Dip Cours S2
Dip Cours S2
Dip Cours S2
COURS :
Pr YACINE TANANE
2
INTRODUCTION :
Le droit international public, parfois appelé droit des gens, peut être défini comme
l’ensemble des normes et des institutions qui ont vocation de régir la société
internationale1. Aussi, ce droit a pour objet de règlementer les relations au sein de la
société internationale2. Ces relations et rapports sont l’œuvre de sujets de Droit
international et qui sont traditionnellement, les Etats, récemment, les organisations
internationales et exceptionnellement les individus. En d’autres termes, c’est le droit des
relations internationales. Mieux encore, c’est le droit applicable à la société internationale.
Malgré sa brièveté, cette définition a le mérite, premièrement de consacrer l’existence
d’une société internationale distincte de la société interne, nationale ou étatique.
Deuxièmement, elle pose les limites des champs d’application respectifs du droit
international et du droit interne. Et enfin, elle atteste du lien sociologique entre le droit et
la société ; chaque société a besoin d’un droit qui est un produit social3.
En revanche, le droit international privé, quoique c’est un droit qui s’applique sur le plan
international, est l’ensemble des règles relatif aux relations entre personnes privées de
pays différents. Il a pour objet non seulement de résoudre les conflits de lois et de
juridiction mais aussi de traiter de la nationalité et de la condition des étrangers. Le droit
international public s’adresse et s’applique aux Etats et aux organisations internationales
intergouvernementales par le biais de normes prescriptives, prohibitives ou permissives.
1
Pierre-Marie Dupuy : Droit international public, Précis Dalloz 2e édition, 1993, p. 1.
2
Catherine Roche: L’essentiel du droit international public. 4e édition, les carrés 2010, p. 3.
3
Daillier, Forteau, Pellet: Droit international public, L.G.D.J 8e édition 2009, p. 43.
3
Au même temps, la société internationale est individualiste. En effet, elle est assujettie au
principe de la souveraineté des Etat.Les Etats se veulent égaux et indépendants.Ils sont très
regardants lorsqu’il s’agit de la plénitude de l’exercice de leurs compétences et abhorrent
l’intervention des autres Etats dans leurs affaires internes. Cette attitude concerne aussi
bien les Etats anciens que les nouveaux. Ces derniers encore plus car ils sont avides
d’autonomie, d’indépendance et d’affirmation de soi sur la scène internationale. Leur
nombre a augmenté et cela en deux phase, la première concerne le processus de
décolonisation qui a connu son summum dans les années soixante-dix. Et la deuxième
phase est celle des années quatre-vingt-dix du siècle dernier (URSS, Yougoslavie).
On outre, la société internationale se caractérise par une nature décentralisée, les Etats ne
sont pas sous la subordination d’un « super Etat ». A la différence de la société interne où
les pouvoirs publics, qui ont le monopole de la puissance, contraignent et subordonnent les
citoyens.
Deuxièmement, la société internationale est obérée par les conflits armés. Pourtant, le
recours à la guerre a été, dès le début du XXe siècle, mis en cause. Le pacte Briand-Kellogg,
ou pacte de Paris signé le 27 août 1928, stipule que les puissances signataires
« condamnent le recours à la guerre pour le règlement des différends internationaux et y
renoncent en tant qu'instrument de politique nationale dans leurs relations mutuelles. »
Cette volonté d’interdiction du recours à la force dans les relations internationales a été
confirmée par les dispositions de la Charte des Nations unies, (appelée aussi Charte de San
Francisco 26 juin 1945), article 2 paragraphe 4 « Les Membres de l'Organisation
s'abstiennent, dans leurs relations internationales, de recourir à la menace ou à l'emploi de
la force, soit contre l'intégrité territoriale ou l'indépendance politique de tout État, soit de
toute autre manière incompatible avec les buts des Nations Unies. » L’interdiction du
recours à la force se verra consacré une valeur coutumière générale par la Cour
Internationale de Justice (CIJ), lors de son avis Nicaragua contre États-Unis de 1986
(Activités militaires et paramilitaires au Nicaragua et contre celui-ci), et qui transcende la
Charte des Nations Unies. L’invasion du Kuweit par l’Irak en 1991 a donné lieu à la
formation d’une coalition internationale chargée de rétablir le respect du principe en
question. L’acte d’agression entrepris par l’Irak a été jugé comme une violation lourde du
droit international. Depuis cet évènement, les Etats, stigmatisés, ne privilégient nullement
le recours à la guerre dans leurs relations en vue de régler un différend. Cependant, et
depuis l’effondrement du communisme, on assiste à une explosion de conflits armés et
principalement de guerres civiles.
Concrètement, le droit international public vise à limiter les tendances d’anarchie dans les
relations internationales par le biais d’un arsenal normatif destiné à assurer la coexistence
entre les sujets du droit international. Cependant, le plus souvent, on reproche à ce droit, à
tort, son manque d’efficacité car ne disposant pas de sanctions. En effet, un pouvoir exécutif
international fait défaut à la société internationale et par conséquent, l’application du droit
international dépend entièrement de la volonté de ses sujets.
Ceci étant, et afin de saisir la portée du droit international public, il importe d’étudier les
modes de formation de ce droit. En droit international, pareil qu’en droit interne, la
question des sources et de leur hiérarchie est une question de grande importance.
Concernant les sources, on ne retiendra que celles qui créent à l’égard des sujets de droit
international et principalement les Etats, des droits et des devoirs, des obligations. Par
conséquent, ne seront pas étudiés les principes relevant de la sociologie des relations
internationales (analyse des acteurs des relations internationales, de leur puissance, de
leurs objectifs et de leurs instruments) ou de la pratique diplomatique par exemple.
Généralement, on distingue les sources formelles et les sources matérielles. Les sources
formelles sont les procédés d’élaboration du droit et les diverses techniques qui
permettent de considérer qu’une règle accède et appartient au droit positif. En d’autres
termes, les sources formelles, simples procédés techniques, correspondent à la formulation
et à l’introduction dans le droit positif du contenu de la règle. Les sources matérielles,
quant à elles, constituent les fondements sociologiques des normes internationales, leur
base politique, morale ou économique. Ce sont les structures internationales et les
idéologies dominantes, mais aussi, les comportements étatiques et les résultats officieux de
négociations encore inachevées. Le contenu du droit dérive des sources matérielles. Elles
ne peuvent parfaire à elles seules une norme internationale, cependant elles participent au
processus d’émergence du droit positif, en cela qu’elles influencent les procédures
juridiques qui matérialisent les sources formelles4.
Les sources formelles du droit international public sont énumérées et déterminées par
l’article 38 de la Cour Internationale de Justice (CIJ) 1945, stipule que : «
1. La Cour, dont la mission est de régler conformément au droit international les différends
qui lui sont soumis, applique :
a. les conventions internationales, soit générales, soit spéciales, établissant des règles
expressément reconnues par les Etats en litige ;
b. la coutume internationale comme preuve d'une pratique générale acceptée comme étant
le droit ;
c. les principes généraux de droit reconnus par les nations civilisées ;
4
Daillier, Forteau, Pellet: Droit international public. Op, cit, p. 124 ; 125.
6
d. sous réserve de la disposition de l'Article 59, les décisions judiciaires et la doctrine des
publicistes les plus qualifiés des différentes nations, comme moyen auxiliaire de
détermination des règles de droit.
2. La présente disposition ne porte pas atteinte à la faculté pour la Cour, si les parties sont
d'accord, de statuer ex aequo et bono. »
Cet article dispose d’un caractère universel car tous les Etats membres de l’ONU sont
parties au Statut de la CIJ. Cependant, cet article n’est pas à l’abri de la critique puisque, en
effet, il ne répertorie pas toutes les sources formelles, il ne fournit pas une liste exhaustive
de ces dernières. Il manque les actes unilatéraux des Etats et les décisions des
organisations internationales.
S’agissant de la hiérarchie des sources, il importe de faire la distinction entre les normes
juridiques internationales et les sources formelles du droit international. On désigne par
norme le contenu et la substance d’une règle préparée en fonction des techniques et
procédures d’une source formelle. Pour illustrer ce qui précède, on peut dire que les
normes coutumières trouvent leur fondement dans la coutume qui est une source formelle.
