DELTA-OM
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Maria Barbi
Ces notes représentent un complement aux outils mathématiques (OM) du module de biophysique (1ère
année deug SVT). Elles ne fournissent pas un cours complet de mathématique, ni les détails des diffé-
rents sujets traités, qui devraient d’ailleurs représenter un bagage déjà acquis pour les étudiants de ce
cours. Leur but est plutôt de donner le cadre d’ensemble des concepts de mathématiques traités dans les
OM et utilisés dans les TD de biophysique (et plus en général dans la thermodynamique standard), de
façon à montrer comme les différents sujets sont logiquement corrélés entre-eux et avec les problèmes
traités en cours et TD. On cherchera donc à montrer l’unité logique des définitions et méthodes qui vont
de l’étude de fonctions aux variations finies à la définition de la différentielle et à celle d’intégrale, en
soulignant les idées générales qui en sont à l’origine et qui représentent la base de l’étude physique.
L’accent mis sur un traitement plutôt “synthétique” que “analytique” devrait permettre aux étudiants
une consultation ponctuelle de ces notes à tout moment, comme d’un résumé des quelques concepts
mathématiques importants pour les études physiques d’intérêt. Sans prétendre à avoir une rigueur ma-
thématique, on a suivi une approche plus physique et pragmatique des différents sujets, en donnant aussi
quelques exemples simples et des références explicites aux thèmes traités en TD. La présentation est
souvent et volontairement très élémentaire, car on a estimé plus important de donner à tous la possibilité
d’avoir un minimum d’intuition et de familiarité avec les méthodes classiques de la description physique
des systèmes et ses définitions de base.
7 En thermodynamique ? Retour au ∆ 7
7.1 Relations entre différentielles . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 8
7.2 Intégrer . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 9
9 Différentielles et équilibre 11
1
1 L’étude d’un système physique
Considérons un système physique quelconque (mécanique, thermodynamique... un ressort, un gaz, un
morceau de métal...) : comment peut-on décrire son comportement ?
Il faudra décrire son état et la façon dont il change si les conditions auxquelles il est soumis changent.
Et comment décrit-on l’état d’un système physique ?
On pourra définir différentes grandeurs physique caractérisant le système dans chaque état : température
T , pression P, volume V pour un gaz, mais aussi énergie cinétique des molécules qui le composent...
longueur l pour un ressort, vitesse v pour une masse ; énergie aussi pour un système mécanique, etc. Le
problème reviendra donc à étudier quelles valeurs de ces grandeurs sont permises une fois que l’on a fixé
les autres ou encore comment chacune de ces grandeurs change si les autres changent.
E P
E(l)
2
E(l)
1
P(V)
0
l V
l0 l1 l2 V0
F IG . 1 – (a) Énergie du ressort en fonction de sa longueur. (b) Isotherme dans le diagramme pression-
volume pour le gaz parfait.
Les courbes que l’on a dessiné répondent à la première question : comment une variable change en
fonction de l’autre. Dans les figures précédentes, on a choisi deux couples de variables pour chaque sys-
tème : l et E, V et P. On pourrait les appeler comme on fait souvent x et y, ou t et f . On parlerait en ce cas
des fonctions y(x) ou f (t), et l’on peut aussi bien écrire E(l), ou P(V ). Remarquons comme l’importance
du concept de fonction et sa puissance sont évidents : nous avons une expression mathématique simple et
synthétique qui permet de déterminer directement la valeur de la variable y, pour n’importe quelle valeur de
la variable x ; de plus, l’existence de cette relation explicite peut nous permettre de dériver facilement cer-
taines propriétés générales, (comme par exemple de savoir si y est toujours positive, si elle croit ou décroît
quand on augmente x, etc.), à travers une étude de la fonction. En décrivant la relation entre deux para-
mètres physiques comme une fonction mathématique, on se donne les moyens mathématiques d’étudier
cette relation.
