Linly 1160-6398 1916 Num 62 1 4243

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Annales de la Société linnéenne

de Lyon

La faune lusitanienne
Commandant Eugène Caziot

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Caziot Eugène. La faune lusitanienne. In: Annales de la Société linnéenne de Lyon, tome 62, Année 1915. 1916. pp. 43-
65;

doi : https://doi.org/10.3406/linly.1916.4243

https://www.persee.fr/doc/linly_1160-6398_1916_num_62_1_4243

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LA FAUNE TERRESTRE LUSITANIENNE

PAR
E. CAZIOT

On rencontre, sur la bordure occidentale de l'Europe, du


Portugal à l'Irlande et à la Grande-Bretagne, les restes d'une
faune ancienne qu'on a appelée, faute d'une meilleure déter¬
mination, atlantique ou lusitanienne. Cette faune est probable¬
ment originaire du sud-ouest de l'Europe, ou, plus vraisem-
bablement, du continent disparu : l'Atlantide de Platon, dont
MM. Négris (i), Germain (2), Termier (3) et Gentil (4) certi¬
fient l'existence en rattachant sa disparition aux divers épisodes
de l'époque glaciaire. L'Atlantide nous a envoyé, probablement
à l'époque tertiaire, peut-être miocène, en tout cas antégla-
ciaire, la faune lusitanienne qui s'est étendue depuis le Maroc
jusqu'à l'Angleterre.
Les auteurs ci-dessus visés sont d'accord pour reconnaître
que les Açores, Madère, les Canaries et les îles du Cap-Vert
ont été réunies autrefois en une masse continentale unique et
que l'aire continentale ainsi définie se reliait à la Mauritanie et
au Portugal.
Les vestiges de la faune terrestre lusitanienne ont encore une
certaine importance. Celle-ci a dû avoir une expansion assez
considérable, car elle a peuplé une partie de l'Europe, princi¬
palement le bassin occidental de la Méditerranée.
La dispersion des espèces de cette faune est très discontinue,
ce qui indique, incontestablement, une preuve d'ancienneté.
A l'époque actuelle, un petit nombre d'espèces seulement se

d'Archéologie,
de (1)
(3)
(A)
(2)
Géographie
P.
L.
P. Gentil,
Germain,
Termier,
Négris,
, session
t.iqi3,
XXII,
19x2,
1913,
igi3,
led'Athènes).

Maroc
l'Atlantide
lela 123).
Problème
Régression
physique.
(Revue
de quaternaire
l'Atlantide
Scientifique).
et(Congrès
la Zoologie
international
(Annales

Soc. Linn., t. lxii, 1915 5


44 LA FAUNE TERRESTRE LUSITANIENNE
sont maintenues en dehors des contrées soumises à l'influence
de l'océan Atlantique. Le climat de la région où cette faune a
pris naissance devait être humide et chaud, sans grands écarts
de température, un climat marin en un mot.
On pourrait s'étonner que la période glaciaire n'ait pas amené
l'extinction totale d'animaux conformés pour vivre dans une
température toujours chaude, du moins tempérée, mais il faut
remarquer que les bords de l'Océan ont dû toujours conserver
un climat plus doux et plus égal pendant la période glaciaire
que l'intérieur du continent alors couvert de grands glaciers ;
au surplus, si l'on admet les théories nouvelles, la tempéra¬
ture, durant la période considérée, n'aurait pas été aussi basse
qu'on serait tenté de le croire : une différence de peu de degrés,
dans la moyenne de notre climat actuel, suffirait à rétablir,
en Europe, de vastes glaciers.
La région lusitanienne nourrissait un grand nombre de mol¬
lusques terrestres. Par suite du climat, beaucoup d'animaux,
confinés de nos jours sur la bordure océanique, ou ayant une
distribution plus ou moins étendue, auraient la même origine.
Les vestiges de cette faune ont une certaine importance ; son
étude peut apporter des éléments qui intéressent la solution
du problème si passionnant de l'Atlantide ; néanmoins, ce que
je présente à ce sujet ne doit pas être considéré comme un
travail définitif : c'est une ébauche dont les données seront
utiles à consulter lorsqu'on pourra établir un travail d'ensem¬
ble , ce qui n'est pas encore permis vu la pénurie de nos ren¬
seignements à ce sujet.
Quelques représentants sont restés cantonnés sur la bordure
océanique, par exemple la Geomalacus, la Testacella Maugei,
les Helix Quimperiana, fusca, ignota, revelata, le Lauria anglica ,
ainsi que les Arions, le Lauria umbilicata, qui se sont étendus
plus ou moins vers l'est.
Les zoologistes citent le lapin ; le genre Fringilla de l'ordre
des Passereaux ; des Isopodes terrestres : le Eluma purpurascens
Budde-Lund, Metoponorthus cingendus Kinchan..., etc. ; des
Coléoptères : le Brachycerus Pradieri Fairm ; de la famille des

l'ouvrage
Madère
(i) Voir,
et dedu
pour
Vernon
Cap-Vert,
l'ensemble
Wollaston
qui des
sont:faunes
des
Teslacca
vestiges
des atlaniica,
archipels
du grand
1S7S.
des continent
Açores, Canaries,
disparu,
LA FAUNE TERRESTRE LUSITANIENNE 45

Curculionidœ, que l'on trouve des Pyrénées Gantabriques au


Morbihan ; le Phaleria atlantica Fauv. et le Phaleria cadaverina
Fabricius, lesquels vivent exclusivement dans les sables du lit¬
toral.
La flore aussi est toute spéciale, et l'on cite :

L 'Erica lusitanica Rudolphi, qui prospère dans l'Espagne sep¬


tentrionale, en Portugal, dans les Landes, la Gironde et le
Finistère.
Le Daboecia polifolia Don. : en Espagne, Portugal, Açores, Bas¬
ses- et Hautes-Pyrénées, Tarn-et-Garonne, Gironde, les bois
et landes de l'Ouest, Maine-et-Loire et Irlande.
Le Cistus hirsutus Lamark : Espagne, Portugal, landes et ro¬
chers siliceux dans le Finistère aux environs de Lander-
neau, etc.
Le Trichomanes radicans, fougère qui croît en Irlande, dans les
Pyrénées, les Açores, Madère, les Canaries, les Antilles, les
Guyanes et le Venezuela (L. Germain).

