Les Grandes Batailles de L'histoire
Les Grandes Batailles de L'histoire
Les Grandes Batailles de L'histoire
■ Les croisades
■ La prise de Jérusalem
■ Borodino
■ Moscou
■ La Berezina
■ L’offensive allemande vers l’ouest
■ La percée de Sedan
■ La victoire allemande
■ La bataille de Stalingrad (septembre 1942-février 1943)
■ Koursk (juillet-août 1943)
■ L’offensive de Rommel
■ El-Alamein
À partir du règne du dynamique pharaon Séthi Ier (v. 1294-1279 av. J.-
C.), l’Égypte entame la reconquête des territoires perdus et récupère la
Palestine. Son fils Ramsès II (1279-1212) décide, dès son arrivée au
pouvoir, de poursuivre l’œuvre de son père et de reprendre la Syrie aux
Hittites.
Quatre ans après le début de son règne, il commence par s’emparer de
l’Amourrou, un État sur la côte syrienne, puis il retrouve l’Égypte afin de
préparer une nouvelle campagne.
Le pharaon veut avant tout s’emparer de Qadesh (actuelle Tell Nebri
Mend), une ville fortifiée sur l’Oronte, en Syrie, qui avait déjà été
conquise une première fois en 1450 par Thoutmosis III. Qadesh présente
un intérêt particulier puisque son emplacement a une grande importance
stratégique : c’est à la fois un point de passage entre la Syrie et la
Palestine, et entre le fleuve Euphrate et la Méditerranée.
Les bas-reliefs des temples (Abou Simbel, Karnak, Louxor, etc.) édifiés au
cours de son règne par Ramsès II, grand bâtisseur, représentent les
victoires remportées par ce grand pharaon, dont Qadesh.
Cette bataille est la première de l’Histoire à avoir laissé des témoignages
détaillés de son déroulement.
Dans la seconde moitié du VIe siècle avant notre ère, l’Empire perse (du
grec « », désignant à l’origine la région située au sud de l’Iran)
s’étend des frontières occidentales de l’Inde jusqu’à l’Égypte, englobant
l’Asie mineure, la Mésopotamie et la Syrie-Phénicie.
L’empire est alors gouverné par l’empereur Darius Ier (521-486 av. J.-C.),
troisième souverain de la dynastie des Achéménides fondée par Cyrus le
Grand en 559 av. J.-C.
Les Grecs, bien que désunis par la rivalité entre les grandes cités, sont le
seul peuple voisin encore insoumis, à l’exception des cités grecques
situées en Asie mineure. C’est dans cette région qu’en 499 av. J.-C., la
révolte des îles grecques d’Ionie (encouragée par la récente défaite de
Darius devant les nomades scythes), durement réprimée, met le feu aux
poudres.
Les Athéniens, que la cité de Milet avait appelés au secours, soutiennent
la révolte des Ioniens. Ils envoient 20 bateaux qui débarquent en Asie
mineure, tandis que la ville d’Érétrie en envoie cinq. Forts de ce soutien,
les Ioniens s’en prennent par surprise à la ville perse de Sardes, capitale de
la province de Satrapie, qu’ils incendient. Les Perses interviennent,
battant les Ioniens à Éphèse, reprenant Chypre et détruisant le port de
Milet en 494 av. J.-C.
La destruction de Sardes a fait naître chez Darius une telle rancune
qu’avant chacun de ses repas, un serviteur doit désormais lui répéter
« …
C’est ainsi que commence la première guerre médique, qui oppose les
Perses (les Mèdes) aux Grecs. Désireux de se venger d’Athènes, Darius
ouvre les hostilités en 492 av. J.-C., en envoyant à la fois une importante
armée de terre commandée par le général perse Mardonios et une flotte
partie de Cilicie. L’armée de terre est chargée de s’emparer d’Athènes et
d’Érétrie, après être passée par la Thrace déjà conquise.
Mais alors que les Perses sont mis en difficulté par les Thraces, la flotte
perse est prise par une tempête au large du mont Athos. 20 000 hommes
sont noyés et 300 navires détruits, soit presque toute la flotte. Face à ce
désastre, l’offensive perse est abandonnée, bien que Mardonios ait réussi à
assujettir la Thrace et la Macédoine.
Mais celui que l’on appelle le « Roi des rois » ne s’avoue pas pour autant
vaincu. En 491 av. J.-C., Darius envoie des ambassadeurs chargés de
demander « la terre et l’eau », c’est-à-dire leur soumission et leur
allégeance, au souverain perse. Athènes, Platées et Sparte ayant refusé,
Darius décide de lancer à nouveau une expédition militaire et lève une
nouvelle flotte.
Au début du mois de septembre 490 av. J.-C., celle-ci navigue jusqu’à l’île
d’Eubée afin de prendre la ville d’Erétrie, qui avait participé à la révolte
des Ioniens. La ville est détruite sans pitié et ses habitants sont réduits en
esclavage.
Une fois ce forfait accompli, la flotte perse prend la direction de l’Attique
et parvient à débarquer dans la baie de Marathon afin de se venger
d’Athènes.
Les Perses comptent environ 20 000 hommes3, sous les ordres du général
mède Datis et du général Artaphène, neveu de Darius. De leur côté, les
Grecs n’ont réuni qu’une armée de 10 000 hommes, menée par le stratège
Miltiade et essentiellement composée d’Athéniens. Ces derniers n’ont
trouvé pour les soutenir que Platées, située en Béotie, qui lui envoie un
millier d’hommes. Connaissant la redoutable réputation des Perses,
Sparte a invoqué les fêtes en l’honneur du dieu Apollon pour s’abstenir de
participer aux combats sans avoir l’air de refuser officiellement.
Les deux belligérants se rencontrent à une quarantaine de kilomètres au
nord-est d’Athènes, dans la plaine de Marathon, longue de 10 kilomètres
et profonde de 3 kilomètres. Miltiade a immédiatement positionné des
hommes sur les hauteurs environnantes pour empêcher les Perses de
s’avancer en direction d’Athènes.
Les deux armées ne s’affrontent pas immédiatement. Elles prennent le
temps de s’observer, pour tenter de deviner leurs intentions mutuelles et
positionner leurs troupes le plus favorablement possible. Le général Datis
est persuadé que Sparte va bientôt envoyer des renforts aux Athéniens. Le
chef perse décide alors d’attaquer à la fois par terre et par mer, et fait
rembarquer une partie de ses troupes pour contourner l’Attique en
direction du port d’Athènes, Phalère. Le but est d’attaquer la cité affaiblie
par l’absence des combattants restés à Marathon pour affronter le reste de
l’armée perse.
Miltiade profite de cette occasion pour compenser son infériorité
numérique. Il dispose ses troupes sur une ligne équivalente à celle de
l’ennemi, soit 1 600 mètres. Mais lorsqu’il lance l’offensive, Miltiade fait
croire qu’il attaque par le front.
De leur côté, les Grecs ont saisi la menace. Un des archontes (hauts
magistrats) athéniens, Thémistocle, convainc à temps les Athéniens de se
doter d’une véritable flotte de guerre afin de pouvoir faire face à la Perse,
redoutable sur terre mais bien plus fragile sur mer. Après avoir reçu l’aval
de la pythie de Delphes interrogée par les Athéniens, la construction de
200 trières supplémentaires pour la nouvelle flotte est lancée. Elle est
financée par Athènes, grâce au développement de l’exploitation des mines
d’argent du Laurion, où sont employés jusqu’à 20 000 esclaves.
L’exploitation de ces mines prendra progressivement une grande place
dans l’économie de la cité, allant jusqu’à constituer la base financière de la
domination athénienne. En outre, Thémistocle fait aménager le port du
Pirée, moins exposé que celui de Phalère et qui devient alors le premier
port d’Athènes.
Pour affronter la menace ennemie, une trentaine de cités se sont unies à
Corinthe. En cas de conflit, il est décidé que les troupes grecques seront
commandées par le roi de Sparte Léonidas Ier, tandis que la flotte sera aux
ordres d’un autre Lacédémonien, Eurybiade, et de l’Athénien
Thémistocle.
Mais tandis que le jour se lève, les Perses ont la surprise de voir la flotte
grecque s’avancer dans leur direction, sous les encouragements des Grecs
restés sur la côte. Ils s’aperçoivent alors qu’ils sont victimes d’une
embuscade. Les nombreux navires perses tentent d’esquisser une
manœuvre d’enveloppement pour repousser les navires grecs vers le
rivage, mais ils ne peuvent se déployer, manœuvrant très difficilement en
raison de l’étroitesse du détroit. Ils doivent alors affronter dans le plus
grand désordre les trières grecques commandées par Eurybiade et
Thémistocle.
Les Grecs, conscients qu’il s’agit là de l’unique occasion d’effacer leur
infériorité numérique et de vaincre de façon décisive leur ennemi
héréditaire, lancent l’assaut avec acharnement. Ils éperonnent les lourds
vaisseaux perses et massacrent leurs équipages. Athènes réussit à
envelopper l’aile droite du dispositif ennemi tenue par les Phéniciens
(alliés des Perses) et se porte au secours des Lacédémoniens (Spartiates)
en difficulté face à un ennemi supérieur numériquement (les Ioniens).
Les Grecs finissent par remporter la victoire. Les Perses ont perdu 200 de
leurs navires et les Grecs seulement 40. L’amiral en chef de la flotte,
Ariabigne, frère de Xerxès, est mort pendant les combats.
Quelques années plus tard, le poète Eschyle fera le récit de cette bataille
dans sa tragédie intitulée , jouée au printemps 472 av. J.-C. lors
des Grandes Dionysies. Il y rend hommage au patriotisme des Grecs, qui
se sont battus avant tout pour leur liberté et celle de leur cité, et dont la
population soutenait leur flotte avec des appels tels que : «
. Les
défenseurs sont anéantis et des béliers fracassent les murailles, tandis que
les navires grecs entrent dans le port de Tyr.
Ainsi succombe l’orgueilleuse ville, payant un lourd tribut : aux 6 000 à
7 000 Tyriens morts au combat s’ajoutent les 2 000 jeunes hommes
qu’Alexandre fait exécuter tandis que la population est réduite en
esclavage.
Alexandre poursuit alors sa route. Après une nouvelle victoire, sur Gaza,
le Macédonien pénètre en Égypte en 332 av. J.-C., où il est accueilli sans
résistance par la population, lasse de la domination perse. Les soldats
perses ayant essuyé de graves revers, Mazacès, le commandant perse de
Memphis, est rapidement soumis.
Alexandre ne désire pas changer les coutumes ni les croyances des
Égyptiens. Descendant le Nil, il fait connaissance avec ses nouveaux
sujets. Pour asseoir une fois de plus sa légitimité (pense-t-il vraiment être
un demi-dieu ?), il se recueille dans le temple d’Amon où un oracle lui
assure la domination du monde.
À la suite de cet épisode, Alexandre décide de fonder la prestigieuse ville
d’Alexandrie dans le delta du Nil, future capitale égyptienne dont le
phare, construit après la mort d’Alexandre, figurera parmi les Sept
Merveilles du monde décrites par Philon de Byzance au IIIe siècle avant
notre ère.
Au printemps 331 av. J.-C., Alexandre quitte l’Égypte pour rejoindre
Babylone et combattre Darius qui s’y est réfugié. Ce dernier a proposé à
Alexandre des pourparlers après sa défaite d’Issos, mais en vain.
Alexandre franchit l’Euphrate, puis le Tigre…
Le roi perse Cyrus, un ancien vassal des Mèdes, fonde cette dynastie
vers 550 av. J.-C. Celle-ci étend sa domination sur l’Orient, de
l’Afghanistan à l’Égypte et de l’Asie mineure au golfe Persique, en
passant par l’Iran et la Mésopotamie, entre le milieu du VIe siècle et la
fin du IVe siècle avant notre ère. Elle prend fin à la suite de la victoire
d’Alexandre à Gaugamélès et de la mort de Darius III en 330 av. J.-C.
Le dernier affrontement entre Alexandre et Darius III se déroule à
Gaugamélès, une vaste plaine à proximité de la ville d’Arbèles, à l’est du
Tigre (en Haute-Mésopotamie).
Le rapport de force est très inégal car Alexandre réunit moins de 50 000
hommes (environ 40 000 fantassins et 7 000 cavaliers), tandis que les
Perses en comptent au minimum cinq fois plus (200 000 fantassins et
45 000 cavaliers, selon certaines sources, et jusqu’à un million d’hommes
selon d’autres !). En outre, les Perses ont considérablement amélioré leur
armement : ils disposent de lances plus longues, de meilleurs chars
équipés de faux et même d’éléphants. Tirant les leçons de leur défaite
d’Issos, ils ont aménagé le lieu de la rencontre pour qu’il leur soit
favorable : ils ont nivelé le sol en faisant ôter les cailloux pour le passage
de leurs chars et en installant des piques métalliques dans le sol pour
ralentir l’avancée des Grecs.
Fort de ses succès des deux années précédentes et convaincu du
professionnalisme de ses troupes, le Macédonien va se lancer dans la
bataille, après quelques hésitations. Alexandre privilégie cette fois la
cavalerie pour les premières charges et prend la tête de l’aile droite de son
armée. Il confie l’aile gauche à Parménion.
Cette dernière est bientôt mise en difficulté par les cavaliers perses, mais
de son côté, Alexandre parvient à enfoncer les lignes adverses, se frayant
un passage entre l’aile gauche des Perses et leur centre. Lançant les
fantassins, Alexandre envoie une partie de la phalange venir en aide à
Parménion, tandis que l’autre charge contre le centre de l’armée perse où
se trouve Darius. Ce dernier est contraint de reculer, puis s’enfuit vers les
montagnes, tandis que les Macédoniens font un véritable massacre dans
les rangs ennemis, ce qui finit par entraîner la déroute de l’armée perse.
Au soir du 1er octobre, la bataille achevée, on dénombre de très
nombreuses pertes dans les rangs des Perses (entre 40 000 et
90 000 morts), tandis que les Macédoniens ne compteraient, eux, que 500
victimes.
Une nouvelle fois, Alexandre a vaincu Darius, mais Gaugamélès marque
la fin de l’empire des Achéménides. Le vainqueur entre alors dans les
villes perses de Babylone, où il se fait proclamer roi d’Asie et dont il fait sa
nouvelle capitale, Suse, puis Persépolis, Pasargades et Ectabane.
Alexandre prend possession du trésor de Darius. Il laisse ses soldats piller
Persépolis, la ville de Cyrus, et incendier ses palais, mais se recueille sur la
tombe du fondateur de la dynastie qu’il vient de vaincre.
Alexandre se lance en vain à la poursuite de Darius. Celui-ci s’est réfugié
dans les hauteurs de la province perse de Bactriane (actuel Afghanistan,
dont la capitale est alors Bacres), mais en juillet 330 av. J.-C., il est
assassiné à l’approche des Macédoniens par l’un de ses satrapes, Bessos, le
gouverneur de la province de Bactriane. Lorsqu’Alexandre découvre son
corps à Hécatompylos, au sud-est de la mer Caspienne, il décide de
rendre hommage à son ancien adversaire en le recouvrant de son
manteau, puis en lui offrant des funérailles solennelles. Il fait ensuite
capturer et mettre à mort le régicide Bessos à l’été 329 av. J.-C.
Ce vainqueur qui reconnaît le courage de l’ennemi et respecte sa
mémoire est devenu le maître de la Grèce et de l’Asie centrale. Il assoit
son pouvoir sur les anciennes satrapies perses et fait taire toute opposition
dans ses propres rangs, allant jusqu’à tuer de ses mains son ancien
compagnon Cleitos, en 328 av. J.-C.
Au cours de la première guerre punique, qui dure 23 ans (264 à 241 av. J.-
C.), Rome conquiert la Sicile, transformée en province romaine, puis les
autres possessions carthaginoises les plus proches de l’Italie, c’est-à-dire la
Corse et la Sardaigne. Cela contribue à renforcer sa puissance maritime
naissante et affaiblit d’autant plus Carthage, qui décide de réagir pour
retrouver au plus vite son prestige.
En 221 av. J.-C., son plus grand général, Hannibal, commandant en chef
des armées carthaginoises, attaque (en période de paix !) et détruit la cité
de Sagonte, alliée de Rome. Cette provocation fait éclater la deuxième
guerre punique.
Bien que Rome soit accessible à ses troupes, Hannibal commet l’erreur de
ne pas l’attaquer et de poursuivre plus au sud, où il espère recevoir le
soutien de cités grecques et italiques, alliées récalcitrantes de Rome. Les
Romains, qui n’étaient pas prêts à combattre, ont alors le temps de se
préparer à attaquer Hannibal.
Or, dans un premier temps, le dictateur Quintus Fabius Maximus, dit « le
Temporisateur », met en avant la tactique d’usure. Mais lorsque son
mandat parvient à son terme, ses successeurs, les consuls Caius Terentius
Varron et Paul Émile, choisissent d’attaquer l’ennemi.
Paul Émile souhaite porter l’offensive en région montagneuse, mais se
plie finalement à l’avis de Varron, qui préfère le site de Cannes, où sont
installés les Carthaginois. Le 2 août 216 av. J.-C., la bataille de Cannes
s’engage ainsi en Apulie (sud-est de l’Italie), sur les rives de la rivière
Aufidius (actuelle Ofanto).
Caius Terentius Varron et Paul Émile sont à la tête de huit légions, ainsi
que de plusieurs contingents alliés. Leurs forces s’élèvent à 90 000
soldats, dont 6 000 cavaliers, et les deux consuls se partagent le
commandement à tour de rôle. Hannibal dispose de 50 000 hommes,
dont 10 000 cavaliers.
Les Romains sont disposés sur une ligne de bataille comportant la
cavalerie romaine sur l’aile droite, la cavalerie alliée sur l’aile gauche et
trois rangs successifs de légionnaires au centre.
Les combats commencent au matin du 2 août 216 av. J.-C. Les fantassins
romains se dirigent en direction du milieu du dispositif ennemi, où se
concentrent habituellement les principales forces. Mais Hannibal leur a
tendu un piège : il a volontairement allégé son centre en plaçant des
Ibères et des Gaulois légèrement armés au milieu de ses forces, tandis
qu’il a consolidé ses ailes, où sont placées ses troupes d’élite et la
cavalerie.
Sous les ordres du consul Varron, les légionnaires se lancent sur le centre
de l’armée ennemie, qu’ils enfoncent facilement. Au même moment, les
cavaliers carthaginois attaquent la cavalerie romaine sur ses flancs et
l’amènent à se replier en désordre. Le consul Varron ne s’aperçoit pas du
piège tendu et donne l’ordre aux légions de poursuivre dans la brèche
centrale, alors que leurs flancs ne sont plus protégés par la cavalerie.
Continuant leur mouvement, les quatre légions sont entraînées en
profondeur dans la ligne ennemie, où elles se retrouvent face à des soldats
africains qui se rabattent autour d’elles en formant un croissant. Les
légions sont alors encerclées par les Carthaginois qui les enveloppent par
les côtés et l’arrière de leur dispositif. Prises en tenaille par la cavalerie,
elles ne peuvent plus reculer et sont massacrées.
La férocité des combats entraîne la mort de près de 50 000 Romains, dont
le consul Paul Émile, et la capture de 10 000 autres. Les Carthaginois ne
perdent que 6 000 soldats, en majorité des Ibères et des Gaulois qui,
placés au centre, ont été en quelque sorte sacrifiés.
En 206 av. J.-C., Hannibal apprend que les Romains, menés par Publius
Cornelius Scipion, un jeune général de 24 ans, ont ouvert un second front
en Espagne et se dirigent vers l’Afrique. Le général carthaginois est alors
contraint de quitter l’Italie, tandis que Scipion le rejoint en Afrique pour
attaquer Carthage.
Après la défaite de Syphax, allié de Carthage, en 203 av. J.-C., le chef
romain inflige une défaite décisive à Hannibal à Zama, en Numidie, en
septembre 202 av. J.-C. À l’issue de cette bataille, Carthage est
transformée en un État tributaire et doit renoncer à toutes ses possessions
hors d’Afrique, tandis qu’Hannibal s’enfuit. Le vainqueur, Scipion, reçoit
le surnom de « l’Africain » lors de son retour triomphal à Rome.
Une dernière guerre punique, bien plus courte que les précédentes (149-
146 av. J.-C.), se déroule à la suite de l’attaque lancée par Carthage sur
son voisin, le roi Massinissa de Numidie orientale (à l’est de l’actuelle
Algérie), allié de Rome. À l’issue d’un siège de deux ans, l’armée romaine
prend Carthage, qui est ensuite totalement rasée et dont le territoire est
soumis à Rome pour plusieurs siècles.
