Analyse Du Discours
Analyse Du Discours
Analyse Du Discours
Nombre de crédits : 4
Public-cible :
Prérequis : Néant
Objectifs généraux : ce cours vise à donner à l’étudiant de Lettres Modernes les bases
théoriques en analyse du discours lui permettant d’appréhender le fait littéraire comme un
discours.
Ressources complémentaires :
Références bibliographiques :
AMOSSY Ruth & MAINGUENEAU Dominique, L’analyse du discours dans les études
littéraires, Toulouse, Presses Universitaires du Mirail 2003.
MAINGUENEAU Dominique, Les termes clés de l’analyse du discours, Paris, Seuil, 2009.
Introduction
objectif pédagogique:
Constituée dans les années 60 à partir des travaux du linguiste Z. S. HARRIS aux USA,
l’analyse du discours se propose d’aller au-delà du mot et de la phrase pour envisager
l’énoncé comme un tout, c’est-à-dire dans « sa structure linguistique, ses conditions de
production historique et politique en tenant compte des interactions subjectives et des
préconstruits qui contraignent le sens » (Mazière, 2005 : 9). C’est donc une discipline au
carrefour des sciences humaines qui,
[A]u lieu de procéder à une analyse linguistique du texte en lui-même ou à une analyse
sociologique ou psychologique de son contexte, vise à rapporter les textes, à travers leurs
dispositifs d’énonciation, aux liens sociaux qui les rendent possibles et qu’ils rendent
possible. (Maingueneau, 2009 : 18-19)
Aujourd’hui encore, l’analyse du discours reste une discipline qui repose sur des approches
variées. Mais, malgré la multiplicité des approches, l’objet d’étude demeure le même, c’est-
à-dire le discours, conçu comme « la manifestation attestée d’une surdétermination collective
de la parole individuelle » (Mazière, 2010 : 9). Pour nous, aborder l’analyse du discours
revient à s’interroger sur la manière dont la discipline a évolué et sur ses influences dans les
études littéraires.
[1] Dans son article intitulé « Idéologie et appareils idéologiques d’État », publié dans la
revue La Pensée en 1970, Althusser démontre les mécanismes de fonctionnement de
l’idéologie qui contribue[nt] à la reproduction des rapports sociaux de production et donc de
la reproduction des modes de domination qui les fondent.
La notion de discours
Objectifs spécifiques:
Le discours
L’instabilité de la notion de discours rend dérisoire toute tentative de donner
une définition précise du discours et de l’analyse du discours. Ce qui explique d’ailleurs
pourquoi les chercheurs en ont plusieurs acceptions. Certains en ont une conception très
restreinte, d’autres en font le synonyme de «texte» ou «d’énoncé». D’emblée, il faudrait
retenir que le discours est une unité linguistique de dimension supérieure à la phrase
(transphrastique), bref un message pris dans sa globalité.
Pour L. GUESPIN, le discours est ce qui s’oppose à l’énoncé, c’est-à-dire que « l’énoncé,
c’est la suite des phrases émises entre deux blancs sémantiques, deux arrêts de
communication ; le discours, c’est l’énoncé considéré du point de vue du mécanisme
discursif qui le conditionne ». Alpha Ousmane Barry affirme pour sa part que « le terme de
discours désigne aussi un ensemble d’énoncés de dimension variable produits à partir d’une
position sociale ou idéologique ; comme c’est le cas par exemple d’une déclaration d’une
personnalité politique ou syndicale. Jean-Michel Adam (1989) énonce sa définition du
discours de la manière suivante : «(…) un discours est un énoncé caractérisable certes par
des propriétés textuelles mais surtout comme un acte de discours accompli dans une
situation (participants, institutions, lieu, temps)»
Comme nous pouvons le constater, il semble qu’il n’y ait pas de mot plus polysémique que
« discours » dans le champ de la linguistique. Pour Alpha Ousmane Barry auteur de l’article
«Les bases théoriques en analyse du discours», «de cette pluralité de définitions, il se
dégage chez tous les auteurs que le discours désigne toute réalisation écrite ou orale par un
sujet, de la dimension de la phrase ou au-delà et ainsi que son contexte. » Le discours se
signale par une série d’indices d’énonciation qui font référence à la situation de
communication. Ces indices sont : l’emploi des pronoms de la 1ere et de la deuxième
personne (singulier/pluriel), l’usage d’un système temporel axé sur le présent comme temps
de la parole prononcée, l’utilisation des déictiques (une classe de mots dont le sens dépend
de la situation de communication). Exemples : d’abord, enfin, ce jour-là, ici-là, à cet endroit-
là, la veille, le lendemain, vraiment.
