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École Nationale Supérieure des Télécommunications

École Doctorale d’Informatique, Télécommunications et Électronique de Paris

Thèse

Pour obtenir le grade de

Docteur de l’École Nationale Supérieure des Télécommunications


Spécialité : Électronique et Communications

Présentée par

Philippe Hamel

Réflectométrie optique faiblement cohérente


sensible à la phase :
principe et application à l’étude de composants
optiques innovants
Soutenue le 06 Mars 2009 devant le jury

Rapporteurs
Prof. Henri Benisty Institut d’Optique Graduate School, France
Prof. Marc Douay Université des Sciences et Technologies de Lille, France
Examinateurs
Dr. Fetah Benabid University of Bath, Angleterre
Dr. Alfredo De Rossi Thales Research and Technology, France
Dr. Siddarth Ramachandran OFS Laboratories, États-Unis
Directeurs de thèse
Dr. Renaud Gabet TELECOM ParisTech, France
Prof. Yves Jaouën TELECOM ParisTech, France
2
3

Remerciements
Je tiens à remercier l’ensemble des personnes qui m’ont aidé directement ou indirecte-
ment dans la réalisation de mon travail de thèse.

Tout d’abord, je remercie l’école doctorale et le département Comelec de m’avoir offert


un cadre de travail accueillant et agréable. Plus spécialement, les membres du groupe Opto
au sein duquel il a été facile d’évoluer, d’apprendre et de discuter avec d’autres chercheurs.
Merci à Cédric, Didier, Guy et aux autres membres du groupe. Je remercie chaleureuse-
ment mes deux directeurs de thèse, Yves et Renaud, pour leur disponibilité, leur simplicité
et leur convivialité. Je leur dois beaucoup. Merci à Yves de m’avoir offert autant d’opportu-
nités de rencontres et de sujets intéressants et de m’avoir guidé avec clairvoyance et bonne
humeur. Merci à Renaud pour son aide quotidienne précieuse, sa générosité, l’ambiance
très chaleureuse qu’il a su installer et l’aide professionnelle qu’il m’a apportée bien au-delà
de ma thèse.

Merci aussi à tous les stagiaires, thésards et post-docs de mon entourage avec lesquels
j’ai passé d’excellents moments. Ces trois ans et demi ont été l’occasion de nouer des liens
profonds, et que j’espère inaltérables, avec certains d’entre eux. A Vincent pour les longues
discussions, les rigolades et les bonnes bières partagées ; A David pour son intelligence, sa
force de caractère et son dynamisme contagieux ; A Fausto pour sa nature chaleureuse et
son ouverture d’esprit ; A Shifeng pour sa sagacité et sa grande curiosité ; A Malek pour
sa bonhomie et son enthousiasme communicatif ; A Sami pour son anticonformisme et son
éclectisme stimulant ; A Mireille pour sa gentillesse et son inépuisable générosité ; A Maya
pour sa candeur et sa spontanéité euphorisante. Merci à tous les autres, Bruno, Sébastien,
Qing, Charlotte, Manu, Steevy, Damien, Fabrice, Eric, Abderrahman, Hajar, Michael, Ra-
quel, Ali, Michel et ceux que j’oublie et qui ont participé à tous les bons souvenirs associés
à ces années de thèse.

Merci à ma famille pour son soutien indéfectible et essentiel et merci enfin à Émilie
dont la présence à mes côtés, tout au long de cette thèse, a été la clé de mon équilibre
professionnel et de mon épanouissement personnel.
4
5

Résumé
L’objet de cette thèse est l’utilisation de la méthode de réflectométrie optique à faible
cohérence (OLCR) sensible à la phase dans le but de caractériser et d’étudier un ensemble
de composants photoniques innovants. Photoniques car il s’agit de guides d’onde optiques
tels que des fibres optiques micro-structurées, des fibres amplificatrices dopées Erbium, des
fibres multimodes ou encore des guides semi-conducteur micro-structurés. Innovants dans
le sens que leur conception et leurs propriétés font à l’heure actuelle l’objet de recherches
pour améliorer la compréhension de phénomènes physiques inhérents à leurs particularités
ou pour offrir de nouvelles performances utiles dans leurs domaines d’application. Il s’agit
de montrer comment l’OLCR sensible à la phase apporte un grand nombre de réponses qui
aident à mieux appréhender le fonctionnement de ces composants ou les principes théo-
riques qui régissent ce fonctionnement.

Pour commencer, nous définirons un cadre à cette étude par le biais d’une présentation
des grandeurs physiques utiles à sa compréhension mais aussi par un état de l’art non
exhaustif des méthodes de caractérisation optique existantes. L’idée est de mieux cerner
le rôle et les spécificités de la méthode OLCR. Ensuite, nous détaillerons l’OLCR, c’est
à dire, son principe théorique, ses diverses applications ainsi que ses limites théoriques
et pratiques de performances. Enfin, nous présenterons un ensemble de résultats concer-
nant les différents composants étudiés au cours de cette thèse. Nous traiterons, dans un
premier temps, des mesures concernant les fibres optiques avec notamment la mesure du
lien indice/amplification dans une fibre dopée Erbium, l’analyse de l’évolution spatiale des
paramètres d’une fibre micro-structurée ou encore la caractérisation complète des valeurs
de dispersion des modes d’une fibre multimode. Dans un second temps, nous aborderons
la caractérisation de guides membranaires à cristaux photoniques et, en particulier, l’étude
du ralentissement de la lumière et des phénomènes de diffusion dans ces guides. Nous
essaierons, pour chacun des cas présentés, d’établir clairement les enjeux et objectifs de
l’étude avant de conclure l’ensemble par un récapitulatif des travaux effectués et une mise
en perspective de cette thèse.
6
7

Table des matières

Introduction 8

1 Méthodes de caractérisation de composants optiques 13


1.1 Grandeurs physiques utiles . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 14
1.1.1 Atténuation . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 14
1.1.2 Indice matériau, indice effectif et indice de groupe . . . . . . . . . . 14
1.1.3 Temps de groupe et dispersion . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 16
1.1.4 Biréfringence . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 18
1.1.5 Longueur de cohérence . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 20
1.2 Méthodes réflectométriques . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 21
1.2.1 OTDR . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 21
1.2.2 OFDR . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 24
1.2.3 OLCR . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 26
1.3 Autres méthodes . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 29
1.3.1 Temps de Vol . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 29
1.3.2 Modulation de la phase . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 30
1.3.3 Interférométrie en lumière blanche (WLI) . . . . . . . . . . . . . . . 32

2 OLCR sensible à la phase : principe et performances 37


2.1 Théorie de la réflectométrie optique à faible cohérence . . . . . . . . . . . . 37
2.2 Le dispositif expérimental . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 41
2.2.1 Interféromètre faiblement cohérent . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 43
2.2.2 Interféromètre cohérent . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 44
2.2.3 Acquisition . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 44
2.3 Performances du banc OLCR . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 44
2.3.1 Spectrométrie à Transformée de Fourier . . . . . . . . . . . . . . . . 45
2.3.2 Résolution spatiale . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 46
2.3.3 Résolution spectrale . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 49
2.3.4 Mesure du paramètre de dispersion d’une fibre SMF28 . . . . . . . . 50
2.3.5 Mesure de la biréfringence . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 55
2.3.6 Sensibilité du dispositif expérimental . . . . . . . . . . . . . . . . . . 58
8

3 Étude de fibres optiques spéciales 65


3.1 Lien indice/amplification dans une fibre dopée Erbium . . . . . . . . . . . . 66
3.1.1 Principes théoriques . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 66
3.1.2 Mesures . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 71
3.2 Évolution longitudinale des propriétés d’une fibre à cristaux photoniques à
cœur plein . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 77
3.2.1 Introduction et contexte . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 77
3.2.2 Mesures et résultats . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 78
3.3 Dispersion des modes de fibres optiques faiblement multimodes . . . . . . . 83
3.3.1 Introduction et contexte . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 83
3.3.2 Principe du guidage multimodale . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 84
3.3.3 Modes LP . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 86
3.3.4 Caractérisation des modes : phase, temps de groupe et dispersion . . 89
3.3.5 Caractérisation des modes : cartographie temps/longueur d’onde des
réflexions . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 100

4 Étude de guides membranaires à cristaux photoniques 107


4.1 Introduction . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 107
4.2 Principes théoriques . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 108
4.2.1 Cristaux Photoniques . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 108
4.2.2 Zone de Brillouin . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 111
4.2.3 Cône de lumière et pertes du guide . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 114
4.3 Caractéristiques des guides et intérêt de l’étude . . . . . . . . . . . . . . . . 116
4.4 Mesures . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 119
4.4.1 Traitement "classique" . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 119
4.4.2 Cartographies temps/longueur d’onde . . . . . . . . . . . . . . . . . 123
4.4.3 Cavités et temps de vie des photons . . . . . . . . . . . . . . . . . . 127

Conclusion 130

Bibliographie 143
9

Introduction

Le domaine des télécommunications optiques demeure aujourd’hui au cœur de nom-


breuses recherches, ceci, notamment, dans le but de concevoir de nouveaux guides d’ondes
optiques, passifs ou actifs, offrant des propriétés innovantes et utiles aux réseaux pour en
améliorer les performances. Des avancées technologiques récentes, telles que l’utilisation des
cristaux photoniques [1] dans les fibres optiques [2] ou dans les guides à semi-conducteur
[3], ont ouvert la voie vers la création de nouvelles applications ou vers l’amélioration d’ap-
plications existantes. La conception de sources supercontinuum fibrées, de fibres infiniment
monomodes, de systèmes intégrables de compensation de dispersion ou encore de lignes à
retard optique progresse à l’heure actuelle par l’intermédiaire de ces avancées. Par ailleurs,
des technologies existantes ont été réexploitées différemment pour en élargir les champs
d’application. Le cas des fibres optiques multimodes utilisées aujourd’hui aussi bien pour
des applications de compensation de dispersion dynamique dans un réseau optique qu’à
des fins d’applications dans le secteur biomédical en est le plus parfait exemple.

Tous les composants optiques tels les fibres optiques, les guides semi-conducteur ou
encore les guides polymères font ainsi l’objet d’évolutions qui suscitent un besoin évident
en terme d’outils théoriques mais aussi en terme de mesure et de caractérisation. En effet,
d’un point de vue pratique, il est essentiel de pouvoir utiliser des techniques d’analyse
suffisamment précises pour comprendre en détail l’impact des processus de fabrications
sur les caractéristiques et propriétés des composants photoniques. Dans certains cas, cette
analyse peut même aboutir à une rétroaction visant à redéfinir et/ou améliorer les pro-
cessus de fabrication. D’un point de vue plus fondamental, il est aussi indispensable de
pouvoir comprendre et assimiler tous les mécanismes physiques et théoriques qui régissent
le fonctionnement de ces composants. Bien souvent situées au niveau d’état de l’art, les
propriétés de ces composants et la maîtrise de celles-ci font l’objet d’un questionnement
auquel l’apport d’un outil de mesure performant fourni des réponses ou des voies d’expli-
cation.

Il est fondamental de pouvoir faire appel à des techniques de mesures capables d’ex-
traire toutes les propriétés d’un composant photonique afin de maîtriser les processus de
fabrication et les caractéristiques physiques du composant. En ce sens, la réflectométrie
optique à faible cohérence (OLCR) sensible à la phase offre une étendue très vaste de pos-
sibilités et une très grande capacité d’adaptation à la plupart des composants photoniques.
Cette méthode est non destructive, rapide, polyvalente et offre de bonnes résolutions dans
10

les domaines temporels et spectraux. Cela en fait l’une des plus adaptée à l’étude de com-
posants photoniques innovants.

L’objectif de cette thèse est de présenter aussi bien les études menées que les résultats
obtenus, par le biais de l’utilisation d’un dispositif OLCR sensible à la phase exclusif, sur
un ensemble de guides d’ondes issus de recherches actuelles dans le domaine photonique.
Il s’agit à la fois d’une approche visant à mieux comprendre des phénomènes physiques
connus dans certains composants et d’une approche ayant pour but de découvrir des méca-
nismes et des propriétés physiques inhérents à des composants en cours de développement.

Ce travail se compose de quatre chapitres. Le premier chapitre définit un cadre à cette


thèse en introduisant toutes les grandeurs physiques utiles à la compréhension de ce travail
et en présentant un ensemble (non exhaustif) de techniques de mesures des composants
optiques pour mieux y situer l’OLCR. Le second chapitre décrit plus précisément la tech-
nique OLCR, ses particularités, ses capacités ainsi que les procédés de mesure et les limites
propres au dispositif mis en œuvre au cours de cette thèse. Le troisième chapitre montre un
ensemble de résultats de caractérisations réalisées sur différentes familles de fibres optiques
spéciales. Le quatrième et dernier chapitre s’attarde sur des résultats obtenus cette fois sur
d’autres types de composants photoniques pour lesquels l’OLCR a été un outil puissant
d’investigation.

Lors du premier chapitre nous définissons des paramètres clés tels que, notamment,
le temps de groupe, la dispersion, la cohérence... Il s’agit à chaque fois d’une description
simple qui vise à permettre de mieux comprendre l’intérêt de la mesure et la connaissance
de ces paramètres dans des composants optiques. La présentation des différentes techniques
de mesure inclut des techniques dites réflectométriques, comme l’OLCR. Les points com-
muns de ces techniques sont de n’utiliser qu’un seul accès du composant et de permettre
une mesure des défauts localisés. Les autres techniques font appel à des principes de mesure
plus variés. Nous verrons enfin qu’un des avantages majeurs de l’OLCR est justement de
concilier la plupart des possibilités de mesure de toutes ces autres techniques.

Au cours du second chapitre, nous approfondissons les principes théoriques qui fondent
la technique OLCR, c’est à dire, le cheminement de l’interférométrie à la réflectométrie
à faible cohérence. Nous établissons les limites des performances du système en terme de
précision sur les différentes mesures (biréfringence, dispersion), de résolution (spatiale et
spectrale), de dynamique ou encore de sensibilité. Cette approche permet, de plus, de pré-
senter le déroulement standard de certaines mesures telles que celle du temps de groupe et
de la biréfringence pour lesquelles nous expliquons chaque étape, qu’elle soit pratique ou
théorique.

Le troisième chapitre est l’occasion de présenter l’ensemble des résultats obtenus sur
des fibres optiques. Différentes thématiques y sont abordées comme l’évolution spatiale des
propriétés d’une fibre micro-structurée (biréfringence et dispersion), la mesure de l’indice
de groupe et de la dispersion dans une fibre dopée Erbium en fonction de la puissance du
11

signal de pompe ou encore l’étude complète des dispersions des différents modes de fibres
légèrement multimodes. Dans chaque cas, nous montrons en quoi la technique OLCR se
révèle être un outil performant et bien adapté à la mesure en question.

Le quatrième chapitre porte sur l’étude d’autres types de guide. Il s’agit principa-
lement de guides à cristaux photoniques membranaires. Nous voyons comment l’OLCR
permet d’extraire avec une grande précision des paramètres fondamentaux de ces guides
mais aussi d’observer des phénomènes encore relativement mal expliqués pour lesquels la
mesure devrait amener à une meilleure compréhension et, par suite, à l’établissement de
modèles théoriques mieux appropriés. Là encore, les spécificités de la technique OLCR,
notamment pour la mesure de temps de groupe très élevés conjointement à l’observation
d’effets de diffusion dans des guides de quelques millimètres de long, s’avèrent adéquates
et utiles.

Pour terminer, nous établissons un bilan des recherches effectuées et des différents
résultats obtenus en essayant d’inclure ce travail dans une perspective à plus long terme
d’utilisation de la méthode OLCR dans la recherche sur les composants optiques.
12
13

Chapitre 1

Méthodes de caractérisation de
composants optiques

Ce chapitre a pour objectif d’introduire le travail de cette thèse. Nous présentons, ici,
un ensemble de techniques de caractérisation de composants optiques afin de mieux situer
l’OLCR au sein des autres méthodes en terme de grandeurs physiques mesurables et de
performances. Il ne s’agit pas d’une revue exhaustive des méthodes existantes, celle-ci se-
rait pratiquement sans limite, mais d’une aide à la définition des spécificités de l’OLCR
dans un contexte riche de techniques de caractérisation.

Dans un premier temps, il est nécessaire de définir quelques unes des grandeurs phy-
siques utiles à la compréhension de cette thèse. C’est l’objet de la première section au cours
de laquelle nous définissons des notions telles que : l’atténuation, les indices, le temps de
groupe, la dispersion, la biréfringence et la longueur de cohérence.

Les deux sections suivantes présentent les méthodes de caractérisation suivant deux
catégories :
– Tout d’abord, les méthodes dites réflectométriques, dont le cheminement historique
permet de mieux comprendre comment et pourquoi l’OLCR est apparu. Nous pré-
sentons donc l’OTDR et l’OFDR et aussi, très succinctement, la technique OLCR
qui sera abordée plus en profondeur, dans le chapitre 2.
– Ensuite, d’autres méthodes diverses de caractérisation de composants optiques telles
que : la Phase-shift, l’interférométrie en lumière blanche ou le temps de vol. Ces
méthodes sont complémentaires des méthodes réflectométriques dans le sens qu’elles
offrent des performances différentes ou permettent la caractérisation d’autres pro-
priétés.

Pour chacune des méthodes présentées, nous décrivons simplement son principe théo-
rique et expérimental avant d’établir quelques unes de ses limites techniques. Et pour
terminer ce chapitre, un tableau récapitulatif permet de situer l’OLCR dans une vue d’en-
semble.
14 1. Méthodes de caractérisation de composants optiques

1.1 Grandeurs physiques utiles


Cette section présente quelques unes des grandeurs physiques essentielles à la compré-
hension de cette thèse.

1.1.1 Atténuation
La notion d’atténuation présentée ici décrit la décroissance de l’intensité d’un signal
optique au cours de sa propagation dans un guide d’onde. Ses origines sont multiples, les
principales étant les suivantes :
– La diffusion Rayleigh due aux imperfections dans la structure du guide ou aux va-
riations microscopiques de densité dans le matériau guidant. Il a été établit une
dépendance de ses pertes à la longueur d’onde en λ−4 .
– L’absorption par le matériau. L’énergie du signal est absorbée par la vibration des
liaisons atomiques du matériau (absorption intrinsèque).
– L’absorption par les ions OH − . Principalement présents dans les fibres optiques,
les ions hydroxyles peuvent, en fonction de leur concentration, créer une absorption
supplémentaire significative autour de la longueur d’onde de 1, 38µm.
– Les pertes par rayonnement. Dans certains guides, une partie de l’énergie du mode de
propagation peut être "mal confinée" et fuir vers l’extérieur ajoutant une contribu-
tion aux pertes du guide. Les imperfections dans la géométrie du guide, les courbures
ou micro-courbures influent considérablement sur ces pertes.

Toutes ces sources d’atténuation entraînent une décroissance exponentielle de la puis-


sance du signal lors de sa propagation dans le guide de la forme :

Ps = Pe e−αL (1.1)

où Ps est la puissance de sortie, Pe la puissance d’entrée, L la longueur du guide et α


le coefficient d’atténuation exprimé en cm−1 . Dans une fibre optique nous utilisons cou-
ramment l’atténuation linéique exprimée en dB.km−1 , coefficient dont la dépendance à la
longueur d’onde peut être forte.

1.1.2 Indice matériau, indice effectif et indice de groupe


Indice matériau
L’indice matériau n décrit une propriété physique intrinsèque du matériau liée à sa
structure atomique. D’un point de vue théorique, nous utilisons souvent cet indice, dans
le cas (abstrait) d’une onde plane parfaitement monochromatique, pour décrire les lois de
l’optique géométrique (par exemple : la loi de Snell-Descartes). Il s’agit, dans ce cas, d’un
indice de phase, i.e. un indice qui détermine la vitesse de la phase comme étant c/n. Cette
vitesse est en fait la vitesse des crêtes lors de la propagation d’un train d’onde infini comme
nous pouvons le voir sur la figure 1.1.
15

TF
t
λ
λ0
Spectre en
longueur d’onde Vitesse de phase
Figure 1.1 – Description schématique de la vitesse de phase dans un guide d’onde
TF : Transformée de Fourier

Par ailleurs, dès lors que nous quittons cette approche monochromatique, il faut prendre
en compte sa dépendance à la longueur d’onde. Cette dépendance est propre à chaque
matériau et peut être, dans certains cas, décrite par une loi mathématique. C’est le cas
notamment de la silice pour laquelle la loi de Sellmeier établit la dépendance de l’indice
matériau à la longueur d’onde sous la forme :
3
X Ai λ2
n2 (λ) = 1 + (1.2)
i=1
λ2 − li2

où les Ai sont des constantes relatives à la force d’oscillation du matériau et les li sont les
longueurs d’onde de résonance du matériau. Précisons que ces coefficients sont dépendants
du niveau de dopage de la silice i.e. ils évoluent avec la fraction de Germanium, Aluminium
ou autres dopants présents dans la silice. A titre d’exemple, une détermination précise pour
la silice pure établie en 1965 par I.H Malitson [4] donne les coefficients :

A1 = 0.6961663 (1.3)
A2 = 0.4079426
A3 = 0.8974794

et

l1 = 0.0684043 (1.4)
l2 = 0.1162414
l3 = 9.8961610

La formule 1.2 est couramment utilisée puisque la silice est le composant le plus répandu,
à l’heure actuelle, dans la fabrication des fibres optiques.
16 1. Méthodes de caractérisation de composants optiques

Indice effectif
L’indice effectif décrit l’indice "vu" par le mode qui se propage à l’intérieur d’un guide
d’onde. Il dépend donc de chacun des indices matériaux des milieux qui composent le guide.
Par exemple, pour une fibre à saut d’indice, il est borné comme suit :

ngaine < nef f ≤ ncoeur (1.5)

où ngaine et ncoeur sont respectivement les indices de la gaine et du cœur de la fibre optique.
Cet indice dépend donc, lui aussi, d’une manière complexe, de la longueur d’onde. En effet,
la répartition du champ dans le guide est fonction de la longueur d’onde et l’indice vu par
le mode évolue différemment suivant la géométrie du guide i.e. son profil d’indice.

Indice de groupe
L’indice de groupe est relié à l’indice effectif par la relation :

dnef f
ng = nef f + λ (1.6)

Cet indice, par opposition à un indice de phase, caractérise la vitesse de groupe c/ng i.e.
la vitesse à laquelle se propage l’énergie d’une impulsion dans le guide comme nous le
voyons sur la figure 1.2 décrivant la propagation d’une impulsion dans un guide. C’est
donc cet indice qui est le plus souvent observé expérimentalement et mesuré à partir d’une
détermination du temps de propagation dans le guide dit temps de groupe.

∆λ TF t
λ
λ0
Spectre en
longueur d’onde Vitesse de groupe

Figure 1.2 – Description schématique de la vitesse de groupe dans un guide d’onde

1.1.3 Temps de groupe et dispersion


Temps de groupe
Le temps de groupe est le temps que met une onde à parcourir l’ensemble d’un guide.
Connaissant l’indice de groupe ng d’un guide, nous pouvons déterminer simplement le
17

temps de groupe τg par la relation :

L ng
τg = (1.7)
c

où L est la longueur du guide et c la vitesse de la lumière dans le vide.

Dispersion
La dispersion chromatique est le phénomène provoqué par le fait que chaque longueur
d’onde se propage à une vitesse différente dans un guide d’onde engendrant l’élargissement
temporel d’une impulsion. La figure 1.3 présente les différents effets de la dispersion en
fonction de sa valeur.

∆τ Si D < 0
dispersion normale
t

Propagation dans
∆τ
t Si D > 0
un guide d’onde
dispersion anormale

t
λ

Figure 1.3 – Description schématique de l’effet de la dispersion dans un guide d’onde

Cette dispersion s’explique puisque, comme nous l’avons vu précédemment, l’indice de


groupe ng est toujours fonction de la longueur d’onde et que, par conséquent, le temps de
groupe l’est aussi [5, 6].

La dispersion chromatique engendre une dépendance de la constante de propagation à


la fréquence. Cette constante peut être développée en série de Taylor autour de la pulsation
centrale ω0 du mode de propagation dans le guide et s’écrire :

1
β(ω) = β0 + β1 (ω − ω0 ) + β2 (ω − ω0 )2 + ... (1.8)
2

où :

dn β
βn = [ ]ω=ω0 (1.9)
dω n
18 1. Méthodes de caractérisation de composants optiques

Les paramètres βn sont reliés à l’indice de groupe par les relations suivantes :

1 dnef f ng
β1 = [nef f + ω ]= (1.10)
c dω c

1 dnef f d2 nef f ω d2 nef f


β2 = [2 +ω ] ' (1.11)
c dω dω 2 c dω 2

β1 correspond au temps de groupe normalisé par la longueur du guide et β2 correspond à la


dispersion exprimée en ps2 .km−1 . Nous utilisons cependant plus couramment (en particu-
lier pour les fibres optiques) la dispersion chromatique sous la forme D en ps.nm−1 .km−1
où :

dβ1 1 dτg
D= = (1.12)
dλ L dλ

où L est la longueur du guide exprimée en km, λ la longueur d’onde exprimée en nm et


τg le temps de groupe exprimé en ps.

D et β2 sont deux façons différentes d’exprimer la dispersion avec :

2πc
D=− β2 (1.13)
λ2

Finalement, l’impact de la dispersion sur l’élargissement temporelle d’une impulsion ∆τ se


traduit par la relation :

∆τ = L D ∆λ (1.14)

où ∆λ et la largeur spectrale de cette impulsion (cf 1.3).

1.1.4 Biréfringence
L’approche scalaire est, la plupart du temps, envisagée pour décrire les phénomènes
relatifs au fonctionnement des composants étudiés. Cependant, la réalité du champ est
vectorielle et il faut en tenir compte pour expliquer ce qu’est la biréfringence et comment
elle peut être mesurée.

Il faut donc considérer, dans un premier temps, que le champ peut être polarisé linéai-
rement ou elliptiquement et, dans un second temps, que dans n’importe quel guide non
parfaitement isotrope, le champ qui se propage subit les effets de l’anisotropie du guide.
Pour mieux comprendre ces effets, il faut décomposer le champ, lors de sa propagation,
19

suivant deux polarisations linéaires, correspondant aux axes propres du guide. Nous consi-
dèrons alors que, suivant ces deux axes, deux "modes" de polarisation se propagent avec
deux indices effectifs nef f différents. Cet effet induit donc, tout comme la dispersion, une
déformation temporelle du signal qui se propage.

La biréfringence de phase Bph (souvent simplement appelée biréfringence) est le facteur


qui rend compte de la différence entre les deux indices effectifs correspondant aux deux
axes propres. Elle est donc donnée par :

Bph =| nyef f − nxef f | (1.15)

où nxef f et nyef f sont les indices effectifs suivant les deux axes propres de polarisation du
guide.

Dans la pratique, la grandeur mesurée (au moins dans le cas de l’OLCR) est plus sou-
vent la biréfringence de groupe définie par :

Bg =| nyg − nxg | (1.16)

Celle ci est, en effet, directement mesurable au travers de la différence de temps de groupe


entre les deux modes (DGD). Cela étant, la biréfringence de groupe, peut être, dans la
plupart des cas, assimilée à la biréfringence de phase [7]. Précisons aussi qu’une autre gran-
deur utile dans le cadre de l’étude de la biréfringence est celle de la longueur de battement
LB définie par :

λ̄
LB = (1.17)
Bph

où λ̄ est la longueur d’onde centrale de la source et Bph la biréfringence.

LB

Figure 1.4 – Illustration de la longueur de battement dans une fibre optique pour une
polarisation initiale linéaire

Cette longueur de battement est une manifestation directe de la biréfringence puisqu’il


s’agit de la distance que parcours une onde polarisée quelconque dans le guide lorsqu’elle
passe par tous les états de polarisation avant de revenir à l’état initial. Cette longueur
20 1. Méthodes de caractérisation de composants optiques

est d’autant plus courte que la biréfringence est grande. La figure 1.4 en présente une
description simplifiée dans une fibre optique et pour un état de polarisation initial linéaire.

1.1.5 Longueur de cohérence


Le premier point important est le fait que, dans n’importe quel système interféromè-
trique, deux signaux provenant d’une même source ne pourront interférer que dans les
limites d’une zone de cohérence appelée longueur de cohérence de la source. Pour une
différence de chemin optique au delà de la longueur de cohérence, les deux signaux s’ad-
ditionnent simplement alors que dans les limites de la longueur de cohérence apparaissent
des franges d’interférence dont le contraste est déterminé par la fonction de cohérence de
la source :

Γ(τ ) ≡< E(t + τ )E(t) >T (1.18)

où E est le champ défini sur un intervalle de temps T .

Cette fonction n’est autre qu’une fonction d’auto-corrélation dont il est connu, d’après
le théorème de Wiener-Khintchine, qu’elle est directement reliée à la transformée de Fou-
rier de la densité spectrale de puissance S par la relation :

S(ν) = T F [Γ(t)] (1.19)

Cette relation est toujours valable pour une source d’énergie finie et est à la base du principe
de l’OLCR comme nous le verrons ultérieurement. Elle amène au second point important
qui est que la longueur de cohérence d’une source est toujours inversement proportionnelle
à la largeur spectrale de celle-ci.