Une norme peut provenir de plusieurs sources différentes comme par exemple les normes
concernant la délimitation du plateau continental, selon les Etats, peuvent avoir comme
source soit le cadre conventionnel soit la coutume. Il est vrai aussi qu’une même source
peut donner lieu à de nombreuses règles de substance diverse et différente, l’exemple du
traité en est la preuve.
Afin d’appréhender la question des sources du droit international dans sa totalité, il est
judicieux d’étudier et les sources conventionnelles et celles non conventionnelles. Cette
distinction qui prend en considération l’article 38 de la CIJ, a la particularité de montrer,
d’une part, que le droit international n’est pas strictement consensuel, aussi qu’il existe
d’autres sources que celles mentionnées dans le précédent article et d’autre part
l’amplification des sources conventionnelles, le droit des traités, par rapport aux autres
sources.
7
Les règles régissant le droit des traités ont été codifiées par la Commission du Droit
International des Nations Unies (CDI) et cela dans le cadre de la Convention de Vienne sur
le droit des traités du 23 mai 1969.
L’étude des traités nous amène à se pencher sur les modalités de leur conclusion, les
conditions de leur validité, leurs effets, et enfin leur terminaison. Mais avant, il importe de
voir les données fondamentales relatives à la notion de traités.
A - DEFINITION
A la lecture de cet article on peut dégager trois éléments essentiels. Premièrement, il s’agit
d’un accord international en forme écrite. Ne concerne cette définition que les accords
conclus par écrit à l’exclusion des accords verbaux par exemple. Cependant, la convention
de Vienne n’ignore pas les accords qui n’ont pas été conclus par écrit, et ne leur dénie pas
une valeur juridique et c’est ce qui ressort de l’article 3.
Cependant, la CIJ reconnait que « la terminologie n’est pas un élément déterminant quant
au caractère d’un accord ou d’un engagement international. » Dans la pratique des Etats les
termes les plus utilisés restent traité, accord, convention.
A l’examen du texte d’un traité, quel que soit son objet, on y trouve deux types de
dispositions. Premièrement, des dispositions opératoires au début et surtout à la fin du
traité qui renseignent sur les parties signataires, le lieu et la date de sa conclusion. En
outre, vers la fin du texte, elles établissent l’ensemble des conditions techniques dans
lesquelles le traité produit ses effets à savoir la date, à l’égard de qui,et éventuellement les
conditions dans lesquelles les parties peuvent y introduire des réserves, comment d’autres
Etats pourront y adhérer, quelles sont les modalités de modifications… Deuxièmement, les
10
A –COMPLEXITE
Cette complexité est la fois double, elle concerne la mise en jeu d’ordres juridiques internes
et internationaux, et la transformation de la société internationale.
Etant une opération à procédure, la conclusion des traités est par nature une matière régie
par le droit international et le droit interne.
5
Pierre-Marie Dupuy, op. cit, 182.
11
B – ELABORATION DU TRAITE
L’élaboration du traité est une opération complexe qui fait intervenir une procédure
spécifique. Elle passe par deux étapes ; celle de la négociation et celle de l’adoption.
1 – LA NEGOCIATION DU TRAITE
Le Chef de l'Etat autorise des négociateurs à agir en son nom. Cette autorisation prend la
forme d'un document dénommé « pleins pouvoirs ». La signature de cet instrument habilite
en conséquence celui qui en est porteur à élaborer un texte au nom de l'autorité suprême
de l'Etat6.
Symbole de la souveraineté, la pratique des pleins pouvoirs survit depuis l’époque des
monarchies européennes. La convention de Vienne reconnait le caractère coutumier de
cette pratique, néanmoins elle laisse aux Etats la liberté d’y recourir ou pas. Les chefs d’Etat
et de gouvernement, les ministres des Affaires étrangères, les chefs de mission
diplomatique et les représentants accrédités d’un Etat à une conférence diplomatique ou
6
Claude Chayet: Les accords en forme simplifiée. Annuaire français de droit international. 1957, V3, p. 3.
12
auprès d’une organisation internationale ne sont pas concernés par cette pratique car ils
disposent de la présomption de représentativité. La présentation des pleins pouvoirs par le
plénipotentiaire reste une simple formalité, cependant certains problèmes peuvent se
poser à savoir la qualité étatique de l’entité représentée (elle peut être contestée) et aussi
la compétence de l’autorité ayant délivré les pleins pouvoirs7.
b – Le déroulement de la négociation.
Les Etats ne s’engagent pas à la légère, ils évitent le risque de se voir d’être liés au-delà de
leur volonté une fois l’accord conclu. Ils définissent les obligations en fonction de leurs
intérêts propres. En effet, l’objet de la négociation est de provoquer des amendements ou
des contre-propositions ou les deux à la fois à des projets de textes lors de leur discussion.
Les projets amendés ou pas vont devenir les dispositions du futur traité. Cependant, les
dispositions ne sont pas définitives, elles sont susceptibles d’être remises en cause tant que
le traité n’est pas adopté.
2 – L’ADOPTION DU TRAITE
L’adoption marque la fin de la phase de négociation. Elle renvoie à deux actes distincts ;
d’une part, l’arrêt du texte qui indique que la négociation a pris fin et que les négociateurs
considèrent que le texte qu’ils ont élaboré est en principe satisfaisant et acceptable. Et
d’autre part, l’authentification qui est une procédure par laquelle les négociateurs
expriment que le texte concorde avec leurs intentions et qu’il est définitif.
La différenciation entre ces deux actes est notoire en matière de traités multilatéraux
puisque le texte est d’abord adopté par l’organisation puis il est soumis à la signature des
chefs de délégation. Cependant, en matière de traités bilatéraux les deux opérations se font
en un acte unique à savoir la signature.
Il importe de signaler que le traité ne s’impose pas encore aux Etats qui l’ont signé, puisque
l’effet obligatoire découle de l’expression du consentement à être lié et non pas de la
signature. Toutefois, la situation d’un Etat qui a signé est tout à fait différente decelle d’un
Etat qui s’est abstenu de le faire. En effet, du fait de la signature, l’Etat reste tenu par
7
Daillier, Forteau, Pellet: Droit international public. Op, cit, p. 145
13
certains droits et devoirs comme par exemple « s’abstenir d’actes qui priveraient un traité
de son objet et de son but » (art 18 CVDT) tant qu’il n’a pas exprimé son consentement à
être lié.
Les modes d’expression à être lié diffèrent que l’on est en présence d’un traité en forme
solennelle ou celui en forme simplifiée.
Les traités en forme solennelle (traités formels, solennels ou « traités proprement dits »)
sont conclus en nom de chef de l’Etat et soumis à ratification ; c’est une procédure « à
double degré ». En effet, la procédure est longue, caractérisée par la distinction entre la
phase d’authentification du texte du traité, matérialisée par la signature, et la phase du
consentement à être lié qui se traduit par l’examen entrepris par les organes compétents
pour engager l’Etat. C’est grâce à cette deuxième étape que le traité produit des effets de
droit.
La ratification (acceptation, approbation), si elle est prévue par les Etats signataires,est
l’acte par lequel une autorité étatique, souvent la plus haute, constitutionnellement
désignée pour conclure les traités, confirme le traité élaboré auparavant, consent à ce
qu’il devienne définitif et obligatoire et s’engage solennellement au nom de l’Etat à
l’exécuter8. L’échange des « lettres de ratification » atteste de la réalité de la ratification ;
mais ils arrivent que les Etats optent pour une simple notification montrant que chacun
d’eux a effectivement accompli l’acte de la ratification. L’envoi des instruments de
ratification est un acte fondamental puisqu’il inaugure l’expression de l’Etat à être lié.
Cependant, il arrive que les Etats non seulement procèdent à une ratification tardive, le
Maroc a signé la CVDT le 23 mai 1969 et ne la ratifié que le 26 septembre 1972 ; mais aussi
s’abstiennent de ratifier, les Etats-Unis ont signé ladite convention mais ne l’ont pas ratifié.