Pour Christian Baylon (Sociolinguistique : société, langue et discours, Nathan, 1996), «le
discours est une conduite sociale : dans une certaine mesure, locuteur et auditeur sont
déterminés en tant que produits sociaux, usant d’instruments sociaux, mais encore les buts
mêmes de l’allocution sont socio-historiques. Le rôle tenu par l’individu dans la structure
linguistique n’est pas sans rapport avec la place qu’il occupe dans les structures qui
définissent une formation sociale donnée.».
Dominique Maingueneau (1989 : 18) va plus loin en écrivant que « tout discours peut être
défini comme un ensemble de stratégies d’un sujet dont le produit sera une construction
caractérisée par des acteurs, des objets, des propriétés, des évènements sur lesquels il
s’opère ». Il (1996 : 8) saisit l’occasion pour expliquer les difficultés de circonscrire l’objet
d’analyse du discours de la façon suivante : «les difficultés que l’on rencontre pour délimiter
le champ de l’analyse du discours viennent pour une part d’une confusion fréquente entre
analyse du discours et ces diverses disciplines du discours (analyse de la conversation,
analyse du discours, théories de l’argumentation, théories de la communication,
sociolinguistique, ethnolinguistique…la liste n’est pas exhaustive). Chacune étudie le
discours à travers un point de vue qui lui est propre ».
En tout cas, le discours suppose l’existence d’un locuteur et d’un auditeur, et la volonté du
locuteur d’influencer son interlocuteur, ce qui fait penser au dictum (ce qui est dit) et le
modus (la manière de le dire). Georges-Elia SARFATI, parle dans Eléments d’analyse du
discours (Armand Colin, 2007) de types et de genres de discours.
Il nous enseigne que les types de discours se recrutent dans les différents domaines de
l’activité socio-historique et culturelle : discours littéraire, discours politique, discours
scientifique, discours religieux, discours juridique, discours journalistique.
Il parle aussi des genres de discours qui se répartissent, quant à eux, en fonction des types
de discours. C’est ainsi que l’article, la loi, le plaidoyer sont des genres du type discursif
juridique ; le fait divers, le reportage, l’éditorial, la brève, des genres du type discursif
journalistique ; la parabole, l’hagiographie (branche de l’histoire religieuse qui traite de la vie
et du culte des saints), la prière, l’homélie, le sermon, des genres du type discursif religieux ;
le poème, le roman, la pièce de théâtre, des genres du type discursif littéraire. Le discours
peut être pédagogique quand le locuteur fait appel à des procédés de renforcement comme
la répétition, didactique quand le locuteur entend faire la leçon à son interlocuteur, et
prescriptif quand le locuteur adopte le ton du conseiller ou dicte des comportements à son
interlocuteur. Mais le discours est foncièrement subjectif (le discours est toujours celui d’un
sujet individuel ou collectif), dialogique (parler, c’est parler à quelqu’un, le locuteur en
position de discours postule nécessairement un allocutaire), polémique (le discours est une
arme de combat, il n’envisage les réalités à construire qu’à partir de réalités à déconstruire).
v Discours/ Texte
A la question, qu’est-ce qu’un texte pour l’opinion courante ? Roland Barthes répondait dans
un article de synthèse publie dans Encyclopedia Universalis en 1974, que le texte est un
tissu de mots engagés dans l’œuvre et agencés de façon à imposer un sens stable et autant
que possible unique. Le texte peut être également défini comme une série orale ou écrite de
mots perçus comme constituant un ensemble cohérent, porteur de sens et utilisant les
structures propres à une langue (conjugaison, construction et association des phrases). Un
texte répond de façon plus ou moins pertinente à des critères qui en déterminent la qualité
littéraire. Dans ce cas, on note en particulier, la syntaxe, l’orthographe lexicale et
grammaticale, la pertinence et la richesse du vocabulaire, la présence de figures de styles, le
registre de langue et la fonction recherche (narrative, descriptive, expressive, argumentative,
injonctive, poétique).
