Erratum
Erratum
Erratum
2024 17:36
ISSN
0318-479X (imprimé)
1705-0065 (numérique)
Découvrir la revue
Tous droits réservés © Revue des sciences de l'éducation, 2002 Ce document est protégé par la loi sur le droit d’auteur. L’utilisation des
services d’Érudit (y compris la reproduction) est assujettie à sa politique
d’utilisation que vous pouvez consulter en ligne.
https://apropos.erudit.org/fr/usagers/politique-dutilisation/
Yamina Bouchamma
Professeure
Université de Moncton
Résumé – Cette étude a examiné les explications que formulent les enseignants
relativement à l’échec scolaire et vérifié les relations entre ces explications et
certaines de leurs caractéristiques sociodémographiques, socioprofessionnelles
et sociocognitives. Des enseignants de trois collèges de la région de Québec
métropolitain (n=336) ont répondu à un questionnaire. Les résultats mon-
trent que les quatre types d’explications de l’échec (étudiant, enseignant,
école et société) varient selon le sexe, le statut professionnel (permanent/non
permanent), le perfectionnement, la scolarité et le sentiment d’efficacité
professionnelle de l’enseignant.
Introduction
Malgré l’abondance des écrits relatifs à l’effet enseignant quant à ses pratiques
pédagogiques, nous nous trouvons paradoxalement, comme le soulignent notam-
ment Mingat (1994), Jarousse (1995), Anderson (1992) et Fang (1996), devant
un manque de recherches consacrées aux croyances des enseignants. Au cégep,
on n’échappe pas à cet état de choses. Bien que plusieurs questions touchant les
étudiants, telles que la pédagogie et l’évaluation, aient été débattues depuis leur
avènement, les croyances des enseignants quant à la réussite et à l’échec scolaires
font trop peu l’objet de recherche. Notre propos a pour but d’étudier le type de
facteurs auxquels l’enseignant du collégial attribue l’échec des étudiants et de faire
le lien entre chacune de ces explications (enseignant, étudiant, école et société)
et certaines caractéristiques professionnelles de l’enseignant. Dans un premier
temps, nous traiterons de la problématique de l’échec scolaire au collégial et de
ses conséquences. Nous aborderons, par la suite et dans l’ordre, le cadre théorique,
la méthodologie utilisée, les principaux résultats et enfin, la discussion relative à
ces derniers.
Problématique
Selon plusieurs sources, dont les données du Service régional des admissions
du Montréal métropolitain de 1992 (Terrill et Ducharme, 1994), de la Direction
générale de l’enseignement collégial (Levesque et Pageau, 1990) et du ministère de
l’Éducation du Québec (Gouvernement du Québec, 1996), seulement les deux tiers
des étudiants admis au collégial obtiennent leur diplôme. Parmi ceux qui n’aban-
donnent pas, la moitié obtient un diplôme avec un an de retard, soit après trois
ans. Quant à l’autre moitié, les deux tiers ne l’obtiennent qu’à l’issue de quatre ans,
soit après deux années de retard (Levesque et Pageau, 1990). Ce qui revient à dire
que seulement 17 % de l’effectif estudiantin admis termine dans les délais prescrits.
l’abandon ne se fait qu’après cinq ou six semaines de cours, l’étudiant qui aban-
donne vient affecter la vie du groupe-classe, ce qui nécessite un réajustement de la
part de l’enseignant (Conseil des collèges, 1988). En plus, l’échec affecte la crédi-
bilité du système scolaire; avec le fort taux d’échec et d’abandon des études, l’ensei-
gnement collégial québécois ne semble pas répondre à sa mission de contribuer
à hausser le taux et le niveau de scolarisation de la population.
Les échecs et les abandons ne sont pas sans conséquences pour la société.
À propos des 100 000 décrocheurs de 1991, Moisset et Toussaint (1992) estiment
pour le Québec un manque à gagner fiscal d’entre 4 et 5 milliards de dollars, soit
environ les deux tiers des dépenses globales consacrées à l’enseignement primaire
et secondaire public et privé en 1989. Le Conseil des collèges (1988) souligne que
« la reprise d’un cours à la suite d’un échec ou d’un abandon exige des coûts addi-
tionnels à la formation» (p. 49), et il s’interroge sur l’efficacité de cet investissement.
