Cours N° 19_HCA 4 2eme année LMD, Architecture (2023-2024)

Cours N°19 : L’art Mudéjar

Introduction :
L'art mudéjar, qui est apparu dans l'Espagne du Moyen Age, n'est ni musulman ni chrétien, il
représente un nouveau mode d'expression artistique, une synthèse harmonieuse des éléments qui le
composent. C'est par conséquent un art de métissage, produit d'une société où cohabitaient
chrétiens, juifs et musulmans, et il a laissé son empreinte dans les églises, les synagogues et les
mosquées.

1. Genèse de l’art hispano-islamique :

Beaucoup d’historiens s’accordent à dire, que l’art musulman d’Espagne est né pendant le règne de
Abd Rahman I, avec l’édification de la grande mosquée de Cordoue (soit soixante-quinze ans après
la première conquête de l’Espagne) en faisant appel à des architectes et artistes d’orient, et à une main
d’œuvre locale qui possédaient ses propres traditions locales artistiques (et climatiques à ne pas nier).
Ce contact entre deux cultures différentes allait donner naissance à un nouveau mode d’expression
artistique.
De ce fait, la genèse de l’art hispano-islamique est, en effet, d’abord un processus de fusion
d’éléments Ibéro-romains, Wisigothiques, byzantins et arabes, tel que : plan à caractère central et
longitudinal, l’usage de la pierre de taille, le décor architectural puisé dans le répertoire végétal et
figuratif antique Romain (Feuille d’acanthe).

2. Résumé sur l’architecture islamique en Andalousie :

On peut résumer l’histoire de l’Espagne musulmane en quatre (4) grandes périodes :
_ L’architecture omeyade entre : 756 à 1031(est déjà présentée dans le cours N° 10)
_ L’architecture des roitelets de Taïfas : 1031 à 1086
_ L’architecture des Berbères : 1086 à 1232
_ L’architecture des Nasrides à Grenade : 1232–1492 (sera présentée dans le cours N° 17)

2.1. Quelques éclaircissements sur l’architecture des roitelets de Taifas et berbères en Espagne :
La période des royaumes de taïfa est l’étape qui succéda la période des Omeyyades d’al-Andalousie
au XIe siècle après l'éclatement du Califat de Cordoue en une série de royaumes appelés " les roitelets
de Taïfas " ou "royaumes de taïfa" (‫)ملوك الطوائف‬.
Du point de vue artistique, l’œuvre architecturale la plus représentative est la citadelle de l’Aljafería,
à Saragosse (Saragosse (en espagnol Zaragoza), ville du nord-est de l’Espagne).

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2.1.1. Les œuvres majeures :

 Palais Aljaferia, témoin exceptionnel de cette période.
 Porte d'Elvira (Elle a été l'entrée de Grenade de la voie de la médina Elvira (un grand arc).
 Banuelo de l'Albaicín (est un vieux hammam du 11ème siècle).
2.1.2. Emprunts à l'architecture omeyyade :
L'architecture des royaumes de taïfa est l'héritière directe de l'architecture Omeyyade du Califat de
Cordoue et pourrait être qualifiée d'architecture post-omeyyade. Elle reprend quelques
caractéristiques de l'architecture omeyyade telle que :
 L'arc outrepassé (arc en fer à cheval)
 L'arc polylobé
 Les arcs entrecroisés
 L'alfiz (encadrement rectangulaire de l'arc)...
2.1.3. Innovations de l'époque des royaumes de taïfa :
L'architecture des royaumes de taïfa apporte plusieurs formes architecturales remarquables qui font
toute l'originalité du palais de l'Aljaferia à Saragosse, parmi ces innovations :
-L'arc outrepassé brisé : C'est à l'Aljaferia qu'apparaît pour la première fois l'arc outrepassé brisé1.
- Le grand arc polylobé brisé orne en abondance l'Aljaferia (au niveau des portiques et le patio).
- L'arc recti-curviligne2 représente l'innovation la plus singulière à l'Aljaferia
Beaucoup d’éléments architectoniques ont été repris par l’architecture almohade (exemple : Giralda),
parmi ces éléments, on cite : le grand arc polylobé brisé, l'arc recti-curviligne, les entrelacements
d'arcs "recti-curviligne
2.2. L’architecture des Berbères : 1086 à 1232
Globalement, elle est représentée par l’architecture des almoravides et almohades.
2.2.1. Les berbères Almoravides conquièrent al-Andalousie en entier entre (1085-1145)
2.2.2. L’architecture des almohades : 1147 et 1269
L'architecture almohade est une architecture sobre et austère, comportant une majorité d'édifices de
type militaire présentant d'imposantes murailles surmontées de merlons pointus. Les édifices
almohades sont construits soit en brique ou en pierre de taille.
2.2.2. 1. Les principaux édifices almohades en Espagne :
-Edifices religieux : Mosquée Santa Catalina de Séville (transformée en église), mosquée de Bollulos
de la Mitación, Giralda de Séville.