Les Etats disposent d’un pouvoir discrétionnaire en matière de ratification, certains d’entre
eux acceptent de signer des traités pour des raisons politiques alors qu’ils n’ont pas
l’intention de les ratifier9.
8
Daillier, Forteau, Pellet: Droit international public. Op, cit, p. 153.
9
Maxime Lefebvre: Le jeu du droit et de la puissance. Précis des relations internationales. 4e édition, PUF, 2013.
p59
14
Le traité en forme simplifiée est un accord conclu selon une procédure courte « à un seul
degré » ; en d’autres termes le traité est définitivement conclu par le seul fait de sa
signature. Celle-ci est à la fois un acte d’authentification du texte et un mode d’expression
du consentement à être lié. Dans ce cas la ratification qui est un élément essentiel de
l’accord formel, n’a pas lieu d’être.
L’utilisation du traité en forme simplifiée a été introduite par la pratique américaine depuis
le XVIIIe siècle et s’est généralisée à tous les Etats. Son avantage c’est qu’elle permet aux
Etats de rapidement subvenir à leurs besoins (négociations militaires, économiques,
financières) et aussi de dépasser tout blocage causé par la pratique parlementaire.
1 – L’entrée en vigueur.
Par ailleurs, on sait que les accords en forme simplifiée entrent en vigueur dès que les Etats
expriment leur consentement à être lié par l’apposition de leur signature. Pour les accords
en forme solennelle, l’entrée en vigueur diffère suivant qu’il s’agit d’un accord bilatéral ou
multilatéral.
Les traités bilatéraux peuvent prévoir leur entrée en vigueur à une date donnée, le jour de
la dernière signature, lors de l'échange des instruments de ratification ou encore lors de
l'échange des notifications. En cas du silence du texte, la CIJ considère qu’il existe une
présomption en faveur de l’entrée en vigueur à la date de l’échange des lettres de
ratification (arrêt 18 novembre 1960, affaire de la sentence arbitrale rendue par le roi
d’Espagne.L'Affaire de la sentence arbitrale rendue par le Roi d'Espagne le 23 décembre
1906, concernant la délimitation de la frontière entre le Honduras et le Nicaragua, avait été
15
introduite par le Honduras contre le Nicaragua par voie de requête déposée le 1er juillet
1958. Le Honduras demandait à la Cour de dire et juger que le Nicaragua est tenu
d'exécuter la sentence; le Nicaragua lui demandait de dire et juger que la décision du Roi
d'Espagne n'a pas le caractère d'une sentence arbitrale obligatoire et qu'elle n'est en tout
cas pas susceptible d'exécution. Par 14 voix contre une, la Cour a dit que la sentence est
valable et obligatoire et que le Nicaragua est tenue de l'exécuter).
Les traités multilatéraux exigent parfois des signatairesl’unanimité des ratifications, mais
cette procédure a le désavantage de bloquer indéfiniment l’entrée en vigueur de l’accord.
Traditionnellement, pour passer outre ce problème, l’entrée en vigueur est subordonnée
non pas au principe de l’unanimité mais seulement à un certain nombre de ratifications. Le
nombre des ratifications nécessaires à l’entrée en vigueur des grandes conventions
conclues sous les auspices des Nations unies est aujourd’hui fréquemment de 35, mais il est
souvent abaissé si l’on veut faciliter l’entrée en vigueur (20 pour la convention contre la
torture de 1984) ou augmenté si une large participation est nécessaire pour des raisons
d’efficacité (60 pour le statut de la CPI de 1998)10.
Dans d’autres cas, il arrive qu’en plus du nombre des ratifications requises, il est nécessaire
d’avoir les ratifications de certains autres Etats ou certaines organisations internationales
pour l’entrée en vigueur. Le Traité d'interdiction complète des essais nucléaires (CTBT) de
1996 subordonne son entrée en vigueur à sa ratification par 60 Etats dont les 44,
nommémentdésignés par l’annexe 2, qui possèdent des centralesnucléaires et des
réacteurs de recherche.
Un traité ou une partie d’un traité peut,selon la volonté et le consentement des Etats ayant
participé à la négociation, s’appliquer provisoirement en attendant son entrée en vigueur.
L’application provisoire ne saurait signifier une entrée en vigueur proprement dite.
2 – Enregistrement et publication.
10
Daillier, Forteau, Pellet. Op, cit, p. 178.
16
à mettre fin aux ententes et accords secrèteentre nations,et favoriser une diplomatie
ouverte et transparente.
Les traités sont accessibles sur le site web des Nations Unies http://untreaty.un.org
A l’origine, la signature ne concernait que les seuls Etats ayant participé à la phase de
négociation. Toutefois, cette éventualité est aujourd’hui étendue aux Etats qui n’ont pas
participé à la négociation ou même à ceux qui y ont pris part mais qui ont jugé inopportun
de signer le traité lors de son adoption.On désigne cette pratique par « la signature
différée ». L’intérêt de cette dernière est de permettre à un Etat, étranger à la négociation,
d’accomplir la procédure pour faire partie d’un traité et aussi de laisser la porte ouverte à
l’Etat qui n’a pas signé de le faire après réflexion.
Quant à l’adhésion, c’est l’acte par lequel un Etat qui n’a pas signé le texte du traité, exprime
son consentement définitif à être lié. L’adhésion est une procédure qui produit les mêmes
effets que la signature et la ratification réunies. En effet, la pratique de l’adhésion permet à
l’Etat de s’engager en toute connaissance de cause, en toute lucidité ; il a au préalable
estimé les inconvénients et les avantages d’un tel engagement. Aussi, elle permet, plus que
la signature différée, d’écourter la procédure tendant vers l’expression du consentement à
être définitivement lié et traduit celle-ci au même titre que la ratification, l’acceptation ou
l’approbation.
2 – Les réserves.
En face d’un traité, un Etat a le choix entre deux attitudes. Il peut refuser d’en faire partie et
par conséquent, ne pas être contraint pas ces dispositions ; ou bien accepter de s’engager
mais pas totalement. En effet, dans ce second cas, l’Etat soit qu’il manifeste son intention
d’exclure certaines dispositions car elles ne lui conviennent pas, soit qu’il entend leur
donner une autre signification acceptable pour lui. On dit alors que l’Etat formule des
réserves aux dispositions du traité.
La réserve est une déclaration unilatérale faite par un Etat en vue de modifier à son égard
les effets juridiques de certaines des dispositions d’un traité à l’égard duquel il s’apprête à
17
La CVDT autorise les Etats à formuler des réserves à chaque étape du processus de la
conclusion du traité ; à la signature, à la ratification, à l’acceptation, à l’approbation ou à
l’adhésion.
Cependant, les réserves ne doivent pas être incompatibles avec l'objet et le but du traité. En
outre, un traité peut interdire les réserves ou n'autoriser que certaines réserves.
Le procédé des réserves soulève d’âpres critiques, on lui reproche de modifier le traité, de
le vider de son contenu, de bouleverser son équilibre entre autre. Si ces critiques sont en
partievrais, cela n’empêche pas d’admettre que les réserves sont un moyen efficace et
d’étendre le champ d’application des traités au plus grand nombre d’Etats, et de permettre
à ces derniers de retailler à leur mesure certaines obligations prévues par le texte.
A côté des réserves, les Etats utilisent fréquemment le procédé des« déclarations
interprétatives » qui est un instrument annexe à un traité dont le but est d'interpréter ou
d'expliquer les clauses de ce traité.Il ne vise ni à exclure ni à limiter les dispositions de
celui-ci.
Par ailleurs, une réserve peut soulever une objection ; en effet, un État contractant a la
faculté de faire une objection à une réserve mais cet acte n’empêche pas le traité d’entrer
en vigueur entre l’objectant et le réservataire, à moins que le premier ne l’ait pas
spécifiquement et expressément déclaré. En principe et selon la CVDT, l’effet de l’objection
ne frappe que la réserve concernée et que son entrée en vigueur est impossible entre
l’objectant et le réservataire.
Une réserve ou une objection à une réserve peut être retirée à tout moment à moins que le
traité n’en dispose autrement. Ce retrait doit être notifié par écrit aux Etats pour pouvoir
prendre effet à leurségards.
