UE 2.2 Physiologie de La Perception Sensorielle Texte
UE 2.2 Physiologie de La Perception Sensorielle Texte
UE 2.2 Physiologie de La Perception Sensorielle Texte
Pr Fabrice Bartolomei
I. Généralités
Les sens nous permettent d’informer notre organisme et notre cerveau sur des propriétés de notre
milieu extérieur. Ils sont une source essentielle de notre connaissance. La perception du monde
extérieur nous parvient grâce à l’analyse de signaux de nature diverse et grâce à plusieurs systèmes
distincts et différenciés au sein du système nerveux, depuis la périphérie (dans ce que l’on appelle les
organes des sens) jusqu’au système nerveux central. Il existe 5 grands sens (Audition (Ouïe), Vision,
Tact, Gustation, Olfaction). Le sens du tact sera étudié à part avec la physiologie de la sensibilité.
II. Audition
En entendant un son on peut en identifier la source et la direction et par exemple prévenir ainsi
d’un danger que l’on ne voit pas. Les sons peuvent avoir une fonction précise notamment dans la
communication inter individus. Chez l’homme la perception des sons du langage constitue le
moyen essentiel de communications et constitue la base des relations sociales. La perception
musicale et ses effets émotionnels sont également propres à l’homme.
A. Nature du son
•• Le son est un changement répétitif dans la pression d’un milieu donné (air le plus souvent
mais aussi eau). Les particules d’air sont déplacées par un système mécanique vibratoire
(exemple : glotte, cône d’un haut-parleur.)
Le déplacement d’air suit des mouvements cycliques, ondulatoires : une alternance d’une
compression et d’une expansion de l’air
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• Un son pur est produit par un diapason: il n’existe qu’une seule fréquence de vibration. On
peut définir 2 mesures caractéristiques d’un son pur : la fréquence de vibration : nombre de cycle
par seconde mesurées en Hertz (Hz) et l’intensité du son : amplitude de la variation de pression.
Elle s’exprime en décibel Il existe une gamme fréquentielle audible par l’homme: au-delà de
20000 Hz ce sont les ultrasons et en deçà de 20 Hz les infrasons
L’oreille contient les systèmes de perception des sons. Elle est formée de 3 parties distinctes
(externe, moyenne, interne). Seule l’oreille interne contient les cellules réceptrices du son
•Elle est formée du pavillon qui concentre les sons. Et du canal auditif.
•Les sons sont conduit à l’oreille moyenne par le canal(ou conduit) auditif externe (2,5 cm chez
l’homme)
Elle est constituée par le tympan et les osselets. Les osselets sont les plus petits os de l’organisme. Ils
forment une chaine qui connecte le tympan à la fenêtre ovale, qui est l’ouverture vers l’oreille
interne.
- Rappelons que la pression est la force exercée sur une membrane par unité de surface de la
membrane=>>P= F/S.
-surface : la fenêtre ovale est plus petite que le tympan donc la pression augmente
-force : le système des osselets effectuent un système de levier qui décuple la force de pression.
a. Anatomie de la Cochlée
La cochlée est une spirale insérée dans l’os temporal. Une fois déroulée on peut décrire
-une base élargie qui contient 2 trous recouverts d’une membrane, la fenêtre ovale et la fenêtre
ronde
-un apex
-canal vestibulaire
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-canal tympanique
-canal cochléaire
La membrane basilaire contient l’organe de Corti qui contient les neurones récepteurs auditifs.
Le canal cochléaire est rempli d’endolymphe, qui est très proche du milieu intracellulaire.
b. Physiologie de la cochlée
-Les vibrations sonores font bouger périodiquement l’étrier qui exerce une pression sur la fenêtre
ovale. L’effet crucial de cette variation de pression est d’entrainer un déplacement de l’endolymphe
dans le canal cochléaire.
Le mouvement de l’endolymphe fait ployer à sa base la membrane basilaire et initie une onde qui se
propage de la base vers l’apex
Les fréquences élevées se propagent peu et modifient les pressions de la membrane basilaire à sa
base rigide et étroite, tandis que les basses fréquences tendent à se propager loin vers l’apex, plus
large et plus souple
Ainsi la membrane basilaire établi un codage du site répertoriant les endroits où la membrane est la
plus distendue en fonction des fréquences du son. Il s’agit là d’un codage fréquentiel (en fonction de
la distance parcourue sur la membrane basilaire).
Les cellules ciliées opèrent la transduction des vibrations auditives en signaux électriques
L’organe de Corti contient des cellules ciliées qui portent environ 100 stéréocils à leur sommet. Les
stéréocils des cellules ciliées traversent la lame réticulaire pour finir dans l’endolymphe et dans la
substance gélatineuse de la membrane tectoriale. Les cellules ciliées forment une synapse avec les
dendrites des cellules ganglionnaires (du ganglion spiral) dont les axones vont constituer le nerf
auditif (VIII)
Les mécanismes de transduction des sons ont été élucidés par des travaux in vitro. Quand la
membrane basilaire vibre et se déforme, cette déformation retentit sur les cellules ciliées.