Phase et amplitude du champ complexe sont corrélées à deux positions différentes z1


et z2 ou à deux instants différents t1 et t2 si la fonction d’auto-corrélation est non nulle,
c’est à dire si nous nous situons dans le domaine de cohérence de la source. Cela s’explique
par le fait qu’une source réelle peut être décomposée en une somme continue de chacune de
ces composantes de Fourier dont la superposition entraîne des fluctuations irrégulières de
la phase et de l’amplitude du champ. La rapidité de ces fluctuations dépend de la largeur
spectrale ∆ν de la source.

Nous considèrons que l’amplitude complexe du champ reste substantiellement constante


pendant un intervalle de temps ∆tc dit temps de cohérence où les changements de phase
entre chaque composante de Fourier de la source restent nettement inférieurs à 2π. C’est
dans cet intervalle de temps caractéristique que la phase et l’amplitude de deux parties du
champs ayant été émis par la même source puis séparés peuvent être dites corrélées. Il est
lié à la largeur spectrale par la relation :

∆tc ∼ 1/∆ν (1.20)


21

Nous parlons plutôt de longueur de cohérence car nous pouvons relier ce temps de co-
hérence à une longueur, au sein de laquelle, la source séparée puis recombinée produit des
interférences. Elle est définie par la relation :

c λ̄2
Lc = c∆tc ∝ = (1.21)
∆ν ∆λ

où c est la vitesse de la lumière dans le vide, λ̄ est la longueur d’onde moyenne de la source
et ∆λ sa largeur spectrale.

1.2 Méthodes réflectométriques


Nous avons vu, au cours de la section précédente, les grandeurs physiques qui défi-
nissent les principales propriétés de composants optiques. Voyons, à présent, quelques unes
des méthodes qui permettent la mesure et l’analyse de ces propriétés.

Les méthodes dites réflectométriques ont pour caractéristique et avantage d’être non
destructive et de ne faire appel qu’à une extrémité du composant sous test ("single end").
Elles sont par conséquent très utilisées dans des situations de test de réseaux optiques
existants en plus de leur utilisation dans le domaine de la recherche.

1.2.1 OTDR
Origines et principe de la méthode

La réflectométrie temporelle dite Optical Time Domain Reflectometry (OTDR) a été


proposée dans les années 1980 [8, 9, 10] comme méthode de mesure et de localisation des
pertes et défauts dans les fibres optiques. Variante de la technique dite de "pulse echo"
utilisée pour déterminer les coupures dans les câbles coaxiaux, c’est une des premières mé-
thodes de caractérisation de ce type qui est encore aujourd’hui largement employée.

Le principe de la mesure [11, 12] repose sur l’utilisation d’impulsions très courtes injec-
tées dans le Composant Sous Test (CST) pour ensuite analyser l’intensité du signal réfléchi
par ce composant en fonction du temps.

Il est connu que toute structure guidante réelle diffuse nécessairement une partie de la
lumière qui s’y propage et, ce, majoritairement du fait de la diffusion Rayleigh. Une partie
de cette lumière diffusée peut se trouver à son tour guidée par la structure dans le sens
de propagation opposé, nous parlons de rétro-diffusion. Si nous considérons la diffusion
du guide homogène sur toute sa longueur, alors, l’intensité de celle-ci décroît en fonction
de la position suivant une loi exponentielle établie lors de la section précédente 1.1. Nous
22 1. Méthodes de caractérisation de composants optiques

pouvons donc mesurer les pertes du guide par le biais de la mesure de la puissance rétro-
diffusée de la lumière injectée.

En effet, l’énergie du signal optique à la distance z de l’entrée de la fibre peut être


exprimée :
Rz
E(z) = E(z0 )e− 0 α(l)dl
(1.22)

où E0 représente l’énergie de l’impulsion à l’entrée du guide, α(l) représente les pertes


locales du guide en l. Sur un intervalle dz une partie de l’énergie est diffusée. Une partie
de cette énergie dEd , proportionnelle aux pertes par diffusion αd (z), est rétro-diffusée et
s’exprime :
Rz
dEd = αd (z)E(z0 )e− 0 α(l)dl
dz (1.23)

Seule une partie, incluse dans la fraction S(z) et déterminée par l’angle solide d’acceptance
(définissant une cône dans lequel les rayons vont être guidés en sens inverse) se propage
vers l’entrée du guide sous la forme :
Rz
dEp = S(z)αd (z)E(z0 )e− 0 α(l)dl
dz (1.24)

Au final, nous mesurons la puissance optique rétro-diffusée le long du guide sous la


forme précédemment exprimée 1.1. Cette formule peut être exprimée en fonction du temps
sachant que la vitesse de propagation dans le guide est c/ng :

P (t) = P (0)e−αtotal t (1.25)

En plus de cette rétro-diffusion, chaque défaut ponctuel, face clivée ou connecteur


introduit une réflexion localisée (réflexion de Fresnel...), visible dans le signal OTDR dès
lors que la dynamique de mesure est suffisante. Ces réflexions peuvent ensuite être localisées
précisément en mesurant le temps qui les sépare de la réflexion sur la face d’entrée du guide
optique testé.

Dispositif expérimental et valeurs clés


La figure 1.5 présente une version simplifiée du dispositif expérimental utilisé pour une
mesure OTDR. Un laser impulsionnel ou modulé en amplitude émet des impulsions qui
passent par un dispositif de couplage avant d’être injectées dans le CST. Le signal rétrodif-
fusé et/ou réfléchi traverse à nouveau le coupleur pour être mesuré par un photo-détecteur
rapide. Le signal électrique issu du photo-détecteur est ensuite analysé à l’oscilloscope dont
23

la synchronisation est donnée par la fréquence de répétition des impulsions laser. Nous ob-
servons donc, sur l’oscilloscope, l’évolution de l’intensité du signal réfléchi en fonction du
temps.

CST
50/50
Laser impulsionnel
P
Trigger

Signal rétrodiffusé
t

Photo−détecteur
P
Signal électrique

t
Signal optique
Oscilloscope

Figure 1.5 – Schéma de principe d’un dispositif expérimental de mesure OTDR

La durée des impulsions joue un rôle primordial dans la détermination de la résolution


spatiale du dispositif. En effet la résolution spatiale est donnée par :

∆z = ∆t × c/2ng (1.26)

où ∆t est la durée de l’impulsion, c la vitesse de la lumière et ng l’indice de groupe du


CST. Nous considérons ici que le sensibilité et la rapidité du détecteur n’interviennent pas
dans ces propriétés bien que les limites de performances en dépendent aussi. Il faut aussi
considérer que plus nous augmentons la bande passante du système de détection, plus le
niveau de bruit de la détection augmente. De plus, l’énergie rétro-diffusée diminue avec la
durée des impulsions et la longueur maximum du CST est fixée par le taux de répétition
des impulsions et par leur puissance. Pour toutes ces raisons, le dispositif OTDR est le
fruit d’un équilibre entre ces différents paramètres conduisant à un compromis résolution
spatiale/dynamique [13].

Les systèmes OTDR récents utilisent des photodiodes à avalanche de bande passante de
l’ordre de 1 à 5GHz qui mesurent le signal optique produit par des trains d’impulsions de
quelques ns de durée à la longueur d’onde 1, 3µm ou 1, 5µm et rétrodiffusé par le CST. Ils
peuvent atteindre des résolutions spatiales de quelques cm pour une dynamique de mesure
de l’ordre de 50dB [14, 13]. Les OTDR sont aussi utilisés couramment dans des solutions
commerciales (Agilent, Anritsu, JDSU...) de maintenance de réseaux avec des dispositifs
compacts aux résolutions spatiales de l’ordre du mètre.
24 1. Méthodes de caractérisation de composants optiques

Pour finir, il est à noter certaines évolutions apportées au dispositif OTDR, dans le but
d’améliorer sa résolution spatiale, ont en fait conduit a développer une forme d’OLCR tel
que nous l’étudierons ultérieurement [15, 16, 17].

1.2.2 OFDR
Origines et principe de la méthode

L’Optical Frequency Domain Reflectometry (OFDR) a aussi été introduite dans les
années 1980 [18, 19] pour mesurer et localiser les pertes dans les fibres optiques. Sa réso-
lution spatiale est meilleure que celle de l’OTDR mais son dispositif expérimental est plus
complexe et plus sensible au bruit du fait du système interférentiel.

Le principe de la mesure [19] consiste, dans un premier temps, à séparer en deux un


signal optique cohérent et continu modulé en fréquence. Une des deux parties de ce signal
est injectée dans le CST dans ce que nous appellons le bras de mesure. Le signal réflé-
chi et/ou rétrodiffusé est alors mélangé avec le signal optique transmis directement dans
l’autre bras du système (le bras de référence).

Le mélange entre les deux signaux produit un battement dont la fréquence permet de
déterminer la position dans le CST alors que son amplitude permet de déterminer l’ampli-
tude de la réflexion ou de suivre la décroissance du signal dans le CST et donc de connaître
les pertes. Le signal de battement est, la plupart du temps, enregistré dans le domaine
spectral par un analyseur de spectre électrique puis, converti au domaine temporel par
transformation de Fourier. L’information obtenue est finalement l’intensité du signal rétro-
diffusé le long du guide en fonction du temps (i.e de la position dans le guide).

Considérons l’amplitude complexe du champs émis par la source pendant un temps T


[20], modulé en fréquence par un signal rampe, sous la forme :

A0 (t) =| A0 | exp (j2π[ν0 + (γ/2)t]t) (1.27)

où A0 est une amplitude constante, γ = ∆f /T la pente de la rampe de fréquence appliquée


au signal optique et ∆f l’intervalle de fréquence couvert par la modulation. La fréquence
instantanée du signal est donc ν0 + γt. Chaque réflexion dans le guide engendre un signal
retour similaire à A0 (t) mais retardé d’un temps correspondant à l’aller-retour dans le CST
depuis l’entrée du guide jusqu’à l’origine de cette réflexion.

Nous faisons donc interférer une somme de signaux retardés d’un temps τm avec le
signal transmis directement pour produire un signal d’interférence du type :

M
X
I(t) ∼ [| rm |2 +2 | rm | cos(2πγτm t − Φm )] (1.28)
m=1
25

où rm , τm et Φm sont respectivement l’amplitude, le retard et le déphasage générés par


la m-ième réflexion. Chaque réflexion laisse donc une trace dans le spectre à la fréquence
fm = γτm correspondant à son retard i.e. à sa position dans le CST. La position et
l’amplitude relative à chaque réflexion sont alors obtenues après traitement numérique par
transformée de Fourier.

Dispositif expérimental et valeurs clés


La résolution spatiale ∆z, définie comme la distance minimale séparant deux réflexions
pouvant être résolues, est ici déterminée principalement par l’intervalle de fréquences
∆f ∼ c∆λ/λ2 couvert par la source lors d’un balayage à travers la relation :
c
∆z ' (1.29)
2ng ∆f

où c est la vitesse de la lumière dans le vide et ng l’indice de groupe du CST.

CST
50/50
Laser
f
Signal retrodiffusé

t Miroir
P

Photo−détecteur Signal électrique


f Signal optique
A.S.E.

Figure 1.6 – Schéma de principe d’un dispositif expérimental de mesure OFDR


A.S.E : Analyseur de Spectre Electrique

La figure 1.6 présente un schéma de principe du dispositif expérimental de mesure


OFDR. Le laser modulé en fréquence par un signal de rampe est divisé en deux (ici par un
coupleur optique) puis réfléchi par un miroir dans le bras de référence et par les défauts
potentiels du CST dans le bras de mesure. Les deux parties se recombinent dans le coupleur
et les interférences sont enregistrées dans le domaine spectral par un Analyseur de Spectre
Électrique (ASE). Le traitement numérique du signal (moyennes, filtrage, transformation
de Fourier) effectué par ordinateur conduit à l’obtention d’une intensité réfléchie en fonc-
tion de la position dans le CST.
26 1. Méthodes de caractérisation de composants optiques

Pour améliorer le rapport signal/bruit, les dispositifs les plus performants utilisent une
détection équilibrée (dont nous verrons l’utilité dans la section 1.2.3) où encore un système
de détection synchrone [21]. L’excursion de mesure est restreinte en comparaison avec
l’OTDR. Elle est liée principalement à la résolution sur la fréquence optique (dégradée par
le bruit sur la rampe). L’état de l’art des dispositifs OFDR récents [22, 23], qui font appel à
des lasers accordables sur un intervalle en longueur d’onde de l’ordre de 40nm, montre des
dynamiques de mesure d’environ 60dB pour une résolution spatiale de quelques dizaines
de µm sur des fibres allant jusqu’à la cinquantaine de mètres.

1.2.3 OLCR
Origines et principe de la méthode

La technique dite de réflectométrie optique à faible cohérence (OLCR) est apparue à


la fin des années 1980 [24]. Offrant de multiples possibilités de caractérisation de guides
optiques dès son origine [25], elle s’est encore diversifiée par la suite comme nous le verrons
ultérieurement.

Elle a tout d’abord été conçue, à l’instar de l’OTDR ou l’OFDR, comme technique de
mesure des pertes et défauts le long d’un guide d’onde optique. Puis, grâce à des dispositifs
expérimentaux capable d’extraire l’information sur la phase, de nouvelles possibilités en
terme d’étude et de mesure de composants optiques sont apparues.

La différence entre un OLCR "conventionnel" et un OLCR sensible à la phase provient,


comme son nom l’indique, de la capacité ou non à extraire la phase du réflectogramme. La
plupart des systèmes se limitent, en effet, à une mesure de l’enveloppe de ce réflectogramme
et peuvent donc déterminer les pertes, les défauts localisés et les inhomogénéités d’indice
là où l’OLCR sensible à la phase est capable de déterminer précisément temps de groupe
et dispersion du guide en plus des paramètres précédents.

La méthode permet donc, aujourd’hui, d’extraire un ensemble de propriétés des com-


posants optiques et a pu être déjà appliquée à de nombreuses caractérisations telles que,
la modulation d’indice dans un réseau de Bragg [26], les variations d’indice complexe dans
un laser DFB [27], le coefficient de couplage d’une cavité en anneau [28] ou encore aussi la
dispersion chromatique et la biréfringence d’une fibre micro-structurée [29].

Le principe de base [30] repose sur l’utilisation d’un interféromètre à deux ondes (le
plus souvent de Michelson) où le CST fait office d’élément réfléchissant dans l’un des deux
bras. La particularité de cet interféromètre est l’utilisation d’une source large bande dite
"faiblement cohérente" dans le but d’obtenir une très bonne résolution spatiale.

Une partie de la source est réfléchie sur un miroir mobile dans le bras que nous appellons
bras de référence alors que l’autre partie est réfléchie par les réflexions sur ou dans le CST,
dans le bras dit de mesure. Le miroir du bras de référence est translaté de façon à faire
27

coïncider le chemin optique provenant de la réflexion sur le miroir avec le chemin optique
provenant d’une réflexion dans le CST. A chaque coïncidence entre deux chemins optiques,
un système de franges d’interférences est produit. La coïncidence dont nous parlons ici
est délimitée par la longueur de cohérence de la source, d’où l’utilisation d’une source
faiblement cohérente (cf subsection 1.1.5).

Figure 1.7 – Exemple de réflectogramme en amplitude obtenu lors d’une caractérisation OLCR
d’un laser DFB

Dans le cas général, pour caractériser un composant à l’OLCR, nous enregistrons l’in-
tensité du signal d’interférence en fonction de la position du miroir comme nous pouvons
le voir sur l’exemple de caractérisation présenté sur la figure 1.7. Cet enregistrement est
appelé interférogramme ou réflectogramme. Cet interférogramme (ici en module) a été en-
registré lors de la caractérisation d’un laser DFB et présente toutes les sources de réflexions
et de pertes dans celui-ci ainsi que leur localisation respective dans le composant.

Dans le cas d’un OLCR sensible à la phase, la dispersion du guide responsable de


l’élargissement des réflexions pendant la propagation est extraite des franges d’interférence
dans le réflectogramme.
En effet, l’intensité mesurée lors d’un enregistrement OLCR peut s’écrire :
Z +∞
R(δ) ∼ S(σ)r̃(σ)e(i2πσδ) dσ (1.30)
−∞

où R(δ) est l’intensité du réflectogramme fonction de la différence de marche entre les deux
28 1. Méthodes de caractérisation de composants optiques

bras δ, σ = 1/λ est le nombre d’onde et r̃(σ) est la réflectivité complexe du CST.
Cette formule relie directement le réflectogramme mesuré et la réflectivité complexe à
travers une transformée de Fourier avec :

r̃(σ) =| r̃(σ) | e(iφ(σ)) ∼ T F [R(δ)] (1.31)

Le module | r̃(σ) | de la réflectivité complexe du CST permet donc de localiser ses défauts
et de déterminer ses pertes linéiques.
La phase permet, quant à elle, de déterminer le temps de groupe à travers la relation :

d∆φ
τg = (1.32)

où ∆φ est la différence de phase entre l’entrée et la sortie du CST et L sa longueur.

La biréfringence est déterminée à partir de la différence de temps de groupe entre


les deux réflexions générées par les deux modes de polarisation du CST. Il suffit, pour
cela d’insérer, en amont du CST, un élément polarisant que nous ferons varier suivant
les mesures. Afin de mieux comprendre cette expérience, plusieurs mesures types seront
décrites, à titre d’exemple, dans le chapitre 2.

Dispositif expérimental et valeurs clés

CST
50/50
Source large bande

Photo−détecteur Miroir mobile


Signal retrodiffusé

Figure 1.8 – Schéma de principe d’un dispositif expérimental de mesure OLCR standard

Le figure 1.8 présente le schéma de principe d’un dispositif expérimental OLCR. Le


faisceau issue de la source optique large bande est, dans un premier temps, séparé en deux.
L’un des faisceaux va se réfléchir sur les faces du guide et sur ses défauts. L’autre se réfléchi
sur le miroir mobile. Les deux faisceaux se recombinent sur un photo-détecteur qui, pour
un traitement numérique éventuel, peut transmettre l’information à un ordinateur faisant
l’acquisition simultanée de la position du miroir et de l’intensité réfléchie.
29

Comme dans le cas de l’OFDR, pour gagner en sensibilité et en dynamique, les systèmes
OLCR récents utilisent la détection synchrone pour améliorer le rapport signal/bruit et
une détection équilibrée pour s’affranchir du signal continu (cf principe de la détection
équilibrée en annexe). Les dynamiques de mesure de systèmes OLCR performants se situent
autour de 100 dB alors qu’ils peuvent atteindre des résolutions de l’ordre de la dizaine
de µm. Ceci étant, le déplacement du miroir est limité pour des raisons pratiques et la
longueur du guide mesuré est souvent restreinte autour du mètre à l’exception de quelques
méthodes spécifiques qui peuvent améliorer cette excursion. Ceci étant, cette amélioration
se fait souvent au détriment de la sensibilité ou de la résolution spatiale de la mesure [31].

1.3 Autres méthodes


1.3.1 Temps de Vol
Origines et principe de la méthode
Il s’agit d’une méthode directe et rapide de mesure du temps de groupe de compo-
sants optiques. Son principe consiste à injecter dans le CST une impulsion, autour d’une
longueur d’onde donnée, dont le temps de propagation dans le composant est mesuré à
l’oscilloscope. Cette opération est répétée pour toutes les longueurs d’ondes où nous sou-
haitons déterminer la dispersion du CST. La méthode étant rapide et relativement peu
coûteuse en équipements, elle est souvent employée pour une caractérisation simple du pa-
ramètre de dispersion d’un guide. Nous allons voir cependant qu’elle est plus rapidement
limitée en terme de résolution que les précédentes méthodes du fait de son principe.

Dispositif expérimental et valeurs clés

Laser impulsionnel accordable


Synchronisation

CST

P Photo−détecteur

Oscilloscope

Figure 1.9 – Schéma de principe d’un dispositif expérimental de mesure du temps de vol

La figure 1.9 présente un schéma de principe de dispositif expérimental utilisé pour


la mesure de temps de vol. Les impulsions sont émises par un laser accordable avant
30 1. Méthodes de caractérisation de composants optiques

d’être injectées dans le CST. La puissance optique, après la traversée du composant, est
ensuite mesurée par une photodiode. Cette photodiode convertit le signal optique en signal
électrique et le délivre à l’oscilloscope dont la synchronisation est donnée par le laser
accordable. De cette façon, il est possible d’observer le décalage temporel de l’impulsion
en fonction de sa longueur d’onde.
Cette méthode est principalement limitée par les mêmes paramètres que ceux qui fixent
les performances de l’OTDR i.e. la bande passante de la photodiode et la durée minimale
des impulsions pouvant être émises. La synchronisation entre le laser accordable et l’oscil-
loscope influe aussi puisqu’une dérive temporelle des impulsions ("jitter") induit une perte
de précision importante sur la mesure du temps de groupe. Les valeurs optimales de bande
passante du détecteur sont situées autour de quelques GHz jusqu’à la dizaine de GHz.
Quoiqu’il en soit, cette méthode est mieux adaptée à des composants longs (au delà du
km) ou aux très fortes valeurs de dispersion pour pouvoir détecter un écart significatif
de temps de groupe entre deux longueurs d’onde avec des écarts minimums de temps de
groupe mesurés de l’ordre de la centaine de ps pour les meilleurs dispositifs.

1.3.2 Modulation de la phase


Origines et principe de la méthode
La méthode de caractérisation par la modulation de la phase, dite de la "phase-shift",
est une méthode issue des techniques appliquées au domaine des radio-fréquences (RF)
dont les premières applications au domaine des télécommunications optiques remontent
aux années 1980 [32, 33]. Elle est proposée pour la mesure de la dispersion chromatique ou
du DGD (Differential Group Delay) dans une fibre optique.

Le principe de la mesure [34] consiste à injecter dans le CST un signal continu et quasi-
monochromatique, modulé en intensité par un signal RF référence. Nous mesurons ensuite
la différence de phase entre le signal de modulation référence et le signal transmis dans le
CST à l’aide d’un voltmètre vectoriel. Cette opération est répétée pour plusieurs longueurs
d’onde de façon à établir une dépendance de cette différence de phase à la longueur d’onde.
Cette dépendance permet à son tour de déterminer l’évolution du temps de groupe avec la
longueur d’onde et donc la valeur de la dispersion.

En effet, la différence de phase en fonction de la longueur d’onde peut être exprimée


comme suit :

2πf0 Lng (λ)


∆φ(λ) = = 2πf0 τg (λ) (1.33)
c

où f0 représente la fréquence du signal de modulation, τg le temps de groupe ou temps de


propagation dans le CST en fonction de la longueur d’onde, L la longueur du guide et ng
l’indice de groupe du guide.
Connaissant la longueur du guide, nous pouvons donc en déduire, à travers la pente de
cette différence de phase ϕ(λ), le temps de groupe en fonction de λ. La dispersion D peut
31

alors être déterminée facilement sachant qu’elle est reliée à τg par la relation 1.12, d’où
l’extraction du paramètre de dispersion à partir d’une mesure de la phase.

Pour mesurer le DGD, il suffit de réaliser la même mesure en y ajoutant un dispositif


de contrôle de l’état de polarisation du signal injecté dans le CST.

Dispositif expérimental et valeurs clés


Le dispositif type utilisé se présente comme sur la figure 1.10. Un signal optique émis,
par une diode laser, autour de la longueur d’onde à laquelle nous souhaitons caractériser le
CST, par exemple 1, 3 µm ou 1, 55 µm, est modulé en amplitude autour d’une fréquence
f0 , dont la stabilité est essentielle. Ce signal est injecté dans le CST puis, après détection
du signal optique par un photo-détecteur, le signal électrique est envoyé sur un voltmètre
vectoriel pour comparer sa phase avec celle provenant directement du signal électrique de
modulation.

Synthétiseur
Modulation
Laser accordable
Signal référence

CST

Photo−détecteur
Signal électrique
Voltmètre vectoriel Signal optique

Figure 1.10 – Schéma de principe d’un dispositif expérimental de mesure Phase-shift

La précision sur la valeur de dispersion est déterminée principalement par la précision


sur la longueur d’onde de la source accordable (±5pm pour les plus précis) et par la fré-
quence de modulation qui, plus elle est élevée, plus elle permet une bonne précision (par
exemple au delà du GHz).

Les valeurs maximales de dispersion mesurables sont, quant à elles, déterminées par
le fait de ne pas franchir un saut de phase de 2π lorsque nous mesurons la différence de
phase entre deux incréments en longueur d’onde. C’est donc le fruit d’un compromis entre
longueur du CST, précision du voltmètre vectoriel et incrément de la source accordable. Les
valeurs minimales de dispersion mesurables sont déterminées par la sensibilité du voltmètre
vectoriel et l’intervalle de longueur d’onde maximale couvert par la source accordable. Par
exemple, pour une excursion spectrale de la source de 50nm, une fréquence de modulation
de 1Ghz, une longueur de fibre de 1km et une résolution en phase du voltmètre vectoriel
32 1. Méthodes de caractérisation de composants optiques

de 0.1◦ nous pouvons attendre une précision sur la valeur de dispersion de l’ordre de
0.005ps.nm−1 .km−1 .

1.3.3 Interférométrie en lumière blanche (WLI)


Origines et principe de la méthode
La technique d’interférométrie en lumière blanche, comme son nom l’indique, est très
proche de la technique OLCR. Des différences existent tout de même et sont liées à plu-
sieurs points particuliers. Tout d’abord, il ne s’agit pas d’une technique réflectométrique
mais d’une technique en transmission. Ensuite la mesure s’effectue pour une position fixe
du miroir dans le bras de référence de l’interféromètre. Enfin le signal interférométrique
est mesuré dans le domaine spectral.

La technique fait donc appel, tout comme l’OLCR, à une source large bande. Le prin-
cipe [35, 36] consiste à introduire le CST dans l’un des deux bras d’un interféromètre en
transmission de type Mach-Zender. La position du miroir dans l’autre bras étant ajustée
de manière à maximiser les interférences produites, nous enregistrons finalement un signal
interférométrique dans le domaine spectral dont la forme va permettre d’extraire l’évolu-
tion de la phase liée au CST et donc le temps de groupe et la dispersion en fonction de la
longueur d’onde.

L’intensité du signal enregistrée en fonction de la longueur d’onde s’exprime :

< I(λ) >=<| E(λ) |2 > +a2 <| E(λ) |2 > +2a <| E(λ) |2 > cos(Φ(λ)) (1.34)

L’évolution relative de la phase est uniquement liée à l’influence du guide puisque, en


dehors du CST, les deux bras de l’interféromètre sont parfaitement identiques en terme
d’éléments dispersifs (ils se compensent donc). En effet, comme nous allons le voir ultérieu-
rement, du fait du montage, l’égalisation des chemins optiques s’effectue par une partie du
montage en espace libre dont nous pouvons considérer l’influence sur la phase comme nulle.

La phase en fonction de la fréquence s’exprime :

Φ(f ) = β(f )L − 2πτ0 f (1.35)

où τ0 ≈ L0 /c est le délai constant associé à la propagation dans le bras de référence avec


L0 la longueur de ce bras.
33

1.0

0.8
Amplitude (u.a.)

0.6

0.4

0.2

0.0
1450 1500 1550 1600 1650
Longueur d’onde (nm)

Figure 1.11 – Exemple de résultat obtenu pour une mesure par interférométrie en lumière
blanche [35]

Le signal d’interférence se présente comme sur la figure 1.11 pour lequel chaque maxi-
mum correspond à un multiple de 2π pour la valeur de Φ. L’idée est donc d’extraire phase
et longueur d’onde pour chacun de ces maximums de façon à obtenir une information dis-
crète Φ(λ). Une fois celle-ci convertie en Φ(f ), elle est ajustée suivant le développement en
série de Taylor de la phase qui donne :

Φ2 f 2 Φ3 f 3
Φ(f ) ' 2π[Φ0 + Φ1 f + + ] (1.36)
2 6

De cette façon, l’information sur la phase est récupérée sur toute la bande de la source
avant d’être dérivée une première fois de façon à obtenir le temps de groupe relatif (relatif
puisque τ0 n’est pas connu) puis dérivée une seconde fois pour obtenir la dispersion chro-
matique du CST.

Il faut noter qu’une variante de cette méthode consiste à déterminer la valeur de lon-
gueur d’onde au maximum des franges d’interférences pour différentes positions du miroir
de façon à suivre l’évolution de cette valeur et à déterminer le paramètre de dispersion à
partir de cette évolution.
34 1. Méthodes de caractérisation de composants optiques

Dispositif expérimental et valeurs clés


Un dispositif expérimental utilisé pour la mesure d’interférométrie en lumière blanche
est décrit sur la figure 1.12. Une diode émet le signal large bande, séparé en deux par
un coupleur, transmis directement dans le bras de référence et transmis à travers le CST
dans le bras de mesure. Avant d’effectuer l’acquisition, la longueur du bras de référence est
ajustée, par l’intermédiaire du miroir mobile, de façon à égaliser les chemins optiques, pour
maximiser le contraste des franges. L’acquisition est réalisée par un analyseur de spectre
optique et traitée numériquement, par ordinateur, de façon à extraire la phase.

