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UNIVERSITE IBN TOUFAIL – KENITRA


FACULTE DES SCIENCES JURIDIQUES,
ECONOMIQUES ET SOCIALES

COURS :

DROIT INTERNATIONAL PUBLIC

(LA FORMATION DU DROIT INTERNATIONAL)

Pr YACINE TANANE
2

INTRODUCTION :
Le droit international public, parfois appelé droit des gens, peut être défini comme
l’ensemble des normes et des institutions qui ont vocation de régir la société
internationale1. Aussi, ce droit a pour objet de règlementer les relations au sein de la
société internationale2. Ces relations et rapports sont l’œuvre de sujets de Droit
international et qui sont traditionnellement, les Etats, récemment, les organisations
internationales et exceptionnellement les individus. En d’autres termes, c’est le droit des
relations internationales. Mieux encore, c’est le droit applicable à la société internationale.
Malgré sa brièveté, cette définition a le mérite, premièrement de consacrer l’existence
d’une société internationale distincte de la société interne, nationale ou étatique.
Deuxièmement, elle pose les limites des champs d’application respectifs du droit
international et du droit interne. Et enfin, elle atteste du lien sociologique entre le droit et
la société ; chaque société a besoin d’un droit qui est un produit social3.

En revanche, le droit international privé, quoique c’est un droit qui s’applique sur le plan
international, est l’ensemble des règles relatif aux relations entre personnes privées de
pays différents. Il a pour objet non seulement de résoudre les conflits de lois et de
juridiction mais aussi de traiter de la nationalité et de la condition des étrangers. Le droit
international public s’adresse et s’applique aux Etats et aux organisations internationales
intergouvernementales par le biais de normes prescriptives, prohibitives ou permissives.

A partir du traité de Westphalie en 1648, et jusqu'aux années soixante-dix du XXe siècle,


l’Etat est l’élément central et exclusif du système international. Aujourd’hui, il s’avère
difficile d’ériger l’Etat comme la composante exclusive du système international. A côté, en
dessous et au-dessus de lui d’autres acteurs le concurrencent. Mais, il reste que la société
internationale demeure une société interétatique. Ceci n’empêche pas d’ignorer le constat
que l’Etat à l’heure actuelle souffre d’une crise multiforme : crise de souveraineté, crise de
territorialité, crise de sécurité, crise idéologique, crise de légitimité.

Néanmoins, l’Etat est créateur de politique internationale, et toutes relations et rapports


sur la scène internationale se font par et à travers l’Etat. Il demeure la structure politique
logique et naturelle pour tout peuple cherchant à intervenir dans la vie et sur la scène
internationale. Indépendance et reconnaissance passent par l’Etat. En outre, la société
internationale étant interétatique, l’ordre se fait par et pour les Etats, par leurs
interventions volontaires, et pour leur bien-être. En matière de désordre au sein du
système international, la capacité régulatrice des Etats, en principe, rend l’importance de
ces derniers encore plus nécessaire.

1
Pierre-Marie Dupuy : Droit international public, Précis Dalloz 2e édition, 1993, p. 1.
2
Catherine Roche: L’essentiel du droit international public. 4e édition, les carrés 2010, p. 3.
3
Daillier, Forteau, Pellet: Droit international public, L.G.D.J 8e édition 2009, p. 43.
3

La société internationale présente un certain nombre d’ambivalences quant à son


caractère. Elle est non seulement, à la fois interdépendante et individualiste ; mais elle est
aussi hétérogène, conflictuelle et règlementée (organisée, normalisée.)

L’interdépendance et l’individualisme se manifestent de manière concomitante.


L’interdépendance est, à n’en pas douter, un phénomène qui s’est largement amplifié dès la
fin du XXème et le début du XXIème siècle. Elle est née de la conscience collective que l’Etat, à
lui seul, est incapable de faire face à toutes ces manifestations nouvelles et soudaines de la
société internationale ; d’où la nécessité de la coopération internationale sous l’égide d’un
nombre toujours grandissant d’organisations internationales. Les Etats ne peuvent se
passer de celles-ci, elles sont capables, à un certain point, d’influencer les agendas des Etats
et même de conditionner leurs actions. L’interdépendance est tout azimut, la société
internationale est arrivée à un niveau d’interdépendance jamais égalé auparavant. Elle
touche tous les domaines de la vie internationale économique, politique, stratégique,
écologique…

Au même temps, la société internationale est individualiste. En effet, elle est assujettie au
principe de la souveraineté des Etat.Les Etats se veulent égaux et indépendants.Ils sont très
regardants lorsqu’il s’agit de la plénitude de l’exercice de leurs compétences et abhorrent
l’intervention des autres Etats dans leurs affaires internes. Cette attitude concerne aussi
bien les Etats anciens que les nouveaux. Ces derniers encore plus car ils sont avides
d’autonomie, d’indépendance et d’affirmation de soi sur la scène internationale. Leur
nombre a augmenté et cela en deux phase, la première concerne le processus de
décolonisation qui a connu son summum dans les années soixante-dix. Et la deuxième
phase est celle des années quatre-vingt-dix du siècle dernier (URSS, Yougoslavie).

On outre, la société internationale se caractérise par une nature décentralisée, les Etats ne
sont pas sous la subordination d’un « super Etat ». A la différence de la société interne où
les pouvoirs publics, qui ont le monopole de la puissance, contraignent et subordonnent les
citoyens.

Par ailleurs, la société internationale est paradoxalement hétérogène, conflictuelle et


organisée. Premièrement, l’hétérogénéité est une donnée objective de la société en
question ; tous les Etats ne disposent pas du même niveau de développement économique,
les distances entre ces niveaux pour certains Etats sont abyssales. Le clivage Nord-Sud
atteste de la division entre le monde des riches et le monde des pauvres. La mondialisation
est un phénomène qui a aggravée encore plus la situation de certains Etats : ceux qui sont
dans les circuits internationaux et profitent de la richesse et ceux qui en sont exclus. La
disparité est d’autant plus prononcée lorsqu’il s’agit de la puissance. Ce phénomène qui est
très difficile à maitriser, éphémère et contraignant, place les Etats sur une échelle qui
comprend, à son étage supérieur, la catégorie de « superpuissance » suivie de celle de
4

« grande puissance », puis celle de « puissance régionale » et enfin celle de « petite


puissance » ; cependant, sans trop détailler, ces catégories comprennent de sous-
catégories.

Deuxièmement, la société internationale est obérée par les conflits armés. Pourtant, le
recours à la guerre a été, dès le début du XXe siècle, mis en cause. Le pacte Briand-Kellogg,
ou pacte de Paris signé le 27 août 1928, stipule que les puissances signataires
« condamnent le recours à la guerre pour le règlement des différends internationaux et y
renoncent en tant qu'instrument de politique nationale dans leurs relations mutuelles. »
Cette volonté d’interdiction du recours à la force dans les relations internationales a été
confirmée par les dispositions de la Charte des Nations unies, (appelée aussi Charte de San
Francisco 26 juin 1945), article 2 paragraphe 4 « Les Membres de l'Organisation
s'abstiennent, dans leurs relations internationales, de recourir à la menace ou à l'emploi de
la force, soit contre l'intégrité territoriale ou l'indépendance politique de tout État, soit de
toute autre manière incompatible avec les buts des Nations Unies. » L’interdiction du
recours à la force se verra consacré une valeur coutumière générale par la Cour
Internationale de Justice (CIJ), lors de son avis Nicaragua contre États-Unis de 1986
(Activités militaires et paramilitaires au Nicaragua et contre celui-ci), et qui transcende la
Charte des Nations Unies. L’invasion du Kuweit par l’Irak en 1991 a donné lieu à la
formation d’une coalition internationale chargée de rétablir le respect du principe en
question. L’acte d’agression entrepris par l’Irak a été jugé comme une violation lourde du
droit international. Depuis cet évènement, les Etats, stigmatisés, ne privilégient nullement
le recours à la guerre dans leurs relations en vue de régler un différend. Cependant, et
depuis l’effondrement du communisme, on assiste à une explosion de conflits armés et
principalement de guerres civiles.

Troisièmement, et pourtant cette société internationale est organisée, policée, règlementée,


normalisée. Cet aspect est dû au fait à l’existence de deux éléments majeurs : la conscience
chez les Etats de leur interdépendance accrue et de la profusion des organisations
internationales et des espaces de discussion et d’échange. Concernant le premier point, les
Etats se voient obligés de coopérer dans tous les domaines et de tirer profit de la
mondialisation. Les Etats ne limitent plus leur diplomatie à la seule recherche d’alliance de
guerre et de paix. L’enchevêtrement des intérêts augmente le nombre et la cadence de
conclusion de traités de coopération. Le second point renvoi au foisonnement des
organisation internationales de toute catégorie et dimension qui offrent un espace de
rencontre et de concertation quasi permanent aux Etats. A l’heure actuelle, les Etats
disposent, en plus du cadre institutionnel conventionnel, d’espaces de rencontre « ad-hoc »
caractérisé par la facilité des procédures de réunion, par exemple le forum de Davos, forum
mondial des droits de l’Homme à Marrakech en novembre 2014…
5

Concrètement, le droit international public vise à limiter les tendances d’anarchie dans les
relations internationales par le biais d’un arsenal normatif destiné à assurer la coexistence
entre les sujets du droit international. Cependant, le plus souvent, on reproche à ce droit, à
tort, son manque d’efficacité car ne disposant pas de sanctions. En effet, un pouvoir exécutif
international fait défaut à la société internationale et par conséquent, l’application du droit
international dépend entièrement de la volonté de ses sujets.

Ceci étant, et afin de saisir la portée du droit international public, il importe d’étudier les
modes de formation de ce droit. En droit international, pareil qu’en droit interne, la
question des sources et de leur hiérarchie est une question de grande importance.
Concernant les sources, on ne retiendra que celles qui créent à l’égard des sujets de droit
international et principalement les Etats, des droits et des devoirs, des obligations. Par
conséquent, ne seront pas étudiés les principes relevant de la sociologie des relations
internationales (analyse des acteurs des relations internationales, de leur puissance, de
leurs objectifs et de leurs instruments) ou de la pratique diplomatique par exemple.

Généralement, on distingue les sources formelles et les sources matérielles. Les sources
formelles sont les procédés d’élaboration du droit et les diverses techniques qui
permettent de considérer qu’une règle accède et appartient au droit positif. En d’autres
termes, les sources formelles, simples procédés techniques, correspondent à la formulation
et à l’introduction dans le droit positif du contenu de la règle. Les sources matérielles,
quant à elles, constituent les fondements sociologiques des normes internationales, leur
base politique, morale ou économique. Ce sont les structures internationales et les
idéologies dominantes, mais aussi, les comportements étatiques et les résultats officieux de
négociations encore inachevées. Le contenu du droit dérive des sources matérielles. Elles
ne peuvent parfaire à elles seules une norme internationale, cependant elles participent au
processus d’émergence du droit positif, en cela qu’elles influencent les procédures
juridiques qui matérialisent les sources formelles4.

Les sources formelles du droit international public sont énumérées et déterminées par
l’article 38 de la Cour Internationale de Justice (CIJ) 1945, stipule que : «
1. La Cour, dont la mission est de régler conformément au droit international les différends
qui lui sont soumis, applique :
a. les conventions internationales, soit générales, soit spéciales, établissant des règles
expressément reconnues par les Etats en litige ;
b. la coutume internationale comme preuve d'une pratique générale acceptée comme étant
le droit ;
c. les principes généraux de droit reconnus par les nations civilisées ;

4
Daillier, Forteau, Pellet: Droit international public. Op, cit, p. 124 ; 125.
6

d. sous réserve de la disposition de l'Article 59, les décisions judiciaires et la doctrine des
publicistes les plus qualifiés des différentes nations, comme moyen auxiliaire de
détermination des règles de droit.

2. La présente disposition ne porte pas atteinte à la faculté pour la Cour, si les parties sont
d'accord, de statuer ex aequo et bono. »

Cet article dispose d’un caractère universel car tous les Etats membres de l’ONU sont
parties au Statut de la CIJ. Cependant, cet article n’est pas à l’abri de la critique puisque, en
effet, il ne répertorie pas toutes les sources formelles, il ne fournit pas une liste exhaustive
de ces dernières. Il manque les actes unilatéraux des Etats et les décisions des
organisations internationales.

