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Blaise de Vigenère

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Blaise de Vigenère
Biographie
Naissance
Décès
Voir et modifier les données sur Wikidata (à 72 ans)
ParisVoir et modifier les données sur Wikidata
Pseudonyme
GraanVoir et modifier les données sur Wikidata
Formation
Activités

Blaise de Vigenère, né le à Saint-Pourçain-sur-Sioule et mort le à Paris, est un diplomate, cryptographe, kabbaliste traducteur, alchimiste et astrologue français.

Cependant, ce secrétaire d’ambassade, voyageur de carrière et de plaisir, qui fréquenta les armées et eut une existence dissipée et aventureuse, fut également un homme d’étude prodigieux et un des auteurs les plus féconds de son époque.

De famille connue, et noble depuis le quinzième siècle, son père, Jean, contrôleur ordinaire des guerres, lui fait donner une éducation classique très poussée, l’envoyant pour cela à Paris. L’adolescent en profite avec zèle puisqu'avide de connaissances, il étudie encore à l'âge mûr. Ces maîtres sont pour le grec et l’hébreu, Turnèbe et Dorat.

Il connait une existence très mouvementée : encore tout jeune, il contribue à la campagne contre les Impériaux, en 1543, puis accompagne, en 1545, l’envoyé de France, Louis Adhémar de Grignan, à la diète de Worms.

Pendant plusieurs années, il voyage pour son compte, parcourant en particulier l’Allemagne et la Hollande, ce, jusqu'en 1547 date à laquelle il devient ensuite, à vingt-quatre ans, secrétaire du duc de Nevers. Il conserve cette charge jusqu’à la mort de ce seigneur et de son fils en 1562.

En 1549, il visite Rome au cours d’une mission diplomatique de deux ans et il y retourna en 1566, à l'ordre de Charles IX lorsqu'il y sera nommé secrétaire d’ambassade, y restant trois ans jusqu'en 1569. Pendant ces deux séjours, il lit des livres traitant de cryptographie et entra en contact avec des cryptologues. Entre-temps, l'année 1565 le voit approfondir ses connaissances linguistiques, notamment dans les langues grecques et hébraïques[1].

Enfin, c'est en 1570 et sous Henri III, qui a beaucoup d'estime pour lui, que le brillant intellectuel est promu «secrétaire de la Chambre de la Majesté du Roy», il se marie avec une certaine Marie Varé, le 24 juillet de la même année[1].

Quand Vigenère prend sa retraite, à 47 ans, il offre sa pension annuelle de 1 000 livres aux pauvres de Paris. Au cours de sa retraite, il écrit plus de vingt livres, dont : le Traicte de Cometes ou étoiles chevelues[2]et le Traicte des Chiffres[3] (1586). Dans son Traicte des Chiffres, il décrit un chiffrement à clé de son invention.

Il meurt d'un cancer de la gorge. Sa tombe est à l'église Saint-Étienne-du-Mont[note 1].

Contributions

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Écrits et traductions

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Vigenère n'avait guère commencé à écrire qu’à cinquante ans. Ses livres témoignent d’une érudition très vaste, mais lourde, diffuse, encombrée d’occultisme. Ils n’en eurent pas moins un succès extraordinaire.

Sans doute l'un des premiers théoriciens de la traduction ; ses ouvrages traitant du sujet, jugés par certains d'un style peu élégant, sont néanmoins vantés par ses contemporains, comme par les spécialistes, en particulier pour la subtilité littéraire desdits textes, à l'instar du psaultier de David tornez en prose mesurée, remarquable par l'utilisation de ce dernier procédé. Il est aussi le seul contemporain à avoir laissé un compte rendu critique des artistes du XVIe siècle.

Astrologie et alchimie

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En tant qu'astrologue gnostique, Vigenère s'attacha à la nature des comètes, tandis que sur le plan de l'Alchimie, il décrivit le caractère et les propriétés des acides benzoïques[1].

Cryptographie : le Chiffre de Vigenère

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La paternité de ce qu'on appelle le « chiffre de Vigenère » revient plutôt à Giovan Battista Bellaso, qui a publié son travail en 1564.

Le chiffrement présenté par Vigenère en 1586 a toutefois quelques différences avec celui de Bellaso. Bellaso se servait d'une « table réciproque » à cinq alphabets de son invention ; Vigenère en utilisait dix. Bellaso basait son chiffrement sur la première lettre du mot ; Vigenère le basait sur une lettre sur laquelle les correspondants s'étaient mis préalablement d'accord.

Cryptographie: Kabbale

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Alphabet hébraïque dit « boulé » utilisé dans la Kabbale.

La Table de Blaise de Vigenère

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Le souci de garder le secret du Nom Ineffable, le « Chem Hamephorah » et la préoccupation de créer d’autres noms divins de substitution ont conduit les mystiques à utiliser divers artifices et constructions cryptographiques qui sont autant de codes et de grilles qu’il faut savoir déchiffrer et lire.

Dans son livre de 1989, Les Talismans: Magie et traditions juives , qui se concentre sur la tradition juive de la kabbale, l'ethnologue David Rouach[4] publie pour la première fois la Table complète de toutes les commutations d’alphabet hébraïque recensée par Vigenère dans son Traité des chiffres ou secrètes manières d'écrire. Cette méthode de combinaison ou de permutation des lettres est appelée le Tserouf. Cette combinaison des lettres est considérée comme le procédé kabbalistique type.

Les 22 clés du tserouf en hébreu de Blaise de Vigenère.

