Guide D'achat Des Casques Pour Le Studio - Audiofanzine
Guide D'achat Des Casques Pour Le Studio - Audiofanzine
Guide D'achat Des Casques Pour Le Studio - Audiofanzine
Q ue ce soit pour faire des prises, de l'édition, bosser la nuit ou s'affranchir d'une acoustique médiocre, le casque est l'un des
meilleurs ami que puisse avoir le home studiste. Reste à savoir quel(s) casque(s) acheter pour quels usages.
Les enceintes ont beau être le dispositif d’écoute privilégié en studio, le casque n’en est pas moins un autre type d’écoute indispensable pour l’en-
registrement, l’édition et même, comme nous allons le voir, le mixage ou le mastering. Inutile de dire qu’il faut le choisir avec soin. Pour ce faire, il
convient toutefois de bien comprendre les enjeux qui sont ceux du casque en studio ainsi que les différents types de casques pouvant répondre à
nos besoins.
Et pour pénétrer ce foisonnant marché, le mieux est dans un premier temps de nous pencher sur l’histoire avec un petit h comme headphones.
Bien avant qu’on imagine l’utiliser pour écouter ou produire de la musique, le casque répond d’abord à un
besoin professionnel. À la fin du 19e siècle, toute communication téléphonique passe par des opérateurs
ou des opératrices qui établissent la liaison entre l’appelé et l’appelant à la main, en connectant des
câbles sur un patch. À mesure que les villes et les particuliers s’équipent, ce qui n’était d’abord qu’un
simple petit tableau devient vite une centrale téléphonique où des dizaines de personnes travaillent côte
à côte et reçoivent, tout le jour durant, des appels qu’elles doivent connecter à leurs destinataires. Inutile
de dire que les salles sont bruyantes et qu’il est parfois dur d’entendre ce que veut le correspondant dans
le brouhaha, tandis que le signal véhiculé est bien faible et que le bras qui tient le combiné fatigue. Pour
alléger la pénibilité de ce nouveau métier tout en le rendant plus efficace, Ezra Gilliland, ami de Thomas
Edison travaillant pour la Bell Telephone Compagny, imagine un dispositif portable qui aurait été utilisé
dès 1881, joignant un émetteur à un récepteur et reposant sur les épaules de l’opérateur. Notez que le
mot transportable serait plus juste vu le poids de l’engin : de 3 à 5 kg !
Pourquoi une telle idée ? Pour pouvoir écouter du son sans être importuné par le bruit ambiant comme l’inverse : ne pas importuner les autres avec
ce que l’on écoute. Cette qualité originelle demeure d’ailleurs la première raison d’utiliser un casque : imaginez à quoi pourrait bien ressembler un
wagon de métro si tout le monde y écoutait sa musique sur des enceintes.
Mais le caractère isolant du casque et la proximité des haut-parleurs avec nos tympans présente en outre un deuxième avantage : cela permet
d’entendre des choses extrêmement fines qu’on serait bien en peine de distinguer avec une paire d’enceintes.
C’est notamment pour cette raison qu’en 1910, l’armée s’intéresse au casque inventé par Natha-
niel Baldwin pour le secteur de la téléphonie et qui, plus que le dispositif rustique de Gilland ou les
autres proto-casques d’Ernest Mercadier, est considéré comme le premier vrai casque de l’histoire.
Il faut dire que le design de ce dernier est déjà très proche du casque tel qu’on le connait aujour-
d’hui. L’objectif de l’US Navy ? En équiper ses opérateurs radios puis, plus tard, les sous-mariniers
préposés à l’écoute du Sonar. Pour ces derniers, le moindre petit chuintement peut révéler un pois-
son rouge, une baleine ou une torpille ennemie. Il faut donc qu’ils disposent d’un système d’écoute
parfaitement isolé et offrant la restitution la plus précise possible.
La suite de l’histoire ne sera qu’une amélioration du concept au fil des usages et besoins. Au-delà
des applications militaires, téléphoniques ou radiophoniques, le casque va devenir un équipement
accessible au grand public avec l’explosion de la hi-fi tandis que certaines grandes compagnies
vont le perfectionner petit à petit.
Les allemands de Beyerdynamic inventent ainsi le premier casque basé sur des transducteurs dynamiques en 1937 (le DT48), les américains de
Koss le premier casque stéréo en 1958 (le SP/3), les japonais de Stax le premier casque électrostatique en 1959 (SR-1), les allemands de Senn-
heiser le premier casque ouvert en 1968, les américains de Bose le premier casque à réduction de bruit en 1989, et entre le marché industriel et la
hi-fi, quantité de sociétés vont écrire l’histoire du casque. Il est à noter que bon nombre d’entre elles sont aussi constructeurs de micros car, après
tout, un transducteur est un transducteur comme nous l’avions vu lors de notre guide d’achat sur les enceintes. On pense notamment à
AKG, Sennheiser, Audio-Technica, Sony, etc.
Bref, du low a coulé sous les arceaux au point qu’il n’est peut-être pas inutile de préciser, avant de rentrer plus vivement dans des détails tech-
niques, ce qu’on appelle aujourd’hui un casque.
Cousin de l’enceinte, le casque est un système d’écoute portable dont le but est de transformer, au moyen de transducteurs, un signal électrique en
son, au contraire du microphone qui lui transforme le son en signal électrique.
Généralement, Il se compose de deux écouteurs abritant les transducteurs et reliés par un arceau, le tout étant complété d’un cordon destiné à le
connecter à une source audio. Comme il existe une multitude de variantes possibles de ce système, on commencera par opérer une grande classi-
fication en fonction de la façon dont le casque se porte, dont ses écouteurs sont en contact avec nos oreilles.
Design du casque
On parle de casque circum-auriculaire (circum-aural en anglais) lorsque les écouteurs englobent toute l’oreille et
reposent sur la tête de l’auditeur. A priori, ce genre de design apporte à la fois un bon confort et favorise l’isolation mais il
implique forcément des écouteurs de grande taille, de sorte que le casque n’a rien de très discret. Précisons que la
plupart des casques utilisés en studio sont de ce type.
Au-delà de ces histoires de formes, un casque se définit d’ailleurs par sa capacité à isoler.
Le design des écouteurs conditionne l’étanchéité du casque et sa capacité à isoler l’auditeur des bruits extérieurs comme à empêcher que le son
diffusé dans le casque soit audible à l’extérieur. Ce choix a cependant une influence sur le rendu sonore comme sur le fait que le casque soit plus
ou moins fatiguant.
On oppose ainsi :
Les casques fermés où l’écouteur est conçu pour être le plus étanche possible. Le but, c’est d’isoler au mieux du bruit extérieur comme ne pas
laisser passer le son du casque vers l’extérieur. Ce design peut présenter deux défauts toutefois par rapport au design ouvert : les ondes et la pres-
sion acoustiques étant confinées dans un petit espace, non seulement le son peut être moins naturel et présenter des basses exacerbées, mais le
casque peut être aussi plus fatiguant à l’usage.
