Origine Egyptienne Du Christiasme Et de L'islam

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SCIENCES DE L’ANTIQUITÉ

L’apport de la religion égypto-africaine aux religions révélées. Le cas du monothéisme.

Dr Mahamadou Imrane SOW


Université Cheikh Anta Diop de Dakar
[email protected]

Résumé : La civilisation égyptienne est connue pour avoir été l’une des civilisations les plus
vieilles au monde. Aujourd’hui, il est attesté que cette civilisation a un rapport direct avec
l’Afrique noire contemporaine et, a joué aussi un rôle important dans l’essor de la civilisation
orientale. Dans le domaine de la religion, la contribution de l’Afrique, singulièrement
l’Égypte ancienne, dans le développement du monothéisme dans les religions révélées est
donc fort probable. C’est cet apport que cette présente étude tente de montrer à travers les
sources écrites, l’épigraphie et certaines données fournies par les textes biblique et coranique.
Abstract: The Egyptian civilization is known to have been one of the oldest civilizations the
world. Today, it is attested that this civilization has a direct relationship with contemporary
black Africa and, it also played an important role in the rise of Eastern civilization. I the field
of religion, the contribution of Africa, particularly ancient Egypt, in the development of
monotheism in the revealed religions is so highly probable. It is this contribution that this
present study attempts to show through written sources, epigraphy and certain data provided
by biblical and koranic texts.

Mots Clés : Apport, Religion, Monothéisme, Afrique, Égypte, Proche-Orient.


Keywords: Contribution, Religion, Monotheism, Africa, Egypt, Near East.

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Introduction
Étymologiquement, le terme monothéisme est constitué de deux mots grecs à savoir ‘‘monos’’
qui signifie ‘‘seul, unique’’ et ‘‘thèos’’ qui renvoie à ‘‘dieu’’. C’est une doctrine religieuse
qui prône la croyance en un Dieu unique1. À cette croyance, il faut ajouter celle relative à
l’au-delà ou à la vie après la mort. Ces deux croyances sont étroitement liées, car la foi en
Dieu fait connaître la première source de l’univers et la foi en l’au-delà fait connaître le sort
de cette existence. Par conséquent, on ne peut pas croire l’une et ignorer l’autre. Ces deux
croyances sont fort anciennes et viennent incontestablement de la religion égyptienne2. La
croyance en l’au-delà des anciens Égyptiens, comme le précise Harun Yahya, « est une
preuve manifeste que le message divin (le monothéisme) avait atteint autrefois la terre
d’Égypte, mais que cette religion avait été plus tard pervertie, le monothéisme se trouvant
entaché d’ajouts polythéistes3. » Ces propos permettent de comprendre que l’Égypte ancienne
a connu deux types de religion : un monothéisme de fond et un polythéisme apparent.
Ce double aspect pose la problématique de l’étude de la divinité dans la religion égyptienne
qui a des connotations directes avec les religions négro-africaines4. C’est pourquoi, dans cette
étude, nous avons utilisé l’expression « religion égypto-africaine5. » Par son antériorité, cette
religion, que Doumbi Fakoly qualifie de « religion négro-africaine », a fortement influencé les
religions révélées. À ce sujet, il écrit : « La religion négro-africaine est non seulement
antérieure à toutes les religions jadis, hier et aujourd’hui encore pratiquées, mais qu’elle a été
la principale source d’inspiration des religions révélées6. » Cette étude vise donc à montrer,
par le biais de l’Égypte ancienne, la contribution de la religion égypto-africaine dans la
naissance et le développement du monothéisme dans les religions révélées. De ce point de
vue, la question qu’on pose est la suivante : Quel est l’apport de la religion égypto-africaine
dans l’étude du monothéisme dans les religions révélées ?

1
Méalet M. et al., 2018, Dictionnaire Universel, Paris, Hachette Livre/Edicef, p. 877.
2
Morenz S., 1977, Essai d’interprétation de la religion égyptienne, Paris, Payot, p. 198.
3
Yahya H., 2003, Les Nations disparues, Paris, Es-Salaam, p. 103.
4
Se référer entre autres aux travaux de Cheikh Anta Diop, Théophile Obenga, Aboubacry Moussa Lam,
Mouhamadou Nissire Sarr, El Hadji Malick Dème, Mahamadou Imrane Sow, etc.
5
L’expression ‘‘égypto-africaine’’ ou ‘‘religion égypto-africaine’’ que nous employons dans cette étude, « est
un mot composé connu des égyptologues africains. Elle est utilisée en faisant simultanément référence à
l’Égypte ancienne et à l’Afrique noire contemporaine. Ce nom est convoqué lorsqu’on veut parler de la négro-
civilisation dans un élan de comparaison avec l’Égypte ancienne », Ayafor E. A. et Sow M. I., 2022, Mort et au-
delà dans la religion égypto-africaine et les religions révélées. Étude comparée, Paris, Connaissances et Savoirs,
p. 22.
6
Fakoly D., 2004, L’origine négro-africaine des religions dites révélées, Paris, Ménaibuc, p. 8.

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La réponse à cette question passe d’abord par un rappel des rapports qui existent entre
l’Égypte ancienne et l’Afrique noire contemporaine7 ; ensuite l’étude de la problématique de
la divinité dans la religion égypto-africaine et enfin l’influence de cette dernière sur les
religions révélées en insistant sur le monothéisme. La démarche adoptée est à la fois
analytique et comparative.
1. Le rapport entre l’Égypte ancienne et l’Afrique noire contemporaine
L’existence de lien entre l’Égypte ancienne et l’Afrique noire contemporaine a fait couler
beaucoup d’encre et de salive entre les chercheurs. En effet, deux camps s’opposaient quant à
l’identification du berceau de l’unité culturelle africaine, les tenants de la thèse saharienne
d’une part et ceux de la thèse nilotique d’autre part8. Le colloque du Caire de 1974 organisé
par l’UNESCO a mis fin à ce débat dans la mesure où il a permis non seulement de réintégrer
l’Égypte dans l’univers négro-africain, mais aussi de mettre en évidence l’existence d’une
parenté culturelle profonde entre celle-ci et le reste de l’Afrique noire, comme le stipulent les
actes du colloque :
« Le colloque du Caire marque une étape capitale dans l’historiographie africaine. Pour la
première fois des experts africains confrontent, dans le domaine de l’égyptologie, les résultats
de leurs recherches avec ceux de leurs homologues des autres pays, sous l’égide de l’UNESCO.
La légitimité scientifique de rechercher systématiquement les liens, quels qu’ils soient, pouvant
exister entre l’Égypte ancienne et le reste de l’Afrique noire a été reconnue au plan
international9. »

Ainsi, le colloque du Caire a marqué un tournant décisif dans l’historiographie africaine,


singulièrement l’égyptologie ; il a accéléré la réécriture de l’histoire africaine avec comme
référentiel l’Égypte ancienne. Aujourd’hui, plus que jamais, des études menées dans ce sens
confirment davantage l’existence de cette profonde parenté culturelle entre l’Égypte ancienne
et le reste de l’Afrique noire dans plusieurs domaines. Théophile Obenga fait le bilan de ce
rapport en ces termes :

7
Il faut souligner aussi que les religions révélées que nous étudions dans ce travail ont des rapports très étroits.
En effet, « il faut entendre par ‘‘religions révélées’’, les trois religions monothéistes révélées en milieu
sémitique (le Judaïsme, le Christianisme et l’Islam). Ces religions, souvent dites religions du livre, prônent la
croyance en un Dieu unique qui s’est révélé pour la première fois à Abraham, le patriarche commun à ces trois
religions. La deuxième caractéristique est qu’elles reposent sur des livres sacrés à savoir, la Bible (pour le
Judaïsme et le Christianisme) et le Coran auquel nous pouvons ajouter la Sunna ou les Hadiths du Prophète
Mouhammad pour l’Islam. Donc, un Dieu commun, un ancêtre commun et des Écritures saintes en corrélation
constituent les trois éléments qui relient le Judaïsme, le Christianisme et l’Islam ». Ayafor E. A. et Sow M. I.,
2022, Mort et au-delà dans la religion égypto-africaine et les religions révélées. Étude comparée, Paris,
Connaissances et Savoirs, p. 20-21.
8
Pour plus de détails, le lecteur peut se référer à l’ouvrage d’Aboubacry Moussa Lam., 1997, Les chemins du
Nil. Les relations entre l’Égypte ancienne et l’Afrique noire, Paris, Présence Africaine.
9
« Les 20 ans du colloque du Caire (1974-1994) : Le peuplement de l’Égypte ancienne et le déchiffrement de
l’écriture méroïtique »., 1994, in Ankh : Revue d’égyptologie et des civilisations africaines, Paris, Khépéra, n°3,
p. 20.