Beaucoup d'autres espèces m'ont été signalées, mais espèces


spéciales à Madère et aux Canaries et ne se trouvant pas dans
l'Europe occidentale. Ces îles ont, en effet, une faune particu¬
lière, distincte de la faune lusitanienne, quoique présentant
pourtant avec elle quelques analogies. Elles ne peuvent être
comprises dans les pays faisant partie de la région faunistique
que nous étudions. Parmi ces espèces signalées, seule YAnthica
angustatus Curtis pourrait être admise comme lusitanienne.
On peut admettre que la faune actuelle de Madère, des Açores
et des Canaries représente le reste de son ancienne faune ; on
peut se demander toutefois si les mollusques terrestres lusita¬
niens ont la même origine. Pour un certain nombre de mala-
cologistes, il y a des doutes sérieux. Il existe bien quelques
analogies entre les diverses faunes, mais, dans l'ensemble, il
existe des différences considérables.
Les ressemblances peuvent s'expliquer par les échanges qui
ont lieu entre les pays voisins : les espèces communes ont dû
facilement être introduites depuis les temps préhistoriques.
La faune malacologique de Madère est fort riche et celle des
Açores est, au contraire, fort pauvre. Les espèces qui existent
46 LA FAUNE TERRESTRE LUSITANIENNE

dans ces îles sont très distinctes de celles qui vivent dans l'Eu¬
rope occidentale, et on y trouve de nombreux groupes d'Hélix
qui ne sbnt pas représentés sur notre continent.
La communauté d'origine des deux faunes atlantidienne et
lusitanienne n'est pas démontrée, et on peut en déduire que,
s'il y a eu réunion de l'Atlantide au continent européen, elle
a dû cesser à une époque très reculée, à l'époque tertiaire, mio¬
cène probablement. Le problème n'est pas insoluble, mais il
n'est pas encore nettement résolu.

DISTRIBUTION GÉOGRAPHIQUE

Famille des ARIONID/E

Genre AHIOUT Ferussac

Les Arions sont des animaux nus, limaciformes, à mâchoire


et radule de Helicidse, à orifice respiratoire dans la moitié anté¬
rieure du bord droit du bouclier toujours granuleux, et pour¬
vus d'un pore muqueux à leur extrémité postérieure. L'appareil
reproducteur simple, n'a jamais ni flagellum, ni poche du
dard, ni prostates vaginales, ni branche copulatrice. Les Ario-
nidse appartiennent à quatre genres différents :
Arion Férussac, Ariunculus Lessona, Geomalacus Allman.
Tetraspis Hagenmûller.
Il est tout à fait probable que le genre Arion, et sans doute
la famille entière des Arionidœ, a une origine atlantique.
Comme le fait remarquer C. Pollonera dans son Recensement
des Arionidse de la région paléarctique (Bollct. Mus. Zool. ed
Anatom. comparata d. Univ. di Torino, vol. V, n° 87, Agosto
1890), « les Arionidse ne sont pas répandus dans toute la région
paléarctique ; ils ont leur plus grand épanouissement dans les
parties chaudes et tempérées du bassin océanique de cette ré¬
gion ; de là, ils s'avancent vers l'est, dans les régions tempérées
et froides, devenant très rares dans le midi. Ils ne s'approchent
du rivage de la Méditarranée qu'en Algérie, près de Gibraltar
LA FAUNE TERRESTRE LUSITANIENNE 47

et dans la région comprise entre la base des Pyrénées et celle


des Alpes-Maritimes. Ils sont très pauvres en espèces dans l'Ita¬
lie péninsulaire et dans l'île de Sardaigne (je n'en ai pas signalé
en Corse : je crois qu'il ne s'en trouve pas). Ils manquent dans
presque toute l'Espagne méditerranéenne, à toute la côte nord
de l'Afrique (à partir de la moitié orientale de l'Algérie), à
toutes les îles de la Méditerranée (sauf une espèce de Sardaigne :
Ichnusarion Isseli Pollonera ( = Arion Isseli Bourguignat), à
toute la région des Balkans, à la Grimée, au Caucase et à toute
l'Asie occidentale. »
Comme on peut le constater, cette famille est confinée dans
l'Europe occidentale, elle ne s'éloigne que faiblement des con¬
trées soumises à l'influence de l'océan Atlantique.
Le genre Arion, en particulier, a son maximum d'espèces en
Portugal, en France et dans les îles Britanniques ; il manque
à l'Afrique, à toutes les îles de la Méditerranée et n'atteint les
rivages de cette mer que sur les côtes de France. Il est, au
contraire, très abondant sur les côtes atlantiques (voir Pollo¬
nera, loc. cit.).
Si beaucoup d'Arions ont émigré des parages de l'Atlantique
dans l'intérieur des terres, d'autres sont restés confinés sur la
bordure océanique. Quelques-uns sont étroitement localisés sur
quelques points, tels que :

Les Arion sulcatus Morel, et Arion Nobrei Pollonera, dans les


provinces du nord du Portugal.
L' Arion hispanicus Simroth, dans l'Espagne centrale et la
Sierra Estrella en Portugal.
L 'Arion Bavayi Pollonera, à Brest.
L' Arion fuligineus Morelet, au Ponto do Lima, dans la pro¬
vince de Douro en Portugal.
UArion timidus Morelet, aux environs d'Abrantès, sur les bords
du Tage.
L' Arion timidus Morelet, var. montana Mabille, dans les chaî¬
nes septentrionales de la province de Beira en Portugal.
L 'Arion hortensis Férussac, Angleterre, France, Europe cen¬
trale.
L 'Arion celticus Pollonera, dans les environs de Brest, où il
remplace l'A. hortensis.
48 LA FAUNE TERRESTRE LUSITANIENNE

L 'Arion anthracius Bourguignat, aux Eaux-Bonnes dans les


Basses-Pyrénées.
L' Arion Mollerii Pollonera, à Bussaco en Portugal.
L 'Arion Pascalianus Mabille, dans la province de Tras-os-Mon-
tes en Portugal.

D'autres occupent une vaste étendue en latitude, mais ne


s'éloignent pas de l'océan Atlantique, tel est l'rion lusitanicus
Mabille, l'une des espèces les plus répandues dans tout le Por¬
tugal, retrouvée à Berehaven, dans le sud de l'Irlande (Collinge,
in Ann. and Magaz. nat. Hist., vol. XII, i8g3). Peut-être le
découvrira-t-on sur les côtes de France, notamment en Bre¬
tagne ?
Signalons qu'il existe des Arions dans les archipels de Madère
et des Açores dont la faune malacologique a des rapports avec
celle de la région dite lusitanienne.
L' Ariunculus de Lessona est un genre voisin des Arions. Il ne
se trouve qu'en Piémont.

ttenre 6EOH ALACUS Allman

Les Geomalacus diffèrent du genre Arion par : apertura geni-


tale magis antica ; poro mucoso angusto, suboccultato ; aper¬
tura respiratoria minus antica. Limacella solida , lœvis, nucleo
et striss careno, ovato depressa, Dorsum et Clypeus maculis pal-
lidis consparsis.

