Culture Litteraire Ecole 121469
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Maîtrise de la langue
Mars 2008
© MEN/DGESCO ► eduscol.education.fr/ecole
Introduction
1. Une culture littéraire pour les élèves de l’école primaire
Une c ulture litt éraire se c onstitue p ar la fréquentation ré gulière d es œuvres. Elle suppose u ne
mémoire des textes, mais aussi de leur langue, une capacité à retrouver, chaque fois qu’on lit, les
résonances qui re lient les œuvres entre elles. Elle est un réseau de références autour desquelles
s’agrègent les nouvelles lectures. Bref, qu’il s’agisse de comprendre, d’expliquer ou d’interpréter,
le véritable lec teur vient sans ce sse p uiser da ns les m atériaux riches et di versifiés q u’il a
structurés dans sa mémoire et qui sont, à proprement parler, sa culture. Si l’on souhaite que les
élèves du collège puissent adopter un premier regard réflexif sur ce qu’ils lisent, il est nécessaire
que, dès l’école primaire, ils aient constitué un capital de lecture sans lequel l’explication resterait
un exercice formel et stérile. Depuis deux siècles, la littérature adressée aux enfants (ou que les
jeunes lecteurs ont reconnue pour leur), qu’elle soit ou ne so it pas « de jeunesse », est riche de
chefs-d’œuvre. Elle s’ est c onstituée c omme un u nivers o ù les th èmes, le s pe rsonnages, le s
situations, les images ne cessent de se répondre. Combien de fois le thème du mensonge a-t-il été
exploré par un a uteur, ou celui de la peur au moment de s’endormir? Combien de jouets ont-ils
voulu devenir des êtres hu mains ? Combien de fo is le loup a-t-i l été cruel, l e renard malin ? Ce
monde i maginaire, qui v ient compléter le m onde réel et p ermet d e mie ux le comp rendre, ne
s’ouvre ni ne se c lôt a vec u n texte, n i m ême avec l’œuvre d’ un a uteur. Po ur qui veut devenir
lecteur, il s’explore comme un continent dont il faut retrouver les routes et les paysages familiers,
ne serait -ce que pour mieux s’étonner devant ce ux qui éch appent aux att entes. La l ittérature
adressée à l’enfance ne s’est jamais située en dehors de la littérature que lisent les adultes. Elle se
porte seu lement vers des lect eurs qu i n ’ont pas les mêmes in terrogations su r le se ns du m onde
que leurs parents, qui n’ont pas non plus la même expérience de la langue. En quelque sorte, elle
fait la courte échelle aux pl us jeunes pour l es introduire à l’univers infini des lectures à venir. À
cet égard, elle constitue véritablement le domaine littéraire de l’écolier. […] Les enseignants du
cycle 3 choisiro nt les œu vres qu’ils feron t lire à leurs élèves en pr enant appui sur u ne large
bibliographie af in de c onstruire un trajet de l ecture, certes ambitieux, mais q ui leur s oit a ussi
véritablement a dapté. Ce tra jet doit êt re va rié et permettre la rencontre de s dif férents genres
littéraires et édit oriaux habituellement adressés à l’enfance (album s, b andes dessinées, cont es,
poésie, romans et récits illustrés, théâtre). En guidant leurs choix par une liste nationale d’œuvres
de référence, on v ise aussi à fa ire de la culture scolaire une culture partagée. Il importe en effet
que tous les élèves aient eu la chance, dans leur scolarité, de re ncontrer des œuvres — dont il s
puissent parler entre eux, dont i ls puissent discuter les valeurs esthétiques ou morales qui y sont
mises à l’épreuve —, q ui soient ce socle de ré férences que pers onne ne pe ut i gnorer. Ce q ui
importe, d’une manière générale, est que l’enfant ait des contacts fréquents avec ces textes (c’est
à- dire qu’il apprenne à y retourner) et qu’il en rencontre beaucoup. Lire deux ou trois livres par
an en classe est in suffisant. Cela conduit à renvoyer vers l a famille la fo rmation du lecteur
véritable (et qui l e re stera) d ont on sai t qu e, à la fin d e sa scol arité p rimaire, il pe ut lire san s
fatigue un li vre par se maine. Ce rtes, face aux sol licitations de toute nat ure d ont l’enfant e st
aujourd’hui l’objet, sinon le consommateur, c’est là un combat audacieux. Qui, sinon l’école, est
susceptible de le mener ?