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« Entre l’Égypte pharaonique et l’Afrique noire d’avant la colonisation, des éléments culturels
décelables sont si nombreux, si variés, si pertinents et d’une telle nature qu’ils ne peuvent que
renvoyer à une communauté d’origine. En Égypte et en Afrique noire, existent et se pratiquent
d’une manière intrinsèque des coutumes identiques : système matrilinéaire, rite de la
circoncision, conception de la création des êtres à partir d’un fonds préexistant (crachat, œuf
cosmique, parole, pensée), collège des initiés et des initiateurs (collège de Thot/collège du
Dahomey), identification de l’initiateur aux dieux de la communauté villageoise, port de la
barbe sacrée dite « barbe postiche10. »

Il convient de rappeler que ces similitudes ne sont pas des faits du hasard. En effet, avant le
séjour de certains prophètes des religions révélées en Égypte ancienne, la Vallée du Nil fut
d’abord le lieu par excellence où les anciens Égyptiens et les Négro-africains leurs
contemporains vécurent ensemble pendant des millénaires. Ils ont donc une origine commune
qui est la Vallée du Nil. La séparation entre anciens Égyptiens et populations noires leurs
contemporains intervint quand l’Égypte fût occupée par les Perses en -525. Cette occupation
longue11 et douloureuse entraîna le départ de certains riverains de la Vallée du Nil vers
l’intérieur du continent africain. C’est dire avec Cheikh Anta Diop que : « Les peuples
africains, qui étaient jusque-là retenus dans la Vallée du Nil comme par un aimant, irradient le
continent dans toutes les directions12. » Ces migrations vers le reste du continent noir sont
plus vraies encore « vu que l’opinion générale dans toute la Sénégambie est que notre contrée
doit son peuplement à des migrations venues de l’Égypte, desquelles descendent toutes ces
populations13. »
En migrant, celles-ci apportèrent avec elles certains éléments de civilisation déjà façonnés et
modelés dans la Vallée du Nil. Voilà pourquoi aujourd’hui, « l’héritage pharaonique survit de
diverses manières en Afrique noire, au sein des sociétés qui n’ont pas encore perdu leur âme
ancestrale ou, comme on dit, leur ‘‘identité culturelle’’, leur ‘‘authenticité historique’’ 14. » À
titre d’exemple, le Dieu céleste sérère Rog Sen fait penser à Ra15. Des divinités nommées
Imana chez les Rwanda, les Rundi des Grands Lacs Africains et les Sanga du Shaba au Zaïre
font également penser à Imn (Amon) de l’Égypte ancienne16.

10
Obenga T., 1973, L’Afrique dans l’antiquité. Égypte ancienne-Afrique noire, Paris, Présence Africaine, p. 446.
11
Cette occupation dont on date le début en -525 s’est passée en deux temps : la première occupation perse :
525-404 av. J.C. ; la deuxième occupation : 384-321 av. J.C. Les souverains perses qui ont gouverné l’Égypte
dans la chronologie égyptienne constituent la XXVIIème dynastie.
12
Diop C. A., 1967, Antériorité des civilisations nègres. Mythe ou vérité historique ? Paris, Présence Africaine,
p. 12.
13
Lam A. M., 1991, « Les migrations entre le Nil et le Sénégal : les jalons de Yoro Dyâo », in Annales de la
Faculté des Lettres et Sciences Humaines, n°21, Dakar, FLSH, p. 130-131.
14
Obenga T., 1990, La philosophie africaine de la période pharaonique (2780-330 avant notre ère), Paris,
L’Harmattan, p. 197.
15
Diop C. A., 1981, Civilisation ou barbarie. Anthropologie sans complaisance, Paris, Présence Africaine, p.
215-216.
16
Obenga T., 1990, La philosophie africaine de la période pharaonique, p. 464.

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Après avoir rappelé le rapport qui existe entre l’Égypte ancienne et l’Afrique noire
contemporaine, il nous reste à présent, à nous pencher sur la problématique de la divinité dans
la religion égypto-africaine.
2. La problématique de la divinité dans la religion égypto-africaine
Une des questions les plus récurrentes dans toutes les religions du monde est très certainement
celle ayant trait à l’existence oui ou non d’une ou de plusieurs divinités. La religion égypto-
africaine n’a pas fait exception à la règle. C’est dire que, dans cette religion, l’existence de
divinité ou de divinités ne fait pas l’ombre d’un doute. L’aspect monothéiste de la religion
égypto-africaine17 n’est pas facile à cerner. En Égypte ancienne, le monothéisme s’est
maintenu côte à côte avec une autre doctrine, le polythéisme durant toute la période de
l’histoire de la civilisation égyptienne. Déjà, sous la Vème dynastie, l’évidence des textes
pyramidaux montre que le monothéisme et le polythéisme fleurissaient côte à côte. C’est ce
qui fait que, dès l’Ancien Empire, la religion égyptienne avait un double aspect : un
polythéisme apparent et un monothéisme de fond.
L’explication que certains égyptologues donnent à cette situation est que : « The religion of
Egypt was from the beginning polytheistic, but that it developed in two opposite directions, in
the one direction gods were multiplied by the addition of local gods, and in the other the
Egyptians drew nearer and nearer to monothéisme18. » Aujourd’hui, une des premières
choses qui ne peuvent passer inaperçues lorsqu’on s’intéresse à la religion égyptienne, c’est
l’effarant nombre de dieux. Il n’y a pas de ville si petite qu’elle soit qui n’ait son dieu.
L’Égypte a connu au moins deux sortes de dieux : des dieux locaux et des dieux cosmiques.
L’existence de tous ces dieux semble faire de la religion égyptienne une religion polythéiste.
Toutefois, d’autres versions donnent à l’Égypte une religion monothéiste19. L’aspect
monothéiste de la religion égyptienne est exprimé clairement dans les textes funéraires des
anciens Égyptiens, depuis l’Ancien Empire jusqu’à la Basse époque, où le mot de « Dieu »
nTr tout court revient fréquemment.

17
Contrairement à la religion égypto-africaine, dans les religions révélées, le monothéisme n’a pas été un sujet
de controverse. Cf. supra, note 7, p. 3.
18
Budge E. A. W., 1895, The Book of the dead. The papyrus of Ani : http://www.sacred-
texts.com/egy/ebod/index.htm, p. xciv, consulté le 28/03/2023.
19
La nature de la religion égyptienne a été un débat controversé entre les égyptologues. Pour certains, la religion
égyptienne est une religion polythéiste ; alors que pour d’autres, elle est monothéiste. Pour plus de détails, cf.
Hornung E., 1968, Les Dieux de l’Égypte. Le un et le multiple, Paris, Éditions du Rocher. Après une analyse
minutieuse de la question dans ma thèse de Doctorat d’État, j’ai pu constater que la religion égyptienne était une
religion monothéiste et, de ce point de vue, elle a même influencé les religions révélées. Cette présente étude est
donc une sorte de confirmation de cette idée déjà développée dans ma thèse.

