MARTIN (P.) (dir.), Limousin – Corrèze – Tarnac – Église Saint-Gilles-Saint-Georges. Site n° 64 103 FS.11.099. Rapport final d’étude archéologique, 3 vol., CRMH Limousin / SRA Limousin / Archeodunum, Colomiers, septembre 2012 (240 p.)., 2012
Durant les quatre semaines du mois de mars 2012, l’entreprise Archeodunum SAS a été chargée de ré... more Durant les quatre semaines du mois de mars 2012, l’entreprise Archeodunum SAS a été chargée de réaliser une étude archéologique de l’église de Tarnac (Corrèze) en vue de sa restauration. Le cahier des charges scientifique fixé par le Service Régional de l’Archéologie de la DRAC Limousin avait plusieurs objectifs. En premier lieu, il fallait de parfaire la connaissance archéologique de l’édifice en le documentant à la fois par l’étude du bâti (étude en plan et en élévation, y compris de la charpente) et des sondages au sol à l’intérieur et à l’extérieur de l’église. En second lieu, il s’agissait de documenter l’origine de certains désordres architecturaux. En dernier lieu, la prescription visait à rechercher un éventuel espace d’inhumation. L’opération archéologique a considérablement renouvelé la documentation relative à l’église Saint-Gilles-Saint-Georges en associant des sondages à l’étude des élévations et de la charpente. Ainsi a-t-on pu déterminer trois phases d’occupation du site antérieures à la construction de l’église du XIIe siècle et sa transformation à la fin du XVe siècle.
La première phase a été mise en évidence par la présence d’une fosse s’apparentant à un silo, signifiant que le site a pu être primitivement le lieu d’une occupation rurale. La chronologie relative permet d’envisager une datation du haut Moyen Âge selon un phénomène déjà observé en Limousin. Toutefois, aucune découverte de mobilier ne permet pour le moment de confirmer la nature ou l’époque. Riche en charbons, le prélèvement effectué dans le comblement de la fosse pourrait fournir des résultats intéressants tant par le radiocarbone que par une étude carpologique.
La seconde phase correspond à l’aménagement d’une maçonnerie dans le comblement de l’éventuel silo. La construction ne semblait pas se développer vers le sud-ouest. Faut-il en conclure qu’il s’agissait d’un angle ou d’une base de support ? Les techniques de mise en œuvre n’apportent a priori aucun indice de datation. L’orientation, en revanche, pourrait éventuellement être perpendiculaire à celle du mur retrouvé dans la partie sud du sondage 2. Une nouvelle fois, les éléments sont trop
fragmentaires et ne permettent ni mise en relation ni conclusion.
La troisième phase voit la construction d’un mur venant s’appuyer, à l’est, contre la maçonnerie implantée dans le comblement du silo supposé. Malgré son alignement commun avec le mur gouttereau sud de la nef, ce mur présente des techniques de construction différentes de celles du XIIe siècle : des moellons irréguliers liés par de la terre, en léger pendage vers l’est. Par ailleurs, la mise au jour de l’arase d’un mur de même facture semble-t-il et, surtout, à la même altitude, invite à considérer l’existence d’un bâtiment possédant le même alignement que l’église mais se développant plus à l’ouest. S’agit-il d’un édifice religieux antérieur ou d’un bâtiment à vocation agricole ? La largeur du mur atteint 0,80 m de largeur, ce qui permet d’envisager une élévation relativement importante. De même, l’aménagement contre une structure plus ancienne évoque les cas étudiés à la chapelle Saint-Martial de Toulx-Saint-Croix (Creuse) ou à Saint-Martin de Brive (Corrèze). L’identification, en revanche, d’un niveau de sol scellant des creusements n’ayant livré aucun ossement pose un double problème. D’une part, faut-il envisager le développement du bâtiment présumé au sud de l’église actuelle ? D’autre part, l’absence d’espace funéraire dans ce secteur paraît aller à l’encontre des sites limousins évoqués plus haut car ils étaient systématiquement associés à des sépultures. Y a-t-il eu un transfert de la zone d’inhumation ? Le terrain est-il trop acide ou trop humide pour avoir conservé les os ?
Les phases suivantes de l’évolution du site sont en rapport avec la construction de l’église au XIIe siècle. L’édifice a été bâti en deux campagnes probablement assez rapprochées dans le temps, comme en témoigne le caractère homogène du parti architectural : tout d’abord le chevet, constitué par l’abside polygonale et la travée droite, ensuite la nef à vaisseau unique de trois travées. Ces données sont intéressantes dans la mesure où elles permettent, d’une part, de dépasser les approches stylistiques de l’histoire de l’art et, d’autre part, de suivre la progression du chantier d’est en ouest. En ce sens, la présence hypothétique d’une église antérieure de même alignement – même parallèle – à l’ouest conduit à s’interroger sur les contraintes rencontrées par les constructeurs et les prérogatives imposées par les commanditaires, notamment la continuité de culte.
