Mouton, Benoist et Cordoba 2012

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MEP_Cleuziou_Intérieur 21/02/13 15:34 Page387

Aux marges de l’archéologie. Hommage à Serge Cleuziou, TAP, Éd. De Boccard, 2012

LE SERPENT, GARDIEN DU CUIVRE


ET DES EAUX DE LA MONTAGNE D’OMAN ?
qui ne peut donc être mis en accès libre sur quelque base de données ou par quelque portail que ce soit.
Tirage à part uniquement destiné à une utilisation privée. De Boccard conserve le copyright sur l’article,

Michel MOUTON, Anne BENOIST et


Joaquín M. CÓRDOBA*

« Connue sous le nom d’el-Hajar, la chaîne d’Oman […] se pré-


sente comme une immense île montagneuse, élevée et massive,
située entre la mer et le désert. […] Les ophiolites et serpenti-
nites de la nappe de Semail donnent un relief complexe de
crêtes et de collines nues qui font ressortir les couleurs variées
(vert sombre, rouge, brun, pourpre) de la roche. » (SANLAVILLE
2000, p. 138).
Ophiolitique : se dit de certains terrains éruptifs, riches en ser-
pentines – du gr. ophis, ios, serpent (Nouveau Larousse Illustré,
t. 6, 1902).

Résumé
Les fouilles menées, ces dernières années, sur plusieurs salles à colonnes et des bâtiments interprétés
comme des lieux de cultes, commencent à nous renseigner sur les rituels que pratiquaient les commu-
nautés de l’âge du Fer dans la péninsule d’Oman (1250-300 av. J.-C.). À cette période, dont les bases de
la chronologie ont été jetées dans le cadre des programmes que menait Serge Cleuziou aux Émirats arabes
unis dans les années 1980, le serpent était fréquemment représenté sur des objets et des récipients en céra-
mique et en bronze. Dans une première tentative pour explorer le monde symbolique de ces commu-
nautés, nous examinons ici la relation qui a pu exister entre ces représentations, et les activités qui nous
paraissent centrales dans l’économie des populations de cette période, la métallurgie du cuivre et l’acqui-
sition de l’eau au travers des galeries drainantes.
Mots-clés : Émirats arabes unis, âge du Fer, métallurgie du cuivre, galerie drainante, serpent.

Abstract
Recent excavations carried out in several pillared halls and in buildings interpreted as spaces for cult are
beginning to give out some information about rituals among Iron Age communities of the Oman peninsula
(1250-300 BC). In this period, for which Serge Cleuziou laid the foundations of a chronological framework
in the 1980s while working in the UAE, the snake was frequently represented on objects as well as on ceramic
and bronze vessels. In a first attempt at exploring the symbolic world of these past communities, this paper will
examine the possible relation between the snake symbol and activities which seem to have been central to the
economy such as copper metallurgy and water collection by means of drainage galleries.
Keywords: United Arab Emirates, Iron Age, copper metallurgy, drainage gallery, snake.

S
* M. Mouton, CNRS, UMR 7041 ArScAn, équipe « Archéologie du Proche-Orient hellénistique et romain », Nanterre
[[email protected]] ; A. Benoist, CNRS Archéorient, Maison de l’Orient Méditerranéen, Lyon
[[email protected]] ; J. M. Córdoba, Universidad Autonoma de Madrid, Faculdad de Filosofia y Letras, Madrid [joa-
[email protected]].

Aux marges de l’archéologie, GIRAUD J. ET GERNEZ G., ÉD., 2012, p. 387­401


(TRAVAUX DE LA MAISON RENÉ­GINOUVÈS, 16)
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est en décembre 1976 qu’une équipe française a commencé à travailler aux Émirats arabes unis (EAU),
C’ visitant dans l’oasis d’al-Aïn plusieurs sites parmi lesquels des installations de l’âge du Fer (1250-300
av. J.-C.). Cette mission était dirigée par Serge Cleuziou, et c’est dans le cadre de son projet que les premières
fouilles françaises ont été engagées sur un site de cette période, à Rumeilah (fig. 1). Elles s’y sont poursuivies
jusqu’en 1984 sous la responsabilité de Rémy Boucharlat. La même équipe s’est ensuite intéressée aux occu-
pations de l’âge du Fer du littoral du golfe Arabo-persique, au nord de Sharjah (Hamriyah), d’une oasis du
piémont (al-Madam) et des
Aux marges de l’archéologie. Hommage à Serge Cleuziou, TAP, Éd. De Boccard, 2012

vallées des montagnes d’Oman


(Bithnah, Masafi). Deux thèses
de doctorat ont posé les ja-
qui ne peut donc être mis en accès libre sur quelque base de données ou par quelque portail que ce soit.
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lons de la chronologie et défini


les premières typologies de la
culture matérielle1. Les résultats
de ces travaux, joints à ceux me-
nés par d’autres équipes émi-
riennes et étrangères, nous ont
peu à peu éclairés sur cette pé-
riode relativement prospère du
peuplement antique de la pé-
ninsule d’Oman. Par la seule
approche archéologique, la cul-
ture de l’âge du Fer est sortie de
l’oubli. La somme des données
accumulées nous permet au-
jourd’hui d’aborder, très pru-
demment, le domaine du cul-
Fig. 1 - Carte de la péninsule d’Oman. Répartition des principaux sites de l’âge du Fer tuel et du symbolique.
(dessin V. Bernard et DAO A. Benoist). Deux activités nous parais-
sent avoir fondé l’économie
des communautés de cette période, d’une part l’agriculture qui reposait sur l’irrigation à partir de galeries
de captage souterraines, d’autre part l’exploitation du cuivre de la montagne d’Oman qui aboutit à l’essor
de l’industrie bronzière. Dans le domaine du cultuel, l’importance du serpent nous apparaît au travers de
ses représentations que nous révèlent des sites chaque jour plus nombreux (al-Qusais, Bithnah, Masafi,
Salut, Saruq al-Hadeed). Nous allons discuter ici de la relation symbolique entre le serpent, la métallurgie
du cuivre et les techniques d’acquisition de l’eau, en nous fondant principalement sur la documentation
acquise dans le cadre des programmes menés par les missions archéologiques française et espagnole aux
Émirats arabes unis.
Ainsi, trente ans plus tard, l’initiative de Serge Cleuziou dans cette région de l’Arabie porte encore des
projets de terrain, menés par des chercheurs formés au sein de ses programmes, et par des collègues espa-
gnols associés depuis des années à ces travaux. Nous lui dédions cette réflexion.