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Dans ces textes, le mot nTr (singulier) apparaît aussi sous la forme du féminin nTrt, sous la
forme du duel nTrwj (féminin nTrtj) ainsi que sous la forme du pluriel nTrw (féminin nTrwt).
Erick Hornung fait remarquer que : « Ce terme employé au singulier constitue un indice
susceptible de prouver l’existence d’un monothéisme égyptien 20. » C’est ce qui l’amène à dire
que : « Dans l’antique religion égyptienne, le monothéisme est incontestable. La multiplicité
des dieux n’est due qu’à la personnification des ″attributs, des caractères et des fonctions du
Dieu suprême″21. » François Daumas abonde dans le même sens lorsqu’il écrit :
« Une divinité unique qui déléguait quelques pouvoirs particuliers à des créatures divines qui
équivalaient à nos anges ou quelque chose d’approchant. Et quand l’Égyptien cultivé les
appelait dieux, il n’était pas troublé car il savait que ces noms individuels n’étaient que des
appellations spécialisées, d’une force divine unique22. »

Selon le Professeur Cheikh Anta Diop, « le monothéisme, dans toute son abstraction, existait
déjà en Égypte qui, elle-même l’avait emprunté au Soudan Méroïtique, Ethiopie des auteurs
anciens23. » C’est le monothéisme inclusif ou monothéisme cosmogonique, selon la remarque
faite par Jan Assmann24. Il explique que : « D’après cette théorie, le monde est plein de dieux,
mais ces dieux proviennent, comme tous les autres êtres vivants ainsi que le monde en tant
que tel, d’un seul Dieu primordial25 . » Sous ce rapport, le monothéisme égyptien serait
antérieur à celui des religions révélées. Doumbi Fakoli ne dit pas le contraire lorsqu’il écrit :
« L’idée du Dieu Unique, seule raison et source de toute la création représente la pierre
angulaire de l’enseignement de l’ancienne Égypte et c’est cette idée qui servit de base aux
religions monothéistes postérieures telles que par exemple la religion hébraïque 26. » La notion
de Dieu unique persista jusqu’à l’époque gréco-romaine. Elle apparaît à travers les textes
religieux égyptiens avec Atoum, le démiurge d’Héliopolis dont la racine tm signifie à la

fois « être complet », mais aussi « ne pas être ».

20
Hornung E., 1968, Les Dieux de l’Égypte. Le un et le multiple, Paris, Éditions du Rocher, p. 13.
21
Hornung E., 1968, Les Dieux de l’Égypte. Le un et le multiple, Paris, Éditions du Rocher, p. 13.
22
Daumas F., 1982, La civilisation de l’Égypte pharaonique, Paris, Arthaud, p. 281.
23
Diop C. A., 1979, Nations nègres et culture. De l’Antiquité nègre égyptienne aux problèmes culturels de
l’Afrique noire d’aujourd’hui, Paris, Présence Africaine, p. 45.
24
Assmann J., 2015, « Nommer l’un dans la théologie égyptienne », in Revue des Sciences Religieuses, n°89, p.
138.
25
Assmann J., 2015, « Nommer l’un dans la théologie égyptienne », p. 138.
26
Fakoly D., 2004, L’origine négro-africaine des religions dites révélées, Paris, Éditions Ménaibuc, p. 42.

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Dieu (Atoum) est l’unique, disent les Textes des Pyramides27. Salut à toi l’unique, énoncent
les Textes des Sarcophages28. Toi le seigneur ! Toi, l’unique ! reprend le Livre des Morts29.
Par-là, Atoum est le maître unique (nb w‘), maître de l’univers (nb r ḏr)30 ; maître de tout
(nb tm), et le créateur de tout (qmA tm)31. Le Dieu Atoum est parfois
associé à Amon Imn qui signifie littéralement « celui qui est caché », « celui qui est
invisible », c’est-à-dire le Dieu dont l’identité n’est pas révélée. L’extrait d’un papyrus écrit
pour le prince Nesi Khonsou, membre du sacerdoce d’Amon, est un exemple du langage
exalté dans lequel ses notariés s’adressaient à Lui, en tant que Dieu de tous les dieux :
« This is the sacred god, the lord of all the gods, Amon-Ra, the lord of the throne of the world, the prince
of Apt, the sacred soul who came into being in the beginning, the great god who liveth by right and truth,
the first ennead which gave birth unto the other two enneads, the being in whom every god existeth, the
One of One, the creator of the things which came into being when the earth took form in the beginning,
whose births are hidden, whose forms are manifold, and whose growth cannot be known… 32. »

Par conséquent, nous pouvons soutenir que la multiplicité des dieux égyptiens ne signifie
nullement que les anciens Égyptiens ont été des polythéistes, même si les esprits les moins
avertis peuvent penser le contraire. Les dieux locaux et cosmiques constituent les différents
attributs du Dieu unique qui est invisible, omnipotent, omniprésent. En Afrique noire, la
problématique de la divinité s’est également posée, car l’histoire du continent africain a été
falsifiée par les chercheurs occidentaux qui n’ont pas hésité d’un iota à ériger en vérités
scientifiques des préjugés sur les Nègres, pour justifier la traite négrière dans un premier
temps33, et pour légitimer le colonialisme en second lieu34.

27
Al-Assiouty S. A., 1989, Origines égyptiennes du Christianisme et de l’Islam. Résultat d’un siècle et demi
d’archéologie, T. III : Recherches comparées sur le Christianisme primitif et l’Islam premier, Paris, Letouzey et
Ané, p. 233.
28
Al-Assiouty S. A., 1989, Origines égyptiennes du Christianisme et de l’Islam. Résultat d’un siècle et demi
d’archéologie, T. III : Recherches comparées sur le Christianisme primitif et l’Islam premier, Paris, Letouzey et
Ané, p. 233.
29
Al-Assiouty S. A., 1989, Origines égyptiennes du Christianisme et de l’Islam, p. 233.
30
Bickel S., 1994, La cosmogonie égyptienne avant le Nouvel Empire, Fribourg, Éditions Universitaires, p. 35-
36.
31
Somet Y., 2016, L’Égypte ancienne : un système africain du monde, Thèse de Doctorat d’égyptologie,
U.C.A.D., p. 48.
32
Budge E. A. W., 1895, The Book of the dead. The papyrus of Ani : http://www.sacred-
texts.com/egy/ebod/index.htm, p. xcv, consulté le 28/03/2023.
33
Pour plus de détails à ce sujet, le lecteur peut se référer à l’article Diop B., 2004, « De l’utilisation des textes
religieux pour justifier la traite des noirs », in Revue Sénégalaise D’Histoire : Archéologie, Histoire et
Civilisations, n°6, Dakar, p. 20-25.
34
La négation de l’existence d’une histoire ou d’une civilisation en Afrique noire fût théorisée pour la première
fois par le philosophe allemand G. W. F. Hegel dans son ouvrage intitulé La raison dans l’histoire. Introduction
à la philosophie de l’histoire. Voici ses propos : « Ce continent n’est pas intéressant du point de vue de sa
propre histoire, par le fait que nous voyons l’homme dans un état de barbarie et de sauvagerie qui l’empêche de
faire partie intégrante de la civilisation ; c’est le pays de l’enfance qui, au-delà du jour de l’histoire consciente,
est enveloppé dans la couleur noire de la nuit… Tels nous les voyons aujourd’hui tels ils ont toujours été. Dans
l’immense énergie de l’arbitraire naturel qui les domine, le moment moral n’a aucun pouvoir précis. Celui qui

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Ce discours ethnocentriste mit l’accent sur la primauté de l’Indo-européen civilisateur des


