Le Comité du patrimoine mondial,
1. Ayant examiné les documents WHC-12/36.COM/8B.Add et WHC-12/36.COM/INF.8B1.Add,
2. Inscrit la Ville historique de Grand-Bassam, Côte d’Ivoire, sur la Liste du patrimoine mondial sur la base des critères (iii) et (iv) ;
3. Adopte la Déclaration de valeur universelle exceptionnelle suivante :
Brève description
La ville historique de Grand-Bassam est un exemple urbain colonial de la fin du XIXe siècle et de la première partie du XXe siècle. Elle suit une planification par quartiers spécialisés pour le commerce, l’administration, l’habitat européen et l’habitat autochtone. Elle offre d’une part une architecture et un urbanisme colonial fonctionnaliste adaptés aux conditions climatiques et suivant les préoccupations hygiénistes de l’époque, d’autre part un village N’zima qui met en évidence la permanence des cultures autochtones. Grand-Bassam fut la première capitale coloniale, portuaire, économique et juridique de la Côte d’Ivoire ; elle témoigne des relations sociales complexes entre les Européens et les Africains, puis du mouvement populaire en faveur de l’indépendance.
Critère (iii) : Grand-Bassam témoigne par son organisation urbaine bien préservée d’une importante tradition culturelle liée à son rôle de capitale coloniale, de centre administratif à l’échelle de l’ancienne AOF (Afrique occidentale française) et de pôle commercial régional. Des années 1880 aux années 1950, la ville rassembla et confronta différentes populations africaines, européennes et moyen-orientales, dans une cohabitation simultanément harmonieuse et conflictuelle.
Critère (iv) : Grand-Bassam offre un exemple éminent d'urbanisme colonial rationnel par ses quartiers spécialisés au sein d'un réseau urbain d'ensemble où la végétation tient une place importante. L’architecture coloniale est caractérisée par un style sobre et fonctionnel, utilisant les principes hygiénistes appliqués à une situation tropicale. L'organisation de la maison vernaculaire au sein du village N'zima lui fait écho, exprimant la permanence des valeurs autochtones.
Intégrité
L’intégrité du tissu urbain et de son environnement est plutôt bonne. Le bien comprend des ensembles suffisamment importants d’éléments bâtis caractéristiques pour être bien compris. Toutefois, l’intégrité architecturale des bâtiments est menacée de plusieurs cas par l’abandon et par l’absence d’entretien. L’intégrité du paysage urbain est parfois menacée par la pression foncière liée au tourisme des plages.
Authenticité
L’authenticité du tissu urbain a été globalement conservée, permettant une expression satisfaisante de la valeur universelle exceptionnelle du bien. Si certains bâtiments, généralement publics, ont été convenablement restaurés et réutilisés, l’intégrité architecturale d’un grand nombre d’immeubles est souvent médiocre ou mauvaise, et leur authenticité est parfois altérée par des adaptations peu conformes.
Éléments requis en matière de protection et de gestion
La protection du bien et son système de gestion sont appropriés et leur mise en place est en cours, notamment via l’institution de la Maison du patrimoine et via la Commission transversale des permis de construire. Il est toutefois indispensable de confirmer le caractère suspensif des décisions de cette dernière et de renforcer les moyens humains et financiers dédiés à la conservation du bien. Les limites de la zone tampon unifiée devraient être étendues autour du quartier du Petit Paris et du phare comme indiqué dans le premier dossier de proposition d’inscription.
4. Demande à l’État partie de mettre en œuvre les mesures réglementaires suivantes :
a) approfondir la précision sur les contours du bien déjà entamée dans les limites cadastrales,
b) agrandir la zone tampon du bien en revenant aux limites envisagées initialement au niveau du quai du Petit Paris et du phare, tout en conservant l’extension actuelle qui unifie la zone tampon,
c) inscrire tous les « bâtiments d’intérêt patrimonial » de l’inventaire local sur la Liste du patrimoine culturel national,
d) clarifier dans un proche avenir la situation de la propriété foncière car le nombre de lots fonciers annoncé est le même que celui du dossier initial (2008) alors que le bien a été étendu au village N’zima, et à propos des lots fonciers non assortis d’un titre de propriété,
e) définir des indicateurs opérationnels de suivi (en complément des indicateurs actuels), correspondant à des actions précises, périodiques et quantifiées, en s’inspirant des standards internationaux en la matière,
f) renforcer et préciser les moyens humains permanents du Comité local et/ou de la Maison du patrimoine pour les actions de suivi de la conservation du bien ; la présence d’un architecte et de spécialistes de la conservation est nécessaire ;
5. Recommande que l’État partie prenne en considération les points suivants :
a) fournir un rapport d’étape sur la mise en place et le fonctionnement de la Commission des permis de construire,
b) poursuivre les efforts entrepris pour renforcer la dimension pratique et opérationnelle du Plan de conservation et de gestion du bien,
c) confirmer les mesures d’encouragement pour la restauration et la conservation des bâtiments privés ;
6. Demande à l’État partie de soumettre d’ici le 1er février 2013 un rapport au Centre du patrimoine mondial sur les progrès faits dans la mise en œuvre des demandes et recommandations ci-dessus pour examen, par le Comité à sa 37e session en 2013.