S’agissant de la hiérarchie des sources, il importe de faire la distinction entre les normes
juridiques internationales et les sources formelles du droit international. On désigne par
norme le contenu et la substance d’une règle préparée en fonction des techniques et
procédures d’une source formelle. Pour illustrer ce qui précède, on peut dire que les
normes coutumières trouvent leur fondement dans la coutume qui est une source formelle.
Une norme peut provenir de plusieurs sources différentes comme par exemple les normes
concernant la délimitation du plateau continental, selon les Etats, peuvent avoir comme
source soit le cadre conventionnel soit la coutume. Il est vrai aussi qu’une même source
peut donner lieu à de nombreuses règles de substance diverse et différente, l’exemple du
traité en est la preuve.

Cette distinction est importante dans la mesure où il ne peut y avoir de hiérarchie de


sources en droit international. L’article 38 de la CIJ en introduisant les sources formelles du
droit international ne procède à aucune classification d’importance : les traités ne sont pas
supérieurs à la coutume et inversement. Cependant, il existe une hiérarchie entre les
normes internationales qui n’est pas fonction de l’origine de celle-ci, c’est-à-dire de la
source formelle, mais de leur caractère intrinsèque. Par exemple en cas de conflit de
normes on privilégie les normes « impératives » jus cogens,aux normes conventionnelles
ou coutumières.

Afin d’appréhender la question des sources du droit international dans sa totalité, il est
judicieux d’étudier et les sources conventionnelles et celles non conventionnelles. Cette
distinction qui prend en considération l’article 38 de la CIJ, a la particularité de montrer,
d’une part, que le droit international n’est pas strictement consensuel, aussi qu’il existe
d’autres sources que celles mentionnées dans le précédent article et d’autre part
l’amplification des sources conventionnelles, le droit des traités, par rapport aux autres
sources.
7

I- La formation conventionnelle du droit international public


II- La formation non-conventionnelle du droit international public
8

CHAPITRE I : LA FORMATION CONVENTIONNELLE DU DROIT


INTERNATIONAL PUBLIC

Historiquement, l’apparition des traités est concomitante à celle de communautés


politiques organisées obligées de nouer contact les unes avec les autres. Actuellement, le
traité est le moyen le plus utilisé et privilégié dans les relations internationales, et
spécialement celles de coopération entre les Etats. La prédilection pour cet instrument
juridique formel permet aux Etats une liberté d’engagement et une garantie de l’égalité de
leurs souverainetés.

Les règles régissant le droit des traités ont été codifiées par la Commission du Droit
International des Nations Unies (CDI) et cela dans le cadre de la Convention de Vienne sur
le droit des traités du 23 mai 1969.

L’étude des traités nous amène à se pencher sur les modalités de leur conclusion, les
conditions de leur validité, leurs effets, et enfin leur terminaison. Mais avant, il importe de
voir les données fondamentales relatives à la notion de traités.

SECTION I :DONNEES FONDAMENTALES

La convention de Vienne de 1969 qualifiée de « traité des traités », constitue un


remarquable succès concernant la codification des diverses règles préexistantes en la
matière. A la lumière de ce qui précède, il importe de voir la définition du traité telle que
dégagée par la convention de Vienne et ensuite la classification des traités.

A - DEFINITION

L’article 2, §1. A de la convention de Vienne stipule que : « L’expression « traité » s’entend


d’un accord international conclu par écrit entre Etats et régi par le droit international, qu’il
soit consigné dans un instrument unique ou dans deux ou plusieurs instruments connexes,
et quelle que soit sa dénomination particulière »

A la lecture de cet article on peut dégager trois éléments essentiels. Premièrement, il s’agit
d’un accord international en forme écrite. Ne concerne cette définition que les accords
conclus par écrit à l’exclusion des accords verbaux par exemple. Cependant, la convention
de Vienne n’ignore pas les accords qui n’ont pas été conclus par écrit, et ne leur dénie pas
une valeur juridique et c’est ce qui ressort de l’article 3.

Deuxièmement, le qualificatif « traité » renvoi à la fois au contenu du traité lui-même


conclu entre les parties et ensuite à l’instrument formalisant cet accord, c’est-à-dire, le
moyen ou le procédé par lequel l’accord a été établi, par exemple un « échange de lettres »,
9

ou un « échange de notes ». Reste à signaler que la convention de Vienne admet qu’un


même accord peut être formalisé par deux ou plus de deux instruments.

Troisièmement, la convention de Vienne admet l’existence d’une pluralité de


dénominations et qu’elles sont similaires. Dans son arrêt du 1er juillet 1994 concernant
l’affaire de la délimitation maritime et des questions territoriales entre Qatar et Bahreïn ; la
CIJ a établi « qu’un accord international peut prendre des formes variées et se présenter
sous des dénominations diverses ». Dans la pratique, les parties disposent de la liberté du
choix du qualificatif attribué à leur engagement en fonction de son objet et de la procédure
à suivre : traité, convention, protocole, déclaration, charte, pacte, statut, constitution,
accord, modus vivendi, échange de notes, échange de lettres, mémorandum d’accord,
procès-verbal approuvé, concordat (les accords de Saint-Siège), code de conduite.

Cependant, la CIJ reconnait que « la terminologie n’est pas un élément déterminant quant
au caractère d’un accord ou d’un engagement international. » Dans la pratique des Etats les
termes les plus utilisés restent traité, accord, convention.

B - CLASSIFICATION DES TRAITES

La convention de Vienne ne procède pas à une typologie de traités même si implicitement


elle fait la distinction entre accords sous forme écrite et ceux qui ne le sont pas. Cependant,
la distinction la plus utile et opératoire et celle basée sur le nombre des parties à l’accord.
En effet on distingue entre les traités bilatéraux et les traités multilatéraux. Les traités
bilatéraux regroupent deux sujets du droit international et historiquement ce sont les
premiers à avoir été utilisés par les Etats. Cette pratique a grandement contribuée à la
construction du droit international général des traités. Les traités multilatéraux ont gagné
en ampleur dans la pratique internationale contemporaine du fait de l’internationalisation
de la société internationale.En effet, les organisations internationales, dont le nombre n’a
cessé de croitre, constituent un cadre de négociation et de coopération pour les Etats,
l’exemple des Nations Unies est révélateur à ce sujet.

C – DESCRIPTION D’UN TRAITE

A l’examen du texte d’un traité, quel que soit son objet, on y trouve deux types de
dispositions. Premièrement, des dispositions opératoires au début et surtout à la fin du
traité qui renseignent sur les parties signataires, le lieu et la date de sa conclusion. En
outre, vers la fin du texte, elles établissent l’ensemble des conditions techniques dans
lesquelles le traité produit ses effets à savoir la date, à l’égard de qui,et éventuellement les
conditions dans lesquelles les parties peuvent y introduire des réserves, comment d’autres
Etats pourront y adhérer, quelles sont les modalités de modifications… Deuxièmement, les
10

clauses normatives proprement dites, et qui intéressentla substance, le contenu matériel de


l’accord : l’objet et les droits et les obligations.

De ce qui précède, l’existence de clauses opératoires et celles normatives explique la nature


même du traité. D’une part, c’est un acte juridique tel que perçu par la convention de
Vienne de 1969. D’autre part, c’est un processus de création de normes juridiques, une
source formelle, comme cela est perçu par l’article 38 du Statut de la CIJ5.

SECTION II : LA CONCLUSION DU TRAITE

La notion de conclusion de traité admet deux interprétations ; au sens restreint du terme,


elle renvoie à l’expression du consentement définitif des Etats à être liés par les
dispositions de l’accord. Dans un sens large, et c’est ce qui ressort de la convention de
Vienne, elle signifie les différentes étapes qui aboutissent à l’engagement des Etats, à savoir
l’élaboration, le consentement à être lié et enfin l’introduction du traité dans l’ordre
juridique international. Mais avant, il importe de voir le caractère complexe de la
conclusion

A –COMPLEXITE

Cette complexité est la fois double, elle concerne la mise en jeu d’ordres juridiques internes
et internationaux, et la transformation de la société internationale.

1 – COEXISTENCE DE DEUX ORDRES JURIDIQUES

La conclusion d’un traité est un acte de souveraineté ; l’Etat volontairement s’impose un


engagement. Le processus par lequel se réalise cet engagement fait intervenir le droit
international en ce qui concerne l’entrée en vigueur du traité par exemple. Par ailleurs, la
décision de l’Etat de consentir à être lié relève du droit interne. Les dispositions du droit
constitutionnel de chaque Etat comprennent les modalités de répartitions des compétences
entre les différentes autorités étatiques. En effet, la constitution fixe l’ordre des
compétences au sein de l’Etat ; elle désigne les autorités compétentes en matière de
conclusion de traité : celles chargées de la négociation, celles chargées de la ratification.

Etant une opération à procédure, la conclusion des traités est par nature une matière régie
par le droit international et le droit interne.

5
Pierre-Marie Dupuy, op. cit, 182.
11

2 –TRANSFORMATION DE LA SOCIETE INTERNATIONALE

L’intensification des relations internationales par l’augmentation du nombre des acteurs a


favorisé la multiplication de traités multilatéraux. En effet, l’accroissement des
organisations internationales, favorisant le renforcement de la coopération et la solidarité
internationales, constituent non seulement un cadre dans lequel sont négociés une
multitude de traités entre Etats, mais elles ont la capacité de conclure des accords et avec
d’autres organisations, et avec les Etats. La procédure inhérente à la conclusion de ces
traités reste complexe car elle met en jeu un nombre important d’Etats, une négociation
dans le cadre d’une organisation renforcée (conférence internationale, structures
préexistent d’une organisation internationale).

B – ELABORATION DU TRAITE

L’élaboration du traité est une opération complexe qui fait intervenir une procédure
spécifique. Elle passe par deux étapes ; celle de la négociation et celle de l’adoption.

1 – LA NEGOCIATION DU TRAITE

Avant d’entamer la phase proprement dite de la négociation du traité, se pose la question


du négociateur et des pleins pouvoirs.

a –L’autorité habilitée à négocier.

Selon les dispositions de la convention de Vienne : « L'expression "pleins pouvoirs"


s'entend d'un document émanant de l'autorité compétente d'un État et désignant une ou
plusieurs personnes pour représenter l'État pour la négociation, l'adoption ou
l'authentification du texte d'un traité, pour exprimer le consentement de l'État à être lié par
un traité ou pour accomplir tout autre acte à l'égard du traité. » (art 2, §1, al c).

Le Chef de l'Etat autorise des négociateurs à agir en son nom. Cette autorisation prend la
forme d'un document dénommé « pleins pouvoirs ». La signature de cet instrument habilite
en conséquence celui qui en est porteur à élaborer un texte au nom de l'autorité suprême
de l'Etat6.

Symbole de la souveraineté, la pratique des pleins pouvoirs survit depuis l’époque des
monarchies européennes. La convention de Vienne reconnait le caractère coutumier de
cette pratique, néanmoins elle laisse aux Etats la liberté d’y recourir ou pas. Les chefs d’Etat
et de gouvernement, les ministres des Affaires étrangères, les chefs de mission
diplomatique et les représentants accrédités d’un Etat à une conférence diplomatique ou

6
Claude Chayet: Les accords en forme simplifiée. Annuaire français de droit international. 1957, V3, p. 3.
12

auprès d’une organisation internationale ne sont pas concernés par cette pratique car ils
disposent de la présomption de représentativité. La présentation des pleins pouvoirs par le
plénipotentiaire reste une simple formalité, cependant certains problèmes peuvent se
poser à savoir la qualité étatique de l’entité représentée (elle peut être contestée) et aussi
la compétence de l’autorité ayant délivré les pleins pouvoirs7.

Généralement, c’est le droit constitutionnel de chaque Etat qui détermine l’autorité


compétente pour négocier. La négociation étant une phase où il ne s’agit pas d’un
engagement définitif mais simplement d’élaborer un traité, le choix porte sur l’exécutif.
C’est la solution admise par presque tous les Etats car c’est l’exécutif qui en réalité dispose
des moyens techniques nécessaires à la négociation (profils techniques, données,
opportunité...)

b – Le déroulement de la négociation.