CST

Source Large Bande 50/50 50/50 A.S.O

Miroir mobile
Figure 1.12 – Schéma de principe d’un dispositif expérimental de mesure par interférométrie en
lumière blanche

A l’heure actuelle, ce type de mesure peut être exécutée en environ 500 ms et avec une
très bonne sensibilité (' 80 dB). Tout comme pour l’OLCR, les échantillons mesurables
sont donc aussi limités en taille autour du mètre. Résolution et sensibilité pour la mesure
de dispersion sont fixées principalement par les capacités de l’analyseur de spectre optique
et en particulier sa résolution spectrale.
35

Conclusion
Le tableau 1.1 nous montre, tout d’abord, la polyvalence de la technique OLCR puisque
elle permet la mesure de l’ensemble des propriétés physiques pouvant être mesurées par les
autres techniques. De plus, comme nous le verrons ultérieurement, sa capacité à étudier
simplement des composants multimodes ou encore à fournir un outil d’analyse précieux
des phénomènes de diffusion dans les composants en font une méthode adaptable à de
nombreuses études.

Méthode Paramètres mesurés Avantages Inconvénients


Défauts localisés Une seule extrêmité Résolution spatiale limitée
OTDR
Atténuation
Défauts localisés Bonne résolution spatiale Excursion limitée
OFDR
Atténuation Une seule extrêmité
Défauts localisés Composants courts Excursion limitée
Atténuation Rapide (qques s) Dispositif complexe
OLCR
Dispersion Une seule extrêmité
Biréfringence
Dispersion Composants longs Dispositif complexe
Phase-Shift
Biréfringence Pas de composants courts
Temps de Dispersion Méthode simple Résolution spatiale limitée
vol Biréfringence Pas de composants courts
Dispersion Très rapide (500ms) Pas de mesure des défauts
WLI
Biréfringence Composants courts

Table 1.1 – Tableau récapitulatif des spécificités des différentes techniques de caractérisation des
composants optiques présentées

Nous avons donc, au cours de cette thèse, utilisé cette technique comme un outil de
mesure, d’analyse et de compréhension des propriétés physiques qui régissent le fonc-
tionnement de composants optiques innovants. Pour les fibres optiques, les guides semi-
conducteurs ou les guides polymères nous verrons comment l’OLCR, et plus particuliè-
rement l’OLCR sensible à la phase, nous a permis d’obtenir des résultats concluants et
d’apporter une contribution à la compréhension de leurs propriétés fondamentales.
36 1. Méthodes de caractérisation de composants optiques
37

Chapitre 2

OLCR sensible à la phase : principe


et performances

Après avoir établi un cadre à ce travail de thèse au cours du chapitre 1, nous abordons à
présent, plus en profondeur, les principes théoriques de l’OLCR, le dispositif expérimental
mis en œuvre et les valeurs caractéristiques qui le définissent.

Dans un premier temps, nous décrivons le principe de l’OLCR, c’est à dire la théorie de
l’interférométrie appliquée à la caractérisation de composants optiques. Nous présentons
les origines théoriques d’une figure d’interférence avant d’expliquer comment, dans le cas
de l’OLCR, elle peut être utilisée pour extraire les propriétés d’un composant optique.

Dans un deuxième temps, nous effectuons une description complète du dispositif ex-
périmental mis en œuvre au cours de ce travail de thèse. Les différents éléments qui le
composent ainsi que leur fonction sont présentés au cours de cette section.

Enfin, nous présentons quelques mesures et études qui permettent d’établir les capa-
cités et les limites techniques du dispositif expérimental OLCR développé à l’ENST. Les
techniques d’extraction de la phase, du temps de groupe, de la biréfringence ou encore de
la dispersion font l’objet de descriptions plus approfondies et nous étudions, au cours de
cette section, un ensemble de propriétés clés de la mesure (sensibilité, résolution...) pour
mieux connaître ses performances.

2.1 Théorie de la réflectométrie optique à faible cohérence


Nous avons vu, au cours du chapitre 1, que c’est à travers l’extraction de la réflectivité
complexe du composant que l’OLCR peut mesurer des paramètres tels la dispersion, les
pertes ou encore la biréfringence. En particulier, les équations 1.30 et 1.31 permettent cette
extraction. Nous allons donc expliquer comment, à partir du principe de l’interférométrie,
ces deux équations peuvent être obtenues.
38 2. OLCR sensible à la phase : principe et performances

Dans un système interférométrique quelconque, nous pouvons considérer le champ émis


par la source comme une somme continue de toutes ses composantes fréquentielles. L’onde
émise par la source peut donc être exprimée sous la forme analytique :
Z +∞ p
E(t) = S(ν)ei(2πνt+ϕ(ν)) dν (2.1)
−∞

où S(ν) représente la densité spectrale de puissance de la source directement reliée à l’ex-


pression temporelle du champ par une transformée de Fourier.

Notons que S(ν) peut aussi être exprimée sous la forme :


Z +∞
S(ν) dν = 1/2 < E(t)E ? (t) >=< Ereel
2
(t) > (2.2)
−∞

Et rappelons qu’une moyenne temporelle s’exprime :


+∞
1
Z
< F (t) >= limT →∞ FT (t)dt (2.3)
2T −∞

où T fixe les limites réelles de l’intervalle de temps dans lequel la fonction est définie et FT
est la fonction F existante entre −T et +T et nulle ailleurs.

De plus il faut considérer que seule l’intensité est mesurable par un détecteur quadra-
tique c’est à dire, la moyenne temporelle du module au carré du champ. Donc, en un point
P quelconque, nous mesurons :

I(P ) = 2 < Ereel 2 (P, t) >=< E(t)E ? (t) > (2.4)

Dans le cas d’un interféromètre, le champ est émis en un point quelconque puis séparé en
deux. Les deux parties s’additionnent sur le détecteur après avoir parcouru deux chemins
optiques différents correspondant aux deux bras de l’interféromètre et subit une réflexion
dans chaque bras. Il s’exprime comme :

E(t) = r̃1 E1 (t − t1 ) + r̃2 E2 (t − t2 ) (2.5)

où E1 et E2 sont les champs au niveau des deux éléments réfléchissants et t1 et t2 sont les
temps de propagation de la lumière de l’élément réfléchissant jusqu’au point d’observation
des interférences. Avec

d1 ng1
t1 = (2.6)
c
39

d2 ng2
t2 = (2.7)
c

où d1 et d2 sont les distances physiques parcourues de l’élément réfléchissant jusqu’au point


d’observation des interférences pour chaque bras, c la vitesse de la lumière, ng1 et ng2 les
indices de groupe de chacun des milieux traversés et r̃1 et r̃2 les réflectivités complexes des
éléments réfléchissants de chaque bras. Dans le cas le plus simple de l’interféromètre de
Michelson idéal, elles sont égales à 1 pour toutes les longueurs d’onde de la source mais
dans la plupart des cas, elles introduisent une variation d’amplitude et de phase dépendant
de la longueur d’onde.

Comme nous l’avons vu, seule l’intensité est observée et le signal mesuré est donc le
module au carré de 2.5 sous la forme :

I = r̃1 r̃1? < E1 (t − t1 )E1? (t − t1 ) > +


r̃2 r̃2? < E2 (t − t2 )E2? (t − t2 ) > +
r̃1 r̃2? < E1 (t − t1 )E2? (t − t2 ) > +
r̃2 r̃1? < E2 (t − t2 )E1? (t − t1 ) > (2.8)

Dans l’équation 2.8, les deux premiers termes correspondent aux intensités telles que nous
pourrions les mesurer avant la recombinaison des deux signaux. Celles-ci sont affectées par
les réflectivités en amplitude des deux éléments réfléchissants. Les troisièmes et quatrièmes
termes sont des termes croisés correspondant aux battements entre les deux signaux c’est
à dire aux interférences.

A partir des équations 2.2, 2.3 et 2.8 nous pouvons exprimer l’intensité mesurée sous
la forme :

I ∝ I0 + 2< < E1 (t + τ )E2? (t) > (2.9)

où I0 représente le fond continu dans l’intensité mesurée lié aux deux premiers termes de
l’équation précédente, < représente la partie réelle et τ = t2 − t1 la différence de temps de
propagation entre les deux bras.

Finalement, pour plus de commodité, nous exprimons l’intensité mesurée en fonction


du nombre d’onde σ et dans le cas où l’une des deux réflectivité complexe est égale à 1
(réflectivité d’un miroir parfait) sous la forme :
Z +∞
I ∝ I0 + r̃(σ) S(σ) e(i2πσδ) dσ (2.10)
−∞
40 2. OLCR sensible à la phase : principe et performances

C’est cette dernière équation qui est à la base du principe de mesure de l’OLCR comme
nous l’avons vu sous la forme 1.30 lors de la section 1.2.3 du chapitre 1.

Dans le cas d’un interféromètre de Michelson où r̃1 = 1 et r̃2 = 1, le terme d’interfé-


rence permet de déterminer directement la densité spectrale de puissance de la source par
une transformation de Fourier du terme de battement mesuré. Il s’agit alors d’un système
de caractérisation de la source par spectroscopie à transformée de Fourier [37].

Dans le cas du système de mesure OLCR, une seule des réflectivités vaut 1 et c’est donc
la réflectivité complexe du composant sous test que nous pourrons déterminer. En réalité,
ce terme d’interférence apparaît pour chacune des réflexions à l’interface ou dans le CST.
En s’affranchissant du fond continu généré par les deux premiers termes de l’équation 2.9,
grâce notamment à une détection équilibrée, il est possible d’accéder à toutes les réflecti-
vités complexes correspondant à chacune des réflexions.

Nous avons vu dans le chapitre 1 que la plupart des dispositifs OLCR expérimentaux
ne permettent pas de déterminer l’information sur la phase issue de la réflectivité mesurée
du composant sous test. En effet, ceux-ci n’ont accès qu’à l’enveloppe de ce signal pour des
raisons de stabilité mécanique et de rapidité qui limitent la précision de l’échantillonnage
du signal mesuré.
Certains dispositifs [38, 39, 40], apparus dans les années 1990 permettent, par le biais
de systèmes capables d’extraire la position du miroir très précisément et d’échantillonner
le signal suffisamment rapidement, de déterminer l’information sur la phase. Cette infor-
mation, à son tour, conduit à déterminer temps de groupe, biréfringence et dispersion [41].

A partir de l’équation 2.10, le signal d’interférence (le réflectogramme) mesuré en fonc-


tion de la différence de marche s’exprime :
Z +∞
R(δ) ∼ | r̃n (σ) | S(σ) e−i(β(σ)δ−φn ) ei(2πσδ) dσ (2.11)
−∞

où β la constante de propagation dans le guide dépendante de la longueur d’onde et φn et


l’influence sur la phase de l’élément réfléchissant. L’ensemble est ici exprimé en fonction
de σ pour plus de commodité vis à vis de l’emploi de la transformée de Fourier. En effet,
σ est la variable duale de la variable différence de marche δ.

La réflectivité complexe correspondant à la n-ième réflexion dans le guide et intégrant


l’influence de la dispersion du guide est donc donnée par :

r̃n (σ) = | r̃n (σ) | e(iφn ) e−i(β(σ)δ) (2.12)


41

Les dispositifs OLCR dit sensibles à la phase doivent respecter le critère de Shannon
soit l’acquisition d’au moins deux points par période du signal d’interférence. De ce fait,
l’information sur la phase peut être recomposée et il est possible d’appliquer une trans-
formée de Fourier au réflectogramme R(δ) pour obtenir un signal complexe R̃(σ). Nous
pouvons alors déterminer l’amplitude et la phase par les relations :

q
A(λ) = R̃r2 + R̃i2 (2.13)
!
R̃i
Φ(λ) = tan− 1 (2.14)
R̃r

Ces deux paramètres permettent de calculer l’évolution de τg avec λ ainsi que la dépen-
dance éventuelle des pertes à la longueur d’onde puisque :

A(λ) ' | r̃n (λ) | S(λ) (2.15)

Φ(λ) ' β(λ) − φn (2.16)

Connaissant S(λ), il est possible de déterminer les pertes en fonction de la longueur d’onde
par le module de la réflectivité complexe. De plus, d’après les équations 1.9 et 1.10, τg =
dβ/dλ et nous pouvons donc déterminer aussi son évolution par la phase de la réflectivité
complexe.

2.2 Le dispositif expérimental


Nous décrivons ici le dispositif expérimental utilisé pour l’ensemble des travaux de cette
thèse et représenté schématiquement par la figure 2.1.

Deux interféromètres sont en fait imbriqués l’un dans l’autre puisqu’ils utilisent le
même miroir mobile dans leurs bras de références respectifs. L’interféromètre dit à faible
cohérence sert à la mesure proprement dite alors que l’interféromètre cohérent sert d’horloge
à l’acquisition de la mesure.
42

Détection équilibrée CST


Laser He−Ne

Photo−détecteur

Lame séparatrice

Coupleur 50/50

Coupleur 50/50

Coupleur 50/50
Miroir Miroir mobile Lame dichroique Source A.S.E Erbium

Figure 2.1 – Schéma du montage OLCR ENST


633/1550nm 1525−1605nm

Interféromètre cohérent
Interféromètre faiblement cohérent
2. OLCR sensible à la phase : principe et performances
43

2.2.1 Interféromètre faiblement cohérent


La source utilisée pour la mesure est une source Erbium à Émission Spontanée Amplifiée
dont le spectre s’étend de 1525 nm à 1605 nm soit l’ensemble des bandes C et L du
domaine des télécommunications optiques. La figure 2.2 présente une mesure de cette
densité spectrale effectuée à l’analyseur de spectre optique (ASO) pour une résolution en
longueur d’onde de 0.1 nm. Celle-ci est plate sur l’ensemble de son domaine spectral avec
des variations du niveau maximum inférieures à 3 dB.

-15

-20

-25
Amplitude (dB)

-30

-35

-40

-45
1520 1540 1560 1580 1600 1620
Longueur d'onde (nm)

Figure 2.2 – Densité spectrale de la source Erbium à Émission Spontanée Amplifiée

La quasi-totalité du montage est fibrée, et ce, avec de la fibre monomode standard


SSMF, à l’exception de la partie du bras de référence dans laquelle se trouve le miroir
mobile. Celui-ci est installé sur coussin d’air afin de minimiser les saccades et vibrations
lors de son déplacement. Dans cette partie, la lumière se propage en espace libre sous la
forme d’un faisceau parallèle sortant et entrant dans la fibre via un collimateur fibré.

Plusieurs coupleurs optiques 50 : 50 divisent le signal entre les deux bras. Le miroir
en translation sur coussin d’air est monté sur un banc dont la longueur est de 125 cm. Sa
vitesse de translation est comprise entre 0.5 mm.s−1 à 4 mm.s−1 lors des acquisitions. Des
études préliminaires ayant démontré que la vitesse la plus adéquate à une bonne mesure
(la moins bruitée) était de 1 mm.s−1 pour le cas de ce banc de mesure, cette vitesse a donc
été utilisée pour l’ensemble de ces travaux.
44 2. OLCR sensible à la phase : principe et performances

L’autre partie de la source se propageant dans le bras de mesure est injectée dans le
CST via un couplage direct de la fibre amorce vers le CST. Ce couplage est réalisé à l’aide
un banc d’alignement tridimensionnel nanométrique. Dans le cas de composants spécifiques
au diamètre de mode très petit (quelques µm), nous avons utilisé une fibre SMF avec ter-
minaison micro-lentillée dont le rayon de ceinture (waist) de sortie d’environ 2 µm permet
d’optimiser le couplage vers le composant.

Les signaux réfléchis dans les bras de mesure et bras de référence sont recombinés au
niveau du dernier coupleur au sein duquel ont lieu les interférences. Les deux parties du
signal d’interférences sont directement reliées à une détection optique équilibrée de bande
passante 125 kHz.

2.2.2 Interféromètre cohérent


La source utilisée pour l’interféromètre cohérent est un laser Helium-Néon stabilisé en
fréquence donc la longueur d’onde est donnée à λ = 632.9918 nm avec une longueur de
cohérence supérieure à 150 cm qui couvre donc la totalité de l’excursion du miroir mobile.
Les franges d’interférences qui défilent avec les déplacements du miroir sont projetées sur
un photodétecteur qui délivre un signal dont la période est :

T0 = λHe−N e /4 (2.17)

Ce signal, après passage dans une boucle à verrouillage de phase électrique (PLL), peut
être sur-échantillonné pour donner une période d’acquisition de λHe−N e /8, λHe−N e /16 ou
λHe−N e /32 le cas échéant. Il y donc acquisition d’un point du réflectogramme faiblement
cohérent environ tous les 180nm.

2.2.3 Acquisition
Le signal issu de l’interféromètre faiblement cohérent est enregistré par une carte d’ac-
quisition (quantifiée sur 12bits) synchronisée par le signal issu de l’interféromètre cohérent.
Les données recueillies par la carte sont finalement transférées à un ordinateur pour pouvoir
procéder au traitement des données nécessaires à l’extraction des propriétés du CST.

2.3 Performances du banc OLCR


Cette section à pour but de définir quelques uns des procédés de mesure (dispersion,
biréfringence) et d’établir les capacités du dispositif expérimental et ses limites en termes
de sensibilité, répétabilité ou résolution.
45

2.3.1 Spectrométrie à Transformée de Fourier


Nous présentons ici, brièvement, une comparaison du spectre de la source Erbium
observé à l’analyseur de spectre optique et de celui obtenu pour la mesure OLCR d’une
réflexion sur une face clivée droite de fibre optique. La figure 2.3 nous montre leur bonne
concordance en considérant que les deux mesures ont été ramenées à zéro pour faciliter la
comparaison. Nous observons donc des spectres relatifs dont la différence dans le rapport
signal à bruit provient du fait que nous avons mesuré la densité spectrale directement à la
sortie de la source avec l’ASO, dans un cas, alors que, dans l’autre cas, l’atténuation dûe
au dispositif et au niveau de réflexion en intensité de la face clivée de la fibre a détérioré ce
rapport. Ceci étant, la différence maximum, entre les deux mesures, dans les fluctuations
du spectre est inférieure à 1dB sur l’ensemble bande C+L. Par ailleurs, lors des mesures
de pertes, nous nous affranchirons de ces différences en référençant les mesures par rapport
au spectre obtenu à partir de la réflexion sur la face d’entrée du composant.

0
Variation de la puissance (dB)

-10

-20

-30
1500 1520 1540 1560 1580 1600 1620
Longueur d'onde (nm)

Figure 2.3 – Comparaison des mesures de la densité spectrale de puissance de la source ASE en
bande C+L
Noir : par ASO ; Gris : par spectrométrie à TF
46 2. OLCR sensible à la phase : principe et performances

2.3.2 Résolution spatiale


Nous avons vu dans le chapitre 1 que la résolution spatiale du dispositif était détermi-
née principalement par la largeur spectrale de la source, c’est à dire, par sa longueur de
cohérence. La figure 2.4 présente un réflectogramme simulé, à partir de la vraie forme du
spectre de la source, c’est à dire tel qu’il devrait être observé sur la face d’entrée du CST
en cas d’équilibrage strict des dispersions dans les deux bras du dispositif. Il s’agit alors
d’un réflectogramme uniquement limité par la transformée de Fourier ("Fourier Transform
Limited").

0.8

0.6
Amplitude normalisée

0.4

0.2

−0.2

−0.4

−0.6

−0.8

−1

−500 −400 −300 −200 −100 0 100 200 300 400 500
Chemin optique (µm)

Figure 2.4 – Résolution spatiale théorique du dispositif OLCR

En utilisant le critère de Rayleigh (première extinction du signal) pour déterminer la


résolution spatiale, à partir de la source ASE en bande C+L, nous obtenons une valeur
théorique dans l’air de :

δx theorique ∼ 40µm. (2.18)

Cependant, dans notre cas précis, la mesure OLCR est affectée par la dispersion résiduelle
du dispositif. En effet, dans le montage utilisé, la dispersion cumulée n’est pas la même
dans chaque bras. De part le principe même du dispositif et l’existance d’un chemin op-
tique en espace libre uniquement dans l’un des deux bras, lorsque les chemins optiques sont
47

équilibrés, les dispersions ne le sont pas nécessairement. Un déséquilibre lié à la différence


de longueur de fibre utilisée entre les deux bras est créé. Donc, dans la pratique, le réflec-
togramme correspondant à la face de sortie de la fibre amorce (c’est à dire la référence) est
élargi.

La figure 2.5 présente le signal interférométrique enregistré sur la face de sortie du


dispositif d’injection (une fibre clivée). Il donne une résolution spatiale réelle du dispositif
à:

δx reel ' 100µm. (2.19)

Cette valeur n’est valable qu’à l’entrée du CST puisque, là encore, la dispersion va, suivant
son signe, étaler ou comprimer spatialement la réflexion au fur et à mesure de la propa-
gation dans le guide. Quoiqu’il en soit, au delà d’une certaine distance de propagation,
le signal réfléchi sera élargi par la dispersion du CST et la résolution spatiale dégradée
d’autant.

1 0.5

0.8 0
0.6
Amplitude normalisée

−0.5
0.4
50 55 60
0.2

−0.2

−0.4

−0.6

−0.8

−1

−500 −400 −300 −200 −100 0 100 200 300 400 500
Chemin optique (µm)

Figure 2.5 – Résolution spatiale expérimentale du dispositif OLCR

L’élargissement relativement à la figure 2.4 apparaît clairement. L’encart présente un


zoom sur une partie du réflectogramme dans laquelle nous observons les franges d’inter-
férences. Du fait du déséquilibre de fibre optique entre les deux bras et de la dispersion
48 2. OLCR sensible à la phase : principe et performances

résiduelle qu’il génère, la période de ces franges varie en fonction de la position. Chaque
longueur d’onde est réfléchie à une position différente [42]. Dans notre cas, la présence d’un
excès de fibre SMF (dont la valeur de dispersion théorique est donnée par le constructeur
à ' 17ps.nm−1 .km−1 ) dans le bras de mesure par rapport au bras de référence, engendre
une trace de dispersion anormale (de signe positif). Par ailleurs, bien que nous les ayons
négligés dans les relations 1.8 à 1.11, les ordres supérieurs de la dispersion ont un impact
observable sur le signal de la figure 2.5. En particulier, la pente de la dispersion β3 qui
signifie une valeur de la dispersion variant avec la longueur d’onde (cf figure 2.10) a pour
effet de disymétriser le signal.
Puissance normalisée

1 1
Puissance normalisée
0.8 0.8

0.6 0.6

0.4 0.4

0.2 0.2

0 0
1450 1500 1550 1600 1650 1450 1500 1550 1600 1650
Longueur d’onde (nm) Longueur d’onde (nm)

1 1
Amplitude normalisée
Amplitude normalisée

0.5 0.5

0 0

−0.5 −0.5

−1 −1
−0.1 −0.05 0 0.05 0.1 −0.1 −0.05 0 0.05 0.1
Position miroir (mm) Position miroir (mm)

Figure 2.6 – Comparaison des réflectogrammes obtenus en fonction de la forme de la densité


spectrale de la source
à gauche : source rectangulaire ; à droite : source gaussienne

Pour finir, la figure 2.6 présente une comparaison théorique des différents réflecto-
grammes obtenus en fonction du type de source utilisée. Il apparaît donc qu’une source
gaussienne permet un meilleure résolution spatiale puisqu’elle évite les rebonds dans le
réflectogramme. En revanche, le source carrée offre un meilleur rapport signal/bruit sur
l’ensemble de la bande et est donc plus appropriée pour la mesure du temps de groupe.
Quoiqu’il en soit, une source carrée permet tout de même, comme nous venons de le voir,
une très bonne résolution spatiale tout en permettant un accès précis à l’information sur
49

le temps de groupe comme nous le verrons ultérieurement.

2.3.3 Résolution spectrale


Le spectre de la source large bande est discrétisé numériquement dans le domaine tem-
porel, ce qui engendre une discrétisation dans le domaine de Fourier correspondant : celui
des fréquences ou plutôt des longueurs d’ondes. Celle-ci peut être quantifiée en considérant
les différents paramètres du dispositif.

Nous avons vu que le signal réflectométrique est échantillonné dans l’espace par un
multiple de la longueur d’onde du laser Hélium-Néon stabilisé. Le calcul de la phase et du
module de la réflectivité complexe s’opère donc de manière numérique par l’algorithme de
FFT en utilisant les relations 2.13 et 2.14.

En pratique le nombre de points enregistrés lors de l’acquisition est donné par la rela-
tion :

L
N= (2.20)
∆x

où L est l’excursion du miroir mobile et ∆x = λHe−N e /8 la distance entre deux points de


mesure. Par exemple, dans le cas d’une excursion de 1mm, le nombre total de point N
enregistré sera d’environ 13000 points.

Si nous considérons l’indice de l’air équivalent à 1 pour la longueur d’onde centrale


de la source Erbium ainsi que pour celle du laser Hélium-Néon, la transformée de Fourier
discrète fixe l’espace entre deux points dans le domaine spectral comme étant :

1
∆σ = (2.21)
∆x 4 N

où le facteur 4 provient des spécificités du montage interférométrique cohérent qui conduit


à cet échantillonnage et où ∆σ est la résolution en nombre d’onde.

Les équations 2.20 et 2.21 conduisent alors à une résolution de type :

1
∆σ = (2.22)
4L

où nous constatons que la résolution dans le domaine spectral est déterminée par l’excur-
sion du miroir. Finalement, la résolution spectrale, considérant la longueur d’onde moyenne
λ̄ >> ∆λ , est donnée par :

λ̄2
δλ = (2.23)
4L
50 2. OLCR sensible à la phase : principe et performances

L’excursion de mesure est, dans la pratique, limitée par la capacité de traitement numé-
rique de l’ordinateur utilisé. En effet le nombre de points d’une acquisition étant déterminé
par la relation 2.20, le fichier de mesure peut rapidement atteindre la taille limite de trai-
tement accessible à l’ordinateur. De ce fait, il est nécessaire, dans le cas de guide dont la
longueur excède environ 10 cm, de faire l’acquisition de plusieurs réflectogrammes pour
chacune des zones utiles. Au final, avec une longueur d’onde moyenne λ̄ = 1565nm et une
excursion limitée à environ 10 cm, la résolution spectrale du dispositif est donnée à :

δλ ' 10pm (2.24)

2.3.4 Mesure du paramètre de dispersion d’une fibre SMF28

Face d’entrée
10
Amplitude (V)

−5

−10
0 1 2 3 4 5 6 7 8 9 10

Face de sortie
10
Amplitude (V)

−5

−10
0 1 2 3 4 5 6 7 8 9 10
Déplacement Miroir (mm)

Figure 2.7 – Réflectogrammes d’entrée et de sortie d’une fibre SMF28

Afin de pouvoir calibrer la mesure de dispersion pour nôtre dispositif expérimental


OLCR, nous avons mesuré les paramètres de dispersion d’une fibre SMF28 du fabricant
Corning. Ces paramètres étant connus et donnés par le constructeur [43] comme :

Longueur d’onde au zéro de dispersion :

1302nm ≤ λ0 ≤ 1322nm (2.25)


51

Pente de la dispersion au zéro de dispersion :


S0 ≤ 0.092ps.nm−2 .km−1 (2.26)

Dispersion chromatique dans le domaine 1200 − 1600nm :

S0 λ4
D(λ) ≈ [λ − 30 ] ps.nm−1 .km−1 (2.27)
4 λ

Après acquisition de deux réflectogrammes correspondant aux faces d’entrée et de sortie


de la fibre tels que nous les voyons sur la figure 2.7, nous pouvons extraire l’évolution de la
phase avec la longueur d’onde, comme nous l’avons vu au cours de la section 2.1. Il suffit
alors de soustraire la phase obtenue pour la face d’entrée à celle obtenue pour la face de
sortie pour obtenir l’influence propre à la fibre.

Extraction de la phase

π/2
Phase (rad)

−π/2

−π
1530 1540 1550 1560 1570 1580 1590 1600
Longueur d’onde (nm)

Figure 2.8 – Évolution de la différence phase mesurée à l’OLCR pour une fibre SMF28

La figure 2.8 présente l’évolution de la phase mesurée dans la fibre SMF28. Cette phase
est toujours mesurée à n × 2π près et évolue donc entre −π et +π avec des sauts de phase
52 2. OLCR sensible à la phase : principe et performances

de 2π. Ces sauts de phase génèrent des discontinuités dans l’évolution du temps de groupe
extrait de la dérivée. Il est impératif de s’en affranchir. Nous présentons la méthode utilisée
pour obtenir le temps de groupe à partir de la phase mesurée.

Deux approches ont été envisagées, au cours de ce travail, pour extraire l’information
sur la phase à partir du réfléctogramme :
– Une première méthode est basée sur l’utilisation de la fonction "Unwrapp" de lissage
de la phase par Matlab. Celle-ci est simple et directe et a été utilisée dans la plu-
part des cas de mesure. Cependant, il est apparu que, dans certains cas d’évolution
très rapide de la phase ou de niveau de bruit important, cette fonction était dans
l’impossibilité de lisser la phase correctement. Une autre méthode a donc du lui être
substituée.

– Une seconde méthode, proposée dans le cadre d’une thèse réalisée à l’université de
Nantes [44], permet de passer directement de la phase mesurée à la dispersion sans
subir les désagréments liés à la fonction de lissage de la phase.