2
lII , on écrira
∆l = lII − lI
pour indiquer cette variation, et de façon analogue on pourra parler d’une variation finie (c’est à dire, ni
infinie, ni proche de zéro) de la température ∆T = TII − TI , de l’énergie ∆E = EII − EI etc.
Le symbole ∆ indique, de façon générale, une variation finie. Il pourra être alors utilisé aussi dans des
contextes différents pour indiquer la variation d’une variable par rapport à sa valeur d’équilibre, plutôt que
à sa valeur de départ : un cas classique est encore l’étirement du ressort, pour lequel on pourra donc dans
certains cas utiliser le même symbole ∆l pour indiquer l − l0 , l étant son étirement à un instant donné, l0 sa
longueur d’équilibre.
En tout cas ∆ indique une différence entre deux valeurs d’une même variable, mesurées dans deux états
(en général) distincts.
∆y = y(xII ) − y(xI ) .
3
de noter que isotherme signifie à température constante pour écrire nRT = Cte . Donc, P(V ) =
nRT /V = Cte /V est la fonction qui donne la pression pour un volume choisi. Il faudra encore
déterminer la constante...
Dans certains cas, y ne pourra pas être déterminé par la seule valeur de x, mais sera dépendant d’autres
variables (Z, W , etc.) aussi. Cependant, si on connaît la fonction y(x, Z,W, etc.) et on est capable de dé-
terminer les valeurs des variables x, Z, W , etc. dans l’état final, on peut évidemment en déduire la valeur
finale de y aussi.
? Exemple : en utilisant la loi des gaz parfaits PV = nRT on peut exprimer la pression P en
fonction de la température et du volume : P = nRT /V , d’où, pour une transformation quel-
conque, on aura ∆P = nR(TII /VII − TI /VI ).
Pour conclure, nous avons donc une solution “facile” à la question “comment change une variable y si on
en fait changer d’autres x, Z, etc.”,dans tous les cas où on connaît explicitement la loi de dépendance entre
les deux, et les valeurs initiales et finales de x, Z, etc.
5.2 La différentielle d
Remarquons que dans l’expression précédente le symbole ∆ a exactement le même sens que ce précé-
demment décrit : c’est une variation, la différence des deux valeurs assumés par la variable x entre deux
états ou points possibles.
Cependant, la notation et les techniques de calcul changent quand une telle variation ∆x est envoyée
vers sa limite, et devient si petite que dans l’intervalle correspondant la courbe y(x) peut se confondre avec
une droite (voir fig. 2(b)). On utilise alors une notation spéciale pour exprimer cette condition de limite et
on indique la variation infinitésimale, qu’on appelle aussi la différentielle de x, avec le symbole d : dx.
En d’autres termes, si x ne varie que à l’intérieur du petit intervalle dx, alors la dépendance de y de x ne
peut pas être distinguée d’une dépendance linéaire, et la fonction y(x) peut être remplacée par l’équation
d’une droite. D’où la définition usuelle de dérivée comme pente de la droite tangente. Mais attention : les
dy
paramètres qui définissent cette droite (en particulier sa pente, dx ) changeront si on choisit l’intervalle dx
près de différentes valeurs de x (fig. 2(b)) : la dérivée de y par rapport à x est, elle aussi, une fonction de x.
4
dy
Conséquence importante : la connaissance de la dérivée2 dx nous permet alors de déterminer combien
y va changer si on fait varier sa variable d’une quantité très petite dx à partir d’un point de départ x : y va
passer de y(x) à y(x + dx) que l’on peut écrire, grâce au fait que dx est “très petit”, comme
dy
dy = (x) dx ;
dx
cette possibilité d’écriture nous sera bientôt très utile.
y(x) y(x) dx
pente
dy(x ) pente
y(x+
A
∆x) dx 1 dy(x )
dx 0
∆y
y(x) y(x) dy
A 0
∆x
x x
xA xB x1 x0
F IG . 2 – (a) Variations finies ∆x et ∆y pour une fonction y(x). (b) Les limites de ces variations, différentielles
dx et dy. Représentation de la relation géométrique entre dx et dy.
