INVACO2 : Séminaire International, INNOVATION & VALORISATION EN GENIE CIVIL & MATERIAUX DE CONSTRUCTION

N° : 1O-059 ALI-BOUCETTA T., Université Badji Mokhtar d’Annaba, Algérie

ETUDE COMPARATIVE SUR L’EFFET D’UNE MEME ADDITION INERTE OU

CHIMIQUEMENT REACTIVE SUR LES PROPRIETES DES BETONS
AUTOPLAÇANTS
(CAS DES LAITIERS GRANULE ET CRISTALLISE)

ALI-BOUCETTA T1, BEHIM M, LAIFA W

Département de Génie Civil, Université d’Annaba, Algérie

Résumé

Les bétons autoplaçants (BAP) constituent une nouvelle génération de béton. Ce sont des bétons très
fluides, se mettant en place sans vibration. Cette propriété peut être obtenue par l’emploi de
superplastifiant et l’ajout d’une farine micronisée qui avec l’eau et le ciment constitue une suspension
colloïdale de viscosité nécessaire, dans laquelle « nagent » les granulats plus grossiers sans aucune
tendance à la ségrégation. Différentes formulations de BAP sont réalisées dans le but de conduire une
étude comparative sur l’effet du dosage en laitier à l’état inerte (laitier cristallisé) et à l’état chimiquement
actif (laitier granulé) par rapport à une addition témoin, chimiquement inerte constituée par les fillers
calcaire, sur les propriétés rhéologiques et mécaniques. La problématique de ce travail est donc la
valorisation des déchets industriels de haut fourneau que sont les laitiers granulé et cristallisé dans le
domaine des BAP. Le but de ce travail est de formuler un BAP avec optimisation de l’addition permettant
de communiquer au mélange les caractéristiques rhéologiques d’un BAP et les propriétés mécaniques
d’un béton ordinaire. Les résultats obtenus montrent un effet favorable de toutes les additions aussi bien
sur les propriétés rhéologiques que les résistances mécaniques. Cependant l’optimum du dosage est
différent d’une addition à une autre. Les mélanges les plus coulants sont ceux obtenus avec les fillers
calcaires, alors que les plus résistants mécaniquement sont obtenus avec addition de laitier.

Mots-clés : Béton autoplaçant, laitier granulé, laitier cristallisé, filler calcaire.

1. INTRODUCTION

De nombreuses études ont montré les effets favorables des additions fines sur les propriétés des bétons
autoplaçants (BAP) à l’état frais [1] (Nehdi & Rahman, 2000) et à l’état durci [2] (El Barak, 2005)
notamment les fillers calcaires qui sont les plus utilisées [3] (Bilberg, 1999). Cependant, peu d’études ont
été conduites sur les laitiers de hauts fourneaux. L’influence des additions sur la fluidité des BAP sont
fonction du dosage, du type, de la finesse et de la forme des particules [4] (Zhang, 2000). Dans notre
étude nous nous sommes fixés comme but l’étude de l’influence de la nature d’une même addition à l’état
inerte (laitier cristallisé) et à l’état chimiquement réactive (laitier granulé) et de son dosage sur les
caractéristiques du BAP à l’état frais et durci en substitution des fillers calcaires traditionnellement
utilisés.

2. PROGRAMME EXPÉRIMENTAL

2.1. Caractérisation des BAP à l’état frais

La plupart des formulations de BAP sont conçues actuellement de manière empirique [5] (Okamura &
Ouchi, 2003), Cependant on doit concilier deux caractéristiques a priori contradictoires la fluidité et la
ségrégation. Par conséquent les BAP doivent satisfaire plusieurs tests ;Nous en avons choisi trois qui sont
recommandés par [6] (AFGC, 2008) et qui permettent de caractériser les principales propriétés du BAP à
l’état frais, soient l’étalement au cône d’Abrams, l’écoulement à la boite en L et la stabilité au tamis et

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comme paramètres rhéologiques le seuil de cisaillement selon la méthode (LCPC Box) [7] (Roussel,
2007) et la viscosité plastique selon [8] (Kurokawa et al, 1994). Le gâchage des bétons et les essais de
caractérisation ont été effectués selon les procédures décrites par [6] (AFGC, 2008).