Dépourvus de moyens adéquats pour venir en aide aux élèves et pour agir
efficacement sur leur motivation, [les enseignants] subissent une pression
constante, ils se sentent démunis face au problème et envisagent avec peu
d’optimisme leurs chances de contribuer significativement à une meilleure
réussite scolaire de leurs élèves. Ils voient alors s’éloigner d’eux un des élé-
ments les plus gratifiants de leur profession (Conseil des collèges, 1992, p. 48).
Cadre théorique
Les explications que donne l’enseignant au sujet de l’échec et de la réussite
se situent dans deux pôles de recherche. Le premier pôle, d’obédience sociologique,
a vu ses prémices en France à la suite de critiques qui ont accusé les travaux en
sociologie de l’éducation les plus connus de mener les enseignants à adopter des
attitudes de fatalisme et de démission à l’égard du rendement scolaire des étudiants
07-RSÉ28-3 Bouchamma 3/05/04 14:05 Page 652
(Snyders, 1976, dans Berger, 1979). Le deuxième pôle trouve son inspiration dans
la psychologie sociale et particulièrement dans la théorie de l’attribution (Weiner,
1979). Ce courant s’est développé à la suite d’études qui ont montré que les per-
ceptions qu’entretiennent les enseignants au sujet de leurs étudiants influencent
le comportement et les résultats de ceux-ci (Rosenthal et Yacobson, 1968). Dans
la foulée de ces premiers travaux, d’autres recherches sont venues élucider les
mécanismes par lesquels les comportements des enseignants influencent les résul-
tats scolaires. Leurs croyances au sujet de l’échec et de la réussite, et plus précisément
les attributions qu’ils en font, constituent, entre autres, l’un des mécanismes qui
influencent leurs attitudes et, par là, les performances de leurs étudiants.
Le modèle que nous avons élaboré s’articule autour de trois grands pôles : les
variables de processus, les variables prédictives et les résultats ou effets produits.
Variables de processus
(explication de l’échec et de la réussite)
Enseignant Interne
Étudiant
École
Société Externe
Variables prédictives
Variables liées à l’enseignant
Sociodémographiques Socioprofessionnelles Sociocognitives
– Sexe – Expérience professionnelle – Sentiment d’efficacité
– Âge, etc. – Statut professionnel professionnelle
– Perfectionnement – Sentiment d’efficacité
– Scolarité personnelle, etc.
Variables contextuelles
Variables liées à l’étudiant Variables liées à l’institution
– Sexe – Matière enseignée
– Origine sociale – Ordre d’enseignement
– Origine ethnique – Système éducatif
– Performances
Variables résultats
Émotions générales Conséquences
– Sentiment de contrôle sur le comportement :
(de puissance) aide, effort, motivation,
évaluation, etc.
aux attributions des enseignants, d’où son éclatement, comme en témoignent les
nombreux travaux dans le domaine, dont ceux de Cooper et Burger (1980), de
Hall, Hines, Bacon et Koulianos (1992) et de Gosling (1992).
07-RSÉ28-3 Bouchamma 3/05/04 14:05 Page 654
Les variables résultats font état de l’effet que produiraient les explications
de l’échec ou de la réussite sur les sentiments de l’enseignant, ce qui condition-
nerait ses comportements à l’égard de ses étudiants en termes d’aide qu’il leur
apporte, d’efforts qu’il va fournir, d’évaluation, de motivation, de sentiment de
puissance et de contrôle sur l’apprentissage de ses étudiants.
mulée, le contexte dans lequel l’attribution est formulée et les différents biais ou
sources d’erreur qui peuvent altérer ces explications. Autrement dit, il est question
de s’interroger sur qui formule les attributions (caractéristiques de l’enseignant),
à l’égard de qui (caractéristiques des étudiants), dans quel contexte ou situations
avec quelles conséquences et quels biais possibles.
