qui êtes accoutumés à vos plaisirs, à vos contentements et à vos aises, et à faire toujours votre volonté, ayez pitié de vousmêmes ! Souvenez-vous que vous serez pour toujours, pour l’éternité, la proie des furies infernales. Considérez que celui qui vous supplie, maintenant, c’est le Juge qui doit vous condamner, et que vous n’avez pas un seul instant de vie assuré ; pourquoi ne voulez-vous pas vivre pour toujours ? Ô dureté des cœurs humains ! Que votre immense miséricorde les attendrisse, mon Dieu 27. Ainsi, en sainte Thérèse, la reconnaissance immense envers Dieu de se savoir épargnée du malheur éternel va nourrir une intense compassion des êtres qui y sont exposés, avec le désir impétueux de les en délivrer à tout prix. Sauver les pécheurs qui, parce qu’ils refusent de reconnaître leur misère, se rendent incapables d’accueillir la miséricorde : telle sera désormais la mission de Teresa de Jesús et de ses filles. « Ayez pitié de ceux qui n’ont pas pitié d’eux-mêmes ! » Le temps viendra, Seigneur, où votre justice devra se manifester, et montrer si elle égale votre miséricorde. Considérez, chrétiens, considérez bien cela, car jamais nous ne pourrons arriver à comprendre tout ce que nous devons à notre Seigneur Dieu ni les magnificences de ses miséricordes. Mais si sa justice est aussi grande que sa clémence, hélas, douleur ! hélas, douleur ! Qu’adviendra-t-il de ceux qui auront mérité qu’elle s’exécute et resplendisse en eux 28 ? « Qu’adviendra-t-il des pécheurs ? » Ce cri angoissé de saint Dominique, sainte Thérèse l’a fait sien. Cette vive compassion pour ceux qui s’égarent loin de Dieu est assurément l’un des traits les plus saillants de ces deux caractères de feu castillans. Parce qu’elle a fait l’expérience de la miséricorde, parce qu’elle en connaît le prix – le précieux sang de Jésus-Christ – la sainte la désire à son tour pour les autres. Et s’ils ne la demandent pas, elle le fera pour eux : « Regardez, ô mon Dieu, que vos ennemis ne cessent de progresser. Ayez pitié de ceux qui n’ont pas pitié d’euxmêmes. Puisque leur malheur les a mis dans un état tel qu’ils ne veulent plus venir à Vous, allez à eux, Vous, ô mon Dieu. Moi, je vous le demande en leur nom […] 29. » Le Château de l’âme, VIes demeures, ch. 6. Exclamation 10. 28 Exclamation 12. 29 Exclamation 9. 26 27 6 LA MISÉRICORDE SELON SAINTE THÉRÈSE D’AVILA N’est-ce pas « faire une aumône splendide que de prier pour ceux qui sont en état de péché mortel 30 » ? Ces âmes qui se perdent, qui ne ferait pas tout, pour les arracher au « malheur des malheurs » ? Voici en effet ce que je pense. Quand nous voyons quelqu’un et surtout une personne amie au milieu de grandes épreuves et de grandes douleurs, il semble que nous sommes naturellement portés à la compassion ; et si ses souffrances sont intenses, nous les ressentons très vivement. Mais la vue d’une âme condamnée pour l’éternité au supplice des supplices, qui donc la pourrait souffrir ? […] Je ne sais comment nous pouvons vivre en repos quand nous voyons tant d’âmes que le démon entraîne avec lui en enfer 31. De là les désirs véhéments d’apostolat de la Madre, et son zèle pour soutenir par la prière ceux qui sont aux avant-postes du combat, les prédicateurs et les théologiens. « Le monde est en feu 32 ! », s’écrie-t-elle. « Mon cœur se brise de douleur en voyant se perdre tant d’âmes, et plus encore, de voir s’en perdre tous les jours davantage 33 ». Elle avouera qu’« elle voudrait se lancer au milieu du monde, pour tâcher de contribuer à ce qu’une âme au moins loue Dieu davantage. Femme, elle s’afflige de ce que les chaînes où la retient son sexe l’empêchent d’exercer ce zèle ; aussi quelle envie ne porte-t-elle pas aux hommes qui ont la liberté de parler à haute voix et de publier combien est grand le Dieu des armées34 ! » Les pécheurs, Thérèse les sauvera par tous les moyens qui sont à sa disposition. Elle sait que la prière, la pénitence, le bon exemple peuvent tout. « Que me fait à moi de rester jusqu’au jour du jugement au purgatoire, si par mes prières je sauve une seule âme, si surtout je procure l’avancement