2.3. Formulation des BAP

Pour cela, nous avons formulé un BAP de référence (BAP R) sans aucune addition en s’appuyant
uniquement sur les critères recommandés par [6] (AFGC, 2008). Ces critères se résument au
rapport (Gravier / Sable) qui doit être proche de 1, au volume de la pâte qui doit être de 330 à 400 l / m3
et le dosage en superplastifiant doit garantir la fluidité du mélange. A partir de la composition du BAP R
nous avons formulés trois BAP avec addition de Filler Calcaire (BAP FC), BAP avec addition de Laitier
Granulé (BAP LG) et BAP avec addition de Laitier Cristallisé (BAP LC) en introduisant les différentes
additions aux dosages de 30, 45 et 60 % par rapport à la masse du ciment. Les différentes compositions
des BAP sont données dans le [tableau 2].

Tableau 2. Compositions des BAP avec additions

Unités BAP R BAP FC BAP LG BAP LC
% 0 30 45 60 30 45 60 30 45 60
Kg/m3 0 105 157,5 210 105 157,5 210 105 157,5 210
CEM II 42,5 Kg/m3 350 350 350 350 350 350 350 350 350 350
Eau Kg/m3 200 200 200 200 200 200 200 200 200 200
E/C - 0,57 0,57 0,57 0,57 0,57 0,57 0,57 0,57 0,57 0,57
E /L - 0,57 0,43 0,39 0,35 0,43 0,39 0,35 0,43 0,39 0,35
3
S 0/0,5 Kg/m 495 495 495 495 495 495 495 495 495 495
S 0,5/5 Kg/m3 249 249 249 249 249 249 249 249 249 249
G 3/8 Kg/m3 416 416 416 416 416 416 416 416 416 416
G 5/15 Kg/m3 499 499 499 499 499 499 499 499 499 499
G/S - 1,22 1,22 1,22 1,22 1,22 1,22 1,22 1,22 1,22 1,22
SP Kg/m3 6.3 6.3 6.3 6.3 6.3 6.3 6.3 6.3 6.3 6.3
3
V/pâte l/m 317 356 377 396 352 370 388 354 375 392

2.2. Caractérisation des bétons à l’état durci

Afin de vérifier la résistance mécanique nous avons utilisé des éprouvettes cubiques (10.10.10) cm 3 pour
les essais de compression à 2, 7, 28 et 360 jours. Les éprouvettes ont été démoulées 24 heures après le
coulage et conservées sous l’eau à la température ambiante.

3. DISCUSSIONS DES RÉSULTATS OBTENUS SUR BÉTON FRAIS

3.1. Etalement (Slump flow)

Les résultats obtenus et présentés sur la figure 1 montrent que tous les bétons ont des valeurs d’étalement
situées à l’intérieur du domaine des BAP y compris le BAP R qui est formulé sans aucune addition.
L’influence des additions minérales sur l’écoulement des BAP est fonction de leur dosage et de leur état
(inerte ou actif) [4] (Zhang, 2000). Les particules fines de l’addition remplissent les vides disponibles
entre les particules du mortier [9] (Yahia, 2005) et libèrent ainsi la quantité d’eau qui occupait ces vides
dans la solution interstitielle, ce qui se traduit par une meilleure fluidité. Cependant, au delà d’un dosage
critique, la viscosité du mortier augmente avec l’augmentation de la quantité de l’addition. Au delà de ce
dosage les frictions entre particules sont de plus en plus importantes. Ainsi les fillers calcaires améliorent
légèrement l’étalement (720 mm pour le BAP FC60), alors que le laitier granulé et cristallisé ont peu
d’influence sur l’étalement jusqu’à un dosage de 30 %. Au-delà de cette valeur on note plutôt une
diminution de l’étalement. En effet, certaines additions comme les laitiers ont une demande en eau
importante par rapport au ciment, ce qui peut réduire les propriétés d’ouvrabilité du béton [10] (Cyr et
Mouret, 2003). Selon [11] (Shi et al, 1998) le laitier adsorbe le superplastifiant. L’écoulement du laitier
granulé, par son caractère hydraulique latent, dépend de deux composantes: la première composante
physico-chimique liée au potentiel d’interaction entre les particules et de l’interaction des fines avec le

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liquide saturant, une deuxième composante granulaire liée aux frottements des particules [12] (Toutou,
2002).