Nègres incapables de développer et de recevoir une éducation ; ce qui fait que : « l’Afrique
n’est pas un continent historique35. » Chemin faisant, « le diktat néocolonial élevé au rang de
‘‘vérité scientifique irréfutable’’, allait aliéner des générations d’Africains qui finissaient par
se persuader que l’Afrique n’avait pas pu inventer de religion authentique36. » Toutefois, en
parcourant de nombreux écrits consacrés à l’histoire des religions africaines depuis leur
antiquité égypto-nubienne, on se rend compte que ces préjugés ne reposent sur aucun
fondement scientifique. C’est dire par-là que les Occidentaux par le biais des missionnaires
n’ont pas apporté de religion ni de civilisation aux populations d’Afrique noire. Sur ce plan,
ils ont échoué37.
Les sources dont nous disposons révèlent que les peuples africains, en dépit de leurs diversités
à l’époque précoloniale, élaborèrent chacun leur propre religion en y investissant tous leurs
particularismes. Ils philosophèrent chacun à leur façon et en fonction de leurs coutumes, de
leurs conditions de vie et des circonstances. La plupart de ces philosophies religieuses furent
monothéistes, car reposant sur un Dieu unique38. Ainsi, malgré la diversité des peuples
africains, il existe entre eux une identité religieuse commune dans la conception de la divinité.
Par exemple, les populations sénégambiennes, dans leur immense majorité, ont cru à travers
leur histoire religieuse en un Dieu suprême. Les traditions recueillies auprès de certaines
ethnies (Peuls, Seereer, Diola, etc.,) ne laissent subsister aucun doute sur cela. Nous pouvons
le vérifier à loisir.

veut connaître les manifestations épouvantables de la nature humaine peut les trouver en Afrique. Les plus
anciens renseignements que nous ayons sur cette partie du monde disent la même chose. Elle n’a donc pas à
proprement parler, une histoire. Là-dessus, nous laissons l’Afrique, elle ne montre ni mouvement, ni
développement et ce qui s’y est passé, c’est-à-dire au Nord, relève du monde asiatique et européen ». Hegel G.
W. F., 1965, La raison dans l’histoire. Introduction à la philosophie de l’histoire, Paris, UGE/Plon, p. 262-264.
35
Diagne P., 1980, « Histoire et linguistique », in Histoire générale de l’Afrique, tome I : Méthodologie et
préhistoire africaine, Paris, Unesco/Jeune Afrique, p. 271.
36
Gnonsea D., 2003, Cheikh Anta Diop et Théophile Obenga : combat pour la renaissance africaine, Paris,
L’Harmattan, p. 83.
37
Le véritable enjeu de la présence des missionnaires en terre africaine n’était pas a priori d’ordre spirituel mais
économique. Ceci se vérifie à travers ce discours de Léopold II, roi des Belges, devant les missionnaires se
rendant en Afrique, et précisément au Congo : « Révérends pères et chers compatriotes. La tâche qui vous est
confiée est très délicate à remplir et demande du tact (…). Le but principal de votre mission au Congo n’est donc
point d’apprendre aux Nègres à connaître Dieu (…). Votre rôle essentiel est de faciliter leurs tâches aux
administratifs et aux industriels (…), vous veillerez entre autres à désintéresser nos sauvages des richesses dont
regorgent leur sol et sous-sol, pour éviter qu’ils s’y intéressent, qu’ils ne nous fassent pas une concurrence
meurtrière et rêvent un jour de nous déloger. Votre connaissance de l’évangile vous permettra de trouver
facilement des textes recommandant aux fidèles d’aimer la pauvreté, tel par exemple ‘‘heureux les pauvres car
le royaume des cieux est à eux. Il est difficile à un riche d’entrer dans le royaume des cieux’’. Vous ferez tout
pour que les Nègres aient peur de s’enrichir pour mériter le ciel ». Bamba A., « L’Afrique entre Dieu et dieux :
le mouvement pendulaire de la foi », https://docplayer.fr/13666106-L-afrique-entre-dieu-et-dieux-le-
mouvement-pendulaire-de-la-foi.html, consulté le 11/03/2023, p. 73.
38
Welch G.,1970, L’Afrique avant la colonisation, Paris, Fayard, p. 170.

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En effet, chez les Peuls le Dieu suprême est nommé ‘‘Gueno’’ ou ‘‘Doundari’’, Dieu créateur
de tout ce qui existe, unique, immortel, omniscient, omnipotent et tout puissant39. La
métaphysique qui se dégage des prières sérères précise que Roog Seen, le Dieu suprême, est
unique et incréé. À ce propos, la tradition orale sérère rapportée par Henry Gravrand dit :
Roog jeger cati;
Roog jeger baa;
Roog jeger yaa;
Roog jeger o ndeh

Traduction
Roog n’a pas de grands parents
Roog n’a pas de père, ni de mère, ni de frère40.
Louis-Vincent Thomas qui a consacré sa thèse de Doctorat d’Etat aux Diola de la Basse-
Casamance abonde également dans le même sens. Au terme de cette étude, il conclut que :
« Ce peuple croit en un Dieu unique Ata Emit, Maître de la pluie, irreprésentable, force
impersonnelle41. » La conception des Diola de Dieu unique ne diffère pas de celle des Congo-
Nord occidentaux et de celle des Miniyanka du Mali. En effet, Chez les Congo Nord-
occidentaux, de même que chez les Miniyanka du Mali, « les populations croient en un Dieu
unique, nommé respectivement Bumba Chembe (Nzambi) et klé42. » La tradition bambara du
‘‘komo’’ nous apprend aussi que le Dieu unique, suprême, Maa Ngala est ‘‘Dombali’’, c’est-
à-dire, inconnaissable et ‘‘Dombali’’ qui signifie incréé, infini43. Tout ce qui a été écrit
jusqu’ici met en branle l’aspect monothéiste de la religion égypto-africaine. Celle-ci joua un
rôle important dans l’émergence du monothéisme dans les religions révélées. C’est ce que
nous allons illustrer dans les lignes qui suivent.
3. L’influence de la religion égypto-africaine sur les religions révélées
Pour mettre en évidence l’apport de la religion égypto-africaine aux religions révélées dans le
domaine du monothéisme, il faut remonter à l’époque précoloniale, à l’antiquité égyptienne.
Surtout que pour Cheikh Anta Diop :

39
Lam A. M., 1993, De l’origine égyptienne des Peuls, Paris, Présence Africaine/Khépéra, p. 269.
40
Gravrand H., 1990, La civilisation seereer. Pangol : le génie religieux seereer, N.E.A., p. 180-181.
41
Thomas L-V., 1959, Les Diola. Essai d’analyse sur une population de Basse-Casamance, Dakar, IFAN, p.
589.
42
Lam A. M. et Sy M. I., 1999-2000, « Le forgeron en Afrique noire depuis l’Égypte ancienne : Du héros
civilisateur au paria d’aujourd’hui », Revue Sénégalaise d’Histoire, Dakar, FLSH, n°4-5, p. 6-7.
43
Bâ A. H., 1980, « La tradition vivante », in Histoire générale de l’Afrique, tome I : Méthodologie et
préhistoire africaine, Paris, Unesco/Jeune Afrique, p. 194.

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53
SCIENCES DE L’ANTIQUITÉ
« Le retour à l’Égypte dans tous les domaines est la condition nécessaire pour réconcilier les
civilisations africaines avec l’histoire, pour pouvoir bâtir un corps des sciences humaines
modernes pour rénover la culture africaine. Loin d’être une délectation sur le passé, un regard
vers l’Égypte antique est la meilleure façon de concevoir et de bâtir notre futur culturel.
L’Égypte jouera dans la culture africaine repensée et rénovée, le même rôle que les antiquités
gréco-latines dans la culture occidentale44. »

