Comprendre La Radicalité Islamiste

Télécharger au format pdf ou txt
Télécharger au format pdf ou txt
Vous êtes sur la page 1sur 6

COURS IEP – FEVRIER 2018

EXPLIQUER LA RADICALITE DJIHADISTE

L’objet de cette présentation est d’essayer de synthétiser les différentes explications et


interprétations existantes du phénomène djihadiste ou terroriste islamiste, c’est-à-dire de
cette violence qu’emploient certains individus au nom de leur interprétation radicale de l’Islam.

On voit tout de suite combien cette question est au cœur de l’actualité et est loin d’être neutre.
Car, en fonction des racines qu’on attribue au phénomène qui frappe aujourd’hui le cœur des
grandes villes occidentales, on prend position dans un débat particulièrement polémique et
sulfureux, fait en retour de passions, de haines et de radicalités politiques.

Pour simplifier, on voit bien qu’affirmer que le djihadisme est le produit de la religion, voire de
la civilisation musulmane ou prétendre au contraire qu’elle n’est que le fruit de l’injustice et
des discriminations sociales des sociétés occidentales post-coloniales, induit des attitudes et des
solutions politiques bien différentes. On a même vu face à la violence extrême et choquante de
ces djihadistes certains dirigeants (comme l’ancien premier ministre Manuel Valls pour ne pas
le nommer) proclamer « qu’expliquer, c’est excuser », suggérant donc que tout effort
d’analyse ou de compréhension de la violence était une façon d’accepter et de disculper ceux
qui s’y adonnaient.

Et bien, ce que je vous propose au contraire, c’est d’essayer (autant que faire se peut) de mettre
à distance l’effroi bien naturel que provoque le terrorisme (et qui est l’objet même des
terroristes) pour nous interroger (de la façon la plus dépassionnée possible) sur les conditions
de passage à l’acte. Mais avant que nous lancer dans cette explicitation, quelques repères me
semblent nécessaire.

- Qu’est-ce le terrorisme ? Un mode d’action (une stratégie politique) du faible au fort qui a
pour but de terroriser, de terrifier un ennemi afin d’en espérer obtenir un gain politique. Cas
du terrorisme irlandais dans les années 1960-1990 qui visait à médiatiser la cause et créer un
rapport de forces favorable avec le Royaume Uni et les unionistes nord-irlandais (en faisant
pression sur les opinions publiques) de telle sorte d’obtenir le rattachement de l’Ulster à
l’Eire.

- Qu’est-ce que l’islamisme ? Une idéologie ou une doctrine politique qui vise 1) à émanciper
et purger les sociétés musulmanes de toute domination ou influence occidentale et/ou jugée
impie, 2) par la construction d’un ordre politique et social qui soit conforme aux préceptes
religieux de l’Islam (cha’aria) ou du moins de la façon dont les islamistes les interprètent.
C’est pourquoi on compte nombre de divergences politiques entre AKP turc, Frères
Musulmans égyptiens, Salafistes-Wahhabites saoudiens ou islamistes chi’ites iraniens ou
libanais.

- Tous les islamistes sont loin d’être terroristes, la plupart étant des militants politiques qui
ne considèrent pas que la promotion de leurs idées passe par le recours à la violence
(beaucoup utilisent les urnes !)

- Qu’est-ce que le djihadisme ? C’est l’idéologie d’une frange extrémiste de l’islamisme qui
appelle à utiliser la violence comme moyen d’action nécessaire et légitime pour imposer
leurs idées, leur conception du monde.

1
- Que peut-on entendre alors par radicalité djihadiste ? Ce sont ceux qui sont pris dans une
logique de radicalité ou de « pensée extrême » comme l’appelle le sociologue Gérald
Bronner et qu’on peut comprendre comme « l’aptitude de certains individus à sacrifier ce
qu’ils ont de plus précieux et en particulier leur vie, et dans de nombreux cas celle des
autres, au nom d’une idée. Autrement dit, certains individus adhèrent si
inconditionnellement à un système mental qu’ils lui subordonnent tout le reste1 ».

Dès lors, essayons de comprendre les raisons qui poussent certains individus à faire le choix
de la violence contre eux (kamikazes) et surtout contre les autres pour imposer leur
conception politique fanatique.