Les Romains commencent à prendre pied en Gaule au IIe siècle avant
notre ère. En 118 av. J.-C., ils annexent le sud de la Gaule, c’est-à-dire la
région méditerranéenne, le couloir du Rhône et le Languedoc, qui prend
le nom de « Province Narbonnaise ». Leur objectif est alors double : ils
veulent protéger la colonie grecque de Massilia (Marseille), menacée par
les habitants d’origine (Celtes et Ligures), et aménager une voie reliant
l’Italie à l’Espagne dont ils viennent d’achever la conquête, Au-delà de
cette romaine s’étend la Gaule libre, dite « chevelue »,
constituée d’une soixantaine de peuples différents. Cette Gaule comprend
la Belgique au nord, la Celtique au centre, et l’Aquitaine au sud-ouest.
À la fin du mois de septembre 52 av. J.-C., alors que les assiégés sont
réduits à la famine, Vercingétorix décide de se rendre. D’après la version
officielle transmise par l’historien grec Plutarque, Vercingétorix, paré de
ses plus beaux atours, aurait jeté ses armes aux pieds de César avant de
descendre de sa monture. Pourtant, César est loin de le traiter d’égal à
égal : le chef gaulois est emprisonné et chaque Gaulois survivant est
réduit en esclavage.
Conduit en Italie, Vercingétorix est traîné enchaîné avec d’autres chefs
vaincus dans les rues de Rome, à l’occasion d’une cérémonie du triomphe
de César, le 26 septembre 46 av. J.-C. Il est étranglé peu après à la prison
Mamertine où il était retenu en captivité12.
Peu après la défaite de Vercingétorix à Alésia, César parvient à défaire les
derniers foyers de rébellion et soumet cette fois l’ensemble de la Gaule,
soit environ 8 millions d’habitants. La guerre des Gaules prend fin en 51
av. J.-C. avec la reddition d’Uxellodunum, ville du Quercy actuel, et un
million d’esclaves gaulois sont ramenés en Italie. La conquête de la Gaule
vaut un grand prestige à Jules César, qui peut désormais lutter contre son
rival au Sénat romain, Pompée.
Divisée en quatre provinces (Aquitaine, Belgique, Lyonnaise et
Narbonnaise), la Gaule romaine paie désormais un impôt à Rome et se
romanise, transformant les Gaulois en « Gallo-Romains ». Pendant trois
siècles, elle connaîtra une période fort tranquille de modernisation et de
prospérité, connue sous le nom de « ».
La bataille d’Actium demeure indissociable de la tragédie qui toucha à
cette occasion deux amants célèbres, Antoine et Cléopâtre.
Cléopâtre est la descendante de Ptolémée Lagos, un général macédonien
qui avait hérité de l’Égypte à la mort d’Alexandre le Grand et qui avait
alors fondé la dynastie des Lagides.
Née en 69 av. J.-C., Cléopâtre hérite du trône à 17 ans. Elle partage le
pouvoir avec son frère Ptolémée XIII, de sept ans son cadet et qu’elle a
épousé, comme l’exige la tradition dynastique.
À cette époque, l’Égypte s’apparente à un protectorat romain officieux.
Alors que Cléopâtre a été écartée du pouvoir par l’entourage de son frère,
sa liaison avec Jules César lui permet de revenir sur le trône d’Égypte en
48 av. J.-C. et de tenter de restaurer la domination des Lagides sur la
partie orientale de la Méditerranée. Un enfant naît de ses amours avec
César, appelé « Ptolémée-César » et surnommé « Césarion ». Cléopâtre
s’installe alors à Rome avec son fils.
Mais sa présence inquiète les politiciens romains qui craignent l’union
officielle de César avec la reine d’Égypte. Cela lui permettrait de former
un grand empire romain oriental, qui pourrait revenir plus tard à
Césarion.
Jules César est assassiné en mars 44 av. J.-C. par Cassius, général romain.
Brutus, son fils adoptif, Cléopâtre et Césarion regagnent l’Égypte, tandis
qu’une guerre civile éclate à Rome.
Les successeurs du dictateur sont Caius Octavius, plus connu sous le nom
d’Octave, un autre fils adoptif, et Marc-Antoine, lieutenant et ami de
César. En 43 av. J.-C., ils forment un triumvirat avec Lépide (proconsul
de Narbonnaise) et parviennent à vaincre ses meurtriers deux ans plus
tard à la bataille de Philippes, en Macédoine. Ils se partagent ensuite
l’Empire romain, lors de la paix de Brindes en octobre 40 av. J.-C. Octave
prend la partie occidentale avec Rome. Marc-Antoine prend la partie
orientale de l’empire, c’est-à-dire la Grèce et l’Asie. Lépide reçoit
l’Afrique.
Mais (Marc) Antoine tombe amoureux de la belle reine d’Égypte et, bien
que marié à la sœur d’Octave, il s’installe à Alexandrie auprès de
Cléopâtre. Son amour pour elle est tel qu’en 34 av. J.-C., il rédige un
testament en sa faveur, dans lequel il lui lègue plusieurs régions orientales
de l’Empire romain. Or, deux amis d’Antoine, exaspérés par la soumission
de celui-ci vis-à-vis de Cléopâtre, informent Octave de l’existence de ce
testament. Octave s’en empare et le lit devant le Sénat romain qui consent
à déclarer la guerre à Cléopâtre VII. Par cette initiative, Octave conforte
son pouvoir en se présentant comme le défenseur de l’empire de Rome
contre l’Orient corrompu par une intrigante.
Prenant le parti de sa maîtresse, Antoine s’organise en attendant l’arrivée
des armées romaines. Il rassemble sa très importante flotte dans le golfe
d’Ambracie, au nord-ouest de la Grèce : 480 navires de guerre, auxquels
s’ajoutent les 60 navires de l’escadre de Cléopâtre. De plus, il dispose de
19 légions disposées dans l’éventualité d’une attaque terrestre d’Octave.
De son côté, Octave compte 400 navires et à peu près autant de
légionnaires. Mais ses troupes sont mieux entraînées et ses vaisseaux plus
rapides. Il est accompagné du remarquable général romain Agrippa.
Alors qu’ils approchent de l’ennemi, Octave et Agrippa font fermer
l’entrée du golfe d’Ambracie, afin de bloquer la flotte adverse et de gêner
son ravitaillement. Conscient qu’il est indispensable de réaliser une
percée, Antoine fait avancer sa flotte, tandis que les vaisseaux de
Cléopâtre se positionnent en seconde ligne.
D’après l’écrivain grec Plutarque (v. 50-v. 125 apr. J.-C.), la fuite
d’Antoine est une trahison : « […] […]
[…]
Mais toujours d’après Plutarque, le
nombre de victimes tend à prouver que cette désertion n’était pas
préméditée par Antoine et sa flotte. En revanche, certains pensent que
cette fuite aurait été décidée avant la bataille, le but étant de forcer le
blocus et de rejoindre l’Égypte avec un maximum de navires.
Les Huns arrivent à Orléans, mais ils doivent affronter les habitants
réunis autour de leur évêque, Aignan, qui les encourage à résister comme
l’a fait Geneviève à Lutèce. Cet évêque, un ancien militaire, organise la
défense de la ville en renforçant les fortifications et appelle à l’aide le
général romain Aetius afin qu’il envoie des renforts au plus vite.
Nommé consul en 432, puis patrice15 en 433, Aetius dispose à Ravenne
d’un pouvoir important auprès de l’empereur Valentinien. En outre, il
connaît particulièrement bien les Huns pour avoir vécu comme otage à la
cour du (roi) des Huns dans sa jeunesse. Devenu officier romain, il
en a recruté à plusieurs reprises dans son armée car, bien que cruels, ils
sont aussi réputés pour leur bravoure.
Pendant que les Huns installent des instruments d’assaut devant les
remparts de la ville, survient une armée de secours commandée par
Aetius. Celui-ci a levé des troupes parmi les Wisigoths du Sud-Ouest,
menés par leur roi Théodoric Ier, les Alains, les Burgondes, les Francs, les
Bretons, etc. C’est la première fois qu’est réunie une telle coalition de
tribus barbares.
La lutte est acharnée et fait de nombreuses pertes dans les rangs des
Huns. Attila est alors contraint de lever le siège de la ville et de se replier
en Champagne avec son armée, honteuse de cet échec et démoralisée. À
nouveau, il doit épargner la ville de Troyes, défendue par l’évêque saint
Loup.
Mais à la mi-juin, les Huns, installés au , aux environs
de Moirey près de Troyes, sont rattrapés par les troupes d’Aetius. C’est à
cet endroit, et plus précisément dans l’immense plaine de Mauriac, que
s’engage, le 20 juin 451, une terrible bataille entre environ 50 000 Huns
et les 60 000 hommes d’Aetius16. Cette plaine sera appelée plus tard
« champs Catalauniques » (nom qui vient probablement de ,
« chefs de guerre », du gaulois , « combat », et de , « chef »).
Les cavaliers huns affrontent non seulement des cavaliers adverses, mais
aussi des fantassins. Bientôt, alors que la lutte évolue au corps à corps, les
Huns, habitués aux combats rapides à cheval, commencent à être
débordés. Attila tente de renverser la situation par une charge
particulièrement violente, au cours de laquelle est tué Théodoric, le roi
des Wisigoths. Ces derniers, fous de colère, décident de venger la mort
de leur chef en redoublant d’acharnement contre les Huns.
Attila, spécialisé dans l’attaque fulgurante, n’est pas habitué à affronter
une pression soutenue de l’ennemi. Il choisit alors de reculer avec ses
hommes et il se retranche derrière des remparts improvisés, constitués de
chariots. Tandis que les Huns empêchent les assaillants d’approcher en
tirant des projectiles, Aetius décide d’assiéger ce campement de fortune.
Au bout de trois jours, Attila parvient néanmoins à ouvrir une brèche et à
s’enfuir. Aetius laisse alors ce qui reste de son armée quitter la Gaule et
rejoindre la vallée du Rhin.
Contrairement à son père Childéric qui avait combattu aux côtés des
Romains contre les Wisigoths et les Alamans, Clovis Ier prend les armes
en 486 pour attaquer Syagrius.
À la tête d’environ 5 000 guerriers, il réussit à vaincre les légions gallo-
romaines à Soissons et scelle ainsi la fin de la présence romaine en Gaule.
La célèbre histoire du vase de Soissons se déroule à cette occasion : après
la victoire, et alors que les guerriers francs se partagent le butin, Clovis
décide de restituer un magnifique vase d’Église à un évêque, mais un
soldat franc s’y oppose et brise le vase. L’année suivante, alors qu’il passe
ses troupes en revue, Clovis aperçoit l’insolent soldat. Clovis lui prend ses
armes et les jette à terre, prétextant qu’elles sont mal entretenues. Tandis
que le soldat se baisse pour les ramasser, il lui fend le crâne avec sa hache
en s’écriant : «
Clovis meurt à Paris en novembre 511, alors qu’il n’a que 45 ans. Seul le
royaume des Burgondes bénéficie encore d’une relative indépendance : en
vingt ans, Clovis a réussi à étendre le royaume des Francs sur toutes les
régions comprises entre les Pyrénées et la vallée du Rhin, à l’exception de
la Vasconie, en Gascogne, et de la Septimanie, le futur Languedoc.
Ce royaume est ensuite partagé entre ses quatre fils : Childebert,
Clodomir, Thierry et Clotaire. Ces derniers poursuivent l’œuvre de leur
père en conquérant la Thuringe (en Allemagne), la Bourgogne et la
Provence, mais les rivalités entre les fils et les petits-fils de Clovis divisent
à nouveau la Gaule. La dynastie mérovingienne disparaît en 751 pour
laisser la place aux Carolingiens.
À la fin du VIIe siècle, les descendants de Clovis, surnommés « les rois
fainéants », ne détiennent pas de véritable pouvoir. En réalité, l’autorité
est détenue par le maire du palais, une sorte de super-intendant que l’on
pourrait qualifier aujourd’hui de « Premier ministre ». C’est justement la
grande valeur du maire du palais d’Austrasie, Pépin de Herstal, qui donne
sa puissance à ce royaume franc de l’époque mérovingienne, dont la
capitale est Metz.
Pépin remporte une série de victoires et son fils Charles, qui lui succède
en 714, achève la conquête du royaume franc de Neustrie. Il multiplie les
interventions militaires, au cours desquelles il assomme l’ennemi avec sa
masse d’armes comme s’il s’agissait d’un marteau, ce qui lui vaut d’être
surnommé « Martel ».
La principale menace à laquelle Charles Martel doit répondre vient du
Sud. Entre 711 et 713, les Arabes ont conquis une grande partie de
l’Espagne prise aux Wisigoths, avant de franchir les Pyrénées quelques
années plus tard, sous les ordres de l’émir al-Hurr. En 720, après avoir
mené une série de raids dans la vallée du Rhône et de la Saône pendant
plusieurs mois, des pillards sarrasins s’implantent en Septimanie
(Languedoc) et prennent Narbonne. Puis ils pénètrent dans la région de
Toulouse au cours de l’année suivante, mais la ville parvient à être sauvée
par l’intervention d’Eudes, duc d’Aquitaine. Les Arabes prennent ensuite
Carcassonne en 724 et, remontant la vallée du Rhône, ravagent Autun en
725.
Après une accalmie, les troupes sarrasines, menées par des Arabes et
comprenant de nombreux Berbères convertis depuis peu, réapparaissent
en Aquitaine en 732.
Charles Martel meurt le 22 octobre 741 et, tel un roi, partage le royaume
entre ses fils Carloman et Pépin dit « le Bref » en raison de sa petite
taille. Mais ces derniers doivent faire face à de nombreuses révoltes et
décident de remettre sur le trône un héritier de la dynastie des
Mérovingiens, Childéric III.
Quelques années plus tard, alors que Carloman a choisi de se retirer dans
un monastère, Pépin réalise un coup d’État en 751 : avec l’accord de
l’Église qu’il a toujours soutenue, il dépose Childéric et se fait élire roi
des Francs. C’est la fin des Mérovingiens et le début d’une nouvelle
dynastie, celle des Carolingiens, jusqu’en 987.
Pépin sera sacré une première fois à Soissons par l’évêque Boniface en
751, puis à Saint-Denis par le pape Étienne II en 754, qui oint également
son fils Charles âgé de 12 ans, le futur Charlemagne. Cette cérémonie du
sacre par le pape, qui fait du roi l’élu de Dieu et symbolise l’alliance du
trône de France avec l’Église, devient la règle pour tous les rois de France
jusqu’à la Révolution.
La Normandie de la seconde moitié du XIe siècle est aux mains de
Guillaume, duc de Normandie et fils naturel de Robert le Magnifique
(également dit « le Diable »), né en 1027. Guillaume, surnommé le
« Bâtard », a dû lutter plusieurs années contre les autres prétendants au
duché de Normandie, et ce n’est qu’en 1047 qu’il est parvenu à asseoir
son autorité sur les barons. La Normandie de cette époque est riche, très
peuplée et puissante.
À la même époque, de l’autre côté de la Manche, le roi d’Angleterre,
Édouard le Confesseur, meurt le 5 janvier 1066, sans fils pour lui
succéder. Dès le lendemain du décès, son beau-frère, le comte anglo-
saxon Harold, s’empare du trône et se fait couronner roi d’Angleterre
dans la cathédrale d’York, alors deuxième ville du royaume.
Mais Guillaume, duc de Normandie, réagit immédiatement : Édouard le
Confesseur, son cousin, a fait de lui son héritier dès 1051, une décision
qu’Harold était chargé d’annoncer officiellement. Guillaume entend donc
prendre possession de son héritage, y compris par les armes. Il commence
par envoyer des représentants à Rome. Harold s’étant rendu coupable de
parjure en ayant trahi la promesse faite au roi Édouard, Guillaume
parvient à le faire excommunier et à obtenir le soutien du pape Alexandre
II pour attaquer l’Angleterre. C’est sous les bannières pontificales que
Guillaume franchira la Manche.
[…]
■
Le 7 juin, les croisés arrivent aux abords de Jérusalem, où ils recueillent
des chrétiens que les Égyptiens ont expulsés de la Ville de peur d’une
trahison. L’armée se prépare à attaquer, mais demeure mal équipée, bien
qu’une escadre génoise ait débarqué à Jaffa avec vivres et armes. De plus,
ses effectifs demeurent restreints face à la détermination des défenseurs
de Jérusalem.
Le siège commence, dans des conditions extrêmes. Le récit de
explique : «
De
leur côté, les assiégés narguent les croisés qui préparent avec difficulté des
tours mobiles et des échelles géantes, et insultent leur religion, ce qui
accroît la colère des chrétiens : «
Il existe de nombreux récits sur cet épisode de l’histoire des croisades, qui
témoignent tous d’un véritable carnage.
Le chroniqueur de l’époque, Raimond d’Aguilers, raconte les scènes
atroces survenues dès le 15 juillet : «
[…]
[…]
[…] ».
L’auteur musulman Ibn Al-Atyhïr (1160-1223) en fait un récit tout aussi
effrayant dans sa écrite au XIIe siècle : «
[…]
[…]
Ce massacre marquera pour de nombreux siècles une rupture entre les
Arabes et les Francs…
Une fois aux mains des croisés, Jérusalem est confiée à l’autorité de
Godefroi de Bouillon, et non à Raymond de Saint-Gilles qui avait
pourtant été choisi par le pape comme chef militaire de cette croisade.
Godefroi est élu comme souverain le 22 juillet 1099, mais il refuse le titre
de « roi de Jérusalem », par humilité envers le Christ. Il prend le titre
d’« Avoué du Saint-Sépulcre ».
La prise de Jérusalem marque la fondation du « royaume latin de
Jérusalem », mais les croisés, dont une partie des effectifs retourne soit
vers le Nord soit en Europe, se retrouvent dans une région à la fois
hostile et difficilement contrôlable.
Aussi soumettent-ils rapidement toutes les places fortes de Galilée, ainsi
que les ports de la rive méditerranéenne. Après avoir refusé les nouvelles
offres de pourparlers du vizir fatimide, ils repartent également se battre
contre les troupes égyptiennes à Ascalon, port de l’ancienne Palestine
méridionale et ancienne cité royale des Philistins. Grâce à une attaque
surprise entre la mer et la cité, le 12 août 1099, ils parviennent à écraser
leur adversaire, qui avait pourtant réuni une armée de 10 000 hommes.
Cette victoire est particulièrement bénéfique aux croisés car elle écarte de
la Terre sainte la menace d’une reconquête par les Égyptiens.
Toutefois, la prise de la ville d’Ascalon sera retardée d’un demi-siècle, en
raison de l’hostilité d’un certain nombre de chevaliers, dont Raymond de
Saint-Gilles, à confier l’autorité de cette place forte à Godefroi de
Bouillon. Ascalon ne sera véritablement aux mains des croisés que le
19 août 1153. Cette rivalité s’avère bien inutile, d’autant que Godefroi de
Bouillon, après s’être activement occupé de l’organisation des États latins,
disparaît quelques mois plus tard, le 18 juillet 1100. Son frère cadet
Baudouin lui succède jusqu’en 1118.
En prenant la cité d’Ascalon, les croisés découvrent l’oignon d’Ascalon
( en latin), dont le bulbe est utilisé comme condiment. Ils
décident d’en rapporter en France, où il reçoit le nom d’« échalogne »
en vieux français (amalgame d’« Ascalon » et d’« oignon »). Il est
aujourd’hui connu sous le nom d’« échalote ».
La défaite de Hattin est terrible pour les Francs, qui viennent de perdre
l’élite de leur chevalerie. Le chemin est libre pour Saladin qui s’empare de
nombreux ports francs. Il fait capituler Saint-Jean-d’Acre le 10 juillet
(tout en épargnant la population), puis Beyrouth le 6 août, ainsi que
d’autres villes d’importance comme Jaffa. Ces forteresses tombent les
unes après les autres car le lâche Guy de Lusignan s’est engagé à
encourager les redditions en échange de sa liberté.
Après avoir repris Ascalon, qui a résisté plusieurs semaines, et Gaza le
5 septembre, Saladin est libéré de la menace de renforts pour les croisés
et se dirige enfin vers Jérusalem.
•
Ils appartiennent à un ordre fondé à Jérusalem en 1119 par Hugues de
Payns, premier grand-maître, et par huit autres chevaliers qui forment
alors « la milice des pauvres chevaliers du Christ ». Sa fondation
officielle date toutefois du concile de Troyes, en 1128, qui impose aux
Templiers la règle cistercienne et leur donne le droit de posséder des
terres, des vassaux, et de recevoir l’aumône. Ils sont vêtus d’un
manteau blanc orné d’une croix vermeille cousue sur le côté gauche, à
proximité du cœur.
Ils tiennent leur nom du temple de Jérusalem, car le roi Baudouin II
leur avait prêté, au moment de la création de l’ordre, une maison à
proximité de l’emplacement de l’ancien temple du roi Salomon.
Ce sont des moines-guerriers chargés de défendre les forteresses (ils
en construiront plusieurs) et les frontières des États latins. Au fil des
années, ils s’enrichissent grâce à de nombreuses donations et
deviennent les banquiers des pèlerins, puis du Vatican et de nombreux
princes.
