Books by Sidy Cissokho
« Le transport a le dos large ! », aiment à dire les professionnels du secteur au Sénégal, soulig... more « Le transport a le dos large ! », aiment à dire les professionnels du secteur au Sénégal, soulignant combien il fait vivre de nombreuses personnes. Considéré comme une activité refuge face aux politiques d’austérité des années 1980, le monde du transport s’est imposé depuis comme le secteur emblématique de l’« informel » dans l’imaginaire scientifique et populaire.
Sidy Cissokho nous ouvre les coulisses des gares routières qui tiennent une place centrale dans ce pays où le réseau ferré est si peu développé et où il est rare de détenir une voiture. En adoptant une écriture attentive aux trajectoires, aux pratiques et aux situations individuelles des acteurs, il nous fait découvrir le fonctionnement de ces lieux déconcertants au premier regard.
Son enquête permet de revenir sur la structuration du secteur depuis les années 1980, le quotidien du travail des chauffeurs, le rôle joué par les organisations professionnelles et les relations personnelles que leurs représentants nouent avec ceux de l’administration et des partis politiques. Il éclaire ainsi non seulement l’histoire sénégalaise, mais aussi celle des sociétés contemporaines en dévoilant le rôle prépondérant joué par l’État dans l’organisation des professions et du monde du travail dans un contexte néolibéral, à rebours des clichés persistants à propos du secteur dit « informel ».
Edited collections by Sidy Cissokho
Africa Today, 2018
1. Introduction to Special Issue: Bus Stations in Africa
Michael Stasik and Sidy Cissokho
2. Fi... more 1. Introduction to Special Issue: Bus Stations in Africa
Michael Stasik and Sidy Cissokho
2. Fighting over Urban Space: Fighting over Urban Space: Matatu Infrastructure and Bus Stations in Nairobi, 1960–2000
Robert Heinze
3. The Woro-Woro Gares Routières of Abidjan: Artisanal Transport and Local Governance in Côte d'Ivoire's Largest City
Marie Richard Zouhoula Bi
4. Mobility, Social Status, and Cooperative Practices in the Sucupira Hiace Central Station, Santiago Island, Cape Verde
Gerard Horta and Daniel Malet Calvo
5. The Vernacular Bureaucracy of Taxi Logistics at the Airport of Dakar
Peter Lambertz
6. Waiting Together: The Motorcycle Taxi Stand as Nairobi Infrastructure
Basil Ibrahim and Amiel Bize
7. Station Waka-Waka: The Temporalities and Temptations of (Not) Working in Ghanaian Bus Stations
Michael Stasik and Gabriel Klaeger
8. Afterword: The Matrix Reloading: On African Bus Stations
Ato Quayson
Articles by Sidy Cissokho
Ce texte rend compte des formes d’appropriation et d’usages stratégiques du statut de salarié au ... more Ce texte rend compte des formes d’appropriation et d’usages stratégiques du statut de salarié au Sénégal. Il mobilise des observations réalisées dans les méandres de l’Inspection du travail et du Tribunal de grande instance de Dakar où ont lieu les audiences liées aux conflits du travail. Il décrit comment le décalage entre la norme juridique issue du Code du travail et les pratiques quotidiennes est construit et mobilisé quotidiennement par les travailleurs et leurs représentants syndicaux lors de conflits avec des employeurs. Le salariat apparaît alors comme une construction symbolique faisant l’objet d’usages beaucoup plus désenchantés que ce que donnent à voir les récits les plus répandus faisant l’histoire politique du mouvement ouvrier dans le contexte industriel européen.
This article investigates appropriations and strategic uses of wage labor in Senegal. It mobilizes observations made at the Inspection du travail and the Dakar Tribunal de Grande Instance, where hearings related to labor disputes take place. It describes how the gap between the legal norm resulting from the Code du travail and daily practices is mobilized by workers and their union representatives during conflicts with employers. Wage labor then appears as a symbolic construction that is subject to much more disenchanted uses than in the most widespread narratives of the political history of the workers’ movement in the European industrial context.