En effet, celle-ci consiste à utiliser l’équation 2.14 que nous dérivons dans un premier
temps pour obtenir :

d dΦ dΦ R̃2
(tanΦ) = [1 + tan2 Φ] = [1 + i ] (2.28)
dσ dσ dσ R̃r2

Cette dérivée peut aussi être exprimée sous la forme :

d dΦ R̃i R̃0 R̃r − R̃i R̃r0


(tanΦ) = [ ]= i (2.29)
dσ dσ R̃r R̃r2

La combinaison des deux équations précédentes conduit à une expression de la dérivée


de la phase sous la forme :

dΦ R̃0 R̃r − R̃i R̃r0


= i (2.30)
dσ R̃r2 + R̃i2

où les termes R̃r0 et R̃i0 sont obtenus par la propriété suivante de la transformée de Fourier :

i 0 i
T F [xR̃(x)] = R (σ) = [R̃0 + iR̃i0 ] (2.31)
2π 2π r

De cette façon, nous pouvons donc calculer le temps de groupe à partir de la phase en
étant insensible aux discontinuités et sans faire appel à une fonction de lissage de la phase.
53

Du temps de groupe à la dispersion


La figure 2.9 présente (en gris) le temps de groupe relatif mesuré dans la fibre SMF28
à partir de la mesure de phase. La partie correspondant à la bande L de la source Erbium
est plus bruitée. Cependant la majorité de ce bruit est supprimée par filtrage numérique.

−3

−4
Temps de groupe relatif (ps)

−5

−6

−7

−8

−9

−10

−11

−12
1510 1520 1530 1540 1550 1560 1570 1580 1590 1600 1610 1620
Longueur d’onde (nm)

Figure 2.9 – Évolution du temps de groupe relatif mesuré dans une fibre SMF28
Gris : mesure ; Noir : ajustement numérique

Comme nous l’avons vu précédemment, nous parlons de temps de groupe relatif puisque
deux réflectogrammes distincts ont dû être enregistrés pour les faces d’entrée et de sortie
de la fibre du fait d’une excursion trop importante pour être couverte par un seul réflec-
togramme. Ceci ne permet donc pas de garder une trace absolue de la position du miroir
sur toute la longueur de la fibre testée (390mm).
Par conséquent la pente de la phase est donnée à une constante près, ce qui entraîne
une mesure relative du temps de groupe. Nous verrons cependant ultérieurement que, dans
le cas de guide plus petit, le temps de groupe est mesuré de manière absolue.

Le temps de groupe relatif obtenu est moyenné sur plusieurs acquisitions (ici 20) pour
diminuer le niveau de bruit puis ajusté numériquement par une loi déterminée au préalable.
La courbe noire de la figure 2.9 présente un ajustement numérique de la mesure du temps
54 2. OLCR sensible à la phase : principe et performances

de groupe.

Eu égard aux origines de la dispersion chromatique, deux approches sont possibles pour
réaliser un ajustement du temps de groupe.

– Tout d’abord, nous savons qu’autour de la fréquence centrale, la phase peut être
développée en série de Taylor au troisième ordre de sorte que :

Φ2 ω 2 Φ3 ω 3
Φ(ω) = Φ0 + Φ1 ω + + (2.32)
2 6

De ce fait le temps de groupe peut être ajusté par une loi polynomiale du second
ordre du type :

Φ3 ω 2
τg (ω) = τ0 + Φ1 + Φ2 ω + (2.33)
2

– Par ailleurs, nous avons vu que l’indice matériau peut être décrit par la loi de Sell-
meier 1.2 présentée au chapitre 1. Basé sur cette équation, le temps de groupe peut
alors être ajusté avec une loi du type :

τg (λ) = A + Bλ2 + Cλ−2 + Dλ4 + Eλ−4 (2.34)

La discrimination entre les deux méthodes d’ajustement s’opère au cas par cas suivant
les origines de la dispersion attribuées au CST. En effet, nous avons vu lors de la section
1.1 du chapitre 1, que la dépendance de l’indice effectif à la longueur d’onde avait pour
cause à la fois la dépendance en longueur d’onde des indices matériaux et la géométrie du
guide. Ceci entraîne que la dispersion chromatique possède deux contributions essentielles
et distinctes que sont :
– La dispersion guide liée à la structure d’indice du guide et à la répartition du champ
dans ce guide.
– La dispersion matériau dont les origines sont intrinsèques au matériau.

La réalité est généralement une combinaison de ces deux contributions mais le design
propre à chaque guide entraîne une prépondérance de l’une ou l’autre de ces dispersions.
La loi utilisée pour ajuster le temps de groupe sera alors, dans le premier cas, une loi de
type série de Taylor et, dans le second cas, une loi de type Sellmeier.

L’ajustement présenté sur la figure 2.9 correspond donc à une loi de Sellmeier à l’ordre 2
(noir). Même si, dans le cas présent, la différence n’est pas significative avec un ajustement
polynomial, celle-ci peut être plus importante dans le cas d’une fibre au profil d’indice
plus complexe. Ces ajustements sont particulièrement importants car ce sont eux qui sont
55

dérivés afin d’obtenir la dispersion chromatique de la fibre en fonction de la longueur


d’onde.

20
Dispersion chromatique (ps.nm−1.km−1)

19.5

19

18.5

18

17.5

17

16.5

16

15.5

15
1530 1540 1550 1560 1570 1580 1590 1600
Longueur d’onde (nm)

Figure 2.10 – Évolution de la dispersion chromatique en fonction de la longueur d’onde mesurée


dans une fibre SMF28
Gris : Mesure OLCR ; Noir : Simulation

La figure 2.10 présente une comparaison des valeurs mesurées (en gris) et simulées (en noir)
de la dispersion chromatique dans un fibre SMF28. La simulation a été réalisée à partir de
la relation 2.27 où la valeur du coefficient S0 à été fixée à 0.090ps.nm−2 .km−1 et la valeur
du coefficient λ0 à 1320nm. La courbe de dispersion chromatique mesurée a été obtenue à
partir d’une approximation du temps de groupe suivant une loi de Sellmeier.
Nous notons un très bon accord des valeurs de la dispersion simulées et mesurées avec
un écart maximum ≤ 2% sur l’ensemble de la bande C+L. Par ailleurs cette précision est
valable tant au niveau de la valeur de la dispersion chromatique elle-même qu’au niveau
de la pente de celle-ci.

2.3.5 Mesure de la biréfringence


A partir de l’acquisition de différents réflectogrammes, correspondant à un même guide
mais pour différents états de polarisation à l’injection dans le guide, il est possible de dé-
terminer sa biréfringence par la mesure OLCR. Comme nous allons le voir, deux approches
56 2. OLCR sensible à la phase : principe et performances

sont envisageables.

Dans un premier cas, la biréfringence peut être mesurée par l’écart spatial séparant,
au sein du réflectogramme, les deux réflexions successives correspondant aux propagations
suivant les deux axes propres de biréfringence. Cette méthode est tout de même limitée
puisqu’il faut pouvoir discriminer suffisamment précisément les maxima des différentes ré-
flexions. Par ailleurs, dès lors que les deux réflexions sont trop proches l’une de l’autre,
elles deviennent impossible à discriminer à cause du recouvrement. Pour ces raisons, cette
méthode convient mieux aux cas de biréfringence élevée dans lesquels aucune superposi-
tion de réflexion n’entrave la mesure et où l’erreur relative sur la position des maxima est
négligeable devant la valeur de la biréfringence.

Une autre approche plus précise et applicable aux cas de réflexions superposées est
celle qui consiste à exploiter les battements produits par ce recouvrement pour mesurer la
biréfringence.

Sortie 0°

Sortie 45°
Amplitude (u.a.)

Sortie 90°

Entrée

-0.5 -0.4 -0.3 -0.2 -0.1 0.0 0.1 0.2 0.3 0.4 0.5

Position du miroir (mm)

Figure 2.11 – Réflectogrammes enregistrés pour une fibre biréfringente en fonction de l’angle du
polariseur d’entrée

Pour illustrer la première méthode de mesure, la figure 2.11 présente plusieurs réflecto-
grammes enregistrés pour une même fibre, fortement biréfringente, en fonction de l’orien-
tation du polariseur d’entrée. Ici, puisque la biréfringence est élevée (' 4.10−4 ), les deux
réflexions, correspondant aux deux états de polarisations orthogonaux, sont suffisamment
57

séparées pour que la biréfringence ait pu être mesurée à partir de l’écart spatial les séparant.

30

25
Puissance optique relative (dB)

20

15

10

0
1510 1520 1530 1540 1550 1560 1570 1580 1590 1600 1610 1620
Longueur d’onde (nm)

Figure 2.12 – Illustration des battements créés par la biréfringence dans le domaine spectral
pour la mesure OLCR d’une fibre biréfringente
Noir : polariseur orienté à 0 degré ; Gris : polariseur orienté à 45 degrés

Dans le cas de la seconde approche, la figure 2.12 présente les battements générés par
la biréfringence dans le domaine spectral. Nous avons établi, de façon arbitraire, comme
0◦ et 90◦ , les deux axes propres de biréfringence de la fibre en plaçant le polariseur, situé
en entrée du guide, de façon à minimiser (éteindre) les battements. La mesure de biréfrin-
gence est ensuite réalisée pour une orientation à 45◦ de ce même polariseur de sorte que les
battements soient maximisés (précisons que ce cas est équivalent à celui dans lequel aucun
polariseur n’est inséré dans le dispositif). La figure présente les résultats obtenus pour une
mesure réalisée suivant les orientations à 0◦ (en noir) et à 45◦ (en gris) du polariseur d’en-
trée. Ainsi nous pouvons observer l’absence totale de battement pour l’orientation à 0◦ du
polariseur alors que ceux ci sont maximums dans le cas de l’orientation à 45◦ . Les niveaux
absolus de deux spectres ont été ajustés empiriquement de manière à mieux pouvoir les
comparer.

En connaissant la période du battement dans le domaine spectral et en utilisant l’équa-


58 2. OLCR sensible à la phase : principe et performances

tion 1.17, nous pouvons déterminer directement la biréfringence de groupe du CST comme
étant :

λ2
Bg = (2.35)
∆λ2L

où L est la longueur du CST. Dans le cas présenté sur la figure 2.12, ∆λ est mesuré comme
étant l’intervalle entre deux minima dans le spectre gris. La valeur de biréfringence obtenue
est alors d’environ 3.10−3 .

Aucune limite réelle n’existe pour la détermination de la biréfringence en ce qui concerne


les valeurs maximales puisque, comme nous la vu sur la figure 2.11, la mesure peut reposer,
dans ce cas, sur l’écart spatial entre les deux modes de polarisation dans le réflectogramme.
Or l’écart mesurable dans la pratique va bien au delà des valeurs de biréfringence réalisable
dans un guide.

En revanche la valeur minimale de biréfringence mesurable est limitée par la période


de battement mesurable la plus importante et, par conséquent, par la largeur spectrale
de la source utilisée. Donc, considérant cette période à 40 nm (soit la demi largeur de la
source) dans nôtre cas, la biréfringence minimum mesurable par ce dispositif expérimental
est limitée à :

Bmin ' 5.10−5 (2.36)

2.3.6 Sensibilité du dispositif expérimental

La carte d’acquisition échantillonnée sur 12 bits permet une dynamique théorique sur
la mesure de réflectivité en intensité d’environ 72 dB 1 . Le signal délivré par la détection
équilibré est compris entre −0.5 et +0.5 Volt crête au plus petit calibre de la carte et −10
et +10 au plus grand calibre de la carte.
Le niveau de bruit dans l’acquisition du signal de mesure, d’origine multiple (bruit
optique de la source, bruit électrique de la détection équilibrée, bruit de phase sur l’acqui-
sition de l’horloge,...), se situe autour de ±0.001 Volt. La dynamique de mesure réelle du
dispositif est donc d’environ 60 dB.

Au delà de la dynamique de mesure, les parties qui suivent ont pour objectif d’établir
les sensibilités de mesure en terme d’intensité comme en terme de précision sur la dispersion
mesurée.

1. 12 bits signifie un échantillonnage sur 212 = 4096 valeurs lors de l’enregistrement du réflectogramme
en amplitude. Il faut ensuite considérer 20 log(4096) = 72.2472 pour déterminer la dynamique théorique
du système sur la mesure de réflectivité en intensité.
59

Sensibilité en intensité
Afin d’établir plus précisément les critères de sensibilité du banc de mesure nous avons
comparé des mesures réalisées pour deux éléments réfléchissants connus que sont les connec-
teurs FC/PC et FC/APC. L’objectif est donc d’aider à mieux quantifier le niveau minimum
de signal réfléchi détectable et, par ailleurs, de déterminer l’impact de ce niveau sur la pré-
cision de la mesure.

La différence entre les deux connecteurs vient de l’angle appliqué au clivage. En effet,
la réflexion de Fresnel sur le connecteur peut être plus ou moins réinjectée dans la fibre
suivant l’angle de la face réfléchissante du connecteur. Les connecteurs FC/PC sont clivés
droit avec un niveau de réflexion de −14dB alors que les connecteurs FC/APC, dont l’angle
de clivage est de 8◦ , sont conçus pour minimiser le signal rétro-guidé avec un niveau de
signal retour ≤ −60dB.

10 0.1

0.05
8
0
6
−0.05

4 −0.1
10 10.5 11
Amplitude (V)

−2

−4

−6

−8

−10
9.8 10 10.2 10.4 10.6 10.8 11 11.2
Déplacement miroir relatif (mm)

Figure 2.13 – Réflectogrammes enregistrés à l’OLCR pour des réflexions sur des connecteurs
FC/PC et FC/APC à l’extrémité d’une fibre SMF
Noir : sortie PC de la fibre amorce ; Gris foncé : sortie PC de la fibre sous test ; Gris clair : sortie
APC de la fibre sous test

La figure 2.13 présente une comparaison de réflectogrammes obtenus à l’OLCR pour


différentes réflexions sur des connecteurs FC/PC et FC/APC à l’extrémité de fibres SMF.
En noir, nous observons la réflexion sur le connecteur FC/PC de la fibre amorce. En gris
foncé, nous observons la réflexion sur le connecteur FC/PC d’une fibre SMF testée. Pour
60 2. OLCR sensible à la phase : principe et performances

finir, en gris clair, nous observons la réflexion sur le connecteur FC/APC d’une autre fibre
SMF testée. Les deux fibres testées ont exactement la même longueur (210cm) et la même
dispersion (17ps.nm−1 .km−1 ), ce qui signifie que les différences d’amplitude dans les ré-
flectogrammes sont uniquement dûes au niveau de réflexion sur le connecteur. La différence
entre les réflectogrammes noir et gris foncé est, quant à elle, uniquement liée à l’étalement
spatial généré par la dispersion de la fibre.

15

10
Temps de groupe relatif (ps)

−5

−10

−15
1510 1520 1530 1540 1550 1560 1570 1580 1590 1600 1610 1620
Longueur d’onde (nm)

Figure 2.14 – Temps de groupe relatif mesuré à l’OLCR à partir de la réflexion sur un
connecteur FC/APC (réflexion < -60dB)
Noir : mesure OLCR ; Gris : ajustement numérique

Bien qu’étant faiblement au dessus du niveau de bruit, le signal correspondant au


connecteur FC/APC (gris clair) apparaît clairement dans l’encart qui présente un zoom
sur le réflectogramme. Il nous permet, de plus, de mesurer avec une bonne précision la
dispersion de cette fibre sur l’ensemble de la bande C+L. La figure 2.14 nous présente
d’ailleurs le temps de groupe relatif mesuré pour la fibre SMF à partir de la réflexion sur
un connecteur FC/APC (en noir) et l’ajustement numérique, réalisé sur cette mesure (en
gris), à partir duquel la dispersion à pu être obtenue. Nous observons donc un évolution
du temps de groupe d’environ 3 ps sur la bande spectrale de la source.
61

−10

−20

−30
Réflectivité (dB)

> 45 dB
−40

−50

−60

−70

−80

−90

−100
9.4 9.6 9.8 10 10.2 10.4 10.6 10.8
Position du miroir (mm)

Figure 2.15 – Réflectogrammes en dB obtenus pour des réflexions sur des connecteurs FC/PC et
FC/APC
Noir : connecteur FC/PC ; Gris : connecteur FC/APC

La figure 2.15 présente, à nouveau, la comparaison entre deux réflectogrammes obtenus


pour les deux types de connecteurs (FC/PC et FC/APC) mais, cette fois, en puissance
optique. Sachant que la puissance optique à la sortie de la fibre (dans les deux cas) a
été mesurée à 0 dBm, nous avons pu constater la capacité de la méthode à détecter un
signal de réflexion d’intensité absolue de l’ordre de −60 dBm. Par ailleurs, l’écart attendu
d’environ 45 dB entre les niveaux de réflexion sur les deux types de connecteurs apparaît
clairement lors de cette mesure.

Sensibilité de la mesure de dispersion


Nous avons calibré la mesure de dispersion par le dispositif OLCR par l’intermédiaire
d’une caractérisation de fibre SMF28. Les résultats ont démontré une très bonne concor-
dance des valeurs théoriques et expérimentales. Il peut être utile néanmoins d’établir une
limite de la valeur de dispersion chromatique pouvant être mesurée. En pratique, nous
pourrons plutôt déterminer la précision relative de la mesure en fonction du niveau de
dispersion cumulée.
62 2. OLCR sensible à la phase : principe et performances

Pour cela nous avons donc réalisé une série de mesures impliquant des tronçons de fibre
SMF28 de différentes tailles. Chacun de ces tronçons a été testé plusieurs fois pour pouvoir
établir une moyenne de la valeur de dispersion cumulée de la fibre ainsi qu’un écart sur
cette moyenne qui servira à fixer la précision de la mesure.
Rappelons que nous appellons la dispersion cumulée la valeur de dispersion propre au
CST et non normalisée par rapport à la distance. Celle-ci est donc exprimée en ps.nm−1
alors que la dispersion chromatique est classiquement exprimée en ps.nm−1 .km−1 .

18

17
Dispersion (ps.nm−1.km−1)

16

15

14

13

12
0 0.002 0.004 0.006 0.008 0.01 0.012 0.014
−1
Dispersion cumulée (ps.nm )
Figure 2.16 – Précision sur la mesure OLCR de dispersion en fonction de la dispersion cumulée
du CST

La figure 2.16 présente une évolution de la précision sur la mesure de dispersion en


fonction du niveau de dispersion cumulée. Nous pouvons donc constater qu’au delà de
' 0.05ps.nm−1 , la valeur de dispersion chromatique est donnée avec une erreur ≤ 1.5%.
Ceci détermine donc le seuil de sensibilité de la mesure de dispersion.

Conclusion
Nous avons montré au cours de ce chapitre, tout d’abord, sur quel principe théorique
est basé la réflectométrie optique à faible cohérence. Ensuite, nous avons expliqué com-
ment ce principe est appliqué avec nôtre dispositif expérimental, à la mesure de propriétés
63

physiques de composants optiques. Enfin, nous avons présenté les capacités spécifiques et
les limites inhérentes à ce dispositif.

La rapidité des acquisitions (quelques secondes), la diversité des paramètres pouvant


être caractérisés (biréfringence, dispersion, pertes...), la très bonne résolution spatiale (en-
viron 100 µm), la dynamique (environ 60 dB) et la grande précision des mesures en terme
de biréfringence (Bmin ' 5.10−5 ) ou en terme de dispersion (0.05 ps.nm−1 ) nous ont
permis, comme nous allons le voir lors des chapitres suivants, de caractériser de nombreux
composants optiques et d’apporter une aide essentielle à la compréhension des phénomènes
physiques liés à leur fonctionnement.
64 2. OLCR sensible à la phase : principe et performances
65

Chapitre 3

Étude de fibres optiques spéciales

Nous présentons, au cours de ce chapitre, un ensemble de résultats obtenus pour des


mesures effectuées sur des fibres optiques. Qu’il s’agisse de fibres dopées Erbium, de fibres
micro-structurées ou encore de fibres légèrement multimodes nous verrons comment la
méthode OLCR permet une analyse en profondeur de certaines de leurs propriétés fonda-
mentales.

La mesure de l’évolution de l’indice et de la dispersion, dans une fibre dopée Erbium,


en fonction de l’intensité du signal de pompe est décrite lors de la première section. Il
s’agit de montrer comment l’OLCR permet une approche et une caractérisation simple et
complète des effets liés à la relation de Kramers-Kronig entre ces différents paramètres.

Nous présentons ensuite la mesure de l’évolution spatiale (longitudinale) des paramètres


d’une fibre micro-structurée. L’aptitude de la technique OLCR à mesurer des tronçons de
fibre optique très courts est ici primordiale. Elle permet une étude de l’impact du processus
de fabrication de la fibre sur ses propriétés optiques.

Enfin, c’est l’analyse complète des propriétés de dispersion de l’ensemble des modes de
fibres légèrement multimodes qui sera présentée. Ces fibres, principalement conçues pour
des applications de gestion de la dispersion, guident quelques modes (typiquement entre 2
et 5) dont les valeurs d’indices de groupes et de dispersions couvrent une très large étendue.
L’OLCR apparaît alors comme une méthode simple, rapide et exhaustive pour ce type de
caractérisation.
66 3. Étude de fibres optiques spéciales

3.1 Lien indice/amplification dans une fibre dopée Erbium


Depuis la fin des années 1980 [45, 46], les fibres dopées aux ions Erbium (Er3+ ) ont
apporté une contribution décisive au développement des réseaux de télécommunications
optiques. En effet, leur capacité à amplifier fortement le signal, et particulièrement dans
une partie du domaine spectral des télécommunications optiques (autour de 1550 nm), a
permis une extension considérable de la portée de ces réseaux.

Par la suite, leur champ d’application s’est grandement élargi et elles sont aujourd’hui
utilisées pour de nombreuses autres applications. Par exemple, la conception de d’inter-
rupteurs optiques non linéaires [47] ou encore, la fabrication de lasers [48].

3.1.1 Principes théoriques


Contexte de l’étude
Il est connu que les caractéristiques des niveaux d’énergie des ions terres rares (Erbium,
Ytterbium...) en font de très bons candidats à l’amplification et, notamment, dans le do-
maine spectral des télécommunications optiques.

Les propriétés des fibres dopées Erbium sont dûes à l’exploitation des différentes tran-
sitions entre les niveaux d’énergie de l’ion Er3+ . En effet, dans un modèle théorique qui
permet de décrire l’amplification Erbium, et qui correspond à la majorité des configura-
tions utilisant le dopage Erbium [49] ces transitions peuvent être présentées comme sur la
figure 3.1.

Etat excité
|3>

Photon λpompe Etat excité


|2>
Photon λsignal Photons λsignal

Etat fondamental
|1>
Figure 3.1 – Diagramme simplifié à 3 niveaux des transitions entre niveaux d’énergie dans l’ion
Erbium

Le signal et la pompe sont tous les deux introduits dans le milieu amplificateur. L’éner-
gie de la pompe est absorbée par la transition de l’électron du niveau fondamental | 1 >
vers le niveau excité | 3 > où l’énergie, pour passer d’un niveau à l’autre, est liée à la
longueur d’onde de la pompe par la quantification E = hνpompe . Il se produit ensuite une
désexcitation non radiative (phonons ou autre) du niveau d’énergie excité | 3 > vers le ni-
veau d’énergie métastable | 2 >. Enfin, l’électron retourne à l’état fondamental en perdant
67

de l’énergie via l’émission d’un photon dont la longueur d’onde correspond, cette fois, à
celle du signal. Le signal est donc amplifié puisqu’il y a transfert de l’énergie de la pompe
vers celle du signal.

gain > 1
Gain (u.a.)

0%
20 %
40 %
60 %
80 %
gain < 1 100 %
inversion de population
1500 1550 1600
Longueur d'onde (nm)

Figure 3.2 – Gain en fonction de la longueur d’onde pour différentes fractions d’inversion de
population

Usuellement, l’évolution du gain dans une fibre dopée Erbium est décrite par la relation :

G = σe N2 − σa N1 (3.1)

où N2 et N1 représentent les taux de population pour les niveaux d’énergie 1 et 2 et σe et


σa les sections efficaces d’émission et d’absorption. Ces deux dernières grandeurs décrivent
la probabilité d’émission ou d’absorption d’un photon par le milieu alors que N2 et N1
décrivent la quantité d’électrons dans l’un ou l’autre des niveaux d’énergie.

La figure 3.2 présente la forme type du gain dans une fibre dopée Erbium en fonction
de la fraction d’inversion de population, c’est à dire, de la répartition des ions par état
d’énergie. Évidemment, il ne s’agit pas de gain mais d’absorption en dessous du seuil de
niveau de pompe à partir duquel la fibre commence vraiment à amplifier le signal. Par
ailleurs, la forme de ce gain dépend fortement de l’inversion de population donc du niveau
de pompe. Plus uniforme, pour les inversions de population les plus faibles (50%), il devient
beaucoup plus important, autour de la longueur d’onde de 1530 nm, pour les inversions
de population les plus fortes (autour de 100%).
68 3. Étude de fibres optiques spéciales

L’une des particularités de cette capacité à amplifier est le lien entre l’amplification
et l’indice du milieu par l’intermédiaire de la susceptibilité atomique [49]. Nous verrons
comment la relation de Kramers-Kronig 3.10 relie les deux de manière significative.

Si, dans la majorité des cas des réseaux de transmission optique, cette propriété est
sans impact sur les performances, elle est d’importance dans certaines applications à forte
puissance (LIDAR...) où cet effet ne peut être négligé comme le montrerons les mesures.

Pour les raisons précédentes, le lien entre l’indice de réfraction et le gain [50, 51, 52, 53]
ou encore celui entre la puissance du signal et l’indice de réfaction [54] ont déjà été le
fruit d’investigations théoriques et expérimentales par le passé. Cependant, à l’exception
de [55], aucune de ces études ne repose sur une méthode interférométrique. L’objet de
ce travail est donc de démontrer l’aptitude de la réflectométrie faiblement cohérente à
analyser en profondeur et simultanément les effets du pompage sur le gain et l’indice de
la fibre. Par une simple acquisition, nous montrerons ces évolutions ainsi que celle de la
dispersion chromatique de la fibre en fonction de la puissance de pompe donc, de l’inversion
de population.

Susceptibilité imaginaire et réelle


Pour comprendre le lien entre gain et indice dans une fibre dopée Erbium, il faut d’abord
décrire la réponse d’un milieu diélectrique à un champ électromagnétique [56]. Usuellement,
nous utilisons le modèle de Lorentz qui décrit la réponse de l’électron au champ sous la
forme d’un oscillateur. Le mouvement de l’électron, pour lequel nous pouvons faire une
analogie avec un système masse-ressort soumis à une excitation, est alors donné par :

d2 x dx
me + me Γ + kx = e E(t) (3.2)
dt2 dt

où me est la masse de l’électron, Γ est le coefficient d’amortissement, kx est la force de


rappel, assimilable à celle d’un ressort, e la charge de l’électron et E(t) le champ électro-
magnétique.

La solution de l’équation 3.2 s’écrit :

e 1
x(t) = 2 E(t) (3.3)
me ω0 − ω 2 − iΓω
p
où ω0 = k/me est la pulsation à la résonance.

Par ailleurs, la polarisation macroscopique, traduisant la réponse du milieu, s’écrit :

P (t) = ρex(t) (3.4)


69

où ρ est la densité atomique.

Mais P s’écrit aussi :

P (t) = E(t) = 0 n2 E(t) = 0 [1 + χ(ω)]E(t) (3.5)

Le point important est que l’ensemble des équations précédentes permet de définir l’indice
de réfraction complexe n, la susceptibilité électrique du milieu χ mais aussi, comme nous
allons le voir, d’établir le lien entre les deux ainsi que le lien entre partie imaginaire et
réelle de chacun d’entre eux.

En effet, l’indice complexe peut s’écrire :

n2 (ω) = 1 + χ(ω) (3.6)

La relation précédente est valable dans le cas d’un milieu passif comme c’est la cas d’une
fibre en silice classique. Elle est d’ailleurs à l’origine de la loi de Sellmeier décrivant cet
indice [57].

A cela, il faut ajouter, dans le cas du milieu dopé Erbium, le fait que cette susceptibilité
est complexe et s’écrit :

χ = χ0 − iχ00 (3.7)

C’est ce fait qui conditionne le lien entre effet d’amplification et variation de l’indice effectif
dans une fibre dopée Erbium.

En effet, il a été montré [56] que la variation d’indice effectif induite par le gain pouvait
être reliée à la partie réelle de la susceptibilité par la relation :
L
1
Z
δn(ω) = Γs χ0 (ω, z)dz (3.8)
2nL 0

où Γs est le facteur de recouvrement du mode de propagation avec le cœur dopé de la fibre


et L la longueur de la fibre.
70 3. Étude de fibres optiques spéciales

Le gain en puissance est, quant à lui, relié à la partie imaginaire de cette même sus-
ceptibilité par la relation :
L
ω
Z
G(ω) = exp[−Γs χ00 (ω, z)dz] (3.9)
nc 0

Finalement, c’est l’une des propriétés de la transformée de Hilbert qui lie les parties ima-
ginaire et réelle de la susceptibilité. Il s’agit de la relation de Kramers-Kronig dont le rôle
est primordial dans l’étude que nous présentons. Celle-ci s’exprime sous la forme :
Z +∞ 00 0
0 1 χ (ω ) 0
χ (ω) = P.V. 0
dω (3.10)
π −∞ ω − ω

où P.V. dénote la valeur de Cauchy principale de l’intégrale.