La documentation
Des représentations de serpents ont été découvertes dès les années 1980 sur plusieurs sites de l’âge du Fer
des piémonts et des vallées de la chaîne d’Oman, au cours des prospections menées sur le territoire des Émi-
rats arabes unis et du Sultanat d’Oman (Nud Ziba2 ; BB-153 ; Am-Dhurra4) et dans les fouilles (al-Qusais5 ;
Rumeilah6). L’hypothèse d’un culte associé au serpent a très vite été évoquée7. Mais ce n’est qu’à la faveur
des découvertes récentes de sanctuaires à Bithnah, Salut, Masafi et Saruq al-Hadeed, auxquels étaient asso-

1. LOMBARD 1985 ; BENOIST 2000.


2. DE CARDI et al. 1994, fig. 8, p. 40-41.
3. HUMPHRIES 1974, fig. 10 : a-b.
4. DE CARDI 1977, fig. 3, p. 106.
5. TAHA 1983.
6. B OUCHARLAT et LOMBARD 1985, pl. 51, p. 7.
7. TAHA 1983 ; LOMBARD 1985.
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ciées plusieurs dizaines, voire plusieurs centaines de ses représentations, que nous avons pris toute la mesure
de l’importance du serpent dans les pratiques rituelles régionales.

La figuration du serpent
Le serpent est représenté
par de petites figurines métal-
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liques, découpées en cuivre


ou moulées en bronze, et par
des figurations incisées ou des
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appliques en relief sur des


vaisselles en céramique. Nous
n’en mentionnerons que
quelques exemples.
Les figurines en bronze et
en cuivre représentent géné-
ralement le serpent rampant
en zigzag8. De dimensions
variables (5 à 25 cm de long),
ces serpents à tête triangu-
laire ou ovale ont une forme
simple, une section aplatie,
sans détails et le plus souvent
Fig. 2 - Figurines de serpents en cuivre et en bronze recueillies dans le sanctuaire de sans décor (fig. 2). Beaucoup
Masafi 3 (Mission archéologique française aux Émirats arabes unis-CNRS). sont façonnés à partir d’une

simple plaque de cuivre découpée et martelée.


D’autres sont coulés en bronze. Quelques exem-
ples très rares portent des décors incisés de che-
vrons ou de petits cercles9 (fig. 3).
À Salut (Sultanat d’Oman) ont été trouvés plu-
sieurs exemplaires d’aspect massif, moulés en
bronze, en position rampante, le corps dessinant
des zigzags, de section légèrement aplatie quoique Fig. 3 - Figurine de serpent en cuivre portant un décor de petits
le corps de l’animal paraisse arrondi10. Ils se carac- cercles, provenant du sanctuaire de Masafi 3 (Mission archéolo-
térisent pas des éléments de métal rapportés : la gique française aux Émirats arabes unis-CNRS).
tête est marquée par deux protubérances sur les-
quelles sont représentés les yeux, et le corps est constellé de points demi-sphériques.
À Masafi (Émirat de Fujeirah, EAU), parmi le matériel recueilli il faut signaler quatre serpents moulés
en bronze, en zigzag, de 8 cm de long environ, trouvés dans la partie nord-est de la fouille. Ils constituaient
vraisemblablement le décor d’un même objet, un coffre, un petit autel ou une porte, puisqu’ils conservent
sur le ventre de petites tiges de fixation, et de part et d’autre de la tête et de la queue, le départ d’une tige
plate, peut-être un élément du décor qui réunissait tous ces serpents11. Un couteau miniature en bronze à
manche évidé, trouvé à Masafi 3, conserve la représentation incisée d’un serpent rampant en zigzag, aux
yeux représentés, deux traits sur le cou, et un décor de points sur le corps12.
Les représentations de serpents sont aussi très fréquentes sur les céramiques trouvées dans les sanc-
tuaires. Ce sont des jarres et des cruches à bec qui se rencontrent également ailleurs sans ces figurations,
mais aussi des coupelles à pied cylindrique plein ou ajouré et des coupelles à manche horizontal, formes
absentes des habitats et des tombes, généralement interprétées comme des brûle-encens.

8. TAHA 2009, pl. 53 ; BENOIST 2010a, fig. 4 ; HARAHSHEH 2008, fig. 26.
9. TAHA 2009, pl. 53 (gauche) ; BENOIST 2009, fig. 18.
10. AVANZINI et al. 2007, fig. 19.
11. BENOIST et al. à paraître, fig. 5.
12. Ibid., fig. 6.
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Fig. 4 - Fragment d’une jarre décorée d’une représentation de Fig. 5 - Anse d’une coupelle en céramique décorée d’une repré-
serpent, provenant du sanctuaire de Bithnah (Mission archéo- sentation de serpent, provenant du sanctuaire de Masafi 3 (Mis-
logique française aux Émirats arabes unis-CNRS). sion archéologique française aux Émirats arabes unis-CNRS).

Les serpents sont représentés en zigzag, très rarement enroulés, seuls pour la plupart, parfois très sché-
matiques mais généralement plutôt dans un style réaliste (fig. 4) : la tête est triangulaire ou ovale, parfois
marquée par deux prolongements latéraux arrondis ou en pointe ; les yeux sont marqués par un point ou
un petit cercle incisé, plus rarement par une légère protubérance arrondie ornée d’un point au centre ; la
gueule est représentée par une incision profonde ; plus rarement la langue est figurée par une incision four-
chue ; les narines sont indiquées par deux points ; les taches ou écailles sont très fréquemment suggérées sur
le corps par de petits cercles incisés ou par des traces de peinture. À Masafi 3 de nombreux serpents com-
portent des protubérances qui ressemblent à deux oreilles pointues qui pourraient évoquer la forme de la
vipère à cornes, espèce très venimeuse.
La position des serpents varie d’un récipient à l’autre. Ils sont fixés sur la partie haute des jarres, sur le
pied et la paroi externe des coupelles sur pied ou sur la poignée des coupelles à manche horizontal (fig. 5).
Dans de nombreux cas, la tête est orientée vers le bord du vase, elle est parfois posée sur le sommet de la
lèvre ou versée dans le récipient. Une petite série de coupelles de Masafi 3 et de Salut se distingue par la
représentation d’un serpent en relief lové à l’intérieur13.
Sur quelques objets, le serpent est associé à d’autres représentations animales ou humaines. À Masafi 1,
un brûle-encens à pied associe un serpent rampant sur le pied à des oiseaux perchés sur le bord. Un autre a
le pied formé par deux chameaux sur lesquels rampe un serpent, et porte un couvercle dont l’anse a la forme
d’un capriné. Il était associé à une figurine humaine nue, portant un turban sur la tête et un serpent enroulé
autour de la taille14. Du sanctuaire de Masafi 3 provient une figurine animale sur laquelle se mêlent des élé-
ments de caprinés (sabots fourchus), de chameau (long cou, tête plate), et sur laquelle rampent des serpents
peints et des serpents en relief, l’un serrant de petits objets ronds dans sa gueule ouverte15. À Bithnah
(Émirat de Fujeirah, EAU) un brûle-encens est formé d’une figurine humaine tenant au-dessus de la tête
une coupelle sur laquelle rampe un serpent16.