Les travaux portant sur les relations entre les acteurs du monde économique et l’État en Afrique ... more Les travaux portant sur les relations entre les acteurs du monde économique et l’État en Afrique insistent avant tout sur la façon dont l’État façonne le monde économique. À l’inverse, ce texte place au premier plan l’étude des moyens concrets par lesquels les représentants du monde économique cherchent à façonner l’action de l’État. Il s’emploie à décrire les modes d’action collective d’une organisation défendant les intérêts de commerçants et d’entrepreneurs dont les activités s’effectuent à l’échelle de la région ouest-africaine. Le texte s’attarde tout particulièrement sur le dispositif mis en place lors des réunions annuelles de l’organisation et la proximité qu’il engendre entre les participants issus aussi bien du secteur privé que public. Il défend l’idée selon laquelle l’organisation de ce type d’évènement confère aux représentants de l’association et à leurs membres un accès privilégié aux représentants de l’État leur permettant de faire valoir leurs intérêts localement, le long des grands axes routiers d’Afrique de l’Ouest. De ce point de vue, les conditions rendant possible l’existence d’une situation de « libre » échange à l’échelle de la région ouest-africaine sont ironiquement le produit d’une série d’échanges excluants, uniquement réservés à une poignée d’initiés.
The study of the relationship between economic actors and the state in Africa usually focuses on the way the latter shapes the economic world. This article, on the contrary, asks how representatives of the business world try to shape state action. It describes the modes of actions of an organization that represents the interests of traders and entrepreneurs involved in transnational economic activities in West Africa. The text focuses on the organizations’s annual meetings and the closeness that it creates between participants from the private and public sectors. It is shown that this type of event gives the representatives of the association and its members privileged access to government officials, thus enabling them to assert their interests on the ground, along the major roads of West Africa. From this perspecitive free trade and regional integration are the product of a liberal dynamic set in motion by donors, but also the result of the collective action of economic actors who influence the actions of state representatives in the name of the common good and for their commercial interests. Thus, ironically, free trade in the West African region is the product of a series of exchanges reserved for insiders.
The term “Washington Consensus” is usually used to refer to a liberal-inspired set of measures im... more The term “Washington Consensus” is usually used to refer to a liberal-inspired set of measures implemented in the late 1980s, primarily aimed at developing countries. The use of this expression reduces our understanding of the creation and spread of these policies. By looking at how the World Bank’s transport infrastructure projects became free-trade-oriented in the 1980s, this paper throws into question our knowledge about these measures, how they spread, and the groups that promoted them. This free trade dimension of the World Bank’s infrastructure projects is not related to any ideological conversion of its employees to the neo-liberal dogma, but rather to the redefinition of roles within the organization’s daily operations. Moreover, it is not supported by economists, but by engineers. Based on this example, the article advocates paying more attention to the diversity of liberal turns, rather than their common features.
L’expression « Consensus de Washington » est couramment utilisée pour désigner un ensemble de mesures d’inspiration libérale mises en œuvre à partir de la fin des années 1980 et principalement dédiées aux pays dits en voie de développement. L’emploi de cette expression homogénéisante tend cependant à appauvrir notre compréhension de ces politiques, de leur fabrique et de leur temporalité. En s’intéressant à la façon dont les projets d’infrastructures de transport de la Banque ont acquis une dimension libre-échangiste au sortir des années 1980, ce texte questionne certaines de nos certitudes à propos de ces mesures, de leur diffusion, et des groupes qui en ont été les promoteurs. Le tournant des projets d’infrastructures de transport de la Banque ne relève pas d’une conversion idéologique de ses employés au dogme néolibéral ; il est plutôt le produit d’une redéfinition des rôles à l’intérieur de l’organisation internationale. De plus, ce changement n’est pas porté par des économistes, mais par des ingénieurs. À partir de cet exemple, cet article appelle à porter une plus grande attention à la diversité des trajectoires historiques des politiques dites libérales plutôt qu’à leurs points communs.
