Dans un corpus de vulgarisation médicale

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Corela

Cognition, représentation, langage


HS-31 | 2020
Métalinguistiques.

De l’(in)constance du métalinguistique dans un


corpus de vulgarisation médicale
Valérie Delavigne

Édition électronique
URL : http://journals.openedition.org/corela/11031
DOI : 10.4000/corela.11031
ISSN : 1638-573X

Éditeur
Cercle linguistique du Centre et de l'Ouest - CerLICO

Référence électronique
Valérie Delavigne, « De l’(in)constance du métalinguistique dans un corpus de vulgarisation
médicale », Corela [En ligne], HS-31 | 2020, mis en ligne le 04 juin 2020, consulté le 03 juillet 2020.
URL : http://journals.openedition.org/corela/11031 ; DOI : https://doi.org/10.4000/corela.11031

Ce document a été généré automatiquement le 3 juillet 2020.

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Creative Commons Attribution - Pas d’Utilisation Commerciale - Partage dans les Mêmes Conditions
4.0 International.
De l’(in)constance du métalinguistique dans un corpus de vulgarisation médicale 1

De l’(in)constance du
métalinguistique dans un corpus de
vulgarisation médicale
Valérie Delavigne

1 En tant qu’objet d’étude à relier à une pratique sociale, les terminologies peuvent être
appréhendées de plusieurs manières. L’une d’entre elles est d’observer les termes
lorsqu’ils s’échappent de leur domaine d’usage habituel. Formes d’une culture, les
terminologies ont en effet affaire avec l’intériorité et l’extériorité des communautés
discursives, opposition qui permet de penser des questions de voisinage, de proximité,
de contact. On a beau faire, les termes jouent l’indiscipline et ne restent guère
cantonnés à l’intérieur des sphères d’activité qui les voient naître. Lorsque l’on est
entre soi, que l’on appartient à la même communauté, l’usage des mêmes mots
auxquels on attribue un sens commun permet de se comprendre. Cependant, dès lors
que le terme technique ou scientifique sort de son cercle habituel, la connivence
s’efface. Il est intéressant de porter son regard là où les terminologies se dissolvent, se
désagrègent : à leur surface de séparation. Car c’est aux frontières que les difficultés
émergent ; les choses se passent au jointif, dans l’entre-deux : sans voisin, il n’y a pas
grand-chose à négocier.
2 Afin de rétablir une intercompréhension, les discours destinés aux « non-experts »
s’attachent à redonner du sens aux mots. Le travail de négociation discursive passe par
des jeux de reformulation bien décrits par les analystes des discours de vulgarisation
(Jacobi 1986, 1999 ; Mortureux 1982, 1988 ; Reboul-Touré 2004 notamment). Ces
dénivellations sémiotiques s’emploient à faciliter l’émergence du sens des termes et
laissent apparaître diverses relations sémantiques (Rey-Debove 1997).
3 A partir d’une analyse contrastive d’un corpus de documents médicaux, brochures pour
les patients atteints de cancer et forums de discussion, nous nous proposons d’explorer
les mouvements des unités terminologiques. Il ne s’agit pas ici de rendre compte des
usages différenciés des terminologies médicales, mais de centrer notre attention sur les
marqueurs métadiscursifs qui les accompagnent. L’analyse contrastive de ce corpus

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montre une économie spécifique de chacun de ces discours, repérable par des choix
lexicaux, énonciatifs et argumentatifs divers, mais aussi, et ce sera le cœur de notre
propos, par des formes métalinguistiques tout à la fois semblables et spécifiques. Si le
corpus révèle des usages certes attendus du métalinguistique comme outil explicatif, il
semble bien qu’il ne s’y réduise pas.

1. Une approche socioterminologique


4 Cette étude s’ancre en socioterminologie, approche sociolinguistique de la
terminologie, objet longtemps peu pris en compte par les linguistes (Gaudin 1993, 2003,
2005). Elle est proche des travaux linguistiques tournés vers l’analyse des discours
spécialisés qui, sans revendiquer l’étiquette « socioterminologique », s’en rapprochent
néanmoins par bien des aspects (Mortureux 1988 et les travaux du Cediscor comme
Moirand 1994, Moirand & Beacco (dir.) 1995, Cusin-Berche (dir.) 2000, Reboul-Touré
1995, 2004, ou encore Dury & Picton 2009 ; voir aussi à ce propos Petit 2010). Ce travail
s’inscrit dans une perspective d’analyse de discours qui tente de prendre en charge les
enjeux de discours et en linguistique de corpus.
5 La terminologie a pour objet l’étude des termes, des systèmes de termes et des discours
dans lesquels ils s’insèrent. Elle s’est développée indépendamment de la linguistique et
ce n’est que récemment que les acquis de la linguistique et de la sociolinguistique ont
été intégrés à la discipline. Devant des postulats historiquement légitimes mais devenus
difficilement recevables, la socioterminologie a proposé des aménagements plus
opératoires : les notions ne préexistent pas aux termes dans des systèmes notionnels ;
les termes ne sont pas des objets en soi qui fonctionnent hors de toute énonciation ; les
domaines ne sont pas des lieux stables et clos qui ferrent les termes dans des sens
immuables ; les discours, et donc les corpus, sont au cœur des processus
méthodologiques. C’est replacer ainsi au cœur de l’analyse un certain nombre d’acquis
linguistiques.
6 Loin d’être une théorie constituée, la socioterminologie ne peut être qualifiée de
discipline, tout au plus d’école de pensée. C’est en tout cas une autre manière
d’envisager les terminologies qui naissent et vivent dans les organisations et les
institutions, et possèdent chacune leurs spécificités. La socioterminologie s’attache à
observer les unités terminologiques dans leur milieu, à examiner leur circulation, en
prêtant une attention particulière aux questions d’usages, de validation sociale des
termes, de normaison (Guespin 1993), de (dé)régulation. L’objectif est de décrire la
variation des terminologies et des dispositifs énonciatifs qui les actualisent en prenant
en compte les contraintes des structures organisationnelles ou institutionnelles où elles
circulent et les conditions matérielles de la communication qui pèsent sur les formes.