Les lieux aux serpents


Au fur et à mesure des découvertes de ces représentations, leur répartition est apparue clairement limitée
à un certain type de bâtiments. Elles ne se rencontrent ni dans les habitats ni dans les dépôts funéraires. On
distingue deux lieux aux serpents, les sanctuaires (monticule aux serpents d’al-Qusais, Bithnah 44, Salut,
Masafi 3 et Saruq al-Hadeed) et les salles à piliers interprétées comme des lieux de réunion ou des bâti-
ments administratifs (bâtiment G à Rumeilah, bâtiment II de Muwailah, et deux des trois bâtiments suc-
cessifs de Masafi 1). Les sanctuaires sont identifiés par la présence du serpent. Les salles à piliers, reconnues
à leur plan, n’ont pas toujours livré de représentations du serpent (Bida Bint-Sa’ud).

13. AVANZINI et al. 2007, p. 5 ; BENOIST 2010a, fig. 10.


14. BENOIST et al. à paraître, fig. 7.
15. BENOIST et al. à paraître, fig. 13.
16. BENOIST 2007, fig. 14.
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Les sanctuaires
Le premier de ces sanctuaires découvert est le monticule aux serpents d’al-Qusais (Émirat de Dubaï,
EAU). Un petit bâtiment rectangulaire construit en dalles de farush (calcaire coquiller), ouvert vers le nord
y était construit dans une zone littorale de sebkha, au centre d’une aire d’occupation étendue, marquée par
des foyers et des structures précaires17. Sur le sol se trouvaient des foyers et un abondant matériel caracté-
ristique du Fer II (1100-600 av. J.C.) comprenant des bols à long manche horizontal et des récipients à pied
cylindrique décorés de serpents en relief. Des figurines en bronze de l’animal et plusieurs centaines de
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pointes de flèches sont également mentionnées parmi le mobilier associé à la construction interprétée
comme un sanctuaire.
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À Bithnah (fig. 6), la plus ancienne construction (niveau I) comprenait un podium. Elle s’ouvrait vers le
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nord, sur une « aire sacrée » où des restes de sacrifices animaux étaient déposés en offrande dans des
fosses18. Dans une seconde phase d’occupation (niveau II), une salle à piliers indique que le lieu est devenu
un lieu de réunion (repas rituels ?). Ce que nous appelons « l’aire sacrée » s’est trouvée alors limitée par une
sorte de bordure, et de nouvelles fosses y furent creusées pour recevoir des dépôts d’ossements d’animaux.
Des petits puits ont été aménagés, parementés de pierres liées au mortier, destinés vraisemblablement à
recevoir des offrandes liquides. À l’est, un autel était entouré de fosses dans lesquelles étaient déposés des
fragments de bronze et des scories de cuivre. Au nord, une petite construction rectangulaire, ouverte au
nord, abritait un podium sur lequel étaient brûlées des offrandes. Au nord-ouest, un bassin alimenté par
un canal servait peut-être à des ablutions. Dans la dernière phase (niveau III) l’autel à l’est a été abandonné,

Fig. 6 - Plan du sanctuaire de Bithnah 44 au niveau III (Mission archéologique française aux Émirats arabes unis-CNRS).

17. TAHA 2009, p. 92-95, pl. 1, 10-11, 26-28, 46, 49, 52-54.
18. BENOIST 2007.
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remplacé peut-être par l’autel dressé au sommet d’une colline au sud du site (aucune relation stratigra-
phique), muni d’un chemin d’accès en zigzag sur la pente. La salle à piliers a été agrandie et au nord une
seconde construction abritant un podium a été aménagée à côté de la précédente. Tous les niveaux ont livré
des représentations de serpents.
Le sanctuaire de Masafi 3 n’est encore qu’en partie dégagé19. Les fouilles en cours ont révélé un espace
d’assez grandes dimensions, délimité par un mur épais en pierres brutes de grand calibre. Le matériel
recueilli est constitué uniquement de figurines de serpents, de quelques couteaux et pointes de lances en
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bronze et de céramiques décorées de serpents en relief (coupelles à anse horizontale, coupelles à pied cylin-
drique et petites jarres). Aucun autel ni podium n’ont été trouvés, ils pourraient se situer dans la partie nord
de l’espace fouillé, d’où proviennent le plus grand nombre de figurines de serpent en bronze.
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Le sanctuaire de Salut se dressait sur une plate-forme massive en brique crues au sommet d’une colline
rocheuse qui culmine à 25 m dans la vallée wadi Bahla20 et qu’entourait une enceinte massive. Au sommet,
auquel mène par le nord une série de rampes et d’escalier aménagés en zigzag, aucune construction n’est
plus visible, mais un petit bâtiment arrondi est conservé au pied de la colline, à l’intérieur de l’enceinte. Le
mobilier recueilli sur la plate-forme comprend un très grand nombre de céramiques décorées de serpents
en relief, dont plus d’une quarantaine de coupelles à anse horizontale, et des figurines de serpent en cuivre
et en bronze. Dans les fosses aménagées ont été trouvées des céramiques caractéristiques du Fer III, ce qui
témoigne de la continuité des rituels liés au serpent jusqu’à la fin de l’âge du Fer.
Saruq al-Hadeed (Émirat de Dubaï, EAU), dans la zone dunaire qui s’avance vers le piémont occidental
des montagnes d’Oman, est un vaste épandage de scories de cuivre qui s’étend sur plusieurs hectares.
Depuis 2003, des fouilles y sont menées par une équipe jordano-émirienne21. Le site n’a pas été explicite-
ment interprété comme un sanctuaire, mais l’abondant mobilier comparable à celui des sanctuaires que
nous avons décrits, incluant de très nombreuses figurines de serpent et des brûle-encens à pied en bronze,
des jarres de stockage, des cruches à bec et des brûle-encens à pied décorés de serpents en relief, forcent l’in-
terprétation. De très nombreux autres objets en bronze y ont aussi été trouvés, vaisselles et armes. Mais la
présence des céramiques aux décors de serpents invalide l’hypothèse d’un lieu consacré uniquement à la
production d’objets en bronze (dont des figurines de serpent). Il semble cependant qu’aucune construction
n’ait été mise en évidence, ni en relation avec le matériel cultuel, ni dans les épandages de scories. Si les
fouilles futures confirment l’absence d’installations construites, il faudra réfléchir à l’existence de lieux de
cultes installés à ciel ouvert ou aménagés en matériaux légers.

