La Notation Scolaire - Inconvénients Et Alternatives
La Notation Scolaire - Inconvénients Et Alternatives
La Notation Scolaire - Inconvénients Et Alternatives
Arthur Moinet
1) De multiples défauts
Le premier écueil de la notation chiffrée demeure sans nul doute dans corrélation
fréquente avec la milieu social de l’élève. Comme nous pouvons voir, la note est souvent le
reflet de ces inégalités et maintient inéluctablement le plus souvent l’élève dans un même
ordre de grandeur durant toute sa scolarité.
Enfin, rappelons que plusieurs autres déterminants sociaux peuvent influer sur
l’attribution d’une note. Par exemple, le nom de l’élève (Guégan ; Dufourcq ; Pascual,
2005), le lieu de résidence (Brinbaum ; Primon, 2014) et bien évidemment le genre. A ce
La constante macabre
L’évaluation lettrée
Plus généralement, cette forme d’évaluation poursuit généralement l’objectif de créer une
nouvelle relation entre les élèves, les étudiants et les parents. Le climat de défiance scolaire
étant souvent un prétexte de conflits et d’échec. D’ailleurs, les élèves jugent souvent de la
1http://www.lexpress.fr/education/un-bulletin-scolaire-sans-notes-ca-ressemble-a-
quoi_1631688.html
Arthur Moinet - 2018
qualité et de la rigueur d’un enseignant avec son approche de la notation (contrôles
surprises, fréquence de la notation…).
Ainsi, nous pouvons considérer qu’une évaluation basée sur une notation chiffrée associée
à un niveau de compétences favorise la confiance et la sérénité dans l’apprentissage. De
plus, un un calendrier commun et approuvé d’évaluation encourage la motivation et les
performances des étudiants (Merle, 2005).
Une alternative plus radicale demeure dans la suppression de toute échelle d’évaluation.
Par exemple, le Danemark ne pratique pas la notation avant les 15 ans, et évalue l’élève
avec un « student program » sur la copie. Ce « student program » contient une
appréciation sur les progrès de l’élève, son degré d’acquisition de chaque compétence, des
conseils pour progresser et une opinion sur son comportement et attitude.
Cette méthode est liée à une méthode globale d’évaluation : de la même façon le sytème
danois donne une importance significative à la notion de compétence au lieu de
l’évaluation dite « par coeur » et met davantage l’élève en situation de travail de groupe et
de recherche individuelle.
Un avantage important de ces systèmes réside sans doute sur leur capacité à favoriser
l’initiative, l’autocritique et l’autonomie des élèves.
L’auto-évaluation, quant à elle, est une méthode se fondant sur l’idée que l’élève doit
réaliser lui-même quelles sont ses faiblesses, les accepter, et travailler pour y remédier.
Contrairement à la notation classique de l’enseignant, l’évaluation n’est pas vue comme
une sanction et donc une source potentielle de découragement. Elle met au contraire
l’élève face à lui-même et l’encourage à s’améliorer. Pour Hattie et Timperley (2007),
acquérir très tôt des compétences pour prendre du recul sur son propre travail et détecter
ses faiblesses est un puissant outil pour atteindre des objectifs de progression.
Dans une enquête réalisée en 2013 par le Conseil académique de la vie lycéenne de
l’académie de Nantes concernant le dispositif d’accompagnement personnalisé, trois
principales doléances furent exprimées : la volonté de bénéficier d’une plus grande aide
pour surmonter ses difficultés propres, le besoin d’obtenir plus de conseil pour
« apprendre à apprendre » et le besoin de plus de flexibilité pour choisir les points précis à
travailler durant les deux heures hebdomadaires d’accompagnement.
Évaluation par lettres, par compétences, par auto-évaluation… Nous avons donc présenté
l’existence de plusieurs alternatives à la notation scolaire. Quelle est donc celle qui nous
paraît la meilleure ?
Les quelques expérimentations étrangères que nous avons citées ont toutes un point
commun : la volonté d’affiner l’évaluation scolaire, de repérer et de faire comprendre à
l’élève quels sont ses progrès et ses axes de progression.
A la lumière de ces expérimentations, et des défauts que nous avons soulignés, il apparaît
clairement qu’un sytème qui évalue les progrès réalisés, y ajoutant un commentaire
personnalisé, semble plus pertinent qu’un sytème évaluant seulement une performance.
L’idée étant d’encourager l’étudiant à augmenter ses efforts, et en les récompensant, que
l’élève ait des facilités ou au contraire plus de difficultés. En d’autres termes, l’objectif étant
d’encourager l’élève à raisonner en terme de compétences et de progrès et non en points et
en notes. Une évaluation qui peut donc être considérée comme « formative » et non
« sommative » (Merle, 2007).
En somme, pourrait tout d’abord être envisagé un sytème qui évalue les travaux des élèves
par commentaires personnels et des portofolios de compétences (Jalbert, 1997) sans
toutefois supprimer immédiatement l’évaluation quantifiée.
Plusieurs enquêtes ont démontré les bénéfices d’une diversification de l’évaluation : dans
l’académie de Nancy-Metz, en 2013, une expérimentation d’école sans note a souligné une
augmentation du « sentiment d’apprendre »3. En 2016, une enquête (qui n’a pas encore été
publiée dans son intégralité), semblait démontrer que la suppression de la note réduisait
Toutefois, nous devons souligner que certaines expérimentations ont cependant produit
des résultats mitigés. En Suisse, une enquête d’Alex Blanchet5 a démontré que le
remplacement des notes par un simple commentaire et un continuum de progression
pouvait rendre plus difficile la capacité à se situer dans la norme de la classe et plus
généralement des programmes.
De plus, en Suède et Danemark, la suppression de la notation chiffrée a pu être accusée de
faire baisser les résultats dans les enquêtes PISA, TIMMS et PIRLS.
Il semble donc clair que le remplacement de la notation chiffrée doit être accompagné par
un encouragement à la prise de responsabilité, afin de ne pas provoquer un manque de
motivation et un désintérêt de l’élève pour l’évaluation.
Nous conclurons ce travail en exprimant le regret que les différentes enquêtes à propos de
la notation scolaire soient encore peu nombreuses et que l’opinion des élèves à propos de
ce sujet soit trop souvent ignorée.
4http://www.cafepedagogique.net/LEXPRESSO/Pages/
2016/03/09032016Article635931027011308054.aspx
5 http://admee2012.uni.lu/pdf2006/S5_7.pdf
Arthur Moinet - 2018
Indications bibliographiques
- BOUCHARD, Pascal. « Les républicains ont raison contre les pédagogues, mais le
savent-ils ? » in Les Temps Modernes, vol. 622, no. 1, 2003, pp. 149-163.
- FEITE ALONSO, Rafael. Nacidos para perder. Un análisis sociológico del rechazo y del
abandono escolares. CIDE. 1990.
- MAULINI, Olivier. Qui a eu cette idée folle, un jour d'inventer les notes à l'école ? Petite
histoire de l'évaluation chiffrée à l'usage de celles et ceux qui désirent s'en passer (et
des autres), 1996, Genève.
- MECHTENBERG, Lydia. « Cheap Talk in the Classroom: How Biased Grading at School
Explains Gender Differences in Achievements, Career Choices and Wages » in Review of
Economic Studies, no. 76, 2009, pp. 1431–1459.
- Rapport du CNESCO : L’évaluation des élèves par les enseignants dans la classe et les
établissements : réglementation et pratiques. 2014, ministère de l’Education nationale.