Les remplois placés de part et d’autre du portail du collatéral nord à la fin du XVe siècle laissent présager qu’ils provenaient d’une des travées du mur gouttereau nord de l’église. La représentation d’un Pierre Arbert, dont le nom est mentionné à cinq reprises dans le Cartulaire d’Uzerche entre 1096 et 1174, accompagné par saint Georges confirme la chronologie absolue de l’édifice – le milieu du XIIe siècle – et sa dédicace dès cette époque. On peut donc s’interroger sur le caractère ancien du vocable Saint-Gilles qui lui est aujourd’hui associé. Faut-il y voir la volonté d’un potentat local de rechercher la protection d’un saint militaire ?
Quant à la zone d’inhumation identifiée au chevet de l’édifice, elle est au moins postérieure à la construction du XIIe siècle. Le site a été largement perturbé – notamment des remblais et des réseaux contemporains – mais aucune sépulture ne semble avoir été recoupée par les maçonneries de l’abside polygonale pour ce qui a été observé dans le sondage. On rappellera cependant que la fondation de l’édifice n’a pas pu être atteinte en raison du niveau de la nappe phréatique mais, quoi qu’il en soit, tout porte à croire que le cimetière s’étendait sous l’actuelle place de l’église. Les éventuels projets de réaménagement du secteur – dans le but d’assainir les abords de l’édifice par exemple – devront donc au moins faire l’objet d’une surveillance archéologique.
Les dernières phases correspondent enfin à l’édification du collatéral nord de l’église et aux différentes transformations qui s’en suivirent. La construction semble homogène et a conservé la pente de la toiture sur le rampant du mur oriental mais également les sablières et les entraits du bas-côté, datés par dendrochronologie du premier tiers du XVIe siècle. Les éléments architecturaux pourraient éventuellement faire remonter quelque peu cette fourchette chronologique dans le dernier quart du XVe siècle mais la concordance globale des résultats n’invalide pas la proposition dendrochronologique.
La construction du collatéral nord entraîna également l’exhaussement général des murs de la nef. En conséquence, l’ensemble de la charpente et de la couverture de l’église fut repris à cette époque et ces travaux furent peut-être accompagnés par une fortification partielle à l’ouest de l’édifice.
Au milieu du XVIIIe siècle, l’ensemble des charpentes de l’église fut repris. Le poids de la nouvelle structure, probablement associé à une déstabilisation des murs gouttereaux depuis leur exhaussement et aggravé par un manque d’entretien, amena à plaquer deux contreforts très massifs sur sa face sud.
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bois, ce colloque réunira des chercheurs européens afin
de croiser les réflexions sur de nombreuses thématiques :
approvisionnement des chantiers et économie de la
construction, modes d’habitation, aspects structuraux, mise en
œuvre des matériaux et décor seront ainsi comparés sur une
longue période, s’étalant du xiiie
au xviiie
siècle. Archéologues,
historiens de la construction, ethnologues, chercheurs à
l’Inventaire ou architectes, par la diversité de leur approche,
éclaireront l’ensemble des caractéristiques et spécificités des
pans de bois, mettant en évidence particularismes et savoirfaire locaux, apparition de procédés novateurs ou au contraire
perpétuation de certaines techniques.
L’apport de l’archéologie du bâti constituera aussi un des fils
conducteurs de cette journée, car le recours à cette méthode
a permis une compréhension beaucoup plus approfondie
de l’architecture en pan de bois, en soulignant par exemple
la complexité des assemblages, le caractère modulaire et
« convertible » de ce type de bâtiments (rationalisation de
la construction, remaniements, déplacements) ou la pose de
pigments colorés et autres revêtements masquant ou mettant
en valeur les éléments de construction.