En attendant de parler en détails du discours, il est important de savoir que sur les plans
théorique et méthodologique, on ne saurait établir un mur de séparation entre le texte et le
discours. A titre de rappel, Greimas nous signale que le discours est de l’ordre du contenu,
alors que le texte est de l’ordre de l’expression. En d’autres termes, le texte relèverait plus
de la linguistique, et le discours de la sémiotique. (Théorie des signes). Quand le texte est
considéré comme un énoncé, il s’oppose au discours. Néanmoins, il faudrait rappeler que
chaque texte est parsemé de discours qui ont des liens étroits avec des situations ou des
genres particuliers. C’est l’exemple des hommes politiques qui font usage soit d’un discours
didactique, soit d’un discours humoristique, en fonction des situations dans lesquelles ils se
trouvent.
-Narratif : a pour fonctions de raconter une histoire, articuler une succession d’actions,
présent dans les types d’écrits comme le conte, le roman, la nouvelle, le récit historique, les
faits divers et le reportage. Quelques indices : passé simple de narration, passé composé,
imparfait d’habitude et présent de narration, repères temporels et verbes d’action.
-descriptif : décrire, donner un état, se représenter un lieu, une personne, présent dans les
types d’écrits comme le portrait, description, compte rendu. Quelques indices : termes
concrets, imparfait de description, repères spatiaux et informations sur les lieux, adjectifs,
figures d’images.
-injonctif ou prescriptif : ordonner ou faire taire, types d’écrits recette, fiche technique,
règlement, règle du jeu, consigne. Quelques indices : impératif, infinitif, référence à la
deuxième personne,
-informatif, explicatif, didactique : informer, expliquer ; reportages, faits divers, compte rendu,
énoncé, lettre ; quelques indices : connecteurs logiques, présent de vérité générale, absence
d’indice de la personne
-poétique ou rhétorique : jouer sur le langage, faire rêver ; poèmes, publicité, chanson.
Quelques indices : allitération, assonance, figures de construction, jeu sur les mots, figures
d’image.
Le discours suppose une organisation transphrastique. Il est soumis à des règles d’organisation
en vigueur dans une communauté donnée, celle des multiples genres du discours. Cela
veut dire qu’un discours, même lorsqu’il a la taille d’une phrase, mobilise des éléments qui
ne sont pas de l’ordre de la phrase tels que les conditions de production historique et
politique, les interactions subjectives , les préconstruits .
Le discours est orienté. Il s’élabore particulièrement dans le temps en fonction d’une fin
(finalité), d’un but. Ce qui fait qu’il peut dévier (digressions…), revenir à sa direction initiale,
changer de direction, etc. Sa linéarité se manifeste souvent à travers des marqueurs
d’anticipations (« on va voir que … ») ou de retour en arrière (« ou plutôt… ») ; tout cela
constitue un véritable guidage de la parole par le locuteur.
Le discours est une forme d’action. Cette idée rejoint la problématique des actes de langage.
Le discours est interactif. Ceci est tout à fait évident dans le cadre d’une conversation, où les
deux locuteurs coordonnent leurs énonciations. Il existe une interactivité constitutive de
chaque énonciation même en l’absence d’un destinataire, ce qui explique les faits de
dialogisme, de polyphonie.
Le discours est régi par divers ordres de normes. Comme tout comportement, il est soumis à des
normes sociales très générales ; il obéit en outre aux normes de l’activité verbale, mais aussi
aux normes spécifiques de chaque de discours et à celles de chaque acte de langage. Plus
fondamentalement, tout acte d’énonciation ne peut se poser sans justifier d’une manière ou
d’une autre son droit à se présenter tel qu’il se présente. Cela veut dire qu’il s’intègre et se
soumet à des normes qui le légitiment par rapport à un genre donné
Le discours est pris dans un interdiscours. Il ne prend sens qu’à l’intérieur d’un interdiscours, à
travers lequel il doit se frayer un chemin et qu’il modifie. Chaque genre de discours, chaque
texte a sa manière de gérer la multiplicité des relations interdiscursives. Le seul fait de
ranger un discours dans un genre implique qu’on le mette en relation avec un ensemble
d’autres productions verbales.
