Textes LIBERTE Et BONHEUR 1

Télécharger au format docx, pdf ou txt
Télécharger au format docx, pdf ou txt
Vous êtes sur la page 1sur 2

Textes LIBERTE et BONHEUR

Texte 1 : J.-J. ROUSSEAU, Les rêveries du promeneur solitaire, « 9e promenade »

Le bonheur est un état permanent qui ne semble pas être fait ici-bas pour l’homme.
Tout est sur la Terre dans une flux continuel qui ne permet à rien d’y prendre une forme
constante. Tout change autour de nous. nous changeons nous-mêmes et nul ne peut s’assurer
qu’il aimera demain ce qu’il aime aujourd’hui. Ainsi tous nos projets de félicité pour cette vie
sont des chimères1. Profitons du contentement d’esprit2 quand il vient ; gardons-nous de
l’éloigner par notre faute, mais ne faisons pas des projets pour l’enchaîner, car ces projets-là
sont de pures folies. J’ai peu vu d’hommes heureux, peut-être point 3 ; mais j’ai souvent vu des
cœurs contents, et de tous les objets qui m’ont frappé c’est celui qui m’a le plus contenté moi-
même. Je crois que c’est une suite naturelle 4 du pouvoir des sensations sur mes sentiments
internes. Le bonheur n’a point d’enseigne extérieure 5 ; pour le connaître, il faudrait lire dans
le cœur de l’homme heureux ; mais le contentement se lit dans les yeux, dans le maintien,
dans l’accent, dans la démarche, et semble se communiquer à celui qui l’aperçoit. Est-il une
jouissance plus douce que de voir un peuple entier se livrer à la joie un jour de fête, et tous les
cœurs s’épanouir aux rayons suprêmes du plaisir qui passe rapidement mais vivement à
travers les nuages de la vie ?

Texte 2 : MARC-AURELE, Pensées pour moi-même, « Pensée VIII »

Si tu es en peine à cause d’une chose extérieure 6, ce n’est pas cette chose qui te
trouble, c’est le jugement que tu portes sur elle. Il dépend de toi de le faire disparaître. Si la
cause de ton chagrin est dans l’une de tes dispositions intérieures 7, qui t’empêche de corriger
ta pensée ? Si tu es triste de ne pas exécuter une action qui te paraît sensée, pourquoi ne pas
l’exécuter, plutôt que de t’attrister ? « Mais il y a un obstacle puissant » dis-tu. N’aie donc pas
de chagrin, car la cause qui t’arrête ne dépend pas de toi […]. Souviens-toi que ta volonté
raisonnable devient invincible, lorsque, ramassée sur elle-même, elle se contente d’elle-
même8, ne faisant rien qu’elle ne veuille, même si sa résistance n’est pas raisonnée. Que sera-
1
Des illusions, de simples produits de notre imagination.
2
Le plaisir ou la joie.
3
Pas du tout.
4
Un effet.
5
De signe visible.
6
A notre esprit et donc au pouvoir de notre volonté.
7
Par exemple une maladie ou une blessure, un regret ou une inquiétude.
8
C’est-à-dire du simple mais fondamental pouvoir de l’esprit d’accepter ou de refuser ce qui se présente à lui.
ce donc lorsqu’elle emploiera la raison et l’examen 9 dans ses jugements ? Aussi la pensée
libérée des passions est une forteresse ; il n’y a rien de plus solide en l’homme ; elle est un
refuge où elle est imprenable. Celui qui ne l’a pas vu est un ignorant ; mais celui qui l’a vu et
ne s’y réfugie pas est un malheureux.

Texte 3 : EPICURE, Lettre à Ménécée

Il faut en outre établir par analogie que, parmi les désirs, les uns sont naturels, les
autres sans fondement et que, parmi ceux qui sont naturels, les uns sont nécessaires et les
autres naturels seulement. Parmi ceux qui sont nécessaires, les uns sont nécessaires au
bonheur, d’autres à l’absence de dysfonctionnements dans le corps, et d’autres à la vie elle-
même. En effet, une étude rigoureuse des désirs permet de rapporter tout choix et tout refus à
la santé du corps et à l’absence de trouble dans l’âme, puisque c’est cela la fin de la vie
bienheureuse. C’est en effet en vue de cela que nous faisons tout, afin de ne pas souffrir et de
ne pas éprouver de craintes. Mais une fois que cet état s’est réalisé en nous, toute la tempête
de l’âme se dissipe, le vivant n’ayant pas besoin de se mettre en marche vers autre chose qui
lui manquerait, ni à rechercher quelque autre chose, grâce à laquelle le bien de l’âme et du
corps seraient ensemble atteints. C’est en effet quand nous souffrons de l’absence du plaisir
que nous avons besoin du plaisir ; mais quand nous ne souffrons pas, nous n’avons plus
besoin du plaisir. Voilà pourquoi nous disons que le plaisir est le principe et la fin de la vie
bienheureuse.

9
La pensée critique.

Vous aimerez peut-être aussi