Papers by Jérémie Ferrer-Bartomeu
revue Réforme, Humanisme, Renaissance, 2023
La couronne au XVIe siècle a rarement été étudiée. Pourtant, comme au Moyen Âge, elle y apparaît ... more La couronne au XVIe siècle a rarement été étudiée. Pourtant, comme au Moyen Âge, elle y apparaît à la fois comme objet, signe et performance théologico-politique de l’exercice de la souveraineté, c’est-à-dire comme réalité matérielle et comme concept. Toutefois, dans une période déchirée par les guerres de Religion, les contestations radicales de l’autorité souveraine actualisent les enjeux et les débats qui entourent cet objet singulier. La couronne fonde-t-elle la souveraineté ? Celui qui la porte en est-il digne ? Quelles sont les conditions qui en garantissent la régularité de la transmission ? Le règne d’Henri III constitue un précipité dramatique de ces enjeux : d’abord quand en 1584 Henri de Navarre, protestant, devient héritier présomptif ; puis, en 1588, quand le roi fait assassiner le duc de Guise et le cardinal de Lorraine lors du coup de majesté des états généraux de Blois. Dès lors, dans une quête angoissée des origines, l’objet couronne se disjoint du chef du roi honni, à qui l’on dénie – comme on la dénie à son héritier hérétique – la souveraineté, la légitimité et in fine la dignité de ceindre la couronne de France. Ce qui se joue sous le règne d’Henri III, à travers la question de savoir à qui revient la couronne de France, c’est finalement une complexe articulation entre droit, hérédité, orthodoxie et dignité.
The crown in the sixteenth century has been infrequently examined in scholarly discourse. Nevertheless, akin to its representation during the Middle Ages, it emerges as an object, symbol, and theologico-political performance of the exercise of sovereignty, embodying both material reality and abstract concept. Yet, in an era torn asunder by the Wars of Religion, radical challenges to sovereign authority bring to the fore the issues and debates surrounding this unique emblem. Does the crown indeed underpin sovereignty? Is the bearer thereof truly worthy? What conditions ensure its orderly succession? The reign of Henry III epitomizes the dramatic encapsulation of these concerns: initially when in 1584, Henry of Navarre, a Protestant, becomes the presumptive heir; and subsequently in 1588, when the monarch orchestrates the assassination of the Duke of Guise and the Cardinal of Lorraine during the Estates General of Blois. Consequently, in a fervent quest for origins, the crown as an object becomes dissociated from the vilified monarch, to whom, much like his heretical heir, sovereignty, legitimacy, and ultimately the dignity to don the crown of France, is denied. The core issue during the reign of Henry III, revolving around the rightful claimant to the French crown, is a multifaceted interplay of law, lineage, orthodoxy, and dignity.
Congrès du GIS « Humanités, Sources et Langues de la Méditerranée
Quels savoirs fondent en fait et en droit le pouvoir de l’écrit politique dans le contexte des tr... more Quels savoirs fondent en fait et en droit le pouvoir de l’écrit politique dans le contexte des troubles civils de religion ? Quelles instances sont chargées de la recollection experte des informations éparses, lacunaires et bruyantes qui parviennent des marges et du cœur du royaume, des potentats alliés et des nations ennemies ? Comment ces informations recueillies sont-elles ensuite soigneusement lissées par le travail des
« bureaux » de la monarchie valoisienne afin de fonder nombre de décisions politiques complexes, de les rendre efficaces et de limiter leurs implications néfastes ?
Notre contribution propose d’opérer une plongée dans l’écheveau de correspondances inquiètes des secrétaires d’État du dernier souverain Valois du XVIe siècle afin de déterminer les raisons politiques et graphiques de ces nouveaux et nécessaires agents gouvernementaux d’un royaume dont l’appareil administratif se pense et se vit hanté par un double sentiment obsidional : celui de la dissension interne et des guerres étrangères.
« Le tremblé des correspondances. Information, préparation et projection des décisions politiques dans les « bureaux » des secrétaires d’État sous le règne de Henri III », dans T. Bru et S. de la Forest d’Armaillé (éds), Matière à écrire. Les échanges de correspondances du XVIe au XIXe siècle, Saint-Denis, Presses universitaires de Vincennes, 2017, p. 17-52.
Nous avons choisi d’éditer quelques pièces afin d’illustrer notre étude. Nous les livrons aujourd... more Nous avons choisi d’éditer quelques pièces afin d’illustrer notre étude. Nous les livrons aujourd’hui au public pour le profit de tous, dans l’attente de la publication prochaine de notre thèse de doctorat.
Ces pièces révèlent des aspects qui se distribuent dans les trois mouvements de notre étude (structures des institutions de l’écrit ; l’exercice du pouvoir par le recours à l’écrit ; les reconfigurations européennes des sociétés politiques) et montrent la finesse de la mécanique de la préparation et de la projection de l’écrit comme celle qui règle le travail concret des bureaux de la monarchie.
Nous avons privilégié des pièces manuscrites inédites, éditées en suivant les règles édictées L’Édition des textes anciens, XVIe-XVIIIe siècle, sous la direction de Bernard Barbiche et Monique Chatenet, Paris, Inventaire général, 1990, 2e éd. 1993, coll. « Documents et méthodes », n° 1.
Dans le passage problématique du moment politique renaissant à l'ère baroque, des administrateurs... more Dans le passage problématique du moment politique renaissant à l'ère baroque, des administrateurs d'un genre nouveau contribuèrent, par leur expertise et leur capacité d'innovation technique et politique, à saturer de leur présence et de leur savoir-faire les secrétariats de la monarchie française.
Ils créèrent ainsi, à l'échelle de leurs parentèles, des réflexes et des pratiques communs dans l'effectuation des décisions souveraines, jetant les bases d'un habitus de serviteur du roi, d'une langue et d'une science d'État. Autonomes dans un système aux normes qu'ils contribuèrent à inventer, pré-bureaucrates consacrés au service et aux volontés du prince, ils lièrent leur ascension à la montée en puissance de l'administration royale.
Le moment politique des années 1560-1610 est une crise, au sens plein du terme : on passe d'un compromis politique à un autre, d'une architecture politique centrée sur la personne du souverain, veillant au fragile équilibre entre les cours et les communautés, à une autre configuration, où l'exaltation de la majesté royale de la nouvelle dynastie Bourbon est la principale charge de secrétaires et de conseillers puissants, dans l'immédiat entourage du souverain.
https://chrhc.revues.org/5680
Syllabus du Professeur Crouzet qui anime le cours magistral dont ce TD dépend : «Le cours s’attac... more Syllabus du Professeur Crouzet qui anime le cours magistral dont ce TD dépend : «Le cours s’attachera tout d’abord à décrire et
analyser la constitution et la gestion d’un espace politique sur dimensionné, sur lequel le soleil ne se couchait jamais et qui voulait porter en lui, par- delà ses diversités, l’imaginaire d’une monarchie universelle : un espace s’étendant des Pays-Bas à la Franche-Comté, des domaines patrimoniaux des HASBOURGS aux Royaumes Ibériques, de Naples à la Sicile, de la Sardaigne au Milanais, du Saint-empire aux Amériques.
« Nous avons perdu toute creance et esperance des uns aux autres, de sorte que nous attribuons à ... more « Nous avons perdu toute creance et esperance des uns aux autres, de sorte que nous attribuons à art et tromperie les ouvertures que nous faisons de part et d’autre (…). [O]ù la confiance defaut les parolles sont inutiles, principalement celles qui sont privées et secrettes. C’est pourquoy je vous ay souvent supplié (…) faire manier et traicter publiquement et par personnes publiques les affaires generalles, estimant n’y avoir un autre moyen d’arrester le cours du mal qui nous va accabler que cestuy-là.», Lettre de Nicolas de Neufville, seigneur de Villeroy, au duc de Mayenne, 2 janvier 1594, publiée dans la Nouvelle collection des mémoires pour servir à l'histoire de France depuis le XIIIe siècle jusqu'à la fin du XVIIIe, t. 44, 601 p., p. 481
Quels savoirs fondent en fait et en droit le pouvoir de l’écrit politique dans le contexte des troubles civils de religion ? Quelles instances sont chargées de la récollection experte des informations éparses, lacunaires et bruyantes qui parviennent des marges et du cœur du royaume, des potentats alliés et des nations ennemies ? Comment ces informations recueillies sont ensuite soigneusement lissées par le travail des « bureaux » de la monarchie valoisienne afin de fonder nombre de décisions politiques complexes, de les rendre efficaces et de limiter leurs implications néfastes ? Ces premières questions adressées aux volumineuses correspondances du principal secrétaire d’État français, de Charles IX à Louis XIII, Nicolas de Neufville, seigneur de Villeroy, tracent les contours de notre recherche doctorale.
Un des aspects centraux du travail des « bureaux » retient notre attention : il s’agit de la structuration d’intenses canaux d’informations pour relier ensemble de nombreux et nécessaires correspondants. L’analyse montre rapidement que cet objectif s’affronte à deux enjeux d’apparence contradictoire : comment transporter continûment l’information la plus fine et précise possible tout en la scellant aux nombreuses puissances et menées adverses ?
Dès lors, quelles sont les techniques du secret identifiables dans la documentation politique, façonnées et maniées par les secrétaires d’État ? Quels discours les acteurs politiques tiennent-ils sur leurs pratiques visant à assurer la confidentialité des dépêches ? Quelle utilisation publique et politique est réservée à l’interception des papiers d’États de potentats ennemis ?
Enfin, quelles sont les conséquences pour l’analyse historienne des techniques raffinées du secret, de la pratique de l’oralité, de l’allusion, des silences nombreux qui piègent et tordent les séries de correspondances, constituant ainsi des obstacles majeurs à la reconstitution de l’économie générale des papiers d’État.
Écumes des décisions, d’ensembles documentaires plus vastes mais détruits ou perdus, échos des murmures du cabinet royal et du chuchotement des « bureaux », les correspondances inquiètes de Villeroy invitent à une plongée dans une histoire potentielle et ouverte de l’État moderne.
Partant, notre propos tentera de déterminer par hypothèses les principales raisons politiques et graphiques de ces nouveaux et nécessaires agents qui structurent les arcanes du pouvoir royal dont l’appareil administratif se pense et se vit hanté par un double sentiment obsidional : celui de la dissension interne et des guerres étrangères.