Les Etats ne s’engagent pas à la légère, ils évitent le risque de se voir d’être liés au-delà de
leur volonté une fois l’accord conclu. Ils définissent les obligations en fonction de leurs
intérêts propres. En effet, l’objet de la négociation est de provoquer des amendements ou
des contre-propositions ou les deux à la fois à des projets de textes lors de leur discussion.
Les projets amendés ou pas vont devenir les dispositions du futur traité. Cependant, les
dispositions ne sont pas définitives, elles sont susceptibles d’être remises en cause tant que
le traité n’est pas adopté.

2 – L’ADOPTION DU TRAITE

L’adoption marque la fin de la phase de négociation. Elle renvoie à deux actes distincts ;
d’une part, l’arrêt du texte qui indique que la négociation a pris fin et que les négociateurs
considèrent que le texte qu’ils ont élaboré est en principe satisfaisant et acceptable. Et
d’autre part, l’authentification qui est une procédure par laquelle les négociateurs
expriment que le texte concorde avec leurs intentions et qu’il est définitif.

La différenciation entre ces deux actes est notoire en matière de traités multilatéraux
puisque le texte est d’abord adopté par l’organisation puis il est soumis à la signature des
chefs de délégation. Cependant, en matière de traités bilatéraux les deux opérations se font
en un acte unique à savoir la signature.

Il importe de signaler que le traité ne s’impose pas encore aux Etats qui l’ont signé, puisque
l’effet obligatoire découle de l’expression du consentement à être lié et non pas de la
signature. Toutefois, la situation d’un Etat qui a signé est tout à fait différente decelle d’un
Etat qui s’est abstenu de le faire. En effet, du fait de la signature, l’Etat reste tenu par

7
Daillier, Forteau, Pellet: Droit international public. Op, cit, p. 145
13

certains droits et devoirs comme par exemple « s’abstenir d’actes qui priveraient un traité
de son objet et de son but » (art 18 CVDT) tant qu’il n’a pas exprimé son consentement à
être lié.

C – L’EXPRESSION DU CONSENTEMENT A ETRE LIE

Les modes d’expression à être lié diffèrent que l’on est en présence d’un traité en forme
solennelle ou celui en forme simplifiée.

1 – Traité en forme solennelle.

Les traités en forme solennelle (traités formels, solennels ou « traités proprement dits »)
sont conclus en nom de chef de l’Etat et soumis à ratification ; c’est une procédure « à
double degré ». En effet, la procédure est longue, caractérisée par la distinction entre la
phase d’authentification du texte du traité, matérialisée par la signature, et la phase du
consentement à être lié qui se traduit par l’examen entrepris par les organes compétents
pour engager l’Etat. C’est grâce à cette deuxième étape que le traité produit des effets de
droit.

La ratification (acceptation, approbation), si elle est prévue par les Etats signataires,est
l’acte par lequel une autorité étatique, souvent la plus haute, constitutionnellement
désignée pour conclure les traités, confirme le traité élaboré auparavant, consent à ce
qu’il devienne définitif et obligatoire et s’engage solennellement au nom de l’Etat à
l’exécuter8. L’échange des « lettres de ratification » atteste de la réalité de la ratification ;
mais ils arrivent que les Etats optent pour une simple notification montrant que chacun
d’eux a effectivement accompli l’acte de la ratification. L’envoi des instruments de
ratification est un acte fondamental puisqu’il inaugure l’expression de l’Etat à être lié.

Cependant, il arrive que les Etats non seulement procèdent à une ratification tardive, le
Maroc a signé la CVDT le 23 mai 1969 et ne la ratifié que le 26 septembre 1972 ; mais aussi
s’abstiennent de ratifier, les Etats-Unis ont signé ladite convention mais ne l’ont pas ratifié.
Les Etats disposent d’un pouvoir discrétionnaire en matière de ratification, certains d’entre
eux acceptent de signer des traités pour des raisons politiques alors qu’ils n’ont pas
l’intention de les ratifier9.

8
Daillier, Forteau, Pellet: Droit international public. Op, cit, p. 153.
9
Maxime Lefebvre: Le jeu du droit et de la puissance. Précis des relations internationales. 4e édition, PUF, 2013.
p59
14

2 –Traité en forme simplifiée.

Le traité en forme simplifiée est un accord conclu selon une procédure courte « à un seul
degré » ; en d’autres termes le traité est définitivement conclu par le seul fait de sa
signature. Celle-ci est à la fois un acte d’authentification du texte et un mode d’expression
du consentement à être lié. Dans ce cas la ratification qui est un élément essentiel de
l’accord formel, n’a pas lieu d’être.

L’utilisation du traité en forme simplifiée a été introduite par la pratique américaine depuis
le XVIIIe siècle et s’est généralisée à tous les Etats. Son avantage c’est qu’elle permet aux
Etats de rapidement subvenir à leurs besoins (négociations militaires, économiques,
financières) et aussi de dépasser tout blocage causé par la pratique parlementaire.

Leprotocole bilatéral franco-marocain du 20 mars 1956 reconnaissant l’indépendance du


Maroc est un exemple de traité en forme simplifiée.

D – INTRODUCTION DU TRAITE DANS L’ORDRE JURIDIQUE


INTERNATIONAL
Il sera question essentiellement de l’entrée en vigueur et de la procédure d’enregistrement
et de publication du traitée.

1 – L’entrée en vigueur.

L’article 24 de la CVDT énonce les modalités de l’entrée en vigueur d’un accord.


Généralement, les dispositions du traité fixent la date de l'entrée en vigueur. Cependant, s’il
arrive que le traité ne mentionne pas de date, il estprésumé que les signataires désirent le
voir entrer en vigueur dès que tous les États participant à la négociation auront exprimé
leur consentement à être liés par ce traité.

Par ailleurs, on sait que les accords en forme simplifiée entrent en vigueur dès que les Etats
expriment leur consentement à être lié par l’apposition de leur signature. Pour les accords
en forme solennelle, l’entrée en vigueur diffère suivant qu’il s’agit d’un accord bilatéral ou
multilatéral.

Les traités bilatéraux peuvent prévoir leur entrée en vigueur à une date donnée, le jour de
la dernière signature, lors de l'échange des instruments de ratification ou encore lors de
l'échange des notifications. En cas du silence du texte, la CIJ considère qu’il existe une
présomption en faveur de l’entrée en vigueur à la date de l’échange des lettres de
ratification (arrêt 18 novembre 1960, affaire de la sentence arbitrale rendue par le roi
d’Espagne.L'Affaire de la sentence arbitrale rendue par le Roi d'Espagne le 23 décembre
1906, concernant la délimitation de la frontière entre le Honduras et le Nicaragua, avait été
15

introduite par le Honduras contre le Nicaragua par voie de requête déposée le 1er juillet
1958. Le Honduras demandait à la Cour de dire et juger que le Nicaragua est tenu
d'exécuter la sentence; le Nicaragua lui demandait de dire et juger que la décision du Roi
d'Espagne n'a pas le caractère d'une sentence arbitrale obligatoire et qu'elle n'est en tout
cas pas susceptible d'exécution. Par 14 voix contre une, la Cour a dit que la sentence est
valable et obligatoire et que le Nicaragua est tenue de l'exécuter).

Les traités multilatéraux exigent parfois des signatairesl’unanimité des ratifications, mais
cette procédure a le désavantage de bloquer indéfiniment l’entrée en vigueur de l’accord.
Traditionnellement, pour passer outre ce problème, l’entrée en vigueur est subordonnée
non pas au principe de l’unanimité mais seulement à un certain nombre de ratifications. Le
nombre des ratifications nécessaires à l’entrée en vigueur des grandes conventions
conclues sous les auspices des Nations unies est aujourd’hui fréquemment de 35, mais il est
souvent abaissé si l’on veut faciliter l’entrée en vigueur (20 pour la convention contre la
torture de 1984) ou augmenté si une large participation est nécessaire pour des raisons
d’efficacité (60 pour le statut de la CPI de 1998)10.

Dans d’autres cas, il arrive qu’en plus du nombre des ratifications requises, il est nécessaire
d’avoir les ratifications de certains autres Etats ou certaines organisations internationales
pour l’entrée en vigueur. Le Traité d'interdiction complète des essais nucléaires (CTBT) de
1996 subordonne son entrée en vigueur à sa ratification par 60 Etats dont les 44,
nommémentdésignés par l’annexe 2, qui possèdent des centralesnucléaires et des
réacteurs de recherche.

Un traité ou une partie d’un traité peut,selon la volonté et le consentement des Etats ayant
participé à la négociation, s’appliquer provisoirement en attendant son entrée en vigueur.
L’application provisoire ne saurait signifier une entrée en vigueur proprement dite.

2 – Enregistrement et publication.

L'Article 102 de la Charte des Nations Unies traite de l’enregistrement et de la publication


et il dispose : "Tout traité ou accord international conclu par un membre des Nations Unies
après l'entrée en vigueur de la présente Charte sera, le plus tôt possible, enregistré au
Secrétariat et publié par lui". Les traités ou accords qui ne sont pas enregistrés ne peuvent
être invoqués devant aucun organe de l'Organisation. L'enregistrement favorise la
transparence et la mise à la disposition du public des textes des traités. La convention de
Vienne reprend l’article en question dans son article 80.

Historiquement, l'Article 102 de la Charte et son prédécesseur, l'Article 18 du Pacte de la


Société des Nations, ont pour origine l'un des 14 points de Woodrow Wilson où il cherchait

10
Daillier, Forteau, Pellet. Op, cit, p. 178.
16

à mettre fin aux ententes et accords secrèteentre nations,et favoriser une diplomatie
ouverte et transparente.

Les traités sont accessibles sur le site web des Nations Unies http://untreaty.un.org

E – SPECIFICITES EN MATIERE DE CONCLUSION DE TRAITE


Il s’agit essentiellement de la signature différée et adhésion, et surtout de la pratique des
réserves.

1 – Signature différée et adhésion.

A l’origine, la signature ne concernait que les seuls Etats ayant participé à la phase de
négociation. Toutefois, cette éventualité est aujourd’hui étendue aux Etats qui n’ont pas
participé à la négociation ou même à ceux qui y ont pris part mais qui ont jugé inopportun
de signer le traité lors de son adoption.On désigne cette pratique par « la signature
différée ». L’intérêt de cette dernière est de permettre à un Etat, étranger à la négociation,
d’accomplir la procédure pour faire partie d’un traité et aussi de laisser la porte ouverte à
l’Etat qui n’a pas signé de le faire après réflexion.

Quant à l’adhésion, c’est l’acte par lequel un Etat qui n’a pas signé le texte du traité, exprime
son consentement définitif à être lié. L’adhésion est une procédure qui produit les mêmes
effets que la signature et la ratification réunies. En effet, la pratique de l’adhésion permet à
l’Etat de s’engager en toute connaissance de cause, en toute lucidité ; il a au préalable
estimé les inconvénients et les avantages d’un tel engagement. Aussi, elle permet, plus que
la signature différée, d’écourter la procédure tendant vers l’expression du consentement à
être définitivement lié et traduit celle-ci au même titre que la ratification, l’acceptation ou
l’approbation.

2 – Les réserves.

En face d’un traité, un Etat a le choix entre deux attitudes. Il peut refuser d’en faire partie et
par conséquent, ne pas être contraint pas ces dispositions ; ou bien accepter de s’engager
mais pas totalement. En effet, dans ce second cas, l’Etat soit qu’il manifeste son intention
d’exclure certaines dispositions car elles ne lui conviennent pas, soit qu’il entend leur
donner une autre signification acceptable pour lui. On dit alors que l’Etat formule des
réserves aux dispositions du traité.

La réserve est une déclaration unilatérale faite par un Etat en vue de modifier à son égard
les effets juridiques de certaines des dispositions d’un traité à l’égard duquel il s’apprête à
17

s’engager définitivement. C’est une procédure conditionnant l’entrée en vigueur du traité


pour l’Etat qui l’émet11.

La CVDT autorise les Etats à formuler des réserves à chaque étape du processus de la
conclusion du traité ; à la signature, à la ratification, à l’acceptation, à l’approbation ou à
l’adhésion.