Quand la membrane basilaire remonte, elle entraîne un mouvement des cellules et de la lame
tectoriale vers l’intérieur de la cochlée, avec un effet inverse quand elle redescend. Les stéréocils
coincés entre lame réticulaire et la membrane tectoriale sont soumis à des déplacements dans un
sens ou dans l’autre. Les déplacements des cils entraînent soit une dépolarisation de la cellule soit
une hyperpolarisation en fonction du sens du déplacement.
Une fois activées les cellules ciliées vont activer synaptiquement les dendrites des neurones
ganglionnaires du nerf auditif.
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Les voies auditives sont complexes et ont une distribution bilatérale. Nous donnerons ici une vision
de la voie principale.
1/Les fibres du nerf auditif (VII) issues du ganglion spiral pénètrent le tronc cérébral et font synapse
au niveau des noyaux cochléaires du tronc.
2/A partir de là, le contingent principal des fibres se projette sur les noyaux de l’olive supérieure et ce
de façon bilatérale (environ 1/3 homolatérale, 2/3 controlatérale).
3/Les fibres partent ensuite de l’olive vers un relais au niveau du colliculus inférieur puis dans le
corps genouillé médian (CGM) qui appartient au thalamus. De là s’effectuent les projections vers le
cortex auditif.
Le cortex auditif primaire correspond à l’aire 41 de Brodman situé dans le gyrus de Heschl au niveau
de la partie néocorticale du lobe temporal (gyrus temporal supérieur). Le cortex auditif secondaire
correspond à l’aire 42 et 22
L’intégration de sons de signification complexe s’effectue probablement dans les aires associatives
auditives. Le langage est représenté au niveau du planum temporale gauche représentant la
majeure partie de l’aire de Wernicke, dont la fonction principale serait l’interprétation des sons du
langage.
III. Vision
La vision est une fonction cérébrale, se produisant dans le « système visuel ». Comme tout système
sensoriel, le système visuel permet au cerveau et à l’animal de recevoir des informations sur le monde
extérieur et d’en donner une interprétation. La lumière réfléchie sur un objet va être analysée par le
cerveau en fonction de son environnement.
Deux grandes fonctions du système visuel ont été mises en avant grâce aux nombreux travaux de
recherche effectués sur le sujet, fonctions conservées dans l’évolution des espèces et que l’on
retrouve tout au long du système visuel.
- fonction d’identification de l’objet : forme, couleur, taille, expérience antérieure (système mnésique)
- fonction de localisation de l’objet dans son environnement spatial ainsi qu’éventuellement analyser
son mouvement, sa direction…
C’est un système particulièrement développé chez l’homme chez qui on a estimé que près de la
moitié du cerveau (40%) était consacrée à l’analyse d’informations visuelles
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•Le transfert de ces messages nerveux depuis la rétine jusqu’au thalamus (nerfs optique, voies
optiques, corps genouillé latéral)
•Puis l’information gagne le cortex cérébral pour y être interprétée et traitée dans diverses tâches
La lumière permet au système visuel de former des images du monde qui nous entoure. La lumière
est une énergie électromagnétique dont on peut définir la longueur d’onde (distance entre 2 ondes
successives), l’amplitude et la fréquence (nombre d’ondes par secondes)
Ces radiations arrivent en petits paquets énergétiques appelés quanta. Les quantas d’énergie
lumineuse sont appelés photons. Le système nerveux humain ne réagit qu’à des quantas d’un spectre
limité entre 400 et 500nm de longueur d’onde (spectre visible chez l’homme)
Du fait des propriétés de réfraction des milieux traversés par la lumière (cornée, cristallin et humeur
vitrée notamment) l’image d’un objet est concentrée sur la rétine.
Le champ visuel est le champ de vision couvert par une rétine. La structure de l’œil dans la tête limite
ce champ visuel notamment au niveau nasal.
Noter encore que l’image est inversée : l’image du champ gauche se forme à droite sur la rétine et
vice-versa.
•La rétine assure la transformation de l’énergie lumineuse en activité nerveuse, étape appelée
transduction.
• Elle a une structure cellulaire relativement simple, disposée en 3 couches principales aux fonctions
distinctes :
-les neurones ganglionnaires qui représentent la voie de sortie de la rétine car ce sont les seules
cellules capables d’émettre des potentiels d’action.