1.1. L’éloge des frontières

7 Une des spécificités de la socioterminologie tient en son intérêt affirmé pour la


circulation des termes (Gaudin 2003 ; Delavigne & de Vecchi 2016). Cette perspective
sociolinguistique mène à considérer les divers canaux par lesquels ils passent et
s’oppose à la terminologie « classique » qui s’est longtemps focalisée sur les unités
terminologiques circonscrites dans des domaines. Or bien des termes ne restent pas
cantonnés aux communautés qui les ont vus naître.

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8 Ce constat de la circulation des termes n’est certes pas nouveau. Louis Guilbert y faisait
déjà référence en son temps (Guilbert 1973 ; voir aussi Beacco 2000). Cependant, cette
circulation s’accentue tout particulièrement aujourd’hui avec le développement
d’internet. Notre monde s’est ouvert et les terminologies se retrouvent bien plus
rapidement à l’extérieur des communautés discursives qui les actualisent d’ordinaire.
9 Que se passe-t-il lorsque les termes sortent de leur écosystème naturel ? La
terminologie s’est peu intéressée aux problématiques de la vulgarisation, ce qui n’est
pas le cas de la linguistique (Jacobi 1986 ; Mortureux 1982 ; Moirand & Beacco 1995 ;
Beacco 1995, 2000). Or c’est bien souvent aux bornes que naissent les difficultés. Faisons
donc, pour reprendre le titre d’un opuscule de Régis Debray (2010), l’éloge des
frontières. Cette posture, en permettant de penser des questions de voisinage, de
proximité, de contacts, présente l’avantage, d’un point de vue méthodologique, de
repérer les négociations terminologiques à l’œuvre en considérant les variations écrites
et orales - diatopiques, diastratiques, diachroniques, etc. - en fonction des conditions de
production, de circulation, de réception et d’interprétation. Ces discours à diffusion
sociale large, parfois placés sous l’hyperonyme « discours de transmission des
connaissances » (Moirand & Beacco 1995), ont été fréquentés par les linguistes dont
l’approche n’est pas spécifiquement terminologique, mais s’ancre plutôt en analyse du
discours et en sémantique lexicale et discursive. Porter le regard vers ces discours
amène à reconsidérer certains préceptes terminologiques et à replacer au cœur de
l’analyse les pratiques sociales situées et les structures organisationnelles et
institutionnelles qui contraignent l’énonciation.

1.2. Corpus : caractérisation et méthode d’approche

10 Notre analyse prend corps dans ce cadre. Ayant été amenée à intervenir dans le circuit
de production de documents pour les patients atteints de cancer (Fervers et al. 2003 ;
Carretier et al. 2010 ; Delavigne 2015), nous avons rassemblé des outils d’information
pour les « patients »1 : brochures papier et leurs « avant-textes » (Fenoglio & Chanquoy
2007) dans lesquels sont colligés les tours d’écriture et les commentaires des scripteurs.
Ce corpus sera désormais désigné par « corpus Brochures ». Viennent en contrepoint de
ce corpus des discussions extraites de forums médicaux autour de la thématique du
cancer, que nous désignerons par « corpus Forum » (pour une présentation plus
approfondie du corpus, voir Delavigne 2013 et Delavigne 2017).
11 Ce qui justifie de rassembler ces deux genres de discours a priori hétérogènes est leur
objectif similaire : l’information autour du cancer. La sphère numérique a transformé
l’environnement social, économique et culturel contemporain. Le domaine médical
n’est pas en reste : dans le panel des outils d’information sollicités par les patients, les
outils numériques occupent désormais une place centrale. Les thématiques de santé ont
ainsi envahi l’espace public, au point qu’Hélène Romeyer parle d’« industries de
contenu » (2008). Contournant le modèle traditionnel d’information descendant du
médecin vers le patient, le patient recherche aujourd’hui activement des informations.
Il s’informe autrement, par le biais d’autres communautés et les formes
d'éditorialisation de l'information s’en voient modifiées (Battaïa 2012). Les forums
cristallisent cette individualisation des pratiques informationnelles médicales. Ces
évolutions amènent à réviser les rapports entre les différents types de savoirs et ne
sont pas sans répercussions sur les usages langagiers.

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12 Notre intérêt pour cet observable émane de l’hypothèse que le forum pouvait
constituer un outil pour documenter un dictionnaire pour les patients. Nous avons
montré ailleurs comment s’y aménage la diffusion de terminologies médicales.
L’autodidaxie trouve là son chemin : on y voit une « culture périmédicale » se
construire et s’imprimer dans la matérialité discursive (Delavigne 2013 ; à paraître),
même si l’on sait que la recherche d’informations y est subordonnée à d’autres
objectifs : quête de soutien, échanges et conseils pratiques (Romeyer 2008).
13 Les spécificités de cet objet discursif, qui correspond à une pratique sémiotique
particulière, interrogent un certain nombre de concepts linguistiques de niveaux
différents, comme les notions de genre discursif (le forum est-il un genre ?) ou de
vulgarisation (peut-on catégoriser le forum comme un discours de vulgarisation ?)
(Colin & Mourlhon-Dallies 2004 ; Panckhurst 2007 ; Anis 2009 ; Liénard & Zlitni 2015),
voire questionnent son statut même de texte (Paveau 2015). Même si notre approche
reste « logocentrée », pour reprendre le terme de Marie-Anne Paveau, puisque nous ne
prenons pas en compte les dimensions techniques et visuelles du forum, a-t-on les
outils théoriques et méthodologiques pour se confronter à ce type de dispositif
discursif ? En effet, si l’on se penche sur la caractérisation formelle du forum médical,
on se retrouve face à des formes spécifiques liées aux conditions matérielles de
production de ces discours. Le forum est truffé de variables d’expression de « bas
niveau » : ponctuèmes, emphase, focalisation des capitales ou graisse typographique,
smileys et autres marqueurs d’émotions et de relations sociales (Marcoccia 2004). Les
formes linguistiques qu’il convoque, ses écarts à la norme, son hétérogénéité
sémiotique, son hybridation entre écrit et oral, ses particularités morphologiques,
syntaxiques et énonciatives : néographies, abréviatifs, accidents dactylographiques,
ellipses, poids de certains déictiques, tout comme ses caractéristiques discursives :
délinéarisation, fragmentation, etc. (Anis 1998 ; Colin & Mourlhon-Dallies 1995 ;
Mourlhon-Dallies 2010), légitiment que l’on passe par une autre notion que Laroussi et
Liénard désignent par « écrilecte » (2013). Ces aspects formels ne sont pas sans poser
problème dès lors que l’on souhaite soumettre des fils de discussion à un outil d’analyse
automatique.
14 Au delà de cette composante numérique, une des difficultés consiste à caractériser
l'ensemble de ce corpus contrasté en gardant à l’esprit son hétérogénéité,
caractéristique guidée par notre visée comparative. Nous avons convoqué dans notre
titre le syntagme « discours de vulgarisation ». Il faut reconnaître que si la désignation
est commode, elle fait fi de la spécificité des discours du corpus et gomme des
différences de perspective. Ce corpus présente certes des traits communs aux discours
de vulgarisation, notamment par les traces de didacticité sur lesquelles nous
reviendrons largement plus bas ; c’est ce qui nous pousse à conserver la désignation.
Cependant, nous sommes ici dans une vulgarisation spécifique qui nécessite de penser
au delà de genres discursifs clairement identifiables, entendus comme normes de
pratiques (l’article de Science & Vie ou celui de Sciences et Avenir par exemple, qui
semblent être les prototypes du texte de vulgarisation), voire des répartitions à l’instar
de celles que propose Petit (2010) par exemple, distribuées entre discours scientifiques
(académiques), discours professionnels qui rassemblent les interactions entre
spécialistes, et discours d’un « troisième type » qui sortent du champ de référence 2.
Nous pourrions catégoriser le corpus sous la désignation « discours de transmission des
connaissances » (Moirand & Beacco 1995) ; nos observations rejoignent en effet bien des