Cependant, les réserves ne doivent pas être incompatibles avec l'objet et le but du traité. En
outre, un traité peut interdire les réserves ou n'autoriser que certaines réserves.

Le procédé des réserves soulève d’âpres critiques, on lui reproche de modifier le traité, de
le vider de son contenu, de bouleverser son équilibre entre autre. Si ces critiques sont en
partievrais, cela n’empêche pas d’admettre que les réserves sont un moyen efficace et
d’étendre le champ d’application des traités au plus grand nombre d’Etats, et de permettre
à ces derniers de retailler à leur mesure certaines obligations prévues par le texte.

A côté des réserves, les Etats utilisent fréquemment le procédé des« déclarations
interprétatives » qui est un instrument annexe à un traité dont le but est d'interpréter ou
d'expliquer les clauses de ce traité.Il ne vise ni à exclure ni à limiter les dispositions de
celui-ci.

Par ailleurs, une réserve peut soulever une objection ; en effet, un État contractant a la
faculté de faire une objection à une réserve mais cet acte n’empêche pas le traité d’entrer
en vigueur entre l’objectant et le réservataire, à moins que le premier ne l’ait pas
spécifiquement et expressément déclaré. En principe et selon la CVDT, l’effet de l’objection
ne frappe que la réserve concernée et que son entrée en vigueur est impossible entre
l’objectant et le réservataire.

Une réserve ou une objection à une réserve peut être retirée à tout moment à moins que le
traité n’en dispose autrement. Ce retrait doit être notifié par écrit aux Etats pour pouvoir
prendre effet à leurségards.

SECTION III : VALIDITE DES TRAITES.


Un traité ne peut produire des effets juridiques que s’il est valide. Toutefois, il est frappé de
nullité en cas de défaut de validité.

A – LES CONDITIONS DE VALIDITE


Les conditions de validitéconcernent essentiellement la capacité des parties, le
consentement donné et enfin la licéité de l’objet du traité.

11
Pierre-Marie Dupuy, op. cit, p. 194.
18

1 – La capacité des parties.

Par capacité en entend les sujets de droit international qui ont l’aptitude de conclure des
traités. Il s’agit en effet des Etats, des organisations internationales et des mouvements de
libération nationale.

a – L’Etat.

L’Etat est par excellence un sujet de droit international et dispose de la capacité de


conclure des traités et c’est ce qui ressort de l’article 6 de la CVDT : « Tout Etat a la capacité
de conclure des traités. »

Les problèmes qui peuvent surgir, concernent la participation d’entitésdécentralisées


(membre d’un Etat fédéral) à la conclusion du traité. Il s’agit en effet, d’une part, de la
capacité de l’entité en question à conclure des traités, la CVDT admet cette capacité aux
Etats membres d’une fédération à condition qu’elle soit prévue par la constitution de celle-
ci.La Convention se réfère au droit interne dans ce cas précis.

D’autre part, l’imputation du traité conclu parune entité décentralisée avec un Etat. Il s’agit
de la responsabilité internationale de l’Etat dont dépend l’entité décentralisée contractante
se trouverait engagée en cas de non-respect de l’engagement.

b – Les organisations internationales.

La capacité des organisations internationales à conclure des traités est aujourd’hui


indéniable. Elle comporte deux caractéristiques ; c’est une capacité à la fois dérivée et
partielle. Elle dérive de la volonté des Etats membres exprimée dans l’acte constitutif de
doter l’organisation de cette capacité. Elle est limitée car elle répond au principe de la
spécialité ; l’organisation internationale ne s’engage que dans les domaines pour lesquelles
elle a été créée.

c – Les mouvements de libération nationale.

En pratique, les mouvements de libération nationale ne peuvent conclure que trois sortes
de traités. Les accords d’indépendance qui sont le prélude pour la naissance d’un nouvel
Etat souverain. Les traités relatifs à la conduite de la lutte armées qui peuvent être
bilatéraux (les accords conclus par l’OLP avec le Liban, la Jordanie ou la Tunisie en 1969,
1970, 1982) ou multilatéraux. Et enfin, la participation aux organisations internationales ;
l’OLP comme membre de la Ligue des Etats arabes.
19

2 – La régularité du consentement.

Les vices qui affectent le consentement et entrainent la nullité du traité sont l’erreur, le dol
et la contrainte. Cependant, il existe une autre situation qu’on appelle « ratification
imparfaite ».

a – Erreur et dol

Les cas d’erreur sont rares en pratiques, et concernent les actes d’application du traité lui-
même ; on peut citer l’exemple retenu par la jurisprudence des traités territoriaux de tracé
de frontières comprenant des cartes inexactes.

La CVDT dans son article 48 restreint les conditions où l’erreur peut être invoquée par
l’Etat qui en est victime. L’erreur doit porter sur un fait, « une situation que l’Etat supposait
exister au moment où le traité a été conclu » ; l’erreur doit aussi porter sur une « base
essentielle du consentement de cet Etat à être lié par le traité » c’est ce qu’on appelle
l’erreur essentielle ; enfin, l’Etat ne saurait invoquer une erreur à laquelle il aurait
contribué par sa propre conduite ou qu’il aurait été en mesure d’éviter ou bien encore, si
par son comportement ultérieur, il a manifesté son entière soumission aux termes du traité
tel qu’il a été établi.

Même si les cas de dol dans la conclusion des traités sont inexistants, la CVDT consacre au
dol l’article 49 sans toutefois le définir. Le dol est à séparer de l’erreur car il consiste en des
comportements délibérés, conduite frauduleuse par exemple, en complète contradiction
avec la confiance mutuelle qui devrait normalement exister entre les négociateurs.
Cependant, le dol ne saurait être invoqué à des fins de nullité si l’Etat, par ses
comportements subséquents, semblait accepter le traité.

b – La contrainte.

La violence peut se manifester par de multiples voies autres que militaires, elle peut aussi
frapper à la fois l’Etat et ses représentants ou seulement ces derniers.

L’article 52 de la CVDT déclare est nul tout traité dont la conclusion a été obtenu par la
menace ou l’emploi de la force en violation des principes du droit international incorporés
dans la charte des Nations Unies. Il est clair que le recours à la force armée est prohibé,
mais l’article en question ne fait aucune référence à l’usage ou la menace des contraintes
économiques, politiques et psychologiques.La formule de compromis de l’article 52 renvoie
à la charte, de sorte que si dans l’avenir l’article 2, paragraphe 4, de la charte est interprété
20

comme recouvrant l’emploi d’autres formes de force que celle de la force armée, cette
interprétation s’appliquera automatiquement ici aussi12.

Lors de la CVDT, la question de l’assimilation de la contrainte économique et politique a la


contrainte armée a été soulevée par les Etats en voie de développement. Devant
l’opposition des Etats occidentaux à cette conception large de la contrainte, les Etats en
voie de développement ont adopté la « déclaration sur l’interdiction de la contrainte
militaire, politique ou économique lors de la conclusion des traités » ; résolution adoptée
en même temps que la convention à la clôture de la convention de Vienne.

La contrainte exercée sur le représentant d’un l’Etat est un acte illicite et entraine la nullité
des traités conclus par la violence. L’article 51 de la CVDT est catégorique à cet égard
puisque la contrainte exercée sur le représentant d’un Etat au moyen d’actes ou de
menaces dirigées contre lui est dépourvue de tout effet juridique.

c – « Ratification imparfaite »

Il s’agit d’un consentement imparfait, non conforme aux dispositions du droit


constitutionnel interne. La cause du vice n’est pas extérieure à l’Etat qui l’invoque comme
c’est le cas pour le dol ou l’erreur, il se trouve constitué par la méconnaissance des
procédures de ratifications en vigueur dans l’Etat concerné.

En pratique, c’est à la suite de changements politiques que des gouvernements ont


tendance à vouloir se libérer des engagements pris par le gouvernement antérieur. L’article
46 de la CVDT écarte l’invocation de ce vice en vue d’obtenir la nullité dans la mesure où
l’Etat victime est internationalement responsable de son comportement et des convictions
qu’il a fait naitre chez les autres Etats parties au traité.

3 - La licéité de l’objet du traité.

Les vices de consentement ont pour conséquence l’invalidité du traité car le consentement
de l’une des parties à l’accord a été vicié ; on parle alors de causes de nullité subjectives
puisqu’elles sont directement liées au comportement d’un sujet de droit. Cependant,
lorsqu’on parle de causes de nullité objectives, c’est quand l’invalidité d’un traité pour
illicéité de son objet met en cause la contradiction manifeste du contenu du traité en
question avec une règle de droit préexistante jouissant d’une valeur hiérarchiquement
supérieure.

Ces règles sont appelées les règles impératives ou jus cogensque les travaux de la CDI ont
consacré en soulignant que certaines règles et certains principes s’imposent aux Etats et
qu’il est interdit d’y déroger par des arrangements conventionnels. De plus, la CDI a

12
Georges Abi-Saab in Recueil des cours 1987-VII de l’Académie de droit international de La Haye, p. 426.
21

recommandé aux Etats de frapper de nullité tout accord violant ces règles impératives. La
CVDT a consacré la primauté des normes impératives devant lesquelles les Etats ont
l’obligation de s’incliner ; c’est ce qui ressort aux termes de l’article 53 : « Est nul tout
traité qui, au moment de sa conclusion, est en conflit avec une norme impérative du
droit international général. Aux fins de la présente Convention, une norme impérative du
droit international général est une norme acceptée et reconnue par la communauté
internationale des Etats dans son ensemble en tant que norme à laquelle aucune
dérogation n'est permise et qui ne peut être modifiée que par une nouvelle norme
du droit international général ayant le même caractère. » Et de l’article 64 qui
stipule : « Si une nouvelle norme impérative du droit international général survient, tout
traité existant qui est en conflit avec cette norme devient nul et prend fin. »

Lors de son arrêt du 5 février 1970, concernant l’affaire Barcelona Traction, la CIJ a
confirmé l’approche de la convention de Vienne en la matière : « Par leur nature même [les
obligations des Etats envers la communauté internationale dans son ensemble]concernent
tous les Etats. Vu l’importance des droits en cause, tous les Etats peuvent être considérés
comme ayant un intérêt juridique à ce que ces droits soient protégés ; les obligations dont il
s’agit sont des obligations erga omnes. » En d’autres termes, la C.I.J affirme qu’ « une
distinction doit être établie entre les obligations des états envers la communauté
internationale dans son ensemble » (jus cogens) « et celles qui naissent vis-à-vis d’un autre
état dans le cadre de la protection diplomatique ».La cours a longtemps évité d’employer
explicitement la notion de jus cogens en lui préférant celle d’obligations erga omnes ou celle
de « principes intransgressibles du droit international coutumier ». Ce n’est qu’en 2006,
lors de l’affaire Activités armées sur le territoire du Congo (Congo/Rwanda), que la CIJ a
explicitement utilisé la notion de jus cogensen déclarant l’interdiction du génocide comme
relevant de celui-ci et que la prévention et la répression d’un tel crime est une obligation
erga omnes.

Il ressort de l’article 53 que le jus cogens est un ensemble de règles au caractère impératif
et qui peut être d’origine soit coutumière soit conventionnelle. La CDI a dégagée une liste
non exhaustive de traités en violation du jus cogens comme par exemple ceux
recommandant l’emploi de la force contraire aux principes de la charte, ceux organisant la
traite des esclaves, la piraterie, le génocide… Toutefois, elle laisse le soin de la
détermination des règles impératives à la pratique des Etats et des tribunaux
internationaux.

B – LA NULLITE DES TRAITES POUR INVALIDITE.


La nullité est la sanction qui frappe un traité pour invalidité et la conséquence qui en
résulte est énoncée par l’article 69 : « les dispositions d’un traité nul n’ont pas de force
juridique ». Les Etats ne peuvent se prévaloir d’un traité nul, ni lui reconnaitre des effets de
22

droit ni s’y soumettre. Il importe de voir les formes de nullité et les conséquences qui
découlent de celle-ci.

1 – Les formes de nullité.