Les casques ouverts où l’écouteur ne cherche pas du tout à être étanche (ce qui peut poser des problèmes pour nous comme nous le verrons)
pour privilégier la qualité du rendu comme le confort.
Les casques semi-ouverts qui sont un entre deux, plus proche toutefois pour l’usage qui nous occupe des casques ouverts que des casques
fermés. Convenons-en en effet : du point de vue d’un courant d’air, une porte à demie-ouverte ne fait pas grande différence avec une porte ouverte.
Le rapport entre casque et micros que nous évoquions plus haut se retrouve dans les technologies employées par les constructeurs :
Transducteurs électrodynamiques :
Il s’agit d’utiliser l’interaction entre un aimant et un électro-aimant (un bobinage de fil électrique très fin) solidaire de la membrane du HP. C’est la
technologie utilisée par l’écrasante majorité des casques en raison de son rapport simplicité/performances/prix. Et c’est la technologie utilisée par
l’écrasante majorité des casques utilisés en studio.
Transducteurs orthodynamiques :
Appelés aussi planar dynamiques, planar magnétiques ou encore isodynamiques, ces transducteurs utilisent comme leur cousins électrodyna-
miques une interaction entre deux champs magnétiques. Il s’agit toutefois d’utiliser un fin plateau incorporant un réseau de minuscules fils pris entre
deux grilles d’aimants placés pôle à pôle. De la sorte, dès qu’on envoie un courant dans le plateau, on perturbe les champs magnétiques, ce qui va
donner lieu à des mouvements utilisés pour mouvoir la membrane.
Transducteurs électrostatiques :
Contrairement aux électrodynamiques et orthodynamiques, les transducteurs électrostatiques n’utilisent pas des aimants pour faire bouger la
membrane du HP, car c’est la membrane elle-même qui bouge directement. Cette dernière est généralement une très fine feuille de Mylar
(quelques microns seulement) qui loge entre deux plaques dont l’une est chargée positivement et l’autre négativement pour que le signal induise un
mouvement de la feuille.
Si nous reviendrons plus tard sur l’intérêt de ces différentes technologies, l’heure est venue de parler dans leur sillage de la façon dont le signal est
acheminé vers le casque. On va parler électricité donc.
Vous vous en rendrez compte en vous intéressant aux spécifications techniques des casques, tous ne présentent pas la même impédance, certains
constructeurs allant même jusqu’à proposer plusieurs versions d’un même modèle avec une impédance différente. Le DT 770 de Beyerdynamic
peut ainsi s’acheter en version 32, 80 ou 250 Ohms.
Rappelons-le : l’impédance, c’est l’opposition qu’exerce un circuit électronique (ici notre casque) sur le passage du courant et qui se définie comme
suit :
Au-delà de cette formule qui doit rappeler quelques cours de physique à certains, on pourrait dire pour les autres que l’impédance peut se voir
comme une forme de friction qui entrave le mouvement des électrons.
Soit. Mais qu’est ce que cela implique pour nos casques ? Rappelons d’abord qu’en marge de leur impédance, tous les casques se distinguent par
leur sensiblité (qu’on appelle encore ça ou là rendement ou efficacité), une donnée qui indique quel niveau sonore est délivré par le casque (en dB
SPL) pour une puissance électrique donnée (en milliWatts abrégé mW) : en général, on nous indique un niveau en dB SPL pour 1 mW de courant.
Or, si le niveau est affaire de puissance, la puissance est quant à elle affaire de tension et d’intensité sur un temps donné (P(t)=U(t)xI(t)), lesquelles
sont soumises à l’impédance. Conclusion : l’impédance va forcément jouer sur le niveau sonore délivré par le casque.
Pourquoi proposer différentes impédances ? Tout simplement pour s’adapter aux différents types d’amplis qu’on trouve sur le marché : 32 Ohms
convient aux baladeurs/smartphones, 80 Ohms aux équipement TV/Hi-fi ordinaires et 250 Ohms ou plus aux équipement de studio et Hi-fi haut de
gamme. Pourquoi de telles différences ? Pour s’adapter à la source d’alimentation des différents appareils. Sur les équipement nomades, la puis-
sance électrique est limitée par l’usage de batteries dont on ne veut pas qu’elles s’épuisent en 3 minutes. Du coup, on opte pour des casques à
faible impédance, ce qui permet à l’ampli d’atteindre le niveau désiré en consommant moins d’énergie.
Dans ces circonstances, vous vous demandez bien pourquoi tout le monde n’utilise pas l’impédance de 32 Ohms, pourquoi les professionnels du
studio préfèrent utiliser des casques à haut impédance. Il y a plusieurs raisons à cela qui tiennent évidemment aux relations qu’entretiennent Z, U
et I que ce soit au niveau de la sortie casque ou du casque lui-même, et qui ont une incidence sur le son. À basse impédance, on observe a priori
plusieurs problèmes sur le plan audio : moins d’energie dans les basses, une plus forte propension à mélanger canal droit et canal gauche (ce
qu’on appelle crossfeed en anglais ou diaphonie en français) et un bruit de fond plus présent, donc un moins bon rapport signal/bruit.
Pourquoi a priori ? Parce que malgré tout, la science évolue et que s’il fallait par exemple lutter contre le bruit de fond créé par les composants élec-
troniques d’autrefois, cet aspect est clairement moins problématique avec les composants modernes tandis que les amplis ont bien progressé. Avec
l’explosion de l’audio nomade, les fabricants rivalisent enfin d’ingéniosité pour proposer toujours plus de qualité avec les basses impédances que
réclament les smartphones et les baladeurs.
Mais au-delà de ces histoires de qualité audio, l’impédance va aussi avoir son importance lorsqu’on souhaite utiliser plusieurs casques en même
temps, comme c’est souvent le cas en studio.
Imaginez que vous souhaitez vous enregistrer Live avec un ami, vous à la guitare acoustique, lui au chant sur un playback de batterie. Chacun
devra évidemment porter un casque pour entendre le playback sans que ce dernier soit enregistré par les micros. Vous me direz que la chose peut
se régler avec un bon vieux câble en Y (un doubleur) ? Certes, mais encore faudra-t-il être attentif aux impédances de sortie de votre appareil
comme aux impédances de vos différents casques car en fonction de celles-ci, vous pourrez obtenir des volumes bien différents d’un casque l’autre
tandis que l’ampli n’aura pas la même charge, ce qui a une incidence sur le niveau comme sur le son.
Au-delà de ces histoires de niveau et d’impédance, le fait d’utiliser un doubleur est d’autant moins pertinent que les musiciens, pour jouer dans les
meilleures conditions, doivent disposer d’un retour personnalisé en termes de niveau comme de mix. Un batteur voudra entendre le métronome, le
chant et la basse avec un petit peu de guitare, tandis qu’un guitariste voudra surtout entendre sa guitare et la batterie, mais moins la basse. Quant
au chanteur, si vous pouvez lui ajouter une petite réverb rien que pour lui, vous seriez un amour !