A cette interrogation, les réponses sont complexes, multiples et mobilisent nombre de


disciplines différentes : de la psychologie à la sociologie, en passant par l’histoire et la
géopolitique. En outre, par-delà les polémiques induites par le type d’interprétation retenue, il
est évident que toutes sont interdépendantes, inextricables mêlées. Et d’ailleurs, loin d’opter
pour l’une ou l’autre de ces explications, les chercheurs se distinguent plus par l’ordre des
priorités, la hiérarchie des facteurs qu’ils accordent pour expliquer le phénomène.
A l’image de l’intense polémique en 2016-2017 entre Gilles Kepel et Olivier Roy où, en faisant
fi des invectives et des caricatures, c’est surtout l’accent que chacun de ces deux chercheurs
mettaient soit sur le poids de l’islam (la « radicalisation islamique » de G. Kepel), soit sur la
dynamique psycho-sociologique (« l’islamisation de la radicalité » d’O. Roy) qui compte sans
qu’il nie totalement les arguments de l’autre.

Alors comment expliquer la radicalisation djihadiste (principalement en France) ?


C’est la rencontre (malencontreuse) entre un mal-être individuel et/ou social et une idéologie
violente et rédemptrice produit d’un contexte global et d’un imaginaire historique et mondialisé
conflictuel. Comprendre cette radicalité est donc un jeu d’échelle (Individu/Société/Monde
globalisé).
Plan :
1) Les racines psycho-sociologiques de la radicalisation djihadiste
2) La dimension imaginaire et mémorielle de la radicalité djihadiste
3) Les enjeux globaux de l’islam radical et djihadiste

1) Les racines psycho-sociologiques de la radicalisation djihadiste

1ère racine de la radicalisation islamiste : les motivations psycho-sociologiques.

Nombre de chercheurs soulignent que les djihadistes radicalisés sont souvent loin des
préoccupations religieuses et que ce qui les motivent n’a que peu à voir avec des
préoccupations spirituelles. En effet, la radicalisation de ces jeunes n’est presque jamais le
fruit d’une imprégnation à la culture religieuse islamique.

La plupart des radicalisés sont des jeunes sans attaches avec l’islam de leurs parents, et qui
souvent mène une vie bien loin des préceptes de la charia : ce sont souvent (mais pas toujours)
des délinquants au départ qui boivent, fument (et pas que du tabac), sortent en boite et
avec des filles non voilées : les frères Abdeslam tenaient un bar (Les Béguines !) et sont sortis

1
Gérald BRONNER, La pensée extrême. Comment des hommes ordinaires deviennent des fanatiques, PUF, 2016,
page 13.

2
en boites de nuit jusque quelques mois avant le Bataclan. Quant à Boulhel (le tueur de Nice)
c’était un fumeur régulier de cannabis et qui entretenait des relations homosexuelles !
On compte même près d’un quart de ceux qui sont partis combattre en Syrie qui sont des
convertis qui n’avaient aucun lien avec l’Islam (on compte même une poignée (4%) de
juifs !). Souvent d’ailleurs leur radicalisation n’a pas lieu à la mosquée ou dans des groupes
islamistes (aucun terroriste n’a jamais été membre des Frères musulmans) mais dans une salle
de sport ou surtout de musculation (importance de la virilité) ou surtout en prison.

C’est cette réalité qui poussent Olivier Roy et d’autres chercheurs comme Farhad
Khosrokhavar2 à axer leur compréhension du phénomène de radicalisation, non à partir de la
doctrine politico-religieuse qu’ils prétendent défendre, mais depuis leur positionnement
individuel et social, qui est récurrent.

Khosrokhavar : « avant 20 ans, l’idéologie joue un rôle marginal, ce sont les problèmes de la
personne qui domine ». Voilà pourquoi O. Roy parle plus d’une « islamisation de la radicalité »
dans la mesure où à ses yeux le processus psychosociologique de la radicalisation est premier
par rapport à l’islamisation. Quelless sont ces récurrences psychosociales qui peuvent être
autant de facteurs de radication ?