Colloque "Arcana Imperii. Gouverner par le secret dans l’Espagne moderne". 16 et 17 avril 2015, Casa de Velázquez
https://www.casadevelazquez.org/pt/investigacao/noticia/arcana-imperii/
Quels savoirs fondent en fait et en droit le pouvoir de l’écrit politique dans le contexte des ... more Quels savoirs fondent en fait et en droit le pouvoir de l’écrit politique dans le contexte des troubles civils de religion ? Quelles instances sont chargées de la récollection experte des informations éparses, lacunaires et bruyantes qui parviennent des marges et du cœur du royaume, des potentats alliés et des nations ennemies ? Comment ces informations recueillies sont ensuite soigneusement lissées par le travail des « bureaux » de la monarchie valoisienne afin de fonder nombre de décisions politiques complexes, de les rendre efficaces et de limiter leurs implications néfastes ?
Notre intervention propose d’opérer une plongée dans l’écheveau de correspondances inquiètes des secrétaires d’État du dernier souverain Valois du XVIe siècle afin de déterminer les raisons politiques et graphiques de ces nouveaux et nécessaires agents gouvernementaux d’un royaume dont l’appareil administratif se pense et se vit hanté par un double sentiment obsidional : celui de la dissension interne et des guerres étrangères.
[Journée d'études du Centre Jean-Mabillon de l'École nationale des chartes et de l'ED Pratiques et théories du Sens, Université de Paris-VIII].
L’institution de la fonction des secrétaires d’État au cœur de l’appareil politique de gouverneme... more L’institution de la fonction des secrétaires d’État au cœur de l’appareil politique de gouvernement au XVIe siècle est un des faits les plus saillants des tentatives de réformation du royaume de France lors des guerres de religion.
L’inflation documentaire sans précédent qui caractérise ce moment politique suppose la refonte des cadres traditionnels de la société politique et l’implantation, au cœur de l’État, d’un personnel aux horizons d’attente neufs pour soutenir cette réformation qui s’inscrit dans les conceptions politiques nouvelles des derniers Valois. Dès lors, une approche de l’État par la pratique et la consistance concrète du travail des « bureaux » de la monarchie administrative montre un projet politique mouvant, s’affrontant à la rugosité et aux malheurs des temps. Les innombrables décisions prises par les commis de chancellerie révèlent une histoire politique ouverte et potentielle. Sans faire l’économie d’une réflexion sur la notion problématique qu’est l’État moderne dans la récente historiographie, nous centrons l’analyse sur la jonction des intérêts d’une société politique qui lie son destin matériel au prince et la déclinaison des pratiques de ce groupe dans l’action de gouvernement. Ces agents vont, tout au long des guerres, créer des procédures de décision, inventer une langue administrative et tenir sur leur propre groupe, leur travail et leurs stratégies sociales un discours qui tend à se confondre avec le récit d’État et de bonne police. Un acteur en particulier nous semble rendre raison des profonds bouleversements de l’entourage royal : Nicolas de Neufville, seigneur de Villeroy. L’analyse de ses pratiques professionnelles et de ses conceptions politiques s’insère dans le courant récent de l’étude européenne des acteurs institutionnels. Nous tentons ainsi de lier pratiques et évènements, discours et cadres mentaux en dépliant ce qui fait la matière dense de la vie et des écrits du secrétaire de quatre rois de France (Charles IX, Henri III, Henri IV, Louis XIII). Nous lions l’édifice de papiers produit, la restitution d’une trajectoire politique et les réformes de l’entourage du roi dans les décennies 1580-1590. Nous tentons ainsi de comprendre comment Villeroy fonde, en fait et en droit, de nombreuses innovations politiques qui, sur près de cinquante ans, s’adossent à la configuration d’un imaginaire royal renouvelé.
[Journée d'études des doctorants du Centre Jean-Mabillon de l'École nationale des chartes - mai 2014]
http://www.enc.sorbonne.fr/actualite/recherche-centre-jean-mabillon/journee-d-etude-des-doctorants-du-centre-jean-mabillon
Dans le cycle de violences ouvert par la rupture de l’unité confessionnelle au XVIe siècle, les v... more Dans le cycle de violences ouvert par la rupture de l’unité confessionnelle au XVIe siècle, les villes se dévoilent à l’analyse historienne comme théâtres et enjeux des affrontements religieux.
L’Occident chrétien de la fin du XVe siècle est alors marqué par une forte croissance urbaine et économique ; ce dynamisme est l’effet de la rapide récupération du temps des malheurs occasionnés par les pestes, les guerres et les famines des années 1350-1430. Si le fait urbain n’est pas majoritaire, les nouvelles configurations des villes se révèlent problématiques pour les autorités centrales et locales qui cherchent à en réguler les usages et les horizons d’attente multiples, ceux des masses foraines et populaires comme des nouveaux groupes élitaires de la marchandise et de la magistrature. On observe dès les années 1520 un double mouvement. Le dynamisme des centres urbains se mue en facteur de crise sous l’effet des Réformes. Les anciennes hiérarchies et solidarités corporatives et paroissiales sont renouvelées, perturbées et heurtées à la faveur des recompositions complexes dues aux divisions religieuses. Fait social total, le choix confessionnel induit des ruptures marquées dans les sociabilités, le bâti, les cérémonies, les usages des villes par leurs habitants. La violence et la radicalité sans précédents qu’occasionnent la poursuite et la destruction de l’hérétique ainsi que la recherche angoissée du salut dans la vraie foi sont autant de catégories d’analyse efficaces des crises qui déchirent les métropoles de l’époque moderne. Les barricades dont se hérissent les centres urbains du premier XVIe au premier XVIIe siècles sont les points de cristallisation des imaginaires et des nouvelles conceptions des technologies de pouvoir qui préfigurent et autorisent la lente émergence de la ville absolutiste.
Conference Presentations by Jérémie Ferrer-Bartomeu
Tandis que les pratiques de l’écrit et de l’oralité ont été remises à l’honneur par de nouvelles ... more Tandis que les pratiques de l’écrit et de l’oralité ont été remises à l’honneur par de nouvelles approches ces dernières années, les rapports complexes régissant ces deux modalités d’expression et de communication ont été peu thématisés et analysés. Ils soulèvent pourtant des questions fondamentales liées à l’histoire de l’époque moderne et à ses sources. Une attention particulière sera accordée aux phénomènes d’hybridation entre écrit et oralité dans différents domaines et contextes. Les fonctions performatives de la parole (dite ou écrite), jusqu’alors négligées, seront au centre de ces journées d’études. Dans le sillage des débats causés par le linguistic turn, elles permettront de questionner sous un jour nouveau les périmètres mouvants du dicible et de l’indicible, du pensable et de l’impensable, du nommable et l’innommable aux XVIe et XVIIe siècles, dans le processus de confessionnalisation comme dans les conflits politiques et géopolitiques qui scandent la première modernité.
The objective of this round table is to analyze the judicial, political, and historical speeches ... more The objective of this round table is to analyze the judicial, political, and historical speeches referring to the French Crown, or attempting to redefine it. The complexity of the issues at stake during the French Wars of Religion (1562-98) never ceases to convey new researches and interpretations due to the abundance of writings and debates. Thence, to theories contesting power in the hands of one individual and restoring the founding principles of legitimate resistance, answer ideologies restyling the role of strengthened sovereignty as the sole guarantee of stability and civil peace. Is the French Crown comparable to or distinguishable from the Crown of Christ and the Imperial Crown? In what measure are discussions about the Crown linked to issues of sovereignty and the "good Christian Prince"? How do religious debates opposing hereditary succession and ancestral election alter the Crown's significance?
À une époque qui voit l’information se multiplier tout en changeant de forme, il est nécessaire d... more À une époque qui voit l’information se multiplier tout en changeant de forme, il est nécessaire de s’interroger sur la question de la parole, depuis sa genèse moderne à sa profusion contemporaine, mais également à son impact. Le projet Anthropologie politique et religieuse de la parole (XVIe-XVIIIe siècle) vise à mettre en lumière l’importance de la problématique de la gestion de la parole dans les sociétés modernes. Dans un paradoxe tout à fait fascinant, la parole oscille entre abondance et rareté : le pouvoir qu’elle détient lui provient de cette dernière et son utilisation doit donc être parcimonieuse et, surtout, contrôlée. C’est ainsi que des stratégies communicationnelles et des acteurs institutionnels naissent ou se développent afin de maitriser la production, la diffusion et la réception de la parole politique. Cependant, ils ne sont pas seuls détenteurs du Verbe politique et les crises successives qui secouent la première modernité encouragent une amplification des discours : l’opposition se multiplie en même temps que les pôles de production, l’imprimerie rend la diffusion plus aisée mais plus incontrôlable, et le pouvoir sacré de la parole souveraine est mis à mal par de nouvelles concurrences. Dans la gestion politique des crises, la parole est alors à la fois problème et solution.
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Colloque international, Université de Genève, 16-18 février 2022, Uni-Bastions 108.
Argumentaire... more Colloque international, Université de Genève, 16-18 février 2022, Uni-Bastions 108.
Argumentaire
A une époque qui voit l’information se multiplier tout en changeant de forme, il est nécessaire de s’interroger sur la question de la parole, depuis sa genèse moderne à sa profusion contemporaine, mais également à son impact. Le projet Anthropologie politique et religieuse de la parole (XVIe-XVIIIe siècle) vise à mettre en lumière l’importance de la problématique de la gestion de la parole dans les sociétés modernes. Dans un paradoxe tout à fait fascinant, la parole oscille entre abondance et rareté : le pouvoir qu’elle détient lui provient de cette dernière et son utilisation doit donc être parcimonieuse et, surtout, contrôlée. C’est ainsi que des stratégies communicationnelles et des acteurs institutionnels naissent ou se développent afin de maitriser la production, la diffusion et la réception de la parole politique. Cependant, ils ne sont pas seuls détenteurs du Verbe politique et les crises successives qui secouent la première modernité encouragent une amplification des discours : l’opposition se multiplie en même temps que les pôles de production, l’imprimerie rend la diffusion plus aisée mais plus incontrôlable, et le pouvoir sacré de la parole souveraine est mis à mal par de nouvelles concurrences. Dans la gestion politique des crises, la parole est alors à la fois problème et solution.
La première journée d’étude de ce projet sera organisée à l’université de Genève. Durant les différentes interventions, nous nous intéresserons à la parole promise et aux différentes formes que cet acte peut recouvrir (serment, charte, foi jurée, profession de foi, confession, menace, malédiction, etc.). S’interroger sur l’acte performatif qu’est le don de parole – comment jure-t-on et quelles sont les conséquences des mots prononcés ou signés ? −, c’est se questionner à la fois sur les modalités linguistiques, institutionnelles et rituelles qui sous-tendent cette pratique et, plus encore, repenser les liens de confiance et d’alliance, le capital symbolique mis en gage par les deux parties : qui jure, et pourquoi cette pratique revêt une telle importance dans la société d’Ancien Régime ?