Dans son recensement des Arionidee de la région paléarc-


tique, Pollonera divise le genre Geomalacus en trois sous-
genres :
Le S. G. Geomalacus sensu stricto, ayant pour type le G. ma -
culosus Allman, espèce lusitanienne, dont nous donnons la
distribution géographique plus loin, et le G. lusitanicus Da
Silva, espèce douteuse (probablement une simple variété du
G. maculosus) , qui a été signalée au sommet du mont Saint-
Sylvestre, à une heure de Vianna do Castello, dans le Minho
(Portugal).
S. G. Arrudia Pollonera comprenant :
LA FAUNE TERRESTRE LUSITANIENNE 49

G. anguiformis Morelet, la Serra de Monchique en Algarve


(Portugal).
G. squammatinus Morelet, la Serra de Caldeirâo, dans le sud
du Portugal.
G. Oliveirœ Simroth, Serra Estrella (Portugal).
S. G. Letourneuxia Bourguignat :
G. numidicus Bourguignat, près des cascades de Sefsef, dans
les environs de Tlemcen (Algérie).
G. Tournieri Pollonera, environs d'Oran.
G. atlanticus Bourguignat, près des cascades de Sefsef, à Tlem¬
cen. 1
G. Moreleti Hesse, Gibraltar.

Les espèces du sous-genre Arrudia de Pollonera sont donc


spéciales aux serras du Portugal, et les Letourneuxia de Bour¬
guignat sont africaines.
Quant aux Geomalacus décrits par Mabille comme vivant
dans le nord et l'ouest de la France, ce sont tout simplement
des espèces du genre Avion. C. Pollonera fait remarquer, à ce
sujet, qu'en voulant corriger les descriptions que les auteurs
anglais ont données du Geomalacus maculosus Allman., ce
même auteur en a donné une complètement fausse, surtout en
ce qui concerne la coloration, in Rev. et Mag. Zool., 1867,
p. 56.
Dans son mémoire Die Geographische V ebreitung der Nach.,
Francfort, 1905, Heynemann, lui, n'énumère que quatre es¬
pèces de Geomalacus :
G. maculosus Allman.
G. anguiformis Morelet.
G. oliveirœ Simroth.
G. grandis Simroth.
Et deux douteuses :
G. squamanatinus Morelet.
G. viridis Morelet.

Il dit, en outre, que ce genre n'existe pas en France et con¬


sidère, par conséquent, comme nulles les affirmations de Taslé
et Desmars (1). C'est une affirmation purement gratuite, la
(1) Il les ignorait sans doute.
50 LA FAUNE TERRESTRE LUSITANIENNE

présence du Geomalacus en Bretagne étant tout à fait vrai¬


semblable.

D'après l'énumération que nous venons de présenter, on peut


constater que le genre Geomalacus est tout entier lusitanien.
On ne le rencontre que dans les pays soumis à l'influence de
l'océan Atlantique, néanmoins il occupe une area immense en
latitude, car il se trouve en Algérie, au Maroc, dans l'extrême -
sud de l'Espagne, en Portugal, dans les Asturies, en Bretagne
et en Irlande.

Geomalacus Maculosus.

Geomalacus maculosus Allman, i846, Ann. and Mag., n° 2, xvn, p. 297,


pl. IX, fig. i-3.
Geomalacus Andrewsi Mabille, 1867, Rev. et Mag. zool., p. 57.
Geomalacus maculosus Desmars, 1873, Catt. Moll., p. 9.
Letourneuxia lusitanica Da Silva e Castro, 1875, Moll. terr. et fluv. Portugal,
p. 242.
Limax lusitanus Morelet, 1877, Journ. conchyl., p. 259.
Geomalacus lusitanus Pollonera, 1890, Bull. Mus. Zool., p. 35.
Geomalacus maculosus Locard, 1882, Prodrome, p. 7.

M. Taylor, dans sa belle Monographie des Coquilles terrestres


et fluviales des îles Britanniques, indique, d'une façon précise,
les habitats de cette espèce dans lesdites îles.
L'espèce type a été découverte en 1 8A 2 , en Irlande, à Long
Garagh, comté de Kerry, par Andrews ; elle a été retrouvée
ensuite à Castletown-Berehaven et Glengariff, comté de Cork,
par le Dr Scharff. Ces localités sont situées tout à fait dans le
sud-ouest de l'Irlande. On ne connait pas cette intéressante
limace dans les autres parties de l'île ni sur aucun point de la
Grande-Bretagne.
En France, elle a été trouvée par Taslé, en février 1868 (un
seul individu), dans l'avenue de Conlo, près Vannes, puis si¬
gnalée par Desmars dans son Catalogue des Mollusques d'Ille-
et-V Haine. De nouvelles recherches la feront certainement re¬
trouver sur d'autres points de notre littoral océanique.
En Espagne, elle est abondante dans la province des Asturies,
près Santa-Albas (P. Fischer, L. von Heyden), Galicie (Dr Sim-
roth) .
LA FAUNE TERRESTRE LUSITANIENNE 51

En Portugal, province de Minho (Simroth), Sporto (Newton) ;


découverte au mont Sylvestre, près Vianno de Castello, par
Silva e Castro, qui l'a décrite sous le nom de Letourneauxia
lusitana.
Son centre de dispersion paraît être le Portugal.

Famille des TESTAGELLID

Genre TESTACELLA Cuyier

Le genre Testacella est tout entier lusitanique, mais plusieurs


espèces se sont répandues dans le bassin occidental de la Médi¬
terranée. Ce sont des mollusques limaciens, nocturnes, car¬
nassiers, subcylindriformes, avec une coquille rudimentaire.
Nous ne croyons pas que, dans ses migrations, ce genre a dé¬
passé l'Italie vers l'est.
L'espèce la plus remarquable de ce genre, la Testacella
Maugei Férussac, est tout à fait occidentale et ne s'écarte guère
du littoral atlantique. Nous donnons ci-après sa dispersion géo¬
graphique.

Testacella Maugei.
Testacella huliotidea (pars) Lamark, 1801, SysL atiim. s. }'ert. p. gfi.
Testacella haliotidea Ledra, 18 10, Voyage à Ténérilïe.
Testacella Maugei Férussac, 1819, Hist. not. gén., p. 9.4, pl. VI 11, fig. 10. la.
Testacella Maugei Deshayes, i83o, Diet, class, nat., t. XVI, p. 179.
Testacella burdigalensis Gassies, 1 855 , in Grolelnup Limaciens, p. i5 mon 5).
Testacella oceanica (n. p.) (1) Grateloup. i855, Limaciens , p. ia.
Testacella canariensis (n. p.) Grateloup, 1 8 5 5 , Limaciens, p. i5.
Testacella Maugei Gassies et Fischer, i856, Mnnog. g. Testacella, p. 36, pl. II,
fig. ia, iF.
Testacela Maugei Gassies, 1809, Moll. Gironde, p. 17.
Testacella Maugei Locard, 1882, Prodrome, p. 17.

Distribution géographique

Açores, Madère (Lowe), îles Canaries (Maugé, Ledru, Férussac,


Rang, Webb et Berthelot).

par(1) M.La denotation


gique. Grateloup,
n. p. d'après
indiquedes
queconsidérations
ces noms spécifiques
de géographie
ont été malacolo
proposé:

Soc. Linn., t. lxii, 1915 5*


52 LA FAUNE TERRESTRE LUSITANIENNE

Maroc, environs de Tanger (Pallary).