Toutes les fois que l’on écrit dx (ou dy, dT , dV etc.) on veut donc indiquer une telle variation “si petite
que” les autres variables du système, qui dépendent éventuellement de x (ou de y, T , etc.), changeront de
façon linéaire si x varie à l’intérieur de l’intervalle correspondant. La possibilité de traiter les problèmes de
ce point de vue “infinitésimal” est un des outils les plus puissants en physique. La raison est qu’elle permet,
justement, d’écrire des lois mathématiques pour décrire la dépendance réciproque des différentes grandeurs
physiques même la où l’on n’est pas capable d’écrire une simple fonction. La “physique” du système peut
cependant être toujours la même : elle est généralement décrite par une équation différentielle, reliant
entre elles les variations, donc les dérivées, des grandeurs physiques intéressantes.
Mais avant de revenir sur ce point, il nous est encore nécessaire de pouvoir traiter le cas où plusieurs
variables sont en jeu.
signification physique : comme partout, on pourrait mettre à la place de ces x, X, y n’importe quelle grandeur physique.
5
toutes les combinaisons de ces trois variables. Pour chaque ensemble de valeurs de Z, W etc., la dérivée
partielle de Y par rapport à X sera donc une fonction de X différente.
Pour “se souvenir” que la fonction dépend aussi d’autres variables que celle par rapport à qui on a
dérivé, on utilise pour les dérivées partielles un symbole différent de d, qui est 4 ∂ : par exemple, une
définition mathématique formelle de la dérivée partielle de la fonction Y (X, Z,W ) par rapport à sa variable
X s’écrirait :
∂Y ∆Y (X, Z,W )|Z,W
(X, Z,W ) = lim
∂X ∆X→0 ∆X
Dans cette écriture, l’indication |Z,W indique que Y varie quand l’on fait varier X mais en laissant Z et
W fixées à leurs valeurs de départ.
? Exemple : considerons encore la loi des gaz parfaits PV = nRT et l’expression de la pression
en fonction de la température et du volume, P = P(T,V ) = nRT /V . On a alors
∂P nR dT nR
|V = =
∂T V dT V
∂P d 1 −nRT
|T = nRT ( )=
∂V dV V V2
Un dernier rappel (moins important pour nous) : comme pour la dérivée totale, les dérivées partielles
possèdent aussi une interprétation géométrique : la différence est dans le fait que maintenant la fonction ne
dépend plus d’une seule variable mais de plusieurs. Pour la dessiner il faudra alors un espace plus grand,
avec autant d’axes qu’il y a de variables. La fonction sera alors décrite par une surface dans un espace à
trois dimensions, ou une “hypersurface” dans un espace encore plus grand. Si nous cherchons à décrire
géométriquement la dérivée par rapport à X, par exemple, d’une fonction de deux variables Y (X, Z), il
faudra d’abord considérer le plan défini par la condition Z = cte, puis identifier la courbe résultant de
l’intersection entre la surface-fonction et ce plan : la dérivée partielle par rapport à X est alors la pente de
la tangente à cette courbe.
Y
pente
Y
XZ
X
0
X
Z=cte
F IG . 3 – Derivée partielle.
Ajoutons pour finir qu’une fois définie la dérivée (totale ou partielle), on peut aussi définir les dérivées
d’ordre suivant comme applications répétées de la même opération de dérivation : donc on aura pour la
dérivée seconde d’une fonction y(x)
d2y
d d
= y(x) ,
dx2 dx dx
et on peut définir une dérivée partielle composée de Y (X, Z)
∂ 2Y ∂ ∂
= Y (X, Z) ,
∂X∂Z ∂X ∂Z
et ainsi de suite.