Nous voulons interroger les éléments constitutifs de la parole jurée, en particulier son media (l’oral, l’écrit ou des formes hybrides) et son effectivité. Deux questions sont centrales : comment est construite la promesse ? Qu’est-ce qu’elle produit en termes d’impact sur le présent et le futur de la situation d’énonciation ? Il est alors nécessaire d’interroger la source de la valeur du serment, les gages donnés pour les parties, mais également les acteurs (producteurs et/ou détenteurs de la parole). Ces « jureurs » peuvent s’engager pour eux-mêmes, mais aussi pour une entité plus large, puisque jurer implique non seulement un gage personnel mais aussi communautaire, soit collectif et gouvernemental. De ce fait, peut-être faut-il envisager l’acte de jurer comme le symbole de la convergence de volontés plurielles. D’une parole jurée, on peut ainsi mettre en exergue les ressorts d’un dispositif politique et religieux largement utilisé et persistant, par une déconstruction minutieuse des contextes et des pratiques, afin d’observer sa pluralité en tant que discours et idées. Cela nous amènera à considérer l’économie de la parole dans son écriture, sa proclamation, sa conservation et ses changements.
Le champ de recherche couvre l’Europe occidentale de la première paix de Cappel jusqu’au traité de Westphalie. Un intérêt tout particulier sera consacré aux pensées transversales et interdisciplinaires capables d’apporter à la question de la parole des réponses à la fois historiques et issues d’autres sciences humaines, permettant donc de confronter différentes approches. Nous nous pencherons ainsi sur des sujets ciblés, afin de pouvoir rentrer dans le vif de cette parole juré, profuse et mystifiée : par exemple les préambules légaux et la manière dont ils introduisent les conjurés, les serments qui entourent les paix de religion, le règlement des conflits ou au contraire les déclarations de guerre, la promesse royale ou princière (qu’elle soit directe ou indirecte), les sermons de guerre, la traitrise et l’abjuration, les savoir-faire administratifs liés à l’acte du don de parole, la matérialité de cette pratique, la force perlocutoire des mots jurés, l’iconographie du serment, ses évolutions et ses permanences, etc.
Serge Slama, professeur de droit public à l’ Université de Grenoble-Alpes, membre du comité de r... more Serge Slama, professeur de droit public à l’ Université de Grenoble-Alpes, membre du comité de rédaction de la Revue des droits de l’homme
Aurélien Taché, député LREM de la Xe circonscription du Val d’Oise et auteur d’un rapport sur l’intégration
Mercredi 17 octobre, salle Henri Cartan, ENS, 19h15
Citoyenneté, souveraineté, migrations : penser les droits des migrants
Une conférence du séminaire annuel Les Savants et les Politiques du Centre européen des études républicaines (CEDRE)
La loi Asile et Immigration a été adoptée au parlement et promulguée, non sans avoir suscité de très vifs débats. Elle s’inscrit dans une longue série de lois réglementant l’accès au territoire et à la citoyenneté des non-nationaux, dont le but est d’encadrer l’arrivée de migrants en Europe et de répondre aux défis qu’elle soulève. Mais ce travail législatif laisse en partie sans réponse des questions essentielles, qui touchent notamment aux questions de la citoyenneté et de la nationalité, des droits de l’homme et des droits des migrants.
Depuis la conception de la citoyenneté donnée par Révolution française – qui se passait de toute référence à une origine ou une nationalité – le statut de citoyen qui ouvre à la protection de la loi a fini par être juxtaposé avec l’idée de nationalité et les droits des individus garantis dans un cadre territorial précis. Cette situation n’est plus : non seulement parce que la Déclaration universelle des droits de l’Homme brise le lien entre citoyenneté et nationalité et interdit en théorie aux États de discriminer les individus en fonction de leur nationalité, mais parce que l’ampleur et la complexité du phénomène migratoire vient poser de nouvelles questions aux États.
On peut en prendre pour exemple les ébauches de citoyenneté européenne, autorisant les ressortissants européens à voter et à se présenter aux élections locales. Pourtant, il est difficile aujourd’hui de définir ces droits, puisque leurs sources sont multiples, à la fois nationales et internationales, et que leur force juridique varie en fonction des institutions qui les mettent en œuvre.
La définition des droits des migrants remet donc au centre des interrogations les droits économiques, sociaux et politiques dont chaque être humain pourrait se prévaloir, en dehors d’une citoyenneté qui est aujourd’hui essentiellement liée à l’État et avec lui à l’obtention de la nationalité.
Il est donc urgent de forger des outils intellectuels pour mieux comprendre le rapport des migrants à la citoyenneté, afin de sortir des cadres de débats prédéfinis et de la répétition des mêmes vérités tronquées dans lequel le débat public s’enferme trop souvent.
Responsable
Olivier Christin, directeur du CEDRE
Coordinateurs
Jérémie Ferrer-Bartomeu, Nicolas Iommi Amunategui
Organisation et communication
Olivier Demoures odemoures@gmail. com
Avec la participation de l’association Débattre en Sorbonne
El aumento del poder soberano (real y principesco) en Europa a partir del siglo XV y durante todo... more El aumento del poder soberano (real y principesco) en Europa a partir del siglo XV y durante todo el siglo XVI se inscribe dentro del proceso de formación del Estado moderno. En un continente constituido en gran medida por Estados diversos, este movimiento se tradujo, entre otros aspectos, en reformas institucionales como las relativas a los Consejos al servicio de los soberanos, de sus regentes (en época de minoría de edad), y de sus representantes (virreyes, lugartenientes generales, gobernadores) durante las ausencias de los detentores del poder supremo. Teniendo como base las aportaciones de una historiografía renovada recientemente, estas dos jornadas profundizarán de manera inédita en la situación de «Esta-dos medianeros», poniendo especial énfasis en la composición, funcionamiento y atribuciones de Consejos asentados en territorios como Navarra, Bearne, Saboya, Transilvania, etc., situados en las esferas de influencia de poderosos vecinos. Investigadores de diversas disciplinas adoptarán una perspectiva comparatista con objeto de valorar desde nuevos enfoques la envergadura de las ideas políticas y prácticas de gobierno de la Europa del Renacimiento.
La croissance du pouvoir souverain (royal et princier) en Europe depuis la fin du XV e siècle et pendant tout le XVI e siècle, s'inscrit dans le processus de formation de l'État moderne. Dans un continent constitué, en grande partie, d'États composites, ce mouvement s'est traduit, entre autres, par des réformes institutionnelles, comme celles relatives aux Conseils qui entouraient les souverains, leurs régents (pendant la minorité des rois), et leurs représentants (vice-rois, lieutenants généraux, gouverneurs) durant les absences des détenteurs du pouvoir suprême. S'appuyant sur les acquis d'une historiographie récemment renouvelée, ces deux journées approfondiront de manière inédite la situation des « États médians » en s'attachant à éclairer particulièrement la composition, le fonctionnement et les attributions des Conseils installés dans les pays comme la Navarre, le Béarn, la Savoie, la Transylvanie, etc., qui se trouvaient entre les sphères d'influence de leurs puissants voisins. Des chercheurs venant de plusieurs disciplines adopteront une perspective comparatiste pour évaluer à nouveaux frais le rayonnement des idées politiques et des pratiques gouvernementales dans l'Europe de la Renaissance.
La communication propose une exploration des liens fonctionnels entre régime de crise politique e... more La communication propose une exploration des liens fonctionnels entre régime de crise politique et construction de l’habitus des experts de gouvernement. Il conviendra d’interroger la lente sédimentation des pratiques de gouvernement lors des guerres de Religion dans le royaume de France comme la réponse terme à terme à un moment de crise politique.
La longue séquence des troubles civils et leur dilatation à l’espace européen, des années 1560 aux années 1620, voit l’émergence d’un personnel politique d’un type nouveau, les secrétaires, institué dans l’immédiat entourage du souverain.
Ces administrateurs de l’écrit, issus, pour une large part, de la meilleure société marchande parisienne, vont saturer de leur présence et de leur savoir-faire les nouveaux bureaux de la monarchie comme les institutions traditionnelles des cours et des conseils. Pour soutenir et défendre leur position de plus en plus éminente dans l’agencement institutionnel, ils vont développer et conjoindre, dans leurs portefeuilles, aux écrits de la pratique, dont ils sont d’éminents spécialistes, des écrits discursifs qui feignent l’antiquité de leurs techniques autant qu’ils affectent une certaine routine voire une fatigue de bureau.
Partant, ces dispositions professionnelles et pré-bureaucratiques vont devenir le ciment de relations d’amitiés avec les administrateurs des bureaux des monarchies voisines, à la faveur des contacts guerriers et cérémoniels.
C’est dans ce périmètre dense qu’on se demandera quels sont les impacts du contexte de crise politique sur la définition même d’une conduite experte des pratiques de gouvernement par des administrateurs qui inventent pour une très large part leurs outils et le discours qui le soutient au sein d’une société politique en intense recomposition.
On esquissera les contours transnationaux d’une république européenne des bureaux travaillée par les mêmes tensions autour de l’axe crise et expertise.
Enfin, on s’interrogera sur les sorties de crise politique, les moments de paix et de stabilisation des reconfigurations sociopolitiques pour se demander comment l’extraordinaire de l’expert devient le quotidien de l’administrateur, à hauteur d’hommes et de plumes.