spirituel d’un grand nombre, et la gloire de Dieu35 ? » De fait, sa vie abonde de ces conversions obtenues par son intercession, ses sacrifices, ses bons exemples. À Becedas (elle n’a que 22 ans), le seul fait d’écouter ses confessions suffit à retourner le curé du lieu, particulièrement scandaleux. Il mourra saintement un an plus tard jour pour jour après avoir rencontré pour la première fois sa sainte pénitente. C’était en quelque sorte la méthode favorite de Thérèse pour ramener à Dieu les prêtres dévoyés : elle commençait par les prier de bien vouloir l’entendre en confession 36. Et lorsque ses prières et son bon exemple ne suffisent pas, lorsque la délivrance est difficile, comme c’est le cas pour cet éminent ecclésiastique qui, écrit-elle, « depuis deux ans et demi vivait dans un péché mortel des plus abominables dont j’ai entendu parler », elle prend les grands moyens, jusqu’à la substitution : Je suppliais sa Majesté de mettre un terme à ses tourments et à ses tentations et de laisser plutôt les démons venir me torturer à sa place, à la condition que je fus à l’abri de toute faute. Or, pendant un mois, je suis passée par les plus cruels tourments. […] Je fis connaître à cet ecclésiastique ce que j’avais enduré durant ce mois ; et on me répondit que par la miséricorde de Dieu, il n’était plus harcelé des tentations du démon. Son âme se fortifia et recouvra une entière liberté. […] Mais volontiers j’aurais accepté de souffrir beaucoup d’années encore, pour voir cette âme affranchie 37. Le Château de l’âme, VIIes demeures, ch. 1. Vie, ch. 32. 32 Le Chemin de la perfection, ch. 1. 33 Ibid. 34 Le Château de l’âme, VIes demeures, ch. 6. 35 Le Chemin de la perfection, ch. 3. 36 Témoignage du père Gonzalez, s. j., au procès canonique. 37 Vie, ch. 31. 30 31 7 LA MISÉRICORDE SELON SAINTE THÉRÈSE D’AVILA Elle-même attestera de la fréquence de ces sauvetages : « C’est très souvent que, grâce à mes prières, notre Seigneur a tiré des âmes de l’état du péché mortel, qu’il en a amené d’autres à une plus haute perfection, qu’il en a délivré du purgatoire ou qu’il en a gratifié de faveurs signalées 38. » « Je la savais vertueuse, je la voulais parfaite » Car la miséricorde de sainte Thérèse ne se manifeste pas seulement à l’égard des grands pécheurs. Elle est aussi palpable envers les âmes déjà avancées sur le chemin de la perfection, surtout envers celles dont elle se sait redevable de quelque bien spirituel. D’un tempérament aimable et affectueux, la Madre était naturellement portée à s’attacher à ceux qui lui faisaient du bien. Si elle dut parfois, au début de sa vie, rectifier ses affections, elle sut toujours les faire tourner au bien des âmes : « Je ne puis rencontrer une personne qui me contente beaucoup sans désirer aussitôt la voir se donner tout à Dieu. Parfois même, ces désirs sont si véhéments qu’il m’est impossible de les contenir. Sans doute, je les forme pour tous, mais ils sont très vifs pour les âmes qui me contentent ; aussi je fais toute sorte d’instances en leur faveur auprès de Dieu 39. » C’est ainsi que d’un ami dominicain, le père García de Toledo, elle dira : « Je me souviens que je conjurai d’abord le Seigneur avec des larmes abondantes d’enchaîner cette âme tout entière à son service. Je la savais vertueuse, il est vrai, mais cela ne me suffisait pas ; je la voulais parfaite 40. » Pour nombre de ses confesseurs, sainte Thérèse ne se contenta pas d’être une pénitente très humblement docile ; elle fut en même temps une vraie mère spirituelle et une irrésistible zélatrice. Savoir qu’elle pouvait aider des âmes bonnes, ardentes, mais imparfaites, à monter plus haut, la ravissait d’amour et de gratitude. « Plus j’aime une personne et moins je puis souffrir en elle la plus petite faute 41 », avoue-t-elle. C’est le cas en particulier de ses filles carmélites : « Dès que j’en vois seulement une offenser Dieu, aussitôt je perds patience ; pour tout le reste, au contraire, le Seigneur, ce me semble, m’en a donné beaucoup 42. » Nulle dureté dans ces propos, mais une profonde haine du péché, et un désir impétueux de perfection