Les différentes approches en analyse du discours
objectif spécifique : citer les différentes approches en analyse du discours
Contenu pédagogique
Les approches en analyse du discours (AD) sont diverses selon qu’elles sont orientées vers
la sociologie, la psychologie sociale, l’anthropologie, l’histoire, la linguistique, etc. Nous
allons nous intéresser à quelques-unes afin de voir dans quelles mesures elles interviennent
dans l’analyse du discours littéraire.
L'approche énonciative
Objectifs spécifiques:
L'approche énonciative
Elle se fonde sur une prise en compte des conditions de production du discours. La théorie
de l’énonciation articule le linguistique sur l’extralinguistique, c’est- à- dire, le discours à ses
conditions de production. Emile Benveniste définit l’énonciation comme « la mise en
fonctionnement de la langue par un acte individuel d’utilisation » (1974 : 80). Il élabore donc
une théorie générale des indicateurs linguistiques (pronoms personnels, formes verbales,
déictiques spatio-temporelle, modalisateurs) par l’intermédiaire des quels le locuteur s’inscrit
dans l’énoncé.
L’un des apports de la théorie de l’énonciation est qu’elle permet de mettre en évidence la
dimension réflexive de l’activité linguistique : l’énoncé ne réfère au monde qu’en
réfléchissant l’acte d’énonciation qui le porte.
Les approches communicationnelle et
conversationnelle
Objectifs spécifiques: définir les approches conversationnelle et communicationnelle.
Selon cette approche, comprendre un discours ne revient pas seulement à reconstituer des
informations, mais à identifier la fonction de ces informations dans la situation où le
discours est produit. L’approche communicationnelle est une approche fonctionnelle qui
trouve ses origines dans la théorie de la communication de Roman Jakobson. Aux éléments
de la communication (émetteur, destinateur, contexte, canal, code, message) correspondent
les fonctions suivantes (référentielle, émotive, conative, phatique, poétique,
métalinguistique). Ainsi dit, la structure du discours dépend de la fonction prédominante.
L’approche conversationnelle
Dialogisme et polyphonie
Dialogisme et polyphonie chez BAKHTINE
Il ressort que toute production monologale, quelle qu’elle soit est dialogue en son principe
dans la mesure où elle est déterminée par un ensemble de productions antérieures. Elle se
présente nécessairement comme une parole adressée, répond à des attentes, implique des
efforts d’adaptation et d’anticipation et peut s’intégrer dans le circuit du dire et du
commentaire. La notion de dialogisme est donc l’une des composantes essentielles de ce
qu’on peut appeler « la dimension interactive du langage ». Si les monologues qui sont
essentiellement des communications unilatérales, peuvent être considérés au même titre
que les productions dialogales, comme des matériaux interactifs, c’est en partie, parce qu’il
relève du dialogisme inhérent à toutes activités verbales.
Chez Bakhtine, la problématique du dialogisme implique que tout discours quelle que soit sa
nature, se présente comme la reprise-modification consciente ou inconsciente de discours
antérieurs. Ces relations interdiscursives résultent du fait que toute forme de conscience ou
de connaissance passe par l’activité discursive, ainsi, chaque discours « répond à quelque
chose, réfute, confirme, anticipe sur les réponses et les objections potentielles, cherche un
soutien »
L'approche sociolinguistique
Objectif spécifique: expliquer l'approche sociolinguistique et montrer comment elle contribue
à l'analyse discursive.
L'approche sociolinguistique
L’approche sociolinguistique
La sociolinguistique est considérée comme un champ d’investigation qui étudie la variété des
usages linguistiques dans une communauté linguistique. Son objet s’applique à des
phénomènes très variés : les fonctions et les usages du langage dans la société, la maîtrise
de la langue, l’analyse du discours, la planification et la standardisation linguistique, les
jugements des communautés sur leurs langues.
Labov pour sa part soutient que toute production linguistique manifeste des régularités et
peut donc faire l’objet d’une description. Il tente d’appréhender le langage comme une
activité socialement localisée dont l’étude se mène sur le terrain.