Par ailleurs, en partant du fait que les attributions dépassent le cadre de la classe
et de l’école, il faudrait sans doute tenir compte d’autres acteurs (les parents, les pairs
et d’autres intervenants). Dans le cadre de cet article, nous nous limitons à l’étude
des explications que donne l’enseignant de l’échec en tenant compte d’un seul biais,
soit l’erreur fondamentale, et de quelques-unes de ses caractéristiques (le sexe, l’âge,
l’expérience professionnelle, le statut professionnel (permanent/non permanent),
le perfectionnement, la scolarité et le sentiment d’efficacité professionnelle).
L’erreur fondamentale
Les explications que donne l’enseignant de l’échec sont susceptibles d’être
influencées par différents biais dont l’erreur fondamentale. Ross (1977) a utilisé
cette expression pour désigner la tendance des gens à surestimer l’explication des
événements par des causes internes (facteurs reliés à la personnalité) et à sous-estimer
les causes externes (la situation, les circonstances) (Hewstone, 1989 ; Ross, 1977).
– Le perfectionnement
– L’expérience professionnelle
– Le statut professionnel
bien, même s’ils sont considérés comme difficiles ou non motivés (Guskey et
Passaro, 1994). Dans le prolongement des travaux de Bandura (1997), Ashton
et Webb (1982 ; 1986), Guskey et Passaro (1994) montrent que les attributions
que font les enseignants au sujet de l’efficacité de l’enseignement reflètent les
attentes des enseignants au sujet des conséquences de l’enseignement dans son
ensemble. D’autres études nous révèlent que les enseignants qui croient que les
enseignants en général et qu’eux-mêmes en particulier peuvent motiver les étu-
diants à performer, ont tendance à expliquer le rendement scolaire par des causes
internes comparativement à ceux qui croient que ni eux ni les autres enseignants
ne peuvent influencer les performances des étudiants (Groenewold, 1990).
Méthodologie
Variables de l’étude
Instrument de mesure
Dans le cadre de cet article, nous aborderons trois sections d’un questionnaire.
– Mesure sociodémographique et socioprofessionnelle. Cette première section
porte sur les informations qui ont trait aux caractéristiques sociodémographiques
et socioprofessionnelles des enseignants (sexe, âge, expérience dans l’enseigne-
ment, statut professionnel permanent ou non permanent, le fait d’avoir suivi
une formation et le plus haut diplôme obtenu).
– Les explications de l’échec. Cette deuxième section contient 28 énoncés repré-
sentant des explications possibles de l’échec sur une échelle de type Likert,
allant de « Aucune influence » à « Très grande influence ». Chaque dimension
des explications de l’échec (enseignant, étudiant, école et société) au collégial
a été représentée par sept énoncés dans l’échelle, ce qui répond au principe
de validité de contenu. Nous avons veillé également à ce que la progression
dans l’explication de l’échec allant de l’enseignant à l’étudiant, à l’école et à
la société n’apparaisse pas dans la présentation des 28 énoncés, principe recom-
mandé dans ce genre de cas (Quivy et Campenhoudt, 1995, p. 172).
Tableau 1
Exemples d’énoncés concernant les explications de l’échec scolaire
Variables Énoncés
Étudiant 23- Les expériences scolaires antérieures des étudiants (échec/réussite).
28- Les changements psychosociaux que vivent les étudiants à cette étape
de leur vie.
Enseignant 5- La qualité des relations enseignant-étudiant.
14- Le type d’évaluation pédagogique de l’enseignant.
École 17- Les ressources matérielles de l’école.
22- Les activités parascolaires au collège.
Société 6- Le niveau socioéconomique des parents.
10- Le type de famille de l’étudiant (stable, monoparentale, etc.).
déroulée l’étude. À l’issue de cette évaluation, certains énoncés ont été reformulés,
d’autres éliminés ou ajoutés, puis testés de nouveau auprès de deux professeurs avant
d’administrer le questionnaire (Bouchamma, 1999). Le test t et l’analyse de variance
ont été utilisés.
Tableau 2
Exemples d’énoncés concernant le sentiment d’efficacité professionnelle
Variables Énoncés
Sentiment d’efficacité 1- L’enseignant est très limité dans ce qu’il peut réaliser parce
professionnelle que l’environnement familial des étudiants exerce une grande
influence sur leur rendement.
5- Même avec de grands efforts, l’enseignant ne peut atteindre les
objectifs scolaires avec la plupart des étudiants en difficulté.