To Be Official or Appear Official? On Two Styles of Roadblock in West Africa (Ghana/Senegal)
This... more To Be Official or Appear Official? On Two Styles of Roadblock in West Africa (Ghana/Senegal)
This study compares two types of roadblocks created by entities representing passenger transport professionals in Ghana and Senegal. Far from competing with the legal authorities, each of these types of roadblock bases their legitimacy on a performance of proximity with the state, its ideal, symbolism and the officials who represent it. By comparing these two cases, however, one may go further. In Ghana, this practice has long been subject to legal supervision. In Senegal, by contrast, it is the result of an array of informal agreements reached at the municipal and regional levels. While this difference confers greater resources upon the Ghanaian entity to stage its proximity with the state, it also makes it more vulnerable than its Senegalese counterpart to changes in the national political conjuncture. In this specific case, what may a priori seem the most fragile performance of the state appears to be the most enduring, if not the most stable.
Français
Cette étude compare deux types de barrage routier mis en place par des entités représentant les professionnels du transport de passagers au Ghana et au Sénégal. Loin de se déployer dans un registre concurrent de celui des autorités légales, la légitimité de chacune de ces formes de barrage repose sur la mise en scène d’une proximité avec l’État, son idéal, sa symbolique et les fonctionnaires qui le représente. La mise en regard de ces deux cas permet cependant d’aller encore plus loin. Au Ghana, cette pratique a longtemps été encadrée par le droit. Au Sénégal, elle est en revanche le produit d’une multitude d’accords informels passés à l’échelle des villes ou des régions. Cette différence a doté l’entité ghanéenne de plus de ressources pour mettre en scène son étaticité, mais l’a aussi rendue plus vulnérable aux évolutions de la conjoncture politique nationale que son homologue sénégalaise. Dans ce cas précis, la forme a priori la plus bricolée d’étaticité est loin d’être la plus fragile. Elle apparaît au contraire comme la plus durable, si ce n’est la plus stable.
L’article porte sur le rapport entretenu par le groupe professionnel des chauffeurs de transport ... more L’article porte sur le rapport entretenu par le groupe professionnel des chauffeurs de transport de passagers au permis de conduire au Sénégal. Il revient d’abord sur les évènements ayant abouti à l’instauration d’une filière de passage quasi exclusivement dédiée à ce groupe social. Il décrit ensuite certaines des pratiques des représentants de la profession visant à protéger le document lors des contrôles routiers. Enfin, il détaille le rôle joué par le document dans la scansion de la carrière des chauffeurs. L’ensemble esquisse les contours d’un ensemble d’usages et de représentations donnant au document une signification dépassant sa fonction sociale juridique initiale. Il met alors en lumière la relativité sociale des pratiques et des imaginaires de l’État.
Distribution électronique Cairn.info pour Editions Karthala. © Editions Karthala. Tous droits rés... more Distribution électronique Cairn.info pour Editions Karthala. © Editions Karthala. Tous droits réservés pour tous pays.
L'une des explications les plus répandues pour décrire la forme prise par les relations entre usa... more L'une des explications les plus répandues pour décrire la forme prise par les relations entre usagers et fonctionnaires en Afrique et, ce faisant, les formes spécifiques prises par l'État sur ce continent, réside dans l'existence de pratiques et de représentations communes aux usagers et aux différentes strates de l'administration. Sur la base d'une enquête ethnographique, l'article revient sur les malentendus potentiels pouvant émerger lors de ces interactions et venant nuancer cette seule explication dans le cas sénégalais. L'article tente ainsi de saisir ce que ces potentielles fausses notes et les façons de les prévenir nous disent sur ce que signifie représenter l'État.
The Senegalese workers’ confederation (CNTS) anchorage in the transport sector are a range of ass... more The Senegalese workers’ confederation (CNTS) anchorage in the transport sector are a range of association named “regroupement de chauffeurs”. These associations exist in each Motor- parks of the national territory. The election of the representative of these organisations grasp hard contest and struggle within the Motor-parks. These tensions systematically lead the challengers to call for partisan or administrative mediations. Paradoxically, the autonomy led the workers to to choose their representative and made them dependent to external institutions. This article comes back on the events which enabled this contradictory situation.
