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George Stinney

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George Stinney
Photos anthropométriques de George Stinney en 1944.
Biographie
Naissance
Décès
Voir et modifier les données sur Wikidata (à 14 ans)
ColumbiaVoir et modifier les données sur Wikidata
Nom dans la langue maternelle
George Junius Stinney Jr.Voir et modifier les données sur Wikidata
Nationalité
Autres informations
Condamné pour
Double meurtre (en)Voir et modifier les données sur Wikidata
Vue de la sépulture.

George Junius Stinney Jr., né le à Pinewood (Caroline du Sud) et mort le à Columbia (Caroline du Sud), est un Afro-Américain de 14 ans injustement condamné à la peine de mort pour le meurtre de deux fillettes de 8 et 11 ans qu’il n’avait pas commis en .

Il est l'un des plus jeunes justiciables injustement exécutés de l'histoire des États-Unis. En , une cour de circuit annule le jugement, estimant que ses aveux ont été forcés, en violation du sixième amendement de la Constitution des États-Unis.

George Junius Stinney Jr. naît le , à Pinewood, dans l'État de Caroline du Sud, aux États-Unis. Sa mère occupe un emploi dans une cantine et son père est employé dans une scierie[1].

Double meurtre

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Le , près de la voie ferrée qui marque la séparation entre quartiers noirs et quartiers blancs, à Alcolu (en), une cité ouvrière ségréguée dans le comté de Clarendon, George Stinney, adolescent noir, croise Betty June Binnicker, 11 ans, et Mary Emma Thames, 7 ans, deux fillettes blanches sorties à vélo cueillir des fleurs[1],[2]. Dans la soirée, les deux enfants sont déclarées disparues. George Stinney et son père se joignent à la battue organisée pour les retrouver[3]. Le , les cadavres de Betty Binnicker et Mary Thames sont retrouvés dans un fossé proche du lieu de résidence de la famille Stinney. Les deux enfants ont été battues à mort[1].

Arrestation

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Le même jour, la police locale se rend au domicile des Stinney et arrête George Stinney, reconnu dernière personne à avoir vu les deux fillettes vivantes. Sa famille, qui a interdiction de lui rendre visite, comprend qu'elle n'est plus en sécurité. Les Stinney abandonnent leur maison et fuient Alcolu[3],[2],[1].

Le , malgré l'absence de toute preuve matérielle, George Stinney est accusé d'homicide avec préméditation[4].

Le procès a lieu le dans le palais de justice du comté de Clarendon, en présence de 1 500 personnes. Il commence à 12 h 30 et dure trois heures, au cours desquelles l'avocat de George Stinney n'intervient à aucun moment[1],[5],[6]. Au terme de la procédure, les membres du jury, composé de douze hommes blancs, déclarent l'adolescent coupable, après dix minutes de délibérations[1],[6]. La loi de Caroline du Sud juge alors en tant qu'adulte tous ceux qui ont au moins quatorze ans[2],[6]. Stinney est condamné à mort par la chaise électrique[2],[5]. La NAACP et plusieurs églises locales demandent au gouverneur Olin D. Johnston (en) d'annuler l'exécution. Il s'y refuse[5].

L'exécution a lieu dans une prison à Columbia le soir du , soit moins de trois mois après le crime[4],[7]. Stinney marche jusqu'à la chambre d'exécution avec un gros annuaire téléphonique ou une Bible qui fera office de siège rehausseur[4],[7]. En effet, en raison de sa petite taille, il est difficile de l'attacher à la chaise. Le masque, conçu lui aussi pour un visage adulte, tombe pendant l'électrocution, exposant son visage aux témoins. Stinney est déclaré mort au bout de huit minutes[4],[7].

George Stinney est l'un des plus jeunes justiciables injustement exécutés de l'histoire des États-Unis[8],[1].

Révision du procès

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En , soit soixante-dix ans après l'exécution, à la suite notamment de recherches faites par un historien local, l'affaire est réexaminée lors d'un procès en annulation introduit notamment par la sœur de George Stinney. Au cours de ce procès, la juge Carmen Mullen déclare que Stinney « pourrait bien avoir commis ce crime » (« may well have committed this crime ») mais que sa décision porterait sur la question de savoir s'il avait bénéficié d'un procès équitable[9]. Pointant les multiples anomalies du procès et estimant que ses aveux avaient probablement été forcés et étaient irrecevables, la juge Mullen annule le jugement ayant condamné George Stinney, estimant que ses droits avaient été bafoués lors de son procès et qu'il n'avait pas pu avoir une défense équitable[9]. Elle conclut également que l'exécution d'un garçon de quatorze ans constitue une « peine cruelle et inhabituelle » et que son avocat « ni ne l'avait appelé à témoigner, ni n'avait préservé ses droits d'appel »[9].