The year 2017 marks the Fifth Centenary of a fundamental event in the history of Europe: the Refo... more The year 2017 marks the Fifth Centenary of a fundamental event in the history of Europe: the Reform, started at the initiative of the Augustinian monk Martin Luther, in which he questioned some basic principles of the spiritual Economy of the Catholic Church. Although Luther's position eventually turned out to be moderate, there was no shortage of more radical preachers who turned images into one of the key issues of the Reform movement, generating a tremendous Debate on the value and meaning of images in religious practice, without which it is impossible to understand the emergence of what we call Art in the Early Modern Age. Spain did not stand aloof from this debate, nor was its position immutable and monolithic as it is sometime portrayed. Firstly, because the battle had to be waged in part within its own frontiers —as demonstrated by the records of the Inquisition. Secondly, because various movements developed within Spain which were contrary to the use of images (the alumbrados for instance), and even took root across the Mediterranean (Valdesianismo in Italy). Thirdly and lastly, because Spain was part of a geography that was much larger, more fluid and more complex than the Iberian Peninsula, namely the Catholic Monarchy. The aim of this workshop is to address these three fundamental aspects:
1) The historical debate and its relationship with the history of the Reform
2) The geography of the problem
3) The new discourse of a reformed Art, Protestant and Catholic alike
En 2017 se celebra el V Centenario de un episodio fundamental en la historia de Europa: la Reforma, iniciada por el monje agustino Martín Lutero, que cuestionaba principios básicos de la Economía espiritual de la Iglesia Católica. Aunque la postura de Lutero a la postre resultó moderada, no faltaron predicadores más radicales que convirtieron las imágenes en uno de los verdaderos caballos de batalla de la Refor-ma, generando un Gran debate sobre el sentido de las imágenes religiosas, sin cuya existencia es imposible comprender el nacimiento de lo que llamamos Arte en la primera Edad Moderna. España no fue ajena a este debate, ni su posición fue, como se presenta en algunas ocasiones, inquebrantable y monolítica. Primero, porque una parte de la batalla tuvo que darse dentro de sus fronteras —como prueban los archi-vos de la Inquisición. Segundo, porque germinaron en su seno distintos movimientos contrarios al uso de las imágenes (los alumbrados, sin ir más lejos) e incluso los exportó fuera de sus fronteras (el Valdesianismo en Italia). Tercero, y último, porque España era parte de una geografía mucho más amplia, fluida y compleja, que la de la Península Ibérica: la Monarquía Católica. El objetivo de este taller consiste en analizar estos tres aspectos fundamentales:
1) El Debate histórico y su relación con la historia de la Reforma
2) La geografía del problema
3) El nuevo discurso de un Arte reformado, Protestante lo mismo que Católico
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Papers by Jérémie Ferrer-Bartomeu
The crown in the sixteenth century has been infrequently examined in scholarly discourse. Nevertheless, akin to its representation during the Middle Ages, it emerges as an object, symbol, and theologico-political performance of the exercise of sovereignty, embodying both material reality and abstract concept. Yet, in an era torn asunder by the Wars of Religion, radical challenges to sovereign authority bring to the fore the issues and debates surrounding this unique emblem. Does the crown indeed underpin sovereignty? Is the bearer thereof truly worthy? What conditions ensure its orderly succession? The reign of Henry III epitomizes the dramatic encapsulation of these concerns: initially when in 1584, Henry of Navarre, a Protestant, becomes the presumptive heir; and subsequently in 1588, when the monarch orchestrates the assassination of the Duke of Guise and the Cardinal of Lorraine during the Estates General of Blois. Consequently, in a fervent quest for origins, the crown as an object becomes dissociated from the vilified monarch, to whom, much like his heretical heir, sovereignty, legitimacy, and ultimately the dignity to don the crown of France, is denied. The core issue during the reign of Henry III, revolving around the rightful claimant to the French crown, is a multifaceted interplay of law, lineage, orthodoxy, and dignity.
« bureaux » de la monarchie valoisienne afin de fonder nombre de décisions politiques complexes, de les rendre efficaces et de limiter leurs implications néfastes ?
Notre contribution propose d’opérer une plongée dans l’écheveau de correspondances inquiètes des secrétaires d’État du dernier souverain Valois du XVIe siècle afin de déterminer les raisons politiques et graphiques de ces nouveaux et nécessaires agents gouvernementaux d’un royaume dont l’appareil administratif se pense et se vit hanté par un double sentiment obsidional : celui de la dissension interne et des guerres étrangères.
« Le tremblé des correspondances. Information, préparation et projection des décisions politiques dans les « bureaux » des secrétaires d’État sous le règne de Henri III », dans T. Bru et S. de la Forest d’Armaillé (éds), Matière à écrire. Les échanges de correspondances du XVIe au XIXe siècle, Saint-Denis, Presses universitaires de Vincennes, 2017, p. 17-52.
Ces pièces révèlent des aspects qui se distribuent dans les trois mouvements de notre étude (structures des institutions de l’écrit ; l’exercice du pouvoir par le recours à l’écrit ; les reconfigurations européennes des sociétés politiques) et montrent la finesse de la mécanique de la préparation et de la projection de l’écrit comme celle qui règle le travail concret des bureaux de la monarchie.
Nous avons privilégié des pièces manuscrites inédites, éditées en suivant les règles édictées L’Édition des textes anciens, XVIe-XVIIIe siècle, sous la direction de Bernard Barbiche et Monique Chatenet, Paris, Inventaire général, 1990, 2e éd. 1993, coll. « Documents et méthodes », n° 1.
Ils créèrent ainsi, à l'échelle de leurs parentèles, des réflexes et des pratiques communs dans l'effectuation des décisions souveraines, jetant les bases d'un habitus de serviteur du roi, d'une langue et d'une science d'État. Autonomes dans un système aux normes qu'ils contribuèrent à inventer, pré-bureaucrates consacrés au service et aux volontés du prince, ils lièrent leur ascension à la montée en puissance de l'administration royale.
Le moment politique des années 1560-1610 est une crise, au sens plein du terme : on passe d'un compromis politique à un autre, d'une architecture politique centrée sur la personne du souverain, veillant au fragile équilibre entre les cours et les communautés, à une autre configuration, où l'exaltation de la majesté royale de la nouvelle dynastie Bourbon est la principale charge de secrétaires et de conseillers puissants, dans l'immédiat entourage du souverain.
https://chrhc.revues.org/5680
analyser la constitution et la gestion d’un espace politique sur dimensionné, sur lequel le soleil ne se couchait jamais et qui voulait porter en lui, par- delà ses diversités, l’imaginaire d’une monarchie universelle : un espace s’étendant des Pays-Bas à la Franche-Comté, des domaines patrimoniaux des HASBOURGS aux Royaumes Ibériques, de Naples à la Sicile, de la Sardaigne au Milanais, du Saint-empire aux Amériques.
Quels savoirs fondent en fait et en droit le pouvoir de l’écrit politique dans le contexte des troubles civils de religion ? Quelles instances sont chargées de la récollection experte des informations éparses, lacunaires et bruyantes qui parviennent des marges et du cœur du royaume, des potentats alliés et des nations ennemies ? Comment ces informations recueillies sont ensuite soigneusement lissées par le travail des « bureaux » de la monarchie valoisienne afin de fonder nombre de décisions politiques complexes, de les rendre efficaces et de limiter leurs implications néfastes ? Ces premières questions adressées aux volumineuses correspondances du principal secrétaire d’État français, de Charles IX à Louis XIII, Nicolas de Neufville, seigneur de Villeroy, tracent les contours de notre recherche doctorale.
Un des aspects centraux du travail des « bureaux » retient notre attention : il s’agit de la structuration d’intenses canaux d’informations pour relier ensemble de nombreux et nécessaires correspondants. L’analyse montre rapidement que cet objectif s’affronte à deux enjeux d’apparence contradictoire : comment transporter continûment l’information la plus fine et précise possible tout en la scellant aux nombreuses puissances et menées adverses ?
Dès lors, quelles sont les techniques du secret identifiables dans la documentation politique, façonnées et maniées par les secrétaires d’État ? Quels discours les acteurs politiques tiennent-ils sur leurs pratiques visant à assurer la confidentialité des dépêches ? Quelle utilisation publique et politique est réservée à l’interception des papiers d’États de potentats ennemis ?
Enfin, quelles sont les conséquences pour l’analyse historienne des techniques raffinées du secret, de la pratique de l’oralité, de l’allusion, des silences nombreux qui piègent et tordent les séries de correspondances, constituant ainsi des obstacles majeurs à la reconstitution de l’économie générale des papiers d’État.
Écumes des décisions, d’ensembles documentaires plus vastes mais détruits ou perdus, échos des murmures du cabinet royal et du chuchotement des « bureaux », les correspondances inquiètes de Villeroy invitent à une plongée dans une histoire potentielle et ouverte de l’État moderne.
Partant, notre propos tentera de déterminer par hypothèses les principales raisons politiques et graphiques de ces nouveaux et nécessaires agents qui structurent les arcanes du pouvoir royal dont l’appareil administratif se pense et se vit hanté par un double sentiment obsidional : celui de la dissension interne et des guerres étrangères.
Colloque "Arcana Imperii. Gouverner par le secret dans l’Espagne moderne". 16 et 17 avril 2015, Casa de Velázquez
https://www.casadevelazquez.org/pt/investigacao/noticia/arcana-imperii/
Notre intervention propose d’opérer une plongée dans l’écheveau de correspondances inquiètes des secrétaires d’État du dernier souverain Valois du XVIe siècle afin de déterminer les raisons politiques et graphiques de ces nouveaux et nécessaires agents gouvernementaux d’un royaume dont l’appareil administratif se pense et se vit hanté par un double sentiment obsidional : celui de la dissension interne et des guerres étrangères.
[Journée d'études du Centre Jean-Mabillon de l'École nationale des chartes et de l'ED Pratiques et théories du Sens, Université de Paris-VIII].
L’inflation documentaire sans précédent qui caractérise ce moment politique suppose la refonte des cadres traditionnels de la société politique et l’implantation, au cœur de l’État, d’un personnel aux horizons d’attente neufs pour soutenir cette réformation qui s’inscrit dans les conceptions politiques nouvelles des derniers Valois. Dès lors, une approche de l’État par la pratique et la consistance concrète du travail des « bureaux » de la monarchie administrative montre un projet politique mouvant, s’affrontant à la rugosité et aux malheurs des temps. Les innombrables décisions prises par les commis de chancellerie révèlent une histoire politique ouverte et potentielle. Sans faire l’économie d’une réflexion sur la notion problématique qu’est l’État moderne dans la récente historiographie, nous centrons l’analyse sur la jonction des intérêts d’une société politique qui lie son destin matériel au prince et la déclinaison des pratiques de ce groupe dans l’action de gouvernement. Ces agents vont, tout au long des guerres, créer des procédures de décision, inventer une langue administrative et tenir sur leur propre groupe, leur travail et leurs stratégies sociales un discours qui tend à se confondre avec le récit d’État et de bonne police. Un acteur en particulier nous semble rendre raison des profonds bouleversements de l’entourage royal : Nicolas de Neufville, seigneur de Villeroy. L’analyse de ses pratiques professionnelles et de ses conceptions politiques s’insère dans le courant récent de l’étude européenne des acteurs institutionnels. Nous tentons ainsi de lier pratiques et évènements, discours et cadres mentaux en dépliant ce qui fait la matière dense de la vie et des écrits du secrétaire de quatre rois de France (Charles IX, Henri III, Henri IV, Louis XIII). Nous lions l’édifice de papiers produit, la restitution d’une trajectoire politique et les réformes de l’entourage du roi dans les décennies 1580-1590. Nous tentons ainsi de comprendre comment Villeroy fonde, en fait et en droit, de nombreuses innovations politiques qui, sur près de cinquante ans, s’adossent à la configuration d’un imaginaire royal renouvelé.