L’approche pragmatique
La définition de la pragmatique la plus ancienne est celle de Morris (1938) présentée par
Armengaud (1985 : 5) : « la pragmatique est une partie de la sémiotique qui traite du rapport
entre les signes et les usagers ». Mais la définition qui nous semble la plus adaptée aux
problématiques de l’analyse du discours est celle que propose Francis Jacques (1979) : « la
pragmatique aborde le langage comme phénomène à la fois discursif et social ».
Le langage est conçu comme un ensemble intersubjectif de signes dont l’usage est
déterminé par des règles partagées. Il s’agit de l’ensemble des conditions de possibilité du
discours, c’est-à-dire, des relations qui s’établissent entre les signes et leurs usagers d’une
part et d’autre part entre les phrases et les locuteurs. L’originalité de l’approche pragmatique
réside dans ses concepts fondamentaux qui ne relèvent ni à proprement parler de la
linguistique, ni de la philosophie. Ces concepts fondamentaux sont :
ü Le concept d’acte
La théorie des actes de langage développée par John Austin pose le problème des
conditions nécessaires et suffisantes pour la réussite ou l’accomplissement d’un acte de
langage. Ces conditions comportent la présence ou l’absence de certains traits dans le
contexte (intentions du locuteur, savoirs, croyances, attentes, effets, …). Pour
Austin, proférer un énoncé, c’est à la fois :
réaliser un acte locutoire, produire une suite de sons ou de phrases dotés d’un sens
dans une langue ;
réaliser un acte illocutoire, c’est-à-dire, produire un énoncé auquel est attachée
conventionnellement à travers le dire même, une certaine force ;
réaliser un acte perlocutoire, c’est-à-dire, provoquer des effets dans la réalité au
moyen de la parole.
ü Le concept de contexte
Le contexte est la situation concrète dans laquelle le discours est émis. Il englobe tous les
paramètres que sont le lieu, le temps, l’identité, la nature des relations qui unissent les
partenaires. En un mot, il s’agit de tout ce dont l’on a besoin de savoir pour comprendre et
évaluer un discours. L’objet de la pragmatique serait de traiter des rapports les plus
généraux entre l’énoncé et l’énonciation, entre les phrases et leurs contextes de
production. Le contexte englobe les individus existants dans le monde réel. C’est l’identité
des interlocuteurs, leur environnement physique et social, le lieu et le temps où les propos
sont tenus.
ü Le concept de performance
Chez Saussure « la langue est un système de signes exprimant des idées, et par là,
comparable à l’écriture, à l’alphabet des sourds muets, aux rites symboliques, aux formes de
politesse, aux signaux militaires … ». La sémiotique de Peirce est triadique, en ce sens que
sa conception du signe repose sur trois éléments :
-l’interprétant ;
Elle est selon Maingueneau (2004 : 39), « une branche de l’analyse du discours, dont elle
mobilise en les adaptant les concepts et les méthodes » qui modifie la manière dont la
littérature est appréhendée. C’est-à-dire que l’œuvre littéraire n’est plus abordée comme ce
système « clos » de la linguistique structurale dont la signification se trouverait dans son
immanence, ni comme la production d’un sujet social, marqué par son histoire, au cœur d’un
vécu qu’il reproduit, mais comme un discours.
Considérer le fait littéraire comme « discours », c’est contester le caractère central de ce qui
pourrait être considéré comme l’instance créatrice. C’est renoncer au fantasme de l’œuvre
en soi dans sa double acception d’œuvre autarcique et d’œuvre au fond de la conscience
créatrice. C’est replacer les œuvres dans les contextes qui les rendent possibles où elles
sont produites, évaluées, gérées. Comme le montre Maingueneau (2004 : 34) :
Les conditions du dire y traversent le dire et le dire renvoie à ses propres conditions de
production (le statut de l’écrivain associé à son mode de positionnement, les rôles attachés
aux genres, la relation aux destinataires construite à travers l’œuvre, les rapports matériels
et les modes de circulation des énoncés).