La CVDT consacre le principe de la divisibilité des clauses du traité (article 44.4). Selon les
cas, l’Etat qui invoque la nullité est en droit de le faire à l’égard de l’ensemble du traité ou
seulement de l’une de ses clauses. Il s’agit essentiellement de faire la distinction entre la
nullité intégrale du traité qui est la règle et la nullité partielle qui est l’exception.

La première joue dans les cas les plus graves, où le principe de divisibilité est impossible, à
savoir, contrainte exercée sur l’Etat ou son représentant, contradiction avec une norme
impérative.

En revanche, en cas de dol par exemple, la nullité partielle peut intervenir à propos de la
clause affectée par le vice en question mais sous certaines conditions particulièrement
restrictive. En effet, les clauses divisibles sont celles détachables du reste du traité sans
pour autant nuire à l’intégrité ou à l’exécution de ce dernier, et celles qui ne constituent pas
une base essentielle du consentement des parties à être liées. Enfin, il faut aussi que la
continuation de ce qui subsiste du traité ne soit pas injuste.

2 – Les conséquences de la nullité des traités.

Dans le cas d’erreur ou de méconnaissance des dispositions du droit interne quant à la


procédure de l’expression du consentement de l’Etat par exemple, les actes accomplis de
bonne foi, avant la déclaration de la nullité, ne sont pas illicites.

Cependant, pour les autres hypothèses, le traité est considéré comme nul à partir du jour
de sa conclusion et non pas au moment de la découverte de la clause de nullité. La nullité a
un effet rétroactif et les parties doivent rétablir leurs rapports mutuels à la situation qui
aurait existé si les actes objet de nullité n’avaient pas été accomplis. S’il s’agit d’une
violation d’une norme impérative, en plus de ce qui a été dit, l’obligation est faite aux Etats
de se conformer et de respecter cette norme de jus cogens.
23

SECTION IV : LES EFFETS DES TRAITES


Selon l’article 2 de la CVDT, l’expression « partie » s’entend d’un Etat qui a consenti à être
lié par le traité et à l’égard duquel le traité est en vigueur ; l’expression « Etat tiers »
s’entend d’un Etat qui n’est pas partie au traité. On examinera les effets des traités vis-à-vis
des Etats parties puis à l’égard des Etats tiers.

A – EFFETS DES TRAITES A L’EGARD DES ETATS PARTIES


Il s’agit essentiellement de l’analyse du caractère obligatoire des traités et de leur exécution
dans l’ordre interne.

1 – Le caractère obligatoire des traités

Le caractère obligatoire des traités concerne essentiellement son fondement et sa portée.

a – Fondement du caractère obligatoire des traités

L’article 26 de la CVDT énonce : « Tout traité en vigueur lie les parties et doit être exécuté
par elles de bonne foi ». Le principePacta sunt servanda, qui signifie que les conventions
doivent être respectées, les États parties à un traité ne peuvent se prévaloir d'obstacles
posés par leur ordre juridique interne pour éviter d'exécuter leurs obligations
internationales. L’exécution de bonne foi et le respect du principe pacta sunt servanda sont
très liés et constituent deux aspects d’un même principe.

Le principe de la bonne foi demeure non seulement une institution en matière de relations
internationales mais d’une importance particulière et essentielle quant au droit des traités.
L’exécution de bonne foi s’apparente le plus à celle qui fait intervenir une volonté positive à
l’égard des engagements pris à savoir honnêteté et loyale ; toutefois une volonténégative
est celle qui se base sur la ruse et la faraude. Il ressort de l’article 18 que la définition de la
bonne foi estde « s’abstenir de tout acte visant à réduire à néant l’objet et le but du traité. »

b - Portée du caractère obligatoire des traités

Il s’agit essentiellementde la portée spatiale, de l’exécution territoriale. Aux termes de


l’article 29 de la CVDT « …un traité lie chacune des parties à l’égard de l’ensemble de son
territoire. » Cette règle est communément acceptée par la pratique des Etats et la
jurisprudence des tribunaux internationaux et nationaux. Aucune collectivité territoriale au
Maroc par exemple ne peut, de son propre chef, se soustraire à l’application d’un traité
dûment ratifié.

Historiquement, certaines clauses limitaient l’application et l’exécution territoriales du


traité, c’est le cas de la « clause fédérale » et de la « clause coloniale ». Concernant la
première clause, devenue très rare actuellement, elle a pour objet d’exclure un ou plusieurs
24

Etats membres d’un Etat fédéral du champ d’application d’un traité conclu par ce dernier
en raison de préserver l’autonomie des Etats fédérés. La seconde clause, quant à elle, les
puissance coloniales avaient l’habitude d’exiger son inclusion dans les dispositions finales
des accords qu’elles passaient pour signifier que les dispositions de ces derniers ne
s’appliquaient pas dans les colonies qu’ils administraient.

Le problème de la règle de l’application territoriale des traités se pose lorsqu’on


appréhende la question de savoir est-ce que le plateau continental et la zone économique
exclusive sont soumis aux dispositions du traité conclu ? Tout dépend des intentions des
parties au traité et de leurs effectives compétences sur ces zones. Les traités instituant
l’Union européenne étendent le champ spatial d’exécution aux zones économiques
exclusives ; les traités protecteurs de la personne humaine intègrent des clauses prévoyant
leur application dans les zones en question.

2 – Les traités dans l’ordre juridique interne

L’exécution des traitésincombe à tous les organes de l’Etat, toutefois et afin de remplir cette
mission, il faut au préalable introduire et ensuite appliquer le traité dans l’ordre juridique
interne.

a – Introduction du traité dans l’ordre juridique interne

Le principe d’exécution de bonne foi des obligations découlant du traité impose


l’introduction dans l’ordre juridique interne du traité. Cette introduction a le mérite
d’imposer effectivement non seulement les normes conventionnelles au même titre qu’une
loi interne, mais aussi à toutes les autorités étatiques, administrations, gouvernants et
gouvernés.

On peut relever deux formes d’introduction de traité. La première c’est la procédure


traditionnelle qui est généralement adoptée par les Etats est consiste à subordonner
l’introduction du traité à l’accomplissement d’un acte juridique spécial par l’autorité
étatique. Le plus souvent l’acte d’introduction émane du pouvoir exécutif. Au Maroc,
concernant les accords visés par l’article 55 de la constitution de 2011, l’introduction des
traités dans l’ordre juridique interne est soumise à la préparation du dahir de publication
par le Secrétariat General du Gouvernement. Le dahir est transmis au Roi qui y appose le
sceau royal avant d’être publié au Bulletin officiel.

La deuxième forme, c’est la technique d’introduction automatique qui ne nécessite pas un


acte juridique spécial préalable. Pour être obligatoire dans l’ordre interne, seul suffit la
ratification et la publication. Cette dernière n’intervient que dans le sens matériel à savoir
la publicité à l’instar de celle faite à toute norme juridique.
25

b – Les mesures d’application

L’exécution du traité par les Etats est souvent tributaire de certaines décisions prisessur le
plan national. A cet égard on peut distinguer entre le traité au caractère self-executing
(auto-exécutoire) et celui qui n’en dispose pas.

Un traité, ou une disposition d’un traité, est self-executing lorsque son application n’est pas
tributaire de mesures internes complémentaires et même les mesures préalables à
l’exécution sont inutiles. Par contre, un traité dépourvu d’un caractère self-executing ne se
suffit pas à lui-même et par conséquent les Etats doivent prendre des mesures
complémentaires sur le plan interne pour son exécution, comme par exemple la
modification de la législation ou de la règlementation existantes, adoption de lois ou d’actes
règlementaires13.

B - EFFETS DES TRAITES A L’EGARD DES ETATS TIERS


Les effets des traités à l’égard des Etats tiers invitent à traiter du principe de la relativité
des traités et des exceptions à ce dernier.

1 – Le principe de la relativité des traités.

La jurisprudence internationale et la pratique des Etats s’accordent pour reconnaitre que


les traités ne peuvent produire d’effets à l’égard des tiers. La CVDT a codifié une coutume
claire et unanimement acceptée et affirmée. L’article 34 dispose que : « un traité ne crée ni
obligations, ni droits pour un Etat tiers sans son consentement. »

Les deux aspects du principe de la relativité (l’accord n’impose ni obligations aux tiers, ni
ne leur confère des droits) sont confirmés par la jurisprudence internationale. Le premier
aspect, l’affaire de l’Ile de Palmas de 1928 relative au différend entre les Etats-Unis et les
Pays-Bas portant sur la souveraineté sur cette ile. Dans cette affaire, l’ile de Palmas faisant
partie des Philippines, les Etats-Unis, successeurs de l’Espagne aux Philippines après la
guerre hispano-américaine de 1898, désiraient opposer lesdits traités aux Pays-Bas. La
Cour Permanente d’Arbitrage a, dans sa sentence arbitrale débouté la réclamation des
Etats-Unis et que le traité en question ne crée aucune obligation a la charge des Pays-Bas.

Le second aspect, concerne l’affaire de l’Ile Clipperton, différend qui opposa la France et le
Mexique relatif à la souveraineté sur cette ile. Le Mexique a tenté de faire naitre à son profit
des droits de certaines dispositions de l’Acte de Berlin de 1885 auquel il n’a pas assisté. La
sentence arbitrale de la CPJI de 1931 a rejeté la prétention du Mexique au motif que ledit
Acte ne crée pas de droit en faveur des Etats tiers et accorde la souveraineté de la France
sur l’ile.

13
Daillier, Forteau, Pellet. Op, cit, p. 255.
26

2 – Exceptions au principe de la relativité des traités.

Les exceptions en question peuvent s’apprécier doublement, d’une part, à l’ occasion de


l’application des traités aux Etats tiers avec leur consentement et d’autre part, lorsque leur
consentement fait défaut.

a - Application des traités aux Etats tiers avec leur consentement.

- Obligations :Il est de règle qu’un traité ne crée absolument pas d’obligations à la charge
des Etats tiers, règle qui découle du principe l’indépendance et de l’égalité des Etats.
Cependant, il existe une exception et c’est celle visée par l’article 35 dispose : «
Une obligation naît pour un Etat tiers d'une disposition d'un traité si les parties à ce traité
entendent créer l'obligation au moyen de cette disposition et si l'Etat tiers
accepte expressément par écrit cette obligation. »

Il ressort de cet article que l’obligation qu’il vise ne s’impose pas à l’Etat tiers en vertu du
traité initial auquel il n’est pas partie, mais en vertu d’un accord entre ce dernier et le
groupe des Etats parties au traité initial.Cet accord auquel l’Etat tiers est partie, étant la
source de son obligation, est qualifié d’accord collatéral14.

-Droits :Par ailleurs, un traité peut créer des droits au profit des Etats tiers dans le respect
de leur souveraineté, il s’agit du traité comprenant la clause dite « clause de la nation la
plus favorisée ». Cette clause signifie que deux Etats A et B concluent un accord relatif aux
tarifs douaniers applicables aux produits importés en provenance de leurs territoires
respectifs. Cet accord comprend une clause qui stipule que l’un des deux Etats bénéficiera
de tout tarif plus favorable que l’autre pourrait ultérieurement concéder, dans un autre
accord, a un troisième Etat C. par conséquent, si l’Etat C,en vertu de l’accord A-C, bénéficie
d’avantages supérieurs à ceux accordés à l’Etat B dans l’accord A-B, alors ces nouveaux
avantages bénéficieront automatiquement à B, même s’il n’est pas partie à l’accord A-C, en
vertu de la clause incluse dans l’accord A-B.

En outre, un autre cas où des droits sont créés au profit d’un Etat tiers avec son
consentement est la « stipulation pour autrui ». Cette technique signifie que les parties à un
accord énoncent une promesse dont le bénéficiaire est un Etat tiers. La jurisprudence
internationale en l’occurrence la CPJI, dans le différend qui opposa la France à la Suisse à
propos des zones franches, a statué en 1932 que la Cour n’exclut pas la stipulation pour
autrui et subordonne sa validité au consentement de l’Etat tiers ; et qu’il ne peut
disparaitre sans le consentement du bénéficiaire. La CVDT corrobore l’arrêt de la CPJI par
les articles 36 et 37§2.