Le roi de France Philippe IV le Bel, jaloux de leur puissance et
souhaitant s’emparer de leurs richesses, les fait arrêter à Paris le
13 octobre 1307 et confisque leurs biens. Au terme de sept années de
procès truqué, plusieurs dizaines de templiers, dont le grand maître
Jacques de Molay, sont condamnées à périr sur le bûcher le 18 mars
1314. Deux ans plus tôt, le pape Clément V avait officiellement
dissous l’ordre des Templiers présent dans plusieurs pays.
•
Leur ordre est créé en 1113 en Palestine par Gérard Tenque, puis
développé par son successeur Raymond du Puy. Ce sont également
des moines combattants, qui ont pour mission de protéger et
d’accueillir les pèlerins venus en Terre sainte.
À l’origine, on désignait ainsi les religieux de l’hospice de Jérusalem
dédié à saint Jean, qui accueillaient et soignaient les pèlerins. En 1140,
cet ordre devient également militaire, même si ses membres
continuent à pratiquer leur vocation première. Ces moines portent
une cape noire ornée d’une croix de Jérusalem blanche.
Ils deviennent les « chevaliers de Rhodes » de 1302 à 1522, période
pendant laquelle ils occupent l’île. Ils prennent le nom de « chevaliers
de Malte » en 1530, lorsque Charles Quint leur donne l’île en échange
de leur lutte contre les Turcs.
En 1798, les chevaliers de Malte doivent se rendre au général
Bonaparte, puis sont expulsés de l’île par les Britanniques en 1802.
Depuis cette date, l’ordre a pu retourner à Malte, mais il n’exerce plus
que des missions caritatives.
Le 20 septembre, les troupes musulmanes parviennent devant les murs de
Jérusalem. La ville n’est plus protégée que par 6 000 soldats, en raison de
la récente bataille de Hattin qui a mobilisé de nombreux combattants,
disparus ou faits prisonniers depuis.
Parmi les défenseurs de Jérusalem se trouve Balian d’Ibelin, un chevalier
fait prisonnier à Hattin, puis libéré et autorisé par Saladin à rejoindre sa
femme, Marie Comnène (petite-nièce de l’empereur byzantin Manuel
Comnène et veuve du roi de Jérusalem Amaury Ier), dans la Ville sainte.
Prenant en main la défense de Jérusalem, il remplace les chevaliers
disparus au combat à Hattin en conférant le titre de chevalier aux
hommes de plus de 15 ans.
Saladin fait donner l’assaut de la ville avec des engins de siège et parvient
à faire une brèche dans les murailles, mais les assiégés se défendent avec
courage. Balian d’Ibelin demande alors à s’entretenir avec Saladin pour
lui proposer la reddition de la ville en échange de la vie sauve et de la
liberté pour ses habitants.
Or, Saladin a promis à ses hommes de se venger de la terrible prise de
Jérusalem par les croisés en juillet 1099. Balian lui répond alors : «
[dans
Jérusalem]
[…] ». Saladin accorde
également aux chevaliers d’Acre, d’Ascalon et de Jérusalem de rejoindre la
ville de Tyr. Cette forteresse, qui devait servir de refuge aux combattants
francs rescapés des récentes défaites, se révélera bientôt imprenable par
les troupes arabes.
Entré triomphalement dans Jérusalem le 3 octobre, Saladin fait
immédiatement restaurer les lieux de culte musulman de la Ville, c’est-à-
dire la mosquée d’Omar, dont il fait ôter la grande croix dorée qui la
surplombait depuis 1099, et la mosquée al-Aqsa, que les Francs appelaient
« Temple de Salomon » en raison de son emplacement. Puis il restaure et
prolonge les fortifications de la Ville et permet aux juifs de revenir vivre
et prier à Jérusalem.
Une grande partie des croisés part alors en direction de Zara, tandis que
d’autres croisés, dont Simon de Montfort et ses hommes, refusent de
participer à ce qu’ils considèrent comme une guerre fratricide : la ville est
en effet catholique et sous l’autorité du roi de Hongrie Émeric, qui avait
accepté de participer à la quatrième croisade. En novembre 1202, les
Francs parviennent à prendre la ville et la remettent aux Vénitiens.
Le pape Innocent III est outré de l’attaque sur Zara et du détournement
de la croisade, dont le but n’est plus alors de délivrer les Lieux saints mais
de combattre des chrétiens. Il excommunie alors les croisés et les
Vénitiens, sanction qui ne les empêche néanmoins pas de se diriger
ensuite vers Constantinople, dont ils s’emparent une première fois le
17 juillet 1203.
L’empereur Alexis III s’enfuit et Alexis Ange devient l’empereur Alexis
IV, tandis que son père Isaac, libéré mais devenu aveugle, est nommé
coempereur. Alexis IV se retrouve alors confronté à de nombreux
problèmes. D’une part, les caisses de l’État sont vides et il ne peut
respecter les promesses financières qu’il a faites aux croisés. D’autre part,
le peuple de Constantinople est hostile à la présence des Francs chez lui
et ne reconnaît pas un souverain soutenu par les Latins. Bientôt, la
situation devient explosive et Constantinople est au bord de la guerre
civile.
Une révolution a lieu au début de l’année 1204 et le chef de l’opposition
anti-occidentale, Alexis Doukas, prend le pouvoir. Le nouvel empereur de
Constantinople, devenu Alexis V, fait exécuter son prédécesseur et jeter
les Latins hors de la ville.
Ces derniers ne tardent pas à tenter de reprendre Constantinople et, le
9 avril 1204, 20 000 Francs et Vénitiens lancent l’assaut. Les croisés se
battent sur terre, infligeant de lourdes pertes aux Byzantins qui doivent
alors se replier dans la ville, tandis que les Vénitiens attaquent par la mer,
la Corne d’or dont la lourde chaîne a été rompue. Les remparts sont
attaqués de part et d’autre, et les croisés parviennent à pénétrer au nord-
ouest de Constantinople, à proximité du palais des Blachernes. Le
12 avril, ils prennent Constantinople.
Or, les croisés savent qu’ils ne peuvent payer les sommes dues aux
Vénitiens, aussi entendent-ils mettre à leur profit les richesses de la ville.
Pendant trois jours, les vainqueurs mettent la ville à sac, commettant
d’horribles massacres et pillant ce qui est à cette époque la plus riche cité
du monde méditerranéen. Ils s’emparent d’objets en métal précieux, de
reliques, de vivres, de chevaux, etc.
On trouve aujourd’hui encore à Venise de nombreuses œuvres d’art prises
à Constantinople en 1204, dont les quatre chevaux en bronze qui se
trouvaient dans l’hippodrome de Constantinople et qui, depuis, ornent la
basilique Saint-Marc.
Le terrible sort fait à la ville et à ses habitants va désormais
considérablement aggraver les divisions existant entre les chrétiens de rite
latin, catholiques, et les chrétiens de rite grec, orthodoxes.
Au total, entre 1096 et 1270, huit croisades ont été organisées, avec le
même objectif initial de détenir les Lieux saints et de conquérir les
régions alentour pour développer les réseaux commerciaux. En 1291, la
prise par les Turcs de la dernière place forte des croisés, Saint-Jean-
d’Acre, entraîne le départ des Francs de Palestine et marque la fin de
l’époque des croisades.
Première 1096-1099
Deuxième 1146-1149
Troisième 1187-1192
Quatrième 1198-1204
Cinquième 1217-1221
Sixième 1228-1229
Septième 1250-1254
Huitième 1268-1270
■
■
Alors que le pape est parvenu à rallier de force Raymond VI de Toulouse,
les croisés pénètrent sur les terres de ce dernier et plus précisément sur
celles de son vassal, Raymond-Roger de Trencavel, vicomte de Béziers et
de Carcassonne.
Parvenus aux pieds de Béziers, une ville riche entourée de remparts, les
croisés s’inquiètent : compte tenu des vivres qu’elle possède et de
l’hostilité de la population, la ville est capable de s’engager dans un siège.
L’évêque de Béziers, qui a rallié les croisés, demande alors à la population
de lui livrer les 222 cathares qui figurent sur une liste qu’il a lui-même
dressée. Mais les Biterrois refusent de livrer l’un des leurs, fut-il non
catholique, et de se soumettre aux exigences de reddition de leur évêque.
Le 22 juillet 1209, une dramatique erreur d’appréciation fait basculer la
situation : des Biterrois mal armés et peu expérimentés prennent
l’initiative de sortir de la ville pour combattre les croisés, qui en profitent
pour forcer l’entrée de la ville. L’assaut est lancé, les chevaliers fonçant
avec les fantassins sur les remparts, dans les fossés et jusqu’aux portes de
Béziers.
La ville est rapidement investie et pillée. Les habitants terrorisés résistent
peu et se réfugient dans les églises. À quelqu’un qui lui demande
comment distinguer les cathares des catholiques, Arnaud-Amaury de
Cîteaux aurait répondu : «
Au cours de cette journée, tous les habitants de Béziers, soit environ
25 000 personnes, sont massacrés, femmes et enfants compris. Les croisés
n’hésitent d’ailleurs pas à tuer d’autres chrétiens dans les lieux de culte
catholique, dont l’église de la Madeleine qu’ils brûlent, ainsi que la
cathédrale Saint-Nazaire. Les chefs de la croisade veulent faire de ce
massacre un exemple pour obtenir rapidement la soumission des villes de
la région.
Deux ans plus tard, une nouvelle et dernière croisade s’organise contre les
cathares : Avignon est prise et, en 1229, le traité de Paris consacre
l’annexion du Languedoc à la Couronne de France. Le concile de
Toulouse renouvelle la condamnation contre l’hérésie cathare.
La croisade contre les Albigeois prend fin avec la chute de Montségur :
cette forteresse située au cœur des Pyrénées abrite alors les derniers
représentants du clergé cathare pourchassés par l’Inquisition. Elle a été
fondée en 1233 pour traquer les hérétiques et les convertir, ou les faire
disparaître. Une expédition menée par Hugues d’Arcy, sénéchal de
Carcassonne, et par l’archevêque de Narbonne, Pierre Amiel, parvient au
pied du nid d’aigle qu’est Montségur à partir du printemps 1243.
Après plusieurs mois de siège, Montségur est prise le 14 mars 1244 et les
habitants refusant d’abjurer leur foi, soit 224 cathares, sont brûlés devant
la forteresse. Les derniers cathares disparaissent au XIVe siècle, exécutés à
Carcassonne en 1329.
En 1214, Philippe II Auguste, monté sur le trône en 1180, est un roi riche
et puissant. Depuis qu’il a succédé à son père Louis VII, il a
considérablement agrandi le domaine royal, surtout au détriment du roi
d’Angleterre qui détenait la plus grande partie du royaume de France.
En effet, la mort du roi d’Angleterre Richard Cœur de Lion, en 1199,
suivie de l’avènement de l’intrigant Jean sans Terre, ont donné l’occasion
au roi de France de récupérer en 1203 toute la Normandie. Cette région
retourne à la France après trois siècles de séparation, ainsi que les fiefs
d’Anjou, de Touraine, du Maine et du Poitou, qui avaient été autrefois les
joyaux de la couronne des Plantagenêts. Seules l’Aquitaine et une partie
du Poitou demeurent alors aux mains des Anglais.
En dépit de ces succès, des menaces subsistent : Jean sans Terre prépare
sa vengeance et son neveu, l’empereur Otton de Brunswick, monte une
coalition contre la France.
Jean sans Terre débarque à la Rochelle en février 1214 et remonte la
Loire, tandis qu’Otton se réunit dans le Nord, à proximité de
Valenciennes, avec les soldats de la coalition. Ceux-ci comprennent
Ferrand de Flandre et Renaud de Dammartin, comte de Boulogne, tous
deux vassaux du roi de France mais favorables aux Anglais, ainsi que
plusieurs princes germaniques.
À la tête d’une armée de 60 000 hommes, Jean sans Terre prend d’abord
Angers, avant de se diriger vers Nantes. Mais le 2 juillet suivant, il est
défait en chemin par les troupes françaises menées par le fils du roi, Louis
(futur Louis VIII, dit « le Lion »), alors qu’il tentait de s’emparer de la
forteresse de la Roche-aux-Moines, dans le Poitou.
Conscient que Jean sans Terre et Otton de Brunswick veulent le prendre
en tenaille, Philippe Auguste décide de les prendre à revers en les
contournant par le nord-est. Ce dernier ne dispose que d’une dizaine de
milliers d’hommes, dont ses fidèles chevaliers tels qu’Eudes de
Bourgogne, Guillaume de Barres ou Mathieu de Montmorency, ainsi que
des gens issus des milices communales d’Amiens, Corbin, Beauvais,
Compiègne, Arras et Soissons.
Apprenant que le roi de France fait route vers Tournai pour attaquer la
Flandre, Otton décide de partir à sa rencontre et de s’installer à Bouvines,
au sud-est de Lille, entre Tournai et l’abbaye de Cysoing, où il compte
empêcher les Français de se replier. Informé de cette menace, le roi de
France décide de battre en retraite jusqu’à Lille, par la route la plus
courte, passant par le pont de Bouvines qui enjambe la petite rivière de la
Marcq.
[…]
En 1328, alors que décède Charles IV, le dernier fils de Philippe le Bel,
les pairs du royaume désignent comme successeur le neveu du roi,
Philippe de Valois. Philippe VI est couronné à Reims le 29 mai 1328, et
c’est ainsi que les Capétiens directs laissent la place à la dynastie des
Valois.
Le roi d’Angleterre, Édouard III, refuse cette décision car sa mère
Isabelle est la fille de Philippe le Bel. Il est donc le descendant direct du
roi de France.
Toutefois, les États généraux réunis en 1317, s’inspirant de la loi salique
des Francs, ont décidé que les femmes ne peuvent hériter de la couronne
de France. De plus, les légistes français estiment qu’elles ne peuvent pas
non plus transmettre la couronne à leurs fils. Mais un tel cas ne s’est
jamais produit avant Isabelle et son fils Édouard, tous les souverains
Capétiens ayant pu transmettre la succession à un fils.
C’est pourquoi Édouard III affirme que c’est bien à lui que revient le
trône de France : ainsi éclate en 1337 la guerre de Cent Ans25, après que
le roi d’Angleterre a poussé les Flamands à la révolte contre l’autorité de
Philippe VI. En 1340, après avoir été reconnu comme souverain légitime
de la France, Édouard III décide de rejoindre l’Écluse, un avant-port de
Bruges, pour soutenir les Flamands. À cette nouvelle, les Français se
préparent à empêcher le débarquement anglais, inacceptable. Mais
lorsque se déroule la bataille navale dite « de l’Écluse », les Anglais
remportent une brillante victoire qui permet à Édouard de poursuivre ses
ambitions.
Au XIVe siècle, la Serbie connaît son âge d’or, sous le règne d’Étienne IX
Douchan (1308-1355), monté sur le trône en 1331. Tout en dominant la
Bulgarie par son mariage avec la fille du souverain bulgare, le roi dirige
un empire comprenant la Serbie, la Macédoine (sauf Salonique), l’Albanie
et la Thessalie. En 1346, désireux de faire face à la menace turque en
donnant à son empire une force politique se substituant à celle de
l’Empire byzantin, il se fait couronner « empereur des Serbes et des
Romains27« dans sa capitale, Uskub (Skoplje, actuelle capitale de la
Macédoine).
Sous son règne, l’Église orthodoxe serbe est étroitement liée au Kosovo,
où le patriarche a fixé son siège à Pec et où se trouvent également les
monastères de Gracanica et de Decani. L’Église serbe, dont le patriarcat a
été créé par Étienne Douchan et qui est protégée par son empereur,
prend à partir de cette époque ses distances avec l’Église de
Constantinople.
Cette décision est directement liée à l’ambition d’Étienne Douchan qui
souhaite conquérir Constantinople. Il est même prêt à envisager une
alliance avec les Vénitiens ou avec les Turcs. Mais il meurt avant d’avoir
concrétisé ce projet.
Sa disparition a de pénibles conséquences pour la « Grande Serbie », qui
connaît un affaiblissement par l’instabilité politique qu’engendre la
succession : l’héritier, Uros, dernier souverain de la dynastie des
Nemanjides, voit son autorité contestée par les seigneurs régionaux
serbes, qui n’agissent plus que pour leur propre compte. Quant aux deux
régions du sud de la Serbie, le Kosovo et la Métochie, elles passent sous
l’autorité du cosouverain d’Uros, le roi Vukasin.
L’Empire byzantin perd ainsi un allié potentiel contre les Turcs, qui
menacent régulièrement l’Europe et qui finissent par y prendre pied, à
Gallipoli, en 1354.
L’année suivante, pour contenir l’avancée des Turcs, Uros parvient à
former une coalition réunissant la majeure partie des princes serbes, le roi
de Hongrie Louis d’Anjou, le prince de Valachie et le tsar bulgare de
Tarnovo. À partir de 1371, le sultan Murad Ier (1359-1389), futur
fondateur de la puissance ottomane en Europe orientale, se lance à la
conquête de la Serbie et de la Bulgarie. Malgré leur alliance, les Serbes et
les Bulgares sont vaincus à la bataille de Cernovem, le 26 septembre 1371.
Cette défaite correspond à une phase décisive de l’avancée des Turcs en
direction des terres serbes.
Passant par l’Anatolie, Tamerlan doit affronter les Ottomans, dirigés par
le sultan Bajazet Ier. Surnommé « la Foudre », celui-ci est le fils du Murad
Ier, vainqueur de la bataille de Kosovo Polje. Les Ottomans ont réussi à
s’emparer des dernières possessions des Byzantins en Asie mineure et
contrôlent alors la majeure partie de l’Anatolie, mais aussi la péninsule
balkanique (voir partie II, chapitre 11).
Les belligérants se rencontrent à Ancyre (appelée « Angora » au
XIXe siècle, avant de prendre le nom d’« Ankara », capitale de la Turquie
depuis 1923), un lieu déjà célèbre pour avoir été en 66 av. J.-C. le théâtre
de la victoire du général romain Pompée sur le roi Mithridate VI Le
Grand, roi du Pont.
Le sultan ottoman commande des troupes composites, disciplinées et
aguerries, dont les célèbres janissaires ainsi que 40 000 cavaliers serbes
sous les ordres du roi Étienne Lazarevic.
De son côté, Tamerlan est à la tête de trois corps d’armée dont les soldats
sont originaires des nombreuses contrées qu’il a conquises (du Caucase,
d’Asie centrale, des Indes, de Russie, etc.) et dispose d’une cinquantaine
d’éléphants, comme cela avait été le cas à Alep, Damas ou Bagdad.
Lorsqu’elles parviennent à Ancyre, les troupes ottomanes sont à bout de
forces, épuisées après une longue marche et assoiffées, les hommes de
Tamerlan ayant empoisonné les puits.
La bataille s’engage sous le soleil et la forte chaleur du mois de juillet.
Malgré le courage des janissaires et des cavaliers serbes, les troupes
mongoles remportent la victoire en l’espace d’une journée.
Fait prisonnier, Bajazet est enfermé dans une cage en fer et meurt en
captivité quelques mois plus tard, le 9 mars 1403.
La défaite des Ottomans, dont l’empire est alors désorganisé puis partagé
entre les fils de Bajazet, offre quelques années de répit à l’Empire
byzantin, qui n’est renversé qu’en 1453 alors qu’il aurait pu l’être un
demi-siècle plus tôt.
■
La bataille est prévue pour le lendemain et les Anglais en profitent pour
s’installer sur des hauteurs alentour afin de se reposer et de préparer leurs
armes. De leur côté, les Français passent la nuit sur leurs montures, le sol
étant détrempé par la pluie qui tombe depuis plusieurs jours.
La bataille s’engage le 25 octobre en fin de matinée. Face aux Français
resserrés sur leur ligne de bataille, les Anglais ont planté des pieux devant
leurs archers pour les protéger en cas de charge.
Alors que les chevaliers français se préparent à s’élancer au galop contre
les lignes anglaises, le duc Jean de Berry leur conseille de ne pas attaquer :
le terrain, boueux, est bien trop lourd et les hommes sont fatigués. En
outre, l’étroitesse du terrain ne permet pas aux chevaliers d’être appuyés
par les fantassins, qui sont écartés, au contraire des Anglais qui les
utilisent au mieux. Mais, rapidement submergés par les redoutables
flèches anglaises, les chevaliers décident néanmoins de charger. Ce sont
les princes de sang qui avancent en premier, suivis des soldats
professionnels.
Les arbalétriers français, placés sur les côtés et à l’arrière, ne peuvent pas
répondre à leur tour aux tirs ennemis avec la même efficacité que les
Anglais. Les chevaliers, alourdis par leurs armures dont certaines
atteignent 20 kilos, se déplacent avec difficulté, s’enfonçant dans la boue
tout en étant criblés de flèches ou écrasés par leurs chevaux blessés. De
plus, leur ligne est si serrée que les chevaliers ne peuvent que
difficilement lever les bras pour manier lances et épées. Enfin, comme à
Crécy, ils ont le soleil dans les yeux.
Le premier rang de chevaliers est décimé. Après avoir tiré suffisamment,
les archers anglais abandonnent leurs arcs et, accompagnés de fantassins,
se jettent sur les Français avec leurs épées, leurs haches, leurs maillets et
couteaux. Les chevaux s’affolent et les Français roulent à terre où,
empêtrés dans leur armure, ils deviennent une proie facile pour l’ennemi.