Through a case study, this contribution analyses the social organization and the redistribution m... more Through a case study, this contribution analyses the social organization and the redistribution mechanisms in one of the most important sector of the Senegalese economy, but also one of the most paradigmatic sector qualified as “informal”: the transport sector. Within the Pompier’s Motor-park, each driver between his arrival and his departure is dispossessed of his vehicle for the “coxeur”. Behind this name we find a range of activities as car placement in the Motor-park, money encashment or vehicle loading. The description of these activities let appear a distribution device based on spatial representation, strong hierarchical report and an under controlled competition managed by the drivers union.
Outsourcing the State? The reform of public transport in Dakar during Abdoulaye Wade mandates__
S... more Outsourcing the State? The reform of public transport in Dakar during Abdoulaye Wade mandates__
Since 1999, a reform of public transportation is in progress in the Senegalese capital. The World Bank has produced the standards for this reform. Its implementation has led to the privatization of the bus stations and of the renewal of part of the fleet. These changes have reshaped the relationships between the State and the actors of the transport sector. Although the reform explicitly aimed at facilitating the private initiative in public transport management, it rather helped the State to reassert its authority over the sector. It ended up, within the bus stations premises, in the coexistence of two models of management, one coming out from the reform initiated after the political changeover, the other one inherited from the socialist era. This reform has therefore created a partial change of the parties involved in the processes of “discharge” at work within the transport sector.
Chapitres by Sidy Cissokho
In this short chapter, the author describes what makes driving licences so special for Senegalese... more In this short chapter, the author describes what makes driving licences so special for Senegalese professional drivers through the portrait of a young driver. The place this document holds within the profession is determined by a series of representations which are specific to this social group, and which heavily relate to the vision of what a rightful career is in this part of society. From this perspective, popular representations of the state are socially embedded into the professional imaginary.
The reform of public transport has been under way in the Senegalese capital since 1999. The World... more The reform of public transport has been under way in the Senegalese capital since 1999. The World Bank set the standards for the reform. Its implementation has led to the privatisation of bus stations and replacement of part of the fleet. These changes have reshaped the relationship between the State and transport sector actors. Although the reform explicitly set out to facilitate private initiative in public transport management, it has instead helped the State to reassert its authority over the sector. As a result, two management models now coexist in the bus stations premises, one stemming from the reform introduced after the political changeover, the other inherited from the socialist era. The reform has thus partially reconfigured the parties involved in discharge processes currently at work within the transport sector.
"L’enchâssement du moment électoral dans l’ordinaire syndical. Le Syndicat national des travailleurs du transport sénégalais en campagne", in, GERVAIS, (J), COURTY, (G.), (Dir.), Le Lobbying électoral, Groupes en campagne présidentielle (2012), Presse Universitaire du Septentrion, Lille, 2016 À travers l’exemple du syndicat des travailleurs des transports durant la campagne présidentielle... more À travers l’exemple du syndicat des travailleurs des transports durant la campagne présidentielle sénégalaise de 2012, cette contribution tente de faire émerger les contraintes façonnant l’activité tactique d’un groupe d’intérêt en période électorale. Après avoir dressé l’éventail des actions menées par le syndicat durant la campagne et les différents investissements dont elles ont été l’objet, la contribution retrace l’univers de contraintes de l’un de ses cadres lors de la campagne. Le principal argument avancé est que la période électorale ne constitue pas un moment de rupture dans le fonctionnement routinier de l’organisation mais plutôt un moment propice pour mettre en exergue les logiques propres à cette institution.
Presse by Sidy Cissokho
https://syndiquaf.hypotheses.org/561
https://noria-research.com/ghana-une-action-syndicale-militarisee/
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Books by Sidy Cissokho
Sidy Cissokho nous ouvre les coulisses des gares routières qui tiennent une place centrale dans ce pays où le réseau ferré est si peu développé et où il est rare de détenir une voiture. En adoptant une écriture attentive aux trajectoires, aux pratiques et aux situations individuelles des acteurs, il nous fait découvrir le fonctionnement de ces lieux déconcertants au premier regard.