1 Ce type d'arc a probablement été inspiré par les arcs entrecroisés qui ornent l'extension de la Mosquée de Cordoue
construite par le calife Al-Hakam II en 961 (qui forment de véritables arcs brisés)
2 Constitué de deux droites elles-mêmes composées d'une succession de lobes et d'angles droits

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-Édifices militaires : remparts de Séville, Torre del Oro à Séville 3(1220), Alcazar4 de Jerez de la
Frontera (fin du XIIe siècle)
-Vestiges des remparts de Cordoue : Porte de Séville, portion de remparts au sud des jardins de
l'Alcazar d'Alphonse XI
2.2.2.2. Emprunts à l'architecture antérieure :
L'architecture almohade a fait de nombreux emprunts aux traditions musulmanes antérieures, d'al-
Andalus ou d'ailleurs :
 Emprunts à l'architecture omeyyade :
o L'arc outrepassé (Giralda)
o L'arc polylobé (Giralda, mosquée de Bollulos)
o L’alfiz (Giralda, mosquée Santa Catalina, mosquée de Bollulos)
 Emprunts à l'architecture des royaumes de taïfa du XIe siècle :
o L'arc outrepassé brisé (mosquée Santa Catalina, Torre de l'Oro)
o Le grand arc polylobé brisé (Giralda)
o L'arc recti-curviligne
o Les entrelacements d'arcs, ajourés ou aveugles
o Les coupoles à nervures de stuc
Citons enfin la céramique vernissée, empruntée à l'Orient via le Maghreb.
2.2.2.3. Innovations : l'arc à lambrequins : d'un côté, l'arc recti-curviligne hérité de Saragosse se
développa très fort dans l'architecture almohade et devint "arc à lambrequins" (ce type d'arc recouvre
en abondance les étages supérieurs de la Giralda de Séville ainsi que le portique du Patio del Yeso à
l'arrière de l'Alcazar de Séville).
3.Le concept « mudéjar » :
-Le concept d'art mudéjar a été utilisé pour la première fois en 1859 par José Amador de los Ríos y
Serrano dans sa thèse El estilo mudéjar, en arquitectura. Ce terme implique le rôle clé des artisans
mudéjars dans l'introduction des influences d'al-Andalus dans les royaumes chrétiens ibériques.
-Le terme « mudéjar » désigne les musulmans demeurés en territoire chrétien après la Reconquista.
- Lorsque ce terme s’attache au mot art, cela désigne un style artistique « art mudéjar ». En effet, il se
vide de ses connotations ethniques car il s’applique non seulement aux monuments construits par les
mudéjares proprement dit, mais aussi aux réalisations d'artisans d'autres confessions tels que les juifs
et les chrétiens. C'est pourquoi l'art mudéjar peut être considéré comme un symbole de coexistence et
de tolérance.

3
Torre del Oro à Séville : est une tour d'observation militaire construite au XIII e siècle à Séville en Espagne durant la
dynastie des Almohades afin de contrôler l'accès à la ville depuis le fleuve Guadalquivir
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Palais des souverains maures en Espagne
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3.1. Définition :
L'art musulman d'Espagne fleurit encore un siècle après la chute de Grenade (1492) sous le nom
d'« art Mudéjar », qui, en fait, existe depuis le XII eme siècle. L'influence musulmane se mêle au décor
eme
gothique et à la Renaissance Italienne. L'Espagne sera influencée jusqu'au XVII siècle par cet art.
(source : www.encyclopedie.bseditions.fr)

3.2. L’art gothique et mudéjar :

Vers la fin du XIIe siècle, le style gothique est introduit en Espagne par des ordres monastiques venus
de France. Certains de leurs premiers bâtiments possèdent quelques caractéristiques gothiques (les
arcs brisés), mais restent pleinement romans dans l’esprit.
Au XIIIe siècle, le style gothique du nord de la France pénètre largement en Espagne, avec
l’édification de la cathédrale de Burgos (début 1221), puis de celles de Tolède (début 1226) et de
León5 (début 1255).