Portugal (Morelet). La Gironde à Bordeaux, Blanquefort, Gra-
dignon, etc., dans Je terrain siJiceux (Gassies, Durieu, Rous¬
sel; , la Rochelle (d'Orbigny père, Aucapitane).
Probablement dans l'Anjou (Germain).
Roguède (Morbihan) (Bourguignat).
Dieppe (Dugué).
Signalé à Cleons, dans la Saône-et-Loire (Chaillon).
Iles Seilly et d'Aurigny (Taylor).
Au sud et au sud-est de l'Irlande et au sud-ouest de l'Angleterre
(Taylor) .

Lue variété fossile a été signalée dans les marnes bleues d<1
Hauterives (Drome), par Gassies et P. Fischer. Nous croyons
plus volontiers que cette variété doit être une espèce parti¬
culière.

Fa.mili.i: i)i;s IJMACID.E

Genre M(L1\

Parmi les Limacidte, plus cosmopolites que les Avionidse,


nous trouvons aussi quelques espèces qui ont une origine atlan¬
tique ou lusitanienne incontestable. Ce sont, par exemple,
le M il ax gagales Draparnaud et Je Milax Sowerbyi Férussac,
dont nous donnons ci-après la dispersion géographique.

Milax gagates.
Limax gagates Draparnaud. iSoi. Tabf. Moll., p. 100.
Limax gagates Draparnaud, i8o5. Hist. Moll p. 122, pl. IX, fig. 1-0.
Milax gagates Gray, i855, Cat. of pulm. or air breath. Moll., p. 17/1.
Arnalia gagates Hevnem.. 1861, Malakozool. Blalt.
Milax gagates Bourguignat, i8H:>, Malacol. lac Qualre-Canfonn (lier. Zooh.
P.'/i34).

Arnalia
Atttaliagagates
Milax p.marginata
gagates
59. Caziol.
Lessona
mut1910.
gagates
ft Moll.
G. Pini.
Pol
-Monaco,
louera.
Moll. Alpes-Maritimes,
Esino,
1876. Monog.
p. 107. Liniacid.
p. 58. Ilaliana ,

Nota. — Moquin-Tanclon ne connaissait pas l'espèce de Férussac, qui existe


pourtant au Muséum ; il ignorait aussi ce que les auteurs avaient écrit à son
serait
sujet. naturalisé.
Il considérait la T. Mavgei comme 1111 mollusque exolique qui se
LA FAt'N'E TERRESTRE LUSITANIENNE

Distrib ltio.n géographique

Le Milax gagates a été signalé à Madère (Lowe), au Maroc


(Pallary), Algérie (Bourguignat), Kabylie (Letourneux), Tuni¬
sie (Bourguignat, le seul Limacien connu dans la régence),
Corse (Requien-Caziot), Sardaigne (Falclis), Baléares (Kobelt),
Portugal (Morelet), Gibraltar (Falsen), Valencia (Hidalgo).
Il paraît avoir la môme origine que YAmalia Soiverbyi, mais
il est moins localisé dans la bordure occidentale de l'Europe.
Grace à l'influence marine, il s'est répandu sur le littoral médi¬
terranéen, sans jamais pénétrer fort avant dans l'intérieur du
continent. Il existe dans toute la Ligurie et la région littorale
de l'Italie (excepté, jusqu'à présent, en Toscane), a pénétré en
Lombardie, mais manque tout à fait en Piémont et sur le ver¬
sant nord des Apennins. La variété Benoiti Lesson, et Poil.
existe à Messine.
Il s'avance donc vers l'orient, quoique non indiqué en Bul¬
garie, ni au Monténégro, ni en Grèce (i).

Milax Sowerbyi.

Umax curiimtus Leach. 1S20, Syn. Moll. , p. 5 \ . pl. Vit. fig. 3.


Limax Sowerbyi Férussac . i8a3, Hist. Moll., p. 96, pl. VIII. D, fig. 7, 8.
Milax Sowerbyi Gray. i855, Catol. of pulm . p. 73.
.

Limax argillaeeus Gassics. i856. Act. Soc. Linn. Boni., t. XXII, fig. 23a.
Milax Sowerbyi Loeard, 1888, Prod., p. 9.

DISTRIBUTION GÉOGRAPHIQUE

Le Milax Sowerbyi est une espèce essentiellement maritime


et occidentale. Il vit sur lout le littoral atlantique, depuis le
Portugal (P) jusqu'à l'Irlande et à l'Angleterre.
Il ne s'éloigne jamais beaucoup des côtes de France. On a
constaté sa présence dans la plus grande partie des départe¬
ments maritimes de l'ouest, notamment aux environs de Bor-

(1) On l'a signalé, en dehors des départements littoraux, dans la Haute-


Garonne. l'Isère, le Rhône, les Vosges, la Haute-Loire, l'Orne, le Gers, la
Drôme,auraient
Elles etc. Plusieurs
besoin ded'être
ces indications
sérieusement
nous
contrôlées.
paraissentLes
touterreurs
à fait douteuses.
de déter¬
mination sont faciles à commettre.
54 LA FAUNE TERRESTRE LUSITANIENNE

deaux (Gassies, Mabille), Fontenay-ie-Comte (Vendée) (Letour-


neux), Vannes (Morbihan) (Taslé), Dinan el Lehon (Côtes-du-
Nord) (Bourguignat), Loire-Inférieure (Caillaud).
Dans presque toute l'Angleterre et l'Irlande ; pas en Ecosse
toutefois (voir carte Taylor).
On le trouve dans le Pleistocène d'Angleterre à Ighstham,
dans l'Holocène d'Oxford (Kent) et Glefton Hampden (Oxford¬
shire) (Kennard).

Famille des HELICIDE

Genre HELIX

1. Helix fusca.

Helix fusca Montagu, 1807, Testae. Brit., p. l\ih, pl. XIII, fig. 1.
Helix corrugata (Zenobia) Gray, 1821, Nat. arrang. moll, in Med. Repos.,
XV, p. 229.
Helix subrufescens Miller, 1822. Ann. phil. , VII, p. 370; iSaS, List of f resell
water , etc. of Bristol.
Helix revelata Bouchard-Chantereaiix (1), 1808, Moll. Pas-de-Calais, p. 44.
n° 20.
Helix fusca Gray, i84o, Iconog. Turton. Man., tab. IV, fig. 36.
Helix fusca (Hygromia) Pfeiffer, i85o, Verzeich., p. 127.
Helix fusca (Zenobia) M. -Tandon, i855, Hist. Moll., II, p. 212, pl. XV,
fig. 33-36.
Zonites fusca (Conulus) Adams, i855. p. 116.
Helix (Zenobia) fusca Paëtel, 1889, Catal., p. i34.
Helix fusca Locard, 189/4, Coq. terr. France , n. 96, fig. 102, io3.
Helix (Trichia) fusca West., Kalalog. reg. palearct., p. 27.
Helix (Capillifera) fusca TTomginan. 1906. Beitrag. Zur Moll., p. 190.

