Sara, Azizi

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Recherches et Applications en Finance Islamique

‫بحوث و تطبيقات في المالية االسالمية‬


Researches and Applications in Islamic Finance
ISSN : 9052-0224
Vol 6, No 1, 2022

Impact des caractéristiques des Sukuk sur leur valeur d’émission

Hanane AZIZI
Faculté des Sciences Juridiques
Economiques et Sociales,
Université Mohammed Premier,
Oujda, Maroc
[email protected]

Résumé: Le présent article vise à analyser l’impact des caractéristiques des Sukuk sur leur
valeur d’émission. Ainsi, nous avons évalué l’effet de l’échéance, du taux de profit, de la
structure des Sukuk, du type d’émetteur et du marché d’émission sur la valeur d’émission
des Sukuk durant la période allant de 2001 à 2020. L’échantillon retenu est constitué des
pays les plus gros émetteurs des Sukuk au niveau mondial, entre autres la Malaisie, le
Bahreïn, l’Arabie Saoudite, le Qatar, l’Emirates Arabes Unis, le Pakistan et l’Indonésie.
L’analyse économétrique a abouti à la confirmation des hypothèses de la recherche selon
lesquelles les caractéristiques quantitatives et qualitatives des Sukuk influencent leur valeur
d’émission. Suite aux résultats obtenus, nous avons procédé à l’analyse de l’expérience
marocaine en termes d’émission des Sukuk.
Mots clés : Sukuk, Valeur d’émission, caractéristiques quantitatives, Caractéristiques
qualitatives, Analyse économétrique.

Abstract: This article aims to analyze the impact of the characteristics of the Sukuk on
their issue value. Thus, we evaluated the effect of maturity, rate of profit, structure of
Sukuk, type of issuer and issue market on the issue value of Sukuk during the period from
2001 to 2020. The selected sample is made up of the largest issuers of Sukuk, including
Malaysia, Bahrain, Saudi Arabia, Qatar, United Arab Emirates, Pakistan and Indonesia.
The econometric analysis resulted in confirmation of the research hypotheses that the
quantitative and qualitative characteristics of Sukuk influence their issue value. Following
the results obtained, we proceeded to analyze the Moroccan experience in terms of Sukuk
issuance.
Keywords: Sukuk, issuance value, quantitative characteristics, qualitative characteristics,
Econometric analysis.
Reçu le : 08 novembre 2021, Accepté le : 17 janvier 2022

Citation : Azizi H. (2022), Impact des caractéristiques des sukuk sur leur valeur d’émission, Recherches et
Applications en Finance Islamique, Vol 6, No 1, pages : 66-83.

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Introduction
Le système financier islamique a connu une évolution considérable cette dernière
décennie, avec un actif total dépassant 2000 milliards de dollars en 2020. Le marché des Sukuk,
en particulier, occupe une place capitale sur ce marché. En effet, l’émission globale des Sukuk
a enregistré une croissance remarquable, elle est passée de 1,172 milliards de dollars en 2001 à
174,641 milliards de dollars en 2020.
Les Sukuk représentent des produits financiers islamiques caractérisés par des éléments
quantitatifs et qualitatifs, à savoir l’échéance, le taux de profit, la structure des Sukuk, le type
d’émetteur et le marché d’émission. Ils obéissent aux principes de la finance islamique,
notamment l’adossement à des actifs tangibles, le partage des profits et des pertes entre les
émetteurs et les souscripteurs, l’interdiction du riba, du gharar, du maysir et des activités
illicites.
Les caractéristiques et les particularités des Sukuk les rendent attrayants pour les
émetteurs et les investisseurs. Néanmoins, l’évaluation des Sukuk constitue l’un des domaines
de la recherche qui a enregistré le plus grand retard en finance islamique. En effet, vu les
particularités de cet instrument financier, il était difficile de développer des modèles généralisés
d’évaluation à l’instar des obligations.
Dans ce cadre, afin de promouvoir les émissions et les échanges des Sukuk, au même titre
que leurs homologues conventionnels, la question de leur évaluation devra être soulevée. Ainsi,
nous proposons d’aborder une nouvelle voie de recherche concernant l’évaluation des Sukuk à
savoir, l’étude de l’impact des caractéristiques des Sukuk sur leur valeur d’émission.
Les études antérieures portant sur les Sukuk se sont focalisées sur les facteurs qui incitent
les émetteurs à choisir l’émission des Sukuk comme mode de financement et l’impact des
conditions économiques sur l’émission des Sukuk. Néanmoins, les études menées pour analyser
la valeur d’émission des Sukuk et leurs caractéristiques restent limitées. A cet effet, la présente
recherche qui fait appel à de nombreuses disciplines, notamment la finance, l’économie, la
charia et le droit, se propose de contribuer à l’étude de la finance islamique, en particulier
l’étude des émissions des Sukuk. Ainsi, notre problématique s’articule autour de la question
suivante : Quels sont les caractéristiques quantitatives et qualitatives des Sukuk qui influencent
significativement leur valeur d’émission ?
Le présent article est organisé de la manière suivante : Dans un premier temps, nous allons
présenter les définitions et les caractéristiques des Sukuk. Dans un second temps, nous allons
présenter la revue de littérature sur les Sukuk et émettre les hypothèses de la recherche. Dans
un troisième temps, il sera question de procéder à l’analyse économétrique pour analyser
l’impact des caractéristiques des Sukuk sur leur valeur d’émission. Finalement, nous allons,
suite aux résultats obtenus, analyser l’expérience marocaine en termes d’émission des Sukuk.