14
Daillier, Forteau, Pellet. Op, cit, p. 266.
27

En définitive, l’exigence du consentement de l’Etat tiers est moins sévère dans le cas
d’accords créant des droits au profit des Etats tiers que dans ceux desquels naissent des
obligations à leur charge.

b - Application des traités aux Etats tiers sans leur consentement.

Les règles conventionnelles aux obligations erga omnes traduisent le principe de


l’existence de traités produisant des effets non seulement à l’égard des Etats tiers, mais à
l’égard de tous les Etats constitutifs de la communauté internationale, sans leur
consentement.Deux cas illustrent ce principe.

Premièrement, la création d’une situation « objective », les grandes puissances


internationales visent à faire respecter leurs actes concertés par le plus grand nombre
d’Etats comme par exemple le principe de libre navigation sur les voies fluviales ou
maritimes d’intérêt international (convention de Constantinople de 1888 relative au canal
de Suez ; traité de 1901 et 1903 sur le canal de Panama) ; le traité d’établissement d’une
frontière crée une situation objective s’imposant erga omnes.

Deuxièmement, la création d’une entité dont l’existence opposable aux tiers. En effet, les
accords d’indépendance à la fin décolonisation ont engendré de nouveaux Etats
indépendants et souverains dont l’existence s’impose à tous les membres de la
communauté internationale. En revanche, les traités constitutifs d’organisations
internationales ne constituent pas un fait objectif et par conséquent ne sont pas opposables
aux Etats Tiers, les Etats non membres.
28

SECTION V : LA FIN DES TRAITES.


Le but de cette section est de porter la lumière sur les mesures qui portent atteinte à la vie
du traité : modification et suspension ou extinction. La modification porte sur le contenu du
traité en le laissant subsister, alors que la suspension ou l’extinction vise l’existence même
du traité.

A – MODIFICATION DES TRAITES.


La modification des traités est une technique plus facile à utiliser à l’égard des traités
bilatéraux que lorsqu’il s’agit des accords multilatéraux.

1 –La modification en tant que règle générale.

En général, la modification emprunte deux voies s’agissant des traités bilatéraux ou


multilatéraux.

a – La modification explicite.

La CVDT énonce dans son article 39 la règle procédurale de modification de traité par voie
d’accord exprès : « Un traité peut être amendé par accord entre les partie. » Cette règle,
concernant à la fois les traités bilatéraux et ceux multilatéraux, peut êtreécartée ou limitée
par les parties en lui préférant l’inclusion dans le traité de dispositions spéciales dites
« clauses de révision ». Celles-ci ont pour but de poser à l’avance la procédure de la
révision.

b –Modification autre qu’explicite.

Il s’agit essentiellement de :

- La modification par voie coutumière ou d’accord tacite : la CVDT admet, ainsi que la
jurisprudence internationale, la possibilité d’une modification par le comportement
ultérieur des parties. L’abstention d’un membre permanent du Conseil de sécurité ne
bloque pas l’adoption d’une résolution par cet organe, contrairement aux exigences claires
de l’article 27§3. La CIJ a corroboré cette pratique en déclarant, dans son arrêt consultatif
du 21 juin 1971, dans l’affaire de la Namibie : « La procédure… suivie par le Conseil de
sécurité a été généralement acceptée par les Membres des Nations Unies et constitue la
preuve d’une pratique générale de l’Organisation ».

- La modification par la survenance d’une nouvelle norme impérative du droit


internationale : La survenance d’une nouvelle norme de jus cogens entraine la modification
d’une clause d’un traité contraire à la règle impérative sur la base du principe de la
divisibilité des clauses du traité (art 44).
29

2 –La modification des traités multilatéraux : exception à la règle.

La modification des traités multilatéraux soulève des difficultés particulières en raison de


la pluralité des parties. Dans le cas où la convention ne prévoit pas les règles régissant sa
propre modification, la solution est présentée par la pratique (la coutume) qui a évolué
avec la multiplication des traités multilatéraux. En effet, la procédure de modification par
un accord ouvert à toutes les parties est une procédure complexe se déroulant en plusieurs
étapes.

Le déclenchement de la procédure se subdivise en deux phases, celle de l’initiative et celle


de la décision concernant la suite à lui donner. Vient ensuite la deuxième étape, celle de la
négociation de la modification. Généralement, cette étape se déroule au sein d’une
conférence diplomatique ad hoc ou une organisation internationale où l’adoption de la
modification se fait par la règle majoritaire et non par celle de l’unanimité.

Enfin, l’entrée en vigueur de la modification après sa ratification ne soulève aucun


problème particulier ; le traité ainsi modifié s’impose aux Etats contractants.

B – EXTINCTION ET SUSPENSION DES TRAITES.


La CVDT a expressément prévu l’extinction et la suspension des traités, respectivement
dans les articles 54 et 57. Les opérations d’extinction et de suspension méritent d’être
analysées en deux temps ; d’une part lorsqu’elles sont le fait des parties et d’autre part
lorsqu’elles sont imposées par des circonstances non prévues par les traités. Mais avant, il
importe de définir les différentes notions en cours d’examen.

1 – Définition.

L’extinction d’un traité produit l’arrêt de l’exécution des obligations de l’accord, en d’autres
termes, il prend fin. Un traité dit éteint est celui qui cesse d’être en vigueur et de produire
des effets.

En revanche, la suspension ne met pas fin au traité, l’instrument subsiste et seules les
normes qu’il contient cessent provisoirement de produire leurs effets. Du fait que le traité
n’est pas éteint, les clauses objet de suspension reprendront leur caractère obligatoire
initial, une fois celle-ci levée.

Quant à la dénonciation ou le retrait, est un acte de procédure accompli unilatéralement


par un Etat partie qui désire se délier de ses engagements. En règle générale le traité et son
contenu subsistent ; seul le champ d’application de l’accord est modifié : l’Etat auteur de la
dénonciation n’est pas tenu par le traité. La dénonciation d’un traité bilatéral entraine
évidement son extinction.
30

2 – Extinction et suspension par la volonté des parties.

L’extinction et la suspension peuvent être prévues dans le traité ou décidées par les parties
postérieurement d’un commun accord.

a –Volonté initiale des parties.

Il s’agit de clauses expresses et de clauses implicites. Pour les premières, on peut citer le
cas des clauses résolutoires.Ce sont celles qui subordonnent la fin du traité à la survenance
de certains faits prévus à l’avance par les parties. Elles peuvent fixer un terme, à
l’expiration duquel le traité ne produit plus d’effets. C’est l’exemple des traités d’alliance,
accords économiques ou de coopération. Aussi, lesclauses de dénonciation et de retrait ; les
clauses suspensivesqui concernent la suspension d’une clause ou d’un engagement, elles
sont fréquentes et en particulier dans les traités économiques. Les Etats parties à ces
traités incèrent souvent une clause de sauvegarde qui permet de suspendre
momentanément l’application de certaines dispositions de l’accord posant des problèmes
graves à l’une des parties. En revanche, la suspension de l’ensemble de la convention est un
acte qui se fait très rarement.

Pour les secondes, on peut citer l’extinction par exécution du traité, il s’agit en fait des
accords dits « traités-contrats » qui portent sur un engagement financier ou une livraison
de fourniture par exemple. Ce genre d’accords crée des obligations strictement délimitées
qui une fois exécutées, épuise ses effets et ne se renouvelle plus. Ce sont des traités où la fin
de l’exécution entraine automatiquement l’extinction. En outre, dénonciation ou retrait
sans autorisation expresse, il arrive que des traités passent sous silence les modalités de
leur propre extinction, et posent le problème de leur permanence. La CVDT autorise une
dénonciation unilatérale fondée sur une autorisation implicite du traité qui peut résulter
des intentions des parties ou se déduire de la nature du traité lui-même.

b – Volonté ultérieure des parties.

Il s’agit ici de volonté expresse et de volonté tacite. Dans le premier cas de figure,
l’extinction expresse peut se produire par la conclusion d’un traité postérieur.Soit que
parfois, l’abrogation du traité antérieur est le seul objet du traité postérieur. Soit que le
plus souvent, l’abrogation porte simplement sur certaines dispositions du traité antérieur
de manière partielle ou entière. Concernant la suspension et principalement la suspension
des traités multilatéraux elle peut résulter d’un accord conclu entre certaines parties
(l’unanimité n’est pas exigée) si cette opération est mentionnée dans une clause du traité
antérieur. Dans le cas contraire, il faut que la suspension ne porte pas préjudice aux autres
Etats parties et qu’elle ne soit pas incompatible avec l’objet et le but du traité antérieur.
31

Par ailleurs, la volonté tacite ; une extinctionimplicite peut survenir du fait de la conclusion
d’un traité postérieur. Il en résulte une abrogation tacite par le second traité qui porte sur
la même matière que le premier, est conclu entre les mêmes parties, et contient des
dispositions incompatibles avec celui-ci. Et par conséquent, il est impossible d’appliquer les
deux traités à la fois. Le traité postérieur l’emporte sur celui antérieur qui cesse d’exister
comme c’est d’ailleurs le cas pour l’abrogation expresse.

3 – Extinction et suspension du traité du fait de circonstances non prévues par le


traité.

Certaines circonstances peuvent justifier l’extinction du traité, sa suspension ou la


dénonciation et sont liées au comportement des parties ; d’autres en sont indépendantes.

a –Circonstances liées au comportement des parties.

Parmi ces circonstances on peut citer la violation du traité. Elle renvoie à l’inexécution
des dispositions de l’accord par un ou plusieurs parties. Le non-respect du traité par une
partie peut entrainer son extinction ou sa suspension jusqu’à la cessation de la violation. La
doctrine et la jurisprudence internationale comme d’ailleurs la CVDT exigent,pour pouvoir
dénoncer unilatéralement un traité, une violation substantielle affectant l’objet et le but du
traité.

A cette règle deux exceptions prévues par l’article 60 de la CVDT : l’extinction ou la


suspension ne peut affecterd’une part, les dispositions du traité conçues pour s’appliquer
précisément aux cas de violation. Et d’autre part, les « dispositions relatives à la protection
de la personne humaine contenues dans des traités de caractère humanitaire, notamment
les dispositions excluant toute forme de représailles à l’égard des personnes protégées par
lesdits traités. » (Article 60).

On peut aussi citer comme circonstances liées au comportement des parties, le conflit
armé international. Ici se pose le problème des effets des conflits armés sur les traités ; la
question est de savoir si un traité peut être terminé ou son application peut être suspendue
en cas d’un conflit armé.

La réponse à cette question reste difficile à cause l’absence de règles claires en la matière.
Cependant, on peut faire la distinction entre les traités bilatéraux, ils prennent fin, ou, en
tout cas sont suspendus dans une situation de conflit armé. Pour les traités multilatéraux,
ils sont suspendus dans les rapports entre belligérants et restent en vigueur dans les
rapports entre les parties non belligérantes et aussi entre ces derniers et les belligérants. A
titre d’exemple, les pays arabes et Israël n’ont pas quitté l’Organisation des Nations Unies
lors des conflits qui les ont opposé depuis 1948.
32

Pour les traités créant une situation objective, comme le tracé de frontières par exemple, ils
ne sont pas affectés par l’état de conflit armé.

Concernant les traités bilatéraux ou multilatéraux relatifs aux règles régissant la conduite
des conflits armés internationaux, comme par exemple le traitement apporté aux
prisonniers de guerre, sont évidemment maintenus.

Les guerres civiles et les représailles armées ne sont pas concernées par ce qui précède.

Et enfin parmi les circonstances il y a la coutume. Naissant de la pratique concordante des


sujets de droit international, si elle est postérieure à un traité, elle a pour effet de modifier
ses dispositions ou même de l’éteindre si son maintien est incompatible avec elle.

b – Circonstances indépendantes des parties.

Parmi les circonstances indépendantes des parties, il en existe trois à savoir : l’impossibilité
d’exécution, le changement fondamental de circonstances et la survenance d’une nouvelle
norme de jus cogens.

- on parle d’impossibilité d’exécution lorsque les parties au traité sont affectées par la
survenance d’une circonstance indépendante de leur volonté et qui rend l’exécution dudit
traité impossible ; c’est le cas de force majeure.