Après une journée d'études consacrée spécifiquement à l'architecture rurale en pan de bois en novembre 2019, ce colloque a pour but d'étendre la réflexion aux édifices sis en milieu urbain afin de détecter d'éventuelles interactions. Modes d'habitation, aspects structuraux, mis en oeuvre des matériaux et décor seront ainsi comparés sur une longue période, s'étalant du xiii e au xviii e siècle. Ces regards croisés sur différents pays européens permettront d'aborder les thèmes de l'approvisionnement des chantiers et de l'économie de la construction mais aussi de mettre en évidence des particularismes et savoir-faire locaux, l'apparition de procédés novateurs ou au contraire la perpétuation de certaines techniques. Archéologues, historiens de la construction, ethnologues, chercheurs à l'Inventaire ou architectes, par la diversité de leur approche, éclaireront l'ensemble des caractéristiques et spécificités des pans de bois. L'apport de l'archéologie du bâti constituera aussi un des fils conducteurs de cette journée, car le recours à cette méthode a permis une compréhension beaucoup plus approfondie de l'architecture en pan de bois, en soulignant par exemple la complexité des assemblages, le caractère modulaire et « convertible » de ce type de bâtiments (rationalisation de la construction, remaniements, déplacements) ou la pose de pigments colorés sur les éléments de construction et autres revêtement masquant ou mettant en valeur les éléments de construction. Appel à communication Bâtir en pan de bois à la campagne et à la ville aux xiii e-xviii e siècles : approche pluridisciplinaire d'une technique de construction en Europe. Colloque du 3 et 4 novembre 2020 © C. Alix © J. Noblet
Papers by Noblet Julien
Grâce aux observations et découvertes permises par la réalisation de sondages associée à la pose d'échafaudage, il a été possible de restituer le couronnement originel de la tour-porte des années 1166-1170d, ainsi que les différentes transformations effectuées au fil des siècles : de la construction d'une guette associée à l'aménagement de hourds jusqu'à la suppression des dispositifs sommitaux au moment de la construction d'une structure accolée, doublant la surface de la tour-porte désormais couverte d'une couverture à quatre pentes. En parallèle, l'observation de la face sud a permis de révéler un système de latrines à conduit biais mais également d'établir une première chronologie des modifications avec le logis sud, jouxtant la tour-porte.
bois, ce colloque réunira des chercheurs européens afin
de croiser les réflexions sur de nombreuses thématiques :
approvisionnement des chantiers et économie de la
construction, modes d’habitation, aspects structuraux, mise en
œuvre des matériaux et décor seront ainsi comparés sur une
longue période, s’étalant du xiiie
au xviiie
siècle. Archéologues,
historiens de la construction, ethnologues, chercheurs à
l’Inventaire ou architectes, par la diversité de leur approche,
éclaireront l’ensemble des caractéristiques et spécificités des
pans de bois, mettant en évidence particularismes et savoirfaire locaux, apparition de procédés novateurs ou au contraire
perpétuation de certaines techniques.
L’apport de l’archéologie du bâti constituera aussi un des fils
conducteurs de cette journée, car le recours à cette méthode
a permis une compréhension beaucoup plus approfondie
de l’architecture en pan de bois, en soulignant par exemple
la complexité des assemblages, le caractère modulaire et
« convertible » de ce type de bâtiments (rationalisation de
la construction, remaniements, déplacements) ou la pose de
pigments colorés et autres revêtements masquant ou mettant
en valeur les éléments de construction.
Après une journée d'études consacrée spécifiquement à l'architecture rurale en pan de bois en novembre 2019, ce colloque a pour but d'étendre la réflexion aux édifices sis en milieu urbain afin de détecter d'éventuelles interactions. Modes d'habitation, aspects structuraux, mis en oeuvre des matériaux et décor seront ainsi comparés sur une longue période, s'étalant du xiii e au xviii e siècle. Ces regards croisés sur différents pays européens permettront d'aborder les thèmes de l'approvisionnement des chantiers et de l'économie de la construction mais aussi de mettre en évidence des particularismes et savoir-faire locaux, l'apparition de procédés novateurs ou au contraire la perpétuation de certaines techniques. Archéologues, historiens de la construction, ethnologues, chercheurs à l'Inventaire ou architectes, par la diversité de leur approche, éclaireront l'ensemble des caractéristiques et spécificités des pans de bois. L'apport de l'archéologie du bâti constituera aussi un des fils conducteurs de cette journée, car le recours à cette méthode a permis une compréhension beaucoup plus approfondie de l'architecture en pan de bois, en soulignant par exemple la complexité des assemblages, le caractère modulaire et « convertible » de ce type de bâtiments (rationalisation de la construction, remaniements, déplacements) ou la pose de pigments colorés sur les éléments de construction et autres revêtement masquant ou mettant en valeur les éléments de construction. Appel à communication Bâtir en pan de bois à la campagne et à la ville aux xiii e-xviii e siècles : approche pluridisciplinaire d'une technique de construction en Europe. Colloque du 3 et 4 novembre 2020 © C. Alix © J. Noblet
Grâce aux observations et découvertes permises par la réalisation de sondages associée à la pose d'échafaudage, il a été possible de restituer le couronnement originel de la tour-porte des années 1166-1170d, ainsi que les différentes transformations effectuées au fil des siècles : de la construction d'une guette associée à l'aménagement de hourds jusqu'à la suppression des dispositifs sommitaux au moment de la construction d'une structure accolée, doublant la surface de la tour-porte désormais couverte d'une couverture à quatre pentes. En parallèle, l'observation de la face sud a permis de révéler un système de latrines à conduit biais mais également d'établir une première chronologie des modifications avec le logis sud, jouxtant la tour-porte.