550 ≤ Et ≥ 850 mm

[6] (AFGC, 2008)

Figure 1. Influence du dosage en addition sur l’étalement (Slump flow)

3.2. La boite en L (L-Box)

Les résultats obtenus par l’essai L – Box, sont présentés sur la figure 2. L’augmentation du dosage des
additions entraîne une difficulté de remplissage. Ainsi, l’optimum des dosages des laitiers semble se situer
entre 30 et 45 %. L’augmentation de la viscosité du mortier a rendu difficile l’écoulement et a entraîné, un
blocage du béton. Le BAP avec addition de filler calcaire garantit des taux de remplissages qui
s’inscrivent dans le domaine des BAP et cela même avec un dosage de 60%.

3.3. Stabilité au tamis

Le BAP R est le seul mélange qui présente un risque de ségrégation statique. En effet la quantité de
laitance (P = 18 %) est située à l’extérieur du domaine des BAP (figure 3). C’est le mélange le moins
riche en pâte (V = 317 litres, tableau 2), présentant une stabilité critique selon l’AFGC [6] (AFGC, 2008),
d’où l’importance du volume de pâte et le rôle des additions pour limiter les risques de ségrégation et de
ressuage [13] (Sedran, 1999). Pour les BAP LG60 et LC60 on a relevé une laitance « P » inférieure à 5%,
la résistance à la ségrégation est dite « trop importante ». Le mortier est trop visqueux pour s’écouler à
travers le tamis, ce qui explique et confirme les résultats de la boite en L.

Figure 2. Influence du dosage des additions sur Figure 3. Influence du dosage en addition sur la
l’écoulement (L – BOX) stabilité au tamis

3.4. Viscosité plastique

Pour la détermination de la viscosité plastique on s’est basé sur la relation (1) [8] (Kurokawa et al, 1994),
qui souligne la corrélation entre la viscosité et la mesure du temps d’étalement T500 :
ρ (1)
µ= (0,0268 Sf − 2,39)T
500
1000

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avec µ : la viscosité plastique du matériau en (Pa.s), ρ : la masse volumique du béton (Kg/m3), Sf :
l’étalement en (mm), T500 : le temps que met la galette à atteindre un diamètre de 500 mm (seconde).

Les résultats présentés sur la figure 4 et obtenus par application de la relation (1) montrent qu’avec
l’augmentation du volume de la pâte on note une augmentation de la viscosité.

Calcaire LG LC Calcaire LG LC

120 4
µ Viscosité, PaS

100

Secondes
3
80
60 2
40

500 ,
1
20

T
0 0
0 15 30 45 60 75 0 15 30 45 60 75
Taux de l'addition, % Taux de l'addition, %

Figure 4. Effet des additions sur la viscosité Figure 5. Effet des additions sur le T 500

Le temps de passage de la galette de béton à un diamètre de 500 mm présenté sur la figure 5 donne une
idée sur la vitesse de déformation du béton. En général, pour un BAP, la littérature mentionne des valeurs
allant jusqu’à 7 secondes [14] (Grünewald et Walraven, 2003). Les BAP LG60 et LC60 présentent les
plus importantes viscosités, en effet on a noté des T500 supérieures aux T500 du BAP FC.

3.5. Seuil de cisaillement

On a utilisé la boite LCPC pour évaluer le seuil de cisaillement (µ). Cette méthode s’appuie sur la mesure
de la longueur d’étalement L du BAP dans une boite de longueur 120 cm. Après l’arrêt de l’écoulement,
la longueur d’étalement mesurée dans la boîte permet de calculer le seuil du béton à partir des relations
fournies dans [7] (Roussel, 2007). Les résultats obtenus présentés sur la figure 6 montrent que toutes les
additions augmentent le seuil de cisaillement pour un taux de 30 %. Cependant au-delà de cette valeur
l’augmentation du seuil de cisaillement avec ajout d’additions inertes (filler calcaire et laitier cristallisé)
est légère et tend à se stabiliser. L’augmentation du dosage du laitier granulé (addition chimiquement
réactive) entraîne une forte augmentation du seuil de cisaillement, se traduisant par une augmentation de
la viscosité corroborant ainsi les résultats obtenus par la relation (1).

