Oct en Face

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Focus

OCT “en face” : comment bien l’utiliser ?


“En Face” OCT: How to use it?
C. Scemama Timsit 1, 2, M. Mauget-Faÿsse1, B. Wolff 1, 2, 3
(1 Service du Pr J.A. Sahel, fondation ophtalmologique Adolphe-de-Rothschild, Paris ; 2 Iena Vision, Paris ;
3
Centre ophtalmologique Maison-Rouge, Strasbourg)

interprétation doit toujours être combinée aux autres


✔✔Mots-clés. OCT “en face” • OCT Spectral Domain • méthodes d’imagerie, et notamment à l’OCT B-scan,
Chorio­rétinopathie séreuse centrale • Vasculopathie qui permet de visualiser la coupe exacte où se situe
polypoïdale. l’OCT C-scan. L’OCT “en face” a de nombreuses appli­
✔✔Keywords. C-scan • OCT Spectral Domain • OCC cations en pathologie de la rétine et de la choroïde.
Central serous chorioretinopathy • Polypoidal choroidal Les pathologies les plus fréquentes seront détaillées et
vasculopathy. illustrées par des exemples.

L’
OCT “en face” est une méthode d’imagerie qui a Définitions
connu un essor important ces 2 dernières années.
Elle permet d’analyser toutes les couches de la ✔✔ Principe (figure 1)
rétine, l’interface vitréomaculaire et la choroïde dans Le principe d’acquisition des images en “en face” est
le plan frontal, “en face”. Cette imagerie donne des de réaliser des coupes (raster) suffisamment serrées
informations complémentaires par rapport à l’analyse (au moins 30 μm d’espacement) centrées sur la zone
des coupes en B-scan horizontales et verticales. Son d’intérêt avec une addition des scans (frame) suffisante.

C-scan

B-scan vertical B-scan horizontal

Figure 1. L’OCT “en face”, ou C-scan, est une image reconstruite à partir de B-scan horizontaux et verticaux.

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L’image “en face” est ainsi reconstruite à partir de ces a
scans, le but étant d’obtenir un bon compromis entre
rapidité d’acquisition et qualité des images “en face”.
Il est cependant important de remarquer que les nouveaux
appareils OCT permettent des acquisitions beaucoup
plus rapides avec une qualité supérieure, surtout depuis
l’avènement de l’OCT-angiographie (angio-OCT), qui donne
systématiquement l’image en “en face” associée.

✔ Analyse
L’OCT “en face” permet une analyse couche par couche
de la rétine et de la choroïde. Cette analyse doit, bien sûr,
être toujours combinée à l’analyse des coupes en B-scan.
Il existe différentes coupes :
• la coupe passant par la limitante interne est utile pour
l’analyse de l’interface vitréomaculaire (traction, trous
maculaires, membrane épirétinienne) et les œdèmes
maculaires ;
• la coupe suivant la membrane de Bruch permet tout
particulièrement d’analyser la choroïde et la rétine b
externe (décollement de l’épithélium pigmentaire, polype,
dégénérescence maculaire liée à l'âge, etc.) ;
• la coupe “transverse” est souvent moins utile et plus
difficile à interpréter (car traversant différentes couches
de rétine).

Il est important de connaître la réflectivité normale de


chacune des couches de la rétine et de la choroïde pour
une meilleure analyse des éléments pathologiques.

Apport de l’OCT “en face” en pathologie

✔ OCT “en face” dans la choriorétinopathie


séreuse centrale
Dans la choriorétinopathie séreuse centrale, les images
d’OCT “en face” permettent d’étudier le (ou les) décol-
lement(s) de l’épithélium pigmentaire (localisation,
forme, taille) et les vaisseaux choroïdiens, qui apparais- Figure 2. Choriorétinopathie séreuse centrale chronique. L’OCT
“en face” (a) montre la dilatation des vaisseaux choroïdiens sous
sent souvent très dilatés dans cette pathologie. Cette la forme de vaisseaux dilatés hyporéflectifs correspondant aux
imagerie nous permet d’obtenir des images similaires vaisseaux hypercyanescents visibles sur l’angiographie au vert
à celles observées avec l’angiographie au vert d’indo- d’indocyanine (b) [flèches blanches].
cyanine (ICG) sans utilisation de colorant : les vaisseaux
hypercyanescents sur l’ICG correspondent aux vaisseaux choroïdiens souvent responsable d’une exsudation intra-
dilatés hyporéflectifs sur l’OCT “en face” (figure 2). ou sous-rétinienne dans la région maculaire ou péri-
papillaire. Ces dilatations anormales, rondes, uniques ou
✔ OCT “en face” dans la vasculopathie multiples “en grappe” sont situées au sein d’un décol-
choroïdienne polypoïdale lement de l’épithélium pigmentaire et alimentées par
Les polypes, dont la description initiale a été faite grâce un réseau vasculaire choroïdien anormal : le Branching
à l’angiographie et plus précisément grâce à l’ICG, cor- Vascular Network (BVN). L’OCT “en face” permet, dans
respondent à une dilatation anormale des vaisseaux de nombreux cas, de les visualiser de manière très