Susceptibilité réelle (u.a.)

1430 1470 1510 1550 1590 1630


Longueur d’onde (nm)

Figure 3.3 – Susceptibilité réelle en fonction de la longueur d’onde pour différentes puissance de
pompe (Puissance de pompe/Puissance de pompe seuil) [49]

La figure 3.3 présente l’évolution théorique de la susceptibilité réelle en fonction de la


longueur d’onde pour plusieurs puissances de pompe (normalisées par rapport à une puis-
sance seuil). Nous verrons que cette figure est tout à fait similaire à l’évolution théorique
de l’indice effectif avec la puissance de pompe.
71

Susceptibilité imaginaire (u.a.)

1430 1470 1510 1550 1590 1630


Longueur d’onde (nm)

Figure 3.4 – Susceptibilité imaginaire en fonction de la longueur d’onde pour différentes


puissance de pompe (Puissance de pompe/Puissance de pompe seuil) [49]

La figure 3.4 présente, quant à elle, l’évolution théorique de la susceptibilité imagi-


naire en fonction de la longueur d’onde pour plusieurs puissances de pompe. Nous pouvons
constater la similarité (à un facteur près) entre cette figure et la figure 3.2 décrivant l’évo-
lution du gain en fonction de la longueur d’onde dans une fibre dopée Erbium.

Finalement ce sont donc le gain et l’indice effectif qui sont directement reliés par la
transformée de Hilbert. La variation du niveau de pompe induira une variation du gain
qui elle même induira une variation de l’indice effectif donc de l’indice de groupe et de la
dispersion chromatique de la fibre.

3.1.2 Mesures
Nous avons caractérisé une fibre dopée Erbium, du constructeur Coractiver (référencée
Er-25-05-01), de 573 mm de long, dont l’absorption théorique au cœur, donnée à la lon-
gueur d’onde de 1529 nm, est de 27.5 dB/m. Il est essentiel, pour des valeurs d’absorption
aussi importantes, de pouvoir effectuer des mesures sur des tronçons de fibres très courts.
De ce point de vue, l’OLCR se montre adaptée à la caractérisation de ces fibres aussi bien
en régime passif qu’en régime actif.

La mesure a été réalisée avec le dispositif présenté sur la figure 2.1 auquel nous avons
ajouté un multiplexeur 980nm/1550nm pour injecter simultanément la pompe et le signal
dans la fibre sous test. La fibre est donc pompée de manière co-propagative par une pompe
72 3. Étude de fibres optiques spéciales

centrée autour de la longueur d’onde de 980 nm et dont la puissance varie entre 0 mW et


80 mW .

3
P pompe (mW)
69
2
32
00
1
Amplitude (V)

-1

-2

-3

2000 4000 6000 8000 10000


Position du miroir (u.a.)

Figure 3.5 – Réflectogrammes de la face de sortie de la fibre dopée Erbium en fonction de la


puissance de pompe

La figure 3.5 présente l’impact de l’amplification/absorption en fonction de la puissance


de pompe sur les réflectogrammes mesurés sur la face de sortie de la fibre. Trois puissances
de pompe sont représentées avec 0 mW en gris clair, 32 mW en gris et 69 mW en noir.
Celles-ci nous permettent de constater l’impact plus grand de l’amplification sur certaines
longueurs d’onde. En effet, les longueurs d’onde sont séparées dans le réflectogramme du
fait de la dispersion non nulle de la fibre. Il apparaît clairement que la partie droite du
réflectogramme (correspondant aux basses longueurs d’onde) est nettement plus amplifiée.
Nous notons une valeur mesurée de l’amplitude allant de ±0, 5 V à ±2, 5 V pour les valeurs
de puissance de pompe de 0 mW et 69 mW au maximum de variation du signal. Cette
partie du signal réfléchi passe d’une forte absorption à une forte amplification. A l’inverse, la
partie gauche (correspondant aux hautes longueurs d’onde) ne subit pratiquement aucune
variation en fonction du niveau de pompe.
73

35
P (mW)
pompe
05
30
31
69

25
Puissance (dB)

20

15

10

5
1480 1500 1520 1540 1560 1580 1600 1620
Longueur d’onde (nm)

Figure 3.6 – Spectres obtenus par TF des réflectogrammes de la face de sortie de la fibre dopée
Erbium en fonction de la puissance de pompe

La figure 3.6 présente l’impact de l’amplification/absorption en fonction de la puissance


de pompe sur le module de la transformée de Fourier des réflectogrammes. Rappelons que
ce module correspond à la densité spectrale de puissance de la source multipliée par le
module de la réflectivité complexe de la fibre. Comme dans le cas de la figure 3.5, les
spectres sont présentés pour trois puissances de pompe différentes avec 0 mW en gris clair,
32 mW en gris et 69 mW en noir. Cette figure confirme l’explication de la figure précé-
dente suivant laquelle l’absorption/amplification est beaucoup plus importante aux basses
longueurs d’onde. En effet, à la longueur d’onde de 1530 nm, la puissance réfléchie subit
une variation d’environ 13 dB pour une puissance de pompe allant de 05 mW à 69 mW . A
l’inverse, à la longueur d’onde de 1590 nm la variation maximale est pratiquement nulle.
Notons que, pour certaines des courbes présentées ici, une "surmodulation" apparaît sur
la courbe du fait de la formation d’une cavité Pérot-Fabry entre la face de sortie de la fibre
d’injection et la face d’entrée de la fibre sous test. En effet, avec un espacement d’environ
500 µm entre les deux fibres, l’intervalle spectrale libre de cette cavité est de quelque nm,
ce qui correspond à la "surmodulation" observée.

Finalement ce module permet une comparaison directe des absorptions/amplifications.


En effet, bien que les pertes liées à l’injection ne soient pas déterminées exactement, celles-
ci sont identiques pour chaque mesure et n’apparaissent pas dans la comparaison. Par
ailleurs, le niveau de réflexion de Fresnel, d’environ −14 dB, n’intervient pas non plus
dans le gain mesuré en fonction de la puissance de pompe puisque il est, là encore, le
même pour chaque mesure.
74 3. Étude de fibres optiques spéciales

12
11
10 Ppompe(mW)
9 05
8 13
23
Gain (dB)

7
6
32
41
5
51
4
60
3 69
2
1
0
1510 1520 1530 1540 1550 1560 1570 1580
Longueur d'onde (nm)

Figure 3.7 – Gains mesurés dans le fibre dopée Erbium en fonction de la longueur d’onde pour
différentes puissances de pompe

La figure 3.7 présente le gain en dB en fonction de la longueur d’onde pour différentes


puissances de pompe, c’est à dire, la différence entre le module de la transformée de Fourier
du réflectogramme pour une puissance de pompe nulle (cf figure 3.6) et ce même module
pour la puissance de pompe indiquée. Tous les gains présentés ont été rapportés au signal
mesuré sans pompe ce qui explique un gain exclusivement positif sur la figure. Nous re-
trouvons une forme d’évolution mesurée similaire à celle de l’évolution théorique 3.2 avec
un maximum d’amplification à la longueur d’onde de 1530 nm. A cette longueur d’onde,
le gain évolue d’environ 8 dB pour une différence de puissance de pompe de 60 dB.
75

3.0
Indice de groupe relatif (x10 4)

2.5 Ppompe(mW)
00
2.0 05
13
23
1.5
32
41
1.0 51
60
0.5 69

0.0
1510 1520 1530 1540 1550 1560 1570 1580
Longueur d'onde (nm)

Figure 3.8 – Indices de groupes relatifs mesurés en fonction de la puissance de pompe

La figure 3.8 présente, quant à elle, l’évolution de l’indice de groupe avec la puissance
de pompe. Nous notons une évolution de l’indice de groupe d’environ 1, 8.10−4 à la lon-
gueur d’onde d’amplification maximale, c’est à dire, autour de 1530 nm. Ceci implique une
variation du temps de groupe, pour un fibre de 50 cm, d’environ 0.3 ps. Bien que réalisé
pour un dopage différent et avec une puissance de pompe différente, les résultats présentés
ici sont en bonne concordance avec les résultats établis dans la littérature par d’autres
méthodes de mesure [52, 58].
76 3. Étude de fibres optiques spéciales

40

30 Ppompe(mW)
Dispersion (ps.nm -1.km -1)

00
20 05
13
23
10
32
41
0 51
60
-10 69

-20
1515 1520 1525 1530 1535 1540
Longueur d'onde (nm)

Figure 3.9 – Évolution de la dispersion chromatique avec la puissance de pompe

Enfin, la figure 3.9 présente l’impact de l’évolution de l’indice sur la dispersion. Les
variations de dispersion engendrées peuvent être importantes étant donné la relation de
dérivation qui lie indice de groupe (temps de groupe) et dispersion chromatique comme
nous l’avons vu avec 1.12. Dans le cas présent, nous observons une variation allant d’en-
viron −10 ps.nm−1 .km−1 sans pompage à 30 ps.nm−1 .km−1 pour la puissance de pompe
maximale à la longueur d’onde de 1530 nm. Cet effet est significatif dans le cas de l’ampli-
fication d’impulsions de longue durée et de forte puissance. La dépletion du gain entraîne
une distorsion de l’impulsion en sortie. Il en résulte également une variation de l’indice
du milieu et donc, par effet Doppler, une variation de la fréquence optique sur la durée
de l’impulsion. C’est notamment le cas des applications LIDAR cohérent pour lesquelles
l’effet ne peut être négligé.

Nous avons donc démontré l’aptitude de l’OLCR sensible à la phase à étudier l’impact
de la relation de Kramers-Kronig, qui lie l’amplification et l’indice dans une fibre dopée Er-
bium sur les systèmes utilisant ce type de fibre. La méthode est rapide (durée d’acquisition
de l’ordre de la dizaine de secondes pour chaque niveau de pompe) et complète dans le sens
qu’elle fournit une observation simultanée de l’amplification, de l’indice et de la dispersion
pour toutes les longueurs d’onde de la source large bande. De plus, elle permet une bonne
précision sur la mesure de l’évolution du paramètre de dispersion (< 1 ps.nm−1 .km−1 )
pour des tronçons de fibre courts (environ 50 cm).
77

3.2 Évolution longitudinale des propriétés d’une fibre à cris-


taux photoniques à cœur plein

3.2.1 Introduction et contexte

L’une des étapes importantes du développement des fibres optiques, après la descrip-
tion du concept de cristaux photoniques et de ses potentialités par Yablonovitch dans les
années 1990 [59], fut l’application de ce concept à la fabrication de fibres optiques d’un
nouveau genre. Ces fibres optiques, dites fibres à cristaux photoniques (FCP), apparues
dans les années 2000 [2], ont ouvert la voie vers un grand nombre de possibilités pour les
fibres optiques et, par conséquent, vers de nouvelles applications. La conception de super-
continuum, de fibres infiniment monomodes ou encore le transport de fortes puissances dans
une fibre à cœur creux sont quelques unes des nombreuses applications pour lesquelles le
développement de FCP a permis ou devrait permettre des avancées considérables.

Nous pouvons distinguer, au sein de ce type de fibre, deux catégories particulières :

– Les FCP à confinement par réflexion totale interne (RTI) modifiée (on parle parfois
de fibres "à trous") dont le guidage s’effectue de la même façon que dans une fibre à
saut d’indice traditionnel. En effet, l’indice moyen y est plus fort au cœur de la fibre
par contraste avec l’indice de la gaine plus faible. Cette différence d’indice induit une
réflexion totale du signal injecté dans le cœur à l’interface cœur/gaine.
– Les FCP à confinement par bande photonique interdite (BIP) dont le guidage pro-
vient du fait que la structure du cristal photonique interdit la propagation, à travers
le cristal, à certaines ondes, en fonction de leur constante de propagation (nous ver-
rons plus en détail le principe théorique des cristaux photoniques au cours du chapitre
4). Nous trouvons aussi bien, dans ce modèle, des fibres à cœur plein (le plus souvent
en silice) que des fibres à cœur creux (trou d’air ou de gaz).

Même si, dans le premier cas, c’est le contraste d’indices moyens qui crée le guidage,
dans les deux cas, les fibres utilisent des structures à cristaux photoniques, c’est à dire,
un arrangement périodique de milieux d’indices différents [59] au sein de leur structure.
Arrangement périodique qui, dans le cas des fibres optiques, se fait par l’introduction,
sur toute la longueur de la fibre de tubes creux ou de plots d’indices différents. Ceux ci
sont donc disposés périodiquement, suivant une géométrie pré-établie (le plus souvent une
maille hexagonale), afin de créer un cristal photonique 2D.

La relative nouveauté de ces fibres fait que, pour leur conception, pour leur fabrication
et pour la maîtrise de leurs propriétés, il est indispensable de faire appel à des méthodes
de caractérisations performantes. L’OLCR peut apporter une aide déterminante dans cha-
cun de ces domaines du fait de son adaptabilité mais aussi de sa capacité à étudier des
échantillons de fibre de quelques dizaines de centimètres de longueur seulement [29].
78 3. Étude de fibres optiques spéciales

3.2.2 Mesures et résultats

2µm

Figure 3.10 – Photo MEB du profile de la fibre PCF Alcatel étudiée

La figure 3.10 présente le profil transverse obtenu par Microscope Électronique à Ba-
layage (MEB) de la fibre testée au cours de cette étude. Le diamètre des trous mesurés est
de 2, 1 µm et l’espacement entre les centres des trous de 2, 5 µm. Il est cependant apparent
que la forme des trous et l’espacement entre eux ne correspondent pas parfaitement au
profil théorique. En effet, pendant le processus de tirage, ceux-ci perdent en partie leur
profil circulaire et peuvent dévier légèrement de leur position initiale. Il faut alors prendre
en compte le fait que cette déformation évolue longitudinalement dans la fibre et entraîne
une variation de ses paramètres. La biréfringence, la dispersion ou encore les pertes sont
modifiées par cette déformation. L’évolution longitudinale des paramètres est donc direc-
tement liée aux conditions de fibrage. Il est, par conséquent, très intéressant de pouvoir
mesurer ces paramètres à différentes positions dans la fibre.
79

Dans un premier temps, la figure 3.11 présente le réflectogramme de mesure obtenu


pour la face de sortie de la fibre à cristaux photoniques étudiée. L’encart présente un zoom
au sein duquel chaque mode apparaît d’un niveau de gris différent. Il s’agit d’une mesure
effectuée sur un tronçon de fibre de 33 cm de long d’une FCP conçue et fabriquée par
Alcatel. Son profil est présenté sur la photo MEB de la figure 3.10. Nous distinguons sur
le réflectogramme une première réflexion importante correspondant au mode fondamental
puis un ensemble de réflexions moins intenses correspondant aux modes d’ordre supérieurs
de cette fibre. Les modes ont pu être classifiés, suivant leur indice effectif croissant, via une
simulation réalisée à partir de la photo MEB et d’une méthode des éléments finis (FEM).

Modes d’ordre supérieur


Mode fondamental 2,3
1 4
Amplitude (u.a.)

Modes d’ordre supérieur

Position du miroir (mm)

Figure 3.11 – Réflectogramme mesuré de la face de sortie de la fibre PCF Alcatel


80 3. Étude de fibres optiques spéciales

Mode fondamental (1550 nm) Modes d’ordre supérieur (1550 nm)


polarisation 0° polarisation 90° 1er mode 2nd mode 3ème mode 4ème mode
neff = 1.390182 neff = 1.390432 neff = 1.314945 neff = 1.314430 neff = 1.308064 neff = 1.306991

Figure 3.12 – Distributions d’intensité et indices effectifs des modes obtenus par simulation FEM

La figure 3.12 présente les profils en intensité obtenus pour quelques uns de ces modes
ainsi que les valeurs d’indices effectifs correspondantes. Cependant, l’emplacement de chaque
mode au sein du réflectogramme est déterminé par son indice de groupe facilement déduit
des indices effectifs simulés.

10

5
groupe
Groupdedelay (ps)
(ps)

0
Temps

-5
Mesure
Measurements
Ajustement
Linear numérique
approximation
-10
1520 1540 1560 1580 1600 1620
Wavelength
Longueur (nm)
d’onde (nm)

Figure 3.13 – Temps de groupe mesuré à l’OLCR du 4eme mode d’ordre supérieur de la fibre
PCF Alcatel

La figure 3.13 présente le temps de groupe mesuré (noir) et l’ajustement numérique


(gris) du 4eme mode d’ordre supérieur de la fibre. En dépit du bruit important du fait
de la faible intensité des réflexions des modes d’ordre supérieur nous avons pu extraire le
paramètre de dispersion de chacun des modes sur l’ensemble de la bande spectrale de la
source. Ainsi, à la longueur d’onde de 1550 nm nous avons obtenu des valeurs de disper-
sion de 238 ps.nm−1 .km−1 , 141 ps.nm−1 .km−1 , 141 ps.nm−1 .km−1 et 256 ps.nm−1 .km−1
respectivement pour les 1er , 2eme , 3eme et 4eme modes d’ordre supérieur de la fibre.
81

Nous avons vu que la structure du cristal photonique dans une fibre optique était créée
par l’arrangement périodique de milieu d’indices différents. Dans le cas présent, il s’agit
de capillaires (tubes d’air) agencés de manière à obtenir le profil de la fibre par la mé-
thode dite du "stack and draw", c’est à dire, empilés suivant la maille hexagonale (avec un
tube de silice au cœur) puis étirés dans un dispositif de tirage de fibre classique. Le pro-
fil final de la fibre est donc une homothétie de celui obtenu après empilement des capillaires.

Pour réaliser la mesure, une fibre de 1 km de long a été découpée en un ensemble de tron-
çons prélevés sur toute sa longueur. Dans un premier temps, plusieurs échantillons d’environ
40 cm ont été prélevés, en suivant une échelle logarithmique à 1, 2, 5, 10, 20, 100, 200 et
500 m dans la fibre. Pour chacun d’entre eux, nous avons mesuré la valeur de la dispersion
du mode fondamental, suivant les deux axes de polarisation, ainsi que la biréfringence. De
plus, ces mesures ont été réalisées en parallèle au Laboratoire National d’Essai (LNE). Le
LNE disposant aussi d’un dispositif OLCR sensible à la phase, nous avons pu établir une
comparaison des valeurs obtenues par les deux bancs de mesure. Nous avons également
comparé la précision de la mesure sur chacune de ces valeurs. Pour chaque mesure de la
dispersion, 20 acquisitions ont été réalisées pour pouvoir calculer une moyenne et un écart
type.

Position dans la fibre (m) DispersionEN ST σEN ST DispersionLN E σLN E


1 146,22 0,59 146,28 0,88
2 146,40 0,11
5 145,92 0,15 145,86 1,69
10 146,34 0,47 146,30 0,54
20 147,14 0,12 147,40 1,10
50 147,22 0,13 146,58 0,64
100 148,20 0,43 147,93 0,64
200 147,07 0,38 146,79 0,83
500 142,28 0,47 142,61 0,32

Table 3.1 – Comparaison ENST/LNE des dispersions mesurées, sur les différents tronçons de la
fibre PCF pour la polarisation 90◦

Les tableaux 3.1 et 3.2 présentent l’ensemble des valeurs de dispersions obtenues, pour
les deux états propres de polarisation, ainsi que les écarts types sur chacune des mesures.
Nous pouvons noter une faible évolution de la dispersion en fonction de la position dans la
fibre et un écart significatif entre les deux polarisations (d’environ 2 à 3 ps.nm−1 .km−1 ). La
plupart de ces effets trouvent leur explication dans les spécificités du processus de tirage
et les déformations géométriques qu’il génère. Par ailleurs, les deux dispositifs affichent
une très bonne précision avec un écart type inférieur à 2% et une très bonne concordance
entre la mesure ENST et la mesure LNE. Enfin, il faut préciser que, pour des raisons de
82 3. Étude de fibres optiques spéciales

Position dans la fibre (m) DispersionEN ST σEN ST DispersionLN E σLN E


1 143,15 0,35 143,07 0,62
2 143,38 0,09
5 143,28 0,08 143,30 1,50
10 143,83 0,27 143,37 0,41
20 143,60 0,17 143,99 0,40
50 143,74 0,08 143,48 0,88
100 144,68 0,35 145,02 0,46
200 144,41 0,19 143,30 0,63
500 141,87 0,59 140,92 0,42

Table 3.2 – Comparaison ENST/LNE des dispersions mesurées, sur les différents tronçons de la
fibre PCF pour la polarisation 0◦

confidentialité, nous ne présentons aucun résultat ayant trait à la biréfringence bien que
ceux-ci aient été utilisés en interne par le fabricant de la fibre.
Dispersion (ps.nm-1.km-1)

Position dans la fibre (m)

Figure 3.14 – Évolution longitudinale de la dispersion mesurée dans la fibre PCF alcatel

Dans un second temps, pour compléter l’analyse de la dépendance de la dispersion


à la position, un autre ensemble d’échantillons prélevés cette fois ci, suivant une échelle
linéaire, et issus de la même fibre, a été ajouté à la mesure précédente. La figure 3.14
présente l’évolution mesurée sur l’ensemble de la longueur de la fibre. Celle-ci est signifi-
cative puisqu’elle est comprise entre 142 ps.nm−1 .km−1 et 148 ps.nm−1 .km−1 pour une
polarisation et 142 ps.nm−1 .km−1 et 144 ps.nm−1 .km−1 pour l’autre. Les variations les
83

plus importantes sont situées au début de la fibre optique, probablement pour des raisons
liées à la "stabilité" du tirage de la fibre.

L’étude réalisée démontre l’apport de cette caractérisation à la compréhension des


phénomènes qui surviennent pendant la fabrication de la fibre et ont un impact sur ses
propriétés. Étude empirique dans un premier temps, elle sert de point de départ à une
compréhension plus fondamentale et éventuellement à une modification de certaines étapes
de la fabrication dans un second temps.

3.3 Dispersion des modes de fibres optiques faiblement mul-


timodes
3.3.1 Introduction et contexte
Historiquement, les premières fibres optiques apparues et utilisées pour des transmis-
sions ont été des fibres multimodes. En effet, la compréhension des propriétés de guidage
et le niveau de maîtrise de la fabrication à l’époque a naturellement conduit à fabriquer ce
type de fibre. Cependant, il a vite été découvert que les fibres optiques monomodes, dans
les bandes spectrales des télécommunications optiques, offraient de bien meilleures perfor-
mances pour leur utilisation dans un système de transmission. La dispersion inter-modale
inexistante et les pertes moindres dans les fibres optiques monomodes étant les deux raisons
principales du relatif "abandon" des fibres optiques multimodes. Depuis lors, la plupart des
fibres utilisées, pour les réseaux de transmission optique en particulier, ont été des fibres
monomodes (SMF, DSF...). Néanmoins, industriels et chercheurs ont récemment porté de
nouveau leur attention sur ces fibres, et ce, parce que certaines de leurs propriétés, jus-
qu’alors perçues comme des défauts, peuvent être exploitées pour produire de nouvelles
applications. De plus, la conversion de l’énergie d’un mode de propagation à l’autre est
aujourd’hui nettement mieux maîtrisée avec notamment des solutions telles que les réseaux
de Bragg longue période [60] ou encore les adaptateurs de taille de mode qui permettent
un transfert de l’énergie d’un mode vers l’autre avec un taux de conversion supérieur à 99%.

A l’heure actuelle, les fibres optiques multimodes peuvent donc être utilisées pour de
nombreuses applications dans le domaine de télécommunications optiques telles que la com-
pensation de la dispersion ou la fabrication d’interrupteurs optiques [61, 62]. Elles peuvent
aussi être utilisées pour des applications dans d’autres domaines tels la conception de cap-
teurs [61] ou le transport de fortes puissances dans un mode d’aire effective très grande
(jusqu’à 3200 µm2 ) [63].

Il est donc essentiel de pouvoir faire appel à des méthodes de mesure capables de ca-
ractériser une fibre multimode dans son ensemble, c’est à dire, de connaître les propriétés
de chacun des modes guidés [64, 65, 66]. De ce point de vue, l’OLCR présente l’avantage
de pouvoir extraire les propriétés de chaque mode à partir d’une seule mesure et sans faire
appel à un dispositif de conversion de mode, comme ce serait le cas notamment d’une
84 3. Étude de fibres optiques spéciales

mesure basée sur la méthode de la Phase-Shift.

Nous présentons ici une étude réalisée sur quatre fibres faiblement multimodes fournies
par les laboratoires d’Optical Fiber Solutions (OFS). Dans le cas présent, l’expression
faiblement multimode désigne des fibres optiques conçues pour guider jusqu’à 5 modes
dans le domaine spectral des télécommunications optiques (autour de la longueur d’onde
1550nm). Ces fibres ont notamment été conçues pour des applications de compensation
de la dispersion. L’objectif est de déterminer le paramètre de dispersion pour chacun des
modes guidés des fibres optiques étudiées.

3.3.2 Principe du guidage multimodale


Pour mieux comprendre cette étude, nous introduisons les principes théoriques du gui-
dage multimodale dans une fibre optique. Nous nous contentons, dans un premier temps,
d’une approche géométrique avant de voir, par la suite, l’approche électromagnétique.

Rappelons tout d’abord que dans une approche par l’optique géométrique, qui permet
une bonne appréhension du guidage multimodale, le guidage se fait par réflexion totale
du rayon à l’interface cœur/gaine. Dans le cas le plus simple d’un guide plan symétrique 1
comme celui que nous pouvons observer sur la figure 3.15, le rayon est ainsi piégé dans un
milieu d’indice plus élevé (le cœur) entouré d’un milieu d’indice plus faible (la gaine).

x
z

ngaine
y

ncoeur

ngaine

Figure 3.15 – Schéma simplifié d’un guide d’onde plan

Le confinement de la lumière s’explique par les lois de Snell-Descartes de la réfraction.


Celles ci établissent, qu’à l’interface entre deux milieux d’indices différents, le rayon est
réfracté avec un angle respectant la relation :

n1 sin(θ1 ) = n2 sin(θ2 ) (3.11)


1. Bien que différent du fait de la symétrie cylindrique, le même raisonnement peut être appliqué aux
fibres optiques
85

où n1 et θ1 sont respectivement l’indice du milieu et l’angle du rayon à l’incidence alors


que n2 et θ2 sont les équivalents après réfraction.

Dans la continuité de la relation 3.11, il a été déterminé qu’un rayon ne se réfracte


plus mais se réfléchit totalement à l’interface entre les deux milieux dès lors que son angle
d’incidence dépasse une certaine valeur. En transposant cela à nôtre guide, la valeur est
donnée par la relation :

sin(θc ) = ngaine /ncoeur (3.12)

où θc est l’angle critique (angle de Brewster) au delà duquel le rayon se réfléchit totalement
et reste confiné dans le cœur.

Pour comprendre le concept de mode, il faut cette fois ci considérer l’onde qui se pro-
page et non uniquement le rayon. En plus de la condition précédente, nous introduisons
alors une autre condition sur la phase de l’onde qui se propage dans le guide 2 . En effet, les
réflexions aux interfaces autant que la propagation dans le cœur introduisent un déphasage
sur l’onde qu’il faut prendre en compte. Pour permettre l’existence d’un mode de propa-
gation dans le guide, il faut que l’onde soit en phase avec elle-même après réflexion sur
chaque interface, c’est à dire, que le déphasage total soit un multiple de 2π. De cette façon,
il y a addition des champs sous forme d’interférences constructives qui fixent l’existence
d’un mode de propagation et la géométrie de celui-ci (en sachant que, dans la réalité, il y a
décroissance exponentielle de l’énergie dans la gaine uniquement expliquée par l’approche
électromagnétique).

θ
d
θ

A B

Figure 3.16 – Condition de phase pour le guidage de l’onde plane représentée par les rayons A
et B

La figure 3.16 présente la condition d’accord de phase pour l’onde qui se propage dans
le guide. Cette condition engendre une discrétisation des valeurs de l’angle θ pouvant être
2. Dans cette approche, il s’agit d’ondes planes. Le rayon étant perpendiculaire au front d’onde de
l’onde plane
86 3. Étude de fibres optiques spéciales

prise par le rayon, chaque angle correspondant alors à un mode de propagation. Cette
discrétisation est déterminée par la relation suivante :

2kncoeur d cosθ − 2φr = 2nπ (3.13)

où φr est le déphasage généré par la réflexion à l’interface, n un entier positif et k = ω/c =


2π/λ le nombre d’onde dans le vide.

Cette discrétisation entraîne, à son tour, une discrétisation des constantes de propaga-
tions scalaires pouvant être prises par les modes. Celle-ci sont données par la relation :

β = ncoeur k (sinθ) = knef f (3.14)

Nous pouvons alors borner β comme suit :

kngaine < β ≤ kncoeur (3.15)

Gaine

θ1 θ2
Coeur

Gaine
Figure 3.17 – Évolution de deux modes dans un guide plan suivant l’approche géométrique

Finalement, chaque mode guidé dans la fibre a son propre indice effectif borné par
l’indice du cœur et celui de la gaine suivant la relation 1.5 présentée dans la section 1.1
du chapitre 1. Le guidage peut être symbolisé comme sur la figure 3.17 qui présente le
guidage de deux modes de propagation différents ayant pour angle de réflexion à l’interface
cœur/gaine respectivement θ1 et θ2 . Par conséquent, chaque mode est caractérisé par un
temps de groupe, une atténuation et une dispersion qui lui est propre.

