Complexe des forêts de Kaeng Krachan

Valeur universelle exceptionnelle

Brève synthèse

Le Complexe des forêts de Kaeng Krachan (CFKK) s’étend dans la chaîne de Tenasserim près de la zone frontalière entre la Thaïlande et le Myanmar. Le Complexe des forêts couvre de vastes milieux boisés qui s’étirent à travers les trois provinces de Ratchaburi, Phetchaburi et Prachuap Khiri Khanans dans la partie occidentale de la Thaïlande, et englobe quasiment trois parcs nationaux et un sanctuaire de faune sauvage. Situé dans l’écorégion indo-malaise, le bien totalise une superficie de près de 409 000 ha. La topographie des lieux est accidentée avec de hautes montagnes à l’ouest, des collines vallonnées à l’est et des élévations de terrain entre 37 et 1 231 mètres au-dessus du niveau de la mer. Le climat est influencé par les vents de mousson du nord-est et du sud-ouest. À l'échelle macroscopique, le CFKK se targue d’une diversité biologique riche et variée résultant de la confluence de quatre sous-régions zoogéographiques (sondaïque, sino-himalayenne, indochinoise et indo-birmane) et quatre provinces floristiques (indo-birmane ou himalayenne, indo-malaise, annamitique et andamanaise). Le CFKK sert d’habitat à des populations significatives d’espèces clés d’importance mondiale avec la présence d’espèces endémiques et en danger. Le bien est également un site prioritaire du hotspot de biodiversité indo-birman pourvu de zones cruciales pour la conservation du tigre et de l’éléphant et qui protège un certain nombre d’habitats importants pour les oiseaux.

Critère (x) : Le CFKK héberge une remarquable diversité de mammifères, d’oiseaux et de reptiles de cette région et est considéré comme l’une des 500 premières aires protégées les plus irremplaçables au monde pour la conservation d’espèces de mammifères, d’oiseaux et d’amphibiens. Le bien se caractérise par six types de forêts, dominés par des forêts semi-sempervirentes, sempervirentes sèches et sempervirentes humides, et complétés par des forêts décidues et mixtes, de montagne et de diptérocarpes décidues. Le bien représente le lieu de rencontre de plusieurs contrées zoogéographiques et provinces floristiques en étant le point le plus au nord pour bon nombre d’espèces venues du sud et, réciproquement, le point le plus au sud pour celles venant du nord. À cette diversité macroscopique s’ajoutent les diverses caractéristiques géologiques et la topographie extrêmement variable qui contribuent à une diversité d’habitats extraordinairement grande à l’échelle microscopique. La riche biodiversité du bien est démontrée par la présence d’au moins 459 espèces d’animaux sauvages connues, ainsi que 81 espèces rares et 48 espèces endémiques.

Le bien abrite un grand nombre d’espèces végétales menacées et rares, dont certaines ont disparu ailleurs dans le monde. Le Prunus kaengkrachanensis se distingue comme une espèce de plante de la famille des rosacées découverte en 2015 et endémique au CFKK. Parmi les autres espèces en danger critique figurent le magnolia « champi doi » (Magnolia gustavii), le bois d’aigle de Malacca (Aquilaria malaccensis) et le Kamettia chandeei de la famille des apocynacées. L’espèce Geostachys smitinandii de la famille du gingembre se trouve uniquement dans le CFKK et le Complexe forestier de Dong Phayayen-Khao Yai, site naturel thaïlandais classé au patrimoine mondial. Le bien est aussi le seul endroit au monde où se développe le Trichosanthes phonsenae, espèce végétale de la famille des cucurbitacées découverte pour la première fois en 2003.

Le CFKK entretient également des populations saines d’espèces sauvages importantes et menacées au niveau mondial. Une suite complète de grands carnivores a été recensée dans le secteur où vivent huit groupes de félidés (espèces de chats), dont le tigre (Panthera tigris). Le bien se distingue comme l’un des quelques derniers lieux où vit encore à l’état sauvage le crocodile du Siam (Crocodylus siamensis). Le pangolin javanais (Manis javanica), la tortue à tête jaune (Indotestudo elongata), la tortue géante (Manouria emys), ainsi que le banteng (Bos javanicus), l’éléphant d’Asie (Elephas maximus), le dhole (Cuon alpinus), l’ours noir d’Asie (Ursus thibetanus), le tapir à chabraque (Tapirus indicus), le saro de Sumatra (Capricornis sumatraensis), le gaur (Bos gaurus) et le macaque brun (Macaca arctoides) y ont leur habitat.