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1. L’émission des Sukuk : définitions et caractéristiques


Les Sukuk ont suscité l’intérêt de plusieurs institutions financières islamiques,
notamment Institution International Islamic Fikh Academy (IIFA), Islamic Financial Services
Board (IFSB), Accounting and Auditing Organization for Islamic Financial Institutions
(AAOIFI) et International Islamic Financial Market (IIFM). Dans un premier temps, nous
allons retenir les définitions des Sukuk selon les principales institutions financières islamiques.
Dans un second temps, il sera question de présenter les éléments qui caractérisent les émissions
des Sukuk.
1.1. Définition des Sukuk
L’organisation AAOIFI, chargée de l’élaboration des standards et des principes en
matières de comptabilité, d’audit, d’éthique, de gouvernance et de conformité à la Charia
(Causse Broquet, G.-2012), définit les Sukuk, dans sa norme Charia 17, comme étant « des
titres financiers émis pour une valeur identique, adossés à un actif tangible ou à un
investissement et dont les détenteurs (ou souscripteurs) bénéficient des parts indivises :
-dans la pleine propriété ou dans l’usufruit d’un actif tangible ;
-au bénéfice de prestations et services ;
-aux actifs d’un projet déterminé, ou dans une activité d’investissement spécifique ». (AAOIFI-
2017)
Selon l’institution islamique IFSB, chargée de l’intégration de la finance islamique dans
le système financier mondial (Causse Broquet, G.-2012), les Sukuk (pluriel de sakk) « souvent
appelés obligations islamiques, sont des certificats avec chaque sakk représentant un droit de
propriété proportionnel et indivis sur des actifs corporels, ou un pool d'actifs principalement
corporels, ou une entreprise. Ces actifs peuvent appartenir à un projet spécifique ou à une
activité d’investissement conformément aux règles et principes de la Charia ». (IFSB-2009)
La commission des valeurs mobilières de la Malaisie, chargée de la régulation et le
développement des marchés de capitaux en Malaisie, considère les Sukuk comme étant « des
certificats de valeur égale attestant la propriété indivise ou l’investissement dans des actifs selon
les principes et les règles de la charia approuvés par le conseil consultatif de la charia en
Malaisie ». (Securities Commission Malaysia-2019)
Sur la base des différentes définitions, nous pouvons définir les Sukuk comme étant des
produits financiers islamiques, émis pour une valeur identique en plusieurs titres, adossés à des
actifs tangibles licites. Les détenteurs des titres bénéficient de la propriété indivise dans les
actifs tangibles, reçoivent une part des profits attachés au rendement de ces derniers (et non pas
un intérêt fixe) et courent les risques inhérents à ces actifs. A l’échéance, les détenteurs des
titres reçoivent une valeur de remboursement qui correspond au prix de marché des actifs
tangibles.

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Après la définition des Sukuk, il sera question de présenter leurs caractéristiques dans le
point suivant.
1.2. Caractéristiques des Sukuk
Avant toute émission, l’émetteur doit établir le prospectus d’émission des Sukuk, visé par
l’autorité des marchés financiers (Harb et al. 2014). Il s’agit, d’un document qui fournit aux
investisseurs des informations concernant les titres émis, l’émetteur et le donneur d’ordre.
En effet, ledit prospectus précise l’émetteur des Sukuk, le donneur d’ordre, le montant total de
l’émission, le montant nominal unitaire, la date de jouissance des coupons de profit, le prix
d’émission, le taux de profit, la périodicité de paiement des profits, la période de l’émission, le
gestionnaire et les investisseurs concernés. (Banque Mauritanienne de Commerce International-
2020)
Ainsi, comme le montre le tableau 1, les Sukuk sont caractérisés par des éléments
quantitatifs et qualitatifs définis dans leur prospectus d’émission. Les caractéristiques d’ordre
quantitatif portent sur l’échéance et le taux de profit. Les caractéristiques d’ordre qualitatif
regroupent la structure des Sukuk, le type d’émetteur et le marché d’émission.
Tableau 1. Émissions globales de Sukuk à taux de profit fixe (>500 millions de dollars,
échéance>1 année, 2020)