Le carnage est tel, malgré l’intervention du corps de bataille français venu
au secours des chevaliers, que les Français sont submergés malgré leur
bravoure.
Mais alors que 1 700 Français sont capturés, Henri V, furieux
d’apprendre une tentative de contre-attaque des Français et contrevenant
aux usages de l’époque consistant à échanger les prisonniers contre une
rançon, ordonne à ses archers de décapiter les prisonniers et d’achever les
blessés. Ce calcul politique vise à affaiblir au maximum les Armagnacs et
leurs partisans. Seuls quelques prisonniers seront épargnés, dont Charles
d’Orléans, neveu du roi de France, emmené pour de nombreuses années
de captivité en Angleterre.
Face à cette folie meurtrière, les fantassins, archers, ou chevaliers français
encore présents sur le champ de bataille sont effrayés et refluent. La
bataille d’Azincourt s’achève donc sur une victoire anglaise.
Après cette victoire qui redonne espoir au peuple français, Jeanne incite
Charles à aller se faire sacrer à Reims, mais celui-ci a peur : la
Champagne est aux mains des Anglais. Jeanne lui ouvre alors la route de
Reims en infligeant des échecs cuisants à l’ennemi à Patay, Auxerre,
Troyes, Châlons-sur-Marne, etc. Le 17 juillet 1429, le sacre de Charles
VII peut avoir lieu.
Alors que les Anglais sont démoralisés, Jeanne poursuit le combat, mais
elle échoue à prendre Paris, tenue par le duc de Bourgogne. En mai 1430,
elle est capturée par les Bourguignons devant Compiègne.
Ces derniers la vendent aux Anglais, qui la confient à un tribunal
ecclésiastique chargé de statuer sur son sort et dirigé par l’évêque de
Beauvais acquis à leur cause, Pierre Cauchon, qui tente de la faire passer
pour une sorcière. Déclarée « , elle est
condamnée au bûcher et meurt à Rouen, le 30 mai 1431.
Mais pour les Anglais, c’est la fin, car l’armée française continue la
reconquête du territoire et Charles VII parvient à rallier à sa cause les
seigneurs dissidents. Ainsi, le roi signe la paix avec le duc de Bourgogne
en 1435 et son armée reconquiert la Normandie en 1449, Bergerac en
1450, Bayonne en 1451, etc.
La guerre de Cent Ans s’achève avec la victoire française de Castillon, le
17 juillet 1453, à l’issue de laquelle les Français reprennent Bordeaux.
Alors que la guerre de Cent Ans prend fin sans qu’aucun traité n’ait été
signé, seule la ville de Calais demeure aux mains des Anglais pour encore
un siècle.
Depuis le XIIIe siècle, l’Empire ottoman étend sa domination en Europe
de l’est en s’emparant de nombreux territoires byzantins : une partie de la
Grèce, la Bosnie, la Serbie, la Macédoine, l’Albanie, l’ensemble de la
Thrace et une grande partie de la Bulgarie. Au XVe siècle, l’Empire
byzantin est ainsi réduit à sa seule capitale, Constantinople, et à quelques
territoires alentour.
Les Byzantins menacés n’ont plus d’espoir que dans l’intervention des
Occidentaux, mais le pape et les pays catholiques rechignent à aider un
rival qualifié d’hérétique depuis le schisme de 1054 qui a divisé la
chrétienté entre catholiques romains et orthodoxes byzantins.
Aussi un éventuel soutien des catholiques aux Byzantins est-il conditionné
par un accord religieux : c’est le concile de Ferrare-Florence, en 1439, par
lequel les Grecs, tout en conservant leur propre doctrine religieuse,
consentent avec beaucoup de difficultés à reconnaître l’autorité
pontificale.
Suite à cet accord, en 1443, les chrétiens hongrois et albanais, encouragés
par Rome, envahissent les Balkans, mais sont vaincus par les Turcs à
Varna en 1444, qui voient s’ouvrir de nouvelles perspectives d’expansion.
Un cousin du roi défunt, François Ier (1494-1547), lui succède sur le trône
de France, le 25 juin 1515. À peine sacré, il décide de venger la France
des récents échecs militaires et de reconquérir le Milanais. À la tête d’une
puissante expédition militaire comprenant 30 000 fantassins et 10 000
cavaliers, François Ier se lance vers l’Italie au mois d’août 1515. Son armée
comprend de nombreux chevaliers, tels que Bayard, le connétable de
Bourbon, le duc de Lorraine, le comte de Guise ou encore le maréchal
Trivulce. En effet, la noblesse a pour rôle de «
, en échange de nombreux privilèges.
Pendant la traversée des Alpes, la présence de 20 000 combattants suisses
au niveau des cols du Mont-Cenis et du Mont-Genèvre contraint l’armée
française à passer plus au sud, en remontant la Durance avant d’atteindre
la plaine du Pô. Ayant franchi les Alpes, les Français partent s’installer à
Marignan, à proximité de Milan, mais y rencontrent les Suisses, alliés de
la Sainte Ligue.
Le roi de France tente de négocier, mais, essuyant un refus, il se prépare
alors à combattre sur cette plaine marécageuse de Marignan. Galiot de
Genouillac, qui commande l’artillerie française, fait disposer les pièces
d’artillerie sur des zones sèches et surélevées, armes qui vont faire toute la
différence sur le champ de bataille. Les Français possèdent 72 canons,
tandis que les Suisses n’en ont que huit.
Dans l’après-midi du 13 septembre 1515, les Suisses se lancent à
l’attaque. Lançant charge après charge, ils commencent à ouvrir des
brèches dans les lignes françaises lorsque 200 cavaliers français menés par
François Ier surgissent. Mais ce sont surtout les batteries de canons qui
mettent l’ennemi en difficulté, et à trois reprises, les Suisses doivent
lâcher prise alors qu’ils parvenaient à les atteindre.
Au soir du 13 septembre, les combats sont interrompus pour la nuit. Le
roi de France en profite pour modifier la disposition de son armée, qu’il
place en longueur, sur une ligne élargie pour augmenter la puissance de
feu. Le roi est placé au centre, le duc d’Alençon sur l’aile gauche et le
connétable de Bourbon sur l’aile droite.
À l’aube, après avoir passé la nuit à veiller, parfois sans descendre de leur
monture, les soldats français voient les Suisses attaquer à nouveau. Ces
derniers choisissent de s’en prendre au centre du dispositif français, qui
est commandé par le roi, mais leurs 5 000 hommes sont alors repoussés
par les piquiers et les arquebusiers français, appuyés par l’artillerie. Ne
pouvant enfoncer le centre, les Suisses tentent alors de se diriger vers les
ailes de position des Français et de s’infiltrer jusqu’aux canons, en vain.
En fin de matinée, les Suisses sont pris à revers par une autre armée venue
soutenir François Ier et commandée par Alviano, capitaine de Venise.
Tandis que les Suisses commencent à reculer, les canons français se
déchaînent. Tentant de fuir, les Suisses sont rattrapés par la cavalerie, qui
fait un véritable carnage.
Submergés, les Suisses parviennent à battre en retraite définitivement.
Les Français, épuisés par les combats, renoncent à poursuivre les vaincus.
Pour le vieux maréchal Trivulce, qui a participé au cours de sa vie à 18
batailles particulièrement difficiles, ce fut « .
La bataille a été particulièrement meurtrière pour les Suisses, qui
dénombrent au moins 13 000 morts, alors que les Français ont perdu
environ 2 500 hommes.
Pour le jeune roi de France, cette brillante victoire, remportée à 20 ans,
lui donne un grand prestige auprès de ses sujets et des souverains
étrangers. Le soir même de la bataille, François Ier est fait chevalier par
Pierre Bayard « .
Alors que la coalition est brisée, Milan doit ouvrir ses portes aux Français.
François Ier repasse les Alpes à la fin janvier 1516.
[espagnols]
[…] […]
[…].
Les Aztèques, bien qu’ayant réussi à tenir deux mois et demi dans de
terribles conditions, sont définitivement vaincus. Entré triomphalement
dans Tenochtitlan, Cortès fait prisonnier le souverain Cuatemoc, qui est
jugé et exécuté. La capitale en ruine est rasée et, sur son emplacement, les
Espagnols construisent Mexico, qui devient la capitale de la Nouvelle-
Espagne (futur Mexique), fondée en 1535. Ils s’emparent ensuite du reste
de la région, dont le Chiapas, le Salvador, le Guatemala, etc.
Après être revenu à Moscou pour préparer une seconde expédition, le tsar
reprend la route de Kazan, le 24 novembre 1549. Parvenu aux pieds des
remparts de la ville, le 14 février 1550, il lance l’assaut : l’armée russe a
recours aux canons, aux catapultes pour abattre les murs, ainsi qu’aux
béliers pour venir à bout des portes les plus épaisses. Les Russes
parviennent à ouvrir une brèche et 60 000 d’entre eux investissent la ville,
massacrant la population, pillant les habitations, etc. Toutefois, ils ne
parviennent pas à prendre la forteresse centrale, qui résiste
désespérément.
Un jour plus tard, survient un brusque dégel qui pénalise gravement les
assaillants. Ceux-ci doivent désormais avancer dans la boue, ne sont plus
ravitaillés en raison de la fonte des glaces qui inonde les routes, et ne
peuvent pas utiliser efficacement leur artillerie lourde pour attaquer la
forteresse, la poudre étant mouillée. Dans de telles conditions, il n’est
plus possible de combattre et l’ordre est donné, la rage au cœur, de battre
en retraite. Les Tatars réfugiés dans la forteresse sont sauvés et ont la
satisfaction de récupérer un certain nombre de pièces d’artillerie et autres
armements que les Russes ont dû abandonner en partant.
Quatre ans après Kazan, une autre capitale d’un khanat tatar, Astrakhan,
tombe aux mains des Russes. À la suite de la conquête de Kazan et
d’Astrakhan, les Tatars opposent une farouche résistance aux mesures de
russification. Pendant plus de deux siècles, ils prendront part aux
nombreuses révoltes qui agiteront la Russie. À partir du XIXe siècle, leur
identité linguistique, religieuse et culturelle sera progressivement tolérée,
puis reconnue au XXe siècle.
Quant à Ivan IV, il impose à la Russie un régime d’oppression et
manifeste une terrible cruauté envers ceux qui s’opposent à lui d’une
façon ou d’une autre, allant même jusqu’à tuer son fils de ses propres
mains. Cela lui vaut d’être surnommé « Ivan le Terrible ».
Grande figure du nationalisme russe, il reste également célèbre pour avoir
forgé un véritable État russe, lancé la colonisation de la Sibérie et ouvert
la Russie au commerce avec l’Occident. Mais à sa mort, en 1584, il laisse
un empire fragilisé qui entre pour trois décennies dans une grave période
de troubles.
La Méditerranée est dominée au XVIe siècle par plusieurs puissances que
sont Venise, l’Espagne et l’Empire ottoman.
Venise est une puissance maritime et commerciale qui tire l’essentiel de
ses ressources du commerce avec l’Orient. Ses navires de combat et leurs
équipages sont les meilleurs de l’époque. L’Espagne domine l’ouest du
bassin méditerranéen en contrôlant la Sicile, la Sardaigne, Milan, Gênes
et le royaume de Naples. L’Empire ottoman s’étend, quant à lui, sur trois
continents (Asie, Afrique et Europe) et notamment sur la Méditerranée
orientale, les Balkans, et jusqu’à la Hongrie. Après avoir occupé presque
tout le bassin méditerranéen, cet empire menace de plus en plus l’Europe
occidentale. Les Ottomans ont pris Belgrade en 1521, Rhodes en 1522, et
ont assiégé Vienne en 1529. Le souverain ottoman, Soliman Ier dit « Le
Magnifique », disparaît en 1566. Son fils aîné, Selim II, lui succède, mais
surnommé « l’Ivrogne », il amorcera le déclin de l’Empire turc.
Si les Ottomans ont échoué à prendre Malte en mai 1565, ils réussissent à
soumettre Chypre en septembre 1570, qui passe pour trois siècles sous
leur domination. Cette île, riche en vignobles et en plantations de coton
et de canne à sucre, appartient alors aux Vénitiens, qui l’ont rachetée en
1489 à une héritière des Lusignan. Après cette offensive, Venise se sent
de plus en plus menacée et doit abandonner sa politique de compromis
avec les Turcs.
L’attaque de Chypre est jugée intolérable par les chrétiens. Ceux-ci
redoutent aussi l’expansion ottomane et sont épuisés par les raids
« barbaresques » des Ottomans qui mènent des razzias sur les côtes
siciliennes ou espagnoles et réduisent des milliers de chrétiens en
esclavage. En outre, les puissances chrétiennes redoutent de croiser en
mer les galères turques, qui les attaquent et condamnent les équipages à la
captivité.
Une coalition dite « de la Sainte Ligue » (bien que la première à porter ce
nom ait échoué en 1538) se forme en mai 1571, à la suite de l’appel
prononcé par le pape Pie V en la basilique Saint-Pierre de Rome. Elle
réunit les États pontificaux, Venise, l’Espagne de Philippe II, les
principautés italiennes indépendantes (Savoie, Toscane, Parme et
Modène) et l’ordre de Malte. La France de Charles IX, aux prises avec ses
difficultés intérieures (c’est l’époque des guerres de religion) et
officiellement alliée aux Turcs, ne s’y joint pas.
De leur côté, les Turcs ont conclu un pacte avec le roi de Hongrie,
Étienne Tokoly. C’est ainsi qu’au mois de mai 1683, les troupes
ottomanes se mettent en marche afin de venir en aide aux Hongrois
opposés à la suzeraineté de l’Autriche, tandis que les Hongrois entament
le siège de Presbourg (devenue Bratislava, actuelle capitale de la
Slovaquie).
Mais le chef ottoman, le grand vizir Kara Mustapha, décide de passer
outre les instructions du sultan Mehmet IV et se dirige sur Vienne, à la
tête d’une gigantesque armée de 150 000 hommes.
Le 14 juillet 1683, le siège de la capitale autrichienne commence.
Léopold Ier et le gouvernement ont eu le temps de quitter la ville, mais il
reste encore 60 000 habitants. Le comte Rüdiger Starhmeberg et le
bourgmestre Andreas Liebenberg organisent la résistance, s’appuyant sur
les quelque 20 000 hommes que comprennent les 11 régiments et la
milice de la ville. En prévision de l’arrivée des Turcs, les faubourgs de la
ville ont été rasés et quantité d’armes et de vivres stockés en vue du siège.
Grâce aux alliances passées par Sobieski, les Viennois savent qu’ils seront
bientôt secourus. Pourtant, en dépit de leur acharnement, la situation des
assiégés devient extrêmement difficile : au début du mois de septembre,
alors que la pénurie sévit, les fortifications menacent de céder devant
l’assaillant turc.
Les alliés des Autrichiens approchent enfin. Les troupes autrichiennes,
complétées surtout par des Bavarois et commandées par le duc Charles de
Lorraine, retrouvent les troupes polonaises de Jean Sobieski. Celui-ci se
retrouve alors à la tête d’un total de 65 000 hommes placés sous son
commandement.
L’armée ainsi réunie arrive sur les hauteurs du Kahlenberg, à l’ouest de
Vienne, le 11 septembre. Le lendemain matin, au cours de la messe
précédant l’attaque, les soldats sont galvanisés par le discours du moine
capucin Marco d’Aviano et partent au combat la rage au cœur. Pendant
toute l’offensive, le religieux les encouragera à se battre comme
« , gagnant par son charisme le surnom de « puissant
magicien » par les Turcs.
Après trois attaques successives des Turcs, survenues pendant leur
descente du Kahlenberg, les armées alliées organisent une puissante
contre-offensive à laquelle leur adversaire ne peut résister. Ce dernier,
affaibli par la fuite des Hongrois et des Tatars, est bientôt défait malgré le
courage des janissaires.
L’armée ottomane choisit de s’enfuir, abandonnant tout : artillerie, butin
accumulé au cours de précédentes victoires, vivres, etc. Elle laisse
également derrière elle entre 15 000 et 20 000 hommes tués au combat…
Alors que se met en place la lutte armée des treize colonies, les
sont placés sous les ordres de George Washington, désigné commandant
en chef des troupes continentales.
Le 4 juillet 1776, une nouvelle réunion du congrès des représentants des
colonies à Philadelphie adopte la Déclaration d’indépendance, qui met un
terme définitif à l’assujettissement à la couronne britannique.
À cette époque, débute le soutien de la France aux colons : en juin 1777,
le marquis de La Fayette se rend en Amérique avec plusieurs chefs
militaires français pour former les combattants et acheminer des armes et
des équipements.
Malgré cette aide et une volonté farouche d’obtenir leur liberté, et bien
que les Anglais n’aient pu mobiliser qu’environ 40 000 hommes à la fois
et soient parfois dépassés par cette forme de guérilla, les
peinent à remporter des victoires. Seule celle de Saratoga, le 17 octobre
1777, est une victoire importante : les Américains parviennent à faire
capituler 5 000 soldats anglais. Elle permet de rallier la plupart des colons
à la guerre d’Indépendance et rend crédible cette guerre, laquelle suscite
désormais bien davantage l’intérêt de la France qui y voit un moyen de
prendre une revanche sur l’Angleterre.
L’américain Benjamin Franklin (inventeur du paratonnerre) intervient
auprès du ministre français Charles de Vergennes, qui parvient à
convaincre Louis XVI. Les relations franco-américaines s’accentuent
alors avec le « Traité d’amitié et de commerce conclu entre le roi et les
États-Unis de l’Amérique septentrionale », signé à Paris le 6 février 1778,
qui accorde un premier prêt et intensifie les livraisons d’armes et de
matériel.
Puis, le 11 juillet 1780, une escadre française de 8 vaisseaux et de 2
frégates, accompagnant 26 navires qui transportent un corps
expéditionnaire de 5 500 hommes commandé par le lieutenant-général de
Rochambeau, débarque à Newport.
Avec l’aide des Français, le général Washington planifie sa campagne
militaire contre les Anglais. Rochambeau estime toutefois qu’il est
nécessaire de faire parvenir de France de nouveaux renforts avant de
passer à l’action. En septembre suivant débarquent 3 300 hommes
supplémentaires, sous les ordres du marquis de Saint-Simon. Washington
est partisan d’une attaque de New York, mais Rochambeau, apprenant
que l’amiral de Grasse est en route pour la baie de Chesapeake, en
Virginie, conseille d’attaquer dans le sud, où les Anglais ont concentré
leurs efforts avec succès.
C’est ainsi que les américains et les armées de Rochambeau,
appuyés par l’escadre française de l’amiral de Grasse, qui ont réussi à faire
croire aux Anglais que leur objectif était New York, manœuvrent en
direction de la base navale de Yorktown, en Virginie. Préalablement, La
Fayette et ses 1 500 hommes ont réussi à repousser le général Charles
Cornwallis et ses 8 000 hommes jusqu’à Yorktown, où ils se sont
retranchés au cours du mois de juillet, sur ordre du général anglais
Clinton qui surestime vraisemblablement l’adversaire.
Mais les Français craignent que les Anglais n’évacuent par la mer et font
venir la flotte française qui, partie de Saint-Domingue, atteint la Virginie
le 3 septembre 1781.
Une victoire navale décisive est alors remportée par l’amiral François de
Grasse sur la flotte de l’amiral anglais Thomas Graves, au niveau de
l’embouchure de la Chesapeake, le 5 septembre 1781. De Grasse met
ensuite sa flotte, forte de 3 000 hommes, à la disposition de Washington
et de Rochambeau pour appuyer leurs opérations terrestres.
La flotte de l’amiral de Grasse stationne dans la baie de Chesapeake pour
bloquer toute sortie de l’ennemi et empêcher tout secours anglais par la
mer. Yorktown se retrouve assiégée à partir du 28 septembre par les 6 000
hommes de Washington, les 5 500 hommes du corps expéditionnaire de
Rochambeau, rejoints par les forces du marquis de Saint-Simon et les
hommes de La Fayette, soit au total 16 000 Français et Américains.
Alors que Rochambeau a fait venir des canons français, l’artillerie harcèle
la place forte et des fossés sont creusés par des ingénieurs français. Quant
aux Anglais, ils tentent en vain, à plusieurs reprises, de forcer les lignes
franco-américaines.
Au bout de plusieurs semaines de siège, alors que des soldats français
commandés par Charles de Lameth parviennent à prendre les premières
redoutes, l’assaut final est lancé par le Marquis de La Fayette. Ses
hommes, qui attaquent baïonnette au canon, réussissent à s’emparer des
dernières redoutes et de la batterie anglaise la plus puissante. Alors que
les Anglais capitulent, le 19 octobre 1781, le comte de Rochambeau a
l’élégance de refuser l’épée du général O’Hara, adjoint de Cornwallis,
pour que celui-ci la remette à George Washington…
À son retour d’Italie, Bonaparte, qui n’a pourtant que 28 ans, est nommé
par le Directoire général en chef de l’armée d’Angleterre. Mais son
indépendance d’esprit, son ambition et sa popularité inquiètent le
gouvernement français. Aussi, lorsque le jeune général demande à être
envoyé en Égypte dans le double objectif de fonder une nouvelle colonie
et de menacer le commerce britannique en coupant la route vers les
Indes, les Directeurs consentent à ce projet gigantesque pour l’éloigner.