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pans des études menées sur ce type de discours comme le travail de négociation
discursive qui accompagne le mouvement des termes. Cependant, cette catégorisation
large gomme là aussi les spécificités des textes présents dans le corpus. Ce qui est sûr,
c’est que le corpus questionne bon nombre de catégories linguistiques.
15 Conformément à certaines approches de l’analyse de discours, notre méthode pour
aborder le corpus reste classique : notre problématique terminologique nous pousse
naturellement à constituer le terme comme point d’entrée en tant que « pivot ». Notre
définition du terme est socioterminologique : c’est une unité lexicale dont la spécificité
est à relier à son statut dans une communauté discursive donnée. Par exemple, un « lit »
dans le monde hospitalier n’est pas nécessairement un meuble. Le statut
terminologique dépend donc du locuteur ou de l’analyste. Le terme est au sens de
Rastier (2011) un passage qui renvoie à une intertextualité et à des cultures. Entrer dans
le corpus par le terme permet de se focaliser sur certains évènements discursifs qu’il
cristallise comme les commentaires méta- et épilinguistiques.
16 Nous avons utilisé un outil d’exploration de corpus, NooJ, développé par Max
Silberztein3. Nous n’exposerons pas les différentes approches outillées disponibles pour
analyser le matériau langagier. Disons simplement que le choix de NooJ se fonde sur le
fait de pouvoir créer nos propres patrons de recherche sans l’effet de « boîte noire » de
certains logiciels. Si les résultats obtenus ne sauraient avoir valeur de preuve et restent
réductibles au corpus, l’utilisation d’un logiciel fait émerger des faisceaux de faits et
met au jour des modes de fonctionnement spécifiques. Une exploration contrastive des
corpus permet en outre de repérer des phénomènes qui n’auraient pas été décelés
manuellement et de caractériser des régularités. Il faut cependant souligner la
difficulté d’utiliser cet outil pour le corpus Forums dans la mesure où les
caractéristiques évoquées plus haut en limitent l’analyse. Néanmoins, se confronter aux
corpus de façon systématisée permet de mettre au jour les marqueurs mobilisés, d’en
répertorier les usages et d’en dessiner le jeu.

2. Marque, trace, marqueur et autres désignations :


hétérogénéité terminologique
17 Afin de donner accès au sens des unités terminologiques, les discours de vulgarisation
convoquent un certain nombre de « structures doubles » (Fuchs 1982), énoncés
paraphrastiques de « discours-sources » qui sont autant de « "proposition
équationnelle" (…) : Z = X, où Z est un terme scientifique, et X une paraphrase non
marquée scientifiquement » (Mortureux 1982). C’en est une des principales
caractéristiques (même si la vulgarisation la meilleure est sans doute celle qui laisse
oublier ces reformulations). Ces structures sont repérables par des segments
linguistiques spécifiques :
Les marqueurs comme "c'est-à-dire", à savoir", "cela signifie que", "ou"
(conjonction), indiquent le point de l'énoncé où la reformulation se réalise. Le
marqueur fonctionne comme une césure ; il coupe l'énoncé qui est aussitôt repris et
dit autrement sous équivalence sémantique. (Peytard 1993)
18 Ces marqueurs métalinguistiques ont été bien identifiés, au point qu’ils ont pu être
constitués ailleurs en outils de repérage d’unités terminologiques sur d’autres corpus
de discours de vulgarisation (Delavigne 2001).

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2.1. Hétérogénéité désignationnelle

