Mandibule de Montmaurin
Mandibule de Montmaurin | |||||
Coordonnées | 43° 13′ 50″ nord, 0° 37′ 55″ est | ||||
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Pays | France | ||||
Région | Midi-Pyrénées, Occitanie | ||||
Vallée | gorges de la Seygouade | ||||
Localité voisine | Montmaurin | ||||
Daté de | 190 ka à 240 ka | ||||
Époque géologique | Pléistocène moyen (période : Paléolithique moyen) | ||||
Découvert le | 1949 | ||||
Découvreur(s) | Raoul Cammas | ||||
Particularités | Diversité du Pléistocène moyen | ||||
Sexe | féminin ? | ||||
Identifié à | pré-néandertalien | ||||
Géolocalisation sur la carte : Haute-Garonne
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Géolocalisation sur la carte : Midi-Pyrénées
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La mandibule de Montmaurin est une mandibule humaine fossile découverte en 1949 dans la grotte de la Niche au site des grottes de Montmaurin en Haute-Garonne, France.
Ce fossile montre des caractères néandertaliens mélangés à des traits plus archaïques. Décrite tout d'abord comme « pré-néandertalienne », elle est considérée à l'époque de sa découverte comme le plus vieux fossile de France[1].
Les dernières études à ce jour (2020) la datent du MIS 7 (entre environ 190 000 à 240 000 ans AP).
Découverte
[modifier | modifier le code]La mandibule de Montmaurin est découverte par Raoul Cammas[n 1] le dans la grotte de la Niche[2], une diaclase[1] qui se trouve à côté de la grotte de Coupe-Gorge au niveau intermédiaire des grottes de Montmaurin (étagées sur trois niveaux)[3],[4],[5],[6].
Elle se trouvait dans la couche la plus ancienne, antérieure à la couche à grands bifaces acheuléens et proche de la couche à Machairodus[7].
Cette découverte se fait alors que la cavité a été mise au jour - de même que la plupart des autres grottes de Montmaurin -[8] juste après la fin de la deuxième guerre mondiale[9], par les carriers qui exploitent le calcaire de la falaise[8]. Le les grottes nouvellement dévoilées reçoivent la visite de l'abbé Henri Breuil et du comte Henri Bégouën, qui en confient les fouilles à Louis Méroc[9]. Méroc dirige les fouilles des grottes de Montmaurin pendant 15 ans de 1946 à 1961[10]. Mais il ne s'intéresse guère à la cavité de la Niche, qui selon lui ne présente pas de stratigraphie : il pense que la mandibule provient probablement « d’une très vieille couche à rhinocéros de Merck, de la grotte-abri de La Terrasse »[11].
Raoul Cammas pense différemment. Ayant noté la provenance de chaque objet découvert, y compris deux vertèbres et un tibia humains, une étude ultérieure faite conjointement avec André Tavoso donne la séquence stratigraphique du remplissage[12].
Études
[modifier | modifier le code]Vallois la décrit dans une courte publication, d'abord en français dans les Comptes-rendus hebdomadaires des séances de l’Académie des sciences (Vallois 1955) puis en anglais dans l'American Journal of Physical Anthropology (Vallois 1956[13]).
Quelque vingt ans plus tard, Billy & Vallois la publient plus en détail (Billy & Vallois 1977a et 1977b)[14]. Leur étude détaillée assied ce fossile dans le milieu paléo-anthropologique[1].
Elle est mentionnée par d'autres auteurs dont Rosas (2001)[15], Mounier, Marchal & Condemi (2009)[16].
Vialet et al. (2017) analysent la microstructure dentaire interne des six molaires présentes sur la mandibule à partir des données tomographiques fournies par le laboratoire AMIS de Toulouse[17], et publient une étude comparative en 2018[18].
Datations
[modifier | modifier le code]Elle est d'abord attribuée à Homo erectus[19], pour la deuxième partie du Pléistocène moyen[20] ou période interglaciaire Mindel-Riss (MIS (SIO) 9 à 11)[18], soit environ 370 à 410 000 ans AP (pour les dates du Mindel-Riss) ou 337 000 à 424 000 ans (pour les dates du MIS 9 à 11). Mounier et al. (2009) l'apparentent à Homo heidelbergensis[16], espèce afro-européenne selon eux[21], avec un âge de 400 000 ans[22].
Les études de Crégut-Bonnoure et al. (2010) l'assignent au MIS 7[18],[20] (soit environ 190 000 à 240 000 ans AP).
À la fin des années 2010, une nouvelle étude du matériel lithique replace ce fossile dans le dernier tiers du Pléistocène moyen (MIS 9 à 6)[20], soit entre 344 ka et 126 ka.
En 2020, Martínez et al. se basent sur une combinaison de données géomorphologiques et paléontologiques et la situent au MIS 7, entre les fossiles du Pléistocène moyen (Sima de los Huesos, la Caune de l'Arago) et les néandertaliens[23].