Source: International Islamic Financial Market (2021), Sukuk report: A comprehensive study
of the Global Sukuk Market, 10th Edition, p.30.
2. L’émission des Sukuk : revue de littérature et hypothèses de la recherche
Les études antérieures portant sur les Sukuk se sont principalement focalisées sur
l’analyse des facteurs qui incitent les émetteurs à choisir l’émission des Sukuk comme mode
de financement plutôt que les obligations ou les emprunts bancaires et sur l’analyse de l’impact
des conditions économiques sur l’émission des Sukuk. Par contre, les études menées pour

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analyser la valeur d’émission des Sukuk et leurs caractéristiques à savoir, l’échéance, le taux
de profit, la structure des Sukuk, le type d’émetteur et le marché d’émission restent très limitées.
Dans ce cadre, Azis et al. (2021) ont analysé l’effet de la valeur d’émission des Sukuk,
de la notation et du risque des Sukuk sur la croissance du marché des capitaux islamiques au
cours de la période allant de 2014 à 2019. Les résultats indiquent que la valeur d’émission et la
notation des Sukuk ont un effet positif et significatif sur la réaction du prix des Sukuk, tandis
que le risque des Sukuk a un effet négatif et significatif sur leurs prix.
Herni et Muhammad (2021) ont examiné l’effet du rendement à l’échéance et du nombre
d’années à l’échéance sur le prix de marché des Sukuk de type corporate en Indonésie et en
Malaisie. Les tests de la régression sur des données de Panel, durant la période allant de 2014
à 2018, ont abouti à confirmer que le rendement à l’échéance et le nombre d’années à l’échéance
exercent un effet négatif et significatif sur le juste prix de Sukuk corporate en Indonésie et en
Malaisie.
Une autre étude menée par Sukmaningrum et al. (2021) a porté sur l’impact des conditions
macroéconomiques sur le rendement brut des Sukuk de type corporate en Indonésie durant la
période allant de janvier 2014 à décembre 2018. Les résultats montrent qu’à long terme le taux
d’intérêt, l’indice de productivité industrielle, le prix mondial du pétrole et le taux de change
ont un effet significatif sur le rendement des Sukuk.
Utmani et Irwati (2018) ont examiné le cas de 27 émetteurs de type corporate durant la
période allant de 2005 à 2017. Les résultats ont montré que la conformité à la charia, le type
d’industrie, le bénéfice et l’âge de la société affectent le choix de la structure des Sukuk. En
effet, la conformité à la charia et le type d’industrie peuvent affecter le choix des émetteurs à
émettre des Sukuk Mudaraba. Par contre, le bénéfice et l’âge de la société n’ont aucun effet sur
le choix de la structure Mudaraba.
Dans une étude qui couvre les émissions des Sukuk en Malaisie entre 2000 et 2017,
Nagano (2018) a examiné l’impact des déterminants de l’émission à savoir le besoin de
financement, la maturité et le degré de l’asymétrie d’information sur le choix de la structure des
Sukuk. Ainsi, la structure Murabaha est préférée lorsque l’émetteur exige des fonds limités et
à court terme quelle que soit l’ampleur de l’asymétrie d’information. En outre, le choix de
Sukuk Ijara, se fait lorsque l’émetteur exige des fonds importants pour une longue échéance et
sous une asymétrie d’information élevée. Enfin, la structure Musharaka permet de couvrir des
fonds importants pour une longue maturité et sous une asymétrie d’information faible où les
pertes et les profits futurs sont partagés entre l’émetteur et les investisseurs.
Hadi et al. (2020) ont mené une étude sur des entreprises émettrices des Sukuk au sein de
la bourse d’Indonésie au cours de janvier 2018. Les résultats de leur étude ont montré que la
maturité, la structure des Sukuk et la maturité par structure des Sukuk affectent la valeur
nominale des Sukuk à un niveau de signification de 30% au cours de janvier 2018.
Melzatia et Doktoralina (2018) ont examiné l’impact de la maturité, de la notation et de
la valeur d’émission sur le rendement des Sukuk sur un échantillon composé de 157 Sukuk émis