Distribution géographique

Landes : environs de Dax et de Mont-de-Marsan (Dupuy).


Gers : environs d'Auch (Dupuy, Grateloup et Raulin).
Vendée : arrondissement de Fontenay-le-Gomte (Letourneux) .
Loire-Inférieure (Caillaud).
Calvados : Colombières, Fouguerolles, foret de Cerisy, etc. (de
L'Hôpital.
(1) Non H. revelata Férussac, 1821, Tabl. Syst. nec H. revelata Michaud,
i83i, compl. Drap., p. 37.
LA FAUNE TERRESTRE Et ÎTANIENNE 55

Côtes-du-Nord (Mabille).
Orne (Desmars) : forêt d'Ecouves, ps des étangs de Radon
(Leboucher) et des étangs de Fonin>;i\ les-Souvets (Letacq),
forêts de Saint-Ortave, de la Ferté-Mas<'; etc. (Letacq).
Sarthe : Arconnay, bois de la Noë-de-Gesne ; bois de Champ-
Chariot, an nord de Bourg-le-Roi, etc. (Letacq), bois de Per-
rochell (Langlais), etc.
Pas-de-Calais : Boulogne-sur-Mer (Grateloup et Raulin).
Nord (Norquet).
Toute l'Irlande, moins tout à fait au sud (Clare), l'Ecosse et
l'Angleterre, mais non dans la partie sud-est ; dans les comtés
de Northampton, Berks, Oxford, Hunts, Cambridge, Nor¬
folk E. et W., Suffolk E. et W., Essex S. et W. et Middlesex ;
mais peut-être ces comtés n'ont-ils pas été bien examinés.

L 'Helix fusca n'est pas connu fossile ni en France, ni en


Angleterre (As. Kennard).

1. Helix revelata.

Helix revelata Férussac (i), 1821, Prod., p. A4 , n° 273.


Helix ponentina Morelet, i8/|5, Moll. Port., p. 65. pl. VI, fig. k-
Helix ponentina Dupuy, i8/i8. Hist. Moll., p. 189. pl. VIII, fig. 9.
Helix occidentalis Recluz, 1 845 , in Rev. Zool., p. 3n.
Helix occidentalis Rossm., Iconog., fig. 827.
Helix lisbonensis L. Pfeiffer, x846, Sytnb., III, p. 68.
Helix occidentalis Moqnin-Tandon, i855. Hist. Moll., p. 221, pl. XVJT,
fig. 10, i3.
Helix revelata Locard, 1888, Prodrome , p. 73.
Helix revelata (Zenobia), 1889, Catal. Paëtel, p. 177.
Helix revelata (Trichia) West., 1890, Kat. reg. paldarct., p. r>3.
Helix revelata Locard, 1 8q4 - Coq. terr. France, p. 111, fig. 1 3 4 . i35 (non
Michaud).
Helix revelata (capillifera) Honigman, 1906, Beitrag. zur Moll., p. 190.

Distribution géogr vphique

Portugal (Morelet) .
Basses-Pvrénées, Landes, Gironde, Lot-et-Garonne (Dupuy,
Gassies, Granger).
Charente-Inférieure : à Saint-Nazaire.

(1) Non H. revelata Michaud = Helix montivaga West. = H. salmurina


Servain.
5® U FAUNE TERRESTRE LUSITANIENNE
Deux-Sèvres : environs de Niort (Drouet).
Indre-et-Loire, Maine-et-Loire, Loire-Inférieure (Micliaud, abbé
Bardin, Servain, Germain).
.Morbihan : la Roche-Bernard à Vannes (Caillaud).
Ille el -Vilaine . Falaises de Cancale (Desmars, Bourguignat).
Côtes-du-Nord : Dinan (Mabille).
Pas-de-Calais.
Bains à la Roehe-du-Theil (abbé Lerav).
Environs de Paris (Bourguignat) .

L'abbé Dupuy le signale dans les vallons des Alpes. Ce ne


peut être que le résultat d'une mauvaise détermination.

Gufrnesey et Jersey (Falmouth Britannia, Pfeiffer).


Dans les comtés de Cornwall W. et E., Devonshire S. et N.,
au sud-ouest de l'Angleterre. probablement dans les comtés
limitrophes de Somerset (Taylor) ; dans l'Holoeène, à White-
sand Baz Cornwall (Kennard).

3. Helix ignota.

fteli.r ignntn J. Mabille. i8G5. Faune Saiut-.Teun-de-Luz. in Journal de


Conehyl.. I. XIII. p. a55.

On. a confondu, sous le nom d 'intersecta, plusieurs espèces


qui doivent rentrer dans le groupe de l'Hélix heripensis (Mabille) ,
qui n'est pas lusitanien et qu'on a confondu souvent sous les
noms de fasriolata Moquin-Tandon de striata Draparnaud, et
,

ca-pe rata Montagu ; mais, il existe un Helix dénommé intersecta


par Michaud, spécial aux contrées soumises à l'influence océa¬
nique : c'est YHeli.r ignota Mabille, que l'on retrouve avec quel¬
ques formes voisines (H. subintersecta Bourguignat, olisippen-
sis Servain, pictorum Bourguignat) sur toute la côte atlantique,
depuis le Portugal (Cintra), les Basses-Pyrénées, s'avançant jus¬
qu'à Lourdes, dans tous les départements de l'ouest et sur
les côtes de la Manche, remplaçant, sous des formes diverses,
le groupe de V Heripensis Mabille ou vivant mêlé avec les espèces
de ce groupe.
ÎA FAINE TERRESTRE LUSITANIENNE 57

4. Helix quimperiana.

Helix quimperiana Férussac, 1822, Tabl. syat., p. 43.


Helix quimperiana Férussac, 182g, Hist. Moll., pl. LXXV, B, fig. 1-0.
Helix Kermorvani Collard-Descherres, 1880, Moll. Ministère in Bull. Soc.
Linn. Bordeaux, IV, p. 98.
Helix Corisopitensis Deshayes, i83i, Encyl. meth., II, p. 210.
Campylea quimperiana Beck, 1837, Index Mollusc., p. 26.
Helix quimperiana Locarcl, 1882, Prodrome, p. 89.
Helix quimperiana Locard, 189/1, Coq. lerr. France, p. i4o, fig. 172-173.