pour ses filles, auxquelles la Madre ne manque jamais de rappeler la miséricorde insigne que Dieu leur a faite en les appelant, sans aucun mérite de leur part, au Carmel. Parce qu’ils sont le fruit de la miséricorde divine, n’ayant pas été fondés par main d’homme mais « par la puissante main de Dieu 43 », les couvents réformés doivent devenir des écoles de miséricorde. Rien n’est plus insupportable à la sainte que ces âmes « raisonnables », « installées » « encapuchonnées » (encapotadas), comme elle les appelle, à savoir ces religieuses repliées sur elles-mêmes, qui pour mieux goûter de leur oraison, en viennent à oublier les autres 44. De telles âmes, cantonnées aux troisièmes demeures, ne progresseront pas beaucoup, si elles ne régressent pas ! Passer beaucoup de temps en prière n’est pas nécessairement la marque de la sainteté. Ce qui 38 Vie, ch. 39. Vie, ch. 34. 40 Vie, ch. 34. 41 Lettre 315 du 8/9 février 1580, à Marie de Saint-Joseph, prieure à Séville. 42 Lettre 194 de juillet 1577, au licencié Gaspar de Villanueva, chapelain des carmélites de Malagon. 43 Fondations, ch. 27. 44 Cf. Le Château de l’âme, IIIes demeures, ch. 2 ; Ves demeures, ch. 3. 39 8 LA MISÉRICORDE SELON SAINTE THÉRÈSE D’AVILA compte c’est l’union de la volonté à Dieu et l’humilité. La marque la plus sûre de l’amour de Dieu sera toujours l’amour du prochain, lequel se manifeste concrètement par les œuvres de miséricorde. Ce sont des œuvres que le Seigneur demande de nous. Si, par exemple, vous voyez une malade à qui vous puissiez procurer du soulagement, n’ayez aucune peine de laisser là vos dévotions pour l’assister et lui montrer de la compassion ; si elle souffre, partagez sa douleur ; s’il vous faut jeûner pour qu’elle ait la nourriture nécessaire, faites-le, non pas tant par amour pour elle que par amour pour Dieu, qui le veut, comme vous le savez. Telle est la véritable union à sa volonté. Si vous voyez que l’on prodigue des louanges à une personne, réjouissez-vous en beaucoup plus que si l’on vous louait vous-même […]. C’est une grande chose de se réjouir quand on publie les vertus de ses sœurs ; comme aussi quand nous découvrons des fautes en quelqu’une d’entre elles, de nous affliger comme si ces fautes nous étaient personnelles, et de chercher à les couvrir 45. On sait que la Madre prêchait d’exemple. Son âme pleine de compassion transparaît souvent dans ses lettres, au style si vif et si spontané. On ne finirait pas de les citer. Contentons-nous d’en mentionner deux ou trois, qui regardent le pardon et la charité fraternelle. À propos de deux sœurs 46 qui, par des calomnies, avaient gravement troublé le carmel de Séville, au point de mettre en péril l’existence même de la communauté, la sainte fait les recommandations suivantes à la prieure et aux religieuses : […] Il ne faut pas en faire un grand crime à [sœur Béatrix], mais la traiter avec la plus tendre compassion ; voilà pourquoi je supplie maintenant Votre Révérence et toutes les sœurs, par charité pour moi, de se conformer exactement à ce que je vais vous dire […]. Bénissez le Seigneur qui n’a permis au démon de ne tenter aucune d’entre vous d’une manière aussi terrible. Comme le remarque, en effet, saint Augustin, nous devons penser que nous aurions pu faire pire encore. Veillez donc, mes filles, à ne point perdre ce que vous avez gagné au milieu de cette épreuve. Rappelez-vous sainte Catherine de Sienne et sa charité à l’égard de cette personne qui l’avait accusée d’être une mauvaise femme. Craignons, craignons, mes sœurs. Si Dieu venait à retirer de nous sa main, de combien de fautes ne serions-nous pas capables ? […] Tout d’abord, mes sœurs, vous devez avoir à cœur de recommander [cette religieuse] à Sa Majesté dans toutes vos prières et à chaque instant, si vous le pouvez, comme nous le ferons dans ce monastère, afin que Dieu nous accorde la grâce de l’éclairer, et que le démon la laisse enfin sortir de cet assoupissement où il la tient […]. Prions, mes sœurs, prions pour elle. Il y a eu des saints qui sont tombés, et qui ensuite se sont relevés ; peut-être cette chute a été