Dans le sud de l’Espagne, l’architecture gothique est fortement influencée par l’art islamique.
L’exemple le plus connu est la cathédrale de Séville (début 1402), construite sur le site d’une
mosquée, ce qui explique son large plan rectangulaire. Elle évoque un immense hall et ne possède pas
la structure caractéristique des cathédrales gothiques. En superficie au sol, c’est l’une des plus grandes
e
églises chrétiennes du Moyen Âge. Le clocher du XII siècle (à l’origine, le minaret) a conservé son
style islamique, en dehors d’ajouts en son sommet.
Les édifices chrétiens reconvertissent les structures préexistantes, mais sont aussi parfois construits
dans le plus pur style islamique. Ce style est appelé mudéjar (de l’arabe, « autorisé à rester », en
référence aux Maures qui sont restés dans les régions de l’Espagne, récupérées lors de la
Reconquista).

4. Quelques chefs d'œuvres de l’art mudéjar :

Les plus grands centres de l'art mudéjar furent Séville, Tolède et Saragosse.
 À Grenade, l'Alhambra (XIV siècle) avec sa célèbre cour des lions et sa salle des rois.
 À Cordoue, la chapelle san Fernando (dans la mosquée).
 À Séville,- l'Alcazar édifié par Pierre Ier le Cruel (1354)
-La cathédrale de Séville (début 1402), avec son minaret la Giralda
 À Ségovie, l'Alcazar royal (XV siècle).
 À Tolède, Synagogue de santa maria la blanca

5 La cathédrale de León est le premier édifice construit sur le modèle des cathédrales françaises de style rayonnant
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 Le monastère de Las Huelgas au début du XIIIe siècle (Alphonse VIII le Noble)

4.4. Les caractéristiques architecturales :

En architecture, les mudéjar utilisèrent leurs propres techniques et leur propre ornementation
appliqués à des édifices romans, surtout gothiques et même Renaissance, ces éléments produisirent un
style hybride d'un grand intérêt. Ses caractéristiques principales sont :
- L'arc en fer-à-cheval (arcs outrepassés), l’arc polylobé, l’arc brisé
-Les tours carrées des minarets seront couvertes d'un clocher, tour que l'on retrouve dans les mosquées
et les synagogues (clochers en forme de minarets)
-L’utilisation de la brique comme matériau principal (en particulier pour les clochers)
-La prolifération des matériaux de décor tels que : le plâtre ciselé, le stuc, le bois, le céramique
- Plafonds à caissons à marqueterie
-Arcatures aveugles
- Les éléments végétaux stylisés, les éléments géométriques, les entrelacs, les étoiles, les éléments
graphiques (l’emploi de la géométrique girih : sont des motifs géométriques islamiques décoratifs
utilisés dans l'architecture et les objets d'artisanat, constitués de lignes angulaires qui forment un motif
de lanières entrelacées.)
-Le rythme répétitif, le remplissage de toute la surface qui est la particularité de l'art islamique, sera
employée dans les mêmes conditions avec les motifs de l'art chrétien tel que la flore naturaliste
gothique.

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N.B :
Des repères chronologiques sur AL-ANDALUS islamique :

711 Arrivée des Omeyyades en Espagne, et la fondation de l’Emirat de Cordoue en 756

1031 Disparition du dernier calife de Cordoue. Al-Andalus se morcèle en une trentaine de

principautés indépendantes appelées Taifas (clan)

1085 Alphonse VI de Castille-León s'empare du royaume musulman de Tolède (Tulaytala en arabe)

1086 Les Almoravides interviennent en Andalus et écrasent Alphonse VI à Zall̄aqa. Ils s'emparent
progressivement des royaumes de Taifas

1147 Les Almohades s'emparent de Marrakech, la capitale de l'empire almoravide. Ils soumettent
progressivement al-Andalus ; Séville devient capitale
1184-1199 Apogée du califat almohade sous al-Mans̄ ur. Averroès est son conseiller.

1212 Bataille de Las Navas de Tolosa, les rois chrétiens défont les Almohades.

1228 Al-Ma‘m̄ un, le dernier calife almohade régnant dans la Péninsule, quitte al-Andalus pour le
Maghreb

1237 Profitant de la crise almohade, un prince arabe, Muhammad ibn Nasr ibn al-Ahmar, s'empare
de Grenade et y fonde l'émirat Nasride (1237-1492)

1333 Grenade entre la Castille et le Maghreb : les Mérinides du Maroc s'emparent de Gibraltar

1492 Boabdil, dernier émir nasride de Grenade, remet sa principauté aux Rois Catholiques