Pourtant, l’Égypte est alors aux mains de l’Empire ottoman, lui-même
allié de la France depuis le XVIe siècle. Talleyrand, ministre des Affaires
Étrangères qui soutient totalement le projet de Bonaparte, se charge de
persuader Selim III que cette expédition n’est pas dirigée contre lui.
Pour financer l’expédition d’Orient, le Directoire envahit la Suisse,
prétextant la défense des Vaudois. Après avoir réprimé sévèrement une
insurrection en septembre 1798, la France contribue à faire disparaître la
Confédération des XIII cantons et met la main sur les fonds de Berne.
Bonaparte, qui prétend qu’« et
croit probablement trouver à nouveau la gloire en Égypte, embarque à
Toulon le 19 mai 1798 avec deux généraux, Kléber et Desaix, et 38 000
hommes. Parmi eux, figurent 150 ingénieurs et savants, dont le chimiste
Claude Berthollet, le géologue Dieudonné Dolomieu, le naturaliste
Geoffrey Saint-Hilaire, le mathématicien Gaspard Monge, l’égyptologue
Jean-François Champollion, ainsi que le dessinateur Denon, chargés de
profiter de l’expédition pour étudier les vestiges archéologiques du pays
des pharaons.
L’expédition débarque à Alexandrie le 1er juillet suivant, après s’être
emparée en chemin de l’île de Malte et avoir miraculeusement échappé à
la flotte du contre-amiral britannique, Horatio Nelson.
Mais une fois sur le sol égyptien, le corps expéditionnaire français doit
affronter ses défenseurs, les Mamelouks, commandés par deux beys,
Mourad et Ibrahim.
Mais le régime impérial ne tarde pas à retrouver la guerre. Dès l’été 1805,
l’Angleterre forme une troisième coalition avec l’Autriche, la Russie, la
Suède et le royaume de Naples, dans le but de forcer Napoléon à quitter
l’Italie, dont il s’est proclamé roi.
Lorsque l’Angleterre, alors l’ennemi le plus dangereux, rompt la paix
d’Amiens, Napoléon décide de l’envahir. Aussi l’empereur réunit-il à
Boulogne 200 000 hommes et une flotte gigantesque de 3 000 bâtiments.
Toutefois, l’invasion n’est réalisable que si les Anglais s’éloignent de la
Manche. Il faut notamment contenir l’escadre anglaise de Méditerranée
commandée par l’amiral Nelson, 47 ans, le redoutable vainqueur
d’Aboukir. À cette fin, Napoléon donne l’ordre à l’amiral Villeneuve, qui
commande la flotte française basée à Toulon, d’attirer Nelson le plus loin
possible, puis de revenir en direction de la Manche.
Quittant Toulon en mars 1805, Villeneuve passe donc Cadix et part pour
les Antilles, pris en chasse par la flotte anglaise. La première partie du
plan de Napoléon se déroule alors favorablement. Mais Villeneuve est
inquiet, et craignant d’être envoyé par le fond, il regagne le continent
européen, ancrant sa flotte au Ferrol, en Espagne du Nord.
À la suite d’une mauvaise communication avec l’Empereur, Villeneuve
rejoint ensuite le port espagnol de Cadix, bloquant les projets d’invasion
de l’Angleterre. Harcelé par Napoléon qui l’attend à Boulogne, l’amiral
français décide d’en ressortir, bien qu’il soit conscient de son infériorité
face aux Anglais. Le 20 octobre, les 18 navires de Villeneuve, soutenus par
15 bâtiments espagnols aux ordres de l’amiral Gravina, prennent le large,
profitant de l’information selon laquelle une partie de la flotte anglaise est
partie effectuer un ravitaillement. Hélas, Villeneuve ignore que Napoléon
vient de quitter Boulogne pour contrer les Autrichiens et a abandonné
son plan d’invasion. Pendant que les navires français et espagnols longent
les côtes méditerranéennes, Nelson et ses 27 vaisseaux, qui veillaient au
large de Cadix, partent à leur rencontre avant que ceux-ci n’atteignent le
cap de Trafalgar au sud-est de l’Espagne.
Au matin du 21 octobre, la flotte franco-espagnole découvre qu’elle est
suivie de près par les Anglais, dont la flotte se scinde en deux colonnes,
selon la tactique adoptée par Nelson. Ces deux colonnes, respectivement
commandées par Nelson, à bord du , et par l’amiral Cuthbert
Collingwood, sur le , doivent couper la ligne
ennemie et la tronçonner en petits groupes isolés, donc vulnérables.
Le 21 octobre, vers midi, les deux flottes se retrouvent face à face et la
bataille navale s’engage. Les Anglais lancent leurs deux colonnes à
l’assaut, galvanisés par le célèbre appel de Nelson, leur rappelant que
« . Ils parviennent
rapidement à s’infiltrer au milieu de la ligne franco-espagnole et la
désorganisent. Le centre et l’arrière du dispositif franco-espagnol,
détruits par l’une des deux colonnes ennemies, plient sous le feu intense
de l’artillerie anglaise. Villeneuve est contraint de venir au secours des
Espagnols, mais il se retrouve isolé dans la mêlée.
À 13 heures 15, Horatio Nelson s’affaisse : un coup de feu tiré du navire
français vient de lui transpercer l’épaule et la colonne
vertébrale. Il décède trois heures plus tard, mais a néanmoins le temps de
voir sa flotte remporter la victoire.
La bataille s’achève vers 17 heures, après que 18 vaisseaux franco-
espagnols ont été mis hors de combat et que l’amiral Villeneuve a été
capturé. En l’espace de cinq heures, les Franco-Espagnols ont perdu
5 000 hommes, dont l’amiral Gravina, et la moitié de leurs navires. Les
Anglais déplorent la perte de « seulement » 450 hommes, dont fait
toutefois partie le chef de leur flotte, l’amiral Nelson.
En outre, la plupart des bâtiments français pris par le vainqueur et
acheminés vers Gibraltar sombrent la nuit suivante, une tempête s’étant
abattue au sud de l’Espagne.
Trafalgar est considérée comme l’une des plus grandes batailles navales
de l’Histoire. Napoléon ne peut désormais plus envisager de débarquer en
Angleterre, pays qui se voit également garantir la maîtrise des mers.
Napoléon est alors contraint de vaincre la « perfide Albion » par un
blocus continental.
L’amiral Nelson, considéré comme un héros, reçoit des obsèques
nationales avant d’être inhumé dans la cathédrale Saint-Paul de Londres.
Napoléon dira de lui à Sainte-Hélène : «
■
Les armées prussiennes ayant franchi l’Elbe se dirigent vers le sud-ouest
en trois colonnes espacées les unes des autres par une cinquantaine de
kilomètres. Celle de droite, aux ordres du général Rüchel, compte
environ 40 000 hommes. Celle de gauche, qui dénombre 44 000 hommes,
est commandée par le prince de Hohenlohe. Celle du centre est menée
par le duc de Brunswick accompagné du roi de Prusse et comprend
56 000 hommes. À ces trois colonnes, s’ajoute une réserve d’environ
20 000 hommes.
En face, Napoléon rassemble près de 170 000 soldats qui avancent,
comme l’ennemi, en trois colonnes séparées entre elles par une trentaine
de kilomètres : à droite, celle de Soult et Ney ; au centre, celle de Murat
suivie de Bernadotte et Davout ; à gauche, Lannes et Augereau.
Remontant la vallée de la Saale, les troupes de Lannes parviennent à
rejoindre, le 10 octobre, l’avant-garde des troupes du prince Louis-
Ferdinand, neveu du roi de Prusse. Elles leur infligent une défaite lors de
la bataille de Saalfeld au cours de laquelle le prince meurt au combat.
De leur côté, Davout et Bernadotte parviennent à rejoindre les arrières
prussiens de la colonne de gauche, le 13 octobre, passant par le Nord
pour ôter aux Prussiens toute possibilité de retraite vers l’Elbe en
prévision de la bataille.
Pour attaquer les flancs français et prendre la Grande Armée en tenaille,
Brunswick et Hohenlohe se séparent en deux corps, le défilé d’Iéna
n’étant alors gardé que par Hohenlohe.
Dans la nuit du 13 au 14 octobre, Napoléon fait occuper le plateau du
Landgrafenberg, dominant la Saale, au nord d’Iéna. Il organise son ordre
de bataille, disposant Lannes au centre de son dispositif, Augereau et Ney
à gauche, Soult et Murat à droite.
Napoléon prévoit une attaque de front depuis Iéna vers Weimar. De leur
côté, Davout doit menacer la retraite de l’ennemi et Bernadotte doit
réaliser la liaison entre les troupes de Davout et la Grande Armée.
Pourtant, le cours de la bataille s’avérera différent de ce que l’Empereur
avait prévu.
■
Le jour même de la bataille d’Iéna, Davout et ses 27 000 hommes, dont
2 000 cavaliers, parviennent comme prévu à Auerstedt. Ils ont la surprise
de se voir largement inférieurs numériquement puisque les troupes
prussiennes de Brunswick atteignent 56 000 hommes dont 12 000
cavaliers.
Davout appelle Bernadotte en renfort, mais celui-ci est en marche vers
Dornbourg et ne peut intervenir. Les trois divisions de Davout doivent
donc affronter seules les importantes forces prussiennes.
Grâce à la division Gudin, placée sur l’aile droite et qui résiste
héroïquement aux attaques de la cavalerie de Blücher, Davout organise au
mieux son dispositif. Il place la division Friant à droite, de façon à
soutenir la division Gudin, et la division Morand à gauche. Ayant
renforcé ses ailes, Davout peut faire déployer son armée de façon à
encercler l’ennemi.
Les Prussiens, surpris par la forte résistance des Français et assaillis par
les tirs d’artillerie habilement concentrés sur les secteurs plus fragiles du
dispositif ennemi, plient lorsque Davout passe à l’offensive. La première
ligne ennemie est enfoncée par la rapidité de la manœuvre française, et en
fin de matinée, alors que le duc de Brunswick vient d’être mortellement
blessé d’un coup de fusil, le roi de Prusse préfère donner l’ordre de battre
en retraite.
Il compte alors sur le renfort des troupes de Hohenlohe venues d’Iéna
pour reprendre le combat. Or, contrairement à ses attentes, le roi voit
celles-ci arriver non pas victorieuses, mais poursuivies par les troupes de
Napoléon.
Alors que le roi de Prusse et sa femme prennent la fuite, la bataille
d’Auerstedt s’achève, comme celle d’Iéna, sur une victoire française.
Au total, les Prussiens ont perdu 27 000 hommes, tués ou blessés, dont le
duc de Brunswick, âgé de 71 ans. 25 000 autres Prussiens ont été faits
prisonniers, dont le futur général et théoricien militaire Carl von
Clausewitz, alors âgé de 26 ans et qui se distinguera à la bataille de
Waterloo. Toute l’artillerie passe aux mains des Français, qui déplorent
de leur côté la perte de plus de 10 000 hommes.
Après que les derniers rescapés de l’armée prussienne ont été rejoints par
les cavaliers de Murat et faits prisonniers, l’Empereur entre en vainqueur
à Berlin par la porte de Brandebourg, le 27 octobre suivant.
L’armée prussienne est anéantie et, à cette défaite, s’ajoute l’humiliation
de cette armée qui était jugée redoutable et qui s’est pourtant effondrée
très rapidement. La Prusse est occupée par les troupes françaises, avant
d’être morcelée par le traité de Tilsit de 1807.
Quant à la campagne de Prusse, elle est loin d’être achevée et les années
qui suivent seront l’occasion pour les Prussiens de tenir leur revanche,
notamment à Waterloo et au congrès de Vienne de 1815.
■
Manquant de vivres et souffrant de dysenterie après deux mois de marche
extrêmement pénible sous la chaleur des mois de juillet et août, les
Français parviennent à proximité du village de Borodino, sur les rives de
la Moskova, à plusieurs dizaines de kilomètres à l’ouest de Moscou.
C’est à cet endroit, dans une région vallonnée, que les Russes les
attendent, décidés à leur barrer la route de Moscou. Ayant opté pour une
attitude défensive, ils ont installé des pièges et ont couvert les collines
alentour de redoutes garnies d’une puissante artillerie.
Le 5 septembre 1812, la Grande Armée arrive sur ce dangereux terrain.
Napoléon ne dispose plus que de 130 000 hommes, ayant perdu des
dizaines de milliers de soldats touchés par la maladie ou déserteurs. Deux
jours plus tard, les belligérants s’affrontent dans de sanglants combats.
Davout propose à Napoléon d’envelopper les arrières de l’ennemi par une
manœuvre nocturne sur les arrières russes, mais l’Empereur refuse,
confiant dans l’attaque classique.
■
Une semaine après Borodino, le 14 septembre 1812, les 100 000
survivants de la Grande Armée atteignent Moscou, mais trouvent une
ville vidée de ses habitants, où seuls subsistent les repris de justice. Ceux-
ci ont été libérés en échange de la promesse de créer dans Moscou un
véritable climat d’insécurité pour les soldats de Napoléon et d’incendier
la ville avec les matières combustibles entassées dans différents quartiers.
Tel est le plan prévu par le gouverneur Rostopchine, père de la comtesse
de Ségur.
Cinq jours plus tard, alors que l’incendie fait rage et que son armée
manque de vivres et de munitions, Napoléon ordonne de battre en
retraite. Cette retraite, effectuée dans les plaines glacées de Russie, est
sans conteste le pire épisode de l’histoire de la Grande Armée, qui se
replie dans un froid extrême, ravagée par la faim et la maladie. Nombreux
sont les soldats qui meurent gelés ou d’épuisement.
Victor Hugo évoquera plus tard ce tragique épisode dans
(parus en 1853) :
■
Poursuivies par trois armées russes et harcelées par les cavaliers cosaques,
les troupes françaises parviennent à la fin novembre au niveau de la
Berezina, un affluent du Dniepr qui a subitement fondu à la suite d’un
dégel. Il leur faut franchir la rivière, mais celle-ci est large de près d’une
centaine de mètres.
Les 400 pontonniers du général Eblé entreprennent alors de construire
deux ponts de fortune sur la rivière, l’un pour les soldats, l’autre pour
l’artillerie et l’équipement. À partir du 26 novembre, les soldats
parviennent ainsi à franchir la rivière, pendant que les généraux Oudinot
et Victor font diversion auprès des Russes.
Parmi les survivants de l’armée de Napoléon, 12 000 d’entre eux, des
retardataires37, ne sont pas encore parvenus à atteindre les ponts lorsque
le 28 novembre, l’un d’entre eux se brise. Lorsque les Russes arrivent le
lendemain, les retardataires ont commencé à franchir le dernier pont dans
une immense et meurtrière bousculade. Puis, pour empêcher l’ennemi de
traverser à son tour, Eblé prend la terrible décision de détruire ce pont.
Certains retardataires, pris de panique, se jettent dans la rivière et se
noient, tandis que les autres sont tués par les Russes ou faits prisonniers à
l’état de moribonds.
Lorsque l’armée française franchit le Niemen en sens inverse, à la mi-
décembre, il ne reste plus que 15 000 survivants.
Quant à Napoléon, il a rejoint Paris de toute urgence afin de faire
échouer une conspiration, ayant appris que le général Claude François de
Malet avait annoncé sa mort.
La campagne de Russie, désastreuse pour la France, décourage les troupes
étrangères qui préfèrent quitter la Grande Armée et redonne espoir aux
pays ennemis de l’Empire. Apparaît ainsi en février 1813 une sixième
coalition, à l’instigation de la Prusse et de la Russie, rejointes l’été suivant
par l’Autriche, la Suède (dont le roi a rallié le maréchal Bernadotte) et
l’Angleterre.
Le 17 mars 1813, la Prusse lance les hostilités en déclarant la guerre à la
France, mais Napoléon remporte les batailles de Lützen (2 mai), de
Bautzen (20 et 21 mai) et de Dresde (26 et 27 août).
Malgré ces trois victoires successives, Napoléon est finalement vaincu à la
bataille de Leipzig, du 16 au 19 octobre 1813, surnommée à juste titre
« bataille des nations » par des armées coalisées deux fois supérieures en
nombre. Cette terrible défaite contraint Napoléon à se retirer
d’Allemagne et permet aux coalisés d’entamer la « campagne de France »,
en janvier 1814.
Malgré le courage et la résistance de ses soldats, Napoléon ne parvient
pas à retenir l’invasion ennemie. Le 30 mars 1814, la capitulation de Paris
est signée. Poussé par ses maréchaux et Talleyrand, son ministre des
Affaires Étrangères, Napoléon abdique à Fontainebleau, le 6 avril suivant.
L’Empereur déchu est envoyé en exil sur l’île d’Elbe, en Méditerranée, à
l’est de la Corse. La France vaincue est ramenée à ses frontières de 1792.
Les Français parviennent à prendre Puebla en mai 1863, puis Mexico les
semaines suivantes. Cette victoire leur permet de placer l’archiduc
autrichien Ferdinand-Maximilien à la tête du Mexique. Mais Benito
Juarez et ses partisans ne renoncent pas, soutenus par les États-Unis qui,
une fois leur propre guerre civile achevée (la guerre de Sécession), exigent
le départ des forces françaises du Mexique.
Au printemps 1866, Napoléon III fait revenir en France le corps
expéditionnaire, pendant que s’accentuent les tensions politiques en
Europe. Privé de la protection des Français, l’empereur Maximilien ne
peut faire face à l’opposition armée et un an plus tard, il est renversé et
fusillé par les partisans du président Juarez.
En France, l’empereur Napoléon III doit faire face aux nombreuses
critiques devant le bilan de son expédition au Mexique, qui, en dépit de
ses succès initiaux, s’est révélée fort coûteuse pour un résultat final
désastreux. Trois ans plus tard, c’est au tour de l’empereur des Français
d’affronter l’ennemi puis d’être renversé.
La guerre de Sécession éclate en 1861. Elle est la plus meurtrière que les
États-Unis aient connue puisqu’en quatre ans, cette guerre civile a fait
près de 620 000 morts.
L’expression
« est volontairement mal traduite pour lui donner un
sens injurieux à l’adresse de la France, puisque dans les faits, c’est le
prince Radziwill, officier du cabinet militaire du roi de Russe, qui s’est
adressé à l’ambassadeur français. La diffusion de la Dépêche d’Ems
constitue une grave offense pour la France et l’Empereur…
Après s’être assuré deux ans plus tôt de la neutralité de l’Angleterre qui
s’irrite de l’expansionnisme russe, le Japon lance, le 8 février 1904, une
attaque surprise sur la base russe de Port-Arthur (installée depuis 1898 à
la pointe sud de la Mandchourie, sur la presqu’île de Liaotung). Il torpille
sept bâtiments de guerre, dont trois sont envoyés par le fond par la flotte
de l’amiral Togo, sans aucune déclaration de guerre préalable45.
À la suite de ce raid, des troupes japonaises envahissent le sud de la Corée
et prennent Séoul, le 1er mai 1904. Les Japonais remportent ensuite la
bataille de Liaoyang, le 3 septembre suivant. Puis ils font capituler la
garnison russe de Port-Arthur le 2 janvier 1905, à l’issue de plusieurs
mois de siège, après avoir isolé la rade avec des navires coulés. Les
Japonais n’y parviennent cependant qu’à la quatrième tentative, au prix de
12 000 morts et de 70 000 blessés dans leur propre camp.
Cette avancée foudroyante des Japonais se poursuit en Mandchourie, où
les troupes du général Kouropatkine sont mises en difficulté à Moukden,
capitale de cette province, au printemps 1905. Ce dernier tient bon en
attendant l’arrivée de renforts partis de la Baltique. En effet, la flotte de
l’amiral Zinovy Rojdestvenski, après être passée par le cap de Bonne-
Espérance, au sud de l’Afrique, arrive en Extrême-Orient au printemps
1905, au terme d’un voyage fatigant de huit mois. Mais il est trop tard
pour secourir les Russes de Moukden qui ont été vaincus le 8 mars
précédent, après trois semaines de combats acharnés, et qui ont quitté la
Mandchourie.
La flotte russe, qui comprend 45 bâtiments dont 5 cuirassés et 6
destroyers, entend rejoindre le port de Vladivostok pour récupérer de son
long voyage avant d’engager les combats. Voulant rejoindre cette base
navale russe au plus vite, l’amiral Rojdestvenski décide de passer par la
mer du Japon plutôt que de contourner l’archipel par le sud-est. Ce choix
est risqué et en s’approchant de la mer du Japon, la flotte russe se
retrouve bloquée par les navires de l’amiral Heihashiro Togo, parmi
lesquels se trouvent huit cuirassés dont deux particulièrement puissants.