[Journée d'études des doctorants du Centre Jean-Mabillon de l'École nationale des chartes - mai 2014]
http://www.enc.sorbonne.fr/actualite/recherche-centre-jean-mabillon/journee-d-etude-des-doctorants-du-centre-jean-mabillon
L’Occident chrétien de la fin du XVe siècle est alors marqué par une forte croissance urbaine et économique ; ce dynamisme est l’effet de la rapide récupération du temps des malheurs occasionnés par les pestes, les guerres et les famines des années 1350-1430. Si le fait urbain n’est pas majoritaire, les nouvelles configurations des villes se révèlent problématiques pour les autorités centrales et locales qui cherchent à en réguler les usages et les horizons d’attente multiples, ceux des masses foraines et populaires comme des nouveaux groupes élitaires de la marchandise et de la magistrature. On observe dès les années 1520 un double mouvement. Le dynamisme des centres urbains se mue en facteur de crise sous l’effet des Réformes. Les anciennes hiérarchies et solidarités corporatives et paroissiales sont renouvelées, perturbées et heurtées à la faveur des recompositions complexes dues aux divisions religieuses. Fait social total, le choix confessionnel induit des ruptures marquées dans les sociabilités, le bâti, les cérémonies, les usages des villes par leurs habitants. La violence et la radicalité sans précédents qu’occasionnent la poursuite et la destruction de l’hérétique ainsi que la recherche angoissée du salut dans la vraie foi sont autant de catégories d’analyse efficaces des crises qui déchirent les métropoles de l’époque moderne. Les barricades dont se hérissent les centres urbains du premier XVIe au premier XVIIe siècles sont les points de cristallisation des imaginaires et des nouvelles conceptions des technologies de pouvoir qui préfigurent et autorisent la lente émergence de la ville absolutiste.
Conference Presentations by Jérémie Ferrer-Bartomeu
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Argumentaire
A une époque qui voit l’information se multiplier tout en changeant de forme, il est nécessaire de s’interroger sur la question de la parole, depuis sa genèse moderne à sa profusion contemporaine, mais également à son impact. Le projet Anthropologie politique et religieuse de la parole (XVIe-XVIIIe siècle) vise à mettre en lumière l’importance de la problématique de la gestion de la parole dans les sociétés modernes. Dans un paradoxe tout à fait fascinant, la parole oscille entre abondance et rareté : le pouvoir qu’elle détient lui provient de cette dernière et son utilisation doit donc être parcimonieuse et, surtout, contrôlée. C’est ainsi que des stratégies communicationnelles et des acteurs institutionnels naissent ou se développent afin de maitriser la production, la diffusion et la réception de la parole politique. Cependant, ils ne sont pas seuls détenteurs du Verbe politique et les crises successives qui secouent la première modernité encouragent une amplification des discours : l’opposition se multiplie en même temps que les pôles de production, l’imprimerie rend la diffusion plus aisée mais plus incontrôlable, et le pouvoir sacré de la parole souveraine est mis à mal par de nouvelles concurrences. Dans la gestion politique des crises, la parole est alors à la fois problème et solution.
La première journée d’étude de ce projet sera organisée à l’université de Genève. Durant les différentes interventions, nous nous intéresserons à la parole promise et aux différentes formes que cet acte peut recouvrir (serment, charte, foi jurée, profession de foi, confession, menace, malédiction, etc.). S’interroger sur l’acte performatif qu’est le don de parole – comment jure-t-on et quelles sont les conséquences des mots prononcés ou signés ? −, c’est se questionner à la fois sur les modalités linguistiques, institutionnelles et rituelles qui sous-tendent cette pratique et, plus encore, repenser les liens de confiance et d’alliance, le capital symbolique mis en gage par les deux parties : qui jure, et pourquoi cette pratique revêt une telle importance dans la société d’Ancien Régime ?
Nous voulons interroger les éléments constitutifs de la parole jurée, en particulier son media (l’oral, l’écrit ou des formes hybrides) et son effectivité. Deux questions sont centrales : comment est construite la promesse ? Qu’est-ce qu’elle produit en termes d’impact sur le présent et le futur de la situation d’énonciation ? Il est alors nécessaire d’interroger la source de la valeur du serment, les gages donnés pour les parties, mais également les acteurs (producteurs et/ou détenteurs de la parole). Ces « jureurs » peuvent s’engager pour eux-mêmes, mais aussi pour une entité plus large, puisque jurer implique non seulement un gage personnel mais aussi communautaire, soit collectif et gouvernemental. De ce fait, peut-être faut-il envisager l’acte de jurer comme le symbole de la convergence de volontés plurielles. D’une parole jurée, on peut ainsi mettre en exergue les ressorts d’un dispositif politique et religieux largement utilisé et persistant, par une déconstruction minutieuse des contextes et des pratiques, afin d’observer sa pluralité en tant que discours et idées. Cela nous amènera à considérer l’économie de la parole dans son écriture, sa proclamation, sa conservation et ses changements.
Le champ de recherche couvre l’Europe occidentale de la première paix de Cappel jusqu’au traité de Westphalie. Un intérêt tout particulier sera consacré aux pensées transversales et interdisciplinaires capables d’apporter à la question de la parole des réponses à la fois historiques et issues d’autres sciences humaines, permettant donc de confronter différentes approches. Nous nous pencherons ainsi sur des sujets ciblés, afin de pouvoir rentrer dans le vif de cette parole juré, profuse et mystifiée : par exemple les préambules légaux et la manière dont ils introduisent les conjurés, les serments qui entourent les paix de religion, le règlement des conflits ou au contraire les déclarations de guerre, la promesse royale ou princière (qu’elle soit directe ou indirecte), les sermons de guerre, la traitrise et l’abjuration, les savoir-faire administratifs liés à l’acte du don de parole, la matérialité de cette pratique, la force perlocutoire des mots jurés, l’iconographie du serment, ses évolutions et ses permanences, etc.
Aurélien Taché, député LREM de la Xe circonscription du Val d’Oise et auteur d’un rapport sur l’intégration
Mercredi 17 octobre, salle Henri Cartan, ENS, 19h15
Citoyenneté, souveraineté, migrations : penser les droits des migrants
Une conférence du séminaire annuel Les Savants et les Politiques du Centre européen des études républicaines (CEDRE)
La loi Asile et Immigration a été adoptée au parlement et promulguée, non sans avoir suscité de très vifs débats. Elle s’inscrit dans une longue série de lois réglementant l’accès au territoire et à la citoyenneté des non-nationaux, dont le but est d’encadrer l’arrivée de migrants en Europe et de répondre aux défis qu’elle soulève. Mais ce travail législatif laisse en partie sans réponse des questions essentielles, qui touchent notamment aux questions de la citoyenneté et de la nationalité, des droits de l’homme et des droits des migrants.
Depuis la conception de la citoyenneté donnée par Révolution française – qui se passait de toute référence à une origine ou une nationalité – le statut de citoyen qui ouvre à la protection de la loi a fini par être juxtaposé avec l’idée de nationalité et les droits des individus garantis dans un cadre territorial précis. Cette situation n’est plus : non seulement parce que la Déclaration universelle des droits de l’Homme brise le lien entre citoyenneté et nationalité et interdit en théorie aux États de discriminer les individus en fonction de leur nationalité, mais parce que l’ampleur et la complexité du phénomène migratoire vient poser de nouvelles questions aux États.
On peut en prendre pour exemple les ébauches de citoyenneté européenne, autorisant les ressortissants européens à voter et à se présenter aux élections locales. Pourtant, il est difficile aujourd’hui de définir ces droits, puisque leurs sources sont multiples, à la fois nationales et internationales, et que leur force juridique varie en fonction des institutions qui les mettent en œuvre.
La définition des droits des migrants remet donc au centre des interrogations les droits économiques, sociaux et politiques dont chaque être humain pourrait se prévaloir, en dehors d’une citoyenneté qui est aujourd’hui essentiellement liée à l’État et avec lui à l’obtention de la nationalité.
Il est donc urgent de forger des outils intellectuels pour mieux comprendre le rapport des migrants à la citoyenneté, afin de sortir des cadres de débats prédéfinis et de la répétition des mêmes vérités tronquées dans lequel le débat public s’enferme trop souvent.
Responsable
Olivier Christin, directeur du CEDRE
Coordinateurs
Jérémie Ferrer-Bartomeu, Nicolas Iommi Amunategui
Organisation et communication
Olivier Demoures odemoures@gmail. com
Avec la participation de l’association Débattre en Sorbonne
La croissance du pouvoir souverain (royal et princier) en Europe depuis la fin du XV e siècle et pendant tout le XVI e siècle, s'inscrit dans le processus de formation de l'État moderne. Dans un continent constitué, en grande partie, d'États composites, ce mouvement s'est traduit, entre autres, par des réformes institutionnelles, comme celles relatives aux Conseils qui entouraient les souverains, leurs régents (pendant la minorité des rois), et leurs représentants (vice-rois, lieutenants généraux, gouverneurs) durant les absences des détenteurs du pouvoir suprême. S'appuyant sur les acquis d'une historiographie récemment renouvelée, ces deux journées approfondiront de manière inédite la situation des « États médians » en s'attachant à éclairer particulièrement la composition, le fonctionnement et les attributions des Conseils installés dans les pays comme la Navarre, le Béarn, la Savoie, la Transylvanie, etc., qui se trouvaient entre les sphères d'influence de leurs puissants voisins. Des chercheurs venant de plusieurs disciplines adopteront une perspective comparatiste pour évaluer à nouveaux frais le rayonnement des idées politiques et des pratiques gouvernementales dans l'Europe de la Renaissance.
La longue séquence des troubles civils et leur dilatation à l’espace européen, des années 1560 aux années 1620, voit l’émergence d’un personnel politique d’un type nouveau, les secrétaires, institué dans l’immédiat entourage du souverain.
Ces administrateurs de l’écrit, issus, pour une large part, de la meilleure société marchande parisienne, vont saturer de leur présence et de leur savoir-faire les nouveaux bureaux de la monarchie comme les institutions traditionnelles des cours et des conseils. Pour soutenir et défendre leur position de plus en plus éminente dans l’agencement institutionnel, ils vont développer et conjoindre, dans leurs portefeuilles, aux écrits de la pratique, dont ils sont d’éminents spécialistes, des écrits discursifs qui feignent l’antiquité de leurs techniques autant qu’ils affectent une certaine routine voire une fatigue de bureau.
Partant, ces dispositions professionnelles et pré-bureaucratiques vont devenir le ciment de relations d’amitiés avec les administrateurs des bureaux des monarchies voisines, à la faveur des contacts guerriers et cérémoniels.