Description
[modifier | modifier le code]Selon Vialet et al. (2018) , la taille relativement petite de cette mandibule de jeune adulte, comparée à celle d'autres fossiles humains du Pléistocène moyen et notamment la mandibule AT-1 de la Sima de los Huesos à Atapuerca, suggère que l'individu a pu être une femme - avec des restrictions sur cette affirmation faute d'un nombre suffisamment grand de fossiles comparables.
La chronologie de son environnement n'explique pas le fait que cette mandibule n'ait que deux, voire tout au plus trois caractéristiques typiques des néandertaliens. Spécifiquement, les dents sont proches de celles des néandertaliens : la morphologie des surfaces de l'émail de ses molaires est typique des lignées néandertaliennes, celle de la jonction entre émail et dentine est également similaire à celle des néandertaliens, et la morphologie et les proportions de la cavité de la pulpe concordent elles aussi avec les caractéristiques néandertaliennes[23].
Mais la mandibule elle-même est nettement plus archaïque[24] : elle se rattache aux populations africaines et eurasiennes du début et du milieu du Pléistocène[25],[23]. Les épaisseurs absolue et relative de l'émail dentaire sont proches de celles de certains hominidés du début du Pléistocène[23]. Son aspect est plus primitif que les fossiles de la Sima de los Huesos, qui sont supposés être plus vieux[25].
Le même problème se retrouve avec la mandibule BH-1 trouvée à Mala Balanica en Serbie, qui ne présente aucun trait néandertalien et est elle aussi plus archaïque que le Pléistocène, comme son environnement lithique le suggère. La même logique s'applique au fossile de Ceprano, Italie. Comme ces autres fossiles et chacun avec ses caractéristiques uniques, celui de Montmaurin dément une évolution linéaire vers le néandertalien[25].
Conservation
[modifier | modifier le code]La mandibule de Montmaurin est conservée au Musée de l'Homme à Paris. Une copie est exposée au musée de Montmaurin[26].
Voir aussi
[modifier | modifier le code]Articles connexes
[modifier | modifier le code]Bibliographie
[modifier | modifier le code]- [Billy & Vallois 1977a] Ginette Billy et Henri Victor Vallois, « La mandibule pré-rissienne de Montmaurin », L’Anthropologie, vol. 81, no 2, , p. 273-312.
- [Billy & Vallois 1977b] Ginette Billy et Henri Victor Vallois, « La mandibule pré-rissienne de Montmaurin (suite) », L’Anthropologie, vol. 81, no 3, , p. 411-458 (résumé).
- [Billy 1982] Ginette Billy, « Les dents humaines de la grotte du Coupe-Gorge à Montmaurin », Bulletins et Mémoires de la Société d'Anthropologie de Paris, xIII, , p. 211-225 (lire en ligne [sur persee]).
- [Cammas & Tavoso 1986] Raoul Cammas et André Tavoso, « Nouveaux restes humains issus du remplissage de La Niche (Montmaurin, Haute-Garonne) », Comptes-rendus de l’Académie des sciences, 2e série, vol. 302, no 8, , p. 609-614.
- [Crégut-Bonnoure et al. 2010] Évelyne Crégut-Bonnoure, Nicolas Boulbes, Claude Guérin, Jacques Pernaud, André Tavoso et Raoul Cammas, « Le contexte géomorphologique et faunique de l’homme de Montmaurin (Haute-Garonne) », Préhistoires Méditerranéennes, (lire en ligne [sur journals.openedition.org], consulté le ).
- [Gaillard 1982] Claire Gaillard, « L'industrie lithique du Paléolithique inférieur et moyen de la grotte de Coupe-Gorge à Montmaurin (Haute-Garonne) », Gallia Préhistoire, vol. 25, no 1, , p. 79-105 (lire en ligne [sur persee]).
- [Martínez et al. 2020] (en) Marina Martínez de Pinillos, Laura Martín-Francés, José María Bermúdez de Castro, Cecilia García-Campos, Mario Modesto-Mata, María Martinón-Torres et Amélie Vialet, « Inner morphological and metric characterization of the molar remains from the Montmaurin-La Niche mandible: The Neanderthal signal », Journal of human evolution, (lire en ligne [sur academia.edu], consulté le ).
- [Méroc 1963] Louis Méroc, « Les éléments de datation de la mandibule humaine de Montmaurin (Haute-Garonne) », Bulletin de la Société géologique de France, vol. 7, no 5, , p. 508-515 (résumé).
- [Serra-Joulin 2002] Danielle Serra-Joulin, « Les industries lithiques de la grotte de la Terrasse à Montmaurin (Haute-Garonne) », Préhistoires méditerranéennes, vol. 10-11, (lire en ligne [sur journals.openedition.org], consulté le ).