Échantillon
Le critère qui a présidé au choix des trois cégeps est l’accessibilité. Il s’agit
d’un échantillon non probabiliste, à choix raisonné. Bien que cet échantillon
trouve des ressemblances dans plusieurs de ses dimensions avec les enseignants
du cégep au moment de l’étude, en l’occurrence quant à la répartition des répon-
dants en regard du statut (permanent/non permanent) et du sexe, nous ne pouvons
le qualifier de représentatif.
Résultats
Tableau 3
Différents types d’attributions
Tableau 4
Analyse de la variance et test de comparaison multiple pour les différents
types d’explications de l’échec selon le sexe de l’enseignant
Les résultats obtenus au test t pour chacun des types d’explications de l’échec
révèlent que les femmes attribuent de façon significative l’échec à des facteurs liés
à l’étudiant (dl = 334 = -3,87 ; p < 0,001). Les femmes, comparativement aux
hommes, attribuent davantage l’échec à des facteurs se rapportant à l’étudiant.
Ce résultat confirme l’hypothèse selon laquelle les femmes, comparativement aux
hommes, auraient tendance à responsabiliser plus l’étudiant de son échec scolaire.
Tableau 5
Analyse de la variance et test de comparaisons multiples pour les différents
types d’attributions selon l’âge
En ce qui concerne l’âge, aucune différence entre les moyennes des quatre
types d’attributions ne s’est avérée significative ; de même, aucune moyenne n’est
significativement distincte entre les différents groupes. L’hypothèse selon laquelle
les enseignants les plus âgés se sentent plus responsables de l’échec se trouve ici
infirmée par nos résultats.
Aucune différence significative sur le plan statistique n’a été enregistrée dans
les moyennes des différentes attributions de l’échec selon l’expérience profes-
sionnelle de l’enseignant. C’est dire que l’expérience de l’enseignant n’explique
aucunement le type d’attribution qu’il fait par rapport à l’échec. Comme pour
l’hypothèse concernant l’âge, l’hypothèse qui postulait que les enseignants les plus
expérimentés se sentent plus responsables de l’échec que les moins expérimentés
se trouve infirmée.
Tableau 6
Analyse de la variance et test de comparaisons multiples pour les différents
types d’attributions selon l’expérience professionnelle de l’enseignant
Les résultats au test t pour chaque type d’attribution révèlent une seule dif-
férence significative et ce, entre les enseignants permanents et non permanents ;
cette différence concerne les attributions de l’échec à l’étudiant (dl = 333 = -1,08 ;
p < 0,05). Ce sont les enseignants non permanents qui attribuent de façon signi-
ficative l’échec à l’étudiant. Rappelons ici l’hypothèse qui énonçait que les professeurs
non permanents responsabilisent plus les étudiants de l’échec comparativement
aux professeurs permanents, hypothèse qui se trouve confirmée.
Tableau 7
Analyse de la variance et test de comparaisons multiples pour les différents
types d’explications selon le statut professionnel
Le tableau 8 montre une différence significative entre les enseignants qui ont
suivi un perfectionnement et ceux qui ne l’ont pas suivi, et ce, en ce qui concerne
l’explication de l’échec par des facteurs liés à l’étudiant (dl = 325 = 4,01; p < 0,001),
à l’enseignant (dl = 211,80 = 2,10; p < 0,05) et à l’école (dl = 325 = 2,36; p < 0,05).
Somme toute, une différence significative est observée entre ceux qui ont suivi
un perfectionnement et ceux qui ne l’ont pas suivi. Ce sont les enseignants qui
ont suivi un perfectionnement qui attribuent, en proportion plus importante,
l’échec aux étudiants, aux enseignants et à l’école, comparativement à ceux qui
n’en ont pas suivi. Ces résultats viennent confirmer, en partie seulement, le pos-
tulat de l’hypothèse selon laquelle l’enseignant qui aurait suivi un perfectionnement
se sentirait plus responsable de l’échec scolaire. Certes, l’enseignant qui a suivi
un perfectionnement se sent, d’une part, plus responsable de l’échec que celui
qui n’en a pas suivi ; mais, d’autre part, il considère l’étudiant comme étant le
premier responsable de son échec et l’école comme responsable aussi, mais dans
une moindre mesure.