C’est dans ce périmètre dense qu’on se demandera quels sont les impacts du contexte de crise politique sur la définition même d’une conduite experte des pratiques de gouvernement par des administrateurs qui inventent pour une très large part leurs outils et le discours qui le soutient au sein d’une société politique en intense recomposition.
On esquissera les contours transnationaux d’une république européenne des bureaux travaillée par les mêmes tensions autour de l’axe crise et expertise.
Enfin, on s’interrogera sur les sorties de crise politique, les moments de paix et de stabilisation des reconfigurations sociopolitiques pour se demander comment l’extraordinaire de l’expert devient le quotidien de l’administrateur, à hauteur d’hommes et de plumes.
1) The historical debate and its relationship with the history of the Reform
2) The geography of the problem
3) The new discourse of a reformed Art, Protestant and Catholic alike
En 2017 se celebra el V Centenario de un episodio fundamental en la historia de Europa: la Reforma, iniciada por el monje agustino Martín Lutero, que cuestionaba principios básicos de la Economía espiritual de la Iglesia Católica. Aunque la postura de Lutero a la postre resultó moderada, no faltaron predicadores más radicales que convirtieron las imágenes en uno de los verdaderos caballos de batalla de la Refor-ma, generando un Gran debate sobre el sentido de las imágenes religiosas, sin cuya existencia es imposible comprender el nacimiento de lo que llamamos Arte en la primera Edad Moderna. España no fue ajena a este debate, ni su posición fue, como se presenta en algunas ocasiones, inquebrantable y monolítica. Primero, porque una parte de la batalla tuvo que darse dentro de sus fronteras —como prueban los archi-vos de la Inquisición. Segundo, porque germinaron en su seno distintos movimientos contrarios al uso de las imágenes (los alumbrados, sin ir más lejos) e incluso los exportó fuera de sus fronteras (el Valdesianismo en Italia). Tercero, y último, porque España era parte de una geografía mucho más amplia, fluida y compleja, que la de la Península Ibérica: la Monarquía Católica. El objetivo de este taller consiste en analizar estos tres aspectos fundamentales:
1) El Debate histórico y su relación con la historia de la Reforma
2) La geografía del problema
3) El nuevo discurso de un Arte reformado, Protestante lo mismo que Católico
The crown in the sixteenth century has been infrequently examined in scholarly discourse. Nevertheless, akin to its representation during the Middle Ages, it emerges as an object, symbol, and theologico-political performance of the exercise of sovereignty, embodying both material reality and abstract concept. Yet, in an era torn asunder by the Wars of Religion, radical challenges to sovereign authority bring to the fore the issues and debates surrounding this unique emblem. Does the crown indeed underpin sovereignty? Is the bearer thereof truly worthy? What conditions ensure its orderly succession? The reign of Henry III epitomizes the dramatic encapsulation of these concerns: initially when in 1584, Henry of Navarre, a Protestant, becomes the presumptive heir; and subsequently in 1588, when the monarch orchestrates the assassination of the Duke of Guise and the Cardinal of Lorraine during the Estates General of Blois. Consequently, in a fervent quest for origins, the crown as an object becomes dissociated from the vilified monarch, to whom, much like his heretical heir, sovereignty, legitimacy, and ultimately the dignity to don the crown of France, is denied. The core issue during the reign of Henry III, revolving around the rightful claimant to the French crown, is a multifaceted interplay of law, lineage, orthodoxy, and dignity.
« bureaux » de la monarchie valoisienne afin de fonder nombre de décisions politiques complexes, de les rendre efficaces et de limiter leurs implications néfastes ?
Notre contribution propose d’opérer une plongée dans l’écheveau de correspondances inquiètes des secrétaires d’État du dernier souverain Valois du XVIe siècle afin de déterminer les raisons politiques et graphiques de ces nouveaux et nécessaires agents gouvernementaux d’un royaume dont l’appareil administratif se pense et se vit hanté par un double sentiment obsidional : celui de la dissension interne et des guerres étrangères.
« Le tremblé des correspondances. Information, préparation et projection des décisions politiques dans les « bureaux » des secrétaires d’État sous le règne de Henri III », dans T. Bru et S. de la Forest d’Armaillé (éds), Matière à écrire. Les échanges de correspondances du XVIe au XIXe siècle, Saint-Denis, Presses universitaires de Vincennes, 2017, p. 17-52.
Ces pièces révèlent des aspects qui se distribuent dans les trois mouvements de notre étude (structures des institutions de l’écrit ; l’exercice du pouvoir par le recours à l’écrit ; les reconfigurations européennes des sociétés politiques) et montrent la finesse de la mécanique de la préparation et de la projection de l’écrit comme celle qui règle le travail concret des bureaux de la monarchie.
Nous avons privilégié des pièces manuscrites inédites, éditées en suivant les règles édictées L’Édition des textes anciens, XVIe-XVIIIe siècle, sous la direction de Bernard Barbiche et Monique Chatenet, Paris, Inventaire général, 1990, 2e éd. 1993, coll. « Documents et méthodes », n° 1.
Ils créèrent ainsi, à l'échelle de leurs parentèles, des réflexes et des pratiques communs dans l'effectuation des décisions souveraines, jetant les bases d'un habitus de serviteur du roi, d'une langue et d'une science d'État. Autonomes dans un système aux normes qu'ils contribuèrent à inventer, pré-bureaucrates consacrés au service et aux volontés du prince, ils lièrent leur ascension à la montée en puissance de l'administration royale.
Le moment politique des années 1560-1610 est une crise, au sens plein du terme : on passe d'un compromis politique à un autre, d'une architecture politique centrée sur la personne du souverain, veillant au fragile équilibre entre les cours et les communautés, à une autre configuration, où l'exaltation de la majesté royale de la nouvelle dynastie Bourbon est la principale charge de secrétaires et de conseillers puissants, dans l'immédiat entourage du souverain.
https://chrhc.revues.org/5680
analyser la constitution et la gestion d’un espace politique sur dimensionné, sur lequel le soleil ne se couchait jamais et qui voulait porter en lui, par- delà ses diversités, l’imaginaire d’une monarchie universelle : un espace s’étendant des Pays-Bas à la Franche-Comté, des domaines patrimoniaux des HASBOURGS aux Royaumes Ibériques, de Naples à la Sicile, de la Sardaigne au Milanais, du Saint-empire aux Amériques.
Quels savoirs fondent en fait et en droit le pouvoir de l’écrit politique dans le contexte des troubles civils de religion ? Quelles instances sont chargées de la récollection experte des informations éparses, lacunaires et bruyantes qui parviennent des marges et du cœur du royaume, des potentats alliés et des nations ennemies ? Comment ces informations recueillies sont ensuite soigneusement lissées par le travail des « bureaux » de la monarchie valoisienne afin de fonder nombre de décisions politiques complexes, de les rendre efficaces et de limiter leurs implications néfastes ? Ces premières questions adressées aux volumineuses correspondances du principal secrétaire d’État français, de Charles IX à Louis XIII, Nicolas de Neufville, seigneur de Villeroy, tracent les contours de notre recherche doctorale.
Un des aspects centraux du travail des « bureaux » retient notre attention : il s’agit de la structuration d’intenses canaux d’informations pour relier ensemble de nombreux et nécessaires correspondants. L’analyse montre rapidement que cet objectif s’affronte à deux enjeux d’apparence contradictoire : comment transporter continûment l’information la plus fine et précise possible tout en la scellant aux nombreuses puissances et menées adverses ?
Dès lors, quelles sont les techniques du secret identifiables dans la documentation politique, façonnées et maniées par les secrétaires d’État ? Quels discours les acteurs politiques tiennent-ils sur leurs pratiques visant à assurer la confidentialité des dépêches ? Quelle utilisation publique et politique est réservée à l’interception des papiers d’États de potentats ennemis ?
Enfin, quelles sont les conséquences pour l’analyse historienne des techniques raffinées du secret, de la pratique de l’oralité, de l’allusion, des silences nombreux qui piègent et tordent les séries de correspondances, constituant ainsi des obstacles majeurs à la reconstitution de l’économie générale des papiers d’État.
Écumes des décisions, d’ensembles documentaires plus vastes mais détruits ou perdus, échos des murmures du cabinet royal et du chuchotement des « bureaux », les correspondances inquiètes de Villeroy invitent à une plongée dans une histoire potentielle et ouverte de l’État moderne.
Partant, notre propos tentera de déterminer par hypothèses les principales raisons politiques et graphiques de ces nouveaux et nécessaires agents qui structurent les arcanes du pouvoir royal dont l’appareil administratif se pense et se vit hanté par un double sentiment obsidional : celui de la dissension interne et des guerres étrangères.
Colloque "Arcana Imperii. Gouverner par le secret dans l’Espagne moderne". 16 et 17 avril 2015, Casa de Velázquez
https://www.casadevelazquez.org/pt/investigacao/noticia/arcana-imperii/
Notre intervention propose d’opérer une plongée dans l’écheveau de correspondances inquiètes des secrétaires d’État du dernier souverain Valois du XVIe siècle afin de déterminer les raisons politiques et graphiques de ces nouveaux et nécessaires agents gouvernementaux d’un royaume dont l’appareil administratif se pense et se vit hanté par un double sentiment obsidional : celui de la dissension interne et des guerres étrangères.
[Journée d'études du Centre Jean-Mabillon de l'École nationale des chartes et de l'ED Pratiques et théories du Sens, Université de Paris-VIII].
L’inflation documentaire sans précédent qui caractérise ce moment politique suppose la refonte des cadres traditionnels de la société politique et l’implantation, au cœur de l’État, d’un personnel aux horizons d’attente neufs pour soutenir cette réformation qui s’inscrit dans les conceptions politiques nouvelles des derniers Valois. Dès lors, une approche de l’État par la pratique et la consistance concrète du travail des « bureaux » de la monarchie administrative montre un projet politique mouvant, s’affrontant à la rugosité et aux malheurs des temps. Les innombrables décisions prises par les commis de chancellerie révèlent une histoire politique ouverte et potentielle. Sans faire l’économie d’une réflexion sur la notion problématique qu’est l’État moderne dans la récente historiographie, nous centrons l’analyse sur la jonction des intérêts d’une société politique qui lie son destin matériel au prince et la déclinaison des pratiques de ce groupe dans l’action de gouvernement. Ces agents vont, tout au long des guerres, créer des procédures de décision, inventer une langue administrative et tenir sur leur propre groupe, leur travail et leurs stratégies sociales un discours qui tend à se confondre avec le récit d’État et de bonne police. Un acteur en particulier nous semble rendre raison des profonds bouleversements de l’entourage royal : Nicolas de Neufville, seigneur de Villeroy. L’analyse de ses pratiques professionnelles et de ses conceptions politiques s’insère dans le courant récent de l’étude européenne des acteurs institutionnels. Nous tentons ainsi de lier pratiques et évènements, discours et cadres mentaux en dépliant ce qui fait la matière dense de la vie et des écrits du secrétaire de quatre rois de France (Charles IX, Henri III, Henri IV, Louis XIII). Nous lions l’édifice de papiers produit, la restitution d’une trajectoire politique et les réformes de l’entourage du roi dans les décennies 1580-1590. Nous tentons ainsi de comprendre comment Villeroy fonde, en fait et en droit, de nombreuses innovations politiques qui, sur près de cinquante ans, s’adossent à la configuration d’un imaginaire royal renouvelé.