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par des entreprises cotées à la bourse d’Indonésie durant la période allant de 2013 à 2016. Les
résultats de la régression multiple montrent que la maturité exerce un effet positif significatif
sur le rendement des Sukuk, la notation a un effet négatif important sur leur rendement et que
la valeur d’émission des Sukuk n’exerce pas un effet significatif sur leur rendement.
Godlewski et al. (2013) analysent la réaction du marché boursier aux émissions des Sukuk
et à celles des obligations pour un échantillon de sociétés malaisiennes émettrices des deux
types de titres durant la période allant de 2002 à 2009. Ainsi, les résultats de l’étude montrent
l’absence d’une réaction du marché boursier aux émissions des obligations. En revanche, le
marché boursier réagit négativement à l’émission des Sukuk. Dans ce cadre, les investisseurs
perçoivent les sociétés émettrices des Sukuk avec un partage des profits et des pertes comme
présentant une situation financière défavorable qui ne leur procure pas l’accès au marché
obligataire conventionnel.
Klein et Weill (2016) ont analysé 2 715 émissions d’obligations et celles des Sukuk pour
le cas de 114 entreprises malaisiennes durant la période courant de 2004 à 2013. Ils aboutissent
à la conclusion selon laquelle les entreprises choisissent d’émettre des Sukuk plutôt que des
obligations pour deux principales raisons. Premièrement, en présence d’une asymétrie
d’information élevée, les entreprises préfèrent partager les pertes et les profits avec les
investisseurs et choisissent d’émettre des Sukuk. Deuxièmement, les entreprises dont la
situation financière est défavorable trouvent des difficultés à accéder au marché obligataire et
se dirigent vers le marché des Sukuk.
Dans le même ordre d’idées, Nagano (2017) aboutit à un résultat similaire pour le cas des
entreprises malaisiennes et indonésiennes durant la période allant de 2000 à 2014. Ainsi, ces
entreprises émettrices préfèrent le marché des Sukuk si leur besoin de financement est important
et sous une asymétrie d’information élevée.
Selon la revue de la littérature réalisée, les recherches qui ont étudié les caractéristiques
des Sukuk ont démontré leurs effets significatifs sur d’autres variables. En outre, l’étude menée
par Hadi, Jayatama et Rinaldhi, qui s’est limitée à l’étude de l’impact de la maturité et de la
structure des Sukuk sur leur valeur nominale, a confirmé l’existence d’un impact significatif de
la maturité et de la structure des Sukuk sur leur valeur d’émission.
Ainsi, sur la base des résultats des études antérieures, nous émettons les hypothèses suivantes
que nous allons vérifier par le biais de l’analyse économétrique :
H1. Les caractéristiques quantitatives des Sukuk influencent significativement leur valeur
d’émission
H1.1. L’échéance influence significativement la valeur d’émission des Sukuk
H1.2. Le taux de profit influence significativement la valeur d’émission des Sukuk
H2. Les caractéristiques qualitatives des Sukuk influencent significativement leur valeur
d’émission
H2.1. La structure des Sukuk influence significativement leur valeur d’émission

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H2.2. Le type d’émetteur influence significativement la valeur d’émission des Sukuk


H2.3. Le marché d’émission influence significativement la valeur d’émission des Sukuk
3. Données et méthodologie utilisées
L’estimation et l’analyse de l’impact des caractéristiques des Sukuk sur leur valeur
d’émission nécessitent le choix d’un échantillon approprié et des variables adéquates. Dans ce
qui suit, nous allons présenter l’échantillon, les variables ainsi que les tests d’hypothèses que
nous allons appliquer.
3.1. Choix de l’échantillon
Notre échantillon est constitué de 925 émissions de Sukuk, à taux de profit fixe et
variable, à l’échelle internationale pour mesurer l’impact de l’échéance, du taux de profit et de
la structure des Sukuk sur leur valeur d’émission. Ces émissions proviennent des pays les plus
gros émetteurs de ce produit entre autres, la Malaisie, l’Arabie Saoudite, le Bahreïn, l’Emirates
Arabes Unies, le Pakistan, le Qatar, le Soudan, l’Indonésie, la Turquie et le Yemen. L’effet du
type d’émetteur et du marché d’émission sur la valeur d’émission des Sukuk sont évalués par
rapport à la valeur annuelle globale d’émission des Sukuk durant la période allant de 2001 à
2020.
Par ailleurs, l’indisponibilité des données est la principale raison de l’exclusion des autres
émissions de Sukuk et des autres pays et du choix de la période étudiée allant de 2001 à 2020.
3.2. Choix des variables
Les données relatives aux émissions des Sukuk sont issues des rapports publiés par
l’institution IIFM. Les variables comprennent la variable à expliquer et les variables
explicatives suivantes :
-Variable à expliquer
Il s’agit de la valeur globale d’émission des Sukuk qui inclut deux composantes : l’émission sur
le marché domestique et celle du marché international. De plus, l’émission des Sukuk peut être
souveraine, quasi-souveraine ou corporate. Il s’agit d’une émission en monnaie nationale ou en
devise étrangère et elle regroupe les différentes structures de Sukuk.
Dans le but de rendre les émissions des différents pays comparables et cohérentes, les
principales émissions, de janvier 2001 à décembre 2020, sont converties en une seule devise le
dollar américain qu’il s’agisse des émissions sur le marché domestique ou international et quel
que soit la devise d’émission.
-Variables explicatives
Il s’agit des caractéristiques des émissions des Sukuk qui comprennent celles d’ordre quantitatif
et celles d’ordre qualitatif.
-Variables explicatives quantitatives