- La frustration sociale et narcissique, le sentiment de déclassement, le ressentiment et la


haine

Beaucoup de radicalisés sont des individus qui se sentent marginalisés, qui ressentent une forme
d’injustice et de non-reconnaissance par rapport à ce qu’ils estiment être leur vraie valeur. Ils
ont souvent des vies minables, affrontant de nombreux échecs qu’ils soient scolaires,
professionnels, amoureux ou familiaux (comme Boulhel ou le tueur d’Orlando). Ce sont ces
échecs qui motivent leur révolte, leur volonté de renverser la société par la violence. D’où la
séduction du discours djihadiste qui leur donne ad hoc une doctrine cohérente qui correspond
à leur aspiration au changement.
Bref, c’est une forme de blessure narcissique comme l’explique, entre autres, le juge
antiterroriste Marc Trevidic : « Les plus dangereux ont été atteints dans leur fierté. Avec
l’impression, qu’on les traite en inférieur alors qu’ils sont supérieurs ».

On note d’ailleurs souvent qu’une fois convertis nombre de djihadistes (qui ne connaissent rien
au Coran et pour la plupart ne parlent pas arabe) conservent leur mode de vie antérieure
(drogue et alcool). On constate aussi que le poids de la frustration sexuelle ou sociale. Devenir
djihadiste et partir en Syrie, c’est 1) pouvoir avoir rapidement des responsabilités nouvelles
et parfois une bonne rémunération, 2) avoir autant d’épouses que l’on souhaite. D’ailleurs
Daesh le savait qui faisait tout son possible pour attirer des femmes pour attirer beaucoup
d’hommes.

Il faut d’ailleurs tenir compte alors de la possibilité de vivre une aventure pour ces jeunes
frustrés et mal dans leur peau, de partir loin dans une terre idéalisée et rêvée pour avoir une
vie que l’on juge héroïque.

2
« Je fais moi-même partie du groupe de chercheurs qui pensent que la radicalisation est un phénomène à plusieurs
dimensions : chez les jeunes des banlieues, la radicalisation permet la sacralisation de la haine de la société, une
haine produite par un sentiment d'exclusion économique et sociale, d'injustice et d'humiliation ; chez les jeunes de
classes moyennes, elle est une réponse au vide de l'autorité, à la fatigue d'être soi, ou à une forme d'anomie. », F.
Khosrokhavar,
http://ses.ens-lyon.fr/articles/la-sociologie-de-la-radicalisation-entretien-avec-farhad-khosrokhavar-291659

3
- La quête d’une possible rédemption et de reconnaissance

Cette dimension utopique est essentielle : dans des sociétés occidentales qui ont vu disparaître
les grandes idéologies, le djihadisme est une forme de radicalisme révolutionnaire nouveau
qui offre des perspectives de transformation. (Comme les jeunes des années 1960 et 1970 qui
devenaient maoïstes ou trotskystes, par quête utopique de révolution)
Les radicalisés sont souvent des loosers qui haïssent le monde dans lequel ils vivent (et qu’ils
perçoivent comme les rejetant). D’où le nihilisme qui les habite : il s’agit de se détruire avec
eux le monde qu’ils exècrent (exemple type d’ailleurs des massacres de masse aux EU ou
ailleurs).

Dès lors aussi, à cette perspective nihiliste, s’ajoute une dimension rédemptrice et
révolutionnaire, d’un feu purificateur. Leur mort et celle du monde qu’il déteste sera le
point de départ d’un monde nouveau qui fera d’eux des martyrs, ou comme le dit O. Roy
qui transforme le looser en super-héros (« il est donc normal que les frontières soient flous
entre un psychopathe suicidaire et un militant du califat ») : d’où la mise en scène de leur acte
qu’ils filment et diffusent (comme Mohammed Merah)

- Le produit d’un conflit de générations et non de classes

Enfin, il y a plus globalement une dimension sociologique importante dans le processus de


radicalisation :

1) D’un côté, il est intéressant de noter que les radicalisés appartiennent à toutes les
catégories sociales et qu’ils sont loin d’être des marginaux ou de réels exclus sociaux.
Loin de là, tous sont souvent issus de classes moyennes plus ou moins aisées (mais pas
pauvres) voire ayant connu des formes d’ascension sociale (donc bien intégrés). D’où la
surprise récurrente des voisins quand ils apprennent qu’un tel était en fait un djihadiste.
D’ailleurs « les djihadistes sont loin d’être systématiquement le produit des banlieues
sensibles3 ». Et que dire des auteurs des attentats du 11 septembre, ces saoudiens issus
des classes privilégiées du royaume wahhabite ?