La CVDT conditionne l’invocation de ces circonstances à l’existence d’une impossibilité


définitive qui doit résulter « de la disparition ou destruction définitive d’un objet
indispensable à l’exécution de ce traité. » (Art 61).

- En principe, le changement fondamental de circonstances par rapport à celles existant au


moment de la conclusion d’un traité peut entrainer son extinction ou sa suspension. Cette
solution est consacrée par la CVDT dans son article 62. Le changement en question ne peut
être évoqué que s’il est « fondamental », en d’autres termes, « l’existence de ces
circonstances… ait constitué une base essentielle du consentement à être lié par le traité »
et que ce changement ait « pour effet de transformer radicalement la portée des obligations
qui restent à exécuter en vertu du traité. »

Les effets d’un changement fondamental de circonstances est l’extinction ou le droit pour la
partie qui l’invoque de s’en retirer. La CVDT cherche à travers l’article 62, §3, à réduire de
la portée de cette solution en admettant que la partie qui invoque le changement ne le fait
que dans un but de la suspension du traité.

- la survenance d’une nouvelle norme de jus cogens peut entrainer soit la fin du traité dans
son ensemble, soit simplement l’extinction d’une ou des dispositions du traité qui sont
contraires à la dite norme.
33

CHAPITRE II- LES SOURCES NON CONVENTIONNELLES

SECTION I : LA COUTUME

L’article 38 du statut de la CIJ stipule que la coutume internationale est une source du droit
international qui vient après le traité et la définit comme « la preuve d’une pratique
générale acceptée comme étant le droit ». Il importe de voir les éléments constitutifs, le
caractère contraignant et le processus de codification de la coutume.

A- LES ELEMENTS CONSTITUTIFS DE LA COUTUME

La coutume est consacrée par la réunion de deux éléments : un élément matériel et un


élément psychologique.

1- L’élément matériel :

L’élément matériel prend existence par la survenance d’une pratique générale qui renvoie
a une répétition dans le temps d’un certain nombre de comportements (actes, déclarations,
faits, agissements) provenant de sujets de droit international.

a- Répétition temporelle

Afin de consacrer une coutume, il importe que la pratique des comportements susvisés soit
à la fois constante et uniforme. Les comportements en question doivent non seulement se
répéter dans le temps mais aussi avoir une durée durant laquelle ils se répètent. En effet, la
coutume se fait dans la durée et par la fréquence.

On peut relever par ailleurs que l’élément matériel de la coutume peut se réaliser dans un
temps relativement bref et donner naissance à un processus coutumier. C’est le cas lorsque
plusieurs résolutions d’organisations internationales sont adoptées dans un temps limité et
concernant une même question.

b- Répétition spatiale

Afin de revêtir un caractère universel, une coutume doit être reconnue par la majorité
représentative des Etats. En effet, la pratique constante de la totalité des Etats n’est pas
requise. La CIJ, dans l’Affaire du Plateau continental de la mer du Nord de 1969, a précisé
que pour une règle conventionnelle soit considérée comme coutumière : « il se peut qu’une
participation très large et représentative de la convention suffise, à condition toutefois
qu’elle comprenne les Etats particulièrement intéressés ».
34

2- L’élément psychologique :

A la pratique constante et uniforme il importe d’ajouter que la coutume doit faire naitre
chez les sujets du droit international la conviction d’un caractère obligatoire « les Etats
intéressés doivent avoir le sentiment de se conformer à ce qui équivaut à une obligation
juridique. » (CIJ Affaire Plateau Continental de la mer du Nord 1969). C’est cette conviction
d’obligation qui différencie la coutume de l’usage et de la courtoisie, qui restent des
pratiques qui nourrissent positivement les relations amicales entre les Etats et envers
lesquelles ils ne se sentent pas liés (l’habitude des Etats de se faire représenter aux
funérailles des chefs d’Etat étrangers).

B- APPLICATION DE LA NORME COUTUMIERE :

Si le traité a des effets qui se limitent en principe aux parties contractantes et aux clauses
auxquelles on peut introduire des réserves, une norme si elle est consacrée comme étant
une règle coutumière, a une portée juridique très importante et est plus contraignante
qu’un traité.

1- Portée de la coutume

La coutume produit ses effets à l’égard de tous les Etats, elle bénéficie d’une présomption
d’acceptation unanime. En effet, il n’est pas nécessaire que l’Etat ait directement participé
ou contribué à sa formation ou l’ait accepté expressément. Les Etats sont tenus de se
conformer à une règle coutumière.

2- Rejet d’une coutume.

Le principe stipule qu’il est impossible de s’opposer à une coutume établie. Cependant, un
Etat a l’opportunité de rejeter expressément une coutume lorsqu’elle est en phase de
construction, il n’est pas alors lié par les règles qu’elle met en place. Un Etat peut toujours
s’opposer a une coutume en formation qu’il n’approuve pas, son manifestation (opposition)
doit être claire et constante.

C- LE PROCESSUS DE CODIFICATION

C’est l’Assemblée Générale des Nations Unies qui mène la mission de codification et du
développement progressif du droit international. La codification est un processus de
conversion des règles coutumières en un cops de règles écrites. Elle répond à un souci de
sécurité juridique qui vise à réunir en un seul texte des règles coutumières souvent
dispersées et dont l’existence est difficile à prouver. De plus, ce processus enrichit le droit
international qui va aboutir à affirmer une nouvelle règle.
35

LES PRINCIPES GENERAUX DU DROIT

Ils constituent une source du droit international souvent invoqués par le juge international.
Si leur définition n’est pas donnée de façon précise, il n’en demeure pas moins qu’ils
encadrent et charpentent le droit international public. Cependant, il importe de faire la
distinction entre les principes généraux « de » droit tels qu’ils sont mentionnés à l’article
38 du statut de la CIJ et ce que la doctrine qualifie de principes généraux « du » droit
international public.

A- LES PRINCIPES GENERAUX DE DROIT DE L’ARTICLE 38 DU STATUT DE LA CIJ

Ces principes généraux peuvent être compris à travers l’étude de deux éléments essentiels
et qui présentent une certaine particularité ; leur genèse et leur contenu.

1- Origine et formation des principes

Lors de la rédaction de l’article 38 du statut de la Cour permanente de justice


internationale, la préoccupation essentielle était d’éviter le «non liquet » à savoir le constat
par le juge, que faute de règle de droit applicable, il se trouve dans l’impossibilité de
statuer. Eu égard au développement très incomplet du droit international,
particulièrementà l’époque, en comparaison des droits internes, c’est pour éviter de telles
situations que fut établie la référence aux principes généraux15. La Cour, devant un droit
applicable aux litiges entre Etats lacunaire, peut ainsi s’alimenter de ces principes pour
s’acquitter de sa fonction judiciaire ; elle doit les chercher dans les règles communes aux
droits internesdes principaux systèmes juridiques mondiaux.

Ces principes traduisent une recherche de l’esprit commun à différentes règles nationales,
une sorte d’un sens commun des lois internes obéissant à une logique ou des exigences
universelles. Par conséquent, ces principes deviennent à la fois communs aux principaux
systèmes juridiques internes et au droit international.

2- Le contenu des principes généraux de droit

L’examen de la jurisprudence judiciaire et arbitrale permet de constater que le recours à


ces principes généraux permet de dégager des règles procédurales nécessaires à la bonne
administration de la justice internationale. Les exemples de ces principes abondent et on
peut citer le principe selon lequel nul ne peut être juge et partie ; personne ne peut être
juge à sa propre cause ; la nécessaire égalité des parties à un différend ; le principe de
l’autorité de la chose jugée ; celui de la bonne foi ; le principe de la force majeure ; celui
selon lequel personne ne peut disposer d’un droit dont il n’est pas titulaire…

15
Pierre-Marie Dupuy, Yann Kerbrat, Droit international public, Précis Dalloz, 2016, p. 372.
36

La valeur de ces principes est évolutive. En effet, ils sont initialement établis par la
jurisprudence internationale, cependant ils vont devenir rapidement une règle coutumière
ou même conventionnelle lorsqu’ils sont réceptionnés par le droit international16.

B- LES PRINCIPES GENERAUX DU DROIT INTERNATIONAL

A la différence des précédents principes, ceux objets d’étude sont propres au droit
international. En d’autres termes, ils ne sont pas issus du droit interne mais directement du
droit international.

1- Origines et caractères

Etant propres au droit international, leur origine sont diverses mais ils sont
essentiellement le produit de l’action conjuguée du juge international et de la diplomatie
normative des Etats. Contrairement aux principes généraux de droit reconnus par les
nations civilisées, ils sont souvent d’énonciation contemporaine.

Bien que le juge international ait fréquemment recours à ces principes, les qualifiant de
concept fondamental par exemple, pour trancher des différends, leur définition est délicate.
Ils sont utilisés dans des circonstances très diverses et qu’il est difficile d’en définir le
contenu. Le caractère commun à ces principes tient à leur haut niveau d’abstraction et à
leur extrême généralité, dont l’effet est de condenser le plus souvent la règle désignée en
une formule dont la concision est parfois source d’ambiguïté. Ces principes apparaissent
comme des axiomes fondamentaux du droit international.

Le juge international extrait ces principes de l’observation des autres sources du droit
international à savoir les coutumes et les conventions. Il en est ainsi du concept juridique
fondamental de la souveraineté des Etats ; des principes généraux de base du droit
humanitaire, du principe Pacta sunt servanda…

2- Fonction

Ces principes disposent d’une vie propre dans la mesure où le juge qui les invoque n’a pas
besoin d’apprécier leur validité juridique, comme il le ferait pour une coutume, ou de
vérifier qu’un Etat est tenu conventionnellement par cette norme. Ils servent souvent de
point de départ, d’articulation ou de soutien à l’argumentation juridique de leurs arrêts,
dont ils fournissent l’ossature conceptuelle17.

La violation répétée d’un principe ne porte pas atteinte à son existence, comme en
témoigne l’invocation répétée du principe d’interdiction du recours a la force. Le juge ou

16
Catherine Roche, L’essentiel du Droit international public, Gualino, 2012, p. 36.
17
Pierre-Marie Dupuy, Yann Kerbrat, op., cit, p. 374.
37

l’arbitre considère ces principes comme inhérents à l’existence de l’ordre juridique


international.

Ces principes sont aussi utilisés par les Etats lors de déclarations unilatérales par exemple.
Ils viseront ainsi notamment au rappel solennel de normes déjà consacrées : par exemple le
cas du principe d’égalité souveraine des Etats, celui de non-intervention ou celui de non-
ingérence dans les affaires intérieures d’un autre Etat.

LES ACTES UNILATERAUX

Les actes unilatéraux bien que non mentionnés à l’article 38 du statut de la CIJ, ils sont
présentés parmi les modes de formation du droit international. Les auteurs des actes
unilatéraux sont les principaux sujets du droit international et en émettant ces actes, qui
sont des droits et des obligations au plan international, leur sont imputables. Que ces actes
soient adoptés par un seul sujet de droit ou parfois par plusieurs, àl’issue d’une conférence
de chefs d’Etatpar exemple, ils visent avant tout la promotion des intérêts particuliers de
leurs auteurs à savoir les Etats et les organisations internationales.

A- LES ACTES UNILATERAUX ETATIQUES

Afin d’agir dans l’ordre international, les Etats n’utilisent pas que la voie conventionnelle,
ils peuvent prendre des initiatives unilatérales four faire valoir leurs intérêts. Ces actes
sont divers et peuvent être classés en trois catégories : opposabilité d’une situation
juridique, l’exercice de droits souverains et la création d’engagements juridiques.

1- Opposabilité d’une situation juridique :

Confronté à une situation constituée en dehors de son intervention, un Etat a deux


possibilités : la reconnaitre ou la protester.

a- La reconnaissance :

La reconnaissance occupe une place importante dans les relations juridiques


internationales. Elle intervient à l’ occasion de tout fait juridique modifiant ou ayant pour
objet de modifier l’ordonnancement juridique international. Cette modification peut être
provoquée par exemple par l’apparition d’un nouvel Etat ou l’exercice de compétences sur
un territoire donné par un gouvernement manifestant ainsi à son égard des prétentions de
souveraineté.