Distribution géographique

L'origine de cet llclix a été le sujet de nombreuses diseus¬


sions.
Le Borgne de Kermovan, capitaine d'artillerie, el Bonnemai-
son ont découvert la première fois cette coquille en 1807, sur
les bords de l'Odet, près de Quimper. Quelques échantillons
lurent remis à hesmarets, membre de l'inslilul, qui la com¬
muniqua au baron d'Audebard de Férussac. Celui-ci la figura
ainsi qu'il vient d'etre relaté.
On considérait cette espèce comme spéciale à la Bretagne,
lorsque Danthon, capitaine de frégate, la trouva en abondance,
en 1839, sur le mont Santorin (/jo3m), près la baie de ce nom,
province de Santander (Espagne). J. Mabille constata le premier
la présence de cette espèce à Ascaire el sur la pente des mon¬
tagnes de Sainl-Jean-de-Luz. M. Bavav, dans la Feuille des
Jeunes Naturalistes, n° 286, en date du 1e1 août 189A, et dans
une lettre particulière qu'il m'a adressée, semble avoir bien
résolu la question. Nous ne saurions mieux faire que d'ex¬
traire de son travail et de ses récits tout ce qui peut nous éclai¬
rer sur la dispersion géographique de cette espèce et de l'étude
de ses mœurs.
L'Hélix quimperiana est-il originaire du nord-ouest de l'Es¬
pagne et importé au nord-ouest de la France ou bien, au con¬
traire et comme semble l'indiquer son nom, est-il originaire
des environs de Quimper et transporté en Espagne ? ou bien
encore se trouve-t-il, en l'un et l'autre pays, dans sa véritable
patrie P Quelque paradoxale que cette troisième opinion puisse
paraître, M. Bavay la croit juste et arrive à la faire partager.
58 LA FAUNE TERRESTRE LUSITANIENNE

M. le marquis de Folin, qui s'est beaucoup occupé de cet


Helix et qui tient absolument à ce qu'il ne soit pas d'origine
bretonne, affirme d'abord son origine espagnole (Le Natura¬
liste, 1888, p. 174), en s'appuyant sur le fait que « dans l'ex¬
trême sud-ouest de la France, il ne dépasse pas les abords de
la montagne et qu'on ne le trouve en aucun lieu entre les Pyré¬
nées et le Finistère ». Sur son territoire d'acclimatation, il vit
sur une zone ne s'écartant guère des bords de la mer ; enfin, il
est montagnard, car des Pyrénées il passe dans les Asturies et
dans la Galicie ; de Folin l'a trouvé dans cette province à Bar-
quecro et à Varès, et cette longue étendue d'habitats lui semble
indiquer que ce sont bien ceux de son origine.
Plus tard (Revue des Sciences naturelles de l'Ouest, 1892,
p. 32/4), le même naturaliste dit, avec non moins de convic¬
tion : « Il est bien prouvé, aujourd'hui, qu'il ne s'est trouvé
aux environs de Quimper que par l'effet de son introduction
près de cette ville, mêlé à quelques débris végétaux, et qu'il
s'y est facilement acclimaté. On trouve son véritable habitat
actuel au pays basque, sur les deux versants des Pyrénées, et
il s'étend sur toute la côte septentrionale de l'Espagne. Nous
l'avons trouvé à Varès, près du cap Ortégal, et au Férol. Re¬
marquons que cette espèce se tient sur une zone étroite bordant
la côte, comme si, regrettant une autre patrie, elle tenait à ne
pas s'en éloigner plus ; effet d'instinct et d'organisation. Il en
est de même en France : il reste stationnaire sur un territoire
restreint, entre Hendaye et la Nive, ne s'en écartant nullement
pour pénétrer plus avant en allant vers l'intérieur du pays. »
« Un peu plus tard encore, dans ses Chasses et Pêches, il fait
venir cet Iïelix de la fameuse Atlantide, d'abord au pays bas
que, puis, de là, en Bretagne. »
Ce sont là des affirmations catégoriques. Elles émanent d'un
naturaliste dont la longue expérience fait autorité. M. Bavay
n'y voit cependant que l'expression d'une opinion répandue,
mais néanmoins discutable ; les preuves invoquées en sa faveur
sont détruites par lui.
Il fait remarquer, tout d'abord, que si l'Hélix quimperiana
se tient assez près du littoral dans le sud-ouest de la France
et en Espagne, on ne saurait invoquer la même habitude en
Bretagne, pour refuser à ce dernier pays d'être aussi sa patrie.
LA FAUNE TERRESTRE LUSITANIENNE 59

Nous ajouterons que 1 'Helix quimperiana vit aussi assez loin


de la mer, dans les Basses-Pyrénées, puisque M. Bavay l'a re¬
cueilli près des bords de la Nivc, en 190g, à 200 mètres du
Pas de Roland : « Je remontais, a-t-il écrit, un ruisseau affluent
de droite, c'est-à-dire du côté des Pyrénées, cherchant un point
propice aux escargots. Quand j'arrivai à un coude de ce ruis¬
seau, je fis la réflexion qu'en Bretagne un tel recoin nourri-
fait certainement l'Hélix en question ; une minute après, con-
clut-il, sur un bloc de quartz blanc semblable à celui de Plou-
gastel, j'apercevais un individu de cette espèce et, à quelques
pas, sous un autre bloc de même nature, gisait un autre indi¬
vidu. C'était donc absolument la même station qu'en Bre¬
tagne. »
Reprenant le récit de la Feuille, M. Bavay dit : « Doit-on
qualifier de montagnarde une espèce qui se tient sur une zone
étroite bordant la côte ? Car M. de Folin a dit et répété qu'elle
habitait au bord de la mer, dans une étroite zone littorale...
On a même déduit que l'importation s'était faite avec du lest.
En réalité, cette espèce habite à l'ombre, dans des petits vallons
bien frais, n'aboutissant jamais à la mer, mais souvent dans
une rade (comme celle de Brest) ou le long des rivières qui vont
se jeter à la mer à plusieurs kilomètres de leur habitation.
D'où il résulte que Y Helix quimperiana se trouve près de l'eau
salée, mais jamais près de la vraie mer, de la mer ouverte.
On le trouve en Bretagne très avant dans les terres, comme
dans le Morbihan, à Elven et dans les landes de Lauvaux, au
Faouet (Preston) ou dans de tels frais vallons existant. Au
pourtour de la rade de Brest et aux alentours immédiats de
cette ville. C'est dans ces deux derniers points qu'il était le plus
commun : il devient de plus en plus rare, disparaissant avec les
ronces et les orties devant l'urbanisation de la campagne. »
On le trouve à Saint-Thegonnee, à 3 heures de la mer, dans
la grotte préhistorique de Roc-Toul (Bavay).
M. de Lausane le signale aux environs de Morlaix. M. Ch. Pi-
quenard dans la forêt de Clohars-Carnoët et aux environs de
Quimperlé. M. le Dr Daniel l'indique au Huelgoat, à 3o kilo¬
mètres au sud de la Manche, à 45 kilomètres au nord de l'Océan.
« C'est même probablement là, dit M. Bavay, le point le plus
central de son habitat breton. » L'Hélix quimperiana vit donc
60 LA FAUNE TERRESTRE LUSITANIENNE