nécessaire pour l’humilier. Si Dieu nous accordait la grâce qu’elle revînt à elle-même et reconnût la fausseté de ce qu’elle a dit, nous aurions tous gagné à souffrir ; il pourrait en être de même pour elle. Le Seigneur, en effet, sait tirer le bien du mal. […] qu’on ne montre pas à cette sœur le moindre ressentiment ; qu’elle soit plutôt entourée de soins par celle qui sera à la tête de la communauté, et que toutes lui manifestent de la bonté et une affection fraternelle. Je vous demande d’agir de même pour l’autre sœur. Vous tâcherez d’oublier le passé et Le Château de l’âme, Ves demeures, ch. 3. Les sœurs Béatrix de la Mère de Dieu et Marguerite de la Conception. Singulier destin que celui de cette sœur Béatrix, dont sainte Thérèse d’Avila raconte les débuts extraordinaires de la vocation au chapitre 26 des Fondations. Le P. Grégoire de Saint-Joseph note qu’elle pleura si bien ses errements qu’elle en devint aveugle, et mourut en odeur de sainteté en 1624. Quant à la sœur Marguerite, sœur converse, elle mourut également très saintement au carmel de Lisbonne en 1647. 45 46 9 LA MISÉRICORDE SELON SAINTE THÉRÈSE D’AVILA chacune d’entre vous considérera ce qu’elle voudrait qu’on fît pour elle-même dans une pareille épreuve 47. Dans une autre lettre, elle reviendra sur le sujet : Je demande à la sœur Béatrix de la Mère de Dieu et à la sœur Marguerite, comme j’en ai conjuré précédemment les autres sœurs, de ne plus parler du passé, si ce n’est avec notre Seigneur, ou avec le confesseur. Elles ont été dans l’erreur, en manquant de cette simplicité et de cette charité auxquelles Dieu nous oblige ; mais elles veilleront à agir maintenant avec droiture et franchise. Elles auront soin, en outre, de donner satisfaction à qui de droit, sans cela, elles ne goûteraient point la paix, et le démon ne cesserait de continuer à les séduire. Pourvu qu’elles contentent notre Seigneur, il n’y a plus à se préoccuper du passé. […] Dieu permet une chute pour nous tenir ensuite dans une plus profonde humilité. Que l’âme se relève avec droiture et connaissance d’elle-même, et elle réalise de plus beaux progrès dans le service de notre Seigneur, comme nous le démontre l’histoire d’un grand nombre de saints. Aussi, mes filles, puisque vous êtes les enfants de la Vierge et que vous êtes sœurs, tâchez de vous aimer beaucoup les unes les autres, et ne songez pas plus au passé que s’il n’avait jamais existé 48. Toutefois, la Madre ne perdait jamais de vue les exigences de la justice. Dans une lettre, encore postérieure, elle n’hésite pas à les rappeler avec fermeté : Cette sœur [Béatrix de la Mère de Dieu] n’est pas encore telle que nous le désirons, et cependant, je suis très satisfaite qu’il y ait un commencement de retour. Nous avons beaucoup prié par ici pour cette pauvre enfant, et le Seigneur s’est peut-être laissé toucher. Néanmoins, j’ai été très peinée lorsque j’ai appris en lisant vos lettres, qu’on lui permettait de communier. Je vous l’assure, ma Mère, il n’est pas raisonnable de laisser passer sans punition des choses pareilles. La prison perpétuelle, qu’on a déjà résolu de lui infliger, me dites-vous, lui conviendrait, et il serait bon qu’elle n’en sortît jamais 49. Telle était l’affection vraie de sainte Thérèse d’Avila pour ses filles. En elle, s’unissaient de façon éminente un ardent amour de la vérité et de la justice et une immense miséricorde pour les pécheurs. Sa vie est ainsi l’illustration concrète et éclatante de ce que l’on observe chez les plus grands saints : la connexion et l’harmonie des vertus en apparence les plus opposées, que Dieu seul peut unir. Car la sainteté est toujours une image de cette union des perfections divines les plus diverses, de l’infinie Justice et de l’infinie Miséricorde, au sein même de la Déité, dans la vie intime de Dieu. Fr. Réginald-Marie RIVOIRE, FSVF 47 Lettre 280 du 3 mai 1579, à la Mère Isabelle de Saint-Jérôme et à la Mère Marie de Saint-Joseph. Lettre 309, janvier 1580, à la prieure et aux carmélites de Séville. 49 Lettre 333 du 4 juillet 1580, à la Mère Marie de Saint-Joseph, prieure à Séville. 48 10