11
Pierre-Marie Dupuy, op. cit, p. 194.
18
Par capacité en entend les sujets de droit international qui ont l’aptitude de conclure des
traités. Il s’agit en effet des Etats, des organisations internationales et des mouvements de
libération nationale.
a – L’Etat.
D’autre part, l’imputation du traité conclu parune entité décentralisée avec un Etat. Il s’agit
de la responsabilité internationale de l’Etat dont dépend l’entité décentralisée contractante
se trouverait engagée en cas de non-respect de l’engagement.
En pratique, les mouvements de libération nationale ne peuvent conclure que trois sortes
de traités. Les accords d’indépendance qui sont le prélude pour la naissance d’un nouvel
Etat souverain. Les traités relatifs à la conduite de la lutte armées qui peuvent être
bilatéraux (les accords conclus par l’OLP avec le Liban, la Jordanie ou la Tunisie en 1969,
1970, 1982) ou multilatéraux. Et enfin, la participation aux organisations internationales ;
l’OLP comme membre de la Ligue des Etats arabes.
19
2 – La régularité du consentement.
Les vices qui affectent le consentement et entrainent la nullité du traité sont l’erreur, le dol
et la contrainte. Cependant, il existe une autre situation qu’on appelle « ratification
imparfaite ».
a – Erreur et dol
Les cas d’erreur sont rares en pratiques, et concernent les actes d’application du traité lui-
même ; on peut citer l’exemple retenu par la jurisprudence des traités territoriaux de tracé
de frontières comprenant des cartes inexactes.
La CVDT dans son article 48 restreint les conditions où l’erreur peut être invoquée par
l’Etat qui en est victime. L’erreur doit porter sur un fait, « une situation que l’Etat supposait
exister au moment où le traité a été conclu » ; l’erreur doit aussi porter sur une « base
essentielle du consentement de cet Etat à être lié par le traité » c’est ce qu’on appelle
l’erreur essentielle ; enfin, l’Etat ne saurait invoquer une erreur à laquelle il aurait
contribué par sa propre conduite ou qu’il aurait été en mesure d’éviter ou bien encore, si
par son comportement ultérieur, il a manifesté son entière soumission aux termes du traité
tel qu’il a été établi.
Même si les cas de dol dans la conclusion des traités sont inexistants, la CVDT consacre au
dol l’article 49 sans toutefois le définir. Le dol est à séparer de l’erreur car il consiste en des
comportements délibérés, conduite frauduleuse par exemple, en complète contradiction
avec la confiance mutuelle qui devrait normalement exister entre les négociateurs.
Cependant, le dol ne saurait être invoqué à des fins de nullité si l’Etat, par ses
comportements subséquents, semblait accepter le traité.
b – La contrainte.
La violence peut se manifester par de multiples voies autres que militaires, elle peut aussi
frapper à la fois l’Etat et ses représentants ou seulement ces derniers.
L’article 52 de la CVDT déclare est nul tout traité dont la conclusion a été obtenu par la
menace ou l’emploi de la force en violation des principes du droit international incorporés
dans la charte des Nations Unies. Il est clair que le recours à la force armée est prohibé,
mais l’article en question ne fait aucune référence à l’usage ou la menace des contraintes
économiques, politiques et psychologiques.La formule de compromis de l’article 52 renvoie
à la charte, de sorte que si dans l’avenir l’article 2, paragraphe 4, de la charte est interprété
20
comme recouvrant l’emploi d’autres formes de force que celle de la force armée, cette
interprétation s’appliquera automatiquement ici aussi12.
La contrainte exercée sur le représentant d’un l’Etat est un acte illicite et entraine la nullité
des traités conclus par la violence. L’article 51 de la CVDT est catégorique à cet égard
puisque la contrainte exercée sur le représentant d’un Etat au moyen d’actes ou de
menaces dirigées contre lui est dépourvue de tout effet juridique.
c – « Ratification imparfaite »
Les vices de consentement ont pour conséquence l’invalidité du traité car le consentement
de l’une des parties à l’accord a été vicié ; on parle alors de causes de nullité subjectives
puisqu’elles sont directement liées au comportement d’un sujet de droit. Cependant,
lorsqu’on parle de causes de nullité objectives, c’est quand l’invalidité d’un traité pour
illicéité de son objet met en cause la contradiction manifeste du contenu du traité en
question avec une règle de droit préexistante jouissant d’une valeur hiérarchiquement
supérieure.
Ces règles sont appelées les règles impératives ou jus cogensque les travaux de la CDI ont
consacré en soulignant que certaines règles et certains principes s’imposent aux Etats et
qu’il est interdit d’y déroger par des arrangements conventionnels. De plus, la CDI a
12
Georges Abi-Saab in Recueil des cours 1987-VII de l’Académie de droit international de La Haye, p. 426.
21
recommandé aux Etats de frapper de nullité tout accord violant ces règles impératives. La
CVDT a consacré la primauté des normes impératives devant lesquelles les Etats ont
l’obligation de s’incliner ; c’est ce qui ressort aux termes de l’article 53 : « Est nul tout
traité qui, au moment de sa conclusion, est en conflit avec une norme impérative du
droit international général. Aux fins de la présente Convention, une norme impérative du
droit international général est une norme acceptée et reconnue par la communauté
internationale des Etats dans son ensemble en tant que norme à laquelle aucune
dérogation n'est permise et qui ne peut être modifiée que par une nouvelle norme
du droit international général ayant le même caractère. » Et de l’article 64 qui
stipule : « Si une nouvelle norme impérative du droit international général survient, tout
traité existant qui est en conflit avec cette norme devient nul et prend fin. »
Lors de son arrêt du 5 février 1970, concernant l’affaire Barcelona Traction, la CIJ a
confirmé l’approche de la convention de Vienne en la matière : « Par leur nature même [les
obligations des Etats envers la communauté internationale dans son ensemble]concernent
tous les Etats. Vu l’importance des droits en cause, tous les Etats peuvent être considérés
comme ayant un intérêt juridique à ce que ces droits soient protégés ; les obligations dont il
s’agit sont des obligations erga omnes. » En d’autres termes, la C.I.J affirme qu’ « une
distinction doit être établie entre les obligations des états envers la communauté
internationale dans son ensemble » (jus cogens) « et celles qui naissent vis-à-vis d’un autre
état dans le cadre de la protection diplomatique ».La cours a longtemps évité d’employer
explicitement la notion de jus cogens en lui préférant celle d’obligations erga omnes ou celle
de « principes intransgressibles du droit international coutumier ». Ce n’est qu’en 2006,
lors de l’affaire Activités armées sur le territoire du Congo (Congo/Rwanda), que la CIJ a
explicitement utilisé la notion de jus cogensen déclarant l’interdiction du génocide comme
relevant de celui-ci et que la prévention et la répression d’un tel crime est une obligation
erga omnes.
Il ressort de l’article 53 que le jus cogens est un ensemble de règles au caractère impératif
et qui peut être d’origine soit coutumière soit conventionnelle. La CDI a dégagée une liste
non exhaustive de traités en violation du jus cogens comme par exemple ceux
recommandant l’emploi de la force contraire aux principes de la charte, ceux organisant la
traite des esclaves, la piraterie, le génocide… Toutefois, elle laisse le soin de la
détermination des règles impératives à la pratique des Etats et des tribunaux
internationaux.
droit ni s’y soumettre. Il importe de voir les formes de nullité et les conséquences qui
découlent de celle-ci.
La CVDT consacre le principe de la divisibilité des clauses du traité (article 44.4). Selon les
cas, l’Etat qui invoque la nullité est en droit de le faire à l’égard de l’ensemble du traité ou
seulement de l’une de ses clauses. Il s’agit essentiellement de faire la distinction entre la
nullité intégrale du traité qui est la règle et la nullité partielle qui est l’exception.
La première joue dans les cas les plus graves, où le principe de divisibilité est impossible, à
savoir, contrainte exercée sur l’Etat ou son représentant, contradiction avec une norme
impérative.