Un article de The Guardian met en lumière le caractère expéditif de son procès et des conditions dans lesquelles ses aveux furent obtenus, alors que rien ne permettait de l'inculper du meurtre des deux fillettes[9].

Les membres de la famille de Betty Binnicker et Mary Thames expriment leur déception face à la décision du tribunal. Bien qu'ils désapprouvent l'exécution de Stinney à l'âge de 14 ans, ils n'ont jamais douté de sa culpabilité, malgré la confession de culpabilité d'un tiers sur son lit de mort, laquelle n'a jamais été étayée selon eux[10].

Postérité

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L'affaire George Stinney est la source d'inspiration de plusieurs œuvres littéraires. En , David Stout publie Carolina Skeletons. Pour ce livre, l'écrivain américain remporte le prix Edgar-Allan-Poe du meilleur premier roman[1]. Une adaptation cinématographique, réalisée par John Erman, sort en  : Carolina Skeletons (Un coupable idéal). Kenny Blank y joue le rôle de Linus Bragg, le personnage inspiré par Stinney[1],[11].

En , le film La Ligne verte de Frank Darabont présente des similitudes avec l'affaire George Stinney. John Coffey, l'un des personnages du long métrage, est notamment désigné à tort coupable du meurtre de deux fillettes blanches[12],[1].

En , paraît Joe Steanay de Georges Cocks puis, en , Florence Cadier publie Né coupable. Les deux romans retracent l'affaire[1],[13]. En , dans Missié, Christophe Léon redonne vie à George Junius Stinney Jr., sous le nom de Martin Julius Crow Jr., en référence aux lois Jim Crow, maintenues dans les États du sud, de à , afin d'empêcher les Afro-Américains d'exercer leurs droits[1].

Notes et références

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  1. a b c d e f g h i j k et l Nicolas Michel, « Se souvenir de George Stinney Jr, exécuté en 1944 à 14 ans », Jeune Afrique, (consulté le ).
  2. a b c et d (en) Lindsey Bever, « It took 10 minutes to convict 14-year-old George Stinney Jr. It took 70 years after his execution to exonerate him », The Washington Post, (consulté le ).
  3. a et b Richard Hétu, « Électrocuté à 14 ans, disculpé 70 ans plus tard? », La Presse, (consulté le ).
  4. a b c et d « George Stinney : exécuté à 14 ans, innocenté par un juge 70 ans après », sur LCI, (consulté le ).
  5. a b et c (en) Hannah Rappleye, Lisa Riordan Seville et Mark Potter, « Advocates push for retrial to clear name of 14-year-old 'killer' executed in 1944 », sur NBC News, (consulté le ).
  6. a b et c (en) Lisa Riordan Seville, « Exonerated After Execution: Judge Tosses Teen's Murder Conviction », sur NBC News, (consulté le ).
  7. a b et c (en) Loulla-Mae Eleftheriou-Smith, « He was 14 when he was executed. More than 70 years later, this boy has been exonerated », sur The Independent, (consulté le ).
  8. (en) Stuart Banner, « When Killing a Juvenile Was Routine », The New York Times,‎ (lire en ligne [archive du ]).
  9. a b c et d (en) Karen McVeigh, « George Stinney was executed at 14. Can his family now clear his name? », sur The Guardian, (consulté le ).
  10. (en-US) Nikki Gaskins, « Goose Creek woman, others hope George Stinney murder conviction sticks », Berkeley Observer,‎ (lire en ligne).
  11. « Un coupable idéal » (présentation de l'œuvre), sur l'Internet Movie Database.
  12. (en-US) Lindsey DeRoche, « Is The Green Mile Based On A True Story? The Answer Is Complicated », sur ScreenRant, (consulté le ).
  13. Paul-François Sylvestre, « Né coupable, de Florence Cadier : illustration glaçante de racisme », sur l-express.ca, (consulté le ).

Article connexe

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Liens externes

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