Bref, tout le monde veut du sur mesure, au point que qu’il vous faudra prévoir autant de sorties casques avec leur propre mix et leur propre volume
que vous devez enregistrer de musiciens simultanément. Vous comprenez dès lors l’intérêt des quadruples ou octuples préamplis casque qui, une
fois raccordés aux bonnes sorties de la console ou de l’interface, vont permettre de créer un véritable réseau casque. Chacun disposera ainsi de
son mix et de son potard de volume pour adapter le retour à sa convenance.
Et puisque nous sommes rentré de plain pied dans l’utilisation studio du casque, je vous propose un petit récapitulatif de cette dernière.
Intérêt du casque en studio
Il a osé ? Il a osé ! Et comme j’en vois déjà qui font les gros yeux en lisant ce dernier point, nous allons de suite le développer.
Cette phrase, on la connaît car on nous l’assène comme un impérieux commandement dès qu’on évoque ce qu’il faut ou ne faut pas faire pour
réussir un mixage. Le problème, c’est qu’à l’heure où ces lignes sont écites, elle est en contradiction avec la pratique de bien des home studistes…
voire de pros comme nous le confiait Klaus Hill.
Elle n’est évidemment pas sans fondement car le casque offre une restitution sonore extrêmement différente des moniteurs, notamment au niveau
de la spatialisation des sons (soit l’endroit d’où ces derniers semblent provenir : plus ou moins à droite ou à gauche, proches ou lointains, etc.).
Cette différence tient dans la façon dont le son nous arrive.
Avec un casque en effet, chaque oreille n’écoute que le canal qui lui est dédié, le son
se jetant directement dans le canal auditif, de façon latérale donc, comme sur le shéma
ci-contre.
Alors qu’avec une paire d’enceintes, les choses sont bien différentes : le son nous
arrive non seulement de devant, mais il n’arrive pas directement à nos oreilles. Ses
ondes se déploient ainsi dans tous les sens, ce qui a plusieurs effets :
Les ondes qui le composent vont non seulement interagir avec la pièce (en se réver-
bérant, en s’atténuant), subissant l’influence de l’acoustique de cette dernière, mais
elles vont en outre interagir entre elles, comme nous l’avions vu lorsque nous
parlions d’acoustique : certaines vont s’additionner, d’autres vont s’annuler, etc.
Les canaux droit et gauche ne sont pas isolés comme avec un casque : avec un peu
de retard sur son homologue gauche et en subissant l’influence acoustique de la
pièce mais aussi de la tête qui diffracte et absorbe les ondes, l’oreille droite entend
aussi une partie du canal gauche… et l’oreille gauche une partie du canal droit,
évidemment… sachant que la latence et l’équilibre spectral de tout cela change à
chaque mouvement de tête !
On oppose ainsi une audition binaurale (les enceintes) à une audition bi-aurale (le
casque), qui changent radicalement la façon dont le cerveau interprète le son qu’on lui
envoie et se représente le placement de ce dernier. Et parce que l’audition bi-aurale est
parfaitement artificielle, vous aurez compris pourquoi on vous déconseille de mixer au
casque.
L’autre facteur tient à l’évolution des usages. Comme nous l’évoquions plus haut, si le Teppaz et la chaîne hi-fi furent les principaux systèmes
d’écoute utilisés dans les années 60 et 70, l’invention du Walkman par Sony et sa répercussion sur les 30 années qui ont suivi ont bouleversé la
donne. Aujourd’hui, 95 % des adolescents utilisent un casque pour écouter de la musique, ce qui est à considérer sachant qu’ils sont parmi les plus
gros consommateurs de musique. On ne mixerait donc que sur enceintes des choses qui sont principalement destinées à être écoutées au
casque ? Ce fut longtemps le cas, au risque parfois d’arriver à des aberrations (voir encadré vi-contre).
A cela s’ajoute le fait que si les pros font ce qu’ils veulent dans leur coûteux studio, la plupart des home studistes font quant à eux ce qu’ils peuvent
dans leur petit salon. Ce qu’ils peuvent pour ne pas déranger leur entourage (l’usage d’un casque résout simplement le problème des nuisances
sonores), et ce qu’ils peuvent pour un budget limité. Vu qu’un excellent casque coûte à peu près le prix d’une médiocre paire d’enceintes, on
comprend que le casque soit, pour beaucoup, passé de simple accessoire à système d’écoute principal.
La chose est d’autant plus envisageable qu’il existe des moyens de simuler le rendu d’enceintes avec un casque.
On trouve un certain nombre de solutions matérielles ou logicielles qui, de manière plus ou moins sophistiquée, vont essayer de restituer la
complexité d’une diffusion sur enceintes en renvoyant une partie filtrée d’un canal vers l’autre, le tout étant même parfois mouillé d’une petite réverb
pour simuler la pièce.
Et ça marche ? Plutôt pas mal, oui, même si ça ne vous dispensera pas de contrôler votre
mixage sur de vraies enceintes dès que possible. On n’a plus en tous cas, grâce à ce type de
traitement, la sensation d’une stéréo écartelée, la scène audio se localisant plus clairement vers
l’avant.
Reste que j’ai un peu mis la charrue avant les boeufs en vous parlant de ces systèmes, car pour l’heure, vous n’avez toujours pas de casque ! Le
moment est donc venu de définir le casque idéal avant de voir si nous pouvons le trouver sur le marché.
Que ce soit pour le suivi d’un enregistrement ou l’édition, on a besoin d’un casque susceptible de nous faire entendre les plus menus détails. Si une
fourmi tousse au pied de la chanteuse, on doit pouvoir l’entendre pour utiliser un détousseur.
Pour le mixage comme le mastering, en plus de cette écoute détaillée, on cherchera à trouver un casque qui couvre le plus large spectre possible,
et puisse nous fournir le rendu le plus homogène, fidèle et linéaire possible.
Pour pouvoir l’utiliser comme retour son lors des prises, on cherchera un modèle qui soit étanche, afin de ne pas avoir de repisse du casque dans
le ou les micros.
Évidemment, notre casque devra être confortable, utilisable sur notre baladeur comme en sortie de notre table ou de notre interface audio, et si
possible joli et pas cher.
Or, s’il est facile de contenter les enfants exigeants en leur proposant une friandise allemande qui combine un grand verre de lait, du chocolat et
une surprise (Michel sait très bien de quoi je parle), j’ai le regret de vous annoncer que le casque que nous venons de décrire n’existe pas, quoi
qu’en disent les publicités des constructeurs.
Avant de vous détailler tout cela, commençons par examiner l’offre du marché en termes de casques.