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Focus

a
précise sous la forme de petites formations arrondies
­hyper-­réflectives au sein du décollement de l’épithélium
pigmen­taire hyporéflectif. Le BVN est également bien
visible dans certains cas (figure 3).

✔✔ OCT “en face” dans la dégénérescence


maculaire liée à l’âge
Les drusens maculaires, qu’ils soient séreux ou réticulés,
sont bien visibles sur l’OCT “en face” sous la forme de
lésions plus ou moins réflectives, arrondies et plus ou
moins confluentes.
Dans la dégénérescence maculaire liée à l'âge néo­
vasculaire, et en particulier dans les décollements de
l’épithélium pigmentaire vascularisés, l’OCT “en face”
peut montrer de façon très précise un lacis néovasculaire
avec ses nombreuses ramifications là où l’OCT B-scan
met en évidence une hyperréflectivité très inhomogène au
sein du décollement de l’épithélium pigmentaire (figure 4).
L’OCT “en face” est également utile dans la dégénéres-
cence maculaire liée à l'âge atrophique et montre la pro-
b gression de l’atrophie géographique plus précocement
que les clichés en autofluorescence : la couche des pho-
torécepteurs (zone ellipsoïde) montre des défects plus
étendus que sur les clichés en autofluorescence (figure 5).
Enfin, l’OCT “en face” permet de visualiser les tubula-
tions de la rétine externe visibles dans la dégénérescence
maculaire liée à l'âge atrophique ou fibroatrophique sous
la forme de ramifications pseudodendritiques hyporéflec-
tives avec une bordure hyperréflective témoignant non pas
d’une activité néovasculaire, mais d’une dégénérescence
de la rétine (figure 6, p. 52).

✔✔ OCT “en face” dans les occlusions veineuses


Le blanc périveinulaire est une entité clinique maintenant
bien connue, présente dans certaines formes ­d’occlusion
de la veine centrale de la rétine (OVCR de type A). Le
blanc périveinulaire correspond à une ischémie capillaire
secondaire à un “bas débit” localisée autour des veinules
post­capillaires. Sur l’OCT “en face”, il est bien visible sous
c
la forme de taches hyperréflectives localisées dans les
couches nucléaire interne et plexiforme externe entourant
les ­veinules dans la région maculaire (figure 7, p. 52).
Les macroanévrysmes veineux, conséquence d’un remo-
delage microvasculaire, sont présents dans les occlusions
de branche veineuse de plus de 6 mois d’évolution. Le
diagnostic est habituellement posé grâce à l’ICG. Sur les
Figure 3. Vasculopathie choroïdienne polypoïdale. L’angio­graphie images “en face”, ils apparaissent sous formes de lésions
au vert d’indocyanine ( a) met en évidence les polypes (hyper- rondes hyperréflectives à centre hyporéflectif, localisées
fluorescents) au sein du décollement de l’épithélium pigmentaire
(DEP) hypofluorescent. L’OCT “en face” (b)montre bien les polypes : dans les couches internes de la rétine, souvent proches
lésions rondes hyperréflectives (flèches blanches) au sein du DEP de territoires ischémiques et peuvent parfois alimenter
hyporéflectif (c). un œdème maculaire (figure 8, p. 53). Comme l’ICG, l’OCT

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a c

Figure 4. Décollement de l’épithélium pigmentaire (DEP) vascularisé. L’angiographie à la fluorescéine (a) montre une hyperfluorescence
inhomogène et la présence de pin points. L’angiographie au vert d’indocyanine (b) montre bien le lacis néovasculaire qui est également
bien visible sur l’OCT “en face” (c) sous la forme d’un lacis néovasculaire hyperréflectif avec de nombreuses ramifications au sein du DEP.
L’OCT B-scan (d) montre une hyperréflectivité inhomogène au sein du DEP, sans lacis individualisable.

a b

Figure 5. Atrophie géographique. Le cliché en autofluorescence (a) met en évidence la zone atrophique hypo-autofluorescente. L’OCT
“en face” (b) met en évidence la zone atrophique et la zone de progression de l’atrophie (carré bleu), qui n’est pas visible sur le cliché en
autofluorescence.