Son enquête permet de revenir sur la structuration du secteur depuis les années 1980, le quotidien du travail des chauffeurs, le rôle joué par les organisations professionnelles et les relations personnelles que leurs représentants nouent avec ceux de l’administration et des partis politiques. Il éclaire ainsi non seulement l’histoire sénégalaise, mais aussi celle des sociétés contemporaines en dévoilant le rôle prépondérant joué par l’État dans l’organisation des professions et du monde du travail dans un contexte néolibéral, à rebours des clichés persistants à propos du secteur dit « informel ».
Edited collections by Sidy Cissokho
Michael Stasik and Sidy Cissokho
2. Fighting over Urban Space: Fighting over Urban Space: Matatu Infrastructure and Bus Stations in Nairobi, 1960–2000
Robert Heinze
3. The Woro-Woro Gares Routières of Abidjan: Artisanal Transport and Local Governance in Côte d'Ivoire's Largest City
Marie Richard Zouhoula Bi
4. Mobility, Social Status, and Cooperative Practices in the Sucupira Hiace Central Station, Santiago Island, Cape Verde
Gerard Horta and Daniel Malet Calvo
5. The Vernacular Bureaucracy of Taxi Logistics at the Airport of Dakar
Peter Lambertz
6. Waiting Together: The Motorcycle Taxi Stand as Nairobi Infrastructure
Basil Ibrahim and Amiel Bize
7. Station Waka-Waka: The Temporalities and Temptations of (Not) Working in Ghanaian Bus Stations
Michael Stasik and Gabriel Klaeger
8. Afterword: The Matrix Reloading: On African Bus Stations
Ato Quayson
Articles by Sidy Cissokho
This article investigates appropriations and strategic uses of wage labor in Senegal. It mobilizes observations made at the Inspection du travail and the Dakar Tribunal de Grande Instance, where hearings related to labor disputes take place. It describes how the gap between the legal norm resulting from the Code du travail and daily practices is mobilized by workers and their union representatives during conflicts with employers. Wage labor then appears as a symbolic construction that is subject to much more disenchanted uses than in the most widespread narratives of the political history of the workers’ movement in the European industrial context.
The study of the relationship between economic actors and the state in Africa usually focuses on the way the latter shapes the economic world. This article, on the contrary, asks how representatives of the business world try to shape state action. It describes the modes of actions of an organization that represents the interests of traders and entrepreneurs involved in transnational economic activities in West Africa. The text focuses on the organizations’s annual meetings and the closeness that it creates between participants from the private and public sectors. It is shown that this type of event gives the representatives of the association and its members privileged access to government officials, thus enabling them to assert their interests on the ground, along the major roads of West Africa. From this perspecitive free trade and regional integration are the product of a liberal dynamic set in motion by donors, but also the result of the collective action of economic actors who influence the actions of state representatives in the name of the common good and for their commercial interests. Thus, ironically, free trade in the West African region is the product of a series of exchanges reserved for insiders.
L’expression « Consensus de Washington » est couramment utilisée pour désigner un ensemble de mesures d’inspiration libérale mises en œuvre à partir de la fin des années 1980 et principalement dédiées aux pays dits en voie de développement. L’emploi de cette expression homogénéisante tend cependant à appauvrir notre compréhension de ces politiques, de leur fabrique et de leur temporalité. En s’intéressant à la façon dont les projets d’infrastructures de transport de la Banque ont acquis une dimension libre-échangiste au sortir des années 1980, ce texte questionne certaines de nos certitudes à propos de ces mesures, de leur diffusion, et des groupes qui en ont été les promoteurs. Le tournant des projets d’infrastructures de transport de la Banque ne relève pas d’une conversion idéologique de ses employés au dogme néolibéral ; il est plutôt le produit d’une redéfinition des rôles à l’intérieur de l’organisation internationale. De plus, ce changement n’est pas porté par des économistes, mais par des ingénieurs. À partir de cet exemple, cet article appelle à porter une plus grande attention à la diversité des trajectoires historiques des politiques dites libérales plutôt qu’à leurs points communs.