- [Vallois 1955] Henri Victor Vallois, « La mandibule humaine pré-moustérienne de Montmaurin », Comptes-rendus hebdomadaires des séances de l’Académie des sciences, no 240, , p. 1577-1579.
- [Vallois 1956] (en) Henri Victor Vallois, « The premousterian human mandible from Montmaurin », American journal of Physical Anthropology, no 14, , p. 319-324.
- [Vialet et al. 2017] Amélie Vialet, Marina Martínez de Pinillos, María Martinón-Torres, José María Bermúdez de Castro, Benoît Bertrand et Thomas Colard, « Résultats préliminaires du récolement et de l'étude des fossiles humains des grottes de Montmaurin (Haute-Garonne, France) », Publication, (lire en ligne [sur researchgate.net], consulté le ).
- [Vialet et al. 2018] (en) Amélie Vialet, Mario Modesto-Mata, María Martinón-Torres, Marina Martínez de Pinillos et José-María Bermúdez de Castro, « A reassessment of the Montmaurin-La Niche mandible (Haute Garonne, France) in the context of European Pleistocene human evolution », PLoS ONE, vol. 13, no 1, (lire en ligne [sur journals.plos.org], consulté le ).
- [Vialet 2019] Amélie Vialet, « Interruption dans le processus de transmission du savoir : exemple des grottes préhistoriques de Montmaurin (Haute-Garonne) fouillées par Louis Méroc (1904-1970) », dans Michel Sot (dir.), Pratiques de la médiation des savoirs, Paris, Éditions du Comité des travaux historiques et scientifiques, , sur books.openedition.org (ISBN 9782735508983, lire en ligne).
Notes et références
[modifier | modifier le code]Notes
[modifier | modifier le code]- Raoul Cammas (Montans, 1905 - Péguilhan, 1987) est huissier de justice à Boulogne-sur-Gesse, habitant localement. Il passe régulièrement au chantier de fouilles et s'intéresse notamment à la diaclase formant la Niche[1].
Raoul Cammas est né à Gaillac (Tarn) le 23 avril 1905 et il est décédé à Boulogne-sur-Gesse (Haute-Garonne) le 1er octobre 1987.
Références
[modifier | modifier le code]- Vialet 2019, paragr. 22.
- Crégut-Bonnoure et al. 2010, paragr. 38.
- Billy 1982, p. 212, plan d'ensemble des grottes.
- Crégut-Bonnoure et al. 2010, paragr. 5, schéma général des grottes de Montmaurin.
- Crégut-Bonnoure et al. 2010, paragr. 7, fig. 2 : « Vue générale de la Niche et de son remplissage. La flèche indique l’emplacement de la mandibule humaine. À gauche Raoul Cammas ».
- Crégut-Bonnoure et al. 2010, paragr. 20, fig. 4 : « Vue générale du karst de Montmaurin », avec une flèche pointant sur la Niche.
- Méroc 1963, résumé.
- Gaillard 1982, p. 79.
- Vialet 2019, paragr. 3.
- Serra-Joulin 2002, résumé.
- Méroc 1963, p. 515. Cité dans Vialet 2019, paragr. 23.
- Cammas & Tavoso 1986. Cité dans Vialet 2019, paragr. 23.
- Vallois 1955 et Vallois 1956 : cités dans Vialet et al. 2018, Introduction.
- Billy & Vallois 1977a et Billy & Vallois 1977b. Cité dans Vialet et al. 2018, Introduction.
- [Rosas 2001] Antonio Rosas, « Occurrence of Neanderthal features in mandibles from the Atapuerca-SH site », American Journal of Physical Anthropology, vol. 114, , p. 74–91 (PMID 11150054).
- [Mounier, Marchal & Condemi 2009] (en) Aurélien Mounier, François Marchal et Silvana Condemi, « Is Homo heidelbergensis a distinct species? New insight on the Mauer mandible », Journal of human Evolution, vol. 56, no 3, , p. 219-246 (lire en ligne [sur academia.edu], consulté le ), p. 238. Cité dans Crégut-Bonnoure et al. 2010, paragr. 3 et Vialet et al. 2018, Introduction.
- Vialet et al. 2017, résumé.
- Vialet et al. 2018, résumé.
- Vallois 1955 ; Vallois 1956 ; Méroc 1963 ; Billy & Vallois 1977a ; Billy & Vallois 1977b. Cités dans Crégut-Bonnoure et al. 2010, paragr. 3.
- Vialet et al. 2018, Introduction.
- Mounier et al. 2009, p. 241.
- Mounier et al. 2009, p. 222.
- Martínez et al. 2020, résumé.
- Vialet et al. 2017.
- Vialet et al. 2018, Discussion.
- « La mandibule de Montmaurin (31) », sur comminges-actu.com, (consulté le ).