En revanche, en cas de dol par exemple, la nullité partielle peut intervenir à propos de la
clause affectée par le vice en question mais sous certaines conditions particulièrement
restrictive. En effet, les clauses divisibles sont celles détachables du reste du traité sans
pour autant nuire à l’intégrité ou à l’exécution de ce dernier, et celles qui ne constituent pas
une base essentielle du consentement des parties à être liées. Enfin, il faut aussi que la
continuation de ce qui subsiste du traité ne soit pas injuste.
Cependant, pour les autres hypothèses, le traité est considéré comme nul à partir du jour
de sa conclusion et non pas au moment de la découverte de la clause de nullité. La nullité a
un effet rétroactif et les parties doivent rétablir leurs rapports mutuels à la situation qui
aurait existé si les actes objet de nullité n’avaient pas été accomplis. S’il s’agit d’une
violation d’une norme impérative, en plus de ce qui a été dit, l’obligation est faite aux Etats
de se conformer et de respecter cette norme de jus cogens.
23
L’article 26 de la CVDT énonce : « Tout traité en vigueur lie les parties et doit être exécuté
par elles de bonne foi ». Le principePacta sunt servanda, qui signifie que les conventions
doivent être respectées, les États parties à un traité ne peuvent se prévaloir d'obstacles
posés par leur ordre juridique interne pour éviter d'exécuter leurs obligations
internationales. L’exécution de bonne foi et le respect du principe pacta sunt servanda sont
très liés et constituent deux aspects d’un même principe.
Le principe de la bonne foi demeure non seulement une institution en matière de relations
internationales mais d’une importance particulière et essentielle quant au droit des traités.
L’exécution de bonne foi s’apparente le plus à celle qui fait intervenir une volonté positive à
l’égard des engagements pris à savoir honnêteté et loyale ; toutefois une volonténégative
est celle qui se base sur la ruse et la faraude. Il ressort de l’article 18 que la définition de la
bonne foi estde « s’abstenir de tout acte visant à réduire à néant l’objet et le but du traité. »
Etats membres d’un Etat fédéral du champ d’application d’un traité conclu par ce dernier
en raison de préserver l’autonomie des Etats fédérés. La seconde clause, quant à elle, les
puissance coloniales avaient l’habitude d’exiger son inclusion dans les dispositions finales
des accords qu’elles passaient pour signifier que les dispositions de ces derniers ne
s’appliquaient pas dans les colonies qu’ils administraient.
L’exécution des traitésincombe à tous les organes de l’Etat, toutefois et afin de remplir cette
mission, il faut au préalable introduire et ensuite appliquer le traité dans l’ordre juridique
interne.
L’exécution du traité par les Etats est souvent tributaire de certaines décisions prisessur le
plan national. A cet égard on peut distinguer entre le traité au caractère self-executing
(auto-exécutoire) et celui qui n’en dispose pas.
Un traité, ou une disposition d’un traité, est self-executing lorsque son application n’est pas
tributaire de mesures internes complémentaires et même les mesures préalables à
l’exécution sont inutiles. Par contre, un traité dépourvu d’un caractère self-executing ne se
suffit pas à lui-même et par conséquent les Etats doivent prendre des mesures
complémentaires sur le plan interne pour son exécution, comme par exemple la
modification de la législation ou de la règlementation existantes, adoption de lois ou d’actes
règlementaires13.
Les deux aspects du principe de la relativité (l’accord n’impose ni obligations aux tiers, ni
ne leur confère des droits) sont confirmés par la jurisprudence internationale. Le premier
aspect, l’affaire de l’Ile de Palmas de 1928 relative au différend entre les Etats-Unis et les
Pays-Bas portant sur la souveraineté sur cette ile. Dans cette affaire, l’ile de Palmas faisant
partie des Philippines, les Etats-Unis, successeurs de l’Espagne aux Philippines après la
guerre hispano-américaine de 1898, désiraient opposer lesdits traités aux Pays-Bas. La
Cour Permanente d’Arbitrage a, dans sa sentence arbitrale débouté la réclamation des
Etats-Unis et que le traité en question ne crée aucune obligation a la charge des Pays-Bas.
Le second aspect, concerne l’affaire de l’Ile Clipperton, différend qui opposa la France et le
Mexique relatif à la souveraineté sur cette ile. Le Mexique a tenté de faire naitre à son profit
des droits de certaines dispositions de l’Acte de Berlin de 1885 auquel il n’a pas assisté. La
sentence arbitrale de la CPJI de 1931 a rejeté la prétention du Mexique au motif que ledit
Acte ne crée pas de droit en faveur des Etats tiers et accorde la souveraineté de la France
sur l’ile.
13
Daillier, Forteau, Pellet. Op, cit, p. 255.
26
- Obligations :Il est de règle qu’un traité ne crée absolument pas d’obligations à la charge
des Etats tiers, règle qui découle du principe l’indépendance et de l’égalité des Etats.
Cependant, il existe une exception et c’est celle visée par l’article 35 dispose : «
Une obligation naît pour un Etat tiers d'une disposition d'un traité si les parties à ce traité
entendent créer l'obligation au moyen de cette disposition et si l'Etat tiers
accepte expressément par écrit cette obligation. »
Il ressort de cet article que l’obligation qu’il vise ne s’impose pas à l’Etat tiers en vertu du
traité initial auquel il n’est pas partie, mais en vertu d’un accord entre ce dernier et le
groupe des Etats parties au traité initial.Cet accord auquel l’Etat tiers est partie, étant la
source de son obligation, est qualifié d’accord collatéral14.
-Droits :Par ailleurs, un traité peut créer des droits au profit des Etats tiers dans le respect
de leur souveraineté, il s’agit du traité comprenant la clause dite « clause de la nation la
plus favorisée ». Cette clause signifie que deux Etats A et B concluent un accord relatif aux
tarifs douaniers applicables aux produits importés en provenance de leurs territoires
respectifs. Cet accord comprend une clause qui stipule que l’un des deux Etats bénéficiera
de tout tarif plus favorable que l’autre pourrait ultérieurement concéder, dans un autre
accord, a un troisième Etat C. par conséquent, si l’Etat C,en vertu de l’accord A-C, bénéficie
d’avantages supérieurs à ceux accordés à l’Etat B dans l’accord A-B, alors ces nouveaux
avantages bénéficieront automatiquement à B, même s’il n’est pas partie à l’accord A-C, en
vertu de la clause incluse dans l’accord A-B.
En outre, un autre cas où des droits sont créés au profit d’un Etat tiers avec son
consentement est la « stipulation pour autrui ». Cette technique signifie que les parties à un
accord énoncent une promesse dont le bénéficiaire est un Etat tiers. La jurisprudence
internationale en l’occurrence la CPJI, dans le différend qui opposa la France à la Suisse à
propos des zones franches, a statué en 1932 que la Cour n’exclut pas la stipulation pour
autrui et subordonne sa validité au consentement de l’Etat tiers ; et qu’il ne peut
disparaitre sans le consentement du bénéficiaire. La CVDT corrobore l’arrêt de la CPJI par
les articles 36 et 37§2.
14
Daillier, Forteau, Pellet. Op, cit, p. 266.
27
En définitive, l’exigence du consentement de l’Etat tiers est moins sévère dans le cas
d’accords créant des droits au profit des Etats tiers que dans ceux desquels naissent des
obligations à leur charge.
Deuxièmement, la création d’une entité dont l’existence opposable aux tiers. En effet, les
accords d’indépendance à la fin décolonisation ont engendré de nouveaux Etats
indépendants et souverains dont l’existence s’impose à tous les membres de la
communauté internationale. En revanche, les traités constitutifs d’organisations
internationales ne constituent pas un fait objectif et par conséquent ne sont pas opposables
aux Etats Tiers, les Etats non membres.
28
a – La modification explicite.
La CVDT énonce dans son article 39 la règle procédurale de modification de traité par voie
d’accord exprès : « Un traité peut être amendé par accord entre les partie. » Cette règle,
concernant à la fois les traités bilatéraux et ceux multilatéraux, peut êtreécartée ou limitée
par les parties en lui préférant l’inclusion dans le traité de dispositions spéciales dites
« clauses de révision ». Celles-ci ont pour but de poser à l’avance la procédure de la
révision.