À la suite de ce texte, faudrait-il penser à une origine égyptienne du monothéisme des


religions révélées ? En tout cas, si l’on tient compte de la religion comme élément important
de la civilisation et dont l’Égypte ancienne est le berceau selon les attestations écrites, on
pourrait répondre par l’affirmative. D’ailleurs, ils existent des références à certains Égyptiens
qui invitèrent les gens autour d’eux à embrasser la religion monothéiste, et ce avant la
naissance de Musa ou Moïse. L’un d’entre eux est le pharaon le plus remarquable de l’histoire
de l’Égypte, à savoir Aménophis IV45. Celui-ci s’était fixé pour mission dès le début de son
règne de débarrasser l’Égypte de ses multiples et encombrantes représentations qui, au lieu de
traduire la réalité, la voilaient.
C’est pendant la cinquième année de son règne qu’il rompit ouvertement avec les prêtres
thébains et déplaça la capitale dans la nouvelle ville, Axt-itn – (Akhetaton,
nouvelle capitale de l’Égypte sous Akhenaton, aujourd’hui Tel-el Amarna ou « Horizon du
disque solaire Aton »)46. Aménophis IV a donné l’explication de ce départ sur une stèle où il
dit : « For, as Father Hor-Aten liveth, more evil are they than those things which I heard unto
year four, more evil are they than those things which I have heard in the year (missing). More
evil are they than those things which the king… heard47. » C’est, ainsi installé à Tel-el
Amarna, que le pharaon envoya de Memphis jusqu’en Nubie des hommes chargés de détruire
les traces des antiques croyances, comme l’explique Claire Lalouette :
« La nouveauté du règne d’Aménophis IV réside dans l’intolérance, qui entraîna destruction et
persécution. Les temples furent fermés, les images sacrées détruites, les richesses des lieux
saints furent saisies et transférées à Amarna. Les séides d’Akhénaton se répandirent dans la
nécropole thébaine, pénétrant dans les tombes, cherchant par le martelage à faire disparaître
systématiquement les noms divins, et surtout celui d’Amon, partout où ils se trouvaient. C’est
un phénomène curieux que cette grande persécution religieuse, témoin d’une haine portée par
Akhénaton envers Thèbes et ses clercs48. »

44
Diop C. A., 1967, Antériorité des civilisations nègres. Mythe ou vérité historique ? Paris, Présence Africaine,
p. 215.
45
Yahya H., 2003, Les nations disparues, Paris, Es-Salaam, p. 103.
46
Bonnamy Y. et Sadek A. A., 2013, Dictionnaire des hiéroglyphes. Hiéroglyphes-Français, Nouvelle édition,
Paris, Actes Sud, p. 17.
47
Gabriel R. A., 2002, Gods of our fathers : The memory of Egypt in Judaism and Christianity, London,
Greenwood Press, p. 45.
48
Lalouette C., 1986, Thèbes. La naissance d’un empire, Paris, Arthème Fayard, p. 515.

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SCIENCES DE L’ANTIQUITÉ

C’est dans cette perspective qu’il remplaça le clergé d’Amon de Thèbes par son dieu Aton
symbolisé par le disque solaire. La relation entre le roi et son Dieu était très étroite. Cette
relation se reflète dans le texte selon lequel : « There is none that know him [the Aten] except
your son [Akhenaton]...for your make him aware of your plans and strength49. » Aujourd’hui,
l’égyptologie a conservé la déclaration du point de vue d’Aménophis IV sur le dieu Aton. Il
s’agit d’un hymne qui révèle la croyance émotionnelle et passionnée du pharaon à l’égard de
son Dieu, Aton. L’examen de cet hymne fait apparaître entre autres cinq croyances
fondamentales, à savoir le monothéisme, l’interdiction des idoles comme faux dieux,
l’immortalité de l’âme, l’au-delà et jugement moral, et la résurrection. Voici un extrait de cet
hymne :
« The great and living Aten… ordaining life, vigorously alive, my Father… my wall of millions
of cubits, my reminder of Eternity, my witness of what is devised, who is established in rising
and setting each day ceaselessly. Whether He is in heaven or earth, every eye beholds Him
without hindrance while He fills the land with His rays and makes everyone to live. With seeing
whom my eyes are satisfied daily when He rises in this temple of the Aten at Akhetaten and fills
it with his Own self by means of His rays, beauteous with love, and embraces me with them in
life and power for ever and enver50. »

De tout ce qui précède, on note que l’aspect le plus visible du monothéisme égyptien reste
sans doute la réforme religieuse du pharaon Aménophis IV qui eut lieu au XIVème siècle
avant J.-C. Il a initié une nouvelle théologie symbolisée par le Dieu Aton, l’incarnation du
soleil. Ce faisant, il est devenu le fondateur de la première religion monothéiste de l’histoire
de l’humanité51. Il fit Aton le seul et unique Dieu vénéré par tous les Égyptiens au moins
durant tout le temps de son règne52. En plus, de l’avis de certains égyptologues, l’hymne
qu’Aménophis IV avait écrit pour son dieu Aton a influencé fortement le Psaume 104 de
David. Quelques extraits comparés suffisent à prouver cela53 :

49
Teeter E.,
https://www/Corpus%201%20égyptologie/[Emily_Teeter]_Religion_and_Ritual_in_Ancient_Egyp.pdf, consulté
le 20/03/2023, p. 184.
50
Gabriel R. A., 2002, Gods of our fathers : The memory of Egypt in Judaism and Christianity, London,
Greenwood Press, p. 49.
51
Cependant, Théophile Obenga, à la suite de Cheikh Anta Diop, nous apprend que le monothéisme égyptien
date d’avant Akhenaton ou Aménophis IV. Il écrit à ce sujet : « En fait, Aménophis IV, en renouant avec le culte
du Soleil érigé en une entité divine unique, toute-puissance et universelle, ne faisait que rejoindre, pour
l’essentiel, un vieux courant spirituel de ses propres ancêtres de l’Ancien Empire (2780-2280 av. notre ère) »,
Obenga T., 1990, La philosophie africaine de la période pharaonique, p. 88.
52
La période de règne du pharaon Aménophis IV est appelée aussi en égyptologie la « période amarnienne ».
Elle englobe le règne d’Akhénaton et de ses deux successeurs, comme le dit bien Emily Teeter 52 : « The
''Amarna period'' (roughly 1350-1325 BC) refers to the reigns of Amenophis IV (who changed his name to
Akhenaten) and his two successors, Smenkhkare and Tutankhamun ». Teeter E.,
https://www/Corpus%201%20égyptologie/[Emily_Teeter]_Religion_and_Ritual_in_Ancient_Egyp.pdf, consulté
le 20/03/2023, p. 185.
53
Fakoly D., 2004, L’origine négro-africaine des religions dites révélées, Paris, Ménaibuc, p. 70.

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SCIENCES DE L’ANTIQUITÉ

Hymne d’Aménophis IV Psaume 104


Lorsque tu te couches…la terre est dans Tu amènes les ténèbres et il est nuit…Les
l’obscurité comme si elle était lionceaux rugissent après la proie et
morte…chaque lion sort de sa tanière et tous demandent à Dieu leur nourriture (20,21).
les reptiles mordent.
…Quand tu te lèves à l’horizon…tu dissipes Le soleil se lève ; ils (les fauves) se retirent et
l’obscurité…ils (les hommes) s’éveillent et se couchent dans leurs tanières. L’homme
se tiennent sur leurs pieds…ils prennent leurs sort pour se rendre à son ouvrage et à son
vêtements…et le pays tout entier se livre à travail jusqu’au soir (22,23).
son travail…
Les arbres et les plantes verdissent. Les Les arbres de l’Eternel se rassasient. C’est là
oiseaux quittent leurs nids et leurs ailes te que les oiseaux font leurs nids…Tous ces
louent. Tous les animaux bondissent sur leurs animaux espèrent en toi (16, 17, 27).
pattes.
Quelles sont multiples tes œuvres ! ...Tu as Que tes œuvres sont en grand nombre, ô
créé la terre et les hommes suivant ton désir. Eternel Tu les as toutes faites avec sagesse
(24).

David n’est pas le seul prophète juif à avoir subi l’influence égyptienne du monothéisme car,
« the religion of Akhenaton during the Amarna Period has been described as ''monotheism'',
and heralded as a possible indication that the Egyptians were the source of Judeo-Christian
thought54. » Cette influence est beaucoup plus manifeste avec le prophète Moїse qui, d’après
la Bible, le Coran et l’égyptologie, est né en Égypte. Certaines sources égyptologiques
précisent que le nom de Moïse qui, en hébreux se prononce « mosché » est d’origine
égyptienne. D’après Richard A. Gabriel, « Moses is the Greek translation of the Egyptian
word ‘‘mose’’ meaning child and is an abridgement of a usually more complete theophorous
name such as Ptahmose (child of Ptah) or Amunmose (child of Amun). The name is a common
one found on many Egyptian graves55. »

54
Douglas J. et al., 1999, Egypt and the Egyptians, Cambridge University Press, p. 91.
55
Gabriel R. A., 2002, Gods of our fathers : The memory of Egypt in Judaism and Christianity, London,
Greenwood Press, p. 78.