19 Au seuil de ce parcours, nous voudrions interroger rapidement la notion de


« marqueur ». Un marqueur signale une « activité » linguistique qui peut s’actualiser
diversement. Prenons deux exemples pour illustrer notre propos : le suffixe –ette est un
marqueur morphologique de petitesse ; un accent est un marqueur sociolinguistique.
Sur le plan descriptif, la conséquence de cette assiette sémantique accueillante est le
flou terminologique par lequel la notion est désignée : marque, marqueur, marquage,
trace, indice… qui se traduit par des structures, patrons, relateurs, motifs, constructions,
expressions, routines4… autant de traces d’opérations, d’activités… La variation est
prégnante et le paradigme désignationnel extrêmement étendu selon la fonction que
l’on donne à ce « marqueur ». On peut voir dans cette inflation désignative la centralité
de la notion en linguistique qui lui a consacré plusieurs colloques. Son sens se voit
borné par diverses qualifications comme ici par métalinguistique, métadiscursif,
métalangagier. Mais là encore, des alternances se repèrent, parfois chez les mêmes
auteurs, selon les théories et le point de vue, selon que la forme actualise un
commentaire ou qu’elle convoque une reformulation.
20 La notion de marqueur s’est développée dans d’autres communautés. On la repère par
exemple dans les sciences de l’information et de la communication, qui la désignent
préférentiellement par trace, avec une acuité particulière suscitée par les usages
numériques (Galinon-Mélénec 2011 ; Jeanneret 2014 ; Pélissier 2015 entre autres).
Analysant la notion, Yves Jeanneret insiste sur le travail réflexif nécessaire à son
exploitation :
Seul ce travail de distinction catégorielle, en lieu et place d’une simple reprise plus
ou moins allusive de la catégorie diffusante de la trace, permet d’envisager les
nouveaux régimes de l’empreinte, de l’inscription et de l’écriture dans les médias
informatisés (Jeanneret 2014: 3).
21 En lien direct avec une conception linguistique, le traitement automatique des langues
et l’ingénierie des connaissances postulent que les marqueurs – désignés par patrons –,
projetés sur des textes, vont permettre d’automatiser le repérage de terminologies et
partant, de « connaissances » (Jacques & Aussenac-Gilles 2006 par exemple), hypothèse
que nous avons suivie par ailleurs (Delavigne 2001). Dans un monde langagier idéal, un
triplet désignation/marqueur/désignation associerait de façon univoque un triplet
désignation/relation/désignation. Cependant, devant la variation des marqueurs, ces
disciplines mettent le doigt sur le fait qu’il faut laisser une place au genre, au contexte
et à l’interprétation qu’on ne saurait réduire à une liste de métadonnées (Aussenac-
Gilles & Condamines 2009).
22 Ce rapide détour permet de mettre le doigt sur la complexité et la polysémie de la
notion. Pour notre part, nous conserverons le terme de marqueur dans la mesure où on
trouve inscrit dans son sémantisme un évènement discursif, quel qu’il soit. Un
marqueur est une marque, un témoignage, une trace d’une activité, d’une opération…
dont il nous faudra affiner les fonctions.

2.2. Hétérogénéité formelle et régularités

23 Les marqueurs métalinguistiques peuvent être de diverse nature : marques


typographiques (virgules, tirets ou parenthèses), verbes (être, appeler, nommer, signifier,

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désigner…), expressions spécifiquement métalinguistiques (c'est-à-dire, autrement dit, en


d’autres termes…), joncteurs (ou, soit…), etc., tout cela étant cumulé parfois au sein du
même énoncé :
La situation de chaque patient est donc discutée au cours d’une réunion appelée
réunion de concertation pluridisciplinaire (RCP).5
24 En examinant les termes, institués comme unités pivots, NooJ nous a permis de
localiser un certain nombre de ces structures. On remarque par exemple la forte
densité sur le corpus des deux points, symptôme visible d’une importante activité
reformulatrice. Cette densité est notamment la trace des glossaires présents dans
chaque guide, les entrées étant suivies systématiquement de deux points ; cependant ce
marqueur graphique se retrouve également dans le corpus Forums, en alternance avec
le signe = :
RH - = recepteurs hormonaux negatifs
ki67: est l indice de prolifiration des cellules cancereuses
Her2: c est une proteine située ds la membrane des cellules; tu auras 1 injection d
herceptine pd qques mois. 6
25 Remarquons de façon incidente que la fréquence des marqueurs de reformulation n’est
pas identique entre les deux corpus. Guillemets de marquage autonymiques et
parenthèses sont ainsi moins présents dans les forums. Être un par contre, forme de
base de la prédication de l’identité, est un marqueur de reformulation omniprésent,
même si, à l’instar d’autres corpus, il peut être équivoque ou, tout simplement, ne pas
actualiser de prédication métalinguistique et introduire un simple commentaire sur
l’objet de discours comme dans l’exemple suivant :
Ce petit coin du forum est un havre de paix pour nous
26 S’il y a certes multiplicité des formes, il y a dans le même temps constance de certaines
unités convoquées. NooJ nous a permis de confirmer l’intuition que nous avions de la
récurrence de plusieurs marqueurs métalinguistiques dans le corpus. Ces régularités
nous ont amenée à intégrer la problématique des « routines » discursives telles que Née
et al. les définissent :
Une routine discursive consiste en la mise en relation de séquences linguistiques
récurrentes, partiellement figées (…) avec des déterminations discursives et des
fonctions textuelles propres à un genre ou une sphère d’activité. (Née et al. 2014 :
2119)
27 Ainsi peut-on repérer des segments récurrents du type : « on parle de… », « les
médecins disent » ou « des patients disent », qui paraissent constituer une sorte de
phraséologie du corpus Brochures. On retrouve là des « motifs » au sens de Longrée &
Mellet (2013), autrement dit des structures préformées qui combinent deux ou
plusieurs unités. Certaines séquences vulgarisatrices sont plus fréquentes que d’autres,
comme « parler [ADV] de » :
Lors de la découverte d'un cancer, il arrive ainsi que l'anatomopathologiste, le
médecin en charge de l'analyse microscopique, n'arrive plus à définir l'origine de la
cellule ; on parle de tumeur « indifférenciée ».
On parle de forme sporadique lorsque ce sont ces mutations dites somatiques qui
sont impliquées dans un cancer
28 On encore « [ADV] appelé » :
Les Kiosques d'accueil et d'information sur le cancer (parfois appelés KIC ou KAC)
sont destinés aux personnes malades ou non, désireuses d'obtenir une information
sur le cancer.

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Pour bénéficier de cette prise en charge à 100 % dans le cadre de votre ALD, votre
médecin traitant doit remplir un formulaire appelé Protocole de soins.
29 Cette surreprésentation de ces configurations lexicales et syntaxiques nous a amenée à
voir une manifestation de préfabriqué, d’associations routinisées qui se font « prêt-à-
écrire » (Delavigne 2017), rejoignant les observations menées sur la phraséologie
(Poudat 2006 ; Tutin 2007 ; Legallois & Tutin 2013).