3.3.3 Modes LP
Nous avons présenté, à travers l’approche de l’optique géométrique, une explication de
la propagation de la lumière dans un guide d’onde. Cette approche simpliste est, dans la
plupart des cas, fidèle à la réalité et, dans tous les cas, permet une bonne compréhension
des mécanismes de guidage. De plus, elle introduit l’origine de la discrétisation des valeurs
87

d’indices effectifs qui conduit à l’existence de différents modes. Ceci étant, les modes étu-
diés, au cours de ce travail sur des fibres optiques, sont les modes dit Linéairement Polarisés
(LP). Leur existence ne peut être comprise que via l’utilisation de l’optique électromagné-
tique. Nous abordons cette autre approche afin d’établir une définition claire des modes
LP utile à la compréhension de l’ensemble de cette étude.

Ce sont les équations de Maxwell, appliquées à la propagation dans une fibre optique
à symétrie cylindrique, qui conduisent à la définition des modes guidés. Dans un milieu
diélectrique isotrope et inhomogène elles amènent à établir l’équation d’onde vectorielle de
Helmholtz simplifiée pour le champ électrique sous la forme :

~ + k 2 E
∆E ~ + ∇(−1 ∇.E)
~ = ~0 (3.16)

où E est le champ électrique, k le nombre d’onde et  le permittivité scalaire du milieu.

L’équation 3.16 permet, en connaissant les caractéristiques du milieu et les paramètres


du champ électromagnétique sur une surface, de déterminer ces paramètres en un autre
point de l’espace. En respectant d’autres conditions que ceux-ci doivent satisfaire pour pou-
voir réellement exister (continuité de la permittivité, annulation des champs à l’infini...) il
est alors possible de déterminer les modes propres de propagation de la fibre.

En se plaçant dans un système de coordonnées cylindriques r~⊥ , ~z où r~⊥ est le vecteur


position transverse, z la direction de propagation dans la fibre et u~z le vecteur unitaire
dans cette direction, il est possible d’écrire un système d’équation décrivant des solutions
pour les équations de Maxwell appelées modes normaux. Ces modes normaux représentent
l’évolution des champs électriques et magnétiques suivant leurs composantes transverses
(e~⊥ , h~⊥ ) ou longitudinales (ez , hz ) sous la forme des relations :

β e~⊥ + i∇⊥ ez = −ωµ0 u~z ∧ h~⊥ (3.17)

β h~⊥ + i∇⊥ hz = −ω u~z ∧ ~⊥ • h~⊥ (3.18)

i
ez = ∇u~z ∧ h~⊥ (3.19)
ω0 z
i
hz = ∇u~z ∧ e~⊥ (3.20)
ωµ0

Ce système d’équations couplées présente deux types de solutions :


– les modes rayonnants qui représentent un ensemble continu de solutions. Ils sont
défini par une constante de propagation β(ω) imaginaire, ne permettent pas la trans-
mission d’un signal et ne nous intéressent pas dans le cadre de cette étude.
88 3. Étude de fibres optiques spéciales

– les modes guidés qui représentent un ensemble discret de solutions ayant chacune un
indice effectif nef f et donc une constante de propagation β(ω) réelle.

Par commodité, nous définissons la fréquence normalisée :


q
V = krcoeur n2c − n2g (3.21)

où rcoeur est le rayon du cœur de la fibre, nc l’indice du cœur et ng l’indice de la gaine.

Il a été montré que pour V inférieur à ' 2, 4, le système d’équation précédent ne


présente qu’une seule solution de mode guidé. Il s’agit alors d’une fibre unimodale (ou
monomode) par opposition à une fibre multimodale.

Il existe, de plus, au sein des modes guidés, une classification liée à la répartition des
champs suivant les différentes directions.
– les modes transverses : avec TE transverse électrique tel que ez = 0 et TM transverse
magnétique tel que hz = 0.
– les modes hybrides pour lesquels à la fois ez 6= 0 et hz 6= 0 appelés HE et EH suivant
la composante longitudinale prédominante.

Cette classification peut être simplifiée lorsque V ≥ 1 et lorsque la différence d’in-


dice entre le cœur et la gaine ∆ tend vers 0 (typiquement autour de 5.10−3 ). Il s’agit
de l’approximation du guidage faible qui détermine l’existence de modes appelés modes
scalaires. Ces modes regroupent plusieurs modes guidés ayant des constantes de propaga-
tion proches. Dans le cas de profils d’indice à symétrie de révolution (par exemple saut
d’indice ou gradient d’indice), ces modes sont décrits par l’équation d’onde scalaire radiale :
 2
m2

d Ψm 1 dΨm 2 2
+ + k n (r) − 2 Ψm (r) = βΨm (r) (3.22)
dr2 r dr r

où r est la coordonnée radiale et Ψm la fonction solution dans le système de coordonnées


cylindrique.

Nous pouvons réécrire cette équation sous une forme normalisée :

m2
 
1 d d 2 2
(R + V F (R) − 2 Ψmn (R) = wmn Ψmn (R) (3.23)
R dR dR R

où R = r/rcoeur est la forme normalisée de la coordonnée r, wmn la constante de propaga-


tion normalisée et Ψmn la fonction solution.

Finalement, les fonctions d’onde normalisées Ψmn déterminent l’existence de modes


LPmn . n est l’indice radial. m est l’indice azimutal qui correspond à la dépendance angu-
laire paire ou impaire en cos mθ ou en sin mθ du champ. Celui-ci s’annule 2m fois en θ et
89

n − 1 fois en r.

Mode LP Mode LP11


01

2 2
0 0 1 2 0 0 1 2
−2 −2 −1 −2 −2 −1

Mode LP Mode LP02


21
Intensité (u.a.)

2 2
0 1 2 0 0 1 2
−2 −2 −1 0 −2 −2 −1

Position (u.a.)

Figure 3.18 – Répartitions en intensité de quelques modes LP d’une fibre optique à saut d’indice

La figure 3.18 présente, à titre d’exemple, quelques formes des répartitions d’intensité
obtenues, par simulation, pour les premiers modes LPmn d’une fibre optique standard. Nous
pouvons y constater les symétries différentes ainsi que le nombre de maxima d’intensité
différents en fonction des indices m et n de ces modes.

3.3.4 Caractérisation des modes : phase, temps de groupe et dispersion


Pour aider à la compréhension de l’étude suivante, le figure 3.19 présente une réflec-
togramme simulé (en haut) ainsi que les temps de groupe obtenus (en bas) à partir des
phases extraites pour chacun des 5 modes présents au sein de ce réflectogramme. Chaque
mode est séparé dans le réflectogramme puisque nous leur avons volontairement attribué
des valeurs d’indices de groupe très différentes allant de 1, 48 à 1, 52 par pas de 0, 1. De
cette façon, leur temps de groupe absolus sont suffisamment différents pour éviter un re-
couvrement dans le réflectogramme. De plus, nous avons fixé, pour chacun de ces modes,
des valeurs de dispersion et de dispersion d’ordre supérieur très différentes afin de montrer
premièrement l’aptitude de la mesure à discriminer clairement chaque cas et deuxièmement
les différences apparentes ou non dans le réflectogramme pour chacun d’entre eux.
90 3. Étude de fibres optiques spéciales

1 3
Amplitude normalisée

1
5
0.5 2 4

−0.5 D = −200 D = 200


D = 20 dD = −0,05 D = 20 dD = 0,05 D = 100
dD = −8 dD = 0,005 dD = 2
−1
−5 −4 −3 −2 −1 0 1 2 3 4 5
Position relative du miroir (mm)

10
Temps de groupe relatif (ps)

2
5

0 3
5

−5 1
4

−10
1520 1530 1540 1550 1560 1570 1580 1590 1600 1610
Longueur d’onde (nm)

Figure 3.19 – Réflectogramme et temps de groupe simulés pour 5 modes aux propriétés de
dispersion différentes
D en ps.nm−1 .km−1 et dD en ps.nm−2 .km−1

Nous distinguons donc :


– Le mode 1 à dispersion "classique" 20 ps.nm−1 .km−1 et dont la valeur de dispersion
d’ordre supérieure est de −8 ps.nm−2 .km−1 .
– Le mode 2 à forte dispersion négative −200 ps.nm−1 .km−1 et dont la valeur de
dispersion d’ordre supérieur est de −0, 05 ps.nm−2 .km−1 .
– Le mode 3 à dispersion "classique" 20 ps.nm−1 .km−1 et dont la valeur de dispersion
d’ordre supérieur est de 0, 005 ps.nm−2 .km−1 .
– Le mode 4 à forte dispersion positive 200 ps.nm−1 .km−1 et dont la valeur de disper-
sion d’ordre supérieur est de 0, 05 ps.nm−2 .km−1 .
– Le mode 5 à forte dispersion positive 100 ps.nm−1 .km−1 et à forte dispersion d’ordre
supérieure positive de 2 ps.nm−2 .km−1 .
91

Pour chacun d’entre eux, à partir du réflectogramme, les temps de groupe sont extraits
facilement ainsi que les dispersions et dispersions d’ordre supérieure. Remarquons aussi
que la déformation du signal réfléchi dans le réflectogramme, qui est provoquée par la
dispersion d’ordre supérieur, n’est pas différentiable, a priori, de pertes en fonction de la
longueur d’onde. L’information sur la phase est donc indispensable à une analyse complète
de la dispersion des modes.

Les 4 fibres testées, aux propriétés différentes, ont été respectivement nommées par le
constructeur, PW050719, PW511, DP3012 et D919. Cette nomenclature sera donc reprise
ici.

0.4
LP01
0.3
LP02
0.2 LP11
Amplitude (V)

0.1

0.0

-0.1

-0.2

-0.3

-0.4

-2 0 2
Position du miroir (mm)

Figure 3.20 – Réflectogramme mesuré de la fibre PW050719

La figure 3.20 présente un réflectogramme type obtenu pour un tronçon d’environ 50 cm


de la fibre PW050719. Nous y distinguons clairement les réflexions laissées par trois modes
différents. Chaque réflexion présente une forme, une amplitude, un élargissement différent
du fait de plusieurs facteurs. Tout d’abord, le taux de couplage de l’énergie de la fibre
amorce vers la fibre sous test n’est pas le même pour chaque mode. Ensuite, la dispersion
diffère d’un mode à l’autre générant un élargissement différent. Finalement, la pente de
la dispersion crée une déformation de la réflexion propre au mode. La position respective
de chaque mode au sein du réflectogramme est, quant à elle, déterminée par les indices de
groupe moyens de chaque mode.
92 3. Étude de fibres optiques spéciales

Connaissant le profil d’indice des différentes fibres, le constructeur a pu réaliser un en-


semble de simulations afin de déterminer les profils théoriques ainsi que les indices effectifs,
sur toute la bande spectrale de la source, de chaque mode guidé. De ce fait, il a pu classifier
les modes LPmn . Par la suite, nous avons utilisé cette classification en même temps que les
indices groupes et dispersions de chaque mode, obtenus à partir des dérivées successives
des indices effectifs, pour déterminer l’emplacement de chaque mode et sa forme au sein du
réflectogramme. Nous avons utilisé ces valeurs théoriques pour calculer un réflectogramme
théorique correspondant à la réflexion sur la face de sortie de chaque fibre.

a
(a) 1 (b)
b LP
LP01
01 LP
1,52 Amplitude (u.a.)
LP1111
Indice de groupe

0,5

1,50 0
LP01
LP 02 0,5 LP02
LP0102
LP LP 02
1,48 LP
LP1111 1
1520 1560 1600 -10
-10 -5
5 0
0
Longueur d’onde (nm) Position relative du miroir (mm)

Figure 3.21 – Évolution des indices de groupe et réflectogramme simulé de la fibre PW050719
(a) indices de groupe en fonction de la longueur d’onde (b) réflectogramme

La figure 3.21 présente les évolutions théoriques des indices de groupe de chaque mode
en fonction de la longueur d’onde (a) ainsi qu’un réflectogramme simulé à partir de ces
indices (b). Nous constatons, à l’exception de l’amplitude absolue, du fait du facteur de
couplage inconnu, la grande similarité de ce réflectogramme avec celui présenté sur la figure
3.20. Il est donc aisé de classifier les différents modes apparus au sein du réflectogramme
de mesure en s’appuyant sur ces simulations. Par ailleurs, celles-ci revêtent un intérêt par-
ticulier dès lors que les modes se recouvrent dans le réflectogramme comme nous le verrons
ultérieurement.

La trace réflectométrique propre à chaque mode peut être isolée numériquement au sein
du réflectogramme pour pouvoir comparer sa phase avec celle issue de la réflexion sur la
face d’entrée et déterminer l’évolution du temps de groupe relatif de ce mode ainsi que sa
dispersion. La figure 3.22 présente les évolutions des temps de groupe relatifs des modes
de la fibre PW050719 obtenus à partir du réflectogramme précédent. Il apparaît claire-
ment que les deux modes LP01 et LP11 se comportent comme des modes "classiques",
c’est à dire, dont la dispersion est dominée par la dispersion matériau. Ils présentent donc,
93

20

LP02
Temps de groupe relatif (ps)

10

LP11
0
LP01

-10

-20
1520 1540 1560 1580 1600 1620
Longueur d'onde (nm)

Figure 3.22 – Temps de groupe relatif des 3 modes de la fibre PW050719

comme pour le mode fondamental d’une fibre SMF, une faible dispersion anormale (autour
de 20 ps.nm−1 .km−1 ). En revanche, et c’est là un intérêt de cette fibre, le mode LP02 , du
fait de sa symétrie différente de celle de deux autres modes, "voit" le profil d’indice de la
fibre différemment et montre une très grande dispersion normale (< −200 ps.nm−1 .km−1 ).
Sa dispersion est dominée par la dispersion guide et peut être utilisée pour la compensation
de dispersion dans le cas d’une conversion de mode suffisamment efficace pour transférer
la majeure partie de l’énergie du signal dans ce mode.

Finalement le tableau 3.3 présente les valeurs de dispersion obtenues pour ces trois
modes à la longueur d’onde de 1550 nm ainsi que les écarts types sur chacune des mesures.
Il démontre une erreur de moins de 3% et confirme l’interprétation faite précédemment.

Mode Dispersion (ps.nm−1 .km−1 ) σ


LP01 21,0 0,3
LP02 20,0 0,2
LP01 -273,4 2,4

Table 3.3 – Valeurs de dispersion mesurées des modes de la fibre PW050719 à la longueur
d’onde de 1550 nm
94 3. Étude de fibres optiques spéciales

Dans le cas de la fibre PW050719, la discrimination entre les modes a pu s’opérer de


manière évidente étant donné une différence suffisante entre les indices de groupe de chaque
mode et, par conséquent, entre leur position respective au sein du réflectogramme. En effet,
chaque réflexion est bien isolée et ne recouvre pas la réflexion voisine au sein du réflecto-
gramme. Cette condition n’est cependant pas vraie pour l’ensemble des fibres. Ainsi, de la
même façon que dans le cas d’une fibre biréfringente, apparaissent des cas dans lesquels les
modes se recouvrent dans le réflectogramme. Ceci provoque un battement aussi bien sur
la phase que sur le module de la réflectivité complexe. Dès lors, pour ces modes, il devient
impossible, dans les zones de recouvrement, de déterminer temps de groupe et dispersion
correctement. Plusieurs méthodes sont alors envisageables pour surmonter ce problème.

La figure 3.23 présente le réflectogramme obtenu pour la fibre PW511. Pour deux
des trois modes présents au sein du réflectogramme, nous observons un recouvrement
important. Les indices de groupe assez proches des modes LP02 et LP01 engendrent ce
recouvrement. En effet, leur temps de groupe est aussi proche et les différentes réflexions
apparaissent pour des positions du miroir quasi-équivalentes.

1.0
0.8 LP01
0.6

0.4
LP02 LP11
Amplitude (V)

0.2

0.0

-0.2

-0.4

-0.6

-0.8
-1.0
0 1 2 3 4
Position du miroir (mm)
Figure 3.23 – Réflectogramme mesuré de la fibre PW511

Dans ce cas, le réflectogramme simulé peut apporter une aide précieuse à la discrimina-
tion des modes. En effet, comme nous l’avons vu précédemment, nous utilisons les valeurs
simulées des indices de groupe pour établir la forme attendue du réflectogramme de la fibre.
De plus, il est possible d’ajouter les modes un par un au sein de ce réflectogramme simulé
et, par conséquent, de déterminer avec certitude l’emplacement de chacun des modes au
95

sein du réflectogramme. De ce fait, nous pouvons identifier la trace laissée par chaque mode
au sein du réflectogramme de mesure.

1.0

0.8 LP01
0.6
LP02 LP11
0.4
Amplitude (V)

0.2

0.0

-0.2

-0.4

-0.6

-0.8

-1.0
0 1 2 3 4
Position du miroir (mm)

Figure 3.24 – Réflectogramme simulé de la fibre PW511

La figure 3.24 présente le réflectogramme simulé, à partir de la forme réelle de la source,


pour la fibre PW511. Les facteurs de couplage de l’énergie vers chaque mode ont été ajus-
tés arbitrairement. Nous constatons une grande similitude avec la figure 3.23. En utilisant
les informations apportées par ce réflectogramme, nous connaissons la contribution propre
aux modes LP01 , LP02 et LP11 au sein du réflectogramme de mesure.

Nous allons à présent développer les différentes approches envisagées pour extraire le
paramètre de dispersion de chaque mode sur l’ensemble de la bande spectrale du disposi-
tif OLCR. La figure 3.25 présente le réflectogramme mesuré de la fibre DP3012. Celui-ci
illustre bien le problème posé. Nous y voyons, en effet, quatre modes distincts (LP01 , LP02 ,
LP03 et LP11 ) mais partiellement superposés. Deux d’entre eux (LP02 , LP03 ), très étalés,
présentent visiblement une très forte dispersion et ont naturellement tendance à recouvrir
les autres.
96 3. Étude de fibres optiques spéciales

0.3

0.2

0.1 LP03 LP01


Amplitude (V)

LP02 LP11
0.0

-0.1

-0.2

-0.3
0 5 10 15 20
Position du miroir (mm)
Figure 3.25 – Réflectogramme mesuré de la fibre DP3012

0.20
LP01
0.15

0.10
LP02
0.05
Amplitude (V)

LP03
0.00

-0.05

-0.10

-0.15

-0.20
0 2 4 6 8 10 12 14 16 18 20
Position du miroir (mm)
Figure 3.26 – Réflectogramme mesuré de la fibre DP3012 avec un rayon de courbure de 2cm
appliqué à la fibre

La figure 3.26 présente un réflectogramme, obtenu pour la fibre DP3012, pour lequel
97

nous avons modifié la courbure de la fibre. L’idée étant de modifier la répartition d’énergie
entre les différents modes par le biais des pertes par courbure. En effet, celles-ci n’affectent
pas tous les modes de la même façon. En particulier, dans cette situation, ceux dont la
symétrie n’est pas de révolution, auront plus tendance à fuir dans la gaine que les autres.
La figure 3.26 nous montre un rapport des amplitudes complètement modifié par rapport à
celui présenté sur la figure 3.25. Il apparaît justement que le mode LP11 , dont la symétrie
n’est pas de révolution, a été complètement supprimé du réflectogramme. Celui-ci a, en
effet, subi des pertes très importantes, au cours de la propagation, du fait de la courbure
de la fibre.

0.15
LP01
0.10

LP02
Amplitude (V)

0.05
LP03

0.00

-0.05

-0.10

-0.15
0 2 4 6 8 10 12 14 16 18 20
Position du miroir (mm)

Figure 3.27 – Réflectogramme mesuré de la fibre DP3012 avec filtrage de la bande L

La figure 3.27 présente un réflectogramme obtenu pour la fibre DP3012 et pour lequel
nous avons filtré une partie des longueurs d’onde de la source. En effet, dans le cas où deux
modes superposés s’avèrent avoir une dispersion de signe opposé, il est possible d’éviter le
recouvrement en filtrant spectralement la source puis en réalisant une mesure partie par
partie. Ici, la figure 3.27 présente une mesure réalisée pour un filtre laissant passer la bande
C et filtrant la bande L. Seule la moitié de la source subsiste et, puisque les modes LP01
et LP02 sont de dispersion opposée, comme nous le verrons ultérieurement, le problème du
recouvrement est partiellement surmonté de cette façon.

Nous venons de voir quelques méthodes pour déterminer la dispersion de chaque mode
sur l’ensemble de la bande de la source et, ce, avec ou sans recouvrement de mode. A cela,
il faut ajouter le fait de pouvoir modifier les conditions d’injection. Là encore, il s’agit
de changer la répartition d’énergie dans les différents modes pour pouvoir s’attarder plus
98 3. Étude de fibres optiques spéciales

précisément sur la mesure de l’un ou l’autre des modes. Toutes ces façons de procéder
sont empiriques mais permettent tout de même un très bonne extraction du paramètre de
dispersion pour toute la bande C+L.

40

LP02
Temps de groupe relatif (ps)

20

0
LP11

LP01

-20

LP03
-40
1520 1540 1560 1580 1600
Longueur d'onde (nm)

Figure 3.28 – Temps de groupe relatifs des modes de la fibre DP3012


Noir : valeurs mesurées ; Gris : Ajustement numérique

Ainsi, la figure 3.28 présente les évolutions des temps de groupe en fonction de la lon-
gueur d’onde pour les quatre modes (LP01 , LP02 , LP03 et LP11 ) de la fibre DP3012 avec
la mesure en noir et l’ajustement numérique correspondant en gris. Nous constatons, tout
d’abord, que le problème lié au recouvrement a été surmonté pour la plupart des longueurs
d’onde. Ensuite, il apparaît qu’au travers de l’ajustement numérique par une loi appropriée
(cf chapitre 2) le temps de groupe peut être connu sur toute la bande pour chaque mode.
Les valeurs de dispersion sont obtenues par la dérivée du temps de groupe ajusté et le sont
pour l’intégralité de la bande.
99

La figure 3.29 montre en noir les valeurs de dispersion déduites à partir de la mesure et
des ajustements numériques des temps de groupe présentés sur la figure 3.28. En gris les va-
leurs de dispersion obtenues à partir des temps de groupe simulés pour chacun des modes.
Nous constatons un bon accord entre les deux dispersions présentées et ceci pour l’ensemble
des quatre modes étudiés. Deux des modes (LP01 et LP11 ) présentent une dispersion "clas-
sique" autour des 20 ps.nm−1 .km−1 alors que les deux autres présentent des valeurs très
élevées de dispersion normale et anormale (LP02 et LP03 ) autour de −600 ps.nm−1 .km−1
et 600 ps.nm−1 .km−1 respectivement.

800

LP03
Dispersion (ps.nm .km )
.1

400
-1

LP01
0
LP11

-400
LP02

-800
1530 1545 1560 1575 1590 1605

Longueur d'onde (nm)


Figure 3.29 – Dispersion chromatique des modes de la fibre DP3012
Noir : valeurs mesurées ; Gris : Ajustement numérique

Il est donc possible de mesurer simultanément et dans une même fibre deux modes
ayant des valeurs de dispersion aussi fortement positive et négative. Ce type de mesure
étant difficilement envisageable par d’autres méthodes. Malgré cela, l’extraction des va-
leurs de dispersion de chaque mode s’avère laborieuse et surtout dépendante de facteurs
tels les pertes par courbures, l’injection... qui sont empiriques et donc pas nécessairement
répétables d’une fibre à l’autre. Nous présenterons, au cours de la partie suivante, un trai-
tement numérique qui s’attache à surmonter ces difficultés et fournit une caractérisation
plus simple et rapide de tous les modes d’une fibre multimode.
100 3. Étude de fibres optiques spéciales

3.3.5 Caractérisation des modes : cartographie temps/longueur d’onde


des réflexions
Nous avons extrait les paramètres de dispersion pour chacun des modes des quatre
fibres multimodes étudiées. Cependant, en dépit des techniques présentées pour surmonter
le problème du recouvrement, la méthode reste assez compliquée. En effet, il n’est jamais
garanti de pouvoir établir une mesure complète dans le cas d’une fibre où les modes qui se
recouvrent sont trop nombreux.

Nous présentons ici, un traitement numérique des données, pouvant être appliqué à ces
mesures pour extraire les mêmes paramètres (temps de groupe, dispersion) tout en sur-
montant systématiquement le problème du recouvrement. L’intérêt de cette méthode est
d’obtenir un réflectogramme plus complet sous la forme d’une cartographie temps/longueur
d’onde des réflexions présentes dans le CST. Par ailleurs, cette cartographie fournie une
information complète sur le signal rétrodiffusé par le CST qui permet une meilleure com-
préhension de ses propriétés comme nous le verrons au cours du chapitre 4, pour des guides
semi-conducteurs à cristaux photoniques.

25

20

15
Puissance (u.a.)

10

Filtre glissant
5

−5
1510 1520 1530 1540 1550 1560 1570 1580 1590 1600 1610 1620
Longueur d’onde (nm)

Figure 3.30 – Représentation du filtrage numérique du spectre dans le domaine de Fourier

La méthode consiste, dans un premier temps, à filtrer, dans le domaine de Fourier,


le spectre obtenu à partir du réflectogramme. Une fois le filtrage opéré, il faut effectuer,
de nouveau, une transformée de Fourier, de manière à obtenir une réflectogramme en
amplitude correspondant uniquement aux longueurs d’onde sélectionnées par le filtre. En
répétant cette opération avec une filtre numérique glissant sur l’ensemble de la bande spec-
101

trale de la source, nous obtenons une cartographie temps/longueur d’onde des réflexions
sur et dans le CST.

Pour bien comprendre ce procédé, la figure 3.30 montre le filtrage en longueur d’onde
opéré sur le spectre dans le domaine de Fourier. Nous y voyons le filtre gaussien, d’environ
2 nm de largeur à mi-hauteur, appliqué au spectre dans le domaine de Fourier. Ce filtrage
est effectué sur toute la bande spectrale de la source en répétant l’opération avec un pas
en longueur d’onde déterminé au préalable (typiquement 0, 5 nm). C’est le signal filtré qui
fait, de nouveau, l’objet d’une transformée de Fourier inverse de façon à obtenir, par son
module, un réflectogramme fonction de la position du miroir.

0.1

LP LP
0.05 03 01
Amplitude (V)

LP
11

−0.05

−0.1
nm)

1580
de (

1570
ur d’on

1560

1550
u e

1540
on g

1530 11 12
L

3 4 5 6 7 8 9 10
Position du miroir mobile (mm)

Figure 3.31 – Réflectogrammes obtenus après TF inverse du spectre filtré pour trois longueurs
d’onde différentes
en pointillés : évolution des maxima d’intensité correspondant aux évolutions du temps de groupe
pour chaque mode

La figure 3.31 présente trois réflectogrammes obtenus pour trois longueurs d’onde diffé-
rentes en suivant le procédé décrit précédemment. C’est le module de ces réflectogrammes,
pour l’ensemble des longueurs d’onde de la source, qui donne accès à une cartographie
complète du signal réfléchi et rétrodiffusé par le CST. Notons que la position du miroir
en abscisse peut aisément être convertie en temps de groupe. En effet, nous connaissons
l’indice de l’air à la longueur d’onde de la source, et donc la vitesse de la lumière dans la
partie en espace libre du système de mesure.
102 3. Étude de fibres optiques spéciales

La figure 3.32 présente, de manière similaire à la figure 3.19 pour l’extraction à partir
de la phase, un réflectogramme simulé pour 5 modes différents ainsi que la cartographie
obtenue à partir de ce réflectogramme. Les propriétés de ces modes sont les mêmes que
dans le cas présenté lors de la section précédente. Nous distinguons, sur la cartographie,
les traces laissées par chacun d’entre eux. Ainsi chaque propriété apparaît distinctement
dans la cartographie. En effet, la dispersion détermine la pente de chaque trace laissée
dans la cartographie alors que la dispersion d’ordre supérieur entraîne la courbure des ces
mêmes traces. Nous allons voir qu’à partir de cette cartographie, il est possible d’extraire
la position des maxima de réflexion et de déterminer de cette façon la dispersion et la
dispersion d’ordre supérieur de chaque mode.

1 3
Amplitude normalisée

1
0.5 5
2 4

−0.5

−1
−5 −4 −3 −2 −1 0 1 2 3 4 5
Position relative du miroir (mm)

1520
1 2 3 4 5
Longueur d’onde (nm)

1540

1560

1580

1600

40 50 60 70 80 90 100
Temps de groupe relatif (ps)

Figure 3.32 – Réflectogramme et cartographie simulés pour 5 modes aux propriétés de


dispersion différentes
103

La figure 3.33 présente, tout d’abord, la cartographie temps/longueur d’onde comparée


au réflectogramme initial et obtenue pour la fibre PW050719. Il s’agit, pour commencer,
d’un cas simple dans lequel aucun recouvrement de mode ne vient perturber la mesure.
L’évolution du temps de groupe (directement relié à la position du miroir) en fonction de
la longueur d’onde conduit à une détermination simple de la dispersion de chaque mode.
Nous observons d’ailleurs sur la figure, en traits pleins, l’ajustement numérique des traces
de chacun des maxima de réflexion correspondants aux différents modes. Ce sont ces ajus-
tements qui permettent l’obtention de la dispersion des modes sur l’ensemble du domaine
spectral couvert par la source.

aa
0 .4
LP
LP02
02 LP
LP01
Amplitude (u.a.)