Ainsi dit, le texte et le contexte ne sont plus des entités différentes l’une de l’autre. Il
s’instaure entre les deux une réflexivité de sorte que le contenu d’une œuvre est en réalité
traversé par le renvoi à ses conditions d’énonciation qui le légitiment. « Le contexte n’est
plus placé à l’extérieur de l’œuvre, en une série d’enveloppes successives, mais, le texte est
la gestion même de son contexte. Les œuvres parlent effectivement du monde, mais leur
énonciation est partie prenante du monde qu’elles sont censées représenter »
(Maingueneau, 2004 : 35). Au lieu de mettre les œuvres en relation avec les instances fort
éloignées de la littérature (classe sociale, mentalité, événement historique…), réfléchir en
termes de discours nous oblige à porter notre attention sur les abords immédiats du texte
(les supports matériels, sa scène d’énonciation…)
Comme tout énoncé, l’œuvre littéraire implique une situation d’énonciation, ce qui justifie
l’appellation discours littéraire. Mais cette situation d’énonciation ne renvoie pas seulement
aux circonstances de production de l’œuvre (année ou période de production, endroit,
individu créateur.) car, il convient d’appréhender l’œuvre littéraire non dans sa genèse, mais
comme dispositif de communication. En réalité, le texte littéraire est le lieu d’une
communication entre un « dehors » et un « dedans », un « extérieur » et un « intérieur » du
texte. Il est la trace d’un discours où la parole est mise en scène. A partir de ce moment, la
situation d’énonciation devient une situation de communication, c'est-à-dire de mise en
scène de l’énonciation et donc d’interaction. Nous distinguons donc trois scènes qui sont :
la scène englobante, la scène générique et la scénographie.
La scène englobante : elle désigne ce qu’on attend communément par type de discours. Elle
définit le statut des partenaires dans un certain espace pragmatique. Tout énoncé littéraire
se rapporte à une scène englobante littéraire dont on sait en particulier qu’elle permet que
l’auteur soit un pseudonyme et que les faits relatés soient de l’ordre du fictif. La scène
englobante présuppose la posture dans laquelle se situer pour interpréter le discours.
La scène générique : elle renvoie aux genres de discours qui lui-même participe à un niveau
supérieur de la scène englobante. Les conditions d’énonciation attachées à chaque genre
correspondent à autant d’attentes et d’anticipations possibles de ces attentes par l’auteur.
Ces attentes se formulent en termes de circonstances d’énonciation : quels sont les
participants ? Le lieu et le moment requis pour effectuer, par quels circuits passent-ils ?
Quelles normes précises à sa consommation ?
La scénographie : elle désigne la scène sur laquelle le lecteur se voit assigner une place, c’est
une scène narrative construite par le texte. C’est dans la scénographie à la fois condition et
produit de l’œuvre, à la fois dans l’œuvre et ce qui l’apporte que se valident les statuts
d’énonciateurs et de co-énonciateur, le temps, l’espace, à partir desquels se développe
l’énonciation. La scénographie peut s’identifier sur la base de plusieurs indices repérables
dans le texte ou le paratexte, elle n’est pas tenue de se désigner : elle se montre
par définition en excès de toute scène de parole qui serait dite dans le texte. La
scénographie est à la fois cadre et processus, elle se trouve aussi bien en aval de l’œuvre
qu’en amont : c’est la scène de parole que le discours présuppose pour pouvoir être énoncé
et en retour, il doit valider à travers son énonciation même. Enonciation par essence
menacée, l’œuvre littéraire lie en effet ce qu’elle dit à la légitimation des conditions de son
propre dire. La scénographie apparait ainsi à la fois comme ce dont vient le discours et ce
qu’engendre ce discours.
Positionnement de l'écrivain dans le champ littéraire
Objectifs spécifiques:
Conclusion
L’analyse du discours ouvre de manière générale de nouvelles perspectives dans la saisie
du phénomène linguistique. Quelle que soit son orientation, son objet demeure le discours,
c’est-à-dire la combinaison du linguistique et de l’extralinguistique. Pour la littérature, elle
devient le lieu d’appréhension de l’œuvre de fiction comme un tout, une globalité, c’est-à-dire
le « dehors » et le « dedans », le « fond » et la « forme », le « texte » et le « contexte »
comme un ensemble réflexif.