au nord, à l'ouest, à l'est, au sud et au centre du Finistère,


autrement dit dans tout le département. On le trouve aussi
dans les Côtes-du-Nord, près du milieu de son bord septen¬
trional ; à Moncontour, dans un vieux mur, reste de fortifi¬
cations (Bavay), forêt de Lorges, à 25 kilomètres de la mer
(M. Bleuse).
La ligne passant par Moncontour, la forêt de Lorges et Elven,
qui n'est pas loin de la frontière d'Ille-et-Vilaine, marque la
limite orientale de son habitat en Bretagne. Cet habitat ren¬
ferme donc à peu près trois départements.
Dans la région sud-ouest, l'Hélix quimperiana vit dans les
Basses-Pyrénées, à Olhette, Sare, le mont d'Arrain, Saint-Jean-
de-Luz, Behobie. Rare à Hendaye, depuis la démolition du
vieux port (Granger).
Cette Hélice aime l'ombre et la fraîcheur, est très délicate,
très difficile à conserver en captivité, très peu rustique. Quoi¬
que fort sauvage en un mot, elle est très peu acclimatable.
<( Certainement, elle n'est pas venue en Bretagne avec du lest,
jamais on n'a pris de lest là où elle vit, fait remarquer à propos
M. Bavay ; elle ne se cache pas dans les débris de carrière
susceptibles de fournir ce lest. Elle vit surtout dans les vieux
murs, humides, les ruines des vieux châteaux, parmi les orties
et les fougères, sous et sur les rochers, à l'entrée des cavernes,
dans les bois montueux et les taillis, sous les pierres recou¬
vertes de broussailles, sous l'abri des roches moussues et
humides. Elle ne sort qu'après les fortes pluies de la fin du
printemps et de l'été, et probablement la nuit, comme l'Hélix
Raspaili en Corse. »
Sans doute, le territoire, limité ainsi qu'il vient d'être tracé,
n'est qu'un îlot comparé à celui des habitats basques et espa¬
gnols, mais il n'est pas si restreint que sembleraient l'indiquer
MM. de Folin et Granger. Un certain nombre de ses stations
armoricaines semblent mal liées l'une à l'autre. Est-on bien
sûr qu'il n'en soit pas de même sur son long territoire espa¬
gnol ? L'a-t-on rencontrée en beaucoup de points, entre Saint-
Sébastien et Barqueiro (Asturies), deux localités presque aussi
éloignées l'une de l'autre que Brest et Hendaye, fait remarquer
favorables.
M. Bavay ? Il est évident qu'on la rencontrera dans les endroits
LA FAUNE TERRESTRE LUSITANIENNE 61

Entre le sud de la Loire et l'Adour, on ne rencontre plus


cette Hélice. Cette absence ne prouve pas, soit son origine bas¬
que, soit son origine bretonne.
M. Bavay conteste en Bretagne son transport par du lest ;
d'ailleurs, cette espèce n'est pas maritime, et on ne peut pas
attribuer son voyage à ses qualités édules : sa taille est trop
médiocre, son test trop fragile, et puis le mollusque fréquente
beaucoup trop les excréments, quand l'occasion s'en présente.
Ce ne sont pas là des conditions qui permettent de la trans¬
porter au loin, ni qui engagent à en faire des provisions de
mer ou de carène, comme cela est arrivé pour d'autres es¬
cargots.
Pour expliquer sa présence au nord-ouest de la France, en
même temps qu'au nord de l'Espagne, M. Bavay fait remar¬
quer la façon dont son habitat armoricain s'avance dans l'Océan
en regard de la péninsule ibérique et pense que la côte qui
s'étend de la Loire à l'Adour, par suite des assauts qu'elle a
subis de la part de l'Océan pendant les temps quaternaires et
actuels, ont été dévorées par la mer terrible, qui a ainsi séparé
en deux régions, l'une petite, l'autre grande, l'habitat primitif
de l'Hélix quimperiana, emportant les terres qui ont dû jadis
unir la Bretagne à l'Espagne.
C'est là une solution pas très éloignée de celle vers laquelle
incline M. de Folin. M. Bavay ne croit pas que les considéra¬
tions géologiques ne s'opposent bien formellement à son adop¬
tion.
L'affaissement constaté des côtes du Morbihan depuis la con¬
struction du dolmen, vient même leur prêter un certain appui,
et l'on sait qu'à l'époque pliocène une invasion marine a dii
niveler la Bretagne. La mer recouvrait une grande partie de la
Vendée. Les mouvements qui se sont produits pendant l'époque
pleistocène viennent à l'appui de cette hypothèse, qui a pour
effet d'éviter de recourir à celle de l'Atlantide, dont les côtes
étaient trop éloignées de celles de notre continent.
L'Hélix quimperiana ne serait pas alors en Bretagne un nou¬
veau venu, mais un reste du passé (M. Piquenard, Bulletin de
la Société des Sciences naturelles de l'Ouest, 1893, p. 271), tout
comme dans le pays basque et au nord de l'Espagne.
62 LA FAUNE TERRESTRE LUSITANIENNE

Famille des PUPIDÉE

Genre L AU RI A

Lauria anglica.
Vertigo anglica Férussac, 1821, Prod., II, p. 35i ; 1823, Tabl. Syst ., p. 68.
Turbo anglicus Wood, 1828, Cat. Suppl., pl. VI, fig. 12.
Pupa ringens Jeffreys, i83o, Svn. test., in Trans. Linn., XVI, II, p. 356
(non Michaud, i83i) (1).
Pupa anglica Pot et Mich., i838, Gai. Douai, I, p. ig5, pl. XX, fig. 1, 2
(non Moq., i843).
Pupa (Charadrobia) a ïiqUcq L. Pfeiffer, Nqth . M clic . viv,y p. 3 /i 8 .
Lauria anglica Westerl., 1897, Synop. Mollusc., p. 67.
Lauria (Charadrobia) anglica Caziot et Margier, Etude historique de la Clas¬
sification des Pupa (B. S. Zool. F., 1909, p. ii).