4 On appelle “familièrement” le symbole ∂ un “d” rond.
6
6 Les équations différentielles
Revenons au problème qui consiste à déterminer l’évolution, ou l’état final, d’un système physique
soumis à une transformation quelconque. Évidemment, la solution sera déterminée par l’état de départ, par
les opérations que l’on exécute, et par les propriétés du système en soi.
Sans vouloir refaire ici un cours de physique, on soulignera que très souvent l’information sur la nature
du système5 est donné par une ou plusieurs6 équations différentielles, c’est a dire des équations dont la
solution est une fonction. Une équation différentielle est en effet une équation faisant apparaître en général
une fonction et ses dérivées. Normalement, plusieurs solutions sont possibles ; il existe une famille de
fonctions qui est capable de résoudre l’équation différentielle. La solution unique du problème particulier
que l’on considère est alors déterminée par les conditions initiales du problème.
d 2x
−kx = m .
dt 2
S’agit-il la d’une équation différentielle ? Demandons nous quelle est la solution que l’on cherche, ici :
on s’intéresse à la dynamique du point de masse m, donc on cherche comment il se déplace au cours du
temps ; la solution sera donnée par la détermination de sa trajectoire. Cette trajectoire sera connue si l’on
peut écrire la position x à chaque instant t, donc la fonction x(t). En réécrivant l’équation précédente comme
d2x
−kx(t) = m (t)
dt 2
les choses sont plus claires : on cherche la fonction du temps8 x(t) qui est solution de l’équation du mou-
vement −kx = md 2 x/dt 2 , et qui devra aussi satisfaire un choix précis des condition de départ.
7 En thermodynamique ? Retour au ∆
Dans certains cas, comme par exemple dans la thermodynamique, il peut être plus intéressant de déter-
miner comment certaines grandeurs physique ont changé du départ (état I) à la fin (état II) d’une transfor-
mation que de connaître tous les états intermédiaires (la “trajectoire” suivie) 9 . La dérivation des variations
finies (totales) des grandeurs thermodynamiques de l’état initial à l’état final permettent quand même d’ac-
quérir des importantes informations sur la transformation étudiée, comme par exemple de savoir si elle a
dégagée de l’énergie ou en a absorbée, si elle peut être parcourue en sens inverse pour revenir à l’état de
départ (si elle est réversible) ou non, etc. On revient donc au problème de déterminer des variations finies
5 Dans l’expression nature du système on veut inclure ici soit les propriétés de la “matière” considérée soit les éventuelles forces
7
∆Y quand on ne peut pas exprimer la quantité Y comme une fonction explicite d’autres variables, supposées
connues.
et aussi
∂U
CV = |V .
∂T
? Exemple 2 : Considérant encore une fois la loi des gaz parfaits, PV = nRT , on peut écrire
par exemple la température comme fonction de la pression et du volume,
T (V, P) = (1/nR)V P ,
et en déduire, en calculant les dérivées partielles de cette fonction par rapport à V puis à P, une
relation entre les différentielles :
nRdT = PdV +V dP .
La possibilité d’écrire des relations sous forme différentielle devient particulièrement importante quand
on ne peut pas écrire la fonction Y explicitement, comme nous avons dit. Un exemple concret et important
est la détermination du travail fait par une force lors d’un déplacement infinitésimale dx de l’objet qui subit
cette force : on a alors
dW = F(x)dx .
8
Ce qui est remarquable, dans ce cas, est que, bien que l’on puisse connaître F(x), on peut n’avoir aucune
fonction W explicite associée au travail10 : on reviendra sur ce point.
? Exemple : Un autre exemple d’une relation entre les différentielles des grandeurs thermody-
namique est l’identité thermodynamique, que l’on utilisera très souvent, et qui s’écrit :
dU = T dS − PdV .