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Focus

a “en face” permet de déterminer leur taille et leur locali-


sation exacte sans injection de colorant. L’OCT “en face”
pourra donc guider le traitement des macroanévrysmes
par photocoagulation laser.
Jusqu’à présent, l’angiographie à la fluorescéine était
le seul examen qui permettait d’évaluer l’ischémie
rétinienne, mais sans qu’il soit possible de préciser
quel plexus capillaire est plus particulièrement atteint.

c
Figure 6. Dégénérescence maculaire liée à l’âge atrophique et
tubulations de la rétine externe. Le cliché en autofluorescence (a)
montre les limites de l’atrophie, qui est hypo-autofluorescente.
L’OCT “en face” (b) met en évidence les tubulations rétiniennes Figure 7. Blanc périveinulaire (BPV). L’angiographie à la fluores-
externes, qui limitent les contours de la zone atrophique sous la céine ( a) met en évidence les tortuosités veineuses et les
forme de cavités hyporéflectives entourées par un liséré hyper- hémorragies. L’OCT “en face” (b) montre l’aspect de BPV : taches
réflectif. L’OCT B-scan (flèche bleue : coupe OCT) [c] localise les hyperréflectives dans la couche nucléaire interne (qui est norma-
tubulations qui se situent dans la rétine externe (flèche blanche). lement hypo­réflective).

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Depuis l’avènement de l’OCT “en face”, il est possible ✔ OCT “en face” et diabète
non seulement d’analyser les territoires ischémiques L’OCT “en face” est également utile chez les patients
mais également de préciser quel plexus capillaire est présentant une rétinopathie diabétique et/ou une
plus particulièrement atteint (superficiel et/ou profond) ; maculopathie diabétique. Elle permet d’évaluer le degré
sur l’imagerie “en face”, l’ischémie se traduit par une d’ischémie maculaire, de repérer les microanévrysmes
raréfaction des capillaires (élargissement des zones maculaires et de localiser l’œdème maculaire afin de
hyporéflectives) [figure 9]. guider un éventuel traitement laser.

a b

Figure 8. Macroanévrysmes veineux chez un patient présentant une occlusion de branche veineuse rétinienne. L’OCT “en face” (a) visua-
lise très bien les macroanévrysmes sous la forme de lésions arrondies à bordure hyperréflective et centre hyporéflectif (flèche blanche).
Sur l’angiographie au vert d’indocyanine (b), les macroanévrysmes sont hyperfluorescents (flèche blanche).

a b c

Figure 9. Ischémie dans une occlusion de branche veineuse rétinienne. L’OCT “en face” montre bien la raréfaction capillaire dans la nucléaire
interne (plexus superficiel) [a] et la plexiforme externe (plexus profond) [b]. L’angiographie à la fluorescéine (c) met en évidence la même
zone ischémique, qui apparaît hypofluorescente. À noter également la présence d’un néovaisseau rétinien (flèche).