Distribution géographique

Dans la Feuille des Jeunes Naturalistes, n° 4i3, pp. 68-70,


ier mars igo5, M. Margier a fait connaître la dispersion géo¬
graphique de ce Lauria. « Cette charmante petite coquille,
dit-il, a été trouvée sur plusieurs points du Portugal, dans le

Beck.
essentiellement
l'Atlantique,
une
nique
indiqué
pl.
du
agr.
d'eau.
il
Orientales
affluents,
dernières
gnol
mais
rapport
Lauria.
deIl
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Nota.
manque
ce
Portugal
XV,
forme
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Pupa
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ramifications
du
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il
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que
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est
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dans
un
Pupa
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la
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différente
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c'est-à-dire
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n'est
elle
autre
haute
Pau,
ringens
les
Pupa
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de
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Caillaux
que
est
àmontagnes.
autres
méditerranéen
d'ailleurs
Pupa
se
de
vallée
montagnarde;
très
anglica
descendue
du
le
que
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de
l'Adour),
inCaillaud
aux
Pupa
type
commun
ringens
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de
Michaud,
sur
vallées
pas
Férussac
l'Ariège,
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Il
un
anglica
que
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une
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qui
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ce
montagnes
Complément
est
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Férussac,
ne
point,
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espèce
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comme
(P.
manquer
les
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de
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lusitanienne;
Dupuy,
ni
l'influence
la
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certains
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en
des
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dans
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régions
d'ailleurs
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de
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auteurs
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les
auteurs
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sur
partie
àdirecte
jusqu'aux
Pyrénées-
et
les
l'Océan;
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un
elle
in
ringens
est
de
p.partir
cours
océa¬
côtes
l'ont
espa¬
Rev.
sous
Tor¬
sans
64,
est,
ses
un
de

i
LA FAUNE TERRESTRE LUSITANIENNE 63

voisinage des côtes (environs de Porto, de Goïmbre, de Cin¬


tra). »
Sa présence a été constatée à l'ile de lié par M. Ph. Rousseau.
Moquin-Tandon l'a indiquée par erreur, dans ses Mollusques
de France, comme ayant été trouvée une fois dans les alluvions
de la rivière, près de Toulouse. On sait qu'il s'agit du Vertigo
Moulinsiana Dupuy, mais, comme l'a dit M. Margier, nous ne
serions pas surpris que de nouvelles recherches la fassent dé¬
couvrir sur d'autres points de nos côtes océaniques, notam¬
ment en Bretagne et dans les Basses-Pyrénées. Gomme elle vit
principalement dans les endroits marécageux, entre les racines
des mousses, au bord des sources, on comprend qu'elle soit si
difficile à trouver. On a pourtant constaté son existence dans
toute l'Irlande, dans les îles Shetland et Orkneys, au nord de
l'Ecosse, dans toute l'Ecosse et l'Angleterre, moins sur quelques
points de la partie sud-est, comme pour l'Hélix fusca (voir carte
Taylor).
Le Pupa anglica n'a pas encore été trouvé au Maroc, où vit
le Pupa tingitana Kob, ni dans la province d'Oran, mais il
s'est avancé jusque dans l'Algérie centrale, et même assez loin
vers l'est.
La forme algérienne, différant un peu du type, a été élevée
au rang d'espèces sous le nom de Vertigo numedica Bourgui-
gnat. Ce n'est, en réalité, qu'une variété du Lauria anglica.
Tandis qu'ailleurs cette espèce ne vit que dans les régions
les plus basses, elle est devenue franchement montagnarde en
Algérie. On la connaît au-dessus de Blidah, à près de i.5oo mè¬
tres d'altitude, et elle est aussi fort commune en Kabylie, où
elle a été rencontrée par Letourneux sur de nombreux points.
Westerlund signale les variétés :
gundilhœ, à Scarborough, en Angleterre.
numidise Bourguignat, Algérie.
Elle existait en Angleterre, pendant le Pleistocene, à Copford
(Essex) et à Warton (Lancashire) et, pendant l'Holocène, à
Jotland Bay (île de Wight), à Harlton (Cambridgeshire) et à
Felstead et Shalford (Essex) (As. Kennard).
A propos du Lauria anglica, M. Margier fait remarquer que
le genre Lauria est un des plus naturels et des mieux carac¬
térisés de la famille des Pupidse, et même de tous les gastro-
64 LA FAUNE TERRESTRE LUSITANIENNE

podes terrestres. Il est très distinct du genre Pupilla Leach, avec


lequel Bourguignat et les malacologistes de son école le con¬
fondaient. Il présente un caractère des plus sérieux, caractère
signalé par Morelet (Mollusques des Açores) et par Bourgui¬
gnat (Malacologie de l'Algérie). Le premier avait observé le
fait chez les Pupa fuscidula Mrts. et fasciolata Morelet ; le
second chez le Pupa umbilicata Drap., qu'à l'état jeune, les
coquilles des Lauria sont munies de petites lames internes
transversales, qui existent de distance en distance au nombre
de 6 à 7. Elles disparaissent lorsque les individus sont adultes.
« Si l'on examine des spécimens jeunes, dit Morelet, on re¬
marque, sur le dernier tour de la spire encore mince et trans¬
parent, des lignes courtes, transversales, d'un blanc opaque,
se succédant à certains intervalles : ce sont autant de lamelles,
calleuses et sensiblement saillantes, distribuées le long de la
spire ; elles rayonnent autour de l'axe central comme de nom¬
breux échelons, jusqu'au dernier pli du palais qui termine la
série. Mais, ce qui n'est pas moins étrange, c'est leur dispari
tion totale, plus rarement partielle, quand la coquille a acquis
tout son développement.
« La première de ces lames naît sur le troisième tour avec le
pli columellaire et le pli principal de la paroi supérieure de
l'ouverture, de sorte que la coquille se trouve, de bonne heure,
munie des trois principales lames qui doivent protéger son
habitant, si tel est, en effet, le rôle que l'on peut assigner à ces
pièces accessoires. »
A ces excellentes observations, nous ajouterons que l'on ne
pourrait mieux comparer les lamelles temporaires des Lauria
jeunes, qu'aux cloisons du Segmentina. Ces lamelles provisoires
sont spéciales à toutes les espèces du genre Lauria. Ce genre
possède, en outre, des plis ou lamelles pariétaires et columel-
laires qui, contrairement aux plis des Torquilla, existent même
chez la coquille jeune, se développent avec elle et persistent
à l'état adulte. Ce caractère lui est commun avec les Orcula,
Cory na et quelques autres Pupidse.

A la faune lusitanienne, on peut rattacher encore la Hyalina


incerta Draparnaud ; toutefois, cette Hyalina se trouve depuis
Pampelune jusqu'aux Pyrénées-Orientales ; elle peut donc faire
LA FAUNE TERRESTRE LUSITANIENNE 65

partie de la région méridionale, ainsi que le Pupa pyrenaica


Boubée, qui vit au mont Alaric, c'est-à-dire sur le versant mé¬
diterranéen. Fagot, en 1891, dans son Histoire malacologique
des Pyrénées françaises et espagnoles, a bien donné la topogra¬
phie, l'orographie et l'hydrographie des deux versants pyré¬
néens, mais il n'a pas établi la répartition des mollusques qu'on
y trouve. Ceux-ci sont bien distincts de ceux des Alpes et ne
peuvent pas être rattachés à des ancêtres communs. Quelques-
uns sont remarquablement localisés, et l'on peut distinguer
deux faunes assez différentes, l'une occidentale, pour le versant
atlantique ; l'autre orientale, pour le bassin de la Méditerranée.
A la première, on peut rattacher la Hyalina incerta visée plus
haut, ainsi que le Pupa pyrenaica Boubée, le Pupa ringens
Caillaud, et, à la seconde, YHelix pyrenaïca, le Pupa affinis
Rossmassler et YOrcula cylindrica Michaud.

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