2.3. Hétérogénéité topologique

30 La délinéarisation des corpus soumis aux outils de traitement automatique ne doit pas
faire négliger le lieu d’apparition des marqueurs métalinguistiques. En effet, nous
faisions l’hypothèse qu’ils n’apparaissent pas n’importe où dans les textes. D’un point
de vue méthodologique, cela implique de prendre en compte 1- la structure du texte, 2-
le lieu d’apparition du marqueur dans le tissu discursif.
31 Sur le corpus Brochures, nous nous attendions à trouver une densité plus importante
de marqueurs en tête de chapitre, ce que l’analyse a confirmé : les débuts de parties
sont des lieux qui mobilisent une forte quantité de structures métalinguistiques dans la
mesure où y apparaissent de nouvelles notions appelant une reformulation explicative.
Mais les marqueurs essaiment également tout au long du texte. Ils n’apparaissent
cependant pas n’importe où : dès qu’un nouveau terme que le scripteur estime opaque
apparaît, il se voit doté d’un appareillage métalinguistique destiné à en élucider le sens.
Le texte ensuite « oublie » cette activité métalinguistique, le terme étant considéré
comme acquis, inscrit dans la mémoire discursive du lecteur. Il entre alors de plain pied
en usage dans le tissu textuel.

3. Hétérogénéité fonctionnelles des marqueurs :


variation de l’activité métalinguistique
32 Les traces de reformulation se transforment en fonction des termes, de leurs lieux
d’apparition, des genres textuels dans lesquels ils circulent, des supports où ils sont
convoqués… Une des caractéristiques des marqueurs métalinguistiques est leur
polysémie. D’un corpus à l’autre, ces éléments discursifs ont-ils les mêmes fonctions ?

3.1. Un objectif prépondérant : la didacticité

33 L’objectif le plus visible et le plus décrit des jeux de reformulation dans les discours de
vulgarisation est de tenter d’établir une intercompréhension : un des rôles du
métalinguistique est en effet de contribuer à des textes efficaces et adaptés au public
considéré. C’est le projet même des guides pour les patients qui sont amenés à
convoquer un certain nombre de termes spécialisés (INCa 2013). Faute de connivence,
le sens de certaines unités doit être travaillé. A cette fin, des propositions
équationnelles du type terme-marqueur-reformulant ou reformulant-marqueur-terme
visent à faciliter l’émergence du sens de ces unités terminologiques, réputées obscures,
en établissant une équivalence sémantique. Ces dénivellations sémiotiques actualisent
des énoncés définitoires autour de ces unités, qui sont autant de traces de
« didacticité » (Moirand 1992)7 :

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Un effet secondaire est une réponse indésirable à un médicament lorsqu'il est


pris à des doses normales
Cette diminution [des composants du sang] entraîne souvent des effets
secondaires : perte de cheveux, nausées, vomissements, mucites, diarrhées ou
constipation, etc.
34 En convoquant des mots « passerelles », ces cotextes permettent l’élucidation ou la
précision du terme supposé non ou mal connu. Des gloses explicatives et définitoires,
de formes variées – ici deux définitions, l’une en intension, l’autre en compréhension –,
aménagent la sémantisation des unités terminologiques. Le rôle du marqueur
métalinguistique est alors d’établir un pont sémantique à finalité didactique entre un
terme et ses paradigmes définitionnels ou désignationnels (Mortureux 1982, 1988,
1993). Remarquons qu’il arrive que le marqueur s’efface, notamment en cas de
diaphore, ce qui peut poser un problème méthodologique à l’analyste pour repérer les
différents paradigmes.
35 Contrairement à ce qu’on pourrait attendre, le corpus Forums n’est pas exempt de ces
traces de didacticité. Même si, dans une première approche, on peut imaginer que le
discours scientifique et médical s’y dissout, il s’avère que c’est un lieu émaillé de
terminologie médicale et de vulgarisation (Delavigne 2013). Les énoncés définitoires
font florès :
chimio (…) : c'est une série de produits qu'ils te mettent en intra-veineuses
Marie, un clip axillaire est une petite agrafe métallique utilisée couramment par les
chirurgiens, pour stopper un saignement ou repérer un endroit préçis sur les
radiographies
On y repère de nombreuses traces d’« activité́ définitoire spontanée » (Husson ici-
même), et celle-ci correspond souvent à une demande explicite :
Récepteurs d'oestrogènes Positifs 99% intensité 3+
Récepteurs de progestérones Positifs 75% intensité 3+
HER-2 : Négatif : 1+
J'aimerais qu'on m'explique tout ça un peu et qu'on me rassure, si possible...
? L'une d'entre vous peut -elle m'expliquer ce que veut dire :
" résultats ANAPATH"
Je ne trouve pas ce mot (anapath) dans le dico, mais peut être s'agit-il d'une
abréviation
36 Ce que l’on voit ici émerger, ce sont donc d’autres formes de didacticité. Se met en
place tout un jeu de questions-réponses directes ou indirectes, qui correspondent au
régime « épistolaire » du forum (Colin & Mourlhon-Dallies 2004).
37 Certes, on trouve dans le corpus Brochures des questions/réponses à visée didactique
et proches des préoccupations de patients, qui vont au-delà de la « question
rhétorique ». Citons en exemple les titres de paragraphes successifs autour de scanner :
Qu’est-ce qu’un scanner ?
A quoi sert un scanner ?
Qu'est-il nécessaire de faire avant un scanner ?
Comment se déroule un scanner ?
Le scanner est-il désagréable ?
Quels sont les risques éventuels d'un scanner ?
Quand obtient-on les résultats d'un scanner ?
38 Dans les forums, le dispositif énonciatif permet des tours conversationnels directs bien
qu’asynchrones. Outre de nombreuses formes narrativisées, on voit apparaître des
citations de paroles de professionnels de santé du type « mon médecin m’a dit que… »,
d’autres paroles de patients, voire la mention de brochures :

Corela, HS-31 | 2020


De l’(in)constance du métalinguistique dans un corpus de vulgarisation médicale 10

comme le dit le thiérachien suite a la rencontre avec l'oncologue il y a une réunion