face à la mort et en quête d’« éternité », se détournent des lieux
d’inhumation traditionnels préférant fonder des églises collégiales
à vocation funéraire. Ces initiatives témoignent de la réaction d’une partie de l’élite confrontée à la démocratisation de l’enterrement
ad sanctos et soucieuse de reposer dans un édifice dont la magnificence, tant dans le faste du service divin assuré par un collège nombreux aux multiples charges liturgiques, que dans la beauté de l’architecture accueillant les cérémonies, devait refléter le rang. Saintes-Chapelles pour les princes du sang et « simples » collégiales pour
les nobles de moins haut lignage accueillent des chanoines voués à prier pour le repos éternel de leur fondateur mais aussi de sa famille.
Ainsi s’établit un culte dynastique symbolisé par des tombes monumentales regroupées dans le chœur que s’approprie le fondateur, tandis que familiers et fi dèles prennent place dans la nef. La distinction entre espace seigneurial et paroissial, soulignée par les circulations, le traitement architectural et ornemental, concourt à renforcer la précellence seigneuriale. Enfin, l’implantation des sanctuaires familiaux à proximité immédiate des châteaux rappelle la dépendance du chapitre à l’égard de son fondateur mais témoigne surtout de l’attachement de ce dernier à la seigneurie rurale, garante de sa
noblesse.
L’apport de l’archéologie constituera aussi un des fils conducteurs : cette méthode a permis entre autres de révéler la complexité des assemblages et le caractère modulaire et « convertible » de ce type de bâtiments.
Auteur : Pierre MARTIN (UNI)
N° site : 45 234 025 AH
N° d’OA : 0612082
Responsable de l’opération : Pierre MARTIN (UNI)
Nature de l’opération : Projet collectif de recherche pluriannuel (PCRP), janvier à décembre 2021
Couverture géographique : Centre-Val de Loire > Loiret > Orléans > Cathédrale Sainte-Croix
Code INSEE de la commune : 45 234
Mots-clefs du thésaurus : Cathédrale, groupe épiscopal, architecture romane, architecture gothique, sous-sol archéologique, historiographie
Chronologie : Antiquité tardive, haut Moyen Âge, XIe siècle, XIIe siècle, XIIIe siècle, bas Moyen Âge, époque moderne, époque contemporaine
Peuples et cités : Orléans, Aurelianum
Keywords : Cathedral, episcopal quarter, romanesque architecture, gothic architecture, archaeological basement, historiography,
Late Antiquity, Early Middle Ages, 11th century, 12th century, 13th century, Late Middle Ages, Early modern period, Late modern period
Titre : Orléans
Sous-titre : Cathédrale Sainte-Croix
Depuis 2017, la cathédrale Sainte-Croix d’Orléans est l’objet d’un Programme collectif de recherche visant à reprendre l’ensemble des données relatives à l’archéologie du site. La démarche repose donc sur une vaste étude documentaire complétée, année après année, afin de porter de nouveaux éclairages sur le monument et de définir une stratégie de reprise des fouilles : plusieurs anciennes excavations demeurent en effet ouvertes au sein de l’édifice et laissent un accès direct aux « archives du sol ».
Après une année probatoire (2017) et une triennale (2018-2020), il est encore trop tôt pour fournir une synthèse des données collectées : celles-ci ne sont pas encore toutes reprises, l’ampleur de la tâche initiale et ses délais incompressibles ayant été fortement entravée par deux années de crise sanitaire, marquées par l’absence de réunions plénières. Toutefois, les résultats ont toujours été consignés régulièrement au travers d’un rapport chaque année.
Pour rappel, le rapport de l’année 2017 (année probatoire) a permis de présenter un premier état de la question sur les recherches menées sur la cathédrale d’Orléans tout en commençant à replacer le monument dans son contexte historique et archéologique. Il en ressortait notamment un problématique générale définie selon trois axes : 1/ l’implantation du christianisme à Orléans depuis la fin de l’Antiquité ; 2/ les chantiers cathédraux au Moyen Âge central ; 3/ la vie et la prière auprès de la cathédrale : chapitre et quartier canonial.
En raison de l’abondance de la documentation à l’échelle du site, il a été décidé, à partir du rapport de l’année 2018 (année 1 de la triennale), de recentrer les questions autour des deux premiers axes problématiques : il en ressort un bilan liminaire sur les sources alto-médiévales, l’historiographie du chanoine Chenesseau, un premier point sur les relevés par scanner 3D des espaces souterrains de la cathédrale, la reprise des données de fouilles anciennes et le pré-inventaire du mobilier déposé dans le sous-sol archéologique.