[Journée d'études des doctorants du Centre Jean-Mabillon de l'École nationale des chartes - mai 2014]
http://www.enc.sorbonne.fr/actualite/recherche-centre-jean-mabillon/journee-d-etude-des-doctorants-du-centre-jean-mabillon
L’Occident chrétien de la fin du XVe siècle est alors marqué par une forte croissance urbaine et économique ; ce dynamisme est l’effet de la rapide récupération du temps des malheurs occasionnés par les pestes, les guerres et les famines des années 1350-1430. Si le fait urbain n’est pas majoritaire, les nouvelles configurations des villes se révèlent problématiques pour les autorités centrales et locales qui cherchent à en réguler les usages et les horizons d’attente multiples, ceux des masses foraines et populaires comme des nouveaux groupes élitaires de la marchandise et de la magistrature. On observe dès les années 1520 un double mouvement. Le dynamisme des centres urbains se mue en facteur de crise sous l’effet des Réformes. Les anciennes hiérarchies et solidarités corporatives et paroissiales sont renouvelées, perturbées et heurtées à la faveur des recompositions complexes dues aux divisions religieuses. Fait social total, le choix confessionnel induit des ruptures marquées dans les sociabilités, le bâti, les cérémonies, les usages des villes par leurs habitants. La violence et la radicalité sans précédents qu’occasionnent la poursuite et la destruction de l’hérétique ainsi que la recherche angoissée du salut dans la vraie foi sont autant de catégories d’analyse efficaces des crises qui déchirent les métropoles de l’époque moderne. Les barricades dont se hérissent les centres urbains du premier XVIe au premier XVIIe siècles sont les points de cristallisation des imaginaires et des nouvelles conceptions des technologies de pouvoir qui préfigurent et autorisent la lente émergence de la ville absolutiste.
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Argumentaire
A une époque qui voit l’information se multiplier tout en changeant de forme, il est nécessaire de s’interroger sur la question de la parole, depuis sa genèse moderne à sa profusion contemporaine, mais également à son impact. Le projet Anthropologie politique et religieuse de la parole (XVIe-XVIIIe siècle) vise à mettre en lumière l’importance de la problématique de la gestion de la parole dans les sociétés modernes. Dans un paradoxe tout à fait fascinant, la parole oscille entre abondance et rareté : le pouvoir qu’elle détient lui provient de cette dernière et son utilisation doit donc être parcimonieuse et, surtout, contrôlée. C’est ainsi que des stratégies communicationnelles et des acteurs institutionnels naissent ou se développent afin de maitriser la production, la diffusion et la réception de la parole politique. Cependant, ils ne sont pas seuls détenteurs du Verbe politique et les crises successives qui secouent la première modernité encouragent une amplification des discours : l’opposition se multiplie en même temps que les pôles de production, l’imprimerie rend la diffusion plus aisée mais plus incontrôlable, et le pouvoir sacré de la parole souveraine est mis à mal par de nouvelles concurrences. Dans la gestion politique des crises, la parole est alors à la fois problème et solution.
La première journée d’étude de ce projet sera organisée à l’université de Genève. Durant les différentes interventions, nous nous intéresserons à la parole promise et aux différentes formes que cet acte peut recouvrir (serment, charte, foi jurée, profession de foi, confession, menace, malédiction, etc.). S’interroger sur l’acte performatif qu’est le don de parole – comment jure-t-on et quelles sont les conséquences des mots prononcés ou signés ? −, c’est se questionner à la fois sur les modalités linguistiques, institutionnelles et rituelles qui sous-tendent cette pratique et, plus encore, repenser les liens de confiance et d’alliance, le capital symbolique mis en gage par les deux parties : qui jure, et pourquoi cette pratique revêt une telle importance dans la société d’Ancien Régime ?
Nous voulons interroger les éléments constitutifs de la parole jurée, en particulier son media (l’oral, l’écrit ou des formes hybrides) et son effectivité. Deux questions sont centrales : comment est construite la promesse ? Qu’est-ce qu’elle produit en termes d’impact sur le présent et le futur de la situation d’énonciation ? Il est alors nécessaire d’interroger la source de la valeur du serment, les gages donnés pour les parties, mais également les acteurs (producteurs et/ou détenteurs de la parole). Ces « jureurs » peuvent s’engager pour eux-mêmes, mais aussi pour une entité plus large, puisque jurer implique non seulement un gage personnel mais aussi communautaire, soit collectif et gouvernemental. De ce fait, peut-être faut-il envisager l’acte de jurer comme le symbole de la convergence de volontés plurielles. D’une parole jurée, on peut ainsi mettre en exergue les ressorts d’un dispositif politique et religieux largement utilisé et persistant, par une déconstruction minutieuse des contextes et des pratiques, afin d’observer sa pluralité en tant que discours et idées. Cela nous amènera à considérer l’économie de la parole dans son écriture, sa proclamation, sa conservation et ses changements.
Le champ de recherche couvre l’Europe occidentale de la première paix de Cappel jusqu’au traité de Westphalie. Un intérêt tout particulier sera consacré aux pensées transversales et interdisciplinaires capables d’apporter à la question de la parole des réponses à la fois historiques et issues d’autres sciences humaines, permettant donc de confronter différentes approches. Nous nous pencherons ainsi sur des sujets ciblés, afin de pouvoir rentrer dans le vif de cette parole juré, profuse et mystifiée : par exemple les préambules légaux et la manière dont ils introduisent les conjurés, les serments qui entourent les paix de religion, le règlement des conflits ou au contraire les déclarations de guerre, la promesse royale ou princière (qu’elle soit directe ou indirecte), les sermons de guerre, la traitrise et l’abjuration, les savoir-faire administratifs liés à l’acte du don de parole, la matérialité de cette pratique, la force perlocutoire des mots jurés, l’iconographie du serment, ses évolutions et ses permanences, etc.
Aurélien Taché, député LREM de la Xe circonscription du Val d’Oise et auteur d’un rapport sur l’intégration
Mercredi 17 octobre, salle Henri Cartan, ENS, 19h15
Citoyenneté, souveraineté, migrations : penser les droits des migrants
Une conférence du séminaire annuel Les Savants et les Politiques du Centre européen des études républicaines (CEDRE)
La loi Asile et Immigration a été adoptée au parlement et promulguée, non sans avoir suscité de très vifs débats. Elle s’inscrit dans une longue série de lois réglementant l’accès au territoire et à la citoyenneté des non-nationaux, dont le but est d’encadrer l’arrivée de migrants en Europe et de répondre aux défis qu’elle soulève. Mais ce travail législatif laisse en partie sans réponse des questions essentielles, qui touchent notamment aux questions de la citoyenneté et de la nationalité, des droits de l’homme et des droits des migrants.
Depuis la conception de la citoyenneté donnée par Révolution française – qui se passait de toute référence à une origine ou une nationalité – le statut de citoyen qui ouvre à la protection de la loi a fini par être juxtaposé avec l’idée de nationalité et les droits des individus garantis dans un cadre territorial précis. Cette situation n’est plus : non seulement parce que la Déclaration universelle des droits de l’Homme brise le lien entre citoyenneté et nationalité et interdit en théorie aux États de discriminer les individus en fonction de leur nationalité, mais parce que l’ampleur et la complexité du phénomène migratoire vient poser de nouvelles questions aux États.
On peut en prendre pour exemple les ébauches de citoyenneté européenne, autorisant les ressortissants européens à voter et à se présenter aux élections locales. Pourtant, il est difficile aujourd’hui de définir ces droits, puisque leurs sources sont multiples, à la fois nationales et internationales, et que leur force juridique varie en fonction des institutions qui les mettent en œuvre.
La définition des droits des migrants remet donc au centre des interrogations les droits économiques, sociaux et politiques dont chaque être humain pourrait se prévaloir, en dehors d’une citoyenneté qui est aujourd’hui essentiellement liée à l’État et avec lui à l’obtention de la nationalité.
Il est donc urgent de forger des outils intellectuels pour mieux comprendre le rapport des migrants à la citoyenneté, afin de sortir des cadres de débats prédéfinis et de la répétition des mêmes vérités tronquées dans lequel le débat public s’enferme trop souvent.
Responsable
Olivier Christin, directeur du CEDRE
Coordinateurs
Jérémie Ferrer-Bartomeu, Nicolas Iommi Amunategui
Organisation et communication
Olivier Demoures odemoures@gmail. com
Avec la participation de l’association Débattre en Sorbonne
La croissance du pouvoir souverain (royal et princier) en Europe depuis la fin du XV e siècle et pendant tout le XVI e siècle, s'inscrit dans le processus de formation de l'État moderne. Dans un continent constitué, en grande partie, d'États composites, ce mouvement s'est traduit, entre autres, par des réformes institutionnelles, comme celles relatives aux Conseils qui entouraient les souverains, leurs régents (pendant la minorité des rois), et leurs représentants (vice-rois, lieutenants généraux, gouverneurs) durant les absences des détenteurs du pouvoir suprême. S'appuyant sur les acquis d'une historiographie récemment renouvelée, ces deux journées approfondiront de manière inédite la situation des « États médians » en s'attachant à éclairer particulièrement la composition, le fonctionnement et les attributions des Conseils installés dans les pays comme la Navarre, le Béarn, la Savoie, la Transylvanie, etc., qui se trouvaient entre les sphères d'influence de leurs puissants voisins. Des chercheurs venant de plusieurs disciplines adopteront une perspective comparatiste pour évaluer à nouveaux frais le rayonnement des idées politiques et des pratiques gouvernementales dans l'Europe de la Renaissance.
La longue séquence des troubles civils et leur dilatation à l’espace européen, des années 1560 aux années 1620, voit l’émergence d’un personnel politique d’un type nouveau, les secrétaires, institué dans l’immédiat entourage du souverain.