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Les couches cellulaires de la rétine sont inversées par rapport à la direction du rayon lumineux. La
lumière pour stimuler les photorécepteurs doit traverser les couches des cellules ganglionnaires et
bipolaires
Il existe 125 millions de photorécepteurs(PR) localisés au fond de la rétine dont la structure est la
suivante :
Les BA ont un segment externe long et cylindrique, les CO un segment externe court et effilé. Il y a 20
fois plus de bâtonnets dans la rétine.
•Les propriétés de ces PR sont différentes: les BA contiennent 1000 fois plus de disques et
photopigments et sont ainsi beaucoup plus sensibles à la lumière: ceci explique qu’ils soient les seuls
actifs en cas de lumière faible (condition scotopique). En condition photopique (lumière du jour) ce
sont les cônes qui sont plus actifs.
• De plus les BA ont tous le même pigment, alors qu’il existe 3 types différents de pigments (et donc
de Co) dans les CO, sensibles à des longueurs d’ondes différentes, et qui sont responsables de la
vision des couleurs
• Variations régionales :
-La rétine centrale : le rapport s’inverse, elle contient essentiellement des CO. La fovéa est un
amincissement de la rétine au centre de la macula et est l’endroit de plus forte discrimination
visuelle.
3. Phototransduction
Les photons vont provoquer des modifications du potentiel membranaire des photorécepteurs et
ainsi modifiant la production de potentiels d’action au niveau des cellules ganglionnaires et de leurs
axones.
Ceci est lié à l’activation du pigment contenu dans les photorécepteurs, la Rhodopsine, pigment
pouvant changer de conformation moléculaire sous l’effet de la lumière.
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Les cônes sont sensibles à la couleur car ils possèdent 3 types de rhodopsines sensibles à 3 longueurs
d’ondes différentes. Les gènes de 2 des 3 types d’opsines sont codés par le chromosome X. Un déficit
génétique de l’un de ces pigments perturbe la vision vert-rouge (1% population male, daltonisme)
Les bâtonnets, contiennent plus de rhodopsine, d’un seul type et qui sont actifs quand la lumière est
faible.
Depuis 1950 on sait enregistrer les cellules rétiniennes in vivo chez l’animal par microélectrodes On
peut ainsi envoyer un spot lumineux sur la rétine et enregistrer les réponses unitaires (potentiels
d’action) au niveau des axones des cellules ganglionnaires. L’activation des cellules rétiniennes se fait
sur de petits secteurs de la rétine, appelés champs récepteurs, arrondis sensibles aux variations de
contrastes et pour certains aux variations de couleurs.
Les axones des cellules ganglionnaires rétiniennes forment le nerf optique puis gagnent le chiasma
optique puis les tractus optiques jusqu’au niveau du corps genouillé latéral (CGL).
De là la voie visuelle se continue par les radiations optiques jusqu’au niveau du cortex visuel. Il y a
une décussation partielle des fibres rétiniennes. Les fibres d’une hémirétine nasale décussent tandis
que les fibres de l’hémirétine temporale restent homolatérales. Le résultat est qu’un hémichamps
visuel se trouve finalement projeté sur le CGL puis le cortex visuel de l’hémisphère controlatéral.
D. Cortex Visuels
L’information visuelle va être amenée du CGL au cortex visuel primaire (V1) par les radiations
optiques.
Le cortex visuel primaire est situé chez l’homme dans l’aire 17 de Brodman à la face interne du lobe
occipital de part et d’autre de la scissure calcarine.
Les enregistrements in vivo chez l’animal ont montré que les neurones visuels analysent des formes
élémentaires (champs récepteurs linéaires). Il s’y produit aussi une fusion binoculaire (convergence
des fibres provenant de chaque oeil)
Le cortex visuel primaire, envoie des projections vers les cortex visuels associatifs (V2, V3, V4, V5
etc..) qui vont permettre 2 types d’analyse, se séparant en 2 voies distinctes
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- Une voie ventrale occipito-temporale, spécialisée dans l’analyse des couleurs et de la forme
des objets.
L’existence de ces 2 voies est attestée chez l’Homme par la pathologie. Les lésions de la voie dorsale
entrainent une ataxie optique, des trouble de la coordination visuo-motrice. Les lésions de la voie
dorsale entrainent des troubles de la reconnaissance des objets (agnosie, prosopagnosie=déficit
reconnaissance des visages).
A. Généralités
L’olfaction et la gustation sont des sens ayant des caractéristiques communes. Ils sont spécialisés
dans la perception de molécules chimiques et leur perception est souvent mêlée. Ainsi quand on
absorbe un aliment, la gustation et l’olfaction sont mis en jeu simultanément (cf Figure
RétroOlfaction) .
Il sont soumis à un apprentissage au cours de la vie et peuvent servir de sens d’alerte (contre les
poisons pour le gout par exemple). Ils peuvent donner lieu à des sensations agréables ( caractère
hédonique) cependant bien connues.