Intégrité

Le bien de près de 409 000 ha en Thaïlande jouxte une vaste zone boisée du Myanmar voisin où le Complexe forestier de Taninthaya et la chaîne de Tenasserim constituent une frontière naturelle entre les deux pays. Ce contexte de connectivité renforce l’intégrité du bien et offre la perspective de possibilités de conservation transfrontalière et de corridor à travers un paysage boisé intact beaucoup plus étendu. Le CFKK protège également les têtes des bassins versants de nombreux cours d'eau importants tels que les rivières Phetchaburi, Kui Buri, Pranburi, Phachi et Mae Klong. Certaines d’entre elles alimentent en eau le site Ramsar du Parc national de Sam Roi Yod qui est l’une des aires les plus connues de Thaïlande pour les oiseaux d’eau.

Le CFKK compte six types de forêts qui couvrent plus de 96 % de la superficie du bien. La forêt sempervirente sèche couvre la majeure partie du secteur, soit environ 65 %. Les systèmes forestiers de la zone inscrite qui restent intacts et de bonne qualité, servent d’habitats convenables pour une faune et une flore d’une remarquable diversité.

Éléments requis en matière de protection et de gestion

Les quatre aires protégées du CFKK sont strictement protégées au titre d’une législation pertinente. Les aires protégées comprennent un sanctuaire de faune sauvage (Mae Nam Phachi) protégé en vertu de la Loi BE 2562 (2019) sur la protection et la conservation des espèces sauvages et trois parcs nationaux (Chaloem Phrakiat Thai Prachan, Kaeng Krachan et Kui Buri) protégés en vertu de la Loi BE 2562 (2019) sur les parcs nationaux. Les Parcs nationaux de Kaeng Krachan et Kui Buri sont reliés entre eux par la Réserve forestière de Kui Buri et une Zone de réserve de l’Armée. Ce corridor est également défini comme une aire protégée au titre de la Loi BE 2507 (1964) sur les Réserves forestières et de la Loi BE 2478 (1935) sur les Zones de réserve militaire. Le classement en aire protégée a essentiellement pour but de sauvegarder et préserver l’intégrité écologique globale de la zone, y compris les valeurs exceptionnelles des espèces sauvages et des bassins versants forestiers des provinces de Phetchaburi et Prachuap Khiri Khan. L’administration de l’aire protégée est confiée à un responsable d’unité de gestion avec un ou plusieurs adjoints pour chaque composante, ainsi que des postes de patrouille installés à l’intérieur et autour des limites du bien.

La Loi sur les parcs nationaux et la Loi sur la protection et la conservation des espèces sauvages, toutes deux adoptées en 2019, visent à trouver un équilibre entre la conservation de la nature et l’utilisation durable des ressources. Ces lois ont pour objet d’autoriser légalement les populations locales à résider dans les aires protégées du bien tout en étant en mesure d’exploiter les produits forestiers afin de subvenir durablement à leurs besoins. La législation prévoit, en outre, de renforcer la participation des populations locales aux processus décisionnels importants relatifs au CFKK en ce qui concerne notamment le plan de gestion des aires protégées, l’étude sur la tenure foncière et les mécanismes juridiques qui améliorent la compréhension entre les populations locales et les hauts responsables du Gouvernement thaïlandais au sujet de l’utilisation des terres. La participation effective et inclusive des populations locales et des peuples autochtones sera essentielle pour instaurer des relations positives qui favorisent des moyens d’existence durables et des approches de gestion participative afin de sauvegarder la valeur universelle exceptionnelle du bien.

Les patrouilles qui couvrent environ la moitié du CFKK se concentrent sur les zones de haute biodiversité et les zones de vulnérabilité aux menaces. Les zones moins accessibles bénéficient d’une surveillance aérienne avec des patrouilles déployées à des endroits précis, ainsi que des patrouilles à pied.