pluridisciplinaire de médecins
exemple liste
Réunions de Concertation Pluridisciplinaire avec l'oncologue
• Pneumologie • Gastro-entérologie • Sénologie • Gynécologie
• Urologie • Otorhinolaryngologie • Dermatologie
• Hématologie • Neuro-oncologie.
voir BROCHURE
39 Ce sont autant de traces d’interdiscours dont se saisit le scripteur pour répondre à la
question d’un internaute. Ce qui caractérise ces énoncés, et ce sur quoi nous voudrions
insister, c’est leur pertinence définitoire :
B5 ca veut dire "cancer retrouvé à la biopsie" rien de plus
J'ai un cancer du sein triple négatif... C’est un cancer qui ne répond ni à
l’hormonothérapie, ni à l'herceptine que certaines ont après la chimio... Sinon,
notre traitement est le même au niveau chimio...
40 Les sens se négocient ainsi au plus près des pratiques et des besoins des patients. La
figure qui émerge est alors celle de « passeur d’expérience », qui offre une qualité de
vulgarisation évaluée comme bien meilleure que celle des professionnels de santé :
Le chirurgien m'a bien expliqué tout ça et l'anesthésiste aussi mais ton témoignage
est nettement plus clair
41 Ce que soulignent l’unité témoignage et l’appréciatif qui l’accompagne, c’est l’expérience
vécue : le patient a acquis des connaissances biomédicales, mais au delà, leur
transmission est jugée bien meilleure ; l’explication est perçue comme « nettement plus
claire » car portée par un discours plus « incarné », autrement dit, plus proche des
préoccupations des autres patients (Delavigne 2016).
42 Cette observation nous renvoie aux études menées sur la compréhension des patients
reçus dans des consultations qui, structurellement, ne peuvent laisser que peu de
temps à l’information8. Dès lors, ce sont les patients qui prennent le relais et
transmettent les connaissances acquises sur le terrain de la maladie. Tout au long du
corpus Forums apparaissent en effet ces formes didactiques spécifiques, convoquées
par des patients pour des patients, mettant en œuvre une « vulgarisation
fonctionnelle ». Elles posent la question de la qualité d’un discours de vulgarisation. Se
profile par cette expertise terminologique une communauté de pratiques que nous
avons appelée ailleurs « communauté d’aventure » à la suite de Louis Quéré (2003),
définie en termes d’expérience partagée (Delavigne à paraître). D’autres pratiques
vulgarisatrices dans lesquelles se réaménagent les figures de l’interlocution se
dessinent et laissent émerger d’autres enjeux.

3.2. Cas particulier : quand le terme devient autonyme

43 Au delà de cette intention didactique portée par les textes de nos deux corpus, les
brochures pour les patients portent le projet programmatique d’un patient « acteur »,
inscrit dans un paradigme participatif (Carretier et al. 2010). L’objectif revendiqué est
d’élaborer des outils au service d’un dialogue qui doit s’établir entre les patients, leurs
proches et les professionnels de santé. Le patient est censé « s’approprier » un certain
nombre de termes médicaux pour ensuite être en mesure de les comprendre et, mieux
encore, de les utiliser dans ses échanges avec les professionnels. Différentes stratégies,
que ce soit au niveau macro ou microtextuel, sont mises œuvre par les scripteurs à
cette fin d’équipement terminologique, profondément dialogique, stratégies au nombre

Corela, HS-31 | 2020


De l’(in)constance du métalinguistique dans un corpus de vulgarisation médicale 11

desquelles on compte la mise en œuvre d’outils métalinguistiques que nous venons


d’évoquer et, plus particulièrement, autonymiques.
44 Le marqueur métalinguistique peut ainsi avoir une fonction de monstration du terme.
On le sait, les marqueurs métalinguistiques ne s’attachent pas à n’importe quel mot ;
dans une perspective de vulgarisation, le couplage fonctionne a priori avec les termes
scientifiques, techniques ou médicaux dont la forme en elle-même peut interpeller le
non-initié.
45 Le dispositif métalinguistique, signalant le non-isomorphisme d’un système
terminologique et du lexique courant, organise un « arrêt sur mot », pour reprendre
l’expression de Jacqueline Authier-Revuz (2000), qui matérialise l’activité
vulgarisatrice :
Le terme neuropathique est composé de neuro «système nerveux» et pathique, qui
vient du grec pathos : «la souffrance». Ces douleurs surviennent sans raison
apparente.
46 Neuropathique est une unité qu’Ad Hermans qualifie de terme « cryptique », par
opposition au terme « delphique » (1997), autrement dit un terme non directement
compréhensible : son sens n’est accessible que si le signe est connu. A l’inverse, les
termes delphiques ont une apparence familière, mais leur interprétation se démarque
de l’interprétation qui en est faite habituellement : ils nécessitent un « augure » pour
accéder au bon sens. Autrement dit, ce sont des homonymes de lexies plus courantes,
des termes construits par « néologie sémantique », par opposition aux termes formés
par néologie formelle, dérivation ou composition. Parler du mot devient alors un outil
d’appropriation terminologique dont témoigne l’organisation du tissu discursif :
On parle de laparotomie pour une ouverture de l'abdomen, de thoracotomie pour
une ouverture du thorax.
47 La symétrie morphologique des termes laparotomie et thoracotomie mise ainsi en
évidence contribue à en expliciter la forme. C’est là un autre type de didacticité, dans
laquelle l’autonymie, qui vient souligner le signifiant, autorise dans le même temps par
un effet définitoire l’appropriation du signifié.
48 Ces stratégies didactiques contribuent à créer un réseau intratextuel ou extratextuel.
Un chaînage sémantique est mis en place, puis le terme est « lâché », perdant son
« escorte métalinguistique » pour reprendre le terme de Pascale Janot (ici-même). Dans
les brochures, le lecteur n’est cependant jamais laissé complètement à lui-même : un
astérisque accompagne le terme et lui signale qu’il peut se référer à un glossaire en fin
d’ouvrage. Cet astérisque est un marqueur graphique métalinguistique à part entière, à
l’instar des liens hypertextes sur internet qui conduisent à une définition ou une page
de vulgarisation (Reboul-Touré 2004).
49 Ces termes se retrouvent ensuite sur les forums, accompagnés certes de commentaires
métalinguistiques, mais aussi épilinguistiques, autrement dit relatifs au jugement
linguistique du locuteur :
mammotome.
voilà les filles lundi j'ai passé ce curieux examen au drole de nom et vraiment je ne
m'attendai pas à un tel moment
50 Mammotome, autre terme cryptique, voit sa forme exhibée, puis il est reformulé en
« curieux examen » où l’hyperonyme examen fonctionne bien comme définisseur, mais
dont la qualification par curieux insiste surtout sur l’expérience vécue.