Dans son traité des chiffres Vigenère va traduire cette liste en alphabet latin

Les 22 clés du tserouf

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C’est l’ethnologue David Rouach qui va, en 1989, percer la clé de fonctionnement de cette table. Le principe du chiffrement de Vigenère introduit la notion de clé. La Table de Vigenère contient 22 clés numérotées de 1 à 22 sur la colonne verticale.

La clé se présente sous la forme de 4 lettres de l’alphabet hébraïque.

Exemple 1: la clé Ath bash ou את/בש. C’est la 22e clé dans sa Table. Elle prend son nom des 4 premières lettres qui se trouvent sur la ligne horizontale au numéro 22.

Exemple 2: la clé אב/גת ou av/gath. Il s’agit de la 2e clé de la Table. Les quatre premières lettres donnent son intitulé.

permutation et chiffrement

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Dans le procédé du Tserouf, on permute une lettre par une autre selon une convention précédemment établie par la clef. Exemples:

  • La 22e clé ath -bash : il s’agit de la permutation de la première lettre de l’alphabet aleph א et de la dernière tav ת , de la seconde beth ב avec l’avant-dernière shin ש.

Les permutations suivantes de la clé 22 s’inscrivent sur la ligne horizontale.

  • La clé 2 ab- gat: La lettre aleph א permute avec la lettre suivante beth ב; la lettre guimel ג avec le tav ת; la lettre resh ר permute avec le shin ש etc.

Toutes ces clés vont permettre de déchiffrer et de lire tous les noms divins. Elles vont renouveler toutes les méthodes de méditations et de contemplation de l’expérience mystique.

Table du Tserouf en caractère latin par Blaise de Vigenère.


Dans son traité, figurent également la liste complète des alphabets hébraïques. Tous ces alphabets vont nous permettre[style à revoir] de lire de nombreux documents écrits en caractères dits « à lunettes » ou « boulés »[5].

Publications

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Cette liste comprend des œuvres originales et des traductions.

Bibliographie

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  • Gaston Bachelard, La Psychanalyse du feu, Paris, PUF, 2015
    Bachelard approuve Vigenère dans son appréciation du brûlot.
  • Gaston Bachelard, La Flamme d'une chandelle, PUF, 1961, p. 29-31 et p. 59-60
    Vigenère est, selon Bachelard, un poète de la « verticalité ». Il « moralise » le feu.
  • Ariane Boltanski, Les Ducs de Nevers et l’état royal : Genèse d’un compromis (1550 – ca. 1600), Droz, Genève, 2006 (Travaux d’Humanisme et de Renaissance, 419).
  • Ernst Bouchard, Notice biographique sur Blaise de Vigenère […], 1868, 212 p. 
  • Richard Crescenzo, Peintures d'instruction : la postérité littéraire des Images de Philostrate, Genève, 1999.
  • Richard Crescenzo, « Numa et la nymphe Égérie : l'approche démonologique de la religion chez Blaise de Vigenère », dans Esculape et Dionysos. Mélanges en l'honneur de Jean Céard, Genève, Droz, 2008, p. 787-799.
  • Richard Crescenzo, Vigenère et l’œuvre de Tite-Live. Antiquités, histoire, politique, Paris, Honoré Champion, 2014.
  • Paul-Victor Desarbres, La Plume et le Lys. Carrière, publication et service de la politique royale chez Blaise de Vigenère (1523-1596), Thèse de doctorat présentée sous la direction de Marie-Christine Gomez-Géraud, Université Paris Ouest-Nanterre, 2016.
  • Marc Fumaroli et collectif, Blaise de Vigenère poète & mythographe au temps de Henri III, Cahiers V.L. Saulnier, no 11, Paris, Éditions Rue d'Ulm, 1994 (ISBN 2728801878)
  • Marc Fumaroli, « Blaise de Vigenère et les débuts de la prose d’art française : sa doctrine d’après ses préfaces. » in L’Automne de la Renaissance (1580-1630), Paris, 1981, p. 31-51 (repris dans La Diplomatie de l'esprit).
  • (es) Marc Fumaroli, « Hacia el triunfo de la prosa : los manifiestos de Vigenère », dans La diplomacia del ingenio. De Montaigne a La Fontaine, Barcelone, Acantilado, 2011, p. 61-104.
  • Jean-François Maillard, « Aspects de l’encyclopédisme au XVIe siècle dans le Traicté des chiffres annoté par Blaise de Vigenère, » in Bibliothèque d’humanisme et de Renaissance, t. XLIV, 2, 1982, p. 235-268.
  • Denise Métral, Blaise de Vigenère archéologue et critique d'art, Paris, E. Droz, 1939.
  • Maurice Sarazin, Blaise de Vigenère, Bourbonnais 1523-1596. Introduction à la vie et à l'œuvre d'un écrivain de la Renaissance, préface de Marc Fumaroli, 1997, Charroux, Éditions des Cahiers bourbonnais, 112 p. 

Notes et références

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  1. Comme celle de Pascal, né exactement un siècle après lui.

Références

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  1. a b et c Schmidt, Albert-Marie., Poètes du XVIeme siècle, texte établi et présenté, Gallimard, (OCLC 88111214, lire en ligne), p. 957
  2. Blaise de Vigenère, Traicté des comètes, ou estoilles chevelues, apparoissantes extraordinairement au ciel, avec leurs causes et effects, par Bl. de Vigere, (lire en ligne)
  3. Blaise de Vigenère, Traicté des chiffres, ou Secrètes manières d'escrire, (lire en ligne)
  4. « Rouach, David », sur catalogue.bnf.fr (consulté le ).
  5. Rouach 1989.

Articles connexes

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Liens externes

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