En 2019, le rapport annuel (année 2) a porté sur une probable nouvelle source iconographique, les diapositifs sur verre du fonds du chanoine Chenesseau, un second bilan des relevés de la cathédrale et une étude du mobilier issu des fouilles anciennes (1937 et 1986-1987) : céramique, matériaux de construction en terre cuite et sols construits.
Le rapport de l’année 2020 (année 3) a concerné le dépouillement du fonds Louis Jarry aux Archives départementales du Loiret, la représentation graphique des fouilles anciennes de la cathédrale afin d’en proposer un nouveau plan sur l’appui des relevés par scanner 3D, une étude des matériaux de construction en terre cuite ainsi qu’un inventaire du mobilier lapidaire. Préalablement à la remise de cette contribution annuelle, il avait été convenu avec le SRA Centre-Val de Loire que la triennale serait prolongée d’un an (année 2021).
À force de patience, les résultats des études lancées aboutissent, pour cette quatrième année de PCR pluriannuel, à alimenter les données documentaires sur la cathédrale Sainte-Croix d’Orléans. On rappellera également que les analyses concernant l’hagiographie alto médiévale et le scanner 3D du monument poursuivent leur progression, même si elles sont une nouvelle fois absentes dans le présent rapport. Pour l’année 2021, les apports documentaires consolident les perspectives qui ont pu être esquissées depuis le lancement du PCR, en 2017.
En premier lieu, l’étude sur les deniers « Sainte-Croix » d’Orléans apporte quelques informations, certes en demi-teinte, sur l’histoire du sanctuaire. Bien que le très faible nombre des découvertes monétaires portant mention de la cathédrale orléanaise ne permette guère d’être affirmatif, l’hypothèse de leur frappe avant la fin du VIIe siècle est proposée par Guillaume Blanchet. Cette mise au point est d’autant plus intéressante pour l’attestation du vocable en parallèle de la production hagiographique et notamment de la première Vita de saint Euverte. L’approche croisée de ces différents aspects de la recherche seront donc à discuter.
En second lieu, l’étude documentaire des archives contemporaines concernant l’installation du calorifère puis la création du sous-sol archéologique de la cathédrale d’Orléans proposée par Julien Noblet éclaire considérablement le contexte des fouilles anciennes, par ailleurs assez bien renseignées par les journaux de fouilles et le fonds Jarry. Elle permet en outre de constater un état relativement lacunaire des informations concernant l’exécution même des travaux et, plus largement encore, l’indigence des sources relatives aux transformations les plus récentes du site : dépose et repose des fragments de la grande mosaïque associées à des réseaux électriques et surtout la construction d’une dalle en béton en 1986-1987. Quoi qu’il en soit, ces informations seront bien évidemment à intégrer à l’historiographie des fouilles.
En troisième lieu, les études de mobilier alimentent concrètement les perspectives de la démarche engagée depuis 2017.
L’analyse des fragments de sols de mortier – le plus souvent associés à des décors de mosaïque – menée par Stéphane Büttner a conduit à déterminer l’existence de cinq types distincts dont deux peuvent être rapprochés de fragments datés par le radiocarbone.
Quant à l’étude des mosaïques de pavement réalisée par Maddalena Vaccaro, elle ouvre tant des pistes de recherche propres aux éléments de sols (mise en œuvre, décors, inscriptions) qu’une réflexion appuyée sur l’évolution du monument durant le haut Moyen Âge et le Moyen Âge central. Si le caractère spécialisé des analyses tend à fournir une vision quelque peu sectorielle des questions, il n’en demeure pas moins un large potentiel de discussion en vue de la synthèse à venir.
Il en va de même pour l’étude des sarcophages présents sur le site, sous la forme soit de contenant funéraires remployés soit de fragments débités et utilisés dans les maçonneries du Moyen Âge central. En l’attente de la contribution de Daniel Morleghem sur le mobilier lapidaire déposé dans le sous-sol archéologique de la cathédrale, les questions liées aux sépultures épiscopales et à l’organisation des chantiers successifs offrent là encore un cadre d’échanges particulièrement stimulant.
Enfin, l’inventaire du mobilier en verre réalisé par Jordi Mach indique une nouvelle fois le potentiel d’une fouille ancienne restée en large partie inexploitée. L’étude de ce mobilier sera réalisée pour le prochain rapport annuel.