Cette relation relie entre elles les variations d’énergie interne U , entropie S et volume V . En-
core une fois, on peut remarquer que l’on ne possède pas une formule pour écrire l’énergie
interne comme fonction des autres variables ; cependant, les lois de la thermodynamique nous
fournissent cette information sur l’influence réciproque entre les variations de ces grandeurs.
Remarquons aussi que l’identité thermodynamique nous permets tout de suite d’écrire T et P
comme dérivées partielles de U : on obtient, en gardant le volume constant (sa variation dV
sera alors zéro) que
∂U
T= |V
∂S
et en gardant constante l’entropie (dS = 0), que
∂U
P= |S .
∂V
7.2 Intégrer
Nous avons donc compris par quels moyens il faudra aborder le problème de déterminer la variation
totale ∆Y d’une grandeur Y a cours d’une transformation : on doit partir de sa variation infinitésimale,
dY . Comment en déduire la variation totale ? Encore une fois la réponse est plutôt logique : simplement
il faudra “suivre” la transformation en la séparant en petits pas infinitésimaux, évaluer le changement de
Y à chaque pas, sommer tous ces changements pour avoir la variation totale. En d’autre termes, il faudra
calculer une intégrale.
P
W=− P(V)dV
P(V)
0
δW=−P(V)dV
P(V)
P(V)
1
V
V0 dV V1
? Exemple : un exemple que l’on devrait bien connaître est le calcul du travail fait par une
force F lors du déplacement du corps par exemple de x1 à x2 : on écrit dans ce cas
Z x2 Z x2
W= dW = F(x)dx .
x1 x1
10 On appelle conservative une force telle qu’elle peut être écrite comme la dérivée d’un potentiel ; dans ce cas seulement on peut
donner une expression explicite du travail comme variation du potentiel.
9
Dans l’exemple précédent, la première égalité est tout simplement l’écriture formelle que l’on utilise pour
indiquer que l’on somme toutes les petites variations dW de chaque pas de la transformation. La deuxième
égalité explicite la façon dont dW dépend de F et de x, et est l’étape que nous permet pratiquement d’évaluer
le travail fourni W . On doit utiliser l’intégration ici (plutôt qu’une somme d’éléments finis) tout simple-
ment parce que, comme nous avons appris, c’est seulement si le pas utilisé est assez petit (infinitésimal),
que nous sommes garantis du fait que les petites contributions dW peuvent être bien représentées par les
“approximations” F(x)dx (la courbe peut être confondue localement, pas par pas, avec la droite de pente
F(x)).
de l’état I à l’état II. C’est important de distinguer les deux cas, parce que la résolution d’un problème donné
peut être facilitée grandement si, justement, la variation de la fonction Y ne dépend pas de la transformation
particulière suivie mais seulement de ses points de départ et d’arrivée. Dans ce cas, on dit que la grandeur
Y est une fonction d’état, ce qui veut dire que Y est toujours la même pour un même état, indépendemment
de la façon dont on l’a obtenu.
? Exemple : Les exemples classiques et très utilisés de fonctions d’états en thermodynamique
sont l’énergie interne, U , et l’entropie, S pour un gaz parfait, que l’on peut définir comme
suit :
U = U(T ) = nαRT
S = S(V, T ) = nR ln(V T α )
où R est la constante des gaz, α vaut 3/2 pour un gaz monoatomique et 5/2 pour un diatomique,
n est le nombre de moles. Étant donné un état d’équilibre du gaz, on connaît sa température T ,
son volume V et sa pression P : énergie interne et entropie sont définies (et de façon unique)
pour cet état. C’est aussi intéressant de remarquer que l’énergie interne U du gaz parfait ne
dépend que de sa température, propriété que l’on utilisera souvent.
Encore une fois, il est utile de bien distinguer les deux type de fonctions, dont les variations dépendent
ou non du parcours. On utilise alors le symbole d seulement pour les différentielles exactes, et on introduit
un nouveau symbole12, δ , pour les grandeurs qui ne sont pas des différentielles exactes.