07-RSÉ28-3 Bouchamma 3/05/04 14:05 Page 665
Tableau 8
Analyse de la variance et test de comparaisons multiples pour les différents
types d’explications selon le perfectionnement
Variables dépendantes t dl p Oui Non
M ET M ET
Étudiant 4,01 325 0,000 *** 4,1687 0,349 3,9971 0,406
Enseignant 2,10 211,80 0,030* 3,7934 0,541 3,6495 0,618
École 2,36 325 0,019* 3,2611 0,471 3,1308 0,489
Société 0,37 325 0,713 3,2055 0,542 3,1829 0,511
Légende – *** : p < 0,001 ; * : p < 0,05.
Les résultats révèlent une seule différence significative entre les enseignants
moins scolarisés et les plus scolarisés pour les attributions de l’échec à des facteurs
concernant l’enseignant (dl = 333 = -1,653 ; p < 0,05). Ce sont les enseignants
les moins scolarisés qui attribuent de façon significative l’échec à l’enseignant.
Ce résultat ne va pas dans le sens de l’hypothèse selon laquelle les professeurs les
plus scolarisés se responsabilisent plus de l’échec.
Tableau 9
Analyse de la variance et test de comparaisons multiples pour les différents
types d’explications selon la scolarité
Variables dépendantes t dl p Moins scolarisés Plus scolarisés
M ET M ET
Étudiant -0,541 333 0,282 4,1010 0,3538 4,1238 0,3894
Enseignant 1,653 333 0,024* 3,7828 0,5028 3,6764 0,6202
École 1,883 333 0,067 3,2582 0,4411 3,1560 0,5106
Société -1,345 333 0,207 3,1580 0,5012 3,2392 0,5606
Légende – * : p < 0,05.
Tableau 10
Analyse de la variance et test de comparaisons multiples pour les différents
types d’explications de l’échec selon le sentiment d’efficacité professionnelle
Discussion
L’étudiant est le premier responsable de l’échec
Les résultats ont montré que les femmes attribuent plus l’échec à l’étudiant
que les hommes. Ces résultats rejoignent ceux de Potvin et Papillon (1992) et
de Léger (1983), selon lesquels les hommes se sentent plus responsables que les
femmes de l’échec. Mais ils ne correspondent pas à ceux de Scherer et al. (1993)
et de Guskey (1981), qui ont observé chez les enseignantes une plus grande volonté
de partager avec les étudiants leurs responsabilités à l’égard de l’échec. Toutefois,
il convient de mentionner que ces résultats relèvent de relations initiales qui pour-
raient être nuancées par des variables de contrôle, comme le statut (permanent/non
permanent).
Pour ce qui est de l’aspect qui a trait aux conséquences susceptibles d’être
engendrées par les attributions externes, nous avons évoqué certaines recherches
selon lesquelles les enseignants qui pensent pouvoir motiver les étudiants à réus-
sir sont plus portés à s’attribuer les causes de l’échec scolaire, sont moins enclins
au stress que ne le sont les enseignants qui croient que ni eux ni les autres enseignants
ne peuvent influencer les performances des étudiants (Groenewold, 1990). Ou
encore, que les enseignants à contrôle interne manifestent, entre autres, plus de
résistance au stress et plus de responsabilité que ceux dont le contrôle est externe
(Soh, 1988).
les plus scolarisés se sentent moins efficaces que ceux qui le sont moins. Les auteurs
en arrivent à cette conclusion en raison du principe selon lequel une formation
plus poussée amène les enseignants à relativiser l’efficacité de leurs méthodes d’ensei-
gnement et à mieux saisir que ce qui réussit aujourd’hui n’est pas garant du succès
du lendemain.
Conclusion
En résumé, nous avons pu identifier que l’enseignant du collégial attribue
l’échec, dans l’ordre suivant, à des facteurs liés à l’étudiant, à l’enseignant, à l’école
et à la société. Parmi les variables considérées dans les relations avec chaque type
d’attribution, nous avons pu constater que les femmes, les enseignants non per-
manents et ceux qui ont suivi un perfectionnement attribuent l’échec de façon
significative à l’étudiant ; que les enseignants qui ont suivi un perfectionnement,
les moins scolarisés et ceux qui ont un fort sentiment d’efficacité professionnelle
se sentent plus responsables de l’échec scolaire ; et que les enseignants qui ont
suivi un perfectionnement attribuent plus l’échec à des facteurs associés à l’école.