This study compares two types of roadblocks created by entities representing passenger transport professionals in Ghana and Senegal. Far from competing with the legal authorities, each of these types of roadblock bases their legitimacy on a performance of proximity with the state, its ideal, symbolism and the officials who represent it. By comparing these two cases, however, one may go further. In Ghana, this practice has long been subject to legal supervision. In Senegal, by contrast, it is the result of an array of informal agreements reached at the municipal and regional levels. While this difference confers greater resources upon the Ghanaian entity to stage its proximity with the state, it also makes it more vulnerable than its Senegalese counterpart to changes in the national political conjuncture. In this specific case, what may a priori seem the most fragile performance of the state appears to be the most enduring, if not the most stable.
Français
Cette étude compare deux types de barrage routier mis en place par des entités représentant les professionnels du transport de passagers au Ghana et au Sénégal. Loin de se déployer dans un registre concurrent de celui des autorités légales, la légitimité de chacune de ces formes de barrage repose sur la mise en scène d’une proximité avec l’État, son idéal, sa symbolique et les fonctionnaires qui le représente. La mise en regard de ces deux cas permet cependant d’aller encore plus loin. Au Ghana, cette pratique a longtemps été encadrée par le droit. Au Sénégal, elle est en revanche le produit d’une multitude d’accords informels passés à l’échelle des villes ou des régions. Cette différence a doté l’entité ghanéenne de plus de ressources pour mettre en scène son étaticité, mais l’a aussi rendue plus vulnérable aux évolutions de la conjoncture politique nationale que son homologue sénégalaise. Dans ce cas précis, la forme a priori la plus bricolée d’étaticité est loin d’être la plus fragile. Elle apparaît au contraire comme la plus durable, si ce n’est la plus stable.
Chapitres by Sidy Cissokho
Presse by Sidy Cissokho
Sidy Cissokho nous ouvre les coulisses des gares routières qui tiennent une place centrale dans ce pays où le réseau ferré est si peu développé et où il est rare de détenir une voiture. En adoptant une écriture attentive aux trajectoires, aux pratiques et aux situations individuelles des acteurs, il nous fait découvrir le fonctionnement de ces lieux déconcertants au premier regard.
Son enquête permet de revenir sur la structuration du secteur depuis les années 1980, le quotidien du travail des chauffeurs, le rôle joué par les organisations professionnelles et les relations personnelles que leurs représentants nouent avec ceux de l’administration et des partis politiques. Il éclaire ainsi non seulement l’histoire sénégalaise, mais aussi celle des sociétés contemporaines en dévoilant le rôle prépondérant joué par l’État dans l’organisation des professions et du monde du travail dans un contexte néolibéral, à rebours des clichés persistants à propos du secteur dit « informel ».
Michael Stasik and Sidy Cissokho
2. Fighting over Urban Space: Fighting over Urban Space: Matatu Infrastructure and Bus Stations in Nairobi, 1960–2000
Robert Heinze
3. The Woro-Woro Gares Routières of Abidjan: Artisanal Transport and Local Governance in Côte d'Ivoire's Largest City
Marie Richard Zouhoula Bi
4. Mobility, Social Status, and Cooperative Practices in the Sucupira Hiace Central Station, Santiago Island, Cape Verde
Gerard Horta and Daniel Malet Calvo
5. The Vernacular Bureaucracy of Taxi Logistics at the Airport of Dakar
Peter Lambertz
6. Waiting Together: The Motorcycle Taxi Stand as Nairobi Infrastructure
Basil Ibrahim and Amiel Bize
7. Station Waka-Waka: The Temporalities and Temptations of (Not) Working in Ghanaian Bus Stations
Michael Stasik and Gabriel Klaeger
8. Afterword: The Matrix Reloading: On African Bus Stations
Ato Quayson
This article investigates appropriations and strategic uses of wage labor in Senegal. It mobilizes observations made at the Inspection du travail and the Dakar Tribunal de Grande Instance, where hearings related to labor disputes take place. It describes how the gap between the legal norm resulting from the Code du travail and daily practices is mobilized by workers and their union representatives during conflicts with employers. Wage labor then appears as a symbolic construction that is subject to much more disenchanted uses than in the most widespread narratives of the political history of the workers’ movement in the European industrial context.