11 On dit aussi parfois différentielle totale exacte.
12 Que l’on appelle “delta”.
10
8.3 Travail et chaleur
Dans le cas de la thermodynamique, les deux différentielles non exactes que l’on considère le plus
souvent sont celles de travail et chaleur, δW et δQ. On comprendra pourquoi, d’un point de vue physique,
ces grandeurs ne sont pas des différentielles exactes : on ne peut pas dire, en effet, qu’un système thermo-
dynamique possède, dans un état donné, du travail ou de la chaleur ; on peut seulement parler de travail ou
chaleur que le système a reçu (ou donné) au cours d’une transformation. Leur valeur dépend donc stric-
tement de la transformation faite, et ne peut en aucun cas être déterminée seulement par les deux états de
départ et d’arrivée. Travail et chaleur sont donc toujours des variations : c’est aussi pourquoi, d’habitude,
on n’utilise pas les symboles ∆W et ∆Q pour décrire leur contribution à l’énergie d’un système, mais on
écrit directement W et Q. On pourrait peut-être choisir une convention différente ; mais l’important est de
comprendre que le travail et la chaleur échangés au cours d’une transformation vont dépendre toujours de
la transformation particulière que l’on a choisie, même si les point de départ et d’arrivée sont les mêmes.
Contrairement à W et Q, les fonctions énergie interne U et entropie S sont comme nous avons vu des
fonctions d’états, de même que les autres potentiels thermodynamiques que l’on rencontrera. On pourra
donc écrire la valeur de chacune de ces fonctions dans un état particulier (comme fonction des grandeurs
qui définissent cet état, par exemple S pourra être écrite comme une fonction de pression et volume, S(V, P),
ou de température et volume, S(T,V )). Cela nous permettra d’évaluer les variation d’un état I à un état II
simplement comme ∆Y = YII −YI .
On peut remarquer aussi que des variables plus simples comme température, volume et pression sont
des fonctions d’état : évidemment, si on peut définir l’état d’un système en assignant par exemple une
température parmi d’autres variables, cet état sera toujours défini par la même valeur de T .
Il sera donc intéressant d’identifier les fonctions d’état du système que l’on étudie, car leur variations
sont d’habitude plus faciles à évaluer ; cependant, il sera parfois nécessaire ou plus efficace de résoudre des
intégrales et d’obtenir d’abord, par exemple, travail et chaleur, et d’en déduire ensuite les autres grandeurs.
9 Différentielles et équilibre
Il y a enfin une dernière raison pour utiliser les différentielles pour étudier (par exemple) les systèmes
thermodynamiques. On peut remarquer que, dans la résolution d’un problème, il peut être intéressant de
chercher les valeurs de certaines variables, pour lesquelles un grandeur d’intérêt atteint sa valeur maximale,
ou minimale :
? Exemple : Si y est l’énergie E d’un système mécanique, son minimum correspond à l’état
d’équilibre du système ; de façon analogue, les potentiels thermodynamiques (U , −S, F , H
etc.) sont construits de telle manière que leur valeur minimale est associée aux états d’équilibre
thermodynamique sous des conditions diverses. Par exemple, le minimum de l’énergie libre
F correspond toujours à l’état d’équilibre d’un système qui évolue à volume et température
fixées ; le minimum du potentiel de Gibbs G à celui d’un système à pression et température
fixée ; pour l’entropie S, on sait qu’elle atteint toujours son maximum (qui correspond au
minimum de −S) pour un système isolé ; et ainsi de suite.