Il s’agit essentiellement de :
- La modification par voie coutumière ou d’accord tacite : la CVDT admet, ainsi que la
jurisprudence internationale, la possibilité d’une modification par le comportement
ultérieur des parties. L’abstention d’un membre permanent du Conseil de sécurité ne
bloque pas l’adoption d’une résolution par cet organe, contrairement aux exigences claires
de l’article 27§3. La CIJ a corroboré cette pratique en déclarant, dans son arrêt consultatif
du 21 juin 1971, dans l’affaire de la Namibie : « La procédure… suivie par le Conseil de
sécurité a été généralement acceptée par les Membres des Nations Unies et constitue la
preuve d’une pratique générale de l’Organisation ».
1 – Définition.
L’extinction d’un traité produit l’arrêt de l’exécution des obligations de l’accord, en d’autres
termes, il prend fin. Un traité dit éteint est celui qui cesse d’être en vigueur et de produire
des effets.
En revanche, la suspension ne met pas fin au traité, l’instrument subsiste et seules les
normes qu’il contient cessent provisoirement de produire leurs effets. Du fait que le traité
n’est pas éteint, les clauses objet de suspension reprendront leur caractère obligatoire
initial, une fois celle-ci levée.
L’extinction et la suspension peuvent être prévues dans le traité ou décidées par les parties
postérieurement d’un commun accord.
Il s’agit de clauses expresses et de clauses implicites. Pour les premières, on peut citer le
cas des clauses résolutoires.Ce sont celles qui subordonnent la fin du traité à la survenance
de certains faits prévus à l’avance par les parties. Elles peuvent fixer un terme, à
l’expiration duquel le traité ne produit plus d’effets. C’est l’exemple des traités d’alliance,
accords économiques ou de coopération. Aussi, lesclauses de dénonciation et de retrait ; les
clauses suspensivesqui concernent la suspension d’une clause ou d’un engagement, elles
sont fréquentes et en particulier dans les traités économiques. Les Etats parties à ces
traités incèrent souvent une clause de sauvegarde qui permet de suspendre
momentanément l’application de certaines dispositions de l’accord posant des problèmes
graves à l’une des parties. En revanche, la suspension de l’ensemble de la convention est un
acte qui se fait très rarement.
Pour les secondes, on peut citer l’extinction par exécution du traité, il s’agit en fait des
accords dits « traités-contrats » qui portent sur un engagement financier ou une livraison
de fourniture par exemple. Ce genre d’accords crée des obligations strictement délimitées
qui une fois exécutées, épuise ses effets et ne se renouvelle plus. Ce sont des traités où la fin
de l’exécution entraine automatiquement l’extinction. En outre, dénonciation ou retrait
sans autorisation expresse, il arrive que des traités passent sous silence les modalités de
leur propre extinction, et posent le problème de leur permanence. La CVDT autorise une
dénonciation unilatérale fondée sur une autorisation implicite du traité qui peut résulter
des intentions des parties ou se déduire de la nature du traité lui-même.
Il s’agit ici de volonté expresse et de volonté tacite. Dans le premier cas de figure,
l’extinction expresse peut se produire par la conclusion d’un traité postérieur.Soit que
parfois, l’abrogation du traité antérieur est le seul objet du traité postérieur. Soit que le
plus souvent, l’abrogation porte simplement sur certaines dispositions du traité antérieur
de manière partielle ou entière. Concernant la suspension et principalement la suspension
des traités multilatéraux elle peut résulter d’un accord conclu entre certaines parties
(l’unanimité n’est pas exigée) si cette opération est mentionnée dans une clause du traité
antérieur. Dans le cas contraire, il faut que la suspension ne porte pas préjudice aux autres
Etats parties et qu’elle ne soit pas incompatible avec l’objet et le but du traité antérieur.
31
Par ailleurs, la volonté tacite ; une extinctionimplicite peut survenir du fait de la conclusion
d’un traité postérieur. Il en résulte une abrogation tacite par le second traité qui porte sur
la même matière que le premier, est conclu entre les mêmes parties, et contient des
dispositions incompatibles avec celui-ci. Et par conséquent, il est impossible d’appliquer les
deux traités à la fois. Le traité postérieur l’emporte sur celui antérieur qui cesse d’exister
comme c’est d’ailleurs le cas pour l’abrogation expresse.
Parmi ces circonstances on peut citer la violation du traité. Elle renvoie à l’inexécution
des dispositions de l’accord par un ou plusieurs parties. Le non-respect du traité par une
partie peut entrainer son extinction ou sa suspension jusqu’à la cessation de la violation. La
doctrine et la jurisprudence internationale comme d’ailleurs la CVDT exigent,pour pouvoir
dénoncer unilatéralement un traité, une violation substantielle affectant l’objet et le but du
traité.
On peut aussi citer comme circonstances liées au comportement des parties, le conflit
armé international. Ici se pose le problème des effets des conflits armés sur les traités ; la
question est de savoir si un traité peut être terminé ou son application peut être suspendue
en cas d’un conflit armé.
La réponse à cette question reste difficile à cause l’absence de règles claires en la matière.
Cependant, on peut faire la distinction entre les traités bilatéraux, ils prennent fin, ou, en
tout cas sont suspendus dans une situation de conflit armé. Pour les traités multilatéraux,
ils sont suspendus dans les rapports entre belligérants et restent en vigueur dans les
rapports entre les parties non belligérantes et aussi entre ces derniers et les belligérants. A
titre d’exemple, les pays arabes et Israël n’ont pas quitté l’Organisation des Nations Unies
lors des conflits qui les ont opposé depuis 1948.
32
Pour les traités créant une situation objective, comme le tracé de frontières par exemple, ils
ne sont pas affectés par l’état de conflit armé.
Concernant les traités bilatéraux ou multilatéraux relatifs aux règles régissant la conduite
des conflits armés internationaux, comme par exemple le traitement apporté aux
prisonniers de guerre, sont évidemment maintenus.
Les guerres civiles et les représailles armées ne sont pas concernées par ce qui précède.
Parmi les circonstances indépendantes des parties, il en existe trois à savoir : l’impossibilité
d’exécution, le changement fondamental de circonstances et la survenance d’une nouvelle
norme de jus cogens.
- on parle d’impossibilité d’exécution lorsque les parties au traité sont affectées par la
survenance d’une circonstance indépendante de leur volonté et qui rend l’exécution dudit
traité impossible ; c’est le cas de force majeure.
Les effets d’un changement fondamental de circonstances est l’extinction ou le droit pour la
partie qui l’invoque de s’en retirer. La CVDT cherche à travers l’article 62, §3, à réduire de
la portée de cette solution en admettant que la partie qui invoque le changement ne le fait
que dans un but de la suspension du traité.
- la survenance d’une nouvelle norme de jus cogens peut entrainer soit la fin du traité dans
son ensemble, soit simplement l’extinction d’une ou des dispositions du traité qui sont
contraires à la dite norme.
33
SECTION I : LA COUTUME
L’article 38 du statut de la CIJ stipule que la coutume internationale est une source du droit
international qui vient après le traité et la définit comme « la preuve d’une pratique
générale acceptée comme étant le droit ». Il importe de voir les éléments constitutifs, le
caractère contraignant et le processus de codification de la coutume.
1- L’élément matériel :
L’élément matériel prend existence par la survenance d’une pratique générale qui renvoie
a une répétition dans le temps d’un certain nombre de comportements (actes, déclarations,
faits, agissements) provenant de sujets de droit international.
a- Répétition temporelle
Afin de consacrer une coutume, il importe que la pratique des comportements susvisés soit
à la fois constante et uniforme. Les comportements en question doivent non seulement se
répéter dans le temps mais aussi avoir une durée durant laquelle ils se répètent. En effet, la
coutume se fait dans la durée et par la fréquence.