Les salles à piliers


Des objets figurant des serpents appa-
raissent en moins grand nombre dans les
salles à piliers rencontrées dans les zones
d’habitat. Elles sont toutes datées du Fer II
(niveaux II et III du bâtiment G à
Rumeilah22, bâtiment II à Muwailah23,
bâtiments des niveaux I, II et III de
Masafi 1, etc.). Ce sont des bâtiments com-
prenant une salle de grandes dimensions
(fig. 7), aux murs enduits avec soin, beau-
coup plus large que les pièces rencontrées
dans les habitats, et dont la couverture est
soutenue par un à trois alignements de
piliers, reposant sur des bases en briques
crues et en pierres, qui se prolongent par
des pilastres contre les murs. Dans chaque
Fig. 7 - Plan du bâtiment G à Rumeilah, avec sa salle à piliers (Mission bâtiment, des pièces de dimensions plus
archéologique française à Abu Dhabi-CNRS). modestes, souvent oblongues, bordent la

19. BENOIST et al. à paraître.


20. AVANZINI et al. 2007.
21. QANDIL 2003 ; HARAHSHEH 2008.
22. B OUCHARLAT et LOMBARD 2001.
23. MAGEE 2003.
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salle à piliers sur un ou deux côtés. Dans la plupart des cas ces pièces ont livré un abondant matériel de
stockage. L’accès à la salle à piliers se faisait à partir d’une porte assez large pour être à double battant (sug-
gérée par l’empreinte du jambage central dans le seuil à Muwailah), soit directement depuis l’extérieur soit
à partir d’une des pièces latérales.
Des aménagements intérieurs ont été conservés dans certains cas : un foyer ovale dans un angle à
Rumeilah (Émirat d’Abou-Dhabi, EAU) et Muwailah (Émirat de Sharjah, EAU), un petit foyer rectangu-
laire dans le niveau I à Masafi 1, une plate-forme rectangulaire vers le centre de la salle, face à l’entrée, à
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Muwailah, deux plates-formes latérales dans la salle du niveau II de Masafi 1. Autour des bâtiments à
colonnes ont été signalées de grandes fosses parementées en pierres ou en briques crues contenant des cen-
dres à Rumeilah et à Bida Bint-Sa’ud (Émirat d’Abou-Dhabi, EAU) et des fosses dans lesquelles étaient
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enfouis des dépôts de petites cruches et de récipients à pied cylindrique à Muwailah.


Les salles à piliers ont été interprétées comme des lieux de banquets et/ou de gestion administrative de
la communauté, pouvant aussi servir de lieu de stockage des biens collectifs. Toutes ont livré des représen-
tations de serpent, à l’exception de celle de Bida Bint-Sa’ud.

Le cuivre et le serpent
Les formations ophiolitiques de la chaîne d’Oman renferment de riches filons de cuivre que les sociétés
anciennes ont su extraire et transformer pour leurs besoins mais aussi pour s’enrichir au travers d’un impor-
tant commerce à longue distance. Le cuivre de Magan, exporté vers la Mésopotamie dès le IIIe millénaire,
a continué à être largement exploité par les communautés villageoises de l’âge du Fer qui n’ont jamais déve-
loppé la métallurgie du fer : l’âge du Fer dans la péninsule d’Oman, est un « âge du Fer sans fer »24. Des
sites de traitement du minerai de cuivre datant de cette période ont été reconnus à Raki 225, Bilad al-
Maidin26 et Saruq al-Hadeed 727. Ce dernier site témoigne de manière surprenante de la relation entre le
traitement de ce métal, son extrac-
tion, son exploitation, et la symbo-
lique du serpent, puisque la repré-
sentation de cet animal se trouve sur
de nombreux objets recueillis au
cœur d’un champ de scories qui
s’étend sur plusieurs hectares dans
une zone dunaire. Cette installation
nous apparaît comme une aberra-
tion logistique puisqu’elle se situe à
plus de 50 km du piémont de la
montagne d’Oman où se trouvaient
les lieux d’extraction. Par consé-
quent son implantation a été com-
mandée par des contraintes qui jus-
tifiaient le transport du minerai
avant traitement sur une aussi
grande distance. Pour cette raison,
on ne peut écarter l’hypothèse d’une
activité pratiquée dans un cadre
symbolique, social ou culturel parti-
culier. L’abondance du mobilier cul-
tuel portant la représentation du
Fig. 8 - Plan de Bithnah 44, au niveau II ; l’autel en forme de serpent est en haut à
serpent, suggère la présence d’un
droite, la tête triangulaire pointant vers le nord-ouest ; les fosses ovales en grand sanctuaire.
nombre sont les tombes d’un cimetière islamique (Mission archéologique fran- L’importance du cuivre et de la
çaise aux Émirats arabes unis-CNRS). métallurgie du bronze en relation

24. LOMBARD 1989.


25. WEISGERBER et YULE 1999, p. 114-116.
26. WEISGERBER 1981.
27. HARAHSHEH 2008.
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394 Le serpent, gardien du cuivre et des eaux de la montagne d’Oman ?

avec les pratiques cultuelles liées au serpent est confirmée sur les autres sites dont nous avons fait l’inven-
taire.
À Bithnah, une plate-forme trouvée dans le niveau II d’occupation a été interprétée comme un autel. Il
s’agit d’une construction circulaire d’un diamètre de 2,40 m partiellement détruite, émergeant du sol de 15
à 20 cm à peine, en terre argileuse jaunâtre, sur laquelle deux arcs-de-cercle en pierres dessinent des courbes
qui pourraient représenter le corps d’un serpent dont la tête serait au nord marquée par un épaississement
triangulaire (fig. 8). Devant cette tête était déposé un petit tas d’une quinzaine de scories bien calibrées
Aux marges de l’archéologie. Hommage à Serge Cleuziou, TAP, Éd. De Boccard, 2012