Types de casque
L’ensemble des casques audio est à cheval sur plusieurs marchés. On distingue ainsi :
Le casque Hi-Fi
Comme nous l’avons vu pour les enceintes, le mot Hi-Fi a été quelque peu galvaudé par le marketing, de sorte qu’on trouve sur ce marché à boire
et à manger au nom d’une écoute d’agrément visant le grand public comme les mélomanes les plus exigeants. Seul point commun de tous ces
casques hi-fi : ils ont été conçus pour un usage sédentaire et pour offrir un port confortable tandis que la plupart d’entre eux se concentrent sur le
fait d’avoir un son agréable (ce qui est évidemment très subjectif et se traduit souvent de nos jours par une mise en avant outrée du bas du
spectre). Notons toutefois que la dématérialisation de la musique et la disparition des chaînes hi-fi au profit des baladeurs et smartphones tend à
confondre ce marché avec celui des casques nomades. Précisons enfin que, comme pour les enceintes, l’idéal de haute-fidélité survit sur le
segment de la hi-fi haut de gamme qu’on désigne désormais sous le nom d’audiophile.
Le problème, c’est que le segment audiophile tend à se confondre avec celui du luxe (et même si le marketing essaie
quotidiennement de nous le faire oublier, je rappelle que dans le dictionnaire, le mot luxe n’a rien à voir avec la notion
de qualité : ce qui définit le luxe, c’est le fait de rendre transformer un produit superflu en produit élitiste par son seul
prix somptuaire ), et si l’on y trouve quantité d’excellents casques, dont un certain nombre utilisés par les pros de l’au-
dio, on y trouve aussi quantité de produits dont les prix exorbitants ne sont pas forcément justifiés par un meilleur son,
mais par la rareté des matériaux précieux utilisés, un design soigné et un argumentaire pseudo-scientifique qui
confine parfois à la superstition, la magie, et une « R&D » qui, curieusement, aboutit rarement à un brevet technolo-
gique réel, ou à un brevet éternellement en cours de dépot…
Méfiance donc.
Le casque nomade
Cousin du casque hi-fi, le casque nomade vise une écoute d’agrément tout en offrant, a priori, une bonne
portabilité avec des modèles de taille raisonnable, parfois pliables et un câble court voire pas de câble du tout
via la technologie Bluetooth.
Comme en attestent certains énormes casques de ce genre depuis le phénomène Beats, ce n’est plus tant
l’encombrement qui définit ce segment mais plutôt les équipements privilégiant la liberté de mouvement (le
Bluetooth remplace donc le câble), la gestion d’un environnement bruyant (processeur de réduction de bruit)
et l’usage avec un baladeur (contrôle du volume et de la lecture depuis le casque) ou un smartphone (micro
minuscule intégré pour téléphoner). C’est donc un casque qui n’a a priori pas été pensé pour les besoins du
studio, d’autant que le plan spectral, il cherchera la plupart du temps à grossir le bas du spectre au détriment
du reste. Parce que les gens aiment bien le bas : c’est un peu le gras et le sucre du son.
Le casque DJ
Conçu pour les besoins spécifique du DJ, ce type de casque doit permettre de pré-écouter le morceau à venir
tout en entendant le morceau en cours de lecture, diffusé à fond sur une sono. Il doit donc offrir une bonne
isolation et disposer d’articulations permettant au DJ de n’écouter qu’une seule des deux oreillettes tandis
que l’oreille libre reste sur le son de la salle.
Sur le plan spectral, la signature sonore des casques DJ se conforme enfin aux genres musicaux liés au
DJing, mettant en avant basse et aigus au détriment du médium. Bref, il s’agit d’un outil qui n’a rien des très
pertinent dans le contexte d’un studio, sachant que le vrai nerf de la guerre quand on mixe, c’est justement le
médium.
Du micro-casque pensé pour le broadcast au casque à infrarouge pour écouter la télé en passant par le casque de mesure utilisé par les ORL ou le
casque pensé pour le jeu vidéo (avec le son 3D et tout et tout), il existe encore quantité de type de casques que nous ne passerons pas en revue
ici, histoire de ne pas trop nous éloigner de notre sujet. A priori en effet, aucun de ces casques n’offre une réelle utilité en studio, encore qu’on
trouve des micro-casques broadcast conçus à partir d’un casque de studio comme le Beyer DT-790 qui n’est jamais qu’un DT-770 flanqué d’un
micro.
Car oui, j’ai failli oublié le type de casque qui nous intéresse le plus :
Le casque de studio
Vous vous en doutez, c’est a priori celui qui est construit pour nos besoins. Sans souci d’être nomade, le casque de studio est confortable pour
permettre de travailler longuement, généralement étanche et propose une courbe de réponses en fréquences… qui, contrairement à ce que l’on
observe sur le marché des enceintes de studio, ne cherche pas systématiquement à être plane.
Comment ça « pas plane » ? Et la neutralité alors ? Pour vous expliquer le pourquoi du comment, un petit détour du côté des mesures s’impose.
Informations techniques
Bien évidemment, les casques peuvent comme les enceintes faire l’objet de différentes mesures renseignant sur leurs performances et que les
constructeurs se font fort de fournir pour vanter les qualités de leur produit. On nous communiquera ainsi le plus souvent la bande passante et le
taux du distorsion harmonique accompagnés de la sensibilité dont nous avons parlé précédemment (et que beaucoup assimileront à la fameuse
« patate »).
Si ces données peuvent s’avérer intéressantes pour différencier des produits bas de gamme (pourvu qu’elles soient fournies et pourvu qu’elles
soient dignes de confiance), elles ne nous avancent toutefois pas à grand chose dès qu’on monte en gamme vu que la bande passante y est
souvent plus étendue qu’il ne faut (jusqu’à 50 kHz !, sachant que la plage des ultrasons qu’aucun humain n’entend commence à 20 kHz) et que le
THD est très faible.
En vis-à-vis de ces données, on s’intéressera plus volontiers à la courbe de réponse en fréquences du casque qui peut nous renseigner sur la
personnalité sonore de ce dernier. Voyez ici celle du Beats Pro de Monster, du Sennheiser HD650 et de l’AKG K702.
Il n’est pas bien difficile de voir les registres de prédilection de ces trois casques bien différents, ces parti-pris pouvant paraître curieux si l’on
compare ces courbes à celles des enceintes de monitoring qui tentent toutes d’offrir l’écoute la plus linéaire possible.
La raison de tels contrastes tient dans le fait qu’on pourrait distinguer deux grandes écoles parmi les casques de studio. Ceux qui cherchent à être
linéaires (comme le HD650 ici) et ceux qui cherchent à mettre en avant telle ou telle partie du spectre pour produire l’effet loupe dont nous parlions
plus haut (on observera ici la bosse du K702 dans les aigus, et le mont Olympe du Beats dans les graves). Or, les deux approches sont très inté-
ressantes et complémentaires : pour vérifier un mix ou un master, un rendu linéaire est évidemment préférable, mais quand il s’agira de travailler
sur certains détails particuliers, de pouvoir scruter des transitoires comme des queues de réverb, de veiller à ce qu’aucun buzz ou parasite ne
pollue une prise de son, un casque ‘loupe’ sur une partie précise du spectre sera bien pratique aussi.