Lentement mais sûrement, les analyses progressent : si certaines restent à livrer, les différents apports annuels invitent d’ores et déjà à des discussions entre les différents spécialistes réunis dans ce Projet collectif de recherche. La stratégie du programme peut donc être définie pour 2022 en une année supplémentaire destinée au bouclage des principales études engagées ou restantes et une amorce de réflexion de synthèse sur les questions les plus avancées par la mise en place de groupes de travail. De fait, l’année 2023 pourra être mise à profit pour la synthèse du PCR et l’éventualité d’une reprise des fouilles à partir de 2024.
En dépit de la découverte de vestiges antiques à proximité du site, aucune structure remontant au début de notre ère n’a été détectée, sans doute en raison des importants décaissements pratiqués aux époques postérieures. Cependant, l’intervention a été d’un grand intérêt pour la connaissance de l’évolution d’une partie de l’îlot au
Moyen Âge et à l’époque moderne.
Malgré l’impossibilité de les dégager, les caves situées perpendiculairement au front de rue permettent d’appréhender le parcellaire médiéval ponot. Quatre parcelles ont ainsi été mises en évidence sur le site et d’autres divisions ont été détectées immédiatement à l’est de la fouille, dans les soubassements de l’immeuble sis au n°12, rue de la Saulnerie (aumônerie). Ainsi a-t-on pu déterminer une organisation assez stricte montrant des parcelles d’environ 8 m de profondeur pour 4 m de largeur en moyenne, toutes dotées de caves. Probablement le cœur de l’îlot était-il non bâti, laissant ainsi l’opportunité de garder des zones vivrières intra muros. Les constructions se sont toutefois développées et ont colonisé cet espace progressivement à partir du début du XIIIe siècle, comme l’atteste l’exemple de la cave E, rejetée au sud-est sans accès sur la rue.
Les vestiges antérieurs au XIVe siècle offrent des informations intéressantes sur quelques aspects de la construction médiévale civile au Puy-en-Velay. Un des bâtiments reposait en effet sur des fondations dotées d’arcs permettant de concentrer le poids de la structure dans les angles et peut-être de répéter ce système dans l’élévation. Encore partiellement conservée en élévation, la maison du n° 7, rue des Farges, malheureusement reconstruite très récemment, pourrait offrir un point de comparaison assez pertinent. La variété des voûtements fournit en outre des critères chronologiques. Ainsi, la première cave à avoir été construite (cave C) présente un berceau brisé appareillé permettant d’associer une meilleure stabilité de la structure tout en élevant suffisamment le niveau à remblayer pour aménager le rez-de-chaussée. Après la construction de la cave D dont le voûtement originel a été complètement refait, la cave E possédait quant à elle un berceau plein-cintre appareillé à pénétrations de façon à dégager des ouvertures latérales au nord et au sud. Enfin, les caves A et E présentent des berceaux en plein-cintre appareillés dont les pénétrations présentent des voussoirs arêtiers traités en besace qu’il faut probablement attribuer au début de l’époque moderne.
Le reste du site, divisé en deux terrasses en raison de la déclivité du coteau, était occupé par différentes constructions. En limite sud-ouest de la terrasse supérieure nord a été mise au jour une petite cave (cave F) probablement transformée en fosse septique. Quant à la terrasse inférieure, au sud, elle a montré la présence de bâtiments successifs. Le plus ancien d’entre eux (bâtiment 1) est nécessairement antérieur à la fin du Moyen Âge ou au tout début de l’époque moderne car son mur sud a été repris pour une construction (bâtiment 2) datée de cette période par la céramique et le congé situé sur le seul piédroit en subsistant. Plus à l’est, en limite de la parcelle AD 568, une autre construction a été détectée. Sa datation n’a pas pu être établie mais elle était nécessairement antérieure aux XVIIe-XVIIIe siècles. La céramique et l’élévation conservée au sud de la fouille fournissent en effet un calage chronologique pour la mise en place d’un nouveau bâtiment (bâtiment 3) remonté sur son mur ouest. Enfin, un petit bâtiment (bâtiment 4) est venu se greffer à l’ouest de cette structure tout en préservant la présence d’un puits antérieur.
La fonction de ces constructions demeure incertaine. Les sources écrites permettent cependant d’appréhender le quartier à la fin de l’époque moderne. Très fortement taxé, l’îlot abritait en effet des marchands issus de riches familles ponotes mentionnées dès le XVIe siècle et continuait d’exercer un attrait sur les gens de robes comme des avocats, un procureur, le président du parlement, des ecclésiastiques ou des nobles. Dès le XIIIe siècle, le commerce du sel a dû constituer une part importante dans le statut social des riverains. Le nom de la rue est en effet attesté dès 1239 et se rapporte à la prérogative des habitants. Malgré la volonté de centraliser la denrée dans un lieu de stockage unique – un grenier – en 1549, il apparaît dans les textes qu’il s’agissait simplement de la cave d’un particulier.