(environ 10 cm chacune), accompagnées d’aucun objet, ni associées à aucune trace pouvant témoigner
d’une activité métallurgique à cet endroit. Ce sont les seules scories de ce type recueillies sur le site. Leur
position devant la gueule du serpent évoque un dépôt intentionnel.
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Autour de ce même autel ont été mises au jour trois fosses de 50/60 cm de diamètre et de 60 cm de pro-
fondeur environ. La fosse C. 544 devant la tête du serpent, à proximité des scories, contenait deux grandes
jarres écrasées, dont une était décorée de grands serpents en relief sur l’épaule. L’ouverture d’une des jarres
était encore en place et clairement orientée vers l’autel ; dans ce grand tesson courbe posé au fond de la fosse
ont été recueillies plus d’une centaine de petites boulettes de bronze d’un calibre de 0,5 à 1 cm de diamètre.
Les deux autres fosses se trouvent à l’opposé, de l’autre côté de l’autel. La fosse C. 565 contenait les restes
de trois jarres de stockage dont une portait un décor de grands serpents sur la panse ; aucun fragment de
bronze ne leur était associé. La fosse C. 580, en partie perturbée par une tombe récente, ne contenait que
quelques tessons d’un grand bassin décoré de deux serpents affrontés peints sur la lèvre plate et d’une petite
jarre à col ; quelques boulettes de bronze leur étaient associées.
L’analyse des boulettes de bronze28 a montré qu’elles sont le résultat de la phase de réduction du métal ;
elles auraient nécessité encore une phase de refonte pour fournir le cuivre plus homogène habituellement
utilisé par les artisans. Ces éléments sont issus de petites coulures de cuivre piégées dans le four. Elles pré-
sentent habituellement des formes et des tailles variables, mais l’ensemble découvert ici est constitué de
billes de dimensions similaires ; de l’avis des paléo-métallurgistes elles ont été volontairement sélection-
nées, ce qui va dans le sens de l’hypothèse d’un dépôt cultuel.
Outre les représentations de serpents, d’autres objets en bronze ont été trouvés dans les salles à colonnes
et les sanctuaires.
À al-Qusais, les fouilleurs ont recueilli un nombre exceptionnel d’objets en bronze sur le monticule aux
serpents : 622 pointes de flèches, des dizaines de couteaux et de pointes de lances en bronze29. À Masafi 1,
une douzaine de couteaux et pointes de lances ont été trouvés dans le sanctuaire, contre une ou deux seu-
lement dans le bâtiment à colonnes30. À Bithnah, sept pointes de flèches se distribuaient sur les deux der-
niers niveaux du site cultuel, une seule en revanche a été trouvée dans la forteresse voisine de Bithnah 24
qui gardait l’entrée de la vallée31. À Saruq al-Hadeed, nous l’avons vu, une impressionnante collection d’ob-
jets en bronze est associée aux scories et au site cultuel, qui regroupe des dizaines de pointes de flèches, des
haches à collet, des poignards à manche évidé, des pointes de lance, des paniers, des bols et des brûle-encens
à pied cylindrique qui reprennent en métal les formes rencontrées ailleurs en céramique32.
Des objets en bronze ont été recueillis aussi dans certaines salles à piliers d’où proviennent également des
représentations de serpents, en particulier à Muwailah (plus de 2 000 fragments de bronze), où le bâtiment
a été interprété comme un centre de production d’objets en cuivre et un « centre de contrôle et de redis-
tribution de produits de haute valeur33 ». À Masafi 1, une jarre de stockage enfouie dans une niche amé-
nagée dans le sol de la salle à piliers du niveau II était remplie de blocs de bronze de grande taille. Une
seconde jarre, scellée par une épaisse couche de destruction de briques crues, contenait aussi des fragments
de bronze34.
L’association entre le serpent et la métallurgie du cuivre nous paraît acquise. Les représentations de ser-
pents associées à l’abondance de matériel en cuivre et bronze sans comparaison avec ce qui est trouvé ail-

28. Les analyses des scories et des produits métalliques sont effectuées par Sophie Pillault, sous la direction d’Alain Ploquin
(CRPG, Nancy) et Cécile Le Carlier (LAM-IRAMAT, Jarville-UMR5060, CNRS, universités de Belfort, Orléans et Bor-
deaux), dans le cadre d’un mémoire de Master 2 en Archéosciences à l’université de Dijon.
29. TAHA 2009, p. 95.
30. BENOIST et al. sous presse, fig. 6.
31. BENOIST 2007, p. 48.
32. HARAHSHEH 2008, p. 43-59.
33. MAGEE 2003, p. 189.
34. BENOIST 2009, p. 11, fig. 8-9 ; BENOIST et al. sous presse.
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Michel MOUTON, Anne BENOIST et Joaquín M. CÓRDOBA 395

leurs dans les habitats, les tombes et les forteresses, ainsi que l’évidence de dépôts intentionnels dans les
sanctuaires ne laissent pas de doute sur cette relation.

L’eau et le serpent
Avec une moyenne pluviométrique située autour de 90-100 mm, les marges arides de la péninsule
d’Oman ne peuvent être mises en valeur sans irrigation ; sauf conditions locales très particulières. Aux
Aux marges de l’archéologie. Hommage à Serge Cleuziou, TAP, Éd. De Boccard, 2012

périodes médiévale et moderne, l’irrigation reposait sur la technique du qanât. Sur la foi des traditions
conservées par l’historiographie arabe, cette technique est réputée avoir été introduite par les Perses, à la
période achéménide ou à la période sassanide35.
qui ne peut donc être mis en accès libre sur quelque base de données ou par quelque portail que ce soit.
Tirage à part uniquement destiné à une utilisation privée. De Boccard conserve le copyright sur l’article,

Mais la conviction de sa très grande ancienneté n’est venue parmi les archéologues que quelques années
plus tard, de la présence d’un qanât associé à un site de l’âge du Fer à Maysar (Sultanat d’Oman) dans
l’Oman central36. Et ce n’est qu’en 1991, au colloque Arabia Antiqua à Rome, que W. Yasin al-Tikriti
annonce la découverte dans l’oasis d’al-Aïn (Émirat d’Abu-Dhabi, EAU) d’une galerie souterraine à Hili 15
en relation stratigraphique avec un site d’habitat bien daté de l’âge du Fer II (Hili 17), des zones de culture
et un bâtiment fortifié (Hili 14)37. Depuis, d’autres qanâts ont été reconnus en relation directe avec des ins-
tallations de l’âge du Fer : à Umm Safah (oasis d’al-Madam, Émirat de Sharjah) deux bols bien caractéris-
tiques du Fer II ont été trouvés dans les déblais de creusement d’un des regards38 ; à Tuqeibah (oasis d’al-
Madam, Émirat de Sharjah) un puits à usage domestique s’ouvre au cœur du village de l’âge du Fer39, dont
le creusement, par sa forme et les traces d’outils qu’il conserve, est tout à fait comparable aux trois
« regards » fouillés le long de la galerie drainante AM-2, dégagée sur une trentaine de mètres40 ; à Bida
Bint-Sa’ud (oasis d’al-Aïn, Émirat d’Abou-Dhabi) la fouille d’un accès à la galerie a livré une abondante
céramique de l’âge du Fer41 ; à Nahil, à 45 km de l’oasis d’al-Aïn, une galerie est associée à un puits artésien
dont le remplissage conservait des céramiques de l’âge du Fer42 ; la céramique trouvée dans une galerie mise
au jour dans le wadi Bisyah (Sultanat d’Oman) appartient uniquement à l’âge du Fer43. Au total, plus d’une
douzaine de galeries drainantes sont aujourd’hui datées de l’âge du Fer ou associées à des sites de cette
période.
Toutes les galeries dont l’origine a pu être reconnue en amont captent des nappes de sous-écoulement de
wadis ou des nappes peu profondes accumulées dans des dépressions concentrant des ruissellements très
localisés (khubras). En cela elles se distinguent des qanâts aménagés durant les périodes médiévale et
moderne, qui sont des galeries profondes qui captent les nappes aquifères44. Le matériel rattaché directe-
ment aux galeries drainantes et la date des établissements auxquels ils se trouvent associés ne permettent
pas de faire remonter ce type
d’aménagements au-delà du
début du Fer II, soit l’extrême
fin du IIe millénaire ou le
début du Ier millénaire avant
notre ère. Les qanâts pro-
fonds captant les nappes
aquifères ne sont peut-être
apparus ensuite dans l’aire
iranienne qu’au Ier millénaire
de l’ère chrétienne45.
Fig. 9 - Plan et coupe de la galerie drainante AM-2 à Tuqeibah (al-Madam) dans sa partie L’exploration de la galerie
fouillée (Mission archéologique espagnole à Sharjah-Universidad Autonoma de Madrid). souterraine AM-2 à Tuqeibah