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✔✔ OCT “en face” dans les télangiectasies les couches de la rétine, d­ ’aspect régulier entouré de
maculaires de type 2 logettes régulièrement réparties sur les bords. Dans les
L’OCT “en face” montre une désorganisation de la maille pseudo-trous, les bords sont moins réguliers, ovalaires
capillaire dans 100 % des télangiectasies maculaires avec une membrane épirétinienne (MER) à la surface de
de type 2. Cette désorganisation n’est visible ni sur la rétine responsable de plis ; les logettes, lorsqu’elles
l’OCT B-scan ni sur l’angiographie à la fluo­rescéine. Elle sont p­ résentes, sont moins régulières (figure 10).
montre une diffusion des télangiectasies sur les temps
tardifs de l’examen. Les kystes sont également présents ✔✔ OCT “en face” et taches blanches
dans 80 % des cas et bien visibles sur l’OCT “en face”. inflammatoires
L’OCT “en face” est très utile pour le diagnostic et la
✔✔ OCT “en face” dans les trous maculaires ­compréhension des taches blanches inflammatoires du
et les pseudo-trous fond d’œil.
Il n’est pas toujours aisé de différencier trou maculaire et Dans la choroïdite multifocale, l’OCT “en face” montre
pseudo-trou sur l’analyse du fond d’œil. L’OCT a permis des lésions rondes hyperréflectives dans le plan de l’épi-
d’en faire le diagnostic de façon certaine en montrant thélium pigmentaire correspondant aux foyers hypo­
un trou intéressant toutes les couches de la rétine dans cyanescents visibles sur l’ICG.
les trous maculaires (de pleine épaisseur) et un trou Dans le syndrome des taches blanches évanescentes
intéres­sant uniquement les couches internes de la rétine (­Multiple Evanescent White Dot Syndrome [MEWDS]),
secondaire à une membrane épirétinienne qui “froisse” l’imagerie “en face” montre des taches hyporéflectives
la surface rétinienne et entraîne une verticalisation des au niveau de la zone ellipsoïde (disruption de cette zone)
berges de l’entonnoir fovéolaire dans les pseudo-trous. correspondant aux taches hypocyanescentes vues sur
L’OCT “en face” est également très utile dans l’évalua- l’ICG. Ces taches se rétablissent progressivement en
tion des trous maculaires et des p­ seudo-trous. Dans quelques semaines avec une restitution concomitante
les trous maculaires, il existe un trou intéressant toutes de la zone ellipsoïde (figure 11).

Limitante interne

Nucléaire interne

Zone ellipsoïde

Figure 10. Trou maculaire de stade 3. L’OCT “en face” passant par différentes couches de la rétine montre la régularité des bords du trou, qui
est plus large au niveau de la zone ellipsoïde, la répartition régulière des logettes cystoïdes (coupe passant par la couche nucléaire interne).

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Conclusion
a
L’OCT “en face” a permis une meilleure compréhension
de nombreuses pathologies rétiniennes et choroïdiennes.
Actuellement, elle peut être réalisée de manière systé-
matique en pratique clinique courante, surtout depuis
l’augmentation des vitesses d’acquisition grâce au
développement d’appareils OCT de plus en plus perfor-
mants. Ces nouveaux appareils permettent la réalisation
concomitante de l’OCT “en face” et de l’angio-OCT.
Enfin, la pratique de l’OCT “en face”, ces dernières années,
a permis de mieux comprendre l’interprétation de l’OCT
ainsi que l’anatomie de la rétine et de la choroïde dans le
plan frontal, ce qui est très utile pour la compréhension de
l’angio-OCT qui constitue l’avenir de l’imagerie moderne. II
Les auteurs déclarent ne pas avoir de liens d’intérêts.

Pour en savoir plus...


• Lehmann M, Wolff B, Vasseur V et al. Retinal and choroidal changes
observed with ‘En face’ enhanced-depth imaging OCT in central serous
chorioretinopathy. Br J Ophthalmol 2013;97(9):1181-6.
b • Coscas F, Coscas G, Querques G et al. En face enhanced depth imaging
optical coherence tomography of fibrovascular pigment epithelium
detachment. Invest Ophthalmol Vis Sci 2012;53(7):4147-51.
• Stopa M, Bower BA, Davies E, Izatt JA, Toth CA. Correlation of patho-
logic features in spectral domain optical coherence tomography with
conventional retinal studies. Retina 2008;28(2):298-308.
• Gaudric A, Aloulou Y, Tadayoni R, Massin P. Macular pseudoholes with
lamellar cleavage of their edge remain pseudoholes. Am J Ophthalmol
2013;155(4):733-42.
• Wolff B, Basdekidou C, Vasseur V et al. “En face” optical coherence tomo-
graphy imaging in type 2 idiopathic macular telangiectasia. Retina 2014;
34(10):2072-8.
Agenda

Nice Rétina 2016 & Imaging


4 e édition
24 et 25 juin 2016
Nice, hôtel Westminster
Organisateurs :
• Nathanael Benhamou
• David Sayag
• Jennyfer Zerbib
Figure 11. Syndrome des taches blanches évanescentes (MEWDS).
• Alain Zourdani
Aspect superposable des lésions visibles sur l’ICG (taches
confluentes hypofluorescentes) [a] et des lésions visibles sur l’OCT Information et programme:
“en face” passant par la zone ellipsoïde (taches hyporéflectives) [b]
correspondant à une disruption de la couche des photorécepteurs. >> www.niceretina.com
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