La reconnaissance aura pour effet d’empêcher celui qui l’émet de contester ultérieurement
la validité de la situation qu’elle a pour objet de constater et d’accepter. Elle est souvent
effectuée par voie de déclaration explicite, cependant rien n’empêche qu’elle découle d’un
comportement à la condition que celui-ci soit clairement imputable aux organes
compétents de l’Etat concerné.
38

Un élément très important en pratique, ainsi que le démontre la jurisprudence, doit être
souligné : du fait que la reconnaissance peut résulter également d’un comportement, aussi
bien passif qu’actif, l’absence de protestation d’un gouvernement face a l’apparition d’une
situation de fait ou de droit susceptible d’avoir des incidences sur ses intérêts est la plupart
du temps considérée comme un acquiescement à la validité et l’opposabilité de cette
situation à son égard, sur lequel il ne saurait revenir18.

b- La protestation :

La protestation produit l’effet inverse de la reconnaissance. Pour sa validité, elle doit être
effectuée de façon suffisamment prompte, claire et constante après la survenance du fait
considéré, elle préviendra l’opposabilité de ce dernier à l’Etat protestataire19.

2- Exercice de droits souverains :

Il s’agit essentiellement d’actes unilatéraux dans l’ordre interne par un Etat, afin d’exercer
les compétences discrétionnaires qui lui sont conférées par le droit international. Ainsi en
est-il par exemple de la délimitation des ses eaux territoriales ou de la zone économique
exclusive, de l’attribution de sa nationalité à une personne physique ou morale, d’une
déclaration d’embargo commercial, de guerre ou de neutralité.

La forme revêtue par ces actes (généralement loi ou décret) importe peu au droit
international. En revanche, leur validité dépend de leur conformité aux règles de ce droit.
Ainsi, la CIJ a subordonné l’efficacité internationale de l’octroi de la nationalité à sa
conformité au critère substantiel d’un lien effectif de l’individu avec le pays auquel il
demande ainsi à être rattaché. Aussi, la détermination unilatérale de la largeur de la mer
territoriale n’est-elle opposable aux autres Etats que si elle n’excède pas la distance établie
en droit international à savoir 12 milles nautiques et la remarque est aussi valable pour la
zone économique exclusive qui ne saurait s’étendre au-delà des 200 milles des lignes de
base20. Ce n’est pas la validité interne de l’acte unilatéral qui est mise en cause mais son
opposabilité internationale.

3- Création d’engagement juridique :

Certains actes unilatéraux ont pour effet, sinon toujours pour objet, le renoncement a
l’exercice d’un droit ou, selon les cas, la création d’une obligation à l’égard de leur auteur.

Les promesses par lesquelles l’Etat s’engage à adopter tel ou tel comportement, sont des
actes unilatéraux autonomes. Lors de l’affaire des essais nucléaires opposant la France à
l’Australie en 1974 portée devant la CIJ, le président français et son ministre des Affaires

18
Ibid., p. 382.
19
Ibid., p. 383.
20
Ibid.
39

étrangères avaient fait des déclarations aux termes desquelles la France renonçait pour
l’avenir aux essais nucléaires dans l’atmosphère, eu égard aux progrès de sa technologie en
la matière.

La CIJ a admis que de tels actes pouvaient « avoir pour effet de créer des obligations
juridiques ». Ainsi, « quand l’auteur de la déclaration entend être lié conformément à ses
termes, cette intention confère à sa prise de position le caractère d’un engagement
juridique, l’Etat intéressé étant désormais tenu en droit de suivre une ligne de conduite
conforme à sa déclaration ». En l’absence de toute intervention d’un autre sujet, que ce soit
pour accepter ou au contraire contester la promesse, un Etat peut donc unilatéralement
s’engager au niveau international. Bien sûr, cette promesse doit émaner d’une personne
susceptible d’engager l’Etat. Lorsqu’il s’impose de telles obligations, l’Etat ne peut pas
unilatéralement revenir sur sa promesse sans engager sa responsabilité internationale,
puisqu’il a crée des droits au profit des tiers.

Enfin, il faut ici mentionner une dernière catégorie d’actes unilatéraux étatiques, ceux par
lesquels un Etat tente d’imposer des obligations à des tiers contre leur volonté. En dehors
des cas très spécifiques où l’Etat agit pour le compte de la communauté internationale, en
étant dûment mandaté, on entre ici dans des domaines plus politiques que juridiques, où la
puissance des Etats pèse d’avantage que la règle de droit21.

B- LES ACTES UNILATERAUX DES ORGANISATIONS INTERNATIONALES

Les actes émanant des organisations internationales font l’objet d’une terminologie très
variée : résolutions, recommandations, décisions, directives, règlements… C’est le traite
constitutif de chaque institution qui prévoit quels sont les organes habilités à prendre tel
ou tel acte, selon quelle procédure et avec quels effets. Devant cette diversité des termes
utilisés, il est judicieux d’entreprendre une distinction entre les décisions à caractère
obligatoire et les recommandations à portée non obligatoire.

1- Les décisions :

Les décisions qui sont des actes unilatéraux émanant des organisations internationales
créent des obligations à la charge de leurs destinataires. Ces décisions produisent des effets
internes ou externes.

a- Un pouvoir réglementaire interne :

Il s’agit d’actes que l’organisation internationale prend unilatéralement mais qui ne créent
d’obligations qu’à l’ egard d’elle-même et/ou des Etats membres. Ces décisions qualifiées
d’actes « autonormateurs », sont liées au fonctionnement interne de l’institution. Elles

21
Catherine Roche, op., cit, p. 40-41.
40

peuvent avoir trait par exemple à l’adoption de son budget ou à la création d’organes
subsidiaires22.

b- Un pouvoir réglementaire externe :

Certaines décisions s’imposent aux Etats membres, qu’ils les aient ou non approuvées ou
qu’ils considèrent comme portant atteinte à leur souveraineté, leur adoption est
strictement réglementée et réservée à des domaines très précis :

- les décisions adoptées par le Conseil de sécurité de l’ONU pour mettre en œuvre les
compétences que lui confère le chapitre VII de la charte relatif au maintien de la paix. Ces
décisions s’imposent aux Etats membres de l’Organisation, en vertu de l’article 25 de la
charte.

- certaines organisations disposent de fait d’un véritable pouvoir réglementaire dans des
domaines très techniques, afin d’uniformiser des réglementations internationales. On cite
l’exemple de l’Organisation mondiale de la Sante qui est une institution spécialisée des
Nations Unies.

- les organisations internationales d’intégration à l’image de l’Union européenne disposent


de ce pouvoir réglementaire externe, à travers les directives, règlements ou décisions, qui
s’impose aux Etats et a une autorité supérieure aux règles internes23.

2- Les recommandations :

Les actes adoptés par les organisations internationales de coopération sont dans leur
majorité des recommandations qui ne sont que des actes invitant les destinataires à suivre
un comportement mais qui ne sont pas juridiquement obligatoires. Il s’agit alors de
propositions, d’exhortations, auxquels les Etats sont libres de se plier ou pas. C’est le cas
des résolutions du Conseil de sécurité, prises dans le cadre du chapitre VI de la charte.

Il importe de mentionner que des recommandations peuvent devenir obligatoires si elles


ont été spécialement acceptées par leurs destinataires. D’autant plus qu’elles disposent
dans certains cas d’une grande portée politique et morale. On cite l’exemple des résolutions
de l’Assemblée générale des Nations Unies qui sont adoptées par une très grande majorité
d’Etats, peuvent constituer un moyen de pression très efficace sur un Etat, ceci d’autant
plus que l’affaire en cause est médiatisée24.

22
Ibid., p. 42.
23
Ibid.
24
Ibid., p. 43.
41

LES MOYENS AUXILIAIRES DE DETERMINATION DES REGLES DE DROIT

Les « moyens auxiliaires de détermination des règles de droit » en ce sens la jurisprudence,


la doctrine et l’équité ne sont pas des sources du droit international, ils n’ont pas pour
fonction de créer des règles de droit mais plutôt d’aider à les déterminer.

A- LA JURISPRUDENCE ET LA DOCTRINE

Etant des moyens auxiliaires de détermination des règles de droit, la jurisprudence et la


doctrine remplissent des rôles distincts.

1- La jurisprudence :

Comme il a été mentionné précédemment, l’activité du juge international peut ainsi


permettre de préciser le statut de règles aux contours incertains, en consacrant par
exemple l’existence d’une coutume internationale. La jurisprudence internationale a, dans
de nombreux domaines, permis de développer le Droit international.

Il importe de relever que la jurisprudence telle que mentionnée à l’article 38 laissait


entendre qu’elle était composée exclusivement des arrêts de la CIJ. En fait, la jurisprudence
internationale recouvre l’ensemble des décisions adoptées aussi bien par des juridictions
que par des tribunaux arbitraux. La jurisprudence a une influence certaine sur
l’interprétation du droit, et par là même sur son évolution25.

2- La doctrine :

Contrairement au juge ou à l’arbitre, qui, même si c’est pour le règlement d’une affaire
déterminée, ont reçu un mandat des Etats pour régler leur différend en application du
droit, les membres de la doctrine ne représentent qu’eux-mêmes, produisant des opinions
sans égale comparaison ni importance par rapport la norme et son contexte dominés par la
prééminence étatique.

Le recours à l’opinion des publicistes les plus qualifiés pour déterminer la règle de droit
international se faisait à un moment où ce droit était à ses balbutiements. Actuellement, la
volonte des Etats priment sur les opinions librement exprimées par des individus ou des
sociétés savantes. Néanmoins, certains organes de codification, comme la Commission du
droit international, au statut d’organe public spécifiquement chargé de tâches de
codification par l’Assemblée générale des Nations Unies, constituent des cénacles
doctrinaux exerçant une influence souvent non négligeable sur l’élucidation du contenu et
de la portée des règles de droit26.

25
Ibid., p. 45.
26
Pierre-Marie Dupuy, Yann Kerbrat, op., cit, p. 391.
42

Il importe de relever le rôle important joué par la doctrine dans le développement du droit
de la mer, par exemple par l’identification de la notion de zone économique exclusive
(ZEE).

B- L’EQUITE

Dans la mesure où le droit est lié à la recherche de la justice, l’équité est inhérente à son
application. Elle intervient en particulier, à titre d’inspiratrice et de guide pour aider à
l’adéquation d’une règle abstraite à une situation concrète. Elle constitue à la fois la finalité
et l’instrument en fonction duquel le droit sera appliqué concrètement. C’est une simple
technique d’interprétation.

C’est essentiellement en matière de délimitation maritime que le juge a eu recours aux


« principes équitables » pour régler des litiges, peut-être parce que c’est un domaine dans
lequel il est particulièrement difficile de fixer des règles générales et abstraites qui
permettent d’appréhender tous les cas d’espèce. Les principes équitables ont aussi inspiré
les délibérations de l’Union internationale des télécommunications en matière d’allocation
des ondes de fréquence et des orbites géostationnaires. C’est aussi le cas, du projet de la
CDI relatif à l’utilisation des voies d’eau internationales à des fins autres que la navigation,
sous la forme de la règle d’« utilisation équitable » de ces eaux par les différents Etats
riverains. D’une façon générale, l’équité se retrouve dans la détermination des conditions
d’utilisation des ressources partagées par deux ou plusieurs Etats27.

Cependant, l’utilisation de l’équité par la jurisprudence, est fréquemment critiquée en


raison de l’insécurité juridique qu’elle entraine. En effet, les parties en conflit avancent
qu’elles ne peuvent pas connaitre les principes équitables que le juge retiendra pour
moduler l’application d’une règle de droit.

Cette insécurité, liée à la liberté d’appréciation laissée au juge, est encore beaucoup plus
forte lorsque le juge statue ex aequo et bono. Cette formule, qui est retenue par l’article 38
de la CIJ, implique que le juge international, lorsqu’il est saisi par les parties à un différend,
pourra dans l’absolu, prononcer son jugement en se fondant uniquement sur l’idée qu’il se
fait de la justice dans l’affaire qu’il a à trancher. Mais ce pouvoir exorbitant, dépend
toujours d’une habilitation expresse des parties28

27
Ibid., p. 392.
28
Catherine Roche, op., cit, p. 46-47.
43

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