35. WILKINSON 1977, p. 128-130 et WILKINSON 1983.


36. WEISGERBER 1981, p. 223, 245 ; WEISGERBER et YULE 1999, p. 144, fig. 16.
37. AL-TIKRITI 2002a et 2002b ; AL-TIKRITI et HADDOU 2001 ; AL-TIKRITI et al. 2001.
38. BENOIST et al. 1997.
39. CÓRDOBA 2008.
40. CÓRDOBA et DEL CERRO 2005 ; CÓRDOBA 2006.
41. AL-TIKRITI 2002a.
42. AL-TIKRITI, mai 2008, communication au colloque de Pise « Eastern Arabia in the First Millennium BC ».
43. CREMASCHI 2007, p. 31.
44. B OUCHARLAT 2001 et 2003.
45. B OUCHARLAT 2003, p. 168-170.
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396 Le serpent, gardien du cuivre et des eaux de la montagne d’Oman ?

(al-Madam, Émirat de Sharjah) a révélé un étonnant tracé en zigzag (fig. 9). La partie souterraine de la
galerie drainante de Hili présente un tracé similaire46. Un coude avait déjà été remarqué dans la galerie sou-
terraine découverte au voisinage du site de Muweilah47. Cette forme sinueuse, si elle est confirmée par de
futures découvertes, pourrait être une caractéristique des galeries de l’âge du Fer ; les qanâts des périodes
postérieures sont au contraire plutôt linéaires pour permettre
les visées à la bougie qui régulaient la pente du plancher. L’ex-
plication proposée par W. Yasin al-Tikriti est séduisante :
Aux marges de l’archéologie. Hommage à Serge Cleuziou, TAP, Éd. De Boccard, 2012

chaque tronçon de galerie était creusé à partir des deux regards


ouverts à ses extrémités, et pour que les deux équipes travaillant
simultanément se rejoignent plus sûrement, la direction prise
qui ne peut donc être mis en accès libre sur quelque base de données ou par quelque portail que ce soit.
Tirage à part uniquement destiné à une utilisation privée. De Boccard conserve le copyright sur l’article,

par les excavateurs était volontairement déviée très légèrement


vers le même côté afin que, selon les lois de la convergence, ils
finissent toujours par se croiser (fig. 10).
De cette manière, le tracé des galeries souterraines se rap-
proche curieusement de la morphologie des serpents tels qu’ils
étaient représentés sur les jarres et les figurines. Mais rien ne
permet de supposer que cette analogie a été déterminante ni
même seulement signifiante dans la construction symbolique
qui fonde le culte de cet animal.
A-t-on par ailleurs des indices d’une relation entre le serpent
et l’eau ? En première analyse, il faut signaler que les conteneurs
céramiques qui portent des représentations de serpents sont
des jarres, grandes ou moyennes, des coupelles à anse et des
Fig. 10 - Vue de l’intérieur de la galerie drainante cruches à bec ponté, toutes formes qui ont pu servir à contenir
AM-2 à Tuqeibah (al-Madam), dont le tracé est un liquide et à le verser lors d’ablutions rituelles.
rendu sinueux par un angle très ouvert (Mission À Bithnah, associés aux dépôts d’ossements de caprinés
archéologique espagnole à Sharjah-Universidad
Autonoma de Madrid).
sacrifiés, ont été trouvés de très petits puits parementés de
pierres, dans lesquels était vraisemblablement versé rituelle-
ment un liquide à partir des jarres et des cruches à bec ponté déposées autour. S’il s’agissait d’eau, elle pou-
vait provenir d’un bassin mis au jour au nord-ouest du sanctuaire, qui était alimenté par un canal de 30 cm
de large. Suivi sur une dizaine de mètres, le canal montre une certaine sinuosité avant de se perdre vers le
nord. Un enduit de couleur blanche et une légère pente favorisaient l’écoulement de l’eau vers le bassin.
L’origine de l’eau n’a pu être déterminée. Rien n’indique une relation avec une galerie drainante ; au
contraire les habitants du lieu gardent la mémoire de sources d’eau dans ce secteur, aujourd’hui taries.
À Masafi, le sanctuaire aux serpents est établi à une soixantaine de mètres au sud de la salle à piliers, en
limite de la zone archéologique reconnue, sans doute à proximité des zones de culture antiques (palmeraie
actuelle). Deux canaux de surface, parallèles, longent le bâtiment à colonnes au sud-est, en direction du
sanctuaire (en cours de fouille). Le premier à l’est n’a été dégagé que sur une longueur de 2 m et semble sim-
plement creusé dans le sol ; il est probable qu’il alimente un réseau d’irrigation. En revanche, le second,
large de 35 cm et profond de 10 à 15 cm, suivi sur environ 25 m, conserve un revêtement d’enduit blanc
inhabituel dans les aménagements liés à l’agriculture. Il est vraisemblable que ces canaux aient été
connectés à un système ramenant l’eau des sources encore exploitées aujourd’hui à un peu plus de 2 km au
nord-est du site. Par ailleurs, un fossé large de 2 m environ et profond d’une trentaine de centimètres, borde
le site cultuel à l’ouest, qui a pu aussi être alimenté en eau.
La salle à piliers de Bida Bint-Sa’ud est à ce jour l’unique exemple d’un bâtiment de ce type qui n’a livré
aucune représentation de serpent48. Il nous faut signaler néanmoins sa proximité (une centaines de mètres)
d’un accès en escalier à une galerie drainante. Enfin à Saruq al-Hadeed 7, les seuls aménagements trouvés
en relation avec l’abondant matériel céramique et métallurgique sont deux puits d’un diamètre de 1 m
environ49, qui pourraient être des regards d’une galerie drainante ; la présence d’une telle galerie, si elle se
confirme, indiquerait un territoire agricole en ce lieu aujourd’hui enseveli sous les dunes.