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De l’(in)constance du métalinguistique dans un corpus de vulgarisation médicale 12

3.3. Négocier les termes : mot juste, ajustement sémantique et


polyphonie

51 Dans la gamme des usages du métalinguistique, nous voudrions mettre l’accent sur un
autre type de couplage discursif. Dans l’extrait suivant, le premier énoncé est une
proposition d’un scripteur à un médecin, chargé de valider le contenu d’un guide pour
les patients :
Ce guide présente la prise en charge des formes les plus fréquentes des cancers de
la vessie : les tumeurs urothéliales. Les formes plus rares ne sont pas abordées.
52 auquel l’expert, invité à commenter l’énoncé, répond9 :
Très grande hétérogénéité de tumeurs de vessie (carcinome urothélial). Certaines
avec très peu de chance de récidive et de progression (LMP et PTA bas grade, elles
sont communément appelées « polype »). Doit-on les appeler cancer ? et d’autres
létales dans plus de 50% des cas (PT2 haut garde) (à proprement parlé K de la
vessie).
53 L’association autonymique porte ici sur les mots de l’expert. Une négociation
terminologique se met en place sur le choix des désignations : « Doit-on les appeler
cancer ? ». « À proprement parlé K de la vessie » renvoie à la problématique du mot
« juste ». Ce phénomène est exacerbé dans l’extrait suivant où le premier énoncé
correspond là encore à une proposition du rédacteur :
Le néphroblastome est un cancer très différent du cancer du rein de l’adulte : les
cellules impliquées ne sont pas les mêmes et les traitements sont donc différents.
54 à laquelle le médecin réagit de la façon suivante :
Ce n’est pas le terme exact du cancer du rein de l’adulte. Le terme exact est
carcinome à cellules rénales
55 On voit la culture médicale de l’expert prendre le pas sur l’objectif de vulgarisation.
Cela va au delà d’une simple affaire de lexique. Ce qui s’exprime ici, c’est le sentiment
qu’il n’existe qu’un seul « vrai terme » pour dire le réel. Cette problématique,
récurrente chez les experts, peut se lire également comme une trace d’individuation
linguistique. Ici, c’est l’institution médicale qui entre en scène et laisse poindre en
filigrane une autre figure de l’interlocution, celle des pairs. L’expert, garant de la
qualité des contenus médicaux des brochures, se sait soumis à leur jugement et se
retrouve aux prises avec un double adressage.
56 On voit ainsi comment entrer dans le corpus par ces traces métalinguistiques permet de
mettre le doigt sur la distance difficilement réductible entre discours experts et
discours patients. Si certains termes subsistent dans les brochures, il faut y voir le
symptôme de la difficulté pour le rédacteur de choisir son camp : supposé produire un
document vulgarisé, il doit dans le même temps tenir compte de la diversité des voix et
négocier les cultures. Pris dans un dialogisme intertextuel (les mots de l’autre, expert
et garant de la fiabilité des informations) et interactionnel (les mots pour l’autre, le
patient et ses proches), la difficulté est précisément de faire avec cette polyphonie.
57 Le corpus Forums n’est pas exempt de ces négociations autonymiques autour des
termes :
Merci à toi de m'avoir éclairée un peu plus. En revanche dans un cancer métastasé
je crois qu'on ne peut pas parler de guérison.
58 Guérison est ici ambigu : soit ce n’est pas le bon terme (on parle de rémission, non de
guérison), soit il est inadéquat (il ne peut pas y avoir de guérison). Mais dans les deux

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De l’(in)constance du métalinguistique dans un corpus de vulgarisation médicale 13

cas de figure, l’enjeu est une affaire de validation terminologique, une négociation
autour d’une normaison. Cette validation est modalisée cependant par croire qui
manifeste les précautions prises par la patiente et convoque l’interdiscours. Ce terme
guérison est bien sûr loin d’être anodin ; c’est même l’exemple type d’un mot chargé
d’enjeux :
Le patient en a souvent conscience : il faut plusieurs années pour que les médecins
parlent de guérison. En attendant, il s'agit d'une rémission. Et cette incertitude est
difficile à gérer.
59 La notion de guérison fait l’objet d’un chapitre spécifique d’une brochure dont le titre
actualise les deux isonymes : « Rémission, guérison ». On retrouve autour des deux
termes une abondance de formes autonymiques, traces du travail d’ajustement
terminologique tenté par le scripteur :
Le mot guérison fait rarement partie du vocabulaire d'un médecin dans ses
échanges avec ses patients traités pour un cancer. Il emploie plus volontiers le
terme « rémission complète » parce qu'il sait qu'une récidive, même lointaine, est
possible.
En revanche, le mot guérison se rencontre souvent dans les statistiques médicales.
On lit par exemple qu'aujourd'hui, on guérit plus d'un cancer sur deux, alors qu'on
n'en guérissait qu'un sur trois il y a trente ans. Comme toute moyenne, cette
affirmation masque de grandes disparités selon les types de cancers. Mais l'emploi
du mot guérison traduit ici en langage ordinaire une notion qu'on appelle « le taux
de survie relative à 5 ans ».
Les statisticiens estiment en effet qu'un patient ayant eu un cancer a des chances
élevées d'être « guéri » lorsque, 5 ans après le diagnostic, il retrouve la même
espérance de vie que l'ensemble de la population de même âge, de même sexe et
n'ayant pas eu de cancer.
60 Le corpus Forums se fait l’écho de ce type de développement :
Si tu lis les fiches des impatientes, tu en trouveras certaines qui ont eu des
rémissions, même après des métastases. J'espère que ça sera ton cas. Mais tu sais,
dans le cancer du sein spécifiquement, en l'état des connaissances actuelles, il y a
pas de "guérison". On a juste des bonnes stats de survie à 10 ans...
61 Les guillemets de connotation autonymique signalent la négociation autour du terme
guérison, suivi par la séquence « On a juste des bonnes stats de survie à 10 ans... », trace
d’énoncé antérieur qui contribue à un effet définitoire. Nous pouvons repérer en effet
des traces d’intertextualité prégnante, citations parfois au mot près de brochures pour
les patients (Delavigne 2013).
62 Ce qui affleure de ces extraits, c’est une autre forme d’expertise, expertise qui peut
s’accompagner de diverses précautions oratoires :
L'index de prolifération correspond au Ki, dont on parle parfois sur ce forum. C'est
un peu le niveau d'agressivité de la tumeur.
63 Le marqueur métalinguistique « c’est » met en œuvre une recatégorisation
terminologique, modalisée par « un peu » qui vient moduler la reformulation, montrer
l’approximation du reformulant et peut-être la prudence du locuteur10. On peut
rapprocher ce cotexte de celui que nous convoquions supra « je crois qu'on ne peut pas
parler de guérison » dans lequel « je crois », trace de l’insécurité linguistique du
locuteur, traduit son sentiment d’illégitimité. Se joue là sans doute une forme d’enjeu
identitaire à l’œuvre dès lors que le terme technique apparaît, qui pose la question de la
« garantie » du savoir convoqué (Rastier 2011).