0 .2 01
LP
LP11
11

0 .0

- 0 .2

- 0 .4

1540 bb
Longueur d’onde (nm)

1560

1580

1600
5 6 7 8 9 10
Position du miroir (mm)

Figure 3.33 – Comparaison réflectogramme classique/Cartographie temps/longueur d’onde de la


fibre PW050719
104 3. Étude de fibres optiques spéciales

Pour rendre compte de la précision de la méthode de la cartographie par rapport à


la méthode consistant à extraire le temps de groupe à partir de la phase, la figure 3.34
présente une comparaison des valeurs de temps de groupe obtenues par les deux approches.
Il s’agit des valeurs des trois modes de la fibre PW050719 pour lesquelles nous constatons
un très bon accord entre les deux méthodes. Il apparaît clair que les valeurs de temps de
groupe peuvent être extraites précisément de la cartographie sur toute la bande spectrale
de la source. Par ailleurs, elles peuvent aussi être numériquement ajustées et, ce, comme
le montre le figure 3.35. De plus, cet ajustement est valable que les modes se recouvrent
ou non.

Classical
Méthode classique New
method method
Cartographie
LP01 LP01
10 LP02 LP02
LP11 LP11
Temps de groupe (ps)

-10

1520 1540 1560 1580 1600 1620


Longueur d’onde (nm)

Figure 3.34 – Comparaison des valeurs de temps de groupe obtenues pour les trois modes de la
fibre PW050719 par la méthode classique et par la cartographie

La figure 3.35 présente la cartographie temps/longueur d’onde, comparée au réflecto-


gramme initial et obtenue pour la fibre DP3012. Dans cette fibre, comme nous avons pu
le voir précédemment, le recouvrement de mode perturbe l’extraction des paramètres dans
une configuration "classique". En revanche, avec ce traitement, cette méthode permet une
bonne extraction du paramètre de dispersion sur toute la bande spectrale de la source. Les
ajustements numériques des traces de chacun des maximas de réflexion correspondants à
chaque mode, en traits pleins sur la figure, permettent un accès direct au temps de groupe
en dépit du croisement des courbes. Nous y distinguons donc cinq modes (LP01 , LP02 ,
LP03 , LP11 et LP12 ) pour lesquels les valeurs de temps de groupe ont pu être extraites pré-
cisément et en bon accord avec les valeurs attendues par la théorie. Par ailleurs, un grand
nombre d’autres traces confirme l’existence d’autres modes dans cette fibre non prévus par
105

la théorie. Ceux-ci n’ont pas fait l’objet d’investigation supplémentaires.


Amplitude (u.a.)

b
a

bc
Longueur d’onde (nm)

LP03

LP12 LP02 LP11

LP01

Position du miroir (mm)


Figure 3.35 – Comparaison réflectogramme classique/Cartographie temps/longueur d’onde de la
fibre DP3012

Conclusion
Plusieurs mesures ont été réalisées sur différentes fibres optiques. Nous avons notam-
ment observé l’évolution liée de l’indice de groupe et de l’amplification avec la puissance
de pompe dans une fibre dopée Erbium. Par une mesure rapide et simple, il nous a été
possible de mesurer l’impact lié à la relation de Kramers-Kronig sur la dispersion. Une
évolution de 40 ps.nm−1 .km−1 autour de la longueur d’onde de 1530 nm pour une puis-
sance de pompe de 80 mW a été mesurée. De plus, nous avons analysé la dépendance
des paramètres que sont la dispersion et la biréfringence à la position longitudinale dans
une fibre optique à cristaux photoniques. La possibilité d’extraire précisément ces para-
mètres pour des tronçons de fibre très courts nous a permis d’enregistrer une évolution de
la dispersion sur 1 km de fibre avec des variations maximales d’environ 6 ps.nm−1 .km−1 .
Enfin, nous avons présenté les résultats de mesure de l’ensemble des paramètres de disper-
sion des modes de fibres légèrement multimodes. L’adaptabilité de la méthode OLCR et
la possibilité d’effectuer un traitement numérique adéquat conduit à l’obtention du temps
106 3. Étude de fibres optiques spéciales

de groupe et de la dispersion sur l’ensemble de la bande C+L pour des fibres présentant
jusqu’à cinq modes. Nous avons notamment caractérisé une fibre présentant simultanément
des modes à dispersion classique (autour de 20 ps.nm−1 .km−1 ), un mode à forte dispersion
positive (autour de 600 ps.nm−1 .km−1 ) et un mode à forte dispersion négative (autour de
−600 ps.nm−1 .km−1 ). Par ailleurs, la méthode du filtrage numérique, permettant l’extrac-
tion d’une cartographie temps/longueur d’onde, n’est pas seulement applicable aux fibres
optiques et nous nous attacherons à présenter, au cours du chapitre suivant, des résultats
obtenus pour des guides photoniques innovants. Ces résultats confirment l’apport de cette
méthode.
107

Chapitre 4

Étude de guides membranaires à


cristaux photoniques

4.1 Introduction

Nous avons vu au cours du chapitre 3 que l’utilisation de cristaux photoniques (CPh)


avait ouvert la voie au développement de nouvelles fibres optiques présentant des propriétés
spécifiques. Les propriétés des cristaux photoniques sont aussi largement exploitées pour
la conception d’autres guides d’onde et notamment les guides à base de semi-conducteur
[67].
Comme pour les fibres optiques, la maîtrise de la conception de ce type de guide permet
de contrôler certaines de leurs propriétés optiques. Majoritairement conçus par agencement
périodique de trous (ou d’autres inclusions) au sein du milieu semi-conducteur, ces guides
connaissent donc, comme nous le verrons ultérieurement, une forte variation de leurs pro-
priétés en fonction de l’espacement, de la taille ou encore de la forme des trous. Le temps
de groupe et la dispersion sont, en particulier, deux paramètres essentiels sur lesquels il est
possible d’influer nettement [68, 69, 70].

L’objet de cette section est une étude de guides à cristaux photoniques membranaires
réalisés sur arséniure de gallium (GaAs) dans le cadre de recherches menées par Thales
Research and Technology pour la fabrication de lignes à retard optiques ajustables et
intégrables.
Nous envisagerons, dans un premier temps, les bases des principes théoriques qui ré-
gissent le fonctionnement de ce type de guide. Puis, nous présenterons les résultats de
caractérisation de ces guides et plus spécialement les phénomènes de diffusion et de ra-
lentissement des ondes ainsi que le lien éventuel entre ces deux phénomènes. Enfin, nous
verrons comment les particularités de l’OLCR en font une technique très appropriée pour
étudier ces guides et quelles sont les conclusions ayant pu être tirées de cette étude.
108 4. Étude de guides membranaires à cristaux photoniques

4.2 Principes théoriques


4.2.1 Cristaux Photoniques
Bien que les effets de la périodicité du milieu sur la propagation d’une onde électro-
magnétique aient déjà été étudiés auparavant, c’est avec Yablonovitch, dans les années
1990, que les concepts de cristaux photoniques et de bandes interdites photoniques ont
été introduits. C’est la jonction des théories d’électromagnétisme classique et de physique
du solide qui a conduit à établir ces concepts et a amené l’appellation "cristal photonique".

Un cristal photonique est simplement une structure périodique dans un milieu électro-
magnétique. Cette structure peut posséder des bandes interdites photoniques c’est à dire,
des longueurs d’onde pour lesquelles la lumière ne peut pas se propager dans la structure
[71, 72, 73]. Il est possible de faire une analogie avec la maille atomique cristalline qui
génère des bandes interdites dans la fonction d’onde de l’électron.

1−D 2−D 3−D

Figure 4.1 – Illustration schématique de cristaux photoniques à 1,2 et 3 dimensions

La figure 4.1 présente une description schématique de cristaux photoniques à 1, 2 ou


3 dimensions. La périodicité de la structure (typiquement un milieu diélectrique) apparait
donc clairement dans 1, 2 ou 3 directions de l’espace.

Il faut reprendre les équations de Maxwell de l’électromagnétisme auxquelles s’ap-


pliquent les effets de la périodicité du milieu pour bien comprendre la notion de bande
interdite photonique.

Considérons, tout d’abord, les champs électrique et magnétique en régime harmonique.


Ils sont, par conséquent, exprimés sous la forme d’ondes planes avec :

~ r, t) = ~e(~r)eiωt
E(~ (4.1)

~ r, t) = ~h(~r)eiωt
H(~ (4.2)
109

où ~r est le vecteur position dans le milieu, ω est la pulsation de l’onde et ~h et ~e décrivent


respectivement les formes vectorielles et dépendantes de la position des champs magnétique
et électrique.

L’utilisation des lois connues de Maxwell amène à établir une équation de propagation
régissant l’évolution du champ magnétique sous la forme :

~ × 1∇ ~ = ω H
 2
∇ ~ ×H ~ (4.3)
 c

où  est la fonction diélectrique qui dépend des coordonnées dans l’espace avec (x, y, z).
Il s’agit d’un problème aux valeurs propres avec H ~ le vecteur propre et ω/c la valeur
propre. On obtient alors, dans le milieu de propagation, la relation suivante :

ωn 2π
k= = (4.4)
c λ

où k est la norme du vecteur d’onde dans le milieu et n est l’indice qui caractérise l’onde
qui se propage dans le milieu à une vitesse c/n.

La relation de dispersion relie la fréquence (plus généralement la pulsation ω) au nombre


d’onde (la norme du vecteur d’onde ~k). Nous verrons que celle-ci revêt une importance par-
ticulière dans l’explication du fonctionnement d’un guide à cristaux photoniques. Dans le
cas le plus basique d’un milieu isotrope, cette relation décrit une simple droite de pente
c/n comme celle représentée sur la figure 4.2.

Droite de pente c/n

k
Figure 4.2 – Relation de dispersion simplifiée dans le cas d’un milieu isotrope

Dans un cristal photonique la fonction diélectrique  est périodique du fait de la pério-


dicité du milieu. Celle-ci s’écrit :

~
(~r) = (~r + R) (4.5)

~ est le vecteur qui décrit la maille élémentaire. Avec


où R
110 4. Étude de guides membranaires à cristaux photoniques

~ = la~1 + ma~2 + na~3


R (4.6)

où a~1 , a~2 et a~3 sont les vecteurs de base de la maille élémentaire et l,m et n sont des entiers.

La figure 4.3 présente un schéma décrivant ces vecteurs dans le cas 2D d’un maille
hexagonale. Cette maille est souvent utilisée dans les guides à cristaux photoniques et par-
ticulièrement dans les fibres optiques, comme nous l’avons vu au cours du chapitre 3.

a2
a1

Figure 4.3 – Exemple de vecteurs élémentaires d’une maille hexagonale dans un cristal
photonique 2D composé de trous arrangés périodiquement

Comme pour la physique du solide, il alors est possible d’établir un réseau réciproque
dont la maille est définie par le vecteur :

~ = ob~1 + pb~2 + q b~3


G (4.7)

où b~1 , b~2 et b~3 sont les vecteurs de base de la maille élémentaire et l,m et n sont des entiers.

Tous les vecteurs élémentaires des deux réseaux (primitif et réciproque) sont liés par la
relation :

a~i .b~j = δij (4.8)

Dans le cas précédent de la structure périodique, nous utilisons le théorème de Bloch-


Floquet qui stipule que la solution à l’équation 4.3 peut être choisie de la forme :

H(~ ~ ~ (~x) ei~k~x


~ x) = H (4.9)
n,k

~ ~ est une fonction d’enveloppe périodique satisfaisant l’équation :


où H n,k
111

!2
~ + i~k) × 1 (∇
~ + i~k) × H
~ ~= ωn (~k) ~ ~
(∇ n,k
Hn,k
(4.10)
 c

~ ~ que
en sachant que la condition de périodicité impose à Hn,k

~ ~ (~x) = H
H ~ ~ (~x + R)
~ (4.11)
n,k n,k

Finalement, l’équation 4.10 détermine des valeurs propres discrètes ωn (~k) pour n =
1, 2, .... Ces valeurs propres sont des fonctions continues du vecteur d’onde de Bloch ~k qui
forment des "bandes" lorsqu’elles sont représentées en fonction de la maille dans ce que
l’on appelle des diagrammes de dispersion ou des structures de bandes. ~k et ω étant des
quantités conservées dans le diagramme, celui-ci représente tous les couples de valeurs ~k
et ω possible au sein du système.

4.2.2 Zone de Brillouin


La solution étant la même à ~k et à ~k + G,
~ les solutions ne peuvent être calculées que
dans un espace limité par la taille de la maille réciproque primitive. Cette zone lorsqu’elle
est définie à partir de ~k = 0 est appelée zone de Brillouin et est donc la seule zone dans
laquelle on aura besoin de calculer les solutions à l’équation 4.10 pour pouvoir détermi-
ner les bandes du cristal photonique. Par exemple, dans un système unidimensionnel où
R = a défini la périodicité du réseau et où G = 2π/a, la zone de Brillouin est définie entre
k = −π/a et k = π/a. Tous les autres vecteurs d’ondes peuvent, par ailleurs, être déduits
par une simple translation de G.

Une bande interdite est un intervalle de fréquence ω au sein duquel il n’existe aucune
solution (pouvant se propager) à l’équation 4.10 c’est à dire qu’il n’existe aucun vecteur
d’onde ~k décrivant un mode pour cet intervalle de fréquence.

Considérons le cas d’un système unidimensionnel avec une périodicité a de la fonc-


tion diélectrique . La relation de dispersion se présente, dans un premier temps, comme
celle présentée par la figure 4.2. Elle peut être déterminée uniquement au sein de la zone
de Brillouin dans laquelle s’exerce un repliement des bandes pour lesquelles | k |> π/a.
Ainsi se construit le diagramme de bande "virtuel" pour ce système, tel que nous pouvons
l’observer sur la figure 4.4. Nous constatons la dégénérescence du mode à k = −π/a et
k = π/a. Si l’on considère vraiment les effets de la périodicité de la fonction diélectrique,
cette dégénérescence disparaît au profit de la création d’une bande interdite (un "gap") au
sein de laquelle aucun mode ne peut exister.

Au delà du cas simple unidimensionnel qui permet de comprendre le concept de bande


interdite, le cas du système bidimensionnel est celui qui nous concerne directement puis-
112 4. Étude de guides membranaires à cristaux photoniques

Figure 4.4 – Diagrammes de bande dans un milieu unidimensionnel périodique


Gauche : repliement des bandes dans la zone de Brillouin ; Droite : effet réel de la variation
périodique de la fonction diélectrique sur le diagramme de bande, apparition d’une bande
interdite

qu’il est à l’origine de la conception de la majorité des guides reposant sur les cristaux
photoniques.

Il faut savoir, tout d’abord, que, dans ce cas, le champs peut être séparé en deux
polarisations :
– TE (Transverse Électrique) si le champ électrique est dans le plan de propagation et
le champ magnétique est perpendiculaire.
– TM (Transverse Magnétique) si le champ magnétique est orienté dans le plan et le
champ électrique est perpendiculaire.

Par conséquent, la construction de diagrammes de bandes se fera différemment pour


les deux polarisations du champ et les domaines de fréquences interdites ne seront pas
nécessairement les mêmes. On parle de bande interdite photonique complète dans le cas
de recouvrement de bande interdite pour les deux polarisations.

Un autre élément à prendre en compte, par rapport au cas unidimensionnel, est la plus
grande complexité dans la construction des diagrammes de bandes à 2 dimensions et en
particulier de la zone de Brillouin. La figure 4.5 représente les zones de Brillouin incom-
pressible dans le cas de cristaux photoniques 2D à maille carrée et à maille hexagonale (ou
triangulaire). On parle de zone de Brillouin incompressible puisqu’elle tient aussi compte
de toutes les symétries du cristal pour réduire au minimum le domaine de calcul des valeurs
propres de l’équation 4.10.
113

M
M K

X
Γ
Γ

Figure 4.5 – Zones de Brillouin (incompressible pour la partie foncée) dans un cristal
photonique 2D
Gauche : maille carré ; Droite : maille hexagonale

Les lettres Γ, K, X, M représentent les extrémités des différentes zones de Brillouin ou


Γ est toujours l’origine, c’est à dire, tel que kx = 0 et ky = 0. Il est usuel de dessiner le
diagramme de bandes suivant les contours de la zone de Brioullin en reliant ces différentes
extrémités puisque c’est le long de ces limites qu’apparaissent les maxima de bande.
Fréquence (u.a.)

Figure 4.6 – Exemple de diagramme de bande dans un cristal photonique 2D


Traits pleins : bandes TE ; Traits pointillés : bandes TM

La figure 4.6 présente un exemple de diagramme de bande d’un cristal photonique


2D décrivant la fréquence normalisée en fonction de ~k (dans chacune des directions). En
trait plein apparaissent les bandes TE et en pointillé les bandes TM. Dans cet exemple,
114 4. Étude de guides membranaires à cristaux photoniques

une bande interdite n’apparaît que pour la polarisation TM. En effet, pour certaines fré-
quences ω, il n’existe aucune valeur de ~k, quelque soit sa norme ou sa direction permettant
la propagation d’un mode TM.

4.2.3 Cône de lumière et pertes du guide


Nous avons décrit, les principes théoriques des cristaux photoniques. Or, la création
d’une bande interdite n’est pas une condition suffisante pour créer un guide d’onde. Il
faut pouvoir "piéger" la lumière au sein du cristal photonique. Le guidage repose donc sur
l’utilisation de défauts. En effet, dans ce type de guide, la lumière est guidée suivant un
défaut ou une ligne de défaut insérée au sein du cristal photonique. Si le défaut fait appa-
raître un niveau d’énergie permis dans la bande interdite, alors, à cette longueur d’onde,
la lumière est piégée dans le cristal et ne peut que se propager suivant la ligne de défaut
créée volontairement.

Précisons aussi que, un guide réel à cristaux photoniques a nécessairement une exten-
sion verticale finie. De ce fait, deux mécanismes de guidage se côtoient : la lumière est
confinée, horizontalement, par l’effet de bande interdite alors que, verticalement, c’est le
mécanisme plus classique de réflexion totale interne qui confine la lumière. Ce point condi-
tionne l’existence du cône de lumière et, comme nous le verrons ultérieurement, l’intérêt
de l’utilisation de membranes.

Le dernier phénomène à prendre en compte dans la compréhension des cristaux pho-


toniques 2D et, en particulier, des guides à cristaux photoniques, est le rôle primordial du
cône de lumière [74]. Il a été montré que si le vecteur d’onde k d’un mode guidé correspond
à une projection du vecteur kr d’un mode radiatif (à fuite), un couplage s’opère entre les
deux entraînant "la fuite" du mode guidé lui même.

n1

kk
n2

Figure 4.7 – Description schématique de la ligne de lumière

Pour mieux comprendre cette idée, prenons le cas simple, représenté par la figure 4.7,
d’une réflexion à l’interface entre deux milieux 3D séparés par un plan infini (dioptre). La
réflexion d’un rayon, à l’interface entre les deux milieux d’indices n1 et n2 , est décrite par
les lois de Snell-Descartes 3.11 et 3.12 présentées au cours du chapitre 3. Pour un ensemble
d’ondes planes, ces lois peuvent être exprimées comme une conservation de la projection
kk du vecteur d’onde. Ainsi, au delà d’un certain angle, défini par la loi 3.11 l’ensemble
115

d’ondes planes du milieu 2 est totalement réfléchi à l’interface et est évanescent dans le
milieu 1. De cette manière, nous définissons une "ligne de lumière" par la droite :
c
ω= k (4.12)
n1 k

Cette droite délimite un cône dans lequel les valeurs (ω, kk ) existent dans les deux milieux,
c’est à dire, une couplage entre les ondes planes des deux milieux s’opère.

En transposant le cas précédent aux guides membranaires à cristaux photoniques, il


faut tenir compte de leur géométrie et considérer le mélange semi-conducteur/trous d’air
comme un milieu d’indice moyen. Alors, nous pouvons définir, au sein du diagramme de
bande, un cône à l’extérieur duquel devra se trouver un mode guidé pour ne pas se coupler
avec un mode radiatif et subir des pertes considérables. Ce cône est délimité dans l’espace
(ω, x, y) par la relation :
 nω 2
2
k⊥ = (4.13)
c

2 = k 2 + k 2 est la norme au carré du vecteur d’onde dans le plan.


où k⊥ x y

mode radiatif

mode
guidé

Figure 4.8 – Description schématique du cône de lumière

La figure 4.8 présente une description schématique de ce cône ainsi qu’une coupe du
guide dans laquelle on peut voir la répartition de l’intensité pour un mode guidé et pour
un mode radiatif. Nous notons la présence du mode radiatif à l’intérieur du cône et du
mode guidé ne subissant pas les fuites à l’extérieur du cône .

Finalement, les pertes se séparent en deux catégories :


– les pertes extrinsèques qui sont dues aux défauts dans la structure du guide par
rapport à la structure idéale. Les inhomogénéités dans la taille, la forme, la position
ou la rugosité des trous qui forment la maille du cristal, entraînent des pertes dont
116 4. Étude de guides membranaires à cristaux photoniques

les manifestations et les origines exactes font encore l’objet de recherche comme nous
le verrons ultérieurement.
– les pertes intrinsèques dont la contribution principale provient des fuites éventuelles
hors du plan. Celles ci sont conditionnées par la position hors ou dans le cône de
lumière du mode guidé.

4.3 Caractéristiques des guides et intérêt de l’étude


Nous avons montré, précédemment, les principes théoriques qui gouvernent les pro-
priétés des cristaux photoniques et leur utilisation dans les guides d’ondes optiques. Nous
examinons, à présent, les propriétés de guides membranaires semi-conducteurs à cristaux
photoniques que nous avons étudiées. L’ensemble de l’étude porte sur des guides membra-
naires réalisés sur Gallium Arséniure au sein du groupe Thales Research and Technology
(TRT).

Le concept de membrane a été introduit, par nécessité, pour pouvoir utiliser le guidage
par bande interdite photonique sans souffrir de pertes trop importantes. En effet, il est
apparu que, dans le cas d’hétérostrucutures (où le guidage s’effectue dans plusieurs ma-
tériaux différents), le cône de lumière était trop "ouvert" pour pouvoir placer un mode à
l’extérieur de celui-ci dans une bande interdite. De ce fait, les pertes trop importantes ont
longtemps fortement limité les applications ouvertes à ce type de composant. Pour pallier à
ce problème, le premier moyen envisageable est la conception de guide aux trous infiniment
longs, ce qui s’avère concrètement irréalisable. Le second moyen consiste à augmenter le
contraste entre le matériau au sein duquel la lumière est guidée et le milieu environnant.
L’avancée technologique a permis la réalisation de guides à cristaux photoniques membra-
naires et cette solution a été largement adoptée par la suite. L’avantage inhérent à la forme
de la membrane est de "rétrécir" le cône de lumière significativement de manière à pouvoir
placer un mode dans une bande interdite et hors du cône facilement.

La figure 4.9 présente une photo réalisée au Microscope Électronique à Balayage (MEB)
d’un guide membranaire tel que ce ceux que nous avons étudiés au cours de ce travail. Il
s’agit d’un guide dans lequel une seule rangée de trous a été retirée dans le cristal pho-
tonique pour faire office de guide. La nomenclature standard dénomme ce guide W1. En
réalité,
√ le 1 de W 1 indique, généralement, que la largeur du guide correspond à une fois
a 3 où a est la période du cristal. √
Il existe ainsi des guides W 1.5, W 2... suivant le nombre
de fois où se trouve la grandeur a 3 dans la largeur du guide. L’ajustement de ce para-
mètre a d’ailleurs un effet important sur les pertes du guide, la dispersion ou encore le
facteur de qualité dans le cas d’une cavité.

L’introduction de guides membranaires a donc permis une réduction drastique des


pertes dans ce type de guide. Les meilleurs résultats en terme de pertes font état de guides
W 1 dont les pertes se situent à 7, 6 dB/cm (à 1, 3 µm) pour des membranes en GaAs [75]
117

5 µm

Figure 4.9 – Photo MEB d’un guide membranaire à cristaux photoniques


Encart : Zoom x10 de la face clivée

et à 5 dB/cm (à 1, 5 µm) pour des membranes en Si [76]. Ces résultats, appliqués à des
guides dont les longueurs maximum n’excèdent pas quelques mm, permettent clairement
d’envisager une utilisation de ce type de guide pour la réalisation de composants pour
l’optique intégrée.

La dispersion des guides membranaires CPh peut être ajustée, en jouant sur les para-
mètres géométriques du guide, pour se placer volontairement dans un régime de propaga-
tion lente avec une dispersion contrôlée [77, 78]. L’utilisation des phénomènes de lumière
lente ("slow light") ouvre des perspectives pour la réalisation de fonctions optiques (ligne
à retard, compensation de dispersion...) compactes et intégrées [79, 80]. Des valeurs très
lentes de vitesse de groupe ont déjà été atteintes mais pour des guides très courts, par
conséquent avec un retard moyen. En effet, les pertes importantes observées en régime lent
ont obligé à faire un compromis retard/pertes. L’ensemble de cette étude porte donc sur
des guides en régime "semi-lent", c’est à dire, pour un vg > c/15.

Il est utile de pouvoir bien caractériser ces guides. Tout d’abord, pour maîtriser et
connaître leurs propriétés réelles une fois les guides conçus. L’information sur le temps de
groupe en fonction de la longueur d’onde pour les modes TE et TM et donc l’information
sur l’indice de groupe et la dispersion sont des paramètres clés qui nécessitent l’utilisation
de techniques spécifiques pour pouvoir être mesurés précisément dans ces guides. Ensuite,
pour comprendre des phénomènes physiques qui font encore l’objet d’investigations et en-
fin, pour permettre à l’avenir de lever des verrous technologiques. Par exemple, le lien
118 4. Étude de guides membranaires à cristaux photoniques

Figure 4.10 – Photo MEB des trous d’un guide membranaire à cristaux photoniques

entre les pertes par propagation, la rétro-diffusion et la vitesse de groupe fait l’objet de
nombreuses recherches à l’heure actuelle afin d’améliorer les performances des guides et
principalement les pertes et les retards atteignables. En particulier, la relation vitesse de
groupe/pertes [76, 81, 82] dont la forme exacte est encore inconnue actuellement. L’inter-
action lumière/matière étant plus importante à vitesse lente, le rôle du désordre dans la
structure peut devenir primordial, notamment, l’impact de facteurs tels que la variation
dans la taille, la position ou la forme des trous.

La figure 4.10 présente une photo MEB de quelques trous d’un structure à CPh dans
laquelle nous constatons une légère variation des paramètres énumérés précédemment. Il
s’agit là d’un exemple de désordre qui a un impact sur les propriétés du guide et dont les ef-
fets doivent être connus et compris pour maîtriser parfaitement la conception de ces guides.

Plusieurs méthodes ont déjà été proposées pour mesurer les paramètres fondamentaux
de guides à CPh telles que la méthode de mesure en champ proche résolue temporellement,
la phase-shift, le temps de vol ou encore l’analyse des franges Fabry-Pérot [83, 84, 85, 86,
87]. Nous verrons cependant que la simplicité, la rapidité et la diversité des paramètres
accessibles via son utilisation offre, à la technique OLCR, un rôle d’importance au sein
de toutes ces méthodes. Le nombre d’informations fournies telles que la mesure précise du
temps de groupe, l’estimation des pertes, la mise en évidence du couplage inter-modal et
l’observation des effets de diffusion permet une bonne analyse des propriétés physiques clés
de ces guides.
119

4.4 Mesures
4.4.1 Traitement "classique"
La première série de mesures porte sur un échantillon (échantillon n◦ 1) dont la période

est a = 418nm et le diamètre des trous est r = 0.26a. Il s’agit d’un guide W = 1.057 3a
avec une rangée de trous manquante dans la direction ΓK. Pour l’injection, nous avons
utilisé une fibre micro-lentillée en sortie avec un rayon de ceinture du faisceau d’environ
2 µm et un système de positionnement 3D dont la précision était de quelques centaines de
nm. La polarisation d’injection a été réglée à l’aide d’un polariseur et d’un contrôleur de
polarisation en entrée du composant ainsi que d’un autre polariseur en sortie du composant
avec un taux d’extinction d’environ 30 dB entre les polarisations TE et TM.

TE (impair)
Longueur d’onde (nm)

Ligne de lumière

TE (pair)

Vecteur d’onde k/KB


Figure 4.11 – Diagramme de dispersion du guide à CPh W1 pour l’échantillon n◦ 1

La figure 4.11 présente le diagramme de bande correspondant à ce guide dans le domaine


spectral de la bande interdite. Il a été obtenu par calcul par une méthode de différences
finies 3D dans le domaine temporel avec des conditions périodiques au bord pour pouvoir
implémenter le théorème de Bloch. Rappelons que la source OLCR couvre un domaine
spectral allant de 1525 nm à 1605 nm. La ligne de lumière représente le bord du cône de
lumière. Par conséquent tout ce qui se situe à l’intérieur du cône et qui est représenté en
pointillé sur la figure correspond à des modes à fuites du guide.