Que ce soit en début ou en fin de cycle, que ce soit au cycle 3 ou dans les cy cles précédents, le
principe de la séquence de littérature est relativement stable. Elle s’organise autour d’une œuvre
qui peut être très courte (un poème, une nouvelle) ou beaucoup plus ample (un roman, une pièce
de théâtre). Il importe avant tout de donner une unité à la séquence et de parcourir l’œuvre en un
temps r aisonnable. En effet, a u-delà d’une sema ine, déjà, la mé moire de l’en fant et sa patience
sont mises à rude épreuve. On n’oubliera pas que, si les morceaux choisis ont joué si l ongtemps
un rôle décisif dans la pédagogie de la lecture, c’est parce que chaque lecture pouvait être traitée
en une unique séa nce. On peut donc considérer qu’un module de littérature ne devrait pas durer
plus de quinze jours, mais qu’il peut, en rev anche, se concentrer sur une séance unique limitée à
une demi-matinée.
La le cture dé bouchant sur une co mpréhension assu rée du te xte e st l’objectif p remier. À l’éco le
primaire, il ne s’agit en aucune façon de proposer aux élèves une initiation à la lecture littéraire
qui passerait par une explication formelle des processus narratifs ou stylistiques. Celle-ci met en
jeu un e relation au langage trop com plexe pour l a majorité d es enfants de cet âge. À l’ école
primaire, la littérature est si mplement considérée comme un ensemble de textes, dont la q ualité
littéraire ne fai t aucun doute e t que l’on s’appr oprie en les lisant. C ette lecture doit être
suffisamment approfondie pour que l’élève g arde la mémoire de ce qu’il a lu et puisse en faire
une référence de s es le ctures ul térieures. Si l’explication n ’est pas a u programme de l’école
primaire, une réflexion collective débouchant sur des propositions interprétatives est possible et
nécessaire. Dès l’école maternelle, l’enfant peut réfléchir sur les enjeux de ce qu’on lui lit lorsque
le texte résiste à une interprétation immédiate, a fortiori au cycle 3. L’interprétation prend, le plus
souvent, la forme d’ un débat très l ibre dans lequel on réfléchi t collectivement sur l es e njeux
esthétiques, ps ychologiques, m oraux, philosophiques q ui so nt a u coeur d ’une ou p lusieurs
œuvre(s). Le maître dispose de quatre instruments pour parcourir le texte : la lecture qu’il peut
lui-même en faire à haute voix, la lecture silencieuse des élèves, le résumé partiel qu’il élabore et
qu’il peut dire ou donner à lire en lecture silencieuse, la lecture à voix haute des élèves. Il peut
aussi, évidemment, ra conter un liv re, en particulier lorsqu’il s’agit de m ontrer l es liens qui
existent av ec ce lui que l’on e st en tr ain de lire . On essa iera d’évi ter d e re courir à la le cture
préparée hors de la classe, car, d’une part, elle est très diversement effectuée par les élèves, du
fait du plus ou moins grand contrôle dont ils disposent dans leur famille (et ce sont évidemment
les élèves ayant le plu s b esoin d ’une prép aration qu i, le plu s sou vent, arrivent en classe san s
l’avoir faite), et, d’a utre part, le pr ogramme d e lecture pe rsonnelle h ors de la classe est déj à
suffisamment copieux. C’est en articulant avec pertinence les quatre modalités de lecture que l’on
avance dans le texte. Il convient de faire de sa découverte un travail collectif structuré, fruit d’une
réflexion commune. Il appartient au maître de préparer avec soin ce cheminement dans l’œuvre
en pr enant garde à ré server à sa p ropre l ecture à h aute voix les p assages clés et les passages
complexes. En effet, un enfant de cycle 3 n’est pas encore un lecteur expert et il ne peut traiter de
manière autonome les aspects les plus complexes du texte. Il a, en particulier, besoin d’un soutien
du maître pour soulager sa mémoire dès que l’information devient trop abondante (il faut alors lui
permettre de synthétiser ce qu’il a d éjà lu ou entendu p our qu ’il p uisse lire ou éc outer