46. AL-TIKRITI, mai 2008, communication au colloque de Pise « Eastern Arabia in the First Millennium BC ».
47. MOUTON 2001, fig. 15.
48. AL-TIKRITI 2002.
49. QANDIL 2003, fig. 6-A.
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Michel MOUTON, Anne BENOIST et Joaquín M. CÓRDOBA 397

Les sanctuaires et les salles à piliers se trouvent sur les lieux de vie des communautés ; ils sont donc asso-
ciés à des territoires agricoles qui nécessitent un système d’irrigation. Les sites de Masafi et de Bithnah sont
implantés en des lieux fertiles, et si des galeries drainantes n’y ont pas été trouvées, les canaux conservés
sont un indice fort de leur probable présence. Rumeilah était un des villages de l’oasis d’al-Aïn où des gale-
ries drainantes ont été trouvées (Hili), et de l’avis des fouilleurs du site, la forme allongée du village pour-
rait témoigner d’une installation le long de l’alignement des regards d’une galerie souterraine, à la gestion
de laquelle la salle à piliers était associée. À Hili même, le plan du bâtiment de Hili 14 laisse supposer la
Aux marges de l’archéologie. Hommage à Serge Cleuziou, TAP, Éd. De Boccard, 2012

présence d’une salle à piliers au sud50. À Salut le sanctuaire domine la très fertile vallée du wadi Bahla, où
plusieurs monticules dispersés dans un réseau de champs fossiles délimités par des murs de pierres et des
levées de terre, ont livré du matériel de l’âge du Fer (site S7/68). Dans les secteurs aujourd’hui désertiques
qui ne peut donc être mis en accès libre sur quelque base de données ou par quelque portail que ce soit.
Tirage à part uniquement destiné à une utilisation privée. De Boccard conserve le copyright sur l’article,

tels que Bida Bint-Sa’ud, la présence de galeries drainantes témoigne de l’existence d’un territoire agricole,
même modeste. À Muwailah, une galerie souterraine drainait l’eau depuis une dépression proche du site de
l’âge du Fer51 où a été trouvée une salle à piliers52. Les écoulements continus qu’offrent ces aménagements
au prix d’un travail considérable n’étaient pas destinés à alimenter les seuls besoins domestiques d’une ins-
tallation humaine. Le site d’al-Qusais, sur le littoral lagunaire du golfe Arabo-persique est l’unique exemple
d’un lieu ayant livré des représentations de serpents mais aucun indice d’une activité agricole : hasard de la
prospection, dans un secteur aujourd’hui totalement urbanisé ?
La relation entre les salles à piliers et les galeries drainantes a été à maintes reprises évoquée, ces dernières
nécessitant une forme de gestion administrative qui a pu être une des fonctions de ces bâtiments collec-
tifs53. Traditionnellement en Arabie le partage de l’eau des qanâts entre les différents propriétaires des jar-
dins à irriguer est assuré par une assemblée selon un code rigoureux et complexe fixé par la communauté54.
Chacun a droit à une part de l’eau, mesurée en volume
ou en temps d’écoulement. Un des outils utilisés pour
mesurer le volume de l’eau courant dans les qanâts est la
taza ou sheqfâ, surtout répandue en Afrique du nord55
mais aussi en Arabie56. Traditionnellement en céra-
mique, ces sortes de filtres percés de trous sont posées
dans les canaux pour réguler les écoulements mesurés en
durées. Des fragments de céramiques comparables ont
été trouvés à l’âge du Fer, toujours en relation avec des
salles à colonnes ou des installations hydrauliques57. La
fonction de ces objets est controversée parce qu’ils sont
très semblables à deux grands couvercles de brûle-encens
aux surfaces rubéfiées, trouvés aussi dans les salles à
piliers58. L’hypothèse fonctionnelle de la taza mérite
néanmoins d’être conservée, avec des réserves, pour les
deux exemplaires présentant des perforations de deux
calibres différents, ce qui est attesté sur les tazas
modernes pour faciliter des mesures différentes : le pre-
mier a été trouvé dans la salle à piliers de Bida Bint-
Fig. 11 - Céramique perforée, pouvant avoir eu une Sa’ud, située à proximité d’un accès à une galerie drai-
fonction comparable à celle des tazas modernes, nante souterraine, rappelons-le59 ; le second provient de
trouvée dans la salle à piliers de Rumeilah (Mission la salle à piliers de Rumeilah (fig. 11), et présente un
archéologique française à Abu Dhabi-CNRS). décor de lignes incisées ondulées60.

50. B OUCHARLAT et LOMBARD 1985, pl. 67.


51. MOUTON 2001.
52. MAGEE 2003.
53. AL-TIKRITI 2002b ; B OUCHARLAT et LOMBARD 2001.
54. WILKINSON 1977.
55. EL-HAJ 1982.
56. WILKINSON 1977, p. 107.
57. BENOIST 2000, p. 353-357.
58. MAGEE et THOMPSON 2001, fig. 14 ; BENOIST 2010b, fig. 9.
59. AL-TIKRITI 2002b, p. 108.
60. B OUCHARLAT et LOMBARD 1985, pl. 51-56, illustré à l’envers.
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398 Le serpent, gardien du cuivre et des eaux de la montagne d’Oman ?

La relation entre le serpent et les galeries drainantes nous apparaît bien moins sûre que la relation entre
le serpent et le cuivre. Nous la retiendrons néanmoins en hypothèse. La relation entre les salles à piliers et
les galeries drainantes alimentant les terres agricoles semble plausible. Mais les indices de pratiques rituelles
en relation avec l’eau dans les sanctuaires demandent à être confirmés.

Le symbolisme du serpent
Aux marges de l’archéologie. Hommage à Serge Cleuziou, TAP, Éd. De Boccard, 2012

On s’attendrait à une forte parenté symbolique entre les rituels de l’âge du Fer omanais et les dépôts
contemporains de serpents lovés à Bahrain ; mais aucune relation apparente n’a pu être établie avec ces pra-
tiques61 très récemment rapprochées des conceptions de l’Inde védique62. Aucun dépôt ou offrande de ser-
qui ne peut donc être mis en accès libre sur quelque base de données ou par quelque portail que ce soit.
Tirage à part uniquement destiné à une utilisation privée. De Boccard conserve le copyright sur l’article,