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SCIENCES DE L’ANTIQUITÉ

Ce nom lui a été donné par la fille du pharaon qui, après avoir sorti l’enfant (Moïse) du Nil,
l’appela Moïse en motivant étymologiquement le choix de ce nom par le fait qu’il avait été
‘‘sauvé des eaux’’56. Ce point de vue est partagé par l’égyptologue Aboubacry Moussa Lam
lorsqu’il écrit :
« Nous ne savons pas qui est à l’origine de la thèse de l’extraction théophorique du nom de
Moïse mais il est étonnant qu’elle ait connu autant de succès malgré l’absence d’une
démonstration digne de ce nom. Mou-cha (eau et arbre) est à notre avis la vraie étymologie du
nom de Moïse. En effet, c’est elle qu’imposent les faits biographiques de personnage Moïse
fournis par la Bible, le Coran et d’autres traditions non égyptologiques et dont l’un des épisodes
les plus significatifs a été admirablement ramassé dans un nom de circonstance que la
sémantique identifie incontestablement comme initialement égyptien57. »

Moïse est également éduqué dans la cour du pharaon où il grandit comme un prince égyptien.
L’idée communément admise de son éducation en Égypte est que : « Moses was learned in all
the wisdom of the Egyptians, and was mighty in his words and deeds 58. » Ainsi, durant son
séjour dans le pays des pharaons, Moїse qui vivait à Tell-el-Amarna où s’est déroulée la
réforme religieuse d’Aménophis IV a gardé le souvenir d’Aton, dieu un et unique59. De ce
point de vue, l’idée centrale des Juifs, à savoir qu’il existe un Dieu unique et non une
multitude de divinités, est d’origine égyptienne. Cette idée est fortement développée par
Cheikh Anta Diop qui fait remarquer que les Juifs n’ont pas inventé le monothéisme ; ils l’ont
reçu de l’Égypte ancienne. En se basant sur les données fournies par la Bible même, il montre
que c’est dans le pays des pharaons que le peuple juif s’initiera au monothéisme. Voici ses
propos : « Ainsi, après les réticences du début, ce peuple (juif) qui ne semblait pas avoir
connu le monothéisme jusque-là, contrairement à l’opinion de ceux qui veulent en faire son
inventeur, le portera néanmoins à un degré de développement assez considérable 60. » Dans la
même lancée, Amar Samb soutient que : « La prophétie de Moïse n’aurait jamais eu tant de
lustre, sans les épreuves, les grandes épreuves, pierre de touche du génie, qu’il rencontra sur
la terre égyptienne61. »

56
Freud S., 1948, Moïse et le monothéisme, Paris, Éditions Gallimard, p. 10.
57
Lam A. M., 2001-2002, « Moїse : essai étymologique », in Ankh : Revue d’égyptologie et des civilisations
africaines, Paris, Khépéra, n°10/11, p. 142.
58
Gabriel R. A., 2002 Gods of our fathers : The memory of Egypt in Judaism and Christianity, London,
Greenwood Press, p. 79.
59
Il faut préciser que Moïse n’est pas contemporain d’Amenophis IV (-1372 -1354), dixième pharaon de la
XVIIIème dynastie). Il est né sous le règne du pharaon Ramsès II (-1304 -1213), troisième pharaon de la
XIXème dynastie égyptienne, au Nouvel Empire). Malgré cet écart, il est attesté que Moïse n’a pas échappé à
l’influence du monothéisme initié par Aménophis IV. D’après Cheikh Anta Diop, « c’est [après la réforme
religieuse d’Amenophis IV] que Moïse s’est fait le champion du monothéisme dans le milieu juif, existant déjà en
Égypte ». Diop C. A., 1979, Nations nègres et culture, p. 44-45.
60
Diop C. A., 1979, Nations nègres et culture, p. 45.
61
Samb A., 1974, « Contribution de l’Afrique aux religions abrahamiques », in Notes Africaines, Dakar, IFAN,
n°142, p. 44.

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SCIENCES DE L’ANTIQUITÉ

D’autres indices historiques et bibliques montrent également que l’Afrique, par le biais de
l’Égypte ancienne et de l’Éthiopie62, a été une terre de refuge aux adeptes des deux autres
religions révélées, à savoir le Christianisme et l’Islam. Assouman Bamba conceptualise fort
bien cette réalité. En effet il écrit :
« Tout aussi biblique est l’exemple de Jésus-Christ qui, dans une sorte de pèlerinage de
murissement en vue de l’accomplissement de sa prophétie, va se ressourcer en Égypte, lieu de
naissance de son prédécesseur Moïse pour être oint du message divin et en recevoir tous les
attributs. Pour ce qui est de l’Islam, les premiers musulmans aussi, pour échapper aux
persécutions des idolâtres mecquois, se sont réfugiés en Afrique (Ethiopie), selon les
recommandations du Saint Prophète de l’Islam. Ces aspects démontrent que l’Afrique est la
terre de refuge pour l’humanité et pour les élus de Dieu63. »

À la suite d’Abraham, Ismaël, Joseph et Moïse, Jésus-Christ a également séjourné en Égypte


ancienne pendant de longues années64. Il y serait resté pendant quinze ans, si le décompte
commence à partir de la mort du roi Hérode. Il est né en l’an 19 avant notre ère et le roi
Hérode est mort en l’an 4 avant notre ère65 ; donc quinze années se sont écoulées entre la
naissance de Jésus et la mort du roi Hérode (19-4= 15). Les propos du philosophe ivoirien
Assouman Bamba (ci-dessus) mettent en branle l’influence de la religion égyptienne sur le
Christianisme et l’Islam. À ce sujet, Sarwat Anis Al-Assiouty fait remarquer que : « C’est
dans les enseignements des sages égyptiens et du monothéisme Universalis égyptien qu’il faut
chercher les antécédents lointains ou immédiats du Christianisme66. » Christiane-Desroches
Noblecourt aborde également l’influence de la religion égyptienne sur le Christianisme de la
manière suivante :

62
D’après les données fournies par les textes égyptiens et les auteurs gréco-romains, les anciens Égyptiens
situaient toujours leur origine au sud ; c’est-à-dire au pays de ‘‘Pount’’. Cette localité désignait la Nubie ou
l’Éthiopie selon les auteurs grecs. Ceux-ci, en parlant des coutumes religieuses en Afrique noire réservaient une
place de choix aux Éthiopiens et aux Égyptiens. Ils les considèrent en effet comme « les premiers sur terre qui
ont créé et porté à un degré extraordinaire de développement tous les éléments de la civilisations ». Mbiti J.,
1972, Religions et philosophie africaines, Yaoundé, Éditions Clé, p. 172.
63
Bamba A., « L’Afrique entre Dieu et dieux : le mouvement pendulaire de la foi », in
https://docplayer.fr/13666106-L-afrique-entre-dieu-et-dieux-le-mouvement-pendulaire-de-la-foi.html, consulté le
11/03/2023, p. 71.
64
La cause de son séjour dans le pays des pharaons est bien détaillée dans l’évangile selon Mathieu : « Après que
les mages du roi (il s’agit d’Hérode) furent partis, l’ange du Seigneur apparut en songe à Joseph (l’époux de
Marie, mère de Jésus) et lui dit : lève-toi, prend l’enfant et sa mère, et fuis en Égypte. Tu y resteras jusqu’à ce
que je te dise de revenir, car Hérode fera rechercher l’enfant pour le tuer. Joseph se leva donc et partit dans la
nuit, emmenant l’enfant et sa mère pour se réfugier en Égypte. Il y restera jusqu’à la mort d’Hérode. Ainsi
s’accomplit ce que le Seigneur avait dit par le prophète : J’ai appelé mon fils à sortir d’Égypte ». La Sainte
Bible., 2000, Mathieu II : 13.
65
Al-Assiouty S. A., 1989, Origines égyptiennes du Christianisme et de l’Islam. Résultat d’un siècle et demi
d’archéologie, T. III : Recherches comparées sur le Christianisme primitif et l’Islam premier, Paris, Letouzey et
Ané, p. 50.
66
Al-Assiouty S. A., 1987, Recherches comparées sur le Christianisme primitif et l’Islam premier. Théorie des
sources Évangiles et Corans Apocryphes Logia et Hadiths forgés, Paris, Letouzey et Ané, 1.