- de compléter l’étude historique déjà réalisée par l’archiviste municipal (liens avec la géologie du site et notamment du Rocher, parcellaire) ;
- d’analyser le bâti du moulin (détermination et caractérisation des périodes de construction, molinologie, typologie de l’édifice, relevé succinct des élévations) ;
- de réaliser un fouille à l’extérieur du moulin pour en comprendre l’environnement.
Les investigations menées sur le site ont permis de répondre partiellement à ces différentes interrogations en fonctions de la nature des vestiges conservés. Ainsi, l’analyse archéologique du moulin de Pierrelatte a mis en évidence quatre états successifs de la construction que l’étude documentaire a permis de dater avec plus ou moins de précision.
Construit vers 1839 sur un terrain appartenant à Jean-François Pellegrin, boulanger, le moulin de Pierrelatte revêt un caractère assez singulier localement, tant par sa situation en plaine que par ses trois niveaux d’élévation. Le Rocher, dont proviennent sans doute les matériaux de construction, pourrait avoir joué un rôle dans l’implantation car il contribuait probablement à dévier le mistral. Quant aux trois niveaux du moulin, ils illustrent peut-être la volonté de développer la puissance de la
machine en juchant les deux étages sur une salle basse excavée – comme à Vallon-Pont-d’Arc (Ardèche), à Saint-Mitre-les-Remparts (Bouches-du-Rhône) ou au moulin de Rochegude à Saint-Clar (Gers) –, ayant pu également servir de stockage. Le moulin offrait en outre un habitat occasionnel, comme le suggèrent la présence d’une cheminée, d’une armoire murale – éléments comparables à ceux du moulin de Beauvert à Donzère (Drôme) – et probablement d’un système de récupération des eaux pluviales de la calotte vers le premier étage.
Ces éléments de confort relatif furent agrémentés par l’installation, vers 1852, d’une pompe à eau au pied du moulin, dont la base fut largement remblayée. Ces travaux sont sans doute en lien avec le creusement d’un bras de canal passant aux abords immédiats de la construction.
Malgré les moyens mis en œuvre pour sa réalisation, le moulin de Pierrelatte ne resta en activité que quelques dizaines d’années, entre 1839 et 1880. Les fils de Jean-François Pellegrin exercèrent également le métier de boulanger et sa fille épousa un meunier. Le moulin répondait donc de façon certaine aux besoins des activités professionnelles de la famille. Toutefois, deux générations plus tard, le moulin fut donné en 1872 par contrat de mariage à François Pommier, petit-fils par sa mère de Jean-François Pellegrin, qui exerçait l’activité d’ouvrier tanneur.
Il n’y avait donc plus la nécessité d’entretenir un moulin, dont la mise hors-service est attestée en 1880 et où il est porté à écurie sur le cadastre. Le mécanisme fut probablement démonté et entraîna la mise en place d’une couverture en appentis, la disparition de tous les aménagements intérieurs (cheminée, escalier, plancher supérieur) et, peut-être dans la foulée, l’installation de bâtiments accolés à la tour. Ceux-ci subsistèrent jusque dans les années 1990.
Etat du site à l’issue de l’intervention : Le moulin a été entièrement restauré immédiatement après l’intervention archéologique. Les ouvertures condamnées sur la face nord ont été débouchées. La surélévation maçonnée sur le chemin dormant et la toiture de tuiles en appentis qu’elle soutenait ont été détruites. Une calotte a été
refaite, ainsi que tout le mécanisme du moulin.
La première phase a été mise en évidence par la présence d’une fosse s’apparentant à un silo, signifiant que le site a pu être primitivement le lieu d’une occupation rurale. La chronologie relative permet d’envisager une datation du haut Moyen Âge selon un phénomène déjà observé en Limousin. Toutefois, aucune découverte de mobilier ne permet pour le moment de confirmer la nature ou l’époque. Riche en charbons, le prélèvement effectué dans le comblement de la fosse pourrait fournir des résultats intéressants tant par le radiocarbone que par une étude carpologique.
La seconde phase correspond à l’aménagement d’une maçonnerie dans le comblement de l’éventuel silo. La construction ne semblait pas se développer vers le sud-ouest. Faut-il en conclure qu’il s’agissait d’un angle ou d’une base de support ? Les techniques de mise en œuvre n’apportent a priori aucun indice de datation. L’orientation, en revanche, pourrait éventuellement être perpendiculaire à celle du mur retrouvé dans la partie sud du sondage 2. Une nouvelle fois, les éléments sont trop
fragmentaires et ne permettent ni mise en relation ni conclusion.