Ces résultats restent cependant à nuancer avec des variables de contrôle ; ici, seules
les relations initiales ont été analysées. Il convient aussi de mentionner que l’échec
et la réussite sont expliqués différemment selon qu’il s’agit de l’échec de ses pro-
pres étudiants ou des étudiants en général. Dans cet article, c’est le point de vue
de l’enseignant sur l’échec en général dont il a été question.
NOTES
1 Le cégep, ou l’enseignement collégial, correspond aux deux années de formation préuniver-
sitaire ou de formation collégiale.
07-RSÉ28-3 Bouchamma 3/05/04 14:05 Page 670
Abstract – The aim of this study is to examine teachers’ explanations of school failure
and to examine the relation between these explanations and certain socio-demographic,
socio-professional, and socio-cognitive characteristics. Teachers from three junior col-
leges in the Quebec City region (n = 336) responded to a questionnaire. Results show
the presence of four types of explanations of school failure (student, teacher, school, and
society) that vary according to sex, professional status (permanent/non-permanent), in-
service training, diploma held, and feelings of professional competence of the teachers
who participated.
Resumen – Este estudio examinó las explicaciones que formulan los profesores respecto
del fracaso escolar y verificó las relaciones entre estas explicaciones y algunas caractérís-
ticas sociodemográficas, socioprofesionales y sociocognitivas. Los profesores de tres Colegios
pos-secundarios de la región metropolitana del Québec (n = 336) respondieron a un cues-
tionario. Los resultados muestran que los cuatro tipos de explicación del fracaso escolar
(alumno, docente, escuela y sociedad) varian según el sexo, el status profesional (permanente/
no permanente), el perfeccionamiento, el diploma y el sentiminteo de eficacia profesional
del profesor.
RÉFÉRENCES
Ames, R. (1975). Teachers’ attributions of responsibility : Some unexpected nondefensive effects.
Jour ducational Psychology, 67(5), 668-676.
Ames, R. (1983). Teachers' attributions for their own teaching. In M.L. John et M.C. Wang (dir.),
Teacher and student perceptions : Implications for learning (p. 105-124). Pittsburgh, NJ : LEA.
Anderson, C.A. (dir.) (1991). Attributions as decisions : A two stage information processing model.
In C.A. Anderson (dir.), New models, new extensions of attribution theory. The third attribu-
tion personality theory conference (p. 12-54). New York, NY : Springer-Verlag.
Anderson, L.W. (1992). Accroître l’efficacité des enseignants. Paris : IPE, Unesco.
Ashton, P.T. et Webb, R. (1982). Teachers sense of efficacy : Toward an ecological model. Communi-
cation présentée à l’Association de recherche américaine sur l’éducation, New York, NY, mars.
Ashton, P.T. et Webb, R. (1986). Making a difference : Teacher sense of efficacy and student achieve-
ment. New York, NY : Longman.
Bandura, A. (1977). Self-efficacy : Toward a unifying theory of behavioral change. Psychological
Review, 84(2), 191-214.
Barbeau, D., Montini, A. et Roy, C. (1997). Tracer les chemins de la connaissance: la motivation
scolaire. Montréal : Association québécoise de pédagogie collégiale.
07-RSÉ28-3 Bouchamma 3/05/04 14:05 Page 671
Bar-Tal, D. (1982). The effects of teachers' behaviour on pupils' attributions: A review. In C. Antaki
et C. Brewin (dir.), Attributions and Psychological Change. Applications of Attributional Theories
to Clinical and Educational Practice (p. 177-194). Toronto : Academic Press.
Beckman, L. (1973). Teacher’s and observer’s perceptions of causality for child’s performance.
Jour ducational Psychology, 65(2), 198-204.
Beckers, J. (1995). Les futurs enseignants se sentent-ils une responsabilité vis-à-vis de l’échec sco-
laire ? Éducation et recherche. Théorie et pratique, 17(3), 334-349.