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« À ma grande satisfaction, j’ai pu lire, sous la plume d’encore rares et courageux collègues,
une phrase qui me paraît d’une évidence indiscutable : ‘‘c’est la religion égyptienne qui a pavé
la voie au christianisme’’. Partout où le Christianisme a pénétré, le culte d’Osiris, puis d’Isis, l’a
précédé de quelques siècles, nivelant le terrain, préparant les esprits à accueillir les
enseignements universalistes du christ67. »

Dans le même registre, la sourate 112 du Coran met en évidence le monothéisme pur. Voici le
contenu de cette sourate :
« Au nom d’Allah, le très Miséricordieux, le Compatissant.
Dis : Allah est unique
Allah l’Eternel
Il n’a pas engendré et n’a pas été engendré.
Il n’y a personne qui Lui soit égal68. »

Il faut préciser que cette sourate rappelle à bien des égards le concept égyptien : xpr ḏs .f : « Il
(Dieu) est celui qui est venu à l’existence de lui-même69. » Dans la langue égyptienne
pharaonique, l’expression « venir à l’existence de lui-même » est formée à partir du verbe
xpr lequel signifie « devenir », « se transformer », « venir à l’existence », « se manifester à »,
« exister70. » Quelques fragments du Papyrus Leiden I 350 permettent également de sous-
tendre cette idée. En effet, on lit :

SAa xprw m sp tpy


Ayant commencé d’exister lors de la fois initiale,

imn xpr(.w) m HAt nn rx bs.f


Amon vint à l’existence au commencement, sans que personne ne connaisse sa forme.

nn xprw nTr Xry HAt.f


Aucun dieu n’a existé avant lui.

nn ky nTr Hna.f Dd.f qi.f


Il n’y avait pas un autre dieu avec lui qui puisse dire sa forme

nn wn mwt.f iry n.s rn.f


Il n’avait pas de mère pour établir pour elle son nom à lui

nn it.f stt sw Dd(.w) wi ink pw


Il n’avait pas de père qui l’ait engendré et qui ait dit : « c’est moi !»

nbiw swHt.f Ds.f


Il façonna son œuf lui-même,

67
Desroches-Noblecourt C., 2004, Le fabuleux héritage de l’Égypte, Paris, Télémaque, p. 283-284.
68
Le Saint Coran et la traduction en langue française du sens de ses versets., 1410 de l’hégire, Al-madinah al-
munawwarah, sourate 112, versets 1-5.
69
Bickel S., 1994, La cosmogonie égyptienne avant le Nouvel Empire, Fribourg, Éditions Universitaires, p. 35.
70
Faulkner R. O., 1991, A concise of Dictionary Middle Egyptian, p. 188.

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sxhm StAw mswt qmA(.w) nfrw.f


Puissance divine aux naissances secrètes qui engendra sa perfection ;

nTr nTry xprw Ds.f


Dieu divin venu à l’existence de lui-même ;

nTrw nbw Dr(.w) SAa.f sw


Tous les (autres) dieux apparurent après qu’il eût commencé d’être71.

Ce passage exprime clairement l’autogenèse, la naissance sans parents de Dieu. Celui-ci s’est
créé lui-même, comme le précisent aussi les phrases ci-dessous :
Jnk xpr Hry- tp nb ////
Jw wbA.n.j kkw
Jw ms.n.j jt.j jw (wr) .n.j mwt.j
Je suis Khépri qui est à la tête (du maître de ?)////
J’ai ouvert les ténèbres,
J’ai mis au monde mon père, j’ai en (gendré) ma mère72.
L’affirmation selon laquelle le Dieu a mis au monde ses propres parents est une manière
hyperbolique de mettre en évidence son autogenèse, sa naissance sans parents justement.
Cette autogenèse apparaît également à travers la notion de trinité. Celle-ci peut être mise à
contribution dans l’étude du monothéisme égyptien, car elle fait ressortir l’influence de
l’Égypte sur les religions révélées, singulièrement le Christianisme dans ce domaine73.
La trinité égyptienne est constituée en effet entre autres de trois entités que sont le Dieu Osiris
ou Osirios (appelé « le père ou le procréateur ») ; le dieu Horus (le fils ou la prédication ou le
verbe) et la déesse Isis (la mère ou la procréatrice)74. Le fait qu’Osiris soit le Dieu suprême
renforce l’idée de la naissance du deuxième personnage divin Horus, le dieu créateur de toutes
les créatures et le Dieu de l’éternité. C’est pourquoi, Osiris est souvent représenté sur les
vestiges assis à la loge en tant que juge pour condamner chaque personne suivant ses actes. Ce
jugement divin est le premier en date dans l’histoire de l’humanité car, « deux mille ans avant
Moïse, et trois mille ans avant le Christ, Osiris, la personnification du Bien, présidait déjà le
tribunal des morts dans l’au-delà, coiffé de Atew ou Atef7576. »

71
Zandee J., 1948, De Hymnen Aan Amon van Papyrus Leiden I 350, chapitre 100, in Somet Y., 2016, L’Égypte
ancienne: un système africain du monde, p. 109.
72
Bickel S., 1994, La cosmogonie égyptienne avant le Nouvel Empire, Fribourg, Éditions Universitaires, p. 44.
73
Il faut toutefois souligner que la notion de trinité n’a pas existé dans la religion musulmane. D’après les
données fournies par le Coran, Allah n’est pas une trinité ; Il est unique. C’est dans cette perspective que la
sourate 112 citée supra a été révélée.
74
El-Zein S. A., L’unicité et la trinité. Traduction revue et corrigée par Mr. Faysal Houdrouge, maison d’édition
et date de publication non indiquée, p. 132.
75
Le terme Atew ou Atef Atfw est une couronne réunissant deux cornes de bélier, une mitre
centrale et deux plumes d’autruche. Portant un disque solaire, elle symbolisait la puissance divine, d’abord

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SCIENCES DE L’ANTIQUITÉ

Il est assisté dans ce jugement par des dieux au nombre de 42 qui écoutent le défunt réciter
une longue liste de péchés et jurer qu’il n’en a commis aucun77. Puis le dieu Anubis prend le
cœur du défunt qu’il place sur un des plateaux d’une balance ; l’autre plateau accueille une
plume, symbolisant Maât, la déesse de la vérité-justice78. En cas de succès lors du jugement79,
Horus conduit le défunt vers le trône d’Osiris ; dans le cas contraire il est dévoré par un
monstre Ammout à tête de crocodile80. D’après Guy Rachet, « les images de la pesée du cœur
dans la balance divine, qu’on trouve à plusieurs reprises dans la littérature de l’Ancien
Testament, sont directement empruntées à l’Égypte81. » Jean Doresse enfonce le clou lorsqu’il
écrit :
« Mais venons-en ici à l’un des motifs les plus importants de ce jugement des défunts – à celui
dont, en même temps, l’origine très égyptienne – exclusivement égyptienne, même ! – avait
semblé, aux critiques modernes, des plus claires et évidentes : je veux parler de la pesée de
l’âme par saint Michel devant le tribunal céleste ! Au premier abord, il semble indiscutable que
cette croyance soit venue, en ligne directe, de la pesée du cœur du défunt par le dieu Thot
devant le tribunal d’Osiris, telle qu’elle est représentée en d’innombrables exemplaires par la
plus importante des illustrations du Livre des Morts82. »

À la lumière de ces faits, on peut souligner que cette interprétation sur le dieu Osiris pourrait
être rapprochée à la fois à la trinité chrétienne.

d’Héryshef, puis d’Osiris ; var. , ou encore . Yvonne Bonnamy Y. et Sadek A.