On peut relever par ailleurs que l’élément matériel de la coutume peut se réaliser dans un
temps relativement bref et donner naissance à un processus coutumier. C’est le cas lorsque
plusieurs résolutions d’organisations internationales sont adoptées dans un temps limité et
concernant une même question.
b- Répétition spatiale
Afin de revêtir un caractère universel, une coutume doit être reconnue par la majorité
représentative des Etats. En effet, la pratique constante de la totalité des Etats n’est pas
requise. La CIJ, dans l’Affaire du Plateau continental de la mer du Nord de 1969, a précisé
que pour une règle conventionnelle soit considérée comme coutumière : « il se peut qu’une
participation très large et représentative de la convention suffise, à condition toutefois
qu’elle comprenne les Etats particulièrement intéressés ».
34
2- L’élément psychologique :
A la pratique constante et uniforme il importe d’ajouter que la coutume doit faire naitre
chez les sujets du droit international la conviction d’un caractère obligatoire « les Etats
intéressés doivent avoir le sentiment de se conformer à ce qui équivaut à une obligation
juridique. » (CIJ Affaire Plateau Continental de la mer du Nord 1969). C’est cette conviction
d’obligation qui différencie la coutume de l’usage et de la courtoisie, qui restent des
pratiques qui nourrissent positivement les relations amicales entre les Etats et envers
lesquelles ils ne se sentent pas liés (l’habitude des Etats de se faire représenter aux
funérailles des chefs d’Etat étrangers).
Si le traité a des effets qui se limitent en principe aux parties contractantes et aux clauses
auxquelles on peut introduire des réserves, une norme si elle est consacrée comme étant
une règle coutumière, a une portée juridique très importante et est plus contraignante
qu’un traité.
1- Portée de la coutume
La coutume produit ses effets à l’égard de tous les Etats, elle bénéficie d’une présomption
d’acceptation unanime. En effet, il n’est pas nécessaire que l’Etat ait directement participé
ou contribué à sa formation ou l’ait accepté expressément. Les Etats sont tenus de se
conformer à une règle coutumière.
Le principe stipule qu’il est impossible de s’opposer à une coutume établie. Cependant, un
Etat a l’opportunité de rejeter expressément une coutume lorsqu’elle est en phase de
construction, il n’est pas alors lié par les règles qu’elle met en place. Un Etat peut toujours
s’opposer a une coutume en formation qu’il n’approuve pas, son manifestation (opposition)
doit être claire et constante.
C- LE PROCESSUS DE CODIFICATION
C’est l’Assemblée Générale des Nations Unies qui mène la mission de codification et du
développement progressif du droit international. La codification est un processus de
conversion des règles coutumières en un cops de règles écrites. Elle répond à un souci de
sécurité juridique qui vise à réunir en un seul texte des règles coutumières souvent
dispersées et dont l’existence est difficile à prouver. De plus, ce processus enrichit le droit
international qui va aboutir à affirmer une nouvelle règle.
35
Ils constituent une source du droit international souvent invoqués par le juge international.
Si leur définition n’est pas donnée de façon précise, il n’en demeure pas moins qu’ils
encadrent et charpentent le droit international public. Cependant, il importe de faire la
distinction entre les principes généraux « de » droit tels qu’ils sont mentionnés à l’article
38 du statut de la CIJ et ce que la doctrine qualifie de principes généraux « du » droit
international public.
Ces principes généraux peuvent être compris à travers l’étude de deux éléments essentiels
et qui présentent une certaine particularité ; leur genèse et leur contenu.
Ces principes traduisent une recherche de l’esprit commun à différentes règles nationales,
une sorte d’un sens commun des lois internes obéissant à une logique ou des exigences
universelles. Par conséquent, ces principes deviennent à la fois communs aux principaux
systèmes juridiques internes et au droit international.
15
Pierre-Marie Dupuy, Yann Kerbrat, Droit international public, Précis Dalloz, 2016, p. 372.
36
La valeur de ces principes est évolutive. En effet, ils sont initialement établis par la
jurisprudence internationale, cependant ils vont devenir rapidement une règle coutumière
ou même conventionnelle lorsqu’ils sont réceptionnés par le droit international16.
A la différence des précédents principes, ceux objets d’étude sont propres au droit
international. En d’autres termes, ils ne sont pas issus du droit interne mais directement du
droit international.
1- Origines et caractères
Etant propres au droit international, leur origine sont diverses mais ils sont
essentiellement le produit de l’action conjuguée du juge international et de la diplomatie
normative des Etats. Contrairement aux principes généraux de droit reconnus par les
nations civilisées, ils sont souvent d’énonciation contemporaine.
Bien que le juge international ait fréquemment recours à ces principes, les qualifiant de
concept fondamental par exemple, pour trancher des différends, leur définition est délicate.
Ils sont utilisés dans des circonstances très diverses et qu’il est difficile d’en définir le
contenu. Le caractère commun à ces principes tient à leur haut niveau d’abstraction et à
leur extrême généralité, dont l’effet est de condenser le plus souvent la règle désignée en
une formule dont la concision est parfois source d’ambiguïté. Ces principes apparaissent
comme des axiomes fondamentaux du droit international.
Le juge international extrait ces principes de l’observation des autres sources du droit
international à savoir les coutumes et les conventions. Il en est ainsi du concept juridique
fondamental de la souveraineté des Etats ; des principes généraux de base du droit
humanitaire, du principe Pacta sunt servanda…
2- Fonction
Ces principes disposent d’une vie propre dans la mesure où le juge qui les invoque n’a pas
besoin d’apprécier leur validité juridique, comme il le ferait pour une coutume, ou de
vérifier qu’un Etat est tenu conventionnellement par cette norme. Ils servent souvent de
point de départ, d’articulation ou de soutien à l’argumentation juridique de leurs arrêts,
dont ils fournissent l’ossature conceptuelle17.
La violation répétée d’un principe ne porte pas atteinte à son existence, comme en
témoigne l’invocation répétée du principe d’interdiction du recours a la force. Le juge ou
16
Catherine Roche, L’essentiel du Droit international public, Gualino, 2012, p. 36.
17
Pierre-Marie Dupuy, Yann Kerbrat, op., cit, p. 374.
37
Ces principes sont aussi utilisés par les Etats lors de déclarations unilatérales par exemple.
Ils viseront ainsi notamment au rappel solennel de normes déjà consacrées : par exemple le
cas du principe d’égalité souveraine des Etats, celui de non-intervention ou celui de non-
ingérence dans les affaires intérieures d’un autre Etat.
Les actes unilatéraux bien que non mentionnés à l’article 38 du statut de la CIJ, ils sont
présentés parmi les modes de formation du droit international. Les auteurs des actes
unilatéraux sont les principaux sujets du droit international et en émettant ces actes, qui
sont des droits et des obligations au plan international, leur sont imputables. Que ces actes
soient adoptés par un seul sujet de droit ou parfois par plusieurs, àl’issue d’une conférence
de chefs d’Etatpar exemple, ils visent avant tout la promotion des intérêts particuliers de
leurs auteurs à savoir les Etats et les organisations internationales.
Afin d’agir dans l’ordre international, les Etats n’utilisent pas que la voie conventionnelle,
ils peuvent prendre des initiatives unilatérales four faire valoir leurs intérêts. Ces actes
sont divers et peuvent être classés en trois catégories : opposabilité d’une situation
juridique, l’exercice de droits souverains et la création d’engagements juridiques.
a- La reconnaissance :
La reconnaissance aura pour effet d’empêcher celui qui l’émet de contester ultérieurement
la validité de la situation qu’elle a pour objet de constater et d’accepter. Elle est souvent
effectuée par voie de déclaration explicite, cependant rien n’empêche qu’elle découle d’un
comportement à la condition que celui-ci soit clairement imputable aux organes
compétents de l’Etat concerné.
38
Un élément très important en pratique, ainsi que le démontre la jurisprudence, doit être
souligné : du fait que la reconnaissance peut résulter également d’un comportement, aussi
bien passif qu’actif, l’absence de protestation d’un gouvernement face a l’apparition d’une
situation de fait ou de droit susceptible d’avoir des incidences sur ses intérêts est la plupart
du temps considérée comme un acquiescement à la validité et l’opposabilité de cette
situation à son égard, sur lequel il ne saurait revenir18.
b- La protestation :
La protestation produit l’effet inverse de la reconnaissance. Pour sa validité, elle doit être
effectuée de façon suffisamment prompte, claire et constante après la survenance du fait
considéré, elle préviendra l’opposabilité de ce dernier à l’Etat protestataire19.