Calcaire LG LC

120
100
80
τ , Pa

60
40
20
0
0 15 30 45 60 75
Taux de l'addition, %

Figure 6. Effet des additions sur le seuil d’écoulement

4. DISCUSSIONS DES RESULTATS OBTENUS SUR BETON DURCI

Les bétons autoplaçants présentent souvent une résistance mécanique plus élevée qu’un béton ordinaire à
un rapport E/C équivalent [15] (Assié, 2004). L’introduction d’additions minérales entraîne une
modification de la porosité de la matrice cimentaire et améliore les résistances mécaniques des Bétons

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[16] (Billberg, 2001) au jeune âge par effet physique principalement et par effet pouzzolanique
lorsqu’elles sont chimiquement actives, à plus longues échéances [17] (Behim, 2004). Cette amélioration
des résistances dépend de la nature, de la finesse et du dosage de l’addition, les résultats obtenus et
présentés sur les figures 7 et 8 sont conformes aux références bibliographiques citées dans ce paragraphe.

Figure 7. Influence du dosage des additions sur la Figure 8. Influence du dosage des additions sur la
résistance en compression à 2 et 7 jours résistance en compression à 28 et 365 jours

Le BAP FC donne de meilleures résistances que les BAP LG et LC à 7 jours, pour un dosage optimal de
45 % environ. Le laitier granulé utilisé est réactif et possède un pouvoir hydraulique latent [17] (Behim,
2004), à 7 jours les résistances obtenues sont moins importantes que celles développées par les BAP FC.
Par contre, l’accroissement des résistances des BAP LG par effet pouzzolanique prend toute son ampleur
à 28 jours. Il est toutefois important de signaler que nous avons posé comme résistance caractéristique en
compression à 28 jours pour un béton d’ouvrage σC 28 = 30 MPa. Tous les mélanges satisfont cette
condition, mieux encore le BAP LG 60 peut même être considéré comme BAP à haute performance, sa
σC 28 = 50 MPa. Les résultats obtenus à 360 jours de durcissement confirment ceux obtenus à 28 jours.

CONCLUSION

L’écoulement des BAP peut être obtenu par l’emploi de superplastifiant comme nous l’avons vu avec le
BAP R alors que pour rétablir un niveau de viscosité convenable permettant de diminuer le risque de
ségrégation et de ressuage, l’emploi d’additions fines est parfaitement justifié. Le caractère inerte ou
réactif de l’addition peut avoir des effets aussi bien sur le béton frais par l’amélioration de la fluidité et
l’élimination des risques de ségrégation en relation avec le dosage, que sur le béton durci. On a pu mettre
en évidence l’effet du laitier granulé, par l’augmentation des résistances mécaniques en particulier à longs
termes (28 et 365 jours) vraisemblablement par action pouzzolanique. Cette étude a permis de mettre en
évidence la possibilité d’emploi des laitiers comme additions fines au BAP pour un dosage de l’ordre de
30 à 45 % mais qui peut être optimisé en relation avec le dosage en superplastifiant et l’emploi d’agent
viscosant. Dans la suite logique de ce travail il est utile de mettre en évidence l’effet des laitiers sur la
durabilité des BAP, car il est connu que ces déchets améliorent aussi la résistance chimique des matériaux
à matrice cimentaire [17] (Behim, 2004).

RÉFÉRENCES BIBLIOGRPHIQUES

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based materials, Cem Concr Res 30[10], pp 1663-1669.
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[3] Billberg P. 1999, Fine mortar rheology in mix design of SCC”, Proceedings of 1st inter Rilem Conf on SCC,
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[4] Zhang X., Han J. 2000, The effect of ultra-fine admixture on the rheological property of cement paste, Cem
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[5] Okamura H., Ouchi M. 2003, Self-Compacting Concrete, Journal of Advance Concrete Technology, vol. 1[1], pp
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[6] Association Française du Génie Civil, 2007, les BAP : recommandations provisoires, pp 63
[7] Roussel N. 2007, the LCPC Box cheap and simple technique for yield stress measurement of SSC, Materials and
structures, 11787, 930, p 8.
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[15] Assié S 2004, Durabilité des bétons autoplaçants, Thèse de doctorat, INSA-Toulouse, p 249.
[16] Billberg P. 2001, influence of filler characteristics on SCC rheology and early hydration, Proceedings of 2nd
Inter Conf on SCC, Tokyo, Japon, pp. 285-294 et 23-25.
[17] Behim M. 2004, Sous produits industriels et développement durable : Réactivité, rôle et durabilité des laitiers
d’EL HADJAR dans les matériaux à matrice cimentaire, Thèse de doctorat d’état en cotutelle Université d’Annaba –
INSA de Toulouse, pp 187.

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