Berger, A. (1979). Les instituteurs d’une génération à l’autre. Paris : Presses universitaires de France.
Berthelot, M. (1991). Enseigner : qu’en disent les profs ? Rapport d’une recherche menée auprès du
personnel enseignant du primaire, du secondaire et du collégial. Québec : Conseil supérieur de
l’éducation.
Bouchamma, Y. (1999). Les déterminants du sentiment d’efficacité de l’enseignant du Cégep. Commu-
nication présentée au 67e Congrès de l’Association canadienne française pour l’avancement
des sciences (Acfas), Ottawa, 10 au 14 mai. Document téléaccessible à l’URL: <http://www.acfas.
ca/congres/congres67/bouchamma_yamina.htm>.
Bourgeois, J.P. (1983). Comment les instituteurs perçoivent l’échec scolaire. Revue française de
pédagogie, 62(1), 27-39.
Carr, M. et Kurtz-Costes, B.E. (1994). Is being smart everything? The influence of students achieve-
ment on teachers' perceptions. British Psychological Society, 64(2), 263-276.
Clark, C.M. et Peterson, P.L. (1986). Teachers' thought processes. In M.C. Wittrock (dir.), Handbook
of research on teaching (3e édition). New York, NY : Macmillan.
Conseil des collèges (1988). La réussite, les échecs et les abandons au collégial. Québec : Ministère
de l’Éducation.
Conseil des collèges (1992). L’enseignement collégial : des priorités pour un renouveau de la forma-
tion. Québec : Ministère de l’Éducation.
Conseil permanent de la jeunesse (1992). Raccrocher l’école aux besoins des jeunes. Avis du Conseil
permanent de la jeunesse concernant le plan du ministère de l’Éducation visant à accroître
la réussite et à prévenir l’abandon scolaire. Québec : Les Publications du Québec.
Conseil supérieur de l’éducation (1991). La profession enseignante: vers un renouvellement du contrat
social. Rapport annuel 1990-1991 sur l’état et les besoins de l’éducation. Québec : Les Publica-
tions du Québec.
Conseil supérieur de l’éducation (1995). Vers la maîtrise du changement en éducation. Rapport annuel
sur l’état et les besoins de l’éducation 1994-1995. Québec : Les Publications du Québec.
Cooper, H.M. et Burger, J.M. (1980). How teachers explain students' academic performance : A
categorization of free response academic attributions. American Educational Research Journal,
17(1), 95-109.
Corriveau, L. (1991). Les Cégeps : question d’avenir. Québec : Institut québécois de la recherche
sur la culture.
Deschamps, J.C. (1977). L’attribution et la catégorisation sociale. Berne : Peter Lang.
Fang, Z. (1996). A review of research on teacher beliefs and practices. Educational Research, 38(1),
47-65.
Försterling, F. (1985). Attributional retraining : A review. Psychological Bulletin, 98(3), 495-512.
Gilly, M. (1980). Maître élève. Rôle institutionnel et représentations. Paris : Presses universitaires de
France.
Gosling, P. (1992). Qui est responsable de l’échec scolaire? Représentations sociales, attributs et rôle
d’enseignants. Paris : Presses universitaires de France.
07-RSÉ28-3 Bouchamma 3/05/04 14:05 Page 672
Goulet, J-P. (dir.) (1995). Enseigner au collégial. Montréal : Association québécoise de pédagogie
collégiale.
Gouvernement du Québec (1996). Les États généraux sur l’Éducation 1995-1996. Exposé de la
situation. Québec : Ministère de l’Éducation.
Greenwood, G.E., Olejnik, S. et Parkay, S. (1990). Relationships between four teacher efficacy
belief patterns and selected teacher characteristics. Journal of Research and Development in
Education, 23(20), 102-106.
Groenewold, F. (1990). Attribution theory analysis of problem classroom behavior. Thèse de doc-
torat en éducation. Vancouver : Université Simon Fraser.
Guskey, T.R. (1981). Measurement of the responsibility teachers assume for academic success and
failures in the classroom. Journal of Teacher Education, 31(3), 44-51.