Ce plan tire son nom de son concepteur, Alfred von Schlieffen, chef
d’état-major de l’armée allemande de 1891 à 1906. Achevé en 1905, le
« Plan d’invasion de la France » est inspiré de la tactique d’Hannibal
lors de la bataille de Cannes, en 216 av. J.-C. Il s’agit d’une stratégie
offensive reposant sur le mouvement, la concentration, la vitesse, etc.
Le plan vise à permettre à l’Allemagne de combattre sur deux fronts
en même temps.
Avec cette stratégie, Schlieffen entend vaincre rapidement la France
grâce à un mouvement circulaire. Après avoir violé la neutralité belge,
les forces allemandes doivent entrer sur le sol français au niveau de
Maubeuge, à quelques kilomètres seulement de la frontière belge, puis
descendre en direction de la vallée de l’Oise, bordée au nord par la
Somme et au sud par la Marne. Ensuite, les troupes allemandes
doivent contourner Paris par le sud-est et enfermer les flancs et les
arrières des forces françaises dans un vaste mouvement tournant. La
marge de manœuvre des Français étant ainsi considérablement
réduite, les Allemands conservent l’initiative pour la bataille décisive.
Appliquant le plan en août 1914, le général von Moltke contourne
ainsi les forces françaises, après avoir envahi la Belgique afin de
pouvoir les envelopper.
Mais cette offensive à outrance et la manœuvre par enveloppement
montrent leurs limites au cours du conflit. Ainsi, les Allemands ont
misé sur la lenteur de la mobilisation russe, mais ils doivent finalement
affronter les troupes adverses sur le front oriental bien plus tôt qu’ils
ne l’avaient prévu. De plus, les Allemands n’imaginaient pas une telle
résistance de la part de la France, pensant qu’elle tomberait
rapidement.
Le plan Schlieffen est donc loin d’être parfait, le déroulement du
conflit ne correspondant pas à ce qui avait été prévu dix ans plus tôt, et
bien que Moltke l’ait modifié en conséquence.
Les alliés franco-britanniques ont su tirer profit d’une armée affaiblie par
l’envoi d’effectifs partis combattre les Russes en Prusse orientale. Ils
remportent ainsi la victoire de la Marne, annoncée officiellement au
ministre de la Guerre par le général Joffre le 11 septembre. Le bilan des
pertes françaises est cependant bien lourd : 80 000 morts.
Ce sont les combattants de Verdun qui se chargeront, deux ans plus tard,
de déloger les Allemands…
Après la victoire de la Marne, se déroule de septembre à novembre 1914
la « course à la mer », au cours de laquelle les armées allemande et
française tentent de se déborder mutuellement en direction de la Manche,
dans un secteur allant de Soissons aux côtes de la mer du Nord. Mais
bientôt, c’est la fin de la guerre de mouvement et le commencement de la
guerre d’usure, symbolisée par Verdun.
Alors que les Allemands soutiennent les Autrichiens, les Britanniques et
les Français ont également des obligations envers les Russes. Or, dès le
début de la guerre et avant de rencontrer de réelles difficultés, la Russie a
demandé à ses alliés d’intervenir contre l’Empire ottoman qui vient
d’entrer dans le conflit en novembre 1914 aux côtés de la Triplice et
s’avance dans le Caucase.
Inquiets de la situation sur le front occidental, les Alliés imaginent
l’ouverture d’autres fronts pour submerger l’ennemi. Winston Churchill,
alors Premier lord de l’Amirauté britannique, est partisan de s’en prendre
rapidement aux Turcs, considérés alors comme l’ennemi le plus fragile.
En prenant les détroits turcs des Dardanelles, les Alliés parviendraient à
faire la jonction avec les Russes au niveau de la mer Noire et à affaiblir les
Turcs dans le Caucase, voire peut-être à les contraindre à faire la paix.
Tandis que les Français ont placé un canon tous les 18 mètres et les
Anglais un canon tous les 50 mètres, le bombardement des lignes
ennemies commence le 24 juin 1916. Après plusieurs jours de tirs
incessants (plus de 1,5 million d’obus a été envoyé) qui laminent les lignes
allemandes, ainsi que l’explosion de mines sous les positions ennemies,
l’infanterie peut enfin passer à l’attaque : l’offensive alliée est lancée le 1er
juillet suivant, sur l’axe Bapaume-Cambrai.
À 7 heures 30 du matin, 100 000 soldats quittent leurs tranchées pour
attaquer les positions ennemies. Mais contrairement aux attentes du haut
commandement allié, les bombardements ne sont pas parvenus à détruire
les défenses allemandes. En effet, les forces allemandes ont eu le temps,
avant l’offensive, de consolider leurs lignes, ce qui leur permet de riposter
avec force sur les assaillants.
L’artillerie allemande, qui a résisté au bombardement allié, fait des
ravages sur l’infanterie britannique qui avance en rangs serrés. Les soldats
britanniques, dont la plupart sont des engagés volontaires peu ou pas
expérimentés, avancent trop lentement sur le terrain accidenté et tombent
les uns après les autres… Karl Blenk, un fusilier allemand du 169e
régiment, témoignera : «
Au soir du premier jour de l’offensive, alors que les objectifs les plus
importants n’ont pas été atteints, les pertes parmi l’infanterie anglaise
sont terrifiantes : 20 000 tués et 40 000 blessés ou disparus. Les pertes
allemandes n’atteignent que 6 000 hommes tués et 2 200 faits prisonniers.
Les Français, commandés par le général Ferdinand Foch, s’en sont mieux
sortis, mais leurs résultats demeurent faibles.
Bien que cette attaque soit la plus sanglante que les Anglais aient connue
au cours de leur histoire, le général Sir Douglas Haig refuse toute idée de
repli et ordonne de maintenir la pression le plus longtemps possible face
aux 18 divisions allemandes.
■
Le 10 mai 1940, les troupes allemandes lancent leurs opérations sur le
front occidental, avec l’invasion des Pays-Bas, de la Belgique et du
Luxembourg, pourtant neutres. Désormais, la déferlante allemande ne
peut être évitée.
L’offensive allemande sur le front ouest correspond à la mise en
application du « plan jaune », ou « plan Manstein », du nom du général
qui en est l’auteur. Elle consiste à attaquer les Pays-Bas et la Belgique afin
de provoquer une montée des forces françaises et britanniques vers le
nord-est, puis à passer les Ardennes et à prendre l’ennemi à revers en le
poussant vers la côte, avant de se retourner vers la ligne Maginot53
jusqu’alors évitée, afin de la neutraliser.
Divisions
• infanterie 135 94 10
• motorisées 7 3 0
• cavalerie 1 5 1
• blindées 10 3 1
Chars 2 600 2 400 600
Canons 7 700 11 000 1 500
Avions 4 500 2 176 550
Dès le 10 mai, les Belges sont débordés par les troupes allemandes du
groupe d’armées A, commandé par le général von Rundstedt (45
divisions), qui inaugurent leur . La forteresse d’Eben-Emael, sur
le canal Albert entre Maastricht et Liège, à proximité de la frontière avec
l’Allemagne, pourtant réputée imprenable, tombe très rapidement aux
mains des Allemands.
Le 11 mai, les forces allemandes du groupe d’armées B, sous les ordres du
général von Bock (29 divisions, dont trois blindées), déferlent
massivement sur les Pays-Bas. En dépit des efforts désespérés de l’armée
hollandaise, elles frappent la « forteresse hollandaise » en plein cœur. Le
14 mai, Rotterdam, dernier bastion de la résistance hollandaise, subit un
terrible bombardement aérien. Le lendemain, le 15 mai, le général
hollandais Winkelman signe la capitulation des Pays-Bas.
■
Les Français considèrent que la forêt des Ardennes est impénétrable et le
maréchal Pétain a lui-même affirmé que ce n’était pas un secteur
dangereux. Par conséquent, elle est mal défendue et c’est justement à cet
endroit que les Allemands ont prévu d’attaquer.
Aussi, parallèlement à leur avancée sur le front hollandais, les Allemands
concentrent leurs efforts sur l’ouest. Dès le 10 mai, ils avancent dans les
Ardennes belges et luxembourgeoises, vers Namur et Dinant, mais aussi
plus au sud, entre Givet et Sedan.
■
Le 18 mai, la capitale belge tombe aux mains des Allemands. Les
Français, affolés par la défaite de Sedan, commencent à retirer leurs
troupes du pays. Les armées belge et anglaise perçoivent ce retrait comme
un « , selon le témoignage du général
Olivier Derousseaux, l’un des chefs d’état-major du roi Léopold de
Belgique.
Les armées alliées de la France entament alors à leur tour leur retraite. Le
25 mai, alors que les Allemands ont réussi à prendre Bruxelles, Namur,
Louvain puis Anvers, le front tenu par l’armée belge s’effondre. Le
28 mai, le roi Léopold choisit de signer la capitulation de son pays.
Tandis que les forces alliées reculent vers le sud, les Allemands atteignent
la baie de Somme le 20 mai. Le général Weygand, qui a succédé à
Gamelin le 19 mai, tente d’organiser une nouvelle ligne de défense, mais
les Allemands bifurquent vers la côte. Bientôt, les 45 divisions des forces
alliées se retrouvent encerclées dans les Flandres et se replient vers la
mer, où elles se retrouvent bientôt prisonnières de la « poche de
Dunkerque ».
Les Britanniques mettent alors en place l’opération Dynamo, confiée à
l’amiral Ramsay, pour évacuer les soldats. Entre le 28 mai et le 3 juin,
200 000 soldats britanniques et 100 000 soldats français parviennent à
quitter Dunkerque pour rejoindre l’Angleterre. Puis la ville tombe et les
40 000 soldats qui n’ont pu embarquer sont capturés le 4 juin. Les
combats reprennent le 5 juin, mais la ligne de défense sur la Somme et sur
l’Aisne est rapidement percée.
Les Allemands continuent leur avancée vers le sud, tandis que des
centaines de milliers de Français prennent la route pour fuir l’avancée
ennemie. Le 11 juin, Paul Reynaud déclare Paris « ville ouverte », alors
que le gouvernement s’est replié vers Bordeaux. Le 12 juin, le général
Weygand ordonne la retraite générale. Paris, Lyon et Brest tombent aux
mains de l’ennemi entre le 14 et le 20 juin.
Les forces de la ligne Maginot doivent également capituler le 22 juin, jour
de la signature de l’armistice à Rethondes par le maréchal Pétain, qui a
pris la place de Reynaud le 17 juin à la présidence du Conseil. La
campagne de France s’achève, avec le triste bilan de 123 000 soldats
français tués et de plus de 1,5 million d’autres faits prisonniers.
La France entre alors dans l’une des périodes les plus sombres de son
histoire. Coupée en deux par une ligne de démarcation, elle passe le
10 juillet, pour quatre longues années, sous l’autorité du régime de Vichy.
Les Allemands décident alors d’envahir l’Angleterre. Ils mettent sur pied
l’opération Seelöwe (« Otarie », en allemand), qui consiste en un
débarquement après avoir préalablement détruit les défenses côtières et
neutralisé la , l’armée de l’air britannique, pour s’assurer la
maîtrise du ciel. Le 30 juillet, le chef de la , Hermann Goering,
proclame le début d’une grande bataille aérienne contre l’Angleterre.
Les Allemands bénéficient d’une supériorité numérique : ils disposent de
1 000 chasseurs, de 1 200 bombardiers Junker, Dornier et Heinkel, ainsi
que de 280 bombardiers stukas et de 375 chasseurs-bombardiers Focke-
Wolfe et Messerschmitt. L’ensemble mobilise 10 000 pilotes et hommes
d’équipage. Le nombre de leurs appareils mis à contribution est alors
« limité » à environ 2 800 avions, car il s’agit de ne pas trop perdre de
matériel.
De leur côté, les Britanniques sont commandés par le maréchal de l’Air
Sir Hugh Dowling et ne disposent que de 850 chasseurs Spitfire (très
performants, dotés d’un moteur Rolls-Royce Merlin) et Hurricane, et de
3 080 hommes, répartis dans les 55 escadrons du Fighter Command.
Voyant que la partie est mal engagée, Hitler lance le 7 septembre une
nouvelle forme d’offensive, cette fois sur la population. Les sites civils
sont bombardés afin de créer une atmosphère de terreur qui démoralise la
population, pouvant l’inciter à demander la reddition. Le 17 septembre,
le plan d’invasion est repoussé.
C’est le début du (« éclair », en allemand), qui concentre tous les
efforts sur les grandes villes anglaises : Londres, où dès le 7 septembre, on
dénombre plus de 400 victimes, Birmingham, Liverpool, Manchester,
etc., sont atrocement touchées par des bombes explosives ou incendiaires.
Mais les Britanniques tiennent bon. Ils sont soutenus par l’exemple de la
famille royale qui refuse de quitter la capitale et par le Premier ministre,
qui, dès le 13 mai 1940, soit trois jours après l’invasion de la France, les a
prévenus : «
Divisions 26 51 59
Objectif Les États baltes et Biélorussie, puis Moscou Ukraine, puis
Leningrad Rostov
Mais l’hiver approche et les soldats allemands ne sont pas équipés pour
passer le terrible hiver russe. Leurs véhicules s’enlisent sur des routes
défoncées et gelées, et tombent en panne à cause du froid.
Staline a formé trois commandements confiés aux maréchaux Vorochilov,
Timochenko et Boudienny. Lorsque les troupes allemandes du général
Guderian parviennent à 20 kilomètres de Moscou, les généraux Joukov et
Rokossovski lancent une contre-offensive réussie le 6 décembre, qui
permet de sauver la capitale.
À la fin de l’année 1941, le bilan de l’opération Barbarossa est pourtant
assez satisfaisant pour l’Allemagne, dont les pertes (564 727 hommes au
8 octobre 1941) sont cinq fois moins élevées que celles des Soviétiques,
qui ne comptent plus que 2,2 millions de combattants.
Au printemps 1942, les Allemands intensifient à nouveau leurs attaques,
ralenties pendant l’hiver en raison du froid. C’est en direction du sud et
sud-est, vers le Don, la Crimée et surtout en direction du Caucase que se
dirigent cette fois les troupes allemandes.
Il est prévu de prendre la Volga et d’envoyer une division plus au sud de
l’URSS, vers Groznyï (actuelle capitale de la Tchétchénie, république
appartenant à la fédération de Russie) et Bakou (actuelle capitale de
l’Azerbaïdjan, ancienne république socialiste soviétique devenue
indépendante en 1991).
À partir du 28 juin, une nouvelle offensive est engagée, qui permet aux
Allemands de prendre Kharkov, un grand centre métallurgique, et de
s’avancer en Crimée et dans les terres situées entre le Don et la Volga.
■
Le projet de von Manstein est accepté par Hitler le 15 avril 1943, en dépit
des réticences de nombreux officiers supérieurs, dont Guderian, devenu
inspecteur des . Le entend par cette opération
parvenir à effacer l’affront de Stalingrad et diviser la coalition alliée :
selon lui, un échec des Soviétiques ne manquerait pas de renverser la
situation et d’entretenir la rancœur de Staline qui demande avec
insistance l’ouverture d’un second front à l’ouest, que les Anglo-Saxons
tardent à mettre en place. Hitler attend donc beaucoup de cette bataille,
précisant : «
L’opération reçoit le nom de « Citadelle ». Prévue pour le 1er mai, elle est
retardée pour permettre aux forces blindées allemandes d’être équipées
des nouveaux chars Tigre et Panthère. La 9e armée du général Model,
appartenant au groupe d’armées Centre du général von Kluge et
concentrée dans la zone d’Orel, doit avancer jusqu’aux arrières de
Koursk. La 4e armée du général Hoth, du groupe d’armées Sud du
maréchal von Manstein et de Bielgorod, doit traverser le front de Voronej
et opérer une jonction avec la 9e armée au niveau de Koursk. Enfin, la 2e
armée allemande doit attaquer les Soviétiques sur le flanc ouest.
L’opération paraît simple car une centaine de kilomètres seulement en
moyenne sépare les deux extrémités du saillant de Koursk. Une attaque
conjuguée des armées du Centre venant du nord et des armées du Sud
doit suffire pour prendre en tenailles les Soviétiques.
Toutefois, les généraux soviétiques ont été informés de l’opération par
leur réseau de renseignements Lucy et ils ont eu d’autant plus le temps de
s’organiser que l’opération a été reportée de deux mois. Ils ont
préalablement placé des forces sur les flancs et à l’arrière du saillant,
tandis que dans le saillant même, huit zones successives de champs de
mines, de barbelés et de défense antichars avec des tranchées ont été
méticuleusement préparées. Le front de Koursk aurait été protégé par les
Soviétiques, par 1 500 mines antichars et 1 700 mines antipersonnelles
par kilomètre (soit quatre fois plus qu’à Stalingrad)…
De plus, les Soviétiques ont une parfaite maîtrise du terrain, qui est
encaissé, ce qui est un atout très important. Ils entendent épuiser les
Allemands par des combats incessants, avant de les détruire par des
contre-offensives aux environs d’Orel et de Bielgorod, créant ainsi un
immense front. Les généraux Rokossovski, sur le front central, et
Vatoutine, sur le front Voronej, sont chargés de la défense du saillant de
Koursk. Ils sont appuyés par d’importantes réserves commandées par le
général Koniev, sur le front de la steppe, l’ensemble des fronts étant
coordonné par le maréchal Joukov, représentant du haut commandement,
et le maréchal Vassilevski, chef d’état-major général.
Désormais, de même que sur les fronts terrestres, les forces allemandes
accumulent les pertes en mer : du printemps 1943 au printemps 1945,
plus de 300 sont coulés par les flottes alliées, qui voient leurs
pertes chuter considérablement.
La bataille de l’Atlantique prend fin le 8 mai 1945, le jour de la
capitulation de l’Allemagne, et après que l’amiral Dönitz, désigné par
Hitler avant de mourir comme son successeur, a tenté sans succès de
négocier une paix séparée avec les Alliés de l’Ouest.
Le bilan de cette bataille est bien lourd : les Britanniques comme les
Allemands déplorent chacun la perte de 30 000 marins. La Grande-
Bretagne a vu couler près de 3 000 de ses bâtiments, tandis que
l’Allemagne a perdu un total de 781 et la plupart de ses bâtiments
de surface. Quant aux alliés des Britanniques (notamment les Canadiens)
ainsi que les pays neutres attaqués par la flotte allemande, ils dénombrent
un total de 15 000 victimes et de 3 000 navires détruits.
Les relations américano-japonaises se sont nettement dégradées tout au
long de l’année 1941.
Les États-Unis demeurent isolationnistes, bien que leur président,
Franklin Delano Roosevelt, soutienne les Britanniques et les Soviétiques
grâce à la loi prêt-bail votée le 11 mars 1941. Roosevelt s’inquiète de la
tournure des événements en Europe et est persuadé que les États-Unis
doivent entrer dans la guerre afin d’anéantir les nazis. Il signe même en
août 1941 la « Charte de l’Atlantique » à Terre-Neuve, avec le Premier
ministre britannique Churchill, qui dénonce la tyrannie nazie et défend
notamment la liberté des mers… ce qui peut évoquer l’Atlantique, mais
aussi le Pacifique.
En effet, les Japonais, alliés des Allemands et des Italiens depuis le
27 septembre 1940, ont des visées expansionnistes auxquelles s’oppose
Washington. En 1931, les Japonais ont conquis la Mandchourie, puis en
1937, une partie de la Chine. Au mois de juillet 1941, ils ont pris pied en
Indochine, alors colonie française.
Leur objectif est de constituer une zone de coprospérité exclusive en Asie
du sud-est tout en écartant toute présence ou influence des puissances
occidentales. Ils ont même pris la précaution de conclure, le 13 avril
1941, avec Moscou un pacte de neutralité valable cinq ans. Le 2 juillet
1941, une conférence de l’empereur Hiro-Hito fixe l’expansion japonaise
en direction du sud. Les États-Unis ne peuvent admettre cette politique
et imposent, avec le soutien de la Grande-Bretagne, un embargo pendant
l’été, coupant les relations commerciales avec le Japon et pénalisant ce
dernier en matière d’approvisionnement pétrolier, mais aussi de zinc, de
minerai de fer, de bauxite, de manganèse, indispensables à la poursuite
des conquêtes japonaises. Il s’agit là de mesures jugées inadmissibles par
Tokyo.
En octobre suivant, le général Tojo, partisan de l’entrée en guerre du
Japon, devient Premier ministre, ce qui va contribuer à accélérer les
événements. Le Japon ne veut pas être freiné dans sa conquête de la
Chine et de l’Asie du sud-est, et se tient prêt à défendre ses intérêts par la
force contre les Américains.
L’amiral Yamamoto, le chef d’état-major de la Marine japonaise, qui a
vécu aux États-Unis, est tellement persuadé de leur supériorité militaire
qu’il préconise une frappe préemptive afin de neutraliser leur flotte du
Pacifique.