Ces administrateurs de l’écrit, issus, pour une large part, de la meilleure société marchande parisienne, vont saturer de leur présence et de leur savoir-faire les nouveaux bureaux de la monarchie comme les institutions traditionnelles des cours et des conseils. Pour soutenir et défendre leur position de plus en plus éminente dans l’agencement institutionnel, ils vont développer et conjoindre, dans leurs portefeuilles, aux écrits de la pratique, dont ils sont d’éminents spécialistes, des écrits discursifs qui feignent l’antiquité de leurs techniques autant qu’ils affectent une certaine routine voire une fatigue de bureau.
Partant, ces dispositions professionnelles et pré-bureaucratiques vont devenir le ciment de relations d’amitiés avec les administrateurs des bureaux des monarchies voisines, à la faveur des contacts guerriers et cérémoniels.
C’est dans ce périmètre dense qu’on se demandera quels sont les impacts du contexte de crise politique sur la définition même d’une conduite experte des pratiques de gouvernement par des administrateurs qui inventent pour une très large part leurs outils et le discours qui le soutient au sein d’une société politique en intense recomposition.
On esquissera les contours transnationaux d’une république européenne des bureaux travaillée par les mêmes tensions autour de l’axe crise et expertise.
Enfin, on s’interrogera sur les sorties de crise politique, les moments de paix et de stabilisation des reconfigurations sociopolitiques pour se demander comment l’extraordinaire de l’expert devient le quotidien de l’administrateur, à hauteur d’hommes et de plumes.
1) The historical debate and its relationship with the history of the Reform
2) The geography of the problem
3) The new discourse of a reformed Art, Protestant and Catholic alike
En 2017 se celebra el V Centenario de un episodio fundamental en la historia de Europa: la Reforma, iniciada por el monje agustino Martín Lutero, que cuestionaba principios básicos de la Economía espiritual de la Iglesia Católica. Aunque la postura de Lutero a la postre resultó moderada, no faltaron predicadores más radicales que convirtieron las imágenes en uno de los verdaderos caballos de batalla de la Refor-ma, generando un Gran debate sobre el sentido de las imágenes religiosas, sin cuya existencia es imposible comprender el nacimiento de lo que llamamos Arte en la primera Edad Moderna. España no fue ajena a este debate, ni su posición fue, como se presenta en algunas ocasiones, inquebrantable y monolítica. Primero, porque una parte de la batalla tuvo que darse dentro de sus fronteras —como prueban los archi-vos de la Inquisición. Segundo, porque germinaron en su seno distintos movimientos contrarios al uso de las imágenes (los alumbrados, sin ir más lejos) e incluso los exportó fuera de sus fronteras (el Valdesianismo en Italia). Tercero, y último, porque España era parte de una geografía mucho más amplia, fluida y compleja, que la de la Península Ibérica: la Monarquía Católica. El objetivo de este taller consiste en analizar estos tres aspectos fundamentales:
1) El Debate histórico y su relación con la historia de la Reforma
2) La geografía del problema
3) El nuevo discurso de un Arte reformado, Protestante lo mismo que Católico
Titre de la communication : Paris, nid d’espions. Chiffrer et comploter pour
défendre la foi catholique en Europe de l’Ouest (1585-1595).
Résumé de la journée :
Desde la Antigüedad hasta nuestros días, la Península Ibérica ha sido objeto de varias representaciones, en mayor medida vinculadas con su situación geográfica. Por ejemplo, entre los autores griegos y latinos, su imagen se fue constituyendo a partir de relatos míticos que describían una especie de «El Dorado» en los límites del Occidente; los escritos de los geógrafos árabes muestran que hasta el siglo X, al-Andalus era una provincia muy periférica del mundo islámico, bastante desconocida del mundo oriental; al final del siglo XV, los reinados portugueses y españoles abren Europa al nuevo mundo; desde la perspectiva de los migrantes en la época contemporánea, surgen nuevos imaginarios relacionados con la Península. El objetivo de esta jornada doctoral es considerar de manera diacrónica, transdisciplinaria y multiescalar las diferentes representaciones y percepciones de las que la Península fue objeto. Esta investigación abarca todo tipo de fuentes: relatos de viajes, mapas, fuentes literarias, etc. Adoptando diferentes enfoques, el reto será analizar la situación y la posición de la Península en el mundo para poder definir los procesos de construcción de las representaciones mentales, tanto históricas como historiográficas. Por lo tanto, es fundamental determinar cómo estas representaciones, aunque estén basadas en la realidad vivida, difieren de ella. Visto como una periferia lejana o como una encrucijada abierta a las circulaciones, este espacio ubicado en el extremo occidental de Europa suscita varias preguntas respecto a la manera en que era percibido y en la que (se) lo representábamos a través de las épocas. Así, ¿De qué manera se construyen estas representaciones, productos de actores, sociedades y contextos diversos? ¿A través de qué medios han sido difundidas? ¿Qué reflejan y para qué fines han sido utilizadas? ¿Cómo considerarlas, teniendo en cuenta los debates historiográficos, antiguos y recientes, de los que fue objeto? ¿De qué manera permite la historia de las representaciones la constitución de un territorio «vivido»?
This study explores how the French Royal State establishes at the heart of its apparatus of power structures specialized in the manipulation, projection, and reception of political writing. These structures are intended to end the troubles of the Wars of Religion, to win political positions against corps and communities, and to strategically, politically, and theoretically arm both battles as well as military and ceremonial contacts across Europe. The actors in these new structures are secretaries of State and secretaries. From this exceptionally intense political crisis, they help bring about a new governmentality that prepares and announces the coming of the administrative monarchy and the pre-bureaucracies of the second part of the 17th Century. As the heart of the state and the conduit of royal desire, secretaries mobilize their professional skills in the service of the sovereign. Their functional position in the state grows into the cutting edge of a political society undergoing intense restructuring. They thus form an administrative society with codes, uses, and practices closely related to their Spanish and English European counterparts, following the increasing internationalism of the Wars of Religion. The heuristic concept of the European “Republic of bureaus” once more asks questions regarding the transnational circulation of administrative knowledge and the transfers of government models. The increased attention to the materiality of the work of government bureaus on the European scale gives this study the dimension of a cultural history of the State, centered on the games of actors and scales, the resolution of conflicts, and the collaboration and connections at the heart of networks of information.
Appel à contribution (Ab)jurer sa parole : promettre la guerre et s'engager pour la paix pendant les crises de l'époque moderne (XVIe-XVII e siècle)
Journées d'études, 17-18 février 2022, Université de Genève
A une époque qui voit l'information se multiplier tout en changeant de forme, il est nécessaire de s'interroger sur la question de la parole, depuis sa genèse moderne à sa profusion contemporaine, mais également à son impact. Le projet Anthropologie politique et religieuse de la parole (XVIe-XVIIIe siècle) vise à mettre en lumière l'importance de la problématique de la gestion de la parole dans les sociétés modernes.
Dans un paradoxe tout à fait fascinant, la parole oscille entre abondance et rareté : le pouvoir qu'elle détient lui provient de cette dernière et son utilisation doit donc être parcimonieuse et, surtout, contrôlée. C'est ainsi que des stratégies communicationnelles et des acteurs institutionnels naissent ou se développent afin de maitriser la production, la diffusion et la réception de la parole politique.
Cependant, ils ne sont pas seuls détenteurs du Verbe politique et les crises successives qui secouent la première modernité encouragent une amplification des discours : l'opposition se multiplie en même temps que les pôles de production, l'imprimerie rend la diffusion plus aisée mais plus incontrôlable, et le pouvoir sacré de la parole souveraine est mis à mal par de nouvelles concurrences. Dans la gestion politique des crises, la parole est alors à la fois problème et solution.
La première journée d’étude de ce projet sera organisée à l’université de Genève. Durant les différentes interventions, nous nous intéresserons à la parole promise et aux différentes formes que cet acte peut recouvrir (serment, charte, foi jurée, profession de foi, confession, menace, malédiction, etc.). S’interroger sur l’acte performatif qu’est le don de parole – comment jure-t-on et quelles sont les conséquences des mots prononcés ou signés ? −, c’est se questionner à la fois sur les modalités linguistiques, institutionnelles et rituelles qui sous-tendent cette pratique et, plus encore, repenser les liens de confiance et d’alliance, le capital symbolique mis en gage par les deux parties : qui jure, et pourquoi cette pratique revêt une telle importance dans la société d’Ancien Régime ?
vile, de conflit politique et religieux ? Comment l’information politique
et diplomatique circule-t-elle dans le champ de force des relations inter-
nationales de l’Europe de la première modernité ? Quelles techniques
administratives nouvelles les souverains mobilisent-ils pour faire face aux
contestations radicales et violentes de leur légitimité ? Quel rôle, enfin,
l’administration joue-t-elle dans la mise en ordre politique d’une réalité
rétive et oppositionnelle ?
Jérémie Ferrer-Bartomeu pose ces questions à la foisonnante produc-
tion écrite des hommes de plume de la monarchie des derniers Valois et
du premier Bourbon et relit l’histoire politique de la première moder-
nité. Il montre comment ce conflit civil puis européen devint le creuset
d’une nouvelle gouvernementalité. Au bruit des armes s’ajouta progres-
sivement le crissement de mille plumes au renfort de la gloire du roi,
participant ainsi à la réduction à l’obéissance et à la pacification d’un
royaume déchiré par la guerre. Secrétaires de la main, des commande-
ments, clercs du secret et du conseil privé, espions, transfuges et grands
officiers allaient former le socle de l’État.
Temps de chaos et de confrontation politique et religieuse, le second
xvie siècle est ici relu comme une séquence d’innovations administra-
tives majeures. Les professionnels de l’écrit forment la pointe avancée
de la société politique. Ils contribuent à l’élargissement des domaines
d’intervention de l’État et assurent, concrètement et quotidiennement,
l’exercice de l’autorité. Cette république européenne des bureaux en
formation traduit la mise en circulation transnationale de savoirs admi-
nistratifs et le transfert de modèles de gouvernement entre puissances
adverses et alliées.
Anne Dobigny-Reverso (Université d’Angers, Institut d’histoire du droit),
et Frédéric Gabriel (CNRS, IHRIM, Lyon)
avec la collaboration d’Isabelle Brancourt (CNRS, IHD)
dans le cadre de l’Institut d’histoire du droit Jean Gaudemet (Paris II-CNRS) et
du Labex CoMod (Université de Lyon) et de l’IRHIM (Lyon)
Année 2024-2025
Université Panthéon-Assas-Paris II
Institut d’histoire du droit, Centre Sainte-Barbe,
4 rue Valette, 75005 Paris
bâtiment C (à gauche dans le hall du Centre Sainte-Barbe), 3e étage
Salle Collinet ou Salle administration
16h30-18h30
Séminaire accessible également en visio-conférence