A., 2013, Dictionnaire des hiéroglyphes. Hiéroglyphes-Français, Nouvelle édition, Paris, Actes Sud, p. 20-21.
76
Diop C. A., 1981, Civilisation ou barbarie. Anthropologie sans complaisance, Paris, Présence Africaine, p.
416.
77
Barguet P., 1967, Le livre des morts des anciens Égyptiens, Paris, Éditions du Cerf, p. 160-164.
78
On constate à ce niveau que le jugement dernier est envisagé comme un fait individuel, immanent après la
mort de chaque personne. Par contre, dans les religions révélées, la résurrection et le jugement dernier ont lieu
après la fin du monde.
79
Dans ce cas, le défunt est reconnu juste de voix s’il y a équilibre entre son cœur et la plume de Maât ; si c’est
le contraire qui se produit, c’est-à-dire si le cœur est plus lourd que la Maât, le défunt est reconnu coupable de
ses actes. Sa demeure sera l’enfer. Par contre, c’est tout le contraire dans les religions révélées. En effet, dans ces
religions, le défunt est reconnu juste de voix si la lourdeur des bonnes actions est constatée lors du jugement.
80
Les textes égyptiens parlent aussi de l’enfer comme demeure des damnés. De ce point de vue, Cheikh Anta
Diop relève une similitude frappante entre l’enfer égyptien et celui islamique. Il écrit à ce sujet : « L’enfer de la
religion égyptienne est représenté dans le tombeau de Séthi I er, père de Ramsès II (XIXe dynastie, 1300 av. J.-
C.). Un serpent monstrueux forme avec ses bouches un pont hideux suspendu dans le vide, au-dessus de l’enfer,
dont les geôliers attisent les flammes. Le mort, à droite, face à la gueule du serpent, n’est soutenu que par ses
actions antérieures sur terre pour traverser ce pont et gagner le paradis. Si le bien l’emporte, il est sauvé. Dans
le cas contraire, il est précipité dans les flammes de l’enfer qui le dévorent. C’est bien le siratal moustakhima de
l’islam, 1700 ans avant la naissance du Prophète Mahomet, et l’on saisit le lien historique indéniable qui existe
entre la religion ancestrale égyptienne et les religions révélées. On aurait pu reproduire aussi le tribunal
d’Osiris (Aras de l’islam), le jour du jugement dernier ». Diop C. A., 1981, Civilisation ou barbarie, p. 417.
81
Rachet G., 1998, Dictionnaire de la civilisation égyptienne, Paris, Larousse-Bordas, p. 235.
82
Doresse J., 1960, Des hiéroglyphes à la croix. Ce que le passé pharaonique a légué au Christianisme,
Istanbul, p. 53.

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Selon la remarque faite par Samit Atef El-Zein, « la divinité première dans la trinité
chrétienne (le Dieu suprême) représente la justice et le châtiment par la condamnation
d’Adam et de sa progéniture à la malédiction éternelle pour avoir mangé le fruit de l’arbre
interdit83. » En plus, l’idée chrétienne de « trois personnes en un seul dieu » et l’idée
égyptienne d’« Osiris est tout » se reflètent clairement dans un hymne du Nouvel Empire en
ces termes : « All gods are three : Amun, Re, and Ptah ; and there is no second to them.
Hidden is His name as Amun, He is Re in face, and His body is Ptha 84. » On retrouve les
mêmes propos dans le texte égyptien ci-dessous :

Xmt pw nTrw nbw Imn Ra PtH nn snw.sn


Tous les dieux sont trois : Amon, Rê et Ptah. Ils n’ont pas leurs pareils.

Imn rn.f m Imn


Caché est son nom en tant qu’il est Amon !

ntf Ra m Hr Dt.f PtH


Il est Rê quant à son visage et Ptah quant à son corps85.

On peut conclure avec Doumbi Fakoly que : « L’idée de la Sainte Trinité chrétienne tire
directement sa source de celle de l’unicité plurielle du Dieu négro-africain et, en tout état de
cause, le Christianisme n’a point innové en la matière, parce que sa trinité a déjà eu des
devancières : ‘‘Osiris-Isis-Horus’’ ; ‘‘Khépri-Râ-Atoum’’86. » Cette influence peut être
expliquée par le fait que les adeptes des religions révélées, singulièrement les Juifs87, durant
leur séjour dans le pays des pharaons88, étaient en contact direct avec les conceptions
funéraires courantes en Égypte ancienne (croyance en un Dieu unique, momification, toilette
mortuaire, circoncision, etc.).

83
El-Zein S. A., L’unicité et la trinité. Traduction revue et corrigée par Mr. Faysal Houdrouge, maison d’édition
et date de publication non indiquée, p. 132.
84
Gabriel R. A., 2002, Gods of our fathers : The memory of Egypt in Judaism and Christianity, London,
Greenwood Press, p. 36.
85
Zandee J., 1948, De Hymnen Aan Amon van Papyrus Leiden I 350, chapitre 300, in Somet Y., 2016, L’Égypte
ancienne: un système africain du monde, p. 112.
86
Fakoly D., 2004, L’origine négro-africaine des religions dites révélées, Paris, Ménaibuc, p. 44.
87
D’après les données fournies par les textes biblique et coranique, c’est avec Joseph ou Yousouf que les Juifs
s’installent en Égypte. C’est un de leur descendant, en l’occurrence le prophète Moïse qui les fera sortir de ce
pays. (Pour plus de détails, cf. La Sainte Bible, Genèse, Exode et le Saint Coran, sourates 12 et 28).
88
Il faut souligner que si Ismaël est considéré comme l’ancêtre historique des Arabes, il est fort probable que
ceux-ci aient des filiations directes avec l’Égypte ancienne. Ismaël est né en Égypte durant le séjour de son père
(Abraham) dans ce pays. Sa mère est égyptienne (Agar). C’est aussi dans le désert égyptien qu’il grandit et
devint un excellent archer. Donc, l’Afrique, par le biais de l’Égypte ancienne, a été une terre de refuse et de
prospérité à certains prophètes des religions révélées.

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Ce contact a eu un impact positif sur leur croyance et, de l’avis de S. H. Aufrère, c’est suite à
cela que « les Juifs prirent conscience d’une vie possible de l’âme après la mort et
commencèrent à embaumer leurs défunts »89. Les funérailles de Joseph s’inscrivent dans la
tradition égyptienne, comme le rappelle la Genèse : « Joseph mourut à cent dix ans, on
l’embauma et on le mit dans un cercueil en Égypte90. » C’est dire enfin que l’influence
déterminante de l’Égypte sur les religions révélées a permis d’appréhender davantage les
bases fondamentales du monothéisme dont ces religions jouissent encore de nos jours dans le
monde.
Conclusion
En définitive, force est de constater que le monothéisme, en tant que doctrine religieuse, est
une croyance fort ancienne de la religion égypto-africaine. Il ressort aussi de l’analyse que
l’Afrique, singulièrement l’Égypte ancienne, a contribué à la naissance et au développement
de cette doctrine religieuse dans les religions révélées. De ce point de vue, la thèse selon
laquelle l’Égypte ancienne fut le berceau du monothéisme peut être admise.

1. Sources écrites et numériques


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89
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colloque de Montpellier sur l’interdit et le sacré dans les religions de la Bible et de l’Égypte, Montpellier, p.
180.
90
La Sainte Bible. Traduite en français d’après les textes originaux hébreu et grec., 2000, version Semeur,
Genèse 50 : 26.

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