Nous distinguons trois modes différents situés à l’extérieur du cône de lumière : deux
modes TE pair et impair et un mode TM. Le mode TE pair (courbe gris foncée) présente
un comportement typique d’une ligne de défaut unique. La vitesse de groupe est quasiment
120 4. Étude de guides membranaires à cristaux photoniques

constante (ce qui correspond à une courbure de bande quasi-nulle sur le diagramme de dis-
persion) pour les hautes fréquences, c’est à dire, pour les basses longueurs d’onde environ
jusqu’à 1610 nm. Pour les hautes longueurs d’onde elle décroît avant de disparaître sur le
bord de bande autour de 1630 nm. Le mode TE impair (courbe gris clair) présente deux
minima dont un dans la zone à fuite. Rappelons, de plus, que le domaine spectral de la
source OLCR se situe entre 1525 nm et 1605 nm. Par conséquent, la plus grande partie de
ce mode se situe en dehors de la bande C+L de la source du dispositif de mesure OLCR
et ne sera pas observé lors de la mesure. Enfin, le mode TM (en noir) se comporte comme
un mode réflexion totale interne à l’exception d’une petite bande interdite entre 1527 nm
et 1537 nm. La courbure de bande est en effet pratiquement nulle sur la quasi-totalité de
la bande impliquant une faible valeur de dispersion comme nous le verrons ultérieurement.
L’indice de ce dernier mode est approximativement constant autour de ng = 5, valeur
typique des modes TM confinés dans des fines membranes. En revanche, le "mini-gap",
situé entre les points M0 et M1 , provient de la modulation périodique de l’indice le long
du guide. A la manière d’un DFB, le mode TM perçoit cette modulation et se trouve donc
intégralement réfléchi aux longueurs d’onde correspondant au "miroir".

1.5

1.0
Amplitude (a.u.)

0.5

0.0

-0.5

-1.0

-1.5
0 5 10 15 20 25

Différence de chemin optique (mm)


Figure 4.12 – Réflectogramme obtenu pour le mode TM du guide CPh membranaire pour
l’échantillon n◦ 1
Gris : Réflexion sur la face d’entrée et rétrodiffusion dans le guide ; Noir : Première réflexion sur
la face de sortie ; Gris clair : Seconde réflexion après un aller-retour

La figure 4.12 présente le réflectogramme obtenu pour la mesure du mode TM du guide


membranaire à CPh. Nous remarquons sur le réflectogramme trois réflexions principales et
121

distinctes qui correspondent à la face d’entrée du guide (gris), à la face de sortie du guide
(noir) puis à nouveau à la face de sortie du guide (gris clair) mais, cette fois, après un aller
retour. Entre la face d’entrée et la face de sortie apparaît aussi un signal lié à la rétrodiffu-
sion dans le guide que nous évoquerons plus en détail par la suite. Il faut noter que, dans
le cas de ces guides, les réflexions liées aux faces d’entrée et de sortie apparaissent sur le
même réflectogramme du fait de sa faible longueur. Par conséquent, le temps de groupe
obtenu sera absolu.

2
Amplitude (a.u.)

-1

-2

-3
0 5 10 15 20 25

Différence de chemin optique (mm)


Figure 4.13 – Réflectogramme obtenu pour le mode TE du guide CPh membranaire pour
l’échantillon n◦ 1
Gris : Réflexion sur la face d’entrée et rétrodiffusion dans le guide ; Noir : Première réflexion sur
la face de sortie ; Gris clair : Seconde réflexion après un aller-retour

La figure 4.13 présente le réflectogramme obtenu, cette fois ci, pour la mesure du mode
TE. Là encore, nous pouvons remarquons sur le réflectogramme trois réflexions. La diffé-
rence principale avec le mode TM provient de l’étalement du mode beaucoup plus impor-
tant lié à la grande valeur de dispersion. De ce fait, nous observons même un recouvrement
entre la première et la seconde réflexion de sortie. Le niveau de signal rétrodiffusé apparaît
moins fortement suivant cette polarisation suggérant un impact moindre.
122 4. Étude de guides membranaires à cristaux photoniques

Temps de groupe (ps)

Longueur d’onde (nm) Longueur d’onde (nm)


(a) (b)
Figure 4.14 – Temps de groupe mesurés pour les deux polarisations
Noir : mesure ; Gris : simulation
(a) Mode TE ; (b) Mode TM

La figure 4.14 présente les temps de groupe obtenus à partir des réflectogrammes 4.12 et
4.13 pour les modes TM (b) et TE (a). Dans les deux cas, nous avons superposé la mesure
(noir) et la simulation (gris) obtenue à partir du diagramme de dispersion. En traits pleins
apparaissent les valeurs simulées correspondant au mode mesuré et en pointillés celles cor-
respondant à l’autre mode.

Le mode TM se comporte comme un mode "classique" à RTI à l’exception des lon-


gueurs d’onde allant de 1530 nm à 1540 nm ce qui confirme les observations faite sur le
diagramme de dispersion. Il s’agit bien de la réflexion due à la modulation d’indice, dans
la direction de propagation, vue par le mode TM. De plus, l’existence de cette mini-bande
interdite génère une divergence du temps de groupe en bord de bande assimilable aux
effets du bord de bande dans un guide DFB standard. Le mode TE impair évolue, pour
sa part, d’un temps de groupe variant faiblement pour les plus petites longueurs d’onde à
un temps de groupe qui croît de plus en plus vite en s’approchant du bord de bande pour
entrée dans une région lente autour de 1600 nm. Cette très grande dispersion engendre
un écart en temps de groupe de plus de 30 ps sur l’ensemble de la bande de la source ce
qui représente un ralentissement assez fort des hautes longueurs d’onde. Là aussi, il y a
une bonne coïncidence entre l’évolution attendue par le diagramme de dispersion (via les
courbures de bandes) et les valeurs mesurées. Nous observons donc, pour les 2 modes, un
très bon accord entre la mesure OLCR et les valeurs simulées de temps de groupe.
123

Un autre point important est l’apparition d’un bruit plus grand, aux longueurs d’onde
équivalentes à celles de la mini-bande interdite du mode TM (environ entre 1530 nm et
1540 nm) dans la mesure du temps de groupe du mode TE. Il faut noter, tout d’abord,
que ces longueurs d’onde correspondent au bord de bande du mode TE pair. Une expli-
cation plausible vient du couplage intermodal lié aux effets du désordre. En effet, il a été
montré que les phénomènes de diffusion augmentent de façon inversement proportionnelle
à la vitesse, par conséquent, ils peuvent devenir très important dans la zone de divergence
du temps de groupe. Dès lors, on peut supposer qu’un couplage s’opère soit de TE impair
vers TE pair, soit de TE vers TM, ce qui peut expliquer l’impact de la mini-bande sur le
mode TE.

4.4.2 Cartographies temps/longueur d’onde

Signal (dB)
Longueur d’onde (nm)

Temps de groupe relatif (ps)


Figure 4.15 – Cartographie temps/longueur d’onde pour le mode TM de l’échantillon n◦ 1

Après avoir observé les résultats obtenus à partir du traitement "classique" de la


mesure OLCR, attardons nous, à présent, sur les résultats obtenus via la cartographie
temps/longueur d’onde. La figure 4.15 présente une cartographie, vue du dessus, obtenue
pour le mode TM de l’échantillon n◦ 1. La dispersion est faible pour les longueurs d’onde
supérieures à 1550 nm et l’évolution du temps de groupe y est plate. En revanche, nous
distinguons clairement la mini-bande entre 1530 nm et 1540 nm avec, sur les bords de
celle-ci, une forte divergence de la vitesse de groupe. En effet, la variation importante des
124 4. Étude de guides membranaires à cristaux photoniques

pertes au bord de la mini-bande engendre, par la relation de Kramers-Kronig, une variation


importante de l’indice et, donc, de la dispersion. Les points remarquables M0 , M1 et E1Γ,K ,
correspondants à ceux observés sur le diagramme de bande, sont signalés sur la figure. Il
apparaît aussi clairement que le niveau de signal réfléchi sur la face d’entrée augmente net-
tement aux longueurs d’ondes correspondantes à cette mini-bande, puisque pratiquement
aucun signal n’est transmis.

Signal (dB)
Longueur d’onde (nm)

Temps de groupe relatif (ps)


Signal (dB)

Longueur d’onde (nm)


Figure 4.16 – Cartographie temps/longueur d’onde pour le mode TE de l’échantillon n◦ 1

La figure 4.16 présente la cartographie, vue du dessus, obtenue, cette fois, pour le mode
TE pair. Les réflexions successives ne se recouvrent pas contrairement à la figure 4.13. Il est
d’ailleurs possible d’y distinguer la trace laissée par un second aller-retour dans le guide.
L’impact provoqué par la mini-bande est aussi bien visible. Les pertes provoquées, par
celle-ci sont d’ailleurs observables sur la partie inférieure de la figure qui présente l’évolu-
tion de l’intensité de la réflexion en dB entre les points A et A’ marqués sur la cartographie.
Le signal réfléchi chute d’environ 10 dB vers 1545 nm pour retrouver son niveau initial
autour de 1525 nm.
125

Nous avons vu que le mode TE impair présente deux états différents, pour des lon-
gueurs d’onde très proches. En effet, E1K présente un état sans fuite et E1Γ un état radiatif
du mode TE impair. Il apparaît, à travers les cartographies observées, que le niveau de
bruit augmentant pour le mode TE dans la figure 4.14 provient des pertes engendrées par
la mini-bande du mode TM. C’est donc le couplage, qui s’opère entre TE et TM et pour
finir vers TE impair, qui fuit partiellement au travers de E1Γ et qui provoque les pertes
observées au niveau du mode TE pair.

Les mesures suivantes, concernent un autre guide (échantillon n◦ 2) pour lequel, la


cartographie s’avère contenir un grand nombre d’informations. Il s’agit toujours
√ d’une
membrane de 265 nm d’épaisseur, de 1 mm de long, avec un guide W = 1.057 3a ayant,
cette fois, une période a = 400 nm et un rayon des trous r = 0.242a.

Signal (dB)

réfl
ect
ogr
am
me
Amplitude (dB)

f
e

)
m
Tem (n
ps d e
e grou ond
pe r ’
e latif urd
(ps) u e
ong
L

Figure 4.17 – Cartographie temps/longueur d’onde pour le mode TE dans l’échantillon n◦ 2

Avant d’analyser les résultats et afin de percevoir l’ensemble des paramètres accessibles
via la cartographie, la figure 4.17 présente une cartographie temps/longueur d’onde 3D de
ce guide qui récapitule les éléments visibles. L’arrière plan montre, à titre de comparaison,
la trace du module du réflectogramme "classique" que l’on peut considérer comme une
projection de l’ensemble des longueurs d’onde séparées sur la cartographie. De plus, nous
126 4. Étude de guides membranaires à cristaux photoniques

observons aussi en a la réflexion sur la face d’entrée du guide, en b, c et d les réflexions


successives sur la face de sortie après plusieurs aller-retour dans le composant, en e les
effets de la rétro-diffusion dans le composant et en f la trace laissée par une cavité. En
effet, il est possible, en déplaçant certains trous par rapport à la maille originale, de cou-
pler une cavité avec le guide principal [88, 89]. Les libertés de conception ainsi que les très
petits volumes pour de forts confinements ont d’ailleurs permis de réaliser des composants
aux facteurs de qualité très élevés (supérieurs aux centaines de milliers) [90, 91, 92]. Nous
verrons que ces cavités peuvent être caractérisées par cette méthode.

Signal (dB)
Longueur d’onde (nm)

Temps de groupe relatif (ps)

Figure 4.18 – Cartographie temps/longueur d’onde pour le mode TE de l’échantillon n◦ 2

La figure 4.18 présente la même cartographie, vue du dessus, de la mesure obtenue pour
le mode TE de l’échantillon n◦ 2. La courbe en pointillé représente les valeurs du temps
de groupe obtenues à partir du diagramme de dispersion simulé. La lettre C indique la
trace laissée par la cavité au sein de la cartographie. Les ronds représentent une mesure du
temps de groupe réalisée par la méthode "classique" OLCR utilisée avec une filtre physique
accordable (d’environ 1 nm de largeur à mi-hauteur) sur les longueurs d’onde de la source.
Ces trois approches montrent un très bon accord sur l’ensemble du spectre de la source.
Le mode TE de l’échantillon n◦ 2 présente une très forte dispersion et permet d’atteindre,
autour de la longueur d’onde de 1580 nm, une vitesse de groupe de l’ordre de c/15 pour
un temps d’aller-retour dans le guide autour de 100 ps. La mesure est précise et ne souffre
pas du recouvrement entre les différents chemins optiques. De plus, la coupure apparaît
clairement sur la cartographie puisque à partir de 1600 nm seule la réflexion sur la face
d’entrée subsiste alors qu’aucun signal de réflexion ou de rétro-diffusion n’apparait après.
127

Cette cartographie montre une évolution significative du niveau de signal rétro-diffusé avec
la vitesse de groupe. En effet, en régime lent (pour les hautes longueurs d’onde) celui-ci
est nettement plus intense.

4.4.3 Cavités et temps de vie des photons

20

τc = 49,2 ps ≡ r = 0.99882

Intensité (dB)
1530 10

-10
Longueur d’onde (nm)

-20

Cavité B 50 100 150 200 250


B’
1550 Temps de groupe (ps)

1570

B B’

1590
r = 0.999
∆υfiltre = 2nm
1610
50 100 150 200 250
Temps de groupe (ps)

Figure 4.19 – Cartographie temps/longueur d’onde simulée avec insertion d’une cavité couplée

Pour finir, bien que, dans le cadre de cette thèse, des études approfondies n’aient pas
été menées sur les cavités couplées, nous présentons une méthode utilisée à partir des me-
sures OLCR pour pouvoir déterminer le facteur Q de celles-ci via la mesure du temps de
vie de photons dans la cavité. Pour décrire le processus de caractérisation d’une cavité, la
figure 4.19 présente une cartographie simulée sur laquelle a été couplée une cavité. Il s’agit
d’une cavité dont l’intervalle spectral libre dépasse le domaine spectral de la source. De ce
fait, nous n’observons qu’une seule trace à la longueur d’onde de 1580 nm. Par ailleurs, le
coefficient de réflectivité de celle-ci a été fixé 0, 999. L’encart de la figure présente une pro-
jection de l’intensité de réflexion au niveau de cette cavité. En partant de la décroissance
(en dB) de la puissance réfléchie nous déterminons le temps caractéristique de la cavité.
En effet, il s’agit simplement d’une décroissance du type :

I = I0 e−t/τc (4.14)
128 4. Étude de guides membranaires à cristaux photoniques

où I0 est l’intensité initiale et τc le temps caractéristique de la cavité. La bonne concor-


dance entre la réflectivité préétablie et celle calculée à partir de l’intensité mesurée confirme
la validité de l’utilisation de la cartographie pour connaître les paramètres d’une cavité
conduisant à son facteur de qualité Q = ωτc .

Cette méthode permet une caractérisation directe des cavités couplées ce qui, dans un
contexte de développement important de ces cavités dans les guides à CPh, est un apport
réel de l’outil d’analyse. Cumulée aux autres possibilités de la mesure, elle peut donner un
bon apperçu des performances d’un système développé pour atteindre des facteurs Q très
élevé.

De plus, la capacité à mesurer la durée de vie des photons à l’intérieur du guide s’avère
utile à d’autres fins. En effet, les phénomènes de diffusion, qui apparaissent comme un
continuum pour une résolution spectrale donnée, sont en fait, pour beaucoup, des phéno-
mènes discrets. Dès lors, ils sont plus clairement observables lorsque la résolution spectrale
de la mesure est améliorée. Ceci est possible, en réduisant la largeur du filtre en longueur
d’onde utilisé dans le traitement numérique. Bien que se faisant au détriment de la résolu-
tion spatiale de la mesure, cette technique permet l’observation dicrète des traces générées
par la rétrodiffusion des défauts du guide. Pour chaque trace il est alors possible de mesurer
le temps de vie d’un photon de la même manière que pour une cavité.
Longueur d’onde (u.a.)

Temps de groupe (u.a.)

Figure 4.20 – Évolution d’une cartographie temps/longueur d’onde avec la résolution spectrale

La figure 4.20 présente deux cartographies temps/longueur d’onde réalisées pour le


même guide mais pour deux résolutions spectrales différentes. La cartographie b, repré-
129

sentant un zoom sur une partie de la cartographie a, a été réalisée pour une résolution
spectrale plus fine que la cartographie a. Il en découle une moins bonne précision sur la
mesure du temps de groupe via les réflexions sur les faces d’entrée et de sortie du guide
puisque celles-ci sont considérablement étalées dans la cartographie b. En revanche, les
traces provoquées par la rétrodiffusion apparaissent dorénavant de façon discrète et sur
toute la bande spectrale. De plus, ces traces sont distinctes y compris au delà du temps de
groupe maximum mesurable, c’est à dire environ 120 ps, à la longueur d’onde de 1585 nm.
Ce dernier point est d’importance comme nous allons le voir à présent.

a
49 ps

a
Longueur d’onde (u.a.)

Amplitude (a.u.)
b
160 ps

214 ps c
c

0 500 1000
Temps de groupe (ps)

Figure 4.21 – Mesure de la durée de vie de photons via la cartographie temps/longueur d’onde

La figure 4.21 présente trois temps de vie obtenus à partir de la cartographie présentée
initialement sur la figure 4.20, pour trois longueur d’onde différentes. Les traits pointillés
représentent les ajustements numériques linéaires réalisés sur les différentes décroissances
en intensité du signal réfléchi. Le temps de vie est donc extrait directement, de la même ma-
nière que pour une cavité, via la décroissance du signal de réflexion. Cette mesure apporte
un intérêt supplémetaire puisque, dès lors que la rétrodiffusion devient trop importante, la
mesure du temps de groupe est compromise et n’a plus de réelle signification. En revanche,
la mesure de la durée de vie du photon dans le guide est toujours réalisable.
Or, les premières études montrent un lien entre temps de groupe dans le guide et durée
de vie du photon rétrodiffusé. Même si la relation exacte reste à établir et demande un
investigation longue, cette piste ouvrirait la voie à une mesure de ralentissements très
importants dans des circonstances de mesure autrement inenvisageables. De ce fait, il
s’agirait d’un outil supplémentaire dans l’analyse et la compréhension des effets qui lient
les pertes et la vitesse de groupe dans ce type de composant.
130

Conclusion
Nous avons étudié, au cours de ce chapitre des guides à cristaux photoniques mem-
branaires. L’OLCR a permis d’analyser des guides d’environ 1 mm de long et pouvant
atteindre un régime semi-lent pour des longueurs d’onde autour de 1600 nm avec une
vitesse de groupe réduite jusqu’à c/15. Nous avons aussi observé des phénomènes de cou-
plage inter-modaux via une mesure en parallèle et pour toutes les longueurs d’onde des
deux polarisations. De plus, le traitement numérique conduisant à l’établissement d’une
cartographie temps/longueur d’onde a rendu possible une observation simultanée des phé-
nomènes de ralentissement d’onde et des phénomènes de diffusion dans le composant. Par
la suite, la méthode devrait contribuer à relier ces deux phénomènes et peut être à mieux
comprendre leur inter-dépendance. Ce facteur est essentiel dans les avancées réalisées par
ces composants puisqu’il permettrait de comprendre les limites théoriques atteignables
dans le compromis pertes/retard. Par ailleurs, nous avons démontré la possibilité de ca-
ractériser des cavités couplées dans ce type de guide et de mesurer le temps de vie de
photons rétodiffusés par les défauts du guide. Qu’il s’agisse d’investiguer les caractérisques
précises de cavités couplées à fort facteur de qualité ou d’élargir les possiblités de me-
sure des phénomènes de ralentissement dans ces guides, cette technique ouvre la voie à
nombre de nouvelles avancées dans les compréhension de la physique des guides à cristaux
photoniques.
131

Conclusion

L’objet de cette thèse était d’utiliser la réfléctométrie faiblement cohérente pour étudier
divers composants optiques innovants. Pour ce faire, nous avons mené à bien un ensemble
de caractérisations ayant pour but l’extraction des paramètres clés de chaque composant
étudié. A chaque fois (à l’exception des fibres dopées Erbium), l’étude en question a été réa-
lisée dans le cadre de recherches impliquant plusieurs acteurs (Alcatel, LNE, OFS, Thales)
et visant à mieux maîtriser la conception du composant, à mieux comprendre les phéno-
mènes physiques impliqués dans son fonctionnement, à mieux connaître ses propriétés ou
encore à parfaire les techniques de fabrication de celui-ci.

Dans un premier temps, nous avons défini un cadre à cette étude en présentant les
grandeurs physiques importantes pour la compréhension de ce travail. Des propriétés telles
que la dispersion, les pertes ou encore la biréfringence ont, en effet, été mesurées tout au
long de cette thèse à travers les différentes caractérisations. Nous avons également présenté
un état de l’art non exhaustif des techniques utilisées pour mesurer ces propriétés dans les
composants optiques. Des techniques diverses telles que la mesure du temps de vol, l’in-
terférométrie en lumière blanche, la méthode de la modulation de la phase mais aussi des
techniques réflectométriques comme l’OTDR ou l’OFDR ont fait l’objet d’une description
tant sur le plan du principe théorique que sur celui des performances limites. De plus, nous
avons situé l’OLCR et démontré ses capacités, en comparaison aux autres méthodes, pour
la caractérisation de composants optiques. Un tableau récapitulatif présente les avantages
et inconvénients de chaque méthode. Il permet de constater que la capacité de l’OLCR à
caractériser des composants courts, la possibilité de mesurer simultanément et rapidement
les pertes, la dispersion et la biréfringence ou encore la réalisation de mesure ne nécessitant
qu’une seule extrémité du composant confère à cette technique un statut privilégié parmi
les autres méthodes pour l’étude complète de composants optiques.

Après avoir défini ce cadre, nous avons analysé plus en profondeur les capacités et li-
mites de performances de l’OLCR sensible à la phase. Pour ce faire nous avons d’abord
présenté en détail le principe de l’interférométrie appliqué à la mesure de la réflectivité com-
plexe d’un composant. Nous avons aussi déterminé certaines des limites inhérentes à notre
système de mesure telles la résolution spatiale d’environ 100 µm, la résolution spectrale
de l’ordre de 10 pm, la dynamique de 60 dB et enfin la sensibilité en intensité permettant
une détection d’une réflexion autant qu’une mesure de la dispersion pour une intensité du
signal réfléchi inférieure à −60 dBm. De plus, en prenant l’exemple d’une fibre SMF et
132

celui d’une fibre à maintien de polarisation, nous avons explicité les méthodes permettant,
à partir de l’acquisition d’un réfléctogramme, d’extraire la phase, le temps de groupe, la
dispersion et la biréfringence. Dans chacun des cas précédents, nous avons établi la sensi-
bilité ou la précision avec notamment une biréfringence minimale mesurable de l’ordre de
5.10−5 et une dispersion minimale mesurable de ' 0.05 ps.nm−1 , avec une erreur ≤ 1.5%.

Au cours du troisième chapitre, nous avons présenté un ensemble de mesures concernant


des fibres optiques spéciales. Pour commencer, nous avons mesuré le lien indice/amplification,
du fait de la relation de Kramers-Kronig, dans une fibre dopée Erbium via la caractérisa-
tion de tronçons courts de fibre (environ 50 cm) pour différentes puissances de pompe. Avec
une pompe à la longueur d’onde de 980 nm allant jusqu’à 80 mW nous avons notamment
observé une variation d’indice de groupe de 1, 8.10−4 pour une variation du gain d’environ
10 dB autour de la longueur d’onde d’amplification maximale de 1530 nm. Ensuite, nous
avons caractérisé une fibre micro-structurée à cœur plein de 1 km de long. En plus de
la mise en évidence de tous ses modes de propagation, nous avons mesuré les paramètres
de dispersion et de biréfringence du mode fondamental pour des tronçons courts (environ
40 cm) issus de cette fibre et déterminé leur évolution longitudinale. Ainsi, nous avons noté
une variation de plus de 5 ps.nm−1 .km−1 sur la longueur de la fibre en plus d’une différence
significative entre les deux polarisations. Enfin, nous avons réalisé une étude complète des
propriétés de dispersion des modes de fibres multimodes. Ainsi, nous avons montré que,
quels que soient les indices de groupes, les dispersions ou les dispersions d’ordre supérieur
de ces modes, ceux-ci étaient accessibles dans leur globalité par une mesure unique et ra-
pide à l’OLCR. En effet, nous avons notamment observé, dans une même fibre, cinq modes
dont trois présentaient des valeurs de dispersion "classique" autour de 20 ps.nm−1 .km−1 ,
un présentait une forte dispersion négative d’environ −600 ps.nm−1 .km−1 et un autre
présentait une forte dispersion positive d’environ 600 ps.nm−1 .km−1 . Et ce pour toute la
bande spectrale de la source, en dépit du recouvrement des modes dans le réflectogramme
de mesure.

La dernière partie présentée au cours de cette thèse concerne une étude menée sur des
guides semi-conducteurs à cristaux photoniques. Nous avons caractérisé quelques uns de
ces guides conçus principalement pour produire des retards importants du signal optique.
Par une analyse complète temps/longueur d’onde présentée sous forme de cartographie
pour chaque mode du composant, nous avons réalisé des mesures du temps de groupe et
montré un ralentissement de la lumière pour des vitesses allant jusqu’à c/15 autour de la
longueur d’onde de 1600 nm et mesurées dans des guides de 1 mm de long. L’utilisation de
fibres micro-lentillées a permis un très bon couplage à l’injection et l’introduction, dans le
dispositif OLCR, de deux polariseurs et d’un contrôleur de polarisation a permis, quant à
elle, une étude séparée et complète de modes TM et TE de chaque guide. Par ailleurs, via
les résultats d’analyse sous forme de cartographie, un ensemble complet de phénomènes
physiques a été mis en évidence comme, par exemple, la rétrodiffusion dans le composant,
les couplages inter-modaux ou encore l’impact d’une mini-bande interdite dans l’évolution
du temps de groupe. Enfin, nous avons montré qu’il est possible de caractériser précisément
une cavité par une mesure de temps de vie des photons dans celle-ci directement accessible
133

par la cartographie temps/longueur d’onde.

L’OLCR est aujourd’hui un outil majeur dans la mesure et la compréhension des phéno-
mènes physiques qui prennent place dans les composants optiques. La sensibilité à la phase
de la méthode et l’utilisation de traitements numériques appropriés permettent une étude
simple et profonde d’un grand nombre de composants. L’avenir devra apporter de nouveaux
développements du procédé de mesure ou du traitement des données pour en améliorer les
performances telles la sensibilité, l’excursion ou la diversité des paramètres accessibles. Il
faudra aussi poursuivre les investigations commencées pour améliorer la compréhension
des phénomènes à l’état de recherche notamment le lien pertes/vitesse de groupe dans les
guides à cristaux photoniques ou encore les performances des cavités couplées à ces guides.
Pour finir, il s’agira aussi de continuer des travaux, qui, pour des raisons d’avancement in-
suffisant n’ont pas été présentés ici mais pourraient conduire à des avancées intéressantes.
Il s’agit, par exemple, de l’étude des phénomènes de couplage entre modes de surface et
mode de cœur d’une fibre micro-structurée à cœur creux mais, aussi, de la caractérisation
de composants optiques polymères.
134
135

Annexes

Annexe 1 : Principe de la détection équilibrée

I1
E1in E1out

I = I1 − I2
E2in E2out

I2

Figure 4.22 – Schéma de principe de la détection équilibrée

La figure 4.22 décrit le principe de base de la détection équilibrée. Le coupleur optique


50/50 introduit un déphasage de π/2 entre les deux signaux correspondant aux deux bras.
Chacun des deux détecteurs quadratiques enregistre mesure l’intensité des deux bras de
sortie du coupleur avant de soustraire ces deux intensités. De cette façon, la partie continue
du signal est supprimée pour ne laisser passer que la partie interférentielle.

Tout d’abord, nous considérons les deux champs en entrée des deux bras du coupleur
optique comme étant exprimés :

p
1
Ein = P1 ejω1 t (4.15)

p
2
Ein = P2 ejω2 t (4.16)

1 et E 2 en sortie du coupleur peuvent être exprimés en fonction


Alors, les deux champs Eout out
des deux champs d’entrée Ein1 et E 2 sous la forme :
in
136

1 π
1
Eout 1
= √ (Ein 2
+ Ein ej 2 ) (4.17)
2
1 π
2
Eout 1
= √ (Ein ej 2 + Ein
2
) (4.18)
2

De ce fait l’intensité détectée par les deux photodiodes s’exprime :

 
1 1 2 P1 P2 p
I1 = Re|Eout | = Re + + P1 P2 sin (ω1 − ω2 )t (4.19)
2 2 2
 
1 2 2 P1 P2 p
I2 = Re|Eout | = Re + − P1 P2 sin (ω1 − ω2 )t (4.20)
2 2 2

La différence entre les deux intensités s’exprime donc :


p
I = I1 − I2 = 2Re P1 P2 sin (ω1 − ω2 )t (4.21)

De cette façon, la partie continue du signal a bien été supprimée.


137

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