Or parce que dans le domaine du studio, on a longtemps considéré l’audition au casque dans le seul contexte du tracking et de l’editing (soit le suivi
de l’enregistrement et son édition), c’est sans conteste les casques dont la courbe de réponse n’est pas plane qui sont les plus nombreux parmi les
références du marché, avec une belle petite bosses dans les haut-médiums/aigus pour bien entendre tout ce qui se passe à ce niveau.
Ceci étant, il est tout à fait possible de rendre plus linéaire la courbe de réponse en fréquence de n’importe quel casque. Comme pour les
enceintes, cela passe par une égalisation en amont.
Lineariser la courbe de réponse en fréquences de votre casque : tel est l’objectif des plug-ins
Toneboosters Morphit et Sonarworks, ce dernier présentant plusieurs avantages. Il est aussi
utilisable pour corriger des enceintes et il est possible d’envoyer son casque pour disposer d’une
calibration sur mesure et non d’une courbe de correction générique (la marque vend par ailleurs
des bundles casques + plug-in + calibration). La chose est d’autant plus intéressante qu’il n’est
pas rare d’observer des réponses en fréquences hétérogènes entre le canal droit et le canal
gauche d’un même casque, fut-il un modèle haut de gamme. Or, la technologie de Sonarworks
corrige séparément la réponse en fréquence de l’oreillette droite et de l’oreillette gauche.
Bref, un achat intéressant qui, même s’il induit une latence pour être efficace, permet d’accroître
la polyvalence d’un casque. D’un clic d’un seul, vous pouvez ainsi passer d’un rendu ‘loupe’ à un
rendu plus linéaire.
Ces précisions apportée, attaquons maintenant la dernière ligne droite en examinant tous les critères vous permettant d’arrêter votre choix.
On y arrive enfin ! Pas trop tôt, me direz-vous. Soit… Même si nous sommes encore loin d’avoir fini ! Pour commencer à bâtir votre short list,
passons en revue tous les choix objectifs qui s’offrent à nous avant de rentrer ensuite dans les choses plus subjectives :
Ouvert ou fermé ?
Si vous comptez faire des enregistrements, alors il vous faut impérativement un casque fermé. Si tel n’est pas le cas et que vous cherchez un
casque pour l’édition, le mixage ou le mastering, vous pouvez toutefois opter pour un modèle ouvert dont le rendu sera souvent plus naturel et qui
sera moins fatiguant à l’usage.
À ce sujet, je vous tiendrai le même discours que pour les enceintes : on s’en fout un peu a priori car si passionnantes que soient ces technolo-
giques pour qui envisage de construire un casque, aucune n’est synonyme de qualité réellement supérieure. La seule chose certaine, c’est que les
casques dynamiques sont les moins fragiles, les moins exigeants en termes de signal et les plus simples à rendre étanches. On n’est donc pas trop
étonné de découvrir que la plupart des grandes références de studio sont de ce type, d’autant qu’ils sont bien moins chers que leurs homologues,
moins lourds ou moins encombrants… À moins de craquer sur un Oppo ou un Audeze à propos desquels certains pros ne tarissent pas d’éloges,
votre casque sera donc probablement un modèle dynamique.
Quelle impédance ?
Toute la question est de savoir si vous comptez utiliser votre casque dans le seul contexte de votre home studio ou si vous voulez aussi pouvoir
l’utiliser avec votre baladeur, votre smartphone ou votre tablette. Dans ce dernier cas, préférez un modèle à basse impédance (une trentaine
d’Ohm). Sinon, préférez un modèle à l’impédance plus haute, a priori synonyme de meilleure qualité audio.
Quel prix ?
Comme souvent avec le matériel audio ou les instruments de musique, le rapport qualité/prix évolue de manière logarithmique, de sorte que si
l’écart de qualité est très important sur les premières tranches de prix, il va en s’amenuisant à mesure qu’on progresse vers le haut de gamme.
Concrètement, on entend une énorme différence entre un casque à 50 euros et un autre à 100 alors qu’entre un casque à 500 et un casque à 1000,
le gain n’a parfois rien de très évident en termes de qualité.
Précisons aussi que la plupart des grandes références en matière de casques de studio, c’est à dire les casques réellement utilisés au quotidien
par les professionnels de l’audio se situent entre 120 et 250 euros.
Vaut-ce la peine d’investir plus ? Seules vos oreilles vous le diront, même si le gain en termes de qualité n’est pas systématique. Vaut-ce la peine
d’investir moins quitte à utiliser un logiciel de correction ? Seul votre portefeuille vous le dira, sachant qu’il n’y a pas de miracles : ce n’est pas avec
un simple EQ logiciel qu’un casque à 20 euros sonnera comme un autre à 200. Au-delà du confort ou de la robustesse, la qualité des transducteurs
pèse sur la qualité du rendu qu’il convient de ne pas réduire au seul point de vue spectral. Le taux de distorsion comme la réponse aux transi-
toires du casque sont ainsi des aspects déterminants pour la qualité de restitution audio. Et pour cela, un logiciel ne vous sera d’aucune aide.
Songez enfin qu’un casque audio pro peut se garder plus de 10 ou 20 ans en fonction du soin que vous en prenez, et qu’il se répare pour certains
modèles. Cela vaut donc sans doute le coup d’investir un peu, plutôt que de perdre de l’argent avec un modèle peu onéreux qui vous lâchera à la
première occasion et que vous remplacerez par un autre modèle qui vous lâchera à son tour. Faites moi confiance là-dessus : quand on n’a peu
d’argent, on n’a pas les moyens d’acheter du bas de gamme car cela revient beaucoup trop cher à l’arrivée. Mieux vaut donc mettre des sous dans
le cochon rose pour s’équiper avec un outil de qualité plutôt que de collectionner les m%@des à bas prix.
Pièces de rechange
Il n’y a rien de plus agaçant que de devoir racheter un casque qui fonctionne très bien parce qu’on a abîmé
son câble ou que le revêtement des écouteurs part en lambeaux. Pour lutter contre cette obsolescence, sinon
programmée, du moins difficilement évitable, on pourra jeter son dévolu sur un modèle dont certaines parties
peuvent être changées si elles sont usées : on parle notamment des cordons, des coussinets, voire de HP.