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Les caractéristiques quantitatives regroupent l’échéance exprimée en année et le taux de profit


fixe exprimé en pourcentage, car nous ne disposons pas des informations complètes concernant
la variation du taux des Sukuk à taux de profit variable.
-Variables explicatives qualitatives
Les éléments qualitatifs regroupent les structures des Sukuk dont celles collectées sont au
nombre de neuf : Ijara, Istisna, Mudaraba, Murabaha, Musharaka, Salam, Wakala,
Exchangeable et Hybird.
En outre, la deuxième caractéristique est relative au type d’émetteur qu’il s’agisse
d’émetteur souverain, corporate ou quasi-souverain.
Les Sukuk souverains regroupent les Sukuk émis par la SPV pour le compte des Etats
souverains, ou directement émis par ces derniers sans passer par la SPV, dans leur propre devise
locale ou dans une autre devise. (Harb et al. 2014)
Les Sukuk corporate sont émis par la SPV sur la demande des émetteurs privés, à savoir les
banques islamiques, les groupes d’assurances Takaful et les grandes entreprises. (Malécot
2016)
Les Sukuk quasi-souverains sont initiés par une entité autre que l’Etat, mais bénéficient des
garanties de l’Etat pour offrir à leurs détenteurs une sécurité supérieure à celle des Sukuk émis
par ladite entité sans garantie en cas de défaut. (Portrait et Poncet 2014)
De plus, le marché d’émission, international ou domestique, constitue le troisième
élément caractéristique des émissions des Sukuk.
3.3. Choix des tests d’hypothèses
Les tests pour échantillons indépendants représentent des tests d’hypothèses où l’on
étudie deux populations distinctes sur une même variable. En effet, ils consistent à former des
groupes selon des variables catégorielles qualitatives pour vérifier si la différence entre les
moyennes des groupes est assez importante pour ne pas être due au hasard. (Carricano et Poujol
2008)

Ces tests permettent de comparer les moyennes de deux groupes (𝑋 et 𝑌 ) dans la


population selon deux hypothèses :
Hypothèse nulle : Il n’existe pas de différence entre les moyennes des deux groupes (𝑋 = 𝑌 )

Hypothèse alternative : Il existe une différence entre les moyennes des deux groupes (𝑋 # 𝑌 )
Nous allons faire appel à ces tests, car les caractéristiques des Sukuk regroupent des
variables quantitatives et qualitatives distinctes pour chaque émission. Ainsi, nous allons faire
appel aux tests pour échantillons indépendants pour parvenir à analyser la relation entre :
-la valeur d’émission des Sukuk, groupe 1 : l’échéance <= 5 ans, groupe 2 : l’échéance > 5 ans
;

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-la valeur d’émission des Sukuk, groupe 1 : le taux de profit <= 5%, groupe 2 : le taux de profit
> 5% ;
-la valeur d’émission des Sukuk, groupes : structure des Sukuk = Ijara, Istisna, Mudaraba,
Murabaha, Musharaka, Salam, Wakala, Exchangeable et Hybird ;
-la valeur d’émission des Sukuk, groupe 1 : type d’émetteur = souverain, groupe 2 : type
d’émetteur = corporate, groupe 3 : type d’émetteur= quasi-souverain ;
-la valeur d’émission des Sukuk, groupe 1 : marché d’émission= international, groupe 2 :
marché d’émission= domestique.
Sous le logiciel SPSS, le test pour échantillons indépendants s’effectue en deux étapes.
Le premier test effectué par SPSS est celui de Levene sur l’égalité des variances et le deuxième
concerne l’égalité des moyennes.
4. Résultats de l’étude
Nous allons analyser l’effet des caractéristiques quantitatives et qualitatives des Sukuk
sur leur valeur d’émission par le biais des tests pour échantillons indépendants.
4.1. Analyse de la relation des caractéristiques quantitatives des Sukuk et leur valeur
d’émission
Il sera question d’étudier l’effet des caractéristiques quantitatives des Sukuk, à savoir
l’échéance et le taux de profit sur leur valeur d’émission.
4.1.1. Analyse de la relation valeur d’émission des Sukuk et leur échéance
Nous avons écarté les émissions de Sukuk dont la maturité est perpétuelle, de notre
échantillon, pour retenir au final 882 émissions durant la période allant de janvier 2001 à
décembre 2020.
Les Sukuk suivant leur maturité comprennent ceux de courte, moyenne et longue
échéance et la durée de chaque type n’est pas universellement fixée. C’est la raison pour
laquelle, nous avons calculé la maturité moyenne des émissions de notre échantillon dont la
valeur est à hauteur de 7 ans. Ainsi, nous avons regroupé deux classes d’émission celles dont
la maturité est inférieure ou égale à 5 ans et celles dont la maturité est supérieure à 5 ans.
D’après le tableau 2, le test de Levene est significatif au seuil de 5% sig=0,002<5% on
accepte l’hypothèse de variances inégales. Pour estimer la différence entre les moyennes des
deux groupes (groupe 1 : échéance <=5 ans et groupe 2 : échéance >5 ans) nous devrons lire
sur la deuxième ligne des résultats (variances inégales) qui visualise sig=0,011<5% on accepte
donc l’hypothèse d’inégalité des moyennes.
Ainsi, les résultats des tests pour échantillons indépendants montrent que, en moyenne,
la valeur d’émission des Sukuk dont l’échéance > 5 ans est supérieure aux émissions des Sukuk
dont l’échéance <= 5 ans. Ainsi, les tests indiquent que la valeur d’émission varie