Il s’agit essentiellement d’actes unilatéraux dans l’ordre interne par un Etat, afin d’exercer
les compétences discrétionnaires qui lui sont conférées par le droit international. Ainsi en
est-il par exemple de la délimitation des ses eaux territoriales ou de la zone économique
exclusive, de l’attribution de sa nationalité à une personne physique ou morale, d’une
déclaration d’embargo commercial, de guerre ou de neutralité.
La forme revêtue par ces actes (généralement loi ou décret) importe peu au droit
international. En revanche, leur validité dépend de leur conformité aux règles de ce droit.
Ainsi, la CIJ a subordonné l’efficacité internationale de l’octroi de la nationalité à sa
conformité au critère substantiel d’un lien effectif de l’individu avec le pays auquel il
demande ainsi à être rattaché. Aussi, la détermination unilatérale de la largeur de la mer
territoriale n’est-elle opposable aux autres Etats que si elle n’excède pas la distance établie
en droit international à savoir 12 milles nautiques et la remarque est aussi valable pour la
zone économique exclusive qui ne saurait s’étendre au-delà des 200 milles des lignes de
base20. Ce n’est pas la validité interne de l’acte unilatéral qui est mise en cause mais son
opposabilité internationale.
Certains actes unilatéraux ont pour effet, sinon toujours pour objet, le renoncement a
l’exercice d’un droit ou, selon les cas, la création d’une obligation à l’égard de leur auteur.
Les promesses par lesquelles l’Etat s’engage à adopter tel ou tel comportement, sont des
actes unilatéraux autonomes. Lors de l’affaire des essais nucléaires opposant la France à
l’Australie en 1974 portée devant la CIJ, le président français et son ministre des Affaires
18
Ibid., p. 382.
19
Ibid., p. 383.
20
Ibid.
39
étrangères avaient fait des déclarations aux termes desquelles la France renonçait pour
l’avenir aux essais nucléaires dans l’atmosphère, eu égard aux progrès de sa technologie en
la matière.
La CIJ a admis que de tels actes pouvaient « avoir pour effet de créer des obligations
juridiques ». Ainsi, « quand l’auteur de la déclaration entend être lié conformément à ses
termes, cette intention confère à sa prise de position le caractère d’un engagement
juridique, l’Etat intéressé étant désormais tenu en droit de suivre une ligne de conduite
conforme à sa déclaration ». En l’absence de toute intervention d’un autre sujet, que ce soit
pour accepter ou au contraire contester la promesse, un Etat peut donc unilatéralement
s’engager au niveau international. Bien sûr, cette promesse doit émaner d’une personne
susceptible d’engager l’Etat. Lorsqu’il s’impose de telles obligations, l’Etat ne peut pas
unilatéralement revenir sur sa promesse sans engager sa responsabilité internationale,
puisqu’il a crée des droits au profit des tiers.
Enfin, il faut ici mentionner une dernière catégorie d’actes unilatéraux étatiques, ceux par
lesquels un Etat tente d’imposer des obligations à des tiers contre leur volonté. En dehors
des cas très spécifiques où l’Etat agit pour le compte de la communauté internationale, en
étant dûment mandaté, on entre ici dans des domaines plus politiques que juridiques, où la
puissance des Etats pèse d’avantage que la règle de droit21.
Les actes émanant des organisations internationales font l’objet d’une terminologie très
variée : résolutions, recommandations, décisions, directives, règlements… C’est le traite
constitutif de chaque institution qui prévoit quels sont les organes habilités à prendre tel
ou tel acte, selon quelle procédure et avec quels effets. Devant cette diversité des termes
utilisés, il est judicieux d’entreprendre une distinction entre les décisions à caractère
obligatoire et les recommandations à portée non obligatoire.
1- Les décisions :
Les décisions qui sont des actes unilatéraux émanant des organisations internationales
créent des obligations à la charge de leurs destinataires. Ces décisions produisent des effets
internes ou externes.
Il s’agit d’actes que l’organisation internationale prend unilatéralement mais qui ne créent
d’obligations qu’à l’ egard d’elle-même et/ou des Etats membres. Ces décisions qualifiées
d’actes « autonormateurs », sont liées au fonctionnement interne de l’institution. Elles
21
Catherine Roche, op., cit, p. 40-41.
40
peuvent avoir trait par exemple à l’adoption de son budget ou à la création d’organes
subsidiaires22.
Certaines décisions s’imposent aux Etats membres, qu’ils les aient ou non approuvées ou
qu’ils considèrent comme portant atteinte à leur souveraineté, leur adoption est
strictement réglementée et réservée à des domaines très précis :
- les décisions adoptées par le Conseil de sécurité de l’ONU pour mettre en œuvre les
compétences que lui confère le chapitre VII de la charte relatif au maintien de la paix. Ces
décisions s’imposent aux Etats membres de l’Organisation, en vertu de l’article 25 de la
charte.
- certaines organisations disposent de fait d’un véritable pouvoir réglementaire dans des
domaines très techniques, afin d’uniformiser des réglementations internationales. On cite
l’exemple de l’Organisation mondiale de la Sante qui est une institution spécialisée des
Nations Unies.
2- Les recommandations :
Les actes adoptés par les organisations internationales de coopération sont dans leur
majorité des recommandations qui ne sont que des actes invitant les destinataires à suivre
un comportement mais qui ne sont pas juridiquement obligatoires. Il s’agit alors de
propositions, d’exhortations, auxquels les Etats sont libres de se plier ou pas. C’est le cas
des résolutions du Conseil de sécurité, prises dans le cadre du chapitre VI de la charte.
22
Ibid., p. 42.
23
Ibid.
24
Ibid., p. 43.
41
A- LA JURISPRUDENCE ET LA DOCTRINE
1- La jurisprudence :
2- La doctrine :
Contrairement au juge ou à l’arbitre, qui, même si c’est pour le règlement d’une affaire
déterminée, ont reçu un mandat des Etats pour régler leur différend en application du
droit, les membres de la doctrine ne représentent qu’eux-mêmes, produisant des opinions
sans égale comparaison ni importance par rapport la norme et son contexte dominés par la
prééminence étatique.
Le recours à l’opinion des publicistes les plus qualifiés pour déterminer la règle de droit
international se faisait à un moment où ce droit était à ses balbutiements. Actuellement, la
volonte des Etats priment sur les opinions librement exprimées par des individus ou des
sociétés savantes. Néanmoins, certains organes de codification, comme la Commission du
droit international, au statut d’organe public spécifiquement chargé de tâches de
codification par l’Assemblée générale des Nations Unies, constituent des cénacles
doctrinaux exerçant une influence souvent non négligeable sur l’élucidation du contenu et
de la portée des règles de droit26.
25
Ibid., p. 45.
26
Pierre-Marie Dupuy, Yann Kerbrat, op., cit, p. 391.
42
Il importe de relever le rôle important joué par la doctrine dans le développement du droit
de la mer, par exemple par l’identification de la notion de zone économique exclusive
(ZEE).
B- L’EQUITE
Dans la mesure où le droit est lié à la recherche de la justice, l’équité est inhérente à son
application. Elle intervient en particulier, à titre d’inspiratrice et de guide pour aider à
l’adéquation d’une règle abstraite à une situation concrète. Elle constitue à la fois la finalité
et l’instrument en fonction duquel le droit sera appliqué concrètement. C’est une simple
technique d’interprétation.
Cette insécurité, liée à la liberté d’appréciation laissée au juge, est encore beaucoup plus
forte lorsque le juge statue ex aequo et bono. Cette formule, qui est retenue par l’article 38
de la CIJ, implique que le juge international, lorsqu’il est saisi par les parties à un différend,
pourra dans l’absolu, prononcer son jugement en se fondant uniquement sur l’idée qu’il se
fait de la justice dans l’affaire qu’il a à trancher. Mais ce pouvoir exorbitant, dépend
toujours d’une habilitation expresse des parties28
27
Ibid., p. 392.
28
Catherine Roche, op., cit, p. 46-47.
43