De la sorte, rien ne s’oppose à ce que vous fassiez un usage bien plus durable de votre casque que s’il
s’agissait d’un modèle tout moulé où la moindre altération est synonyme de mise à la poubelle. Notez à ce
sujet que la plupart des modèles utilisés en studio pro disposent de pièces de rechange, le champion dans le
domaine demeurant le HD25 de Sennheiser dont toutes les parties (à part l’arceau) sont disponibles en
pièces détachées…
Accessoires
Le constructeur peut également fournir divers accessoires avec le casque, qu’il s’agisse d’un adaptateur miniJack>Jack ou de deux cordons sépa-
rés (un pour le Jack, un pour le miniJack). A partir d’un certain prix, les constructeurs fournissent aussi une housse voire un étui de rangement qui
peut avoir son intérêt si vous comptez trimballer votre bébé. A mi-chemin entre l’accessoire de confort et la pièce de rechange, certains construc-
teurs proposent deux jeux de coussinets avec le casque : l’un en velours, l’autre en simili-cuir. Ce sont là autant de détails qu’il convient d’examiner,
même s’ils ne constitueront pas un critère de sélection très important.
Au delà des critères que nous venons d’évoquer, le choix d’un casque est comme pour les enceintes éminemment subjectif, certains ne jurant que
par tel modèle quand d’autres le détestent.
Confort et ergonomie
Le port est évidemment le plus important car si vous devez rester plusieurs heures avec le casque sur les oreilles, autant s’assurer que ce dernier
ne se transforme pas en instrument de torture. On portera son attention sur la façon dont les écouteurs reposent ou englobent l’oreille, sur la
contrainte exercée par l’arceau mais aussi sur le poids du casque. Certains aiment les casques légers, d’autres les casques plus lourds, et entre les
235 g d’un AKG K702 et les 402 g d’un Beats Pro, il y a un monde qui fait que le casque se fait plus ou moins oublier à l’usage.
Suivant les matériaux employés, certaines casques s’avèrent en outre plus chauds que d’autres : un détail important si vous ne voulez pas vous
rendre compte à vos dépens qu’effectivement, on peut aussi transpirer des oreilles.
C’est encore au titre du confort qu’on appréciera la longueur et le type du cordon utilisé : droit ou à spirale, long ou court, cela peut faire une diffé-
rence dans le côté pratique du casque au quotidien. Quand c’est possible, on choisira aussi un modèle dont le cordon est détachable, ce qui peut
éviter bien des drames lorsqu’on marche dessus et qu’on se retrouve ensuite avec un casque hémiplégique…
On n’imagine bien qu’en matière de son comme de confort, tous les goûts sont dans la nature et qu’en fonction de la musique que l’on fait, on aura
différentes attentes. Le registre le plus bas du spectre aura ainsi moins d’importance pour un métaleux que pour un beatmaker hip hop ou un musi-
cien électronique. Mais la subjectivité va bien plus loin que ça, de sorte que parler de casques tourne vite au dialogue de sourds.
En effet, nous avons tous des organes auditifs, des crânes et des oreilles différents sur le plan physiologique et en fonction de notre âge comme
des éventuels traumatismes que nous avons connus, nous avons tous des courbes d’audition différentes de sorte qu’aucun de nous n’entend la
même chose en chaussant un même casque.
Si l’on rajoute à cela les notions de culture qui sont variables d’un peuple à l’autre (voir encadré), de goûts changeant d’un individu à un autre, ainsi
que le fait que nous ne soyons pas tous autant entraînés à l’exercice d’écouter, on comprend vite à quel point l’avis de quelqu’un sur un casque ne
nous avancera pas trop dans la quête du modèle qui est le meilleur pour nous. Pour parler concrètement, disons qu’on ne perçoit sans doute pas le
haut-médium exacerbé d’un Sony 7506 avec les oreilles d’un jeune homme de 18 ans ou celles d’un homme de 60. Et disons qu’un ingénieur du
son et son jumeau bibliothécaire n’entendront pas la même chose en chaussant le même casque.
Qu’en conclure ? Que les bancs d’essai comme les avis d’utilisateurs ou le conseil des amis sont intéressants dans la mesure où ils permettent de
fixer des repères, à plus forte raison quand ils proposent des comparaisons auxquelles vous pouvez vous référer, mais que cela demeure toujours
l’opinion d’un locuteur unique dont il ne faudra jamais perdre de vue qui il est (son âge, ses compétences en la matière) ni d’où il vient.
À la fin, vous seriez donc seul avec vos deux oreilles pour faire votre choix ? En quelque sorte, oui, et vous ne serez fixés sur vos préférences en la
matière qu’en chaussant le casque qui vous intéresse, et en le comparant avec d’autres modèles dont vous envisagez l’achat.
Écoute comparative
Comme pour les enceintes et puisque le choix d’un casque est vraiment affaire de subjectivité, le mieux est de pouvoir tester plusieurs modèles en
passant très vite de l’un à l’autre pour apprécier les différences. N’oubliez pas en effet que la partie de la mémoire qui nous sert à la comparaison
auditive a au mieux 4 secondes de tampon. De fait, écouter deux casques à 10 minutes d’intervalle n’a déjà plus aucun intérêt pour les comparer.
A défaut d’avoir un ami disposant de tous les modèles vous intéressant (et qui sera soit un pro,
soit un geek monomaniaque) et susceptible de vous accueillir pour réaliser vos tests, le mieux
sera de passer par un magasin qui vous proposera plusieurs modèles à l’écoute, en espérant
que vous ayez la possibilité de calibrer les volumes pour chaque compétiteur (n’oubliez pas : ce
qui sonne plus fort donne toujours l’impression de sonner mieux) et d’utiliser vos propres
morceaux de références, qu’il s’agisse de vos compos ou de chansons que vous connaissez par
coeur.
Comme pour les enceintes, pensez toujours à écouter de la voix parlée car c’est clairement le
son qui nous est le plus familier et sur lequel tel ou tel parti pris dans le rendu du spectre vous
sautera toujours aux oreilles.
Ceci étant dit, histoire de vous donner quelques repères, l’heure est venue de vous recommander quelques références concrètes… à écouter avant
d’acheter bien sûr !
Autant le marché des enceintes de monitoring est relativement vaste, autant celui des casques de studio l’est beaucoup moins dès que l’on exclut
les modèles qui n’utilisent le terme de 'Studio’ qu’à des fins marketing (comme le fait Beats par exemple) pour vendre des casques qui n’ont rien de
pertinent pour notre usage. De fait, les grands constructeurs ne proposent chacun que quelques modèles de casque de studio, le gros de leur cata-
logue se concentrant sur les casques Hi-Fi ou nomades. On se rend en outre compte que de leur point de vue, le casque de studio ou audio pro est
souvent synonyme de casque fermé. Il existe pourtant bien des casques ouverts qu’on trouve dans les studios et qu’il faudra parfois aller chercher
dans les pages hi-fi ou audiophile des constructeurs.