2) D’un autre côté, s’il n’y a pas de lutte des classes dans le djihadisme, en revanche on
comprend que le djihadisme est une forme de conflit générationnel. Le djihadisme est
un phénomène « de « jeunes » qui rejettent tant l’autorité de leurs parents que l’islam de
ces derniers4 » Les djihadistes sont souvent en guerre avec leurs parents, ou plutôt avec
ce qu’ils représentent : ils leur reprochent leur vie intégrée et l’abandon de leur vraie foi.
Ce qui leur permet d’inverser la relation générationnelle et de se poser comme ceux qui
savent et qui vont sauver leur parents (en mourant avant eux). D’où la dynamique
fraternelle très courante qui associe les frères (et sœurs parfois) d’une même génération
contre leurs parents (ou ce qu’ils représentent) : Merah, Kouachi, Abdeslaam, Abaaoud,
Clain…

2) La dimension imaginaire et mémorielle de la radicalité djihadiste

Ces facteurs psycho-sociaux prennent alors vie dans le radicalisé grâce à un univers
imaginaire que promeut l’idéologie djihadiste et qui répond à ces aspirations. En effet, le
3
Olivier Roy, ibid., page 65
4
Olivier Roy, Le djihad et la mort, Seuil, 2017, page 47.

4
propre de cette dynamique de radicalisation, c’est de s’inscrire dans un certain nombre de faits
socio-culturels propres à notre époque et à la globalisation.

- La culture jeune et de la violence : les djihadistes sont bien loin d’être des salafistes
(voulant rompre avec la société moderne pour se tourner vers la spiritualité et une vie
conforme à l’Islam littéral). Ce sont des jeunes qui boivent et qui surtout adorent la musique
rap, les jeux vidéo (notamment de shoot them up), le cinéma hollywoodien, les fringues
branchés… On sait que Scarface était régulièrement projeté à Raqqa ! D’ailleurs la
propagande de Daesh n’hésitait guère à mobiliser les codes de l’héroïsme hollywoodien
(contre plongée, ralenti, mise en scène…) pour ses films de propagande.

- Une culture globalisée : ce qui les motivent, ce sont les images du monde qu’ils perçoivent
et qui mobilisent leur rancœur et leur haine contre leur propre société. « Ce ne sont pas
des Palestiniens qui tirent sur le Bataclan : c’est celui qui de loin a vu des vidéos sur la
destruction opérée à Gaza par les Israéliens.5 » D’ailleurs dans nos pays ce ne sont pas le
Hezbollah, les Talibans, le Hamas ou toute autre organisation islamiste qui fait des attentats
au nom de la défense de l’Islam, mais des individus très loin de tous ces problèmes et qui
n’en ont qu’une connaissance déformée et lointaine (à l’image de Merah tueur de juif pour
libérer la Palestine !).

- Une mémoire postcoloniale pervertie : dans l’imaginaire et le discours des djihadistes figure
en bonne place la mémoire coloniale (d’où peut-être l’importance des Algériens, mais qui
n’est pas si forte que cela néanmoins). Celle d’une France laïque et impérialiste qui : 1) est
responsable de la situation de difficultés sociales et politiques des pays musulmans par ses
interventions (comme en Lybie en 2011) et surtout la colonisation qu’elle a imposée durant
un siècle, et 2) qui n’a de cesse de vouloir humilier et combattre l’Islam en France
(question de la laïcité) comme hors de France. D’où d’ailleurs la convergence objective entre
le discours des radicalisés et ceux culturalistes d’extrême droite qui tous deux considèrent
que la République et la France sont incompatible avec l’Islam (qui seraient alors réduit à ce
que les djihadistes disent de cette religion !).

- Aucune culture religieuse : Or, on l’a dit les djihadistes ne connaissent presque rien à
l’Islam et sont de piètres pratiquants, ignorant l’arabe et donc le Coran. En fait, ils
expriment une religion sans culture (la sainte ignorance d’Olivier Roy) où ils recréent de
toutes pièces leur propre religion. D’ailleurs, cette dynamique solitaire de construction de
ses propres préceptes religieux est le propre de l’Islam sunnite où le rapport entre le
croyant, le texte sacré et Dieu est solitaire et direct (un peu comme dans le Protestantisme).
Aucune autorité légitime n’existe pour dire le vrai. C’est d’ailleurs pourquoi il n’existe pas
de mouvements djihadiste de ce type dans l’islam chi’ite : « le chiisme ne laisse pas se
développer la « sainte ignorance » des jeunes radicaux [sunnites] qui s’autoproclament
maitre de la vérité. Le clergé sait et il sait tout.6 »