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significativement selon la maturité des Sukuk. En effet, la forte demande de fonds pour financer
les projets d’envergure exige une émission dont la durée de vie est assez longue.
Néanmoins, d’après la figure 1, le volume des émissions des Sukuk dont la maturité est
inférieure ou égale à 5 ans représente 60% des émissions de notre échantillon et dépasse
largement le nombre d’émission d’une maturité supérieure à 5 ans. Ainsi, dans le but
d’augmenter les émissions des Sukuk en valeur il faut développer celles dont la maturité est
supérieure à 5 ans.

Tableau 2. Test t pour échantillons indépendants : VES et E

Source : Résultats obtenus sous SPSS

Figure 1. Emissions des Sukuk par maturité (janvier 2001-décembre 2020)


Échéance <=5 ans Échéance > 5 ans

40%

60%

Source : Construite à partir des données de l’institution International Islamic Financial Market
4.1.2. Analyse de la relation valeur d’émission des Sukuk et leur taux de profit
Dans le but d’analyser l’impact du taux de profit sur la valeur d’émission des Sukuk, nous
avons retenu un échantillon composé de 222 émissions dont le taux de profit est fixe durant la
période allant de janvier 2005 à décembre 2020. Ainsi, les émissions dont le taux de profit est
variable ont été écartées, car nous ne disposons pas des informations complètes concernant leur
variation.

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Pour regrouper les Sukuk en fonction de leur taux de profit, nous avons calculé le taux
de profit moyen des émissions de notre échantillon dont la valeur est à hauteur de 4,63 %. Ainsi,
nous avons regroupé deux classes d’émission celles dont le taux de profit est inférieur ou égal
à 5% et celles dont le taux est supérieur à 5 %.
Les résultats des tests pour échantillons indépendants montrent que, en moyenne, la
valeur d’émission des Sukuk dont le taux de profit <= 5 % est supérieure aux émissions dont le
taux de profit > 5 %. Ce résultat est dû principalement à l’abondance des Sukuk à taux de profit
<= 5 % dans notre échantillon.
En effet, d’après la figure 2, le volume des émissions des Sukuk dont le taux de profit est
inférieur ou égal à 5 % représente 72% des émissions de notre échantillon et dépasse largement
le nombre d’émission à taux de profit supérieur à 5 %. Dans ce cadre, dans le but d’augmenter
les émissions des Sukuk en valeur il faut développer celles dont le taux de profit fixe est
supérieur à 5%.

Figure 2. Emissions des Sukuk par taux de profit (janvier 2001-


décembre 2020)
Échéance <=5 % Échéance>5 %

28%

72%

Source : Construite à partir des données de l’institution International Islamic Financial Market
4.2. Analyse de la relation des caractéristiques qualitatives des Sukuk et leur valeur
d’émission
Il sera question d’étudier l’effet des caractéristiques qualitatives des Sukuk, à savoir la
structure des Sukuk, le type d’émetteur et le marché d’émission sur leur valeur d’émission.
4.2.1. Analyse de la relation valeur d’émission des Sukuk et structure des Sukuk
L’échantillon retenu pour analyser l’impact des différentes structures des Sukuk sur leur
valeur d’émission est constitué de 878 émissions de Sukuk couvrant différentes échéances et
taux de profit fixe ou variable durant la période allant de janvier 2001 à décembre 2020.
Les résultats des tests pour échantillons indépendants, appliqués à notre échantillon,
n’étaient pas concluants. C’est la raison pour laquelle, nous allons analyser les émissions des
différentes structures par rapport à la valeur d’émission globale des Sukuk durant la période
allant de janvier 2001 à décembre 2020.

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Ainsi, d’après la figure 3, la structure Murabaha est en tête des émissions des Sukuk au niveau
des deux marchés international et domestique avec une part de 39% du total des émissions,
suivie de la structure Ijara d’une part de 22% des émissions totales, les Sukuk Wakala avec une
part de 16% et les Sukuk Hybrid avec une part de 12%.
Dans ce cadre, à l’instar des conclusions de l’étude de Nagano, les émetteurs choisissent
en particulier les deux structures Murabaha et Ijara en fonction de leur besoin de financement.
Ainsi, l’émetteur fait appel à la structure Murabaha lorsqu’il exige des fonds limités, alors qu’il
préfère la structure Ijara lorsqu’il s’agit de fonds importants. A cet effet, la structure des Sukuk
affecte significativement leur valeur d’émission. (Nagano 2018)
Par ailleurs, le volume des émissions dont la structure représente Murabaha est beaucoup
plus important que les émissions de Sukuk Ijara. Ces préférences des émetteurs entravent à la
fois l’augmentation des émissions des Sukuk en valeur ainsi que le développement du marché
secondaire des Sukuk, car la structure Murabaha est a priori une structure non négociable selon
la majorité des comités de la charia.