The study of the relationship between economic actors and the state in Africa usually focuses on the way the latter shapes the economic world. This article, on the contrary, asks how representatives of the business world try to shape state action. It describes the modes of actions of an organization that represents the interests of traders and entrepreneurs involved in transnational economic activities in West Africa. The text focuses on the organizations’s annual meetings and the closeness that it creates between participants from the private and public sectors. It is shown that this type of event gives the representatives of the association and its members privileged access to government officials, thus enabling them to assert their interests on the ground, along the major roads of West Africa. From this perspecitive free trade and regional integration are the product of a liberal dynamic set in motion by donors, but also the result of the collective action of economic actors who influence the actions of state representatives in the name of the common good and for their commercial interests. Thus, ironically, free trade in the West African region is the product of a series of exchanges reserved for insiders.
L’expression « Consensus de Washington » est couramment utilisée pour désigner un ensemble de mesures d’inspiration libérale mises en œuvre à partir de la fin des années 1980 et principalement dédiées aux pays dits en voie de développement. L’emploi de cette expression homogénéisante tend cependant à appauvrir notre compréhension de ces politiques, de leur fabrique et de leur temporalité. En s’intéressant à la façon dont les projets d’infrastructures de transport de la Banque ont acquis une dimension libre-échangiste au sortir des années 1980, ce texte questionne certaines de nos certitudes à propos de ces mesures, de leur diffusion, et des groupes qui en ont été les promoteurs. Le tournant des projets d’infrastructures de transport de la Banque ne relève pas d’une conversion idéologique de ses employés au dogme néolibéral ; il est plutôt le produit d’une redéfinition des rôles à l’intérieur de l’organisation internationale. De plus, ce changement n’est pas porté par des économistes, mais par des ingénieurs. À partir de cet exemple, cet article appelle à porter une plus grande attention à la diversité des trajectoires historiques des politiques dites libérales plutôt qu’à leurs points communs.
This study compares two types of roadblocks created by entities representing passenger transport professionals in Ghana and Senegal. Far from competing with the legal authorities, each of these types of roadblock bases their legitimacy on a performance of proximity with the state, its ideal, symbolism and the officials who represent it. By comparing these two cases, however, one may go further. In Ghana, this practice has long been subject to legal supervision. In Senegal, by contrast, it is the result of an array of informal agreements reached at the municipal and regional levels. While this difference confers greater resources upon the Ghanaian entity to stage its proximity with the state, it also makes it more vulnerable than its Senegalese counterpart to changes in the national political conjuncture. In this specific case, what may a priori seem the most fragile performance of the state appears to be the most enduring, if not the most stable.
Français
Cette étude compare deux types de barrage routier mis en place par des entités représentant les professionnels du transport de passagers au Ghana et au Sénégal. Loin de se déployer dans un registre concurrent de celui des autorités légales, la légitimité de chacune de ces formes de barrage repose sur la mise en scène d’une proximité avec l’État, son idéal, sa symbolique et les fonctionnaires qui le représente. La mise en regard de ces deux cas permet cependant d’aller encore plus loin. Au Ghana, cette pratique a longtemps été encadrée par le droit. Au Sénégal, elle est en revanche le produit d’une multitude d’accords informels passés à l’échelle des villes ou des régions. Cette différence a doté l’entité ghanéenne de plus de ressources pour mettre en scène son étaticité, mais l’a aussi rendue plus vulnérable aux évolutions de la conjoncture politique nationale que son homologue sénégalaise. Dans ce cas précis, la forme a priori la plus bricolée d’étaticité est loin d’être la plus fragile. Elle apparaît au contraire comme la plus durable, si ce n’est la plus stable.