L’utilité de la notation différentielle dans la détermination de ces conditions d’équilibre est facile à com-
prendre. Reprenons le cas simple d’une grandeur y fonction d’une variable x. Comme nous avons dit, y(x)
peut représenter n’importe quelle grandeur physique, dont on cherche un minimum. Et nous savons que la
condition de minimum s’écrit
dy
= 0.
dx
Si on suppose donc d’avoir trouvé la valeur x0 pour laquelle y a son minimum, on aura, en utilisant notre
définition de différentielle, que, en correspondance de x0 ,
dy
dy(x0 ) = (x0 )dx = 0 :
dx
11
et donc qu’une petite variation de x autour de x0 ne fera pas varier y, de façon que dy = 0. Géométrique-
ment : la dérivée nulle de y à son minimum fait que, si on ne se déplace que de très peu en direction x, y ne
change pas. On peut donc indiquer la condition de minimum (ou maximum) de façon équivalente comme
dy = 0 ⇔ y max ou min
Plus simplement encore, la condition dx = 0 pour une variable quelconque signifie qu’elle ne varie pas, et
l’on peut utiliser en effet cette condition pour qu’elle demeure constante au cours d’une certaine transfor-
mation.
Cette notation simple devient particulièrement intéressante dans le cas des fonctions de plusieurs va-
riables : dans ce cas, pour trouver un minimum (ou maximum) de la fonction Y (X, Z,W ) il faut que toutes
ses dérivées partielles soient nulles. Mais en utilisant la formule de dY donnée au paragraphe 7.1, il est
facile de voir que cela correspond aussi à imposer la condition dY (X, Z,W ) = 0.
? Exemple : Nous venons de dire que l’entropie S atteint toujours son maximum pour un
système isolé. On peut le montrer en utilisant la relation thermodynamique (dU = T dS − PdV ,
paragraphe 7.1). Cette relation permet en effet d’écrire
1 P
dS = dU + dV
T T
pour le système à l’équilibre ; comme le système est isolé, son énergie ne peut pas varier, donc
dU = 0 ; et aussi, la variation dV de son volume doit être nulle, car autrement le système rece-
vrait du travail. Donc dS = 0, c’est à dire qu’elle est soit à un maximum, soit à un minimum. Il
nous faudra le second principe de la thermodynamique pour montrer qu’il s’agit, en fait, d’un
maximum.
Attention : la relation entre différentielles que l’on vient d’écrire dans l’exemple précédent ne vaut
que si les deux états voisins sont bien définis, c’est à dire s’ils sont des états d’équilibre. Ceci implique
aussi qu’il ne doit pas y avoir d’autres variables internes au système qui peuvent varier (à U, V fixés, par
exemple) et qui peuvent correspondre à des valeurs différents de la fonction considérée (S, dans l’exemple).
En effet, il y a des cas où une telle variable interne doit être ajouté : dans le exercices du TD4, cette variable
sera par exemple la positon x du piston qui sépare en deux un volume donné. En général, le problème se
présente sous cette forme dans tous les cas ou on utilise des potentiels thermodynamiques pour déterminer
l’état d’équilibre d’un système.
Dans ce cas, il faut ajouter la dépendance de cette variable interne, susceptible de faire varier le potentiel
thermodynamique en question.
? Exemple : Si on considère le potentiel thermodynamique énergie libre F = U − T S, on peut
écrire, à l’aide de l’identité thermodynamique, dF = −PdV − SdT . On dit alors que V et T
sont les variables “naturelles”de F , car si elles ne changent pas, alors dV = 0, dT = 0 et
donc dF = 0 : et effectivement F est à sa valeur minimale, à l’équilibre, pour un système à
température et volume fixés.
Mais si le système considéré contient une variable interne x capable de faire varier F , il faut
l’ajouter dans la définition de la différentielle de F : on aura
∂F
dF = −PdV − SdT + dx :
∂x
Pour déterminer la position d’équilibre dF = 0, en sachant que dV = 0 et dT = 0, il faudra
encore déterminer le x tel que ∂F
∂x = 0. C’est ce qu’on fera, en pratique, dans les exercices sur
les potentiels thermodynamiques.
12