Figure 3. Emissions totales des Sukuk par structure (janvier 2001-


décembre 2020)
hybrid wakala ijara mudaraba murabaha
salam musharaka Exchangeable Istisna
1% 5%0% 0% 12%

16%
39%
22%

5%
Source : Construite à partir des données de l’institution International Islamic Financial Market
4.2.2. Analyse de la relation valeur d’émission des Sukuk et type d’émetteur
D’après les résultats des tests, en moyenne, l’émission souveraine est supérieure aux
émissions de Sukuk corporate et quasi-souverains. En outre, les valeurs d’émission des Sukuk
souverains et corporate dépassent celles des Sukuk quasi-souverains durant la période allant de
2001 à 2020. Par conséquent, nous confirmons l’hypothèse selon laquelle la valeur d’émission
varie selon le type d’émetteur.
D’après la figure 4, la valeur d’émission des Sukuk par type d’émetteur atteste des
différences importantes. En effet, au cours de la période allant de 2001 à 2008, l’émission des
Sukuk corporate dépasse largement celle des Sukuk souverains et quasi-souverains.
En revanche, la deuxième phase allant de 2009 à 2020, est caractérisée par une hausse
remarquable de l’émission globale des Sukuk souverains par rapport aux Sukuk corporate et
quasi-souverains.

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Ainsi, la crise financière et économique de 2008 (s’est transformée en une crise de


confiance), montrant les limites et les imperfections du système financier conventionnel,
notamment le marché des obligations, a orienté les Etats musulmans et non musulmans vers
l’émission des Sukuk.
Cette préférence pour l’émission des Sukuk, en générale, et celle des Sukuk souverains,
en particulier, est due à deux principales raisons :
-Par le biais de l’émission des Sukuk souverains, les Etats financent leurs projets sociaux
notamment, dans le domaine de l’éducation, de la santé et d’habitat ainsi que leurs projets
structurants qui ont des effets positifs à long terme sur la croissance économique entre autres,
les investissements dans le domaine des infrastructures, de l’énergie et de l’agriculture.
-les Sukuk reposent sur les principes de la finance islamique à savoir leur adossement à des
actifs tangibles (pour maintenir la connexion entre la sphère financière et la sphère réelle), le
partage des profits et des pertes entre l’émetteur et les souscripteurs, l’interdiction du riba, de
l’incertitude et de l’asymétrie d’information.
Figure 4. Valeur d’émission globale des Sukuk par type d’émetteur (2001-2020)

Source : Construite à partir des données de l’institution International Islamic Financial Market
4.2.3. Analyse de la relation valeur d’émission des Sukuk et marché d’émission
D’après les résultats des tests pour échantillons indépendants, en moyenne, la valeur
d’émission des Sukuk au niveau du marché domestique dépasse largement celle du marché
international. Par conséquent, en moyenne, la valeur d’émission varie en fonction du marché
d’émission.

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D’après la figure 5, au cours de la période allant de 2001 à 2011, la valeur d’émission sur
le marché domestique est en progression continue, la Malaisie étant le plus gros émetteur en
devise locale, alors que l’émission internationale demeure marginale.
Toutefois, depuis l’année 2012 à 2020, la valeur d’émission au niveau du marché
international suit un trend haussier (passée respectivement de 20 269 à 42 408 millions de
dollars) notamment, grâce aux Emirates Arabes Unis en tête des émetteurs sur les marchés
internationaux. Ainsi, la crise financière et économique de 2008 a orienté les Etats musulmans
et non musulmans vers l’émission des Sukuk, à l’échelle internationale, sur les grandes places
boursières en particulier la Bourse de Londres.

Figure 5. Valeur d’émission globale des Sukuk par marché d’émission (2001-2020)

Source : Construite à partir des données de l’institution International Islamic Financial Market

5. Discussion des résultats et comparaison avec l’expérience marocaine


Les résultats des tests pour échantillons indépendants, durant la période allant de janvier
2001 à décembre 2020, montrent que l’échéance, le taux de profit, la structure des Sukuk, le
type d’émetteur et le marché d’émission exercent un effet significatif sur la valeur d’émission
des Sukuk.
En effet, en appliquant les tests pour échantillons indépendants sur notre échantillon composé
de 925 émissions des Sukuk nous avons abouti aux résultats suivants :
- en moyenne, la valeur d’émission des Sukuk dont la maturité est supérieure à 5 ans dépasse
celle des Sukuk dont la maturité est inférieure ou égale à 5 ans ;