Il s’inspire de l’attaque japonaise sur Port-Arthur (Chine du Nord) en
1904, ainsi que de celle, plus récente, des Britanniques qui ont lancé avec
succès des avions partis du porte-avions l’ contre des bâtiments
italiens dans le port de Tarente, le 11 novembre 1940. Il monte ainsi un
scénario de raid sur la plus importante base navale américaine dans le
Pacifique. Celle-ci est située à Pearl Harbor, sur l’île d’Oahu, dans
l’archipel des Hawaï, à 5 500 kilomètres des côtes japonaises. Le « plan
Z » de Yamamoto nécessite une longue préparation des pilotes de
l’aéronavale et la mise au point de torpilles capables d’agir en eau peu
profonde.
À partir du 26 novembre 1941, la flotte navale d’assaut commandée par
l’amiral Chuichi Nagumo quitte la base navale japonaise à Etorofou, dans
les îles Kouriles. Elle comprend 6 porte-avions (l’ , l’ , le ,
le , le et le ) dotés de plus de 400 avions de combat,
2 cuirassés rapides, 3 croiseurs lourds, 9 destroyers et 8 pétroliers, ainsi
que 26 sous-marins transportant 5 sous-marins de poche devant entrer
dans la base de Pearl Harbor. Passant par le Pacifique Nord, loin des
routes traditionnellement fréquentées, elle attend les ordres.
Le 2 décembre, l’amiral Nagumo reçoit le message «
» qui lui donne l’ordre d’attaquer Pearl Harbor. Deux jours plus
tard, la flotte change de cap vers le sud afin de se rapprocher de sa cible
jusqu’à 250 000 milles de distance.
la Mandchourie.
la Chine.
l’Indochine (française).
Hong Kong (britannique), les îles Guilbert, Guam et
Wake et Midway (américaines), la Malaisie, Formose (actuelle île de
Taïwan), Bornéo (britannique), la Thaïlande.
les Philippines.
Singapour (britannique).
la Birmanie (britannique), les Indes néerlandaises (actuelle
Indonésie).
les îles Aléoutiennes et la Nouvelle-Guinée.
île de Guadalcanal.
: le Japon menace directement l’Inde et l’Australie.
La guerre en Afrique du Nord a commencé le 16 septembre 1940 par une
attaque italienne à Sidi-Barrani contre les troupes britanniques présentes
en Égypte. Mais rapidement, les troupes italiennes du maréchal Graziani
sont dépassées par les Anglais. Ceux-ci lancent en décembre suivant une
offensive en direction de la Libye, remportant notamment une victoire à
Benghazi, et gagnent Tobrouk. En deux mois, les Italiens ont été
poursuivis sur 1 200 kilomètres à travers l’Afrique du Nord…
Simultanément, un autre corps d’armée britannique prend les autres
colonies italiennes de Somalie, d’Éthiopie et d’Érythrée. Hitler décide
alors d’envoyer deux divisions en Libye, afin de venir en aide à ses alliés
italiens.
■
À la mi-février 1941, l’ commandée par le général Erwin
Rommel, comprenant alors la 5 division légère et la 15e
e
,
débarque à Tripoli, la capitale libyenne. Elle a été constituée le 20 janvier
1941 pour contrer la 8e armée britannique qui vient de s’emparer de la
Cyrénaïque.
L’ , qui dénombre alors 20 000 hommes, entame avec succès la
campagne de Libye et parvient à repousser les Anglais vers l’est, en
Égypte. Rommel est conscient que les Anglais sont affaiblis par l’envoi de
troupes en Grèce et bien qu’il n’oppose que 174 chars face aux 724 chars
anglais, il dispose de terribles canons de 88. Une contre-offensive
britannique, appelée « » (« Hache d’armes »), est lancée le
15 juin mais échoue. L’ avance vite, mettant à profit le matériel
et appliquant régulièrement avec succès les tactiques de diversion et
d’encerclement. Peu à peu, Rommel gagne une réputation d’invincibilité
et reçoit le surnom de « Renard du désert ».
Il parvient à Tobrouk, un port qui revêt une grande importance
stratégique car il permet l’approvisionnement des Britanniques et détient
notamment une usine de distillation d’eau douce (180 000 litres par jour),
si précieuse pour la guerre dans le désert. En outre, Rommel ne peut
prendre le risque de laisser Tobrouk aux mains des Anglais. Cela
fragiliserait son flanc gauche alors qu’il entend poursuivre vers l’Égypte.
Aussi entame-t-il le siège de la ville le 11 avril 1941. Mais celle-ci tient
bon : fortifiée, elle est défendue par la 9e division australienne et
ravitaillée par la mer grâce aux Britanniques. Churchill a donné pour
instruction aux défenseurs de Tobrouk de tenir «
. Jusqu’au 4 mai, Rommel tente la percée de Tobrouk, mais ses
effectifs sont alors trop faibles.
Le 26 mai 1942, Rommel lance une nouvelle attaque massive vers l’est, en
direction du canal de Suez. L’opération Venezia consiste à gagner le sud
de Bir-Hakeim (en Libye, à 60 kilomètres au sud de Tobrouk), puis à
rejoindre le nord vers Tobrouk. L’objectif est d’encercler les Anglais par
l’est et de s’emparer de Tobrouk. Après avoir réussi à détruire deux
brigades d’une division indienne et à faire 4 000 prisonniers, Rommel
ordonne l’attaque de Bir-Hakeim le 1er juin.
Cependant, les troupes britanniques, sous les ordres du général Claude
Auchinleck, parviennent à se replier, grâce à la courageuse résistance des
Forces françaises libres (FFL) commandées par le général Koenig et qui
ont réussi à tenir leur position à Bir-Hakeim jusqu’au 10 juin. Quant aux
hommes de Koenig, après huit jours de bataille acharnée, ils ont réussi à
opérer une percée dans les lignes allemandes et à rejoindre leurs alliés
anglais.
Mais la 8e armée doit se retirer au-delà de Tobrouk et la ville,
abandonnée, tombe le 21 juin. Rommel fait 30 000 prisonniers et
récupère les nombreux véhicules et le carburant découverts dans la ville.
Hitler, satisfait, le nomme maréchal.
■
Les Anglais parviennent jusqu’à El-Alamein, en Égypte, à une centaine de
kilomètres avant Alexandrie et le delta du Nil. Afin de tenter de bloquer
l’avancée allemande, ils s’installent derrière une ligne de défense qui
s’étend sur 65 kilomètres de long, bordée au nord par la mer
Méditerranée et au sud par la dépression de Qattara, une zone
marécageuse. La vie dans le désert est rude : une forte chaleur le jour, le
froid pendant la nuit, les tempêtes de sable, la dysenterie et les insectes
peuplant les marécages empoisonnent le quotidien des soldats.
Les divisions blindées de Rommel, qui ne comptent plus qu’une centaine
de chars moitié allemands, moitié italiens, arrivent le 30 juin à El-
Alamein. Dès le 1er juillet, ne voulant pas laisser à leur adversaire le temps
de s’organiser, les Allemands tentent une offensive. Mais malgré de
nombreuses pertes dans les deux camps, celle-ci prend fin le 27 juillet sans
que ni les Allemands, ni les Britanniques n’aient réussi de véritable
percée. Dans les deux camps, des tranchées sont alors creusées et l’on
multiplie les champs de mines et les barbelés… À la fin juillet, Rommel
reçoit de nouveaux chars (210 blindés allemands, 300 italiens) qui doivent
l’aider à faire face au millier de chars britanniques.
■
En dépit des projets sur Midway, le plan Mo, qui consiste à prendre Port-
Moresby, capitale de la Nouvelle-Guinée, est maintenu. Il permet de se
rapprocher de l’Australie, que les Japonais espèrent envahir. Cette
opération donne lieu, du 4 au 8 mai 1942, à la bataille de la mer de
Corail, une bataille navale au cours de laquelle, pour la première fois, les
navires ne s’affrontent pas directement mais laissent la première place à
l’aviation.
Forts de leur supériorité navale, les Japonais amorcent un débarquement
avec trois porte-avions, le , le et le . Mais ils trouvent
face à eux les porte-avions américains et , escortés de
croiseurs. En effet, les Américains ont été informés des plans japonais par
le décryptage de leurs codes et l’amiral Nimitz a envoyé une escadre
commandée par le contre-amiral Fletcher.
Une bataille aéronavale s’engage : dès le 4 mai, une quarantaine d’avions
décollés du coulent quatre bâtiments japonais. Le 7 mai, les
avions américains coulent le petit porte-avions , atteint par 13
bombes et 7 torpilles, tandis que 36 bombardiers japonais envoient par le
fond le destroyer américain . Le 8 mai, les Japonais envoient 70
bombardiers à l’assaut des deux porte-avions américains et endommagent
gravement le , qui reçoit deux torpilles sur son flanc gauche et
deux bombes sur l’avant. Le est atteint par une bombe de
400 kg. Du côté japonais, le a reçu notamment deux bombes des
avions du et d’autres bâtiments japonais de moindre tonnage
sont gravement endommagés.
■
Trois semaines seulement après l’échec de la mer de Corail, l’opération
Mi est lancée. Le rapport de force entre les deux adversaires est très
inégal. Les Américains n’ont pas encore rattrapé leurs pertes de Pearl
Harbor et ne disposent que de trois porte-avions, tandis que les Japonais
en ont trois fois plus. Ils n’ont qu’une dizaine de croiseurs, les Japonais
une trentaine. Ils ne disposent que d’une quinzaine de destroyers, les
Japonais 70…
Mais les Japonais ignorent que les Américains sont parvenus, une fois de
plus, à percer les codes secrets japonais baptisés « ». Ainsi, dès le
20 mai, les Américains prennent connaissance du projet de Yamamoto, ce
qui annule l’effet de surprise espéré par les Japonais. Grâce aux
informations transmises par les messages décryptés, les Américains évitent
le barrage de sous-marins japonais mis en place entre Midway et Hawaï.
L’amiral Chester Nimitz, commandant en chef de la flotte du Pacifique,
peut faire partir à temps leurs porte-avions, le , l’ et le
, de la base de Pearl Harbor.
Au cours des semaines qui précèdent l’attaque, les Japonais ont divisé
leurs forces navales en trois groupes. Le premier est une force d’attaque
confiée à l’amiral Nagumo et placée en avant-garde. Elle est composée
notamment de quatre porte-avions transportant 250 avions (l’ , le
, le et l’ , qui ont participé à l’attaque de Pearl Harbor
quelques mois auparavant), de 3 croiseurs et de 15 destroyers. Le second
groupe, qui est une force d’invasion, est composé d’une flotte de
débarquement avec 5 000 hommes et commandée par l’amiral Kondo. Le
troisième groupe, où se trouve l’amiral Yamamoto, comprend la majeure
partie de la flotte aéronavale, dont un porte-avions léger, la plupart des
croiseurs et des destroyers, des cuirassés dont le puissant . Il se
trouve placé en arrière des deux autres formations.
Par ailleurs, les Japonais entament une attaque de diversion menée sur les
îles Aléoutiennes Attu et Kiska, dans le Pacifique Nord. Mais les
Américains, connaissant l’absence d’intérêt stratégique de cet archipel, ne
se laissent pas prendre au piège et n’envoient qu’une escadre de croiseurs.
Le bilan de l’opération Mi est bien plus élevé pour les Japonais (3 500
hommes tués, 332 avions, 4 porte-avions et 1 croiseur perdus), que pour
les Américains (300 hommes tués, 147 avions, 1 porte-avions et 1
destroyer perdus).
C’est une immense victoire pour les Américains car elle efface
l’humiliation de Pearl Harbor et amorce leur reconquête du Pacifique. En
outre, cette bataille confirme la supériorité du rôle du porte-avions dans
la guerre du Pacifique. Les historiens inscrivent par conséquent cette
bataille de Midway comme un véritable tournant dans le déroulement de
la guerre dans le Pacifique.
À l’issue de cette bataille et en dépit de leur échec, les forces japonaises
demeurent importantes et redoutables. À la suite de Midway, les Japonais
sont contraints de renoncer au Pacifique Centre, mais ils poursuivent
néanmoins leur progression dans la zone sud-ouest du Pacifique, le long
de l’archipel des îles Salomon, ainsi qu’en Nouvelle-Guinée.
De mars à juillet 1942, leur progression leur permet de conquérir
notamment l’île de Guadalcanal, au sud-est des îles Salomon, à proximité
des côtes australiennes. En outre, ils réussissent bien facilement, début
juin, à prendre les îles Attu et Kiska, dans l’archipel des Aléoutiennes.
Mais celles-ci s’avèrent peu intéressantes sur le plan militaire. Le 15 août
suivant, les Américains reprendront l’île de Kiska désertée par les
Japonais. Il s’agit alors surtout d’en faire une opération psychologique
auprès de la population américaine, lui prouvant ainsi que les Japonais ne
peuvent s’en prendre à l’Alaska.
Pour contrer les Japonais dans le sud-ouest du Pacifique, les Américains
adoptent une stratégie de reconquête des îles du Pacifique, qualifiée de
« saute-mouton ». Bien que la priorité soit donnée à la guerre en Europe,
le général MacArthur, nommé en avril 1942 commandant en chef allié
des forces du sud-ouest du Pacifique, persuade les autorités civiles qu’une
contre-attaque est nécessaire.
■
Au début du mois de juillet 1942, les Américains découvrent que les
Japonais ont commencé à construire un aéroport à Guadalcanal, au cours
du mois de juin 1942. Celui-ci leur permettrait d’atteindre l’Australie,
située à 1 500 kilomètres, et de dominer ainsi le sud-ouest du Pacifique.
De plus, les Japonais ont débarqué à Buna, au nord de la Papouasie, et
entendent gagner Port-Moresby, qu’ils avaient échoué à prendre au cours
du mois de mai précédent, par voie terrestre, en descendant vers le sud de
la Nouvelle-Guinée à travers la jungle et la montagne, et soutenus grâce à
leur base de Guadalcanal.
Pour contrer la menace que les Japonais font peser à la fois sur l’Australie
et sur la Nouvelle-Guinée, les Américains mettent en place une stratégie
offensive sur les îles Salomon et décident d’intervenir d’abord à
Guadalcanal même. Leur objectif est de reconquérir toutes les îles du
Pacifique prises par les Japonais.
Parallèlement à ces défaites navales, les 15 000 Japonais présents sur l’île
sont de plus en plus isolés. Ils souffrent de maladies tropicales et
manquent de vivres et de munitions, car les destroyers de ravitaillement
ne parviennent plus à passer. Ceux-ci sont sans cesse repoussés par les
Américains qui, eux, bénéficient de renforts et atteignent près de 60 000
hommes en novembre 1942.
Le 31 décembre 1942, l’île de Guadalcanal est sous le contrôle des
Américains. Guadalcanal se termine, symbole de la « guerre d’usure ». Le
bilan est très dur pour les Japonais. Du 7 août au 31 décembre 1942, les
pertes matérielles sont à peu près équivalentes, chacun des belligérants
déplorant la perte de 24 navires et d’environ 600 avions. Mais les pertes
humaines sont très inégales puisque, sur 35 000 hommes, les Japonais en
ont perdu 24 000, tandis que les Américains dénombrent 3 000 tués.
Au début de février 1943, après que l’état-major japonais a décidé
d’évacuer les rescapés de la 17e armée, les Japonais quittent Guadalcanal
et se replient au centre des îles Salomon.
Désormais, les efforts se portent sur l’Alsace occupée, car la 1re armée
française entend profiter de l’affaiblissement des Allemands. Le 1er corps
du général Bethouard, au sud, et le 2e corps du général de Montsabert, au
nord, bénéficient fin janvier des renforts du 21e corps américain. Le
e
9 février, un communiqué du général de Lattre annonce : «
■
Iwo Jima est une île de taille modeste (8 kilomètres de long sur 4
kilomètres de large), où les Japonais ont aménagé trois petits aéroports.
Une fois consolidés par les Américains, ceux-ci serviraient de parfaits
tremplins pour lancer des raids de bombardiers B-29 sur le Japon. L’état-
major japonais est pleinement conscient de cet enjeu stratégique et a
même envisagé de faire sauter l’île, avant de lui préférer une autre
solution pour la rendre imprenable.
Iwo Jima peut désormais servir de base aux Américains, qui se consacrent
cette fois à la prise de l’île d’Okinawa.
■
La conquête de l’île d’Okinawa, qui correspond à l’opération Iceberg, fait
partie d’un plan bien plus important consistant à envahir le Japon.
Dans cet objectif, l’île d’Okinawa servirait de point d’appui idéal pour les
troupes américaines : celles-ci construiraient des bases sur toute la
longueur de l’île, soit près de 100 kilomètres. Les bombardiers pourraient
alors disposer de plus de carburant et emporter plus de bombes qu’en
partant des bases de l’archipel des Mariannes, situées à plus de 4 500
kilomètres des côtes nippones.
La difficulté est de prendre cette île défendue par 120 000 soldats
japonais. Il faut donc préalablement l’isoler. Dès le 26 mars 1945, des
cuirassés de la britannique, soutenant leurs alliés américains,
lancent ainsi une attaque sur les bases aériennes japonaises situées sur les
îles Sakaishima, entre Formose et Okinawa. Le même jour, les
Américains prennent les îles Kerama et Keise. De plus, avant le
débarquement est organisé un bombardement intensif des bases
japonaises de Kyushu, à 500 kilomètres d’Okinawa, pour limiter les
capacités de riposte des Japonais.
D’importants moyens sont mobilisés en prévision d’un débarquement sur
Okinawa : la 10e armée commandée par le général Simon Buckner,
comprenant 5 divisions ainsi que 3 divisions du corps des , soit
près de 550 000 hommes. Ceux-ci bénéficient d’un appui en mer de la
réunissant 18 porte-avions, 10 navires de ligne et une force
amphibie de près de 1 400 bâtiments, ainsi que du soutien de la flotte
britannique.
Les Américains sont désormais situés à près de 500 kilomètres des côtes
japonaises et peuvent envisager un débarquement sur le sol nippon.
Toutefois, cette double victoire américaine à Iwo Jima et à Okinawa a
coûté cher en vies humaines. Les estimations réalisées quant au coût
d’une invasion du Japon, compte tenu du fanatisme des soldats japonais,
sont pessimistes, prévoyant au moins 250 000 morts parmi les assaillants
américains.
Les stratèges sont donc partisans de bombardements massifs sur les villes
japonaises afin de conduire la population, à bout de forces et démoralisée,
à renoncer à la poursuite de la guerre. Mais compte tenu de la forte
résistance japonaise dans les récents combats, civils compris, il n’est pas
certain que la population cède à cette forme de guerre psychologique. Les
Américains s’attendent donc à une guerre longue.
La découverte de la bombe atomique, expérimentée avec succès dans le
désert du Nouveau-Mexique trois semaines après la victoire d’Okinawa,
change la donne : par l’emploi de cette arme terrifiante, l’invasion du
Japon peut être évitée. L’arme atomique est ainsi lancée le 6 juin sur la
ville d’Hiroshima, puis le 9 juin sur celle de Nagasaki, faisant environ
200 000 victimes dans d’atroces conditions. Il aura néanmoins fallu ces
deux bombes aux Américains pour que le Japon, anéanti, accepte la
capitulation, le 14 août.
Celle-ci est signée le 2 septembre 1945 par l’empereur Hiro-Hito, devant
le général MacArthur, commandant en chef des forces alliées dans le
Pacifique, sur le porte-avions américain , marquant la fin de la
Seconde Guerre mondiale.
Depuis la seconde moitié du XIXe siècle, les Français sont présents dans
une grande partie de la péninsule indochinoise, en Asie du sud-est. Leur
colonie d’Indochine comprend le Tonkin, l’Annam et la Cochinchine
(trois régions qui composent l’actuel Vietnam), le Laos et le Cambodge.
À l’issue de la Seconde Guerre mondiale, les nationalistes, membres du
Viêt-minh, le parti communiste indochinois, réclament le départ des
Français et l’indépendance de l’Indochine française. Ils refusent le
maintien de l’occupation coloniale française, en raison de l’attitude du
gouvernement de Vichy pendant la guerre et du rôle important joué par
les nationalistes dans la libération de leur pays envahi par les Japonais à
partir de juillet 1941. À l’initiative de leur leader Hô Chi Minh, ils
proclament l’indépendance de la « république démocratique du
Vietnam » le 2 septembre 1945, jour de la reddition officielle du Japon et,
donc, de la fin de la Seconde Guerre mondiale.
La France envoie deux émissaires, Jean Sainteny et le général Leclerc,
pour discuter avec Hô Chi Minh de l’avenir de la colonie française. Elle
entend maintenir celle-ci dans l’Union française, en dépit d’un statut
d’autonomie qui ne fait que « l’associer » à la France sans lui donner son
indépendance. Les nationalistes jugent cette solution inacceptable et, en
novembre 1946, éclate la guerre d’Indochine.
Le siège de Diên Biên Phu, au printemps 1954, correspond à la dernière
phase de cette guerre qui dure depuis presque huit ans.
De son vrai nom Nguyen tat Than, il est né en 1890 à Kiêm Liên,
dans la province de Nghê An située dans ce qui est alors l’Indochine
française, mais qui deviendra le Vietnam.