pent n’a été trouvé dans la région omanaise. Et d’ailleurs, la représentation en spirale qui pourrait figurer
les serpents ainsi sacrifiés est rare dans la région omanaise, en comparaison avec les centaines de figurations
connues qui montrent l’animal rampant, presque toujours ondulant ou en zigzag.
La dimension symbolique du serpent est complexe. Tantôt représentation astrale, tantôt image des puis-
sances souterraines, il se tient au cœur des mythes, de la genèse biblique au récit fondateur de la société
aztèque. Les divinités qu’il caractérise, les légendes auxquelles il appartient, les rituels qui lui sont associés
transmettent des idées et des symboles dont la somme ne permet aucune analyse syncrétique. Plutôt que
de croiser ces connaissances, nous admettrons que la symbolique des pratiques rituelles de la culture de
l’âge du Fer omanais est ancrée dans le domaine culturel des sociétés de l’Orient ancien.
Le serpent y est le gardien de l’arbre de la connaissance de l’Ancien Testament. Attribut du Dieu Ninazû,
il est le protecteur de la médecine en Mésopotamie. Il favorise la vitalité dans les incantations ougaritiques.
Dans l’épopée de Gilgamesh, le serpent vole au héros la plante de l’immortalité, lui qui chaque année renaît
dans sa peau neuve. Il est à la fois lié à la connaissance et au savoir, mais aussi à la fertilité, à la vitalité, à la
vie.
Le savoir qu’il détient et protège fait de lui le gardien et le dispensateur des richesses et des pouvoirs
acquis par la possession de secrets, de connaissances cachées, inaccessibles au commun des mortels. Ces
connaissances permettent de dompter la nature, ses forces et ses ressources, et d’en tirer profit. Dans ce
domaine il est souvent lié à la terre et aux énergies primaires du monde souterrain, sources de biens pré-
cieux mais aussi de forces imprévisibles et dangereuses, génératrices de chaos63. Il est ainsi associé à certains
arts du feu, en particulier à la métallurgie. C’est vraisemblablement dans cette perspective, en relation avec
ses pouvoirs liés à la fois au monde souterrain et aux richesses cachées qu’il participe aux pratiques rituelles
en relation avec le cuivre, attestées dans les sanctuaires de l’âge du Fer omanais. Cette relation se retrouve
au nord de l’Arabie, dans le temple de Hathor construit sur les mines de cuivre de Timna, d’où proviennent
un serpent en bronze doré et plusieurs fragments d’autels ornés de serpents64.
Par sa relation avec la fertilité, le serpent est lié à l’agriculture et à l’eau qui donne la vie. Ainsi, en Égypte
le serpent est l’attribut de Remenutet, déesse des greniers pleins et du pays fertile mais aussi protectrice des
nourrissons65 ; en Mésopotamie, il est associé au dieu Ninguishzidda, fils du Dieu Ninazû et seigneur du
bon arbre, dieu de la végétation66. C’est à cette dimension que renvoient les représentations de couples de
serpents entrelacés, l’association avec des palmiers dattiers et des animaux à cornes, que l’on rencontre sur
des objets mésopotamiens et sur certains bas reliefs d’Arabie du sud67. En Arabie de manière plus générale,
il semble lié au monde des djins et avoir une valeur apotropaïque68.
Dans la glyptique mésopotamienne, le serpent est représenté stylisé en flots ondulants69. Le serpent
monstrueux qui sert de trône au dieu Napirisha d’Anshân a été interprété par Pierre Amiet comme un sym-
bole de la vie souterraine et de l’eau70. Les serpents sont associés à des génies des eaux sur une table à liba-

61. Il est intéressant de noter néanmoins la découverte récente, à Masafi, de récipients en céramique dont la pâte présente des inclu-
sions blanches, comparable à certains types décrits à Bahreïn. Mais cette identification demande à être vérifiée par des analyses
pétrographiques.
62. POTTS 2007, p. 69.
63. DHORME 1949, p. 120 ; ROOT 2002, p. 169.
64. ROTHENBERG 1972, p. 152 et 154.
65. LURKER 1980, p. 100.
66. DHORME 1949, p. 120.
67. ANTONINI 2004, p. 88 ; AUDOUIN et ARBACH 2004, fig. 4.
68. RUTTEN 2008.
69. AMIET 1966, fig. 1284, 1294, 1295.
70. AMIET 1988, p. 78.
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Michel MOUTON, Anne BENOIST et Joaquín M. CÓRDOBA 399

tions du XIIIe siècle av. J.-C. à Suse71. C’est précisément à la période élamite, au IIe millénaire avant notre
ère, que le serpent est le plus clairement invoqué en relation aux eaux souterraines, des eaux qui jaillissent
du sol et fertilisent la terre. Inshushinak, dieu tutélaire de Suse, est représenté avec un serpent sur une série
d’empreintes élamites :
« Il apparaît comme un dieu de fertilité, intimement associé à la terre, non pas celle des profondeurs où siègent
les puissances infernales, mais celle qui se trouve immédiatement sous le sol et d’où jaillit l’eau douce des sources
et des rivières ; il incarne en somme les eaux souterraines qui à travers lui se répandent à la surface du monde pour
Aux marges de l’archéologie. Hommage à Serge Cleuziou, TAP, Éd. De Boccard, 2012

fructifier les plantes et multiplier les troupeaux. […] Quant aux serpents, […] plutôt qu’une évocation des puis-
sances chtoniennes, ainsi qu’on l’admet trop souvent, il semble qu’ils étaient un symbole de fertilité72. »
Bien que la représentation de ce dieu associé au serpent ne soit attestée en Elam que jusqu’au XIIIe siècle
qui ne peut donc être mis en accès libre sur quelque base de données ou par quelque portail que ce soit.
Tirage à part uniquement destiné à une utilisation privée. De Boccard conserve le copyright sur l’article,

av. J.-C.73, le symbolisme du serpent de l’âge du Fer omanais pourrait s’apparenter à son principe, que
l’animal soit une représentation de la divinité elle-même ou qu’il soit seulement un attribut d’une divinité
que nous n’avons pas identifiée.
Ainsi, si la relation entre la métallurgie du cuivre et la figuration du serpent nous paraît bien attestée
pour la période étudiée, la relation du serpent avec l’eau et les galeries drainantes n’est encore qu’une hypo-
thèse.
L’association du cuivre et des eaux souterraines nous semble pertinente dans le cadre étroit de la sym-
bolique orientale du serpent. Ces deux ressources sont les plus précieuses pour les communautés de l’âge
du Fer : l’eau fertilise la terre et le cuivre sert à la fabrication des armes, des outils et des objets symboliques.
Elles proviennent de sous la terre des piémonts et des montagnes de l’Oman : d’où le serpent les fait jaillir
et les révèle, lui qui est le gardien des richesses cachées ? Le serpent symbolique est un élément inquiétant
en relation avec le monde souterrain mais il incarne aussi la fertilité et la richesse que procure la maîtrise
des ressources de ce monde souterrain. Le creusement des galeries drainantes représentait un travail consi-
dérable, pour capter et canaliser l’eau souterraine jusque sur les lieux de vie et de culture ; dans les croyances
des communautés de l’âge du Fer leur abondance ou leur tarissement pouvait être lié au bon vouloir du ser-
pent. Les filons de cuivre étaient cherchés dans la montagne, et chaque fois leur puissance était aléatoire ;
là encore la fortune dépendait peut-être de la bienveillance du serpent. Et comment ne pas rapprocher la
forme serpentine de l’animal tant de fois représenté sur le mobilier cultuel, avec la sinuosité souterraine des
galeries drainantes et des filons de cuivre des montagnes ophiolitiques ?

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