3) Les enjeux globaux de la radicalisation djihadiste

Par conséquent, on comprend combien la radicalisation est le fruit de la rencontre entre des
individus pris dans un certain contexte psycho-sociologique et un imaginaire culturel
contemporain qui les rend sensible au discours idéologique façonnée depuis le monde arabo-
musulman. Car comme le souligne, G. Kepel, c’est bien aussi la radicalisation islamique qui
5
Olivier Roy, Le djihad et la mort, Seuil, 2017, page 21.
6
Olivier Roy, Le djihad et la mort, Seuil, 2017, page 33.

5
forge une doctrine idéologique qui séduit ces générations. Ou comme le dit également la
politiste Myriam Benraad : « pour comprendre le phénomène djihadiste, il faut le traiter
comme une idéologie contemporaine et s’attacher au discours et à la vision du monde de
ses adeptes. »

Autrement dit, on ne peut nier aussi les enjeux politiques et géopolitiques de la radicalisation
djihadiste. Car le djihadisme et sa vision apocalyptique est une idéologie politique structurée
qui vise, comme tout mouvement politique, à conquérir le pouvoir et qui promeut l’action
djihadiste, c’est-à-dire terroriste, pour mieux les atteindre. Quels sont ses buts ? Quelles sont
ses stratégies globales ? Pourquoi faire des attentats et tuer tant d’innocents ?

1) Prendre le pouvoir dans le monde musulman : pour les groupes djihadiste, l’action
terroriste a pour but de légitimer leur discours politique et d’apparaitre come les seuls
vrais musulmans qui défendent l’Islam. Ils souhaitent convaincre les populations
musulmanes qu’ils sont le seul recours pour améliorer la situation, face à des dictatures et
des idéologies nationalistes arabes qui ont faillis, comme face à l’Occident et de pseudo
régimes démocratiques, qui ne sont pas conformes au Coran et qui sont le voile d’une
occidentalisation larvée et oppressive.

2) Encourager les opinions publiques occidentales et leur gouvernement à entrer en guerre


contre les Musulmans : en multipliant les attentats en Occident, les chefs djihadistes
comme les exécutants cherchent à terroriser les opinions publiques, à favoriser un
sentiment de peur vis-à-vis de tous les musulmans et de dresser les sociétés occidentales
contre eux.
Dès lors, cet affrontement civilisationnel qu’ils auraient créé pourraient 1) valider leur
discours d’une incompatibilité entre Islam et l’Occident (dont les principes humanistes et
démocratiques ne seraient qu’un leurre face à la négation des droits des musulmans), 2)
favoriser des interventions occidentales dans les pays musulmans (validant leur théorie
d’une guerre entre les deux et de la dynamique impérialiste et destructrice des Occidentaux)
et 3) d’apparaître comme les seuls vrais défenseurs de l’Islam face à tous leurs
concurrents (d’où la compétition macabre à laquelle se livrent les groupes djihadistes entre
eux – Al Qaida et Daesh surtout).

Bref, ce sont des acteurs qui (toutes choses égales par ailleurs) reprennent d’une certaine
manière LA DOCTRINE LENINISTE (DES ISLAMO-LENINISTES), celle d’une minorité
professionnelle qui doit éclairer et rallier les masses à sa cause, par une action résolue et
violente afin d’anticiper la Révolution.

Or, cette idéologie djihadiste est le produit d’une réalité socio-politique et économique, celle
de pays musulmans profondément déstabilisés par la modernité (économique, sociétale,
démographique, culturelle) créée par la mondialisation contemporaine et dans laquelle
l’idéologie djihadiste prend racine.

Cette idéologie se nourrit des difficultés de ce Moyen Orient troublé (chômage, mal
développement économique, changements démographiques et générationnels…) autant qu’elle
nourrit en retour quelques individus avec un discours adapté à leur mal-être et leur aspiration
nihiliste et/ou révolutionnaire. Aussi comme l’explique Pierre Puchot : « la victoire militaire
contre l’EI ne changera rien. Il faut assécher la production idéologique des djihadistes ». Et
donc aussi tenter de résoudre les conflits et plus largement la crise des pays d’Islam, dont
nous sommes si proches et si liés.

Vous aimerez peut-être aussi