Guskey, T. et Passaro, P. (1994). Teacher efficacy : A study of construct dimensions. American
Educational Research Journal, 31(3), 627-643.
Hall, B.W., Villeme, G. et Burley, W. (1989). Teachers' attributions for students' academic success
and failure and the relationship to teaching level and teacher feedback practices. Contem-
porary Educational Psychology, 14(2), 133-144.
Hall, B.W., Hines, C.V., Bacon, T.P. et Koulianos, G.M. (1992). Attributions that teachers hold
to account for student success and failure and their relationship to teaching level and teacher effi-
cacy beliefs. Communication présentée à l’assemblée annuelle de l’Association américaine de
recherche en éducation, San Francisco, CA, avril (document ERIC ED 349280).
Hewstone, M. (1989). Causal attribution. From cognitive processes to collectivebeliefs. Oxford: Blackwell.
Huberman, M. (1978). L’évolution de la formation américaine. Une approche contextuelle de la
formation des enseignants aux Etats-Unis et quelques points de comparaison avec l’Europe
francophone. In Debesse M. et Mialaret, G. (dir.), Traité des sciences pédagogiques. Fonction
et formation des maîtres (Vol. 7, p. 324). Paris : Presses universitaires de France.
Jarousse, J.-P. (1995). Efficacité interne des systèmes éducatifs et évaluation par les résultats. Édu-
cation et recherche. Acquis et perspectives de l’économie de l’éducation, numéro spécial, 78-93.
Kaszap, M. (1996). Perception des exigences de la réussite scolaire au Cégep. Domaine cognitif, affec-
tif, créatif, gestion, communication. Une comparaison professeurs élèves. Une adéquation possible
avec les résultats scolaires. Rapport de recherche présenté au Programme d’aide à la recherche
et à l’apprentissage. Québec : Ministère de l’Éducation.
Léger, A. (1983). Les enseignants du secondaire. Paris : Presses universitaires de France.
Levesque, M. et Pageau, D. (1990). La persévérance aux études. La conquête de la toison d’or ou
l’appel des sirènes. Québec : Ministère de l’Enseignement supérieur et de la science, Direction
générale de l’enseignement collégial.
Mingat, A. (1994). Éléments pour une analyse de la politique éducative française. Savoir, Édu-
cation, Formation, 6(3), 495-515.
Moisset, J.J. et Toussaint, P. (1992). Pourquoi faut-il combattre l’abandon scolaire ? Une perspective
socio-économique. In Centre de recherche et d’intervention sur la réussite scolaire (CRIRES)
et Fédération des enseignantes et enseignants de commissions scolaires (FECS) (dir.), Pour
favoriser la réussite scolaire. Réflexions et pratiques. Actes du colloque organisé par le CRIRES et
la CEQ (p. 38-57). Québec : Éditions Saint-Martin.
Monteil, J.M., Bavent, L. et Lacassagne, M.F. (1986). Attribution et mobilisation d’une appar-
tenance idéologique : un effet polydoxique. Revue française de psychologie, 31(20), 115-121.
Parent, G., Duquette, R. et Carrier, J. (1993). Opinion des enseignants sur les causes du décrochage
scolaire. Revue des sciences de l’éducation, XIX(3), 537-553.
Potvin, P. et Papillon, S. (1992). Teacher’s sense of responsibility toward students achievement
and their attitude. Canadian Journal of Special Education, 8(1), 33-42.
07-RSÉ28-3 Bouchamma 3/05/04 14:05 Page 673
Weiner, B. (1979). A Theory of motivation for some classroom experiences. Journal of Educational
Psychology, 71(1), 3-25.
Weiner, B. (1980). A cognitive (attribution) -emotion- action model of motivated behavior : An
analysis of judgments of help-giving. Journal of Personality and Social Pysychology, 39(2), 186-
200.
Weiner, B. (1984). Principles for a theory of student motivation within an attributional frame-
work. In R. Ames et C. Ames (dir.), Research on Motivation in Education : Student Motivation
(Tome i, p. 15-38). New York, NY : Academic Press.
Wiley, G.M. et Eskilson, A. (1978). Why did you learn in school today ? Teachers' perceptions
of causality. Sociology of Education, 51(4), 261-269.