La troisième phase voit la construction d’un mur venant s’appuyer, à l’est, contre la maçonnerie implantée dans le comblement du silo supposé. Malgré son alignement commun avec le mur gouttereau sud de la nef, ce mur présente des techniques de construction différentes de celles du XIIe siècle : des moellons irréguliers liés par de la terre, en léger pendage vers l’est. Par ailleurs, la mise au jour de l’arase d’un mur de même facture semble-t-il et, surtout, à la même altitude, invite à considérer l’existence d’un bâtiment possédant le même alignement que l’église mais se développant plus à l’ouest. S’agit-il d’un édifice religieux antérieur ou d’un bâtiment à vocation agricole ? La largeur du mur atteint 0,80 m de largeur, ce qui permet d’envisager une élévation relativement importante. De même, l’aménagement contre une structure plus ancienne évoque les cas étudiés à la chapelle Saint-Martial de Toulx-Saint-Croix (Creuse) ou à Saint-Martin de Brive (Corrèze). L’identification, en revanche, d’un niveau de sol scellant des creusements n’ayant livré aucun ossement pose un double problème. D’une part, faut-il envisager le développement du bâtiment présumé au sud de l’église actuelle ? D’autre part, l’absence d’espace funéraire dans ce secteur paraît aller à l’encontre des sites limousins évoqués plus haut car ils étaient systématiquement associés à des sépultures. Y a-t-il eu un transfert de la zone d’inhumation ? Le terrain est-il trop acide ou trop humide pour avoir conservé les os ?
Les phases suivantes de l’évolution du site sont en rapport avec la construction de l’église au XIIe siècle. L’édifice a été bâti en deux campagnes probablement assez rapprochées dans le temps, comme en témoigne le caractère homogène du parti architectural : tout d’abord le chevet, constitué par l’abside polygonale et la travée droite, ensuite la nef à vaisseau unique de trois travées. Ces données sont intéressantes dans la mesure où elles permettent, d’une part, de dépasser les approches stylistiques de l’histoire de l’art et, d’autre part, de suivre la progression du chantier d’est en ouest. En ce sens, la présence hypothétique d’une église antérieure de même alignement – même parallèle – à l’ouest conduit à s’interroger sur les contraintes rencontrées par les constructeurs et les prérogatives imposées par les commanditaires, notamment la continuité de culte.
Les remplois placés de part et d’autre du portail du collatéral nord à la fin du XVe siècle laissent présager qu’ils provenaient d’une des travées du mur gouttereau nord de l’église. La représentation d’un Pierre Arbert, dont le nom est mentionné à cinq reprises dans le Cartulaire d’Uzerche entre 1096 et 1174, accompagné par saint Georges confirme la chronologie absolue de l’édifice – le milieu du XIIe siècle – et sa dédicace dès cette époque. On peut donc s’interroger sur le caractère ancien du vocable Saint-Gilles qui lui est aujourd’hui associé. Faut-il y voir la volonté d’un potentat local de rechercher la protection d’un saint militaire ?
Quant à la zone d’inhumation identifiée au chevet de l’édifice, elle est au moins postérieure à la construction du XIIe siècle. Le site a été largement perturbé – notamment des remblais et des réseaux contemporains – mais aucune sépulture ne semble avoir été recoupée par les maçonneries de l’abside polygonale pour ce qui a été observé dans le sondage. On rappellera cependant que la fondation de l’édifice n’a pas pu être atteinte en raison du niveau de la nappe phréatique mais, quoi qu’il en soit, tout porte à croire que le cimetière s’étendait sous l’actuelle place de l’église. Les éventuels projets de réaménagement du secteur – dans le but d’assainir les abords de l’édifice par exemple – devront donc au moins faire l’objet d’une surveillance archéologique.
Les dernières phases correspondent enfin à l’édification du collatéral nord de l’église et aux différentes transformations qui s’en suivirent. La construction semble homogène et a conservé la pente de la toiture sur le rampant du mur oriental mais également les sablières et les entraits du bas-côté, datés par dendrochronologie du premier tiers du XVIe siècle. Les éléments architecturaux pourraient éventuellement faire remonter quelque peu cette fourchette chronologique dans le dernier quart du XVe siècle mais la concordance globale des résultats n’invalide pas la proposition dendrochronologique.
La construction du collatéral nord entraîna également l’exhaussement général des murs de la nef. En conséquence, l’ensemble de la charpente et de la couverture de l’église fut repris à cette époque et ces travaux furent peut-être accompagnés par une fortification partielle à l’ouest de l’édifice.
Au milieu du XVIIIe siècle, l’ensemble des charpentes de l’église fut repris. Le poids de la nouvelle structure, probablement associé à une déstabilisation des murs gouttereaux depuis leur exhaussement et aggravé par un manque d’entretien, amena à plaquer deux contreforts très massifs sur sa face sud.