Pour l’usage qui nous occupe, on distinguera 3 gammes de prix : l’entrée de gamme se situe à moins de 100 euros, le milieu de gamme tourne
autour des 150 euros et le haut de gamme rassemble ce qui se trouve au-delà de 200 euros. Qu’est ce qui différence les produits de ces différentes
gammes en termes de qualité ? Le confort d’abord, certains modèles peu chers étant vraiment peu agréables à l’usage, la solidité et la « réparabi-
lité » du casque ensuite, mais aussi le son évidemment. C’est assez flagrant entre l’entrée de gamme et le milieu de gamme : on gagne énormé-
ment de détail à l’écoute (dans les transitoires comme dans la restitution du spectre) tandis que le côté 'boxy’ que peuvent avoir les casques fermés
peu chers disparait.
N’oubliez pas non plus que pour proposer les prix parfois hallucinants qu’on trouve en entrée de gamme, les marques réduisent leur coûts de fabri-
cation sur deux variables essentielles : l’éthique de fabrication (Tiers Monde mon amour) comme un abaissement des exigences lors du contrôle
qualité en usine. De fait, sur les casques les moins chers, il est fort probable que vous constatiez de grande différences d’un exemplaire à l’autre
d’un même modèle. En guise de repère, notez que la plupart des casques utilisés par les professionnels en studio se situent dans le milieu de
gamme.
Ne vous étonnez pas enfin, concernant cette sélection, de ne pas trouver tel modèle de telle ou telle marque. Nous avons préféré nous concentrer
sur les casques que nous avons testés. De ce fait, ces suggestions seront couramment mises à jour lorsqu’un modèle testé nous paraîtra mériter
sa place parmi les références retenues.
Soyons clair, sous la barre des 50 euros, nous n’avons encore jamais rien entendu de convaincant, même dans la perspective d’un débutant. Et s’il
existe bien pire au même prix, voire plus cher, un Superluxe HD681 vendu 20 euros offre par exemple le confort et le son… d’un casque à
20 euros ! Ce n’est qu’en approchant les 100 euros qu’on commence vraiment à accéder à des choses plus défendables comme
l’Audio-Technica ATH-M40x que nous utilisons au quotidien pour notre podcast, et quelques références autrefois vendues sensiblement plus cher
comme l’AKG K271 MkII ou le Sony MDR 7506, ces derniers ne s’étant pas forcément bien tirés de notre écoute comparative lorsqu’ils étaient
vendus autour des 150 euros. Mais à leur nouveau prix, inutile de dire qu’ils redeviennent bien plus pertinents.
C’est clairement dans cette gamme que l’on commence à rencontrer les grandes références de l’audio pro, offrant souvent un excellent compromis
pour le prix. Si vous ne cherchez pas un casque de prise mais un outil pour le tracking et le mixage, il serait dur de ne pas vous recommander
chaudement le K702, un modèle ouvert, qu’on retrouve aujourd’hui sous la barre des 170 euros (voire moins !) et qui était encore vendu 300 euros il
y a 5 ans de cela ! Mais pour peu que vous soyez à l’aise avec la personnalité sonore du casque que vous choisiez, soyez sûr que vous le garderez
longtemps en choisissant parmi ces références.
BeyerDynamic DT770 Pro Sennheiser HD25–1 II / AKG K702 Audio-Technica M50x BeyerDynamic
(fermé) Plus (ouvert) (fermé) DT990 Pro
(fermé) (ouvert)
Nous ne vous donnerons pas de consignes pour le très haut de gamme hi-fi considérant que si vous être prêt à investir plusieurs milliers ou
dizaines de milliers d’euros dans un casque, c’est que vous savez ce que vous faites, et que vous ne le faites pas spécialement dans un but de
production audio mais pour vous faire plaisir (je ne crois pas connaître d’ingénieur du son, si fortuné et célèbre soit-il, travaillant avec un Orpheus
de Sennheiser à 50 000 euros, un casque qui, soit dit en passant, n’a fait l’objet d’aucun test comparatif sérieux et d’aucune mesure indépendante
en dépit des critiques dythyrambiques qu’on a pu lire ça et là à son sujet).
Considérons toutefois qu’entre 200 et 500 euros, on pénètre dans le haut de gamme du casque de studio, avec des modèles ouverts ou semi-
fermés la plupart du temps (des casque ne convenant a priori pas pour la prise) et l’apparition de technologies plus coûteuses (casque orthodyna-
miques et électrostatiques). Investir plus de 200 euros dans un casque est-il raisonnable ? Oui, dans la mesure où l’on sent une progression par
rapport au milieu de gamme (encore qu’avec le nouveau prix du K702…) et que 200, 300 voire 500 euros ne sont pas forcément des prix délirants
pour des outils que vous garderez longtemps. Ce sont surtout des prix autrement plus honnêtes que les tarifs exhorbitants pratiqués par Apple sur
la gamme Beats qui valent au mieux la moitié de leur prix, sans doute moins.
Sennheiser HD650 BeyerDynamic DT880 Audio-Technica M70x Oppo PM-3 AKG K712 Pro
(ouvert) (ouvert) (fermé) (fermé) (ouvert)
Casque ou casques ?
Nous en avions parlé lors de notre guide d’achat des enceintes : plus vous disposez de systèmes d’écoute et plus vous serez en mesure d’assu-
rer la portabilité de votre mix. De ce point de vue, il n’y a rien d’idiot dans le fait de s’équiper de plusieurs casques aux rendus ou aux caractéris-
tiques complémentaires. On peut ainsi s’équiper d’un petit casque fermé pour les prises en complément d’un gros ouvert pour le reste, ou encore
d’un casque 'loupe’ et d’un casque au rendu plus linéaire.
Il ne s’agit pas pour moi de vous pousser vers la collectionite parfaitement vaine, mais de souligner qu’en l’absence d’un système d’écoute qui vous
satisfasse, multiplier les points de vue est toujours une bonne chose pour aboutir à la fin à une production de qualité. De ce point de vue, on peut
parfaitement s’équiper d’un, deux ou trois casques, à plus forte raison quand on ne dispose pas, pour telle ou telle raison, d’une paire d’enceintes
qui offre une écoute satisfaisante.
Comme vous l’avez compris plus gaut, en fonction de son impédance comme de la technologie qu’il emploie, un casque aura besoin d’un courant
plus ou moins important pour fonctionner. Et c’est sur ce point précis qu’intervient un préampli qui va s’assurer que le signal délivré par la chaîne
audio soit conforme aux exigences des transducteurs.