B. La gustation
Il existe une certaine correspondance entre structure chimique et gout. Ainsi la sensation salée
est liée à des sels (Nacl, KCl..), la perception sucrée à des substance chimiques de type sucres
naturels ou artificiels. Le gout amer peut être lié à des molécules de nature très variable par
contre (cf Diapositive).
L’umami est un gout d’individualisation plus récente. Il est dû à la présence d’acide glutamique
dans l’alimentation, notamment asiatique
2. Organe du Gout
Il est représenté par la langue qui contient les papilles gustatives, elles même contenant les
bourgeons gustatifs.
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Les bourgeons gustatifs contiennent les cellules gustatives réceptrices du gout qui vont envoyer
vers le système nerveux central les informations gustatives.
Ils forment des structures en « oignon » avec un pore sortant au niveau des papilles
linguales. Chaque bourgeon contient des cellules gustatives (perception du gout, TRC : taste
Cell Receptor). Les cellules TRC sont entourées de terminaisons nerveuses et de cellules
basales. Elles se renouvellent régulièrement, par cycles de 15 jours remplacées par des
cellules basales qui se différencient en cellules TRC.
c. La transduction du gout
Les mécanismes de Transduction sont complexes et différents pour les 5 gouts de base. La
transduction salée fait appel à des canaux Na+ spécifiques sur la membrane des cellules TRC. Pour les
autres gouts, la transduction est due à la fixation des molécules gustatives sur des récepteurs
transmembranaires. Ceux-ci provoquent l’activation de protéine G et la libération de calcium
intracellulaire, lui-même provoquant la libération de neurotransmetteur activant les extrémités
nerveuses présentes au sein des bourgeons gustatifs.
Un bourgeon gustatif contient des cellules ayant des récepteurs pour les différentes saveurs.
Les extrémités nerveuses présentes au niveau des bourgeons gustatifs forment es fibres
nerveuses qui vont quitter la langue vers le système nerveux central à travers 3 principaux
nerfs crâniens ( VII et IX et X). Il y a un relais au niveau d’un gros noyau du tronc cérébral. L’influx
ensuite suit des voies qui croisent la ligne médiane jusqu’au Thalamus. Puis l’information est
envoyé vers le cortex gustatif qui chez se situe au niveau de la partie insulaire antérieure.
L’insula est un lobe enfoui au fond de la fissure Sylvienne du cerveau (cf Figure).
C. L’Olfaction
C’est aussi un sens d’alerte mais qui joue de nombreux rôle dans la vie animale. Chez l’homme plus
de 5 millions de substances odorantes (dont 80% serait perçues comme désagréable) seraient
reconnues. L’apprentissage est comme pour le goût important (senteurs parfumeurs). C’est un
système à 2 neurones ne passant pas par le thalamus et atteignant directement le système nerveux
central.
Les principales structures dans l’organisation de l’olfaction sont : l’épithélium olfactif dans les cavités
nasales, un relais dans le bulbe olfactif puis transfert vers le système nerveux central (Figure
organisation du système olfactif)
1/L’épithélium Olfactif
Il représente environ 10 cm2 au niveau de la partie supérieure des fosses nasales chez l’homme. Il est
constitué de 3 types cellulaires: cellules olfactives réceptrices (COR), cellules basales, cellules de
soutien. Les COR sont de véritables neurones bipolaires avec une dendrite et un axone. Elles se
renouvellent toutes les 3 semaines environ par les cellules basales. C’est un exemple unique de
renouvellement de neurones tout au long de la vie d’un individu.
C’est la stimulation des COR par les odeurs au niveau de récepteurs spécifiques qui conduit à
l’émission d’un message nerveux. Elle se fait par plusieurs étapes :
- les récepteurs sont des récepteurs 7 domaines transmembranaires identifiés chez le rat
initialement dont on connait 350 gènes chez l’homme. Chaque COR a un seul type de récepteur.
- L’activation des récepteurs provoque une dépolarisation des cellules et l’émission de potentiel
d’actions au niveau des axones des COR qui forment les fibres nerveuses olfactives.
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Des études in vitro montrent que les neurones olfactifs répondent à plus d’un stimulus odorant
alors que chaque neurone olfactif a un seul récepteur. Ceci est dû au fait qu’une odeur donnée
peut activer plusieurs récepteurs. Ainsi une gamme de récepteur va être activée pour une odeur
donnée, conduisant à un codage de l’information et la base de la reconnaissance des odeurs.
Les cellules bipolaires envoient leurs axones à travers la lame criblée de l’ethmoïde vers le bulbe
olfactif. Elles y font synapse et un deuxième neurone (cellule mitrale) va quitter le bulbe olfactif
pour gagner les cortex olfactifs dans le SNC.
L’information olfactive est ensuite transmise aux cortex olfactifs qui sont essentiellement
représentés par les cortex temporo-internes et le cortex orbito-frontal