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De l’(in)constance du métalinguistique dans un corpus de vulgarisation médicale 14

64 On voit ainsi émerger de nouvelles formes de connaissances, de nouvelles formes


d’expertise. Cette expertise peut se décliner de deux manières. La première est celle des
connaissances engrangées au fil des fréquentations des équipes médicales et des
lectures (de brochures, d’ouvrages, de sites internet, de blogs, de forums…) ; la seconde
est une expertise « expérientielle », fondée sur l’expérience de la maladie. Si nous
avons pu mettre en évidence cette expertise expérientielle par le biais du
métalinguistique (cf. supra à propos de mammotome « ce curieux examen »), cette
expertise est encore plus visible lorsque l’on se tourne vers les formes narrativisés de la
maladie et de ses traitements, dimension interactionnelle qui reste à explorer.

4. Pour conclure
65 La catégorie du métalinguistique est un trait quasi-définitoire des discours de
vulgarisation, sorte de « signature générique » (Legallois & Tutin 2013: 10). En
continuité avec ces analyses, nous avions dans un premier temps fait l’hypothèse de la
constance de ces marqueurs sur notre corpus. Nous avions repéré en effet la régularité
de certains segments, autant de solidarités lexicales et syntaxiques qui nous ont
amenée à y voir des « routines » d’écriture (Delavigne 2017).
66 Si la didacticité est une fonction prévisible d’un corpus de brochures d’information
pour les patients, elle est moins attendue sur un corpus de forums médicaux. Or, en
examinant les deux corpus de manière contrapunctique, nous avons pu y reconduire le
même type d’observations : la didacticité qui vise la dissolution du jargon est
prépondérante ; les marqueurs métalinguistiques mettent en scène des énoncés
définitionnels, des reformulations, etc. Ce constat étoffe les lieux discursifs de la
vulgarisation et, dans la continuité de ce que soulignait Sandrine Reboul (2004), vient
élargir la gamme des formes qu’elle est susceptible de prendre.
67 Après avoir fait le constat de l’hétérogénéité formelle des marqueurs repérés sur le
corpus, la variation fonctionnelle des formes discursives de reformulation est vite
devenue une de nos questions de recherche. L’entrée dans le corpus par le
métalinguistique attaché aux termes s’avère très productive. Le corpus déploie un
panel varié de marqueurs métalinguistiques polyfonctionnels. Dans cet espace discursif
spécifique, on ne peut pas réduire le métalinguistique à la seule visée illocutoire
explicative ou reformulatrice et à son effet définitoire. Au-delà de la tentative de
résolution de la fracture linguistique, l’analyse de l’activité métalinguistique permet de
rendre compte de la façon dont les terminologies sont reprises, commentées,
recatégorisées, validées, évaluées. Elle met en évidence une vulgarisation spécifique,
adaptée et déclarée comme telle. Et elle permet de voir comment les forums
constituent un espace qui reconfigure la figure de l’expert en aménageant un espace de
validation où se construisent diverses identités, et notamment celle de « passeur »
d’expérience.

Corela, HS-31 | 2020


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NOTES
1. Le terme « patient » désigne ici les personnes malades et, par extension, leurs proches et toute
personne concernée par les informations délivrées par les guides.
2. Les analyses montrent que différents modèles sont nécessaires pour rendre compte de la
réalité des discours de vulgarisation qui ne se laissent pas rassembler en une vison unitaire
(Delavigne 2001).
3. http://www.nooj4nlp.net/pages/nooj.html
4. Un appel de la revue Corpus (2015) se faisait l’écho de l’abondance de ce type de structures
lexico-syntaxiques plus ou moins figées.
5. Nous soulignons les marqueurs métalinguistiques.
6. La mise en forme et la graphie d’origine, ainsi que les usages spécifiques de la typographie et
des ponctuèmes sont conservés tels quels.
7. En gras dans les exemples qui suivent.
8. http://www.tns-sofres.com/etudes/sante/190903_cancer.pdf
9. Pour une description du dispositif d’élaboration des brochures pour les patients et une
description des acteurs, voir INCa (2013) et Delavigne (2017).
10. Sur un peu, voir Ducrot (2002).

RÉSUMÉS
Les terminologies peuvent être appréhendées de plusieurs manières. L’une d’entre elles est de les
observer lorsqu’elles s’échappent de leur sphère d’usage habituelle. Afin de rétablir une
intercompréhension, les discours destinés aux « non-experts » s’attachent à leur redonner du
sens par un travail de négociation discursive qui s’emploie à faciliter l’émergence du sens des
termes. L’analyse contrastive d’un corpus de documents médicaux, brochures pour les patients
atteints de cancer et forums de discussion montre une économie spécifique des discours par des
formes métalinguistiques à la fois semblables et spécifiques. Si le corpus révèle des usages
attendus du métalinguistique comme outil explicatif, il semble bien qu’il ne s’y réduise pas.

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De l’(in)constance du métalinguistique dans un corpus de vulgarisation médicale 19

Terminologies can be examined in many ways. One of them is to observe when they escape their
usual scope of usage. In order to reestablish intercomprehension, discourses that are intended
for "non-experts" attempt to give them meaning through an effort of discursive negotiation that
seeks to facilitate the emergence of the meaning of terms. The contrastive analysis of a corpus of
medical documents, brochures for cancer patients and discussion forums shows a specific
economy of discourse through metalinguistic forms that are both similar and specific. If the
corpus reveals expected uses of metalinguistics as an explanatory tool, it appears that there is
more to it.

INDEX
Mots-clés : socioterminologie, discours de vulgarisation, forums médicaux, activité
métadiscursive, variation, ajustement sémantique, validation terminologique, expertise
Keywords : socioterminology, popular discourses, medical forums, metadiscursive activity,
variation, semantic adjustment, terminological validation, expertise

AUTEUR
VALÉRIE DELAVIGNE
Université Sorbonne nouvelle-Paris 3CLESTHIA EA 7345

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