Des préamplis casque, il s’en cache donc un derrière chaque prise casque de vos équipements audio, qu’il s’agisse de votre smartphone, de votre
télé ou de votre interface audio, de sorte qu’a priori, vous ne devriez même pas vous soucier de leur existence. Sauf qu’on peut tout à fait acheter
des préamplis casques dédiés pour plusieurs raisons :
parce que la technologie du casque que l’on utilise nécessite, outre une haute impédance, une alimentation électrique, comme c’est le cas pour
les casques électrostatiques
pour être à même de gérer plusieurs casques en même temps
pour gagner enfin en qualité audio, sachant que la sortie casque de nos équipements n’est souvent pas la partie qui bénéficie du plus d’attention
de la part des constructeurs
Le bonheur est dans le préampli
Vous vous en doutez, même s’il s’avère capable de « driver » des casques à haute impédance, le préampli d’une interface audio d’entrée de
gamme n’est pas forcément le plus qualitatif qui soit. Et comme il ne fait aucun doute que la qualité de rendu d’un casque dépend en premier lieu
de la qualité du signal qu’on lui soumet, plus la préamplification de ce dernier sera qualitative (en termes de rapport signal/bruit, de distorsion, etc.),
meilleur sera le résultat à la fin.
La recherche du meilleur son possible passe donc logiquement par la recherche du meilleur préampli possible, même si je ne saurais que trop vous
conseiller de rester cohérent et raisonnable dans votre investissement.
À moins d’être dans le besoin d’offrir plusieurs retours casques auquel cas un quadruple ou octuple préampli s’impose (et ce n’est pas forcément
très cher), à moins d’avoir investi dans un coûteux casque électrostatique qui nécessite une alimentation, sachez où se trouve la priorité dans vos
achats.
Commencez par vous équiper d’un bon casque comme ceux listés dans les conseils de cet article et n’investissez que dans un préampli dédié si
vous ayez pu entendre qu’il apportait une amélioration réelle. Et quand je parle de l’entendre, cela passe forcément par une écoute comparative
que vous réaliserez avec deux bons casques identiques branchés chacun sur les préamplis à comparer, en vous assurant que le volume de l’un à
l’autre soit le même. Je sais : c’est contraignant, mais c’est réellement la seule façon raisonnable de dépenser son argent, à l’heure où les argu-
ments publicitaires tenteront de convaincre votre cerveau reptilien que votre survie dépend de l’achat d’un coûteux équipement supplémentaire.
Une chose est sûre en tout cas : si d’un modèle de casque à un autre, vous entendrez des différences flagrantes, pour peu que vous n’utilisiez pas
une sortie casque vraiment médiocre à la base ou pas du tout apte à driver votre casque à haute impédance, le fait de changer de préampli casque
ne va pas révolutionner votre vie ni la personnalité sonore de votre casque. Comparé sur plusieurs casques (DT770 Pro, HD25, M50, K271 Mk2 &
Ultrasone Pro 550), le Grace Design m902 apportait plus de bas que le couple PreSonus HP-60/Avid Mbox Pro mais ne changeait pas complète-
ment la donne non plus. Et peut-être était-ce dû au fait que le m902 embarque son propre convertisseur NA… Bref, mon conseil est le suivant :
consacrez votre temps et votre argent à trouver le ou les bons casques, car ces derniers seront autrement plus déterminants pour la qualité de vos
productions que ne le sera un préampli dédié.
Casque et santé
Vous devez déjà le savoir : l’usage immodéré du casque peut dégrader votre appareil auditif. Il convient ainsi de ne pas écouter à trop fort niveau,
ni sur des plages de temps trop longues sans laisser l’oreille se reposer, sans quoi vous vous exposez à des dommages irréversibles pour
certains : acouphènes, hyperacousie, perte d’audition. S’il ne serait pas correct de dire que vos oreilles ont un capital casque comme votre peau a
un capital soleil, il s’agit toutefois d’être raisonnable… et prudent ! En effet, vu la proximité du transducteur avec votre tympan, soyez vigilants en
remettant toujours le volume d’écoute à zéro avant de chausser le casque : si d’aventure la musique se mettait d’un seul coup à hurler à un volume
que vous n’aviez pas prévu, si vous deviez vous prendre une bonne saturation numérique, votre appareil auditif pourrait être gravement altéré.
Vous en avez sans doute entendu parlé : Lara Fabian en a fait les frais et a bien failli voir sa carrière prendre prématurément fin en 2013. Reve-
nant sur les circonstances de l’accident, Rob Mancuso, ingé son Live de la chanteuse belge, explique « qu’alors qu’elle répétait pour une émis-
sion de télévision, un technicien a accidentellement envoyé un signal de 1kHz directement dans ses in ears. Ce signal de 1kHz a été envoyé si fort
et si rapidement que ça a été comme si un coup de feu lui avait été tiré à côté de chaque oreille. Le niveau de pression sonore de ce signal a été
assez fort pour lui faire perdre l’équilibre et la faire tomber par terre. Imaginez entendre un bruit assez fort pour vous faire tomber ! Cet événement a
manifestement blessé son audition et elle a dû être envoyée aux urgences ». » Le problème, c’est que la chanteuse a continué à exercer son
métier, si bien que lors d’un concert à Dijon, elle est prise d’une brusque surdité. Elle raconte : « Pendant un solo de guitare, je me retourne vers
l’ingénieur du son et lui signale un problème technique. Je n’entends plus ! Il me répond qu’il n’a touché à rien. J’enlève mes oreillettes, l’ambiance
sonore est brouillée autour de moi. Je me rends compte que le problème, c’est moi ». Le problème, s’est une « surdité subite » obligeant l’artiste à
laisser son appareil auditif « se régénérer dans le silence. »
Or, soyez-en sûr, si la chanteuse a pu recouvrer le sens de l’ouïe et reprendre son métier, son appareil auditif ne s’est certainement pas régénéré
comme le ferait la queue d’un lézard qu’on aurait coupée. Ce qui est détruit est détruit et il y a fort à parier que l’audiogramme de la chanteuse
porte les traces sévères de l’accident tandis qu’elle doit probablement vivre avec de bons acouphènes.
Bref, soyez prudent. Très prudent. Et sachez que certains casques incorporent un limiteur, à toutes fins utiles.
Conclusion
Avec cet article, nous en avons a priori fini avec le système d’écoute de votre Home Studio, ce qui constitue probablement, comme nous l’avions
expliqué dans les articles précédents, la partie la plus cruciale de ce dernier pour assurer la qualité de vos productions.
Reste que, pour l’heure, avec vos enceintes et votre casque posés à même le sol de votre pièce à l’acoustique soignée, vous pouvez au mieux
vous targuer… d’avoir des enceintes et un casque posés à même le sol d’une pièce à l’acoustique soignée !
Que manque-t-il pour en faire un home studio digne de ce nom ? Bien des choses, sans aucun doute, à commencer par ce qui va constituer le
coeur de votre équipement audio : le dispositif d’enregistrement.
Ce sera là le sujet de nos prochains articles qui, entre autres choses, aborderont des questions dont la trollerie devraient en émoustiller plus d’un :
analogique ou numérique ? Mac ou PC ? Logiciel ou matériel ? Et qui qui c’est qu’il a le meilleur moteur audio du monde ? On devrait bien s’amu-
ser. ;-)