Après de courtes études à Hué, il quitte l’Indochine en 1911 et
parcourt l’Europe occidentale et la côte est américaine, vivant de
« petits boulots ». Il se rend en France en 1919, où il devient membre
des Jeunesses socialistes.
En 1921, marqué par le principe du droit des peuples à disposer d’eux-
mêmes défendu deux ans plus tôt par le président américain Wilson au
congrès de Versailles, il rédige un manifeste intitulé « Revendications
du peuple annamite » contre la colonisation française, et participe au
congrès de Tours.
Il se rend ensuite en Union soviétique, puis en Chine et à Hong Kong
où, recherché pour ses activités révolutionnaires, il finit par être arrêté
par les services anglais. En 1930, il fonde le parti communiste
indochinois. Il effectue un nouveau séjour en Union soviétique entre
1936 et 1937, au cours duquel il devient cadre du Komintern. Il
s’installe ensuite à Pac Po, dans la province de Cao Bang, avant de
retourner en Chine où il est de nouveau arrêté et emprisonné
plusieurs mois.
Revenu au Vietnam, il rebaptise en 1941 son parti le « Front
d’indépendance du Vietnam » (« Viêt-minh » en Vietnamien), et,
installé dans le maquis, il organise la résistance face à l’occupant
japonais en Indochine. En 1942, après avoir pris le nom de « Nguyen
aï Quoc », il adopte celui d’« Hô Chi Minh », qui signifie
approximativement en vietnamien : « celui qui apporte les lumières ».
Le 2 septembre 1945, il autoproclame l’indépendance du Vietnam,
mais celle-ci n’est pas reconnue, ce qui amène Hô Chi Minh à
négocier avec Jean Sainteny, l’envoyé du gouvernement français. En
mars 1946, le Vietnam devient un État libre, mais membre de l’Union
française, dont les prérogatives n’ont pas été précisées initialement, ce
que refuse Hô Chi Minh. Le 6 janvier 1946, celui-ci est devenu
président de la république du nouveau Vietnam, grâce au succès du
Viêt-minh lors de l’élection de la nouvelle Assemblée constituante.
Les négociations sont bientôt anéanties par l’incompréhension entre
le leader indochinois et le gouvernement français.
En novembre 1946, Hô Chi Minh prend l’initiative de lancer la
guérilla contre la France, qui riposte en bombardant le port
d’Haiphong. La guerre d’Indochine va durer huit ans, de 1946 à 1954.
Pendant toute cette période, Hô Chi Minh dirigera le Viêt-minh.
Élu président de la république démocratique du Vietnam du Nord en
1954, il entend réunifier le pays sous les principes du socialisme et
devient secrétaire général du parti communiste de 1956 à 1961.
Il décède à Hanoï en 1969, en pleine guerre du Vietnam, et ne verra
pas son ambition se réaliser. Ce n’est qu’en 1975 que le pays se
réunifiera sous un régime communiste, à la suite de la chute de
Saïgon, la capitale du Vietnam du Sud, rebaptisée depuis en son
honneur « Hô Chi Minh-ville ».
Elle dure depuis bientôt trois ans lorsque survient, comme chaque année
entre la fin janvier et la mi-février, la période du Têt Ngyen Dau. Cette
fête vietnamienne de la nouvelle année lunaire correspond depuis le début
de la guerre à une période de trêve. Aussi les militaires américains ont-ils
relâché leur vigilance, les attaques des Viêt-congs devant nettement
diminuer à cette période.
Pourtant, les services de renseignements américains ont signalé
récemment des risques réels en provenance du FNL. L’attaque récente, le
21 janvier 1968, de la base de Khe Sanh, dans la partie Nord du Sud-
Viêtnam à proximité de la frontière avec le Nord-Viêtnam et le Laos,
pourrait correspondre aux menaces détectées par les services de
renseignements. Les Américains ont déplacé des soldats pour renforcer la
défense de cette base et de la zone frontalière, au détriment des villes du
sud du pays.
En réalité, cette attaque n’est qu’une manœuvre de diversion orchestrée
par le gouvernement communiste de Hanoï et par le FNL, qui entendent
lancer une offensive de grande ampleur contre le Sud-Viêtnam.
Le 31 janvier 1968, premier jour du Têt, le FNL lance une première
offensive en différents points au centre du Sud-Viêtnam. Les soldats
nord-vietnamiens, mêlés aux civils, réussissent à se fondre dans la foule et
parviennent à tirer sur des bâtiments officiels. Ils sont bientôt arrêtés par
les hommes de l’ARVN, l’armée sud-vietnamienne. Une fois de plus, on
pense qu’il s’est agi de l’offensive annoncée et que l’alerte est désormais
passée.
Or, c’est un piège : tandis que la surveillance se relâche, l’assaut est lancé
sur les grandes villes de province du Sud. Hue, l’ancienne capitale, est
notamment le théâtre de violents combats de rues et va devenir la ville la
plus touchée, l’ordre n’étant rétabli par les qu’à la fin février.
Parvenus dès le lendemain de l’offensive à Saïgon, la capitale, les soldats
du FNL s’en prennent aux bâtiments gouvernementaux, dont le palais de
l’Indépendance, le siège de la radio nationale, l’ambassade des États-Unis
et le quartier général américain. Au total, une centaine de cibles urbaines
seront touchées au Sud-Viêtnam.
Commandés par le général Westmoreland, les Américains se retrouvent
débordés par les forces nord-vietnamiennes au pire moment, alors qu’ils
sont affaiblis dans leur système de défense. Face aux 85 000 combattants
du FNL, la victoire américaine est loin d’être acquise. Il faut attendre la
fin du mois de mars pour que les Américains et les forces de l’ARVN
reprennent l’avantage et que les combats cessent officiellement.
L’armée nord-vietnamienne a perdu 45 000 hommes, soit plus de la
moitié des soldats ayant participé à l’offensive, les Sud-Vietnamiens ont
perdu 11 000 hommes et les Américains, 2 000.
L’offensive du Têt est un échec sur le plan militaire pour les Nord-
Vietnamiens, mais un succès politique car elle a un effet psychologique
redoutable sur les Américains et les Sud-Vietnamiens. Elle prouve
d’abord que les villes du Sud ne sont pas imprenables, mais aussi que les
Américains ne sont pas invulnérables et peuvent être mis en très grande
difficulté. Ce faisant, elle redonne confiance aux combattants nord-
vietnamiens et affaiblit le moral de ceux du Sud. Elle amène aussi la
population américaine, qui suit de plus en plus les événements de la
guerre du Vietnam à la télévision, à se poser bien des questions sur
l’utilité de l’intervention des États-Unis.
Plus encore, l’offensive du Têt n’est pas étrangère au discours du
président Johnson aux Américains, le 31 mars 1968. Celui-ci annonce,
d’une part, la fin des bombardements sur le Nord-Viêtnam et, d’autre
part, qu’il ne se représentera pas aux prochaines élections présidentielles.
Ce discours en faveur de la paix débouchera sur l’ouverture de
négociations à Paris, Hanoï et Washington.
Toutefois, le retrait des troupes américaines ne sera effectif que cinq ans
plus tard, sous la présidence de Richard Nixon qui signera les accords de
Paris le 27 mai 1973.
Ce n’est qu’en avril 1975, avec la chute de Saïgon consacrant la victoire
définitive des troupes communistes, que la guerre du Vietnam prend fin.
Le Vietnam est officiellement réunifié en juillet 1976, sous le nom de
« république socialiste du Vietnam », avec Hanoï pour capitale.
L’État d’Israël est apparu officiellement le 14 mai 1948, à la suite d’un
plan de partage des Nations unies. La résolution 181 du 29 novembre
1947 prévoyait de faire cohabiter un État israélien et un État palestinien,
tandis que les Lieux saints de Jérusalem et de Bethléem seraient placés
dans une zone internationale. Malgré le refus des pays arabes voisins de
reconnaître les dispositions de cette résolution, ces derniers ont envahi
l’État hébreu, en vain, dès sa création. Depuis, aucun État palestinien n’a
encore vu le jour et des centaines de milliers de Palestiniens sont devenus
des réfugiés.
Hormis une crise grave survenue en 1956 avec l’invasion du Sinaï par les
troupes israéliennes qui soutenaient l’opération franco-britannique contre
Nasser, les relations entre l’État hébreu et ses voisins sont restées froides
et tendues.
Le début des années 1960 voit ressurgir le problème israélo-palestinien :
après que les Israéliens ont décidé d’aménager les eaux du Jourdain pour
leurs propres cultures dans le Néguev, les pays arabes en profitent pour
resserrer leurs liens afin de s’opposer plus efficacement à l’État hébreu.
La conférence du Caire, organisée en janvier 1964, prend un certain
nombre de décisions, dont un plan de détournement des eaux du
Jourdain, et autorise l’Organisation de libération de la Palestine (OLP),
nouvellement fondée, à prendre part en tant qu’observateur aux sommets
arabes. Une armée de libération de la Palestine est également fondée et
reçoit l’autorisation de recruter dans tous les pays abritant des
Palestiniens. La tension ne peut désormais que s’accroître en Israël et
dans les pays arabes voisins.
Tandis que 250 000 Palestiniens prennent à leur tour le chemin de l’exil
vers la Jordanie, la Syrie ou le Liban, le Conseil de sécurité des Nations
unies vote la résolution 242, le 27 novembre suivant. Celle-ci exige
notamment la restitution de ces territoires, mais tout en reconnaissant le
droit à l’existence et à la sécurité d’Israël.
Depuis cette date, l’État d’Israël ayant été reconnu par l’Égypte en 1979,
le Sinaï lui a été rendu. La paix a également été signée avec la Jordanie en
1994. La bande de Gaza, évacuée à l’été 2005 par les colons israéliens, et
la majeure partie de la Cisjordanie devraient, un jour prochain, constituer
le futur État palestinien. En revanche, le Golan demeure occupé par les
armées israéliennes, la Syrie refusant toute négociation avec l’État
hébreu, qu’elle ne reconnaît toujours pas.
En outre, le sort des colonies juives situées à Jérusalem-Est, ainsi que la
gestion des Lieux saints et le statut de la Ville ne sont pas non plus réglés,
les Palestiniens entendant faire de Jérusalem leur future capitale, ce que
refusent les Israéliens.
En 1970, Gamal Abdel Nasser disparaît et Anouar el-Sadate, l’un de ses
principaux collaborateurs, lui succède à la présidence de l’Égypte. Les
années 1969-1970 ont été marquées par une guerre d’usure (tirs de part et
d’autre, raids de l’aviation israélienne, etc.) entre Égyptiens et Israéliens
au niveau de la zone du canal de Suez. Un des premiers objectifs de
Sadate est donc de parvenir à un accord concernant les territoires
occupés, mais il échoue à s’entendre avec les Israéliens.
Bientôt, en accord avec le chef de l’État syrien, Hafez el-Assad, et d’autres
dirigeants arabes, il décide d’une nouvelle guerre qui se poursuivrait
jusqu’à la reconquête des territoires perdus en 1967 et la restauration des
droits du peuple palestinien. Depuis la guerre des Six Jours, en effet, les
anciens vaincus ont eu l’occasion de méditer leur échec : leurs soldats ont
été formés par des conseillers soviétiques, leur aviation est protégée d’une
attaque au sol par des abris et leur territoire est défendu notamment par
des missiles sol-air SAM soviétiques et des missiles antichars.
Ayant stabilisé le front oriental face à leur ennemi le plus faible, la Syrie,
les Israéliens privilégient de renforcer le front de l’ouest, dans le Sinaï,
contre les Égyptiens. Leur confiance est réconfortée par la mise en place
par les Américains, à partir du 11 octobre, d’un pont aérien qui, les
Açores, fournit aux Israéliens des armes et du matériel performant.
L’URSS met également en place un pont aérien pour les pays arabes.
Au cours de la nuit du 15 au 16 octobre, le général israélien Ariel Sharon
réussit à faire franchir le lac Amer à ses blindés, grâce à des barges
amphibies. 24 heures plus tard, ceux-ci passent le canal de Suez, puis
marchent sur Le Caire. Une tête de pont, défendue par cinq brigades
israéliennes, est mise en place.
Le 19 octobre, la 3e armée égyptienne est mise en difficulté par les blindés
israéliens et bombardée par l’aviation israélienne, les installations
antiaériennes égyptiennes ayant été détruites au sol. Le 24 octobre, la 3e
armée égyptienne est prise au piège à l’est du canal et la ville de Suez est
occupée par les Israéliens. Ce n’est que ce jour-là que les troupes
israéliennes acceptent de déposer les armes, après que l’Union soviétique
et les États-Unis ont menacé d’intervenir militairement pour séparer les
deux camps.
Entre-temps, le Conseil de sécurité a demandé un cessez-le-feu, le
21 octobre, sur les vives instances de Moscou et de Washington, inquiets
du bouleversement provoqué dans le monde arabe. En effet, quatre jours
plus tôt, les pays arabes membres de l’OPEP (Organisation des pays
exportateurs de pétrole), menés par l’Arabie Saoudite, ont annoncé un
embargo sur leurs exportations de pétrole à destination de l’Europe et des
États-Unis, tant que les armées israéliennes n’auront pas évacué les
territoires occupés.
Ces pays veulent ainsi punir Israël et, surtout, les États-Unis qui l’ont
soutenu pendant cette guerre. Ils profitent aussi d’une occasion unique
pour s’affirmer enfin face aux compagnies pétrolières anglo-saxonnes, les
, qui refusent une meilleure redistribution des dividendes de l’or
noir.
Les hostilités militaires s’ouvrent le 1er mai 1982, lorsque les Britanniques
bombardent Port-Stanley, tandis que l’aviation argentine, basée
essentiellement en Patagonie, attaque les chasseurs britanniques. Pour la
première fois depuis 1945, s’ouvre une nouvelle bataille aéronavale.
Le lendemain, grâce à un de leurs sous-marins nucléaires d’attaque, les
Anglais coulent l’unique croiseur argentin, le , qui a osé
poursuivre sa route au-delà de la limite des 200 milles.
Les Argentins, qui ne peuvent utiliser les quelques bâtiments dont dispose
leur marine, lancent leur aviation. C’est elle qui va supporter l’essentiel de
l’effort militaire argentin et remporter plusieurs succès, en infligeant de
lourdes pertes aux Britanniques. Le 4 mai, elle coule notamment le
destroyer britannique , touché par un missile Exocet58.
Fin mai, le combat devient également terrestre : les Britanniques
débarquent à San Carlos et s’emparent de Port-Darwin, puis de Port-
Stanley qu’ils ont encerclé.
Les soldats argentins, qui sont souvent de jeunes appelés, se retrouvent
assaillis par les troupes de choc britanniques. Ils doivent se battre et
progresser sous le feu de l’artillerie navale et de l’aviation. Après un
dernier assaut mené par 4 500 soldats professionnels britanniques sur le
sol malouin, les soldats argentins participant à la bataille décident de se
rendre le 13 juin.
Le lendemain, le général argentin Menendez, avec l’accord de son
gouvernement, capitule officiellement.
Le 2 août 1990, l’Irak envahit le Koweït avec une armée de 100 000
hommes.
En réalité, le contrôle des îles Warba et Boubiane, dont la souveraineté
est disputée entre les deux pays, permettrait à Saddam Hussein de
retrouver un large accès sur le Golfe lui assurant l’argent nécessaire à son
économie dévastée.
L’Irak, qui possède déjà 10 % des réserves mondiales de pétrole,
obtiendrait ensuite une place prépondérante au sein de l’OPEP
(Organisation des pays exportateurs de pétrole) grâce à l’annexion du
Koweït, comptabilisant alors environ 20 % des réserves mondiales. À ces
bénéfices, s’ajouteraient les 122 milliards de dollars que détient le Koweït
en investissements, source d’enrichissement considérable.
Enfin, Saddam Hussein n’a pas perdu son ambition d’affirmer son
leadership sur la région… Le fait que son pays soit le premier importateur
d’armes du monde (3,5 milliards de dollars en 1988) confirme le fait qu’il
se donne les moyens d’y arriver, au moins par la force.
Les combats sur le sol koweïtien sont brefs et, dès le 3 août, tous les
points clés du pays sont contrôlés par l’armée irakienne. L’émir
koweïtien, le Cheikh Jaber, se réfugie en Arabie Saoudite.
Immédiatement, la communauté internationale réagit : le jour même de
l’offensive irakienne, le Conseil de sécurité des Nations unies adopte la
résolution 660 exigeant le retrait immédiat des troupes irakiennes. La
Ligue arabe condamne elle aussi l’invasion et appuie cette résolution dès
le lendemain. Pour empêcher l’Irak de mettre la main sur les
investissements financiers koweïtiens, les Occidentaux gèlent ceux-ci,
ainsi que les avoirs irakiens.
Saddam Hussein veut dissuader les Occidentaux d’intervenir : le 6 août, il
réunit les quelque 6 000 ressortissants occidentaux présents dans la zone,
plus d’une centaine d’entre eux devant servir de « boucliers humains » sur
des sites stratégiques irakiens. Le jour même, les Nations unies décident
le boycott commercial, financier et militaire de l’agresseur.
Le lendemain, soit moins d’une semaine après l’arrivée au Koweït des
troupes irakiennes, le président des États-Unis, George Bush, annonce sa
décision d’intervenir directement. La Grande-Bretagne, la France, le
Canada et l’Italie choisissent de participer à l’intervention, y compris sur
le terrain. Ils sont rapidement suivis par l’Égypte, la Syrie, le Maroc et
l’Arabie Saoudite, disposés à prêter leur assistance à cette coalition
militaire. L’Iran, quant à lui, ne bougera pas, Bagdad ayant pris la
précaution de signer avec Téhéran un traité de paix dans lequel l’Irak
renonce à toutes ses anciennes revendications.
Le 29 août, confirmant la déclaration américaine, une nouvelle résolution
onusienne autorise le recours à la force si l’Irak n’évacue pas le Koweït
d’ici le 15 janvier 1991. Or, si l’Irak refuse toujours de se retirer de ce
pays qui est devenu sa « dix-neuvième province », les négociations
entamées entre Javier Pérez de Cuellar, secrétaire général des Nations
unies, et Tarek Aziz, ministre irakien des Affaires Étrangères, réussissent
le 3 septembre à faire relâcher les otages devant servir de boucliers
humains. Au grand soulagement de tous, les 130 Occidentaux quittent
alors Bagdad pour Paris.
Le 15 janvier 1991, date limite imposée par l’ONU, Saddam Hussein n’a
pas retiré ses troupes. L’opération Tempête du désert reçoit donc
confirmation.
À partir du 17 janvier et jusqu’au 23 février, la coalition dirigée par le
général américain Schwartzkopf, commandant en chef des armées alliées,
bombarde les positions militaires et les infrastructures irakiennes, visant
également Bagdad et portant en quelques heures des coups décisifs au
potentiel ennemi.
Deux jours après le début de cette opération, dans l’espoir de pousser
Israël à entrer dans la guerre et de faire éclater la coalition à laquelle
participent plusieurs pays arabes, l’Irak lance sur Israël six missiles Scud
qui atteignent Tel-Aviv et Haifa, faisant plusieurs victimes.
Du 24 au 28 février, la coalition intensifie ses bombardements,
notamment avec des bombes au napalm, très meurtrières, et lance une
offensive contre les positions irakiennes, qui ne bénéficient pas d’une
couverture aérienne suffisante pour se protéger. Les tranchées sont
détruites et les défenseurs ensevelis, parfois même avant d’avoir
combattu. Quant aux chars irakiens, ils sont immobilisés par l’intensité
des bombardements alliés. Désorganisée et démoralisée, l’armée
irakienne enregistre un grand nombre de victimes, mais aussi de
désertions.
Fortes de leur supériorité, les troupes alliées pénètrent en Irak et au
Koweït, capturant plusieurs milliers de soldats irakiens. Tandis qu’une
opération de débarquement est simulée à l’est du territoire, depuis le
golfe Persique, les troupes terrestres de la coalition, parties d’Arabie
Saoudite, avancent dans un large mouvement d’enveloppement, sur un
front de 500 kilomètres.
Dès le 26 février, alors que les blindés alliés ont réussi à couper la retraite
de la garde républicaine irakienne, Saddam Hussein consent à accepter les
résolutions du Conseil de sécurité. Mais bien qu’il annonce le retrait de
ses troupes du Koweït, le dictateur irakien s’en prend à la population
civile. Il met le feu aux puits de pétrole koweïtiens et, en déversant le
pétrole dans le Golfe, provoque une marée noire. Le 28 février, Koweït
City est finalement libérée par les forces alliées.
Le 2 mars, les combats prennent définitivement fin lorsque Saddam
Hussein, vaincu, accepte la résolution 686 du Conseil de sécurité qui fixe
les conditions de cessation des hostilités et instaure un cessez-le-feu
provisoire. Un mois plus tard, l’Irak accepte également la résolution 687
décrétant un cessez-le-feu définitif dans le Golfe.
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