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- la valeur d’émission des Sukuk à taux de profit fixe inférieur ou égal à 5% est supérieure à
celle des Sukuk à taux de profit supérieur à 5% ;
- les structures Murabaha dominent les émissions des Sukuk suivies des structures Ijara ;
- les émissions souveraines dépassent les émissions de type corporate et quasi-souverain ;
- les émissions domestiques dépassent celles à l’international.
Ainsi, l’augmentation en valeur des émissions des Sukuk nécessite le développement des
émissions de longues maturités, à taux de profit attractif, négociables au niveau des marchés
secondaires et dont la structuration est basée sur des contrats Ijara, Mudaraba et Musharaka
proches de l’esprit de la finance islamique. En outre, le développement de la valeur des
émissions des Sukuk exige l’engagement du secteur privé à travers des émissions de type
corporate et des émissions au niveau des marchés internationaux.
Nous allons analyser, suite aux résultats obtenus, l’opportunité de financement à travers
les émissions des Sukuk pour le Maroc. Ce dernier, qui a procédé le 5 octobre 2018 à sa
première émission souveraine de Sukuk Ijara. Ainsi, il sera question d’analyser l’émission
marocaine des Sukuk par rapport à notre échantillon composé de 925 émissions des Sukuk. Le
but étant de parvenir à effectuer des recommandations quant aux structures des Sukuk les plus
adéquates au cas marocain.
Dans le but de diversifier ses sources de financement et d’attirer les investisseurs sensibles
à l’argument religieux, le Maroc a modifié le cadre juridique de la titrisation pour permettre
l’émission des Sukuk. (Lagtati 2018). En effet, afin de contribuer à la croissance de l’économie
réelle et au développement socioéconomique, le Maroc a finalisé le cadre juridique des Sukuk
en adoptant la loi n° 33-06 relative à la titrisation des créances telle qu’elle été modifiée et
complétée par les lois n° 119-12, n° 05-14 et n° 69-17. (El Morabit et al. 2019)
Si l’on compare les caractéristiques de l’émission des Sukuk souverains marocains avec
les émissions souveraines, domestiques, de type Ijara, de notre échantillon, on peut soulever
que :
-le taux de profit de 2,66% est en-dessous des taux de profit que procurent les émissions de
notre échantillon qui varient entre 3,5% et 16,47% ;
-l’échéance de 5 ans est proche de la maturité moyenne des émissions de notre échantillon ;
-la valeur d’émission de 1 milliard de dirhams soit 100 millions de dollars est en-dessous des
valeurs d’émission de notre échantillon qui varient entre 103 et 9067 millions de dollars.
Certes, la valeur de la première émission des Sukuk Ijara souverains marocains est en-
dessous de la moyenne et le rendement annuel procuré est moins attractif. Mais, la forte
demande des investisseurs, enregistrée lors de cette première émission, de 3,6 milliards de
dirhams pour une offre de 1 milliard de dirhams incitera le Maroc à opter pour des valeurs
d’émissions plus élevées, des maturités plus longues, des taux de profit plus attractifs, des
structures telles que Mudaraba, Musharaka, Salam dans ses futures émissions souveraines.

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D’une part, les Sukuk asset-backed de type Mudaraba et Musharaka sont à envisager,
pour l’Etat marocain, dans le cas de financement des projets robustes, avec des perspectives de
croissance. En effet, ces structures sont plus proches de l’esprit de la finance islamique, en
particulier leur respect du principe de partage des profits et des pertes et plus résistants face aux
crises.
D’autre part, à l’instar de l’Etat du Bahreïn, le Maroc peut recourir à l’émission des Sukuk
Salam de courte maturité de 3 mois, libellés en dirham marocain, destinés aux banques
participatives à des fins de gestion de leur liquidité (placer leurs excédents de financement et
financer leurs besoins de financement). Etant donné que le Maroc est l’un des plus gros
producteurs du phosphate et de ses dérivés à l’échelle internationale, nous suggérons
l’utilisation de ce produit comme actif sous-jacent.
Au final, les différentes émissions auront des effets positifs à court, à moyen et à long
terme sur la croissance économique du Maroc à savoir :
-pallier au déficit budgétaire du Maroc ;
-permettre à l’Etat Marocain de financer ses grands projets sociaux (Education, Santé…) et
d’investissement (infrastructures et des énergies renouvelables…) ;
-diversifier les instruments de financement de l’économie marocaine (alternatives aux prêts
bancaires et aux émissions obligataires) ;
-répondre à la demande des investisseurs (souscripteurs) résidents et internationaux
(notamment, relevant du Moyen Orient et d’Asie) qui préfèrent les produits conformes à la
Charia ;
-permettre aux banques participatives de gérer leur liquidité et d’optimiser la gestion de leurs
ressources ;
-encourager les émissions potentielles de Sukuk corporate pour le financement des projets du
secteur privé, en particulier le financement des petites et moyennes entreprises et des jeunes
entreprises.
Par ailleurs, le Maroc doit se concentrer sur l’amélioration continue des règles juridiques
et fiscales visant à accélérer le développement de la finance islamique, en particulier l’émission
des Sukuk et la sensibilisation des investisseurs en matière des Sukuk. (Abniaz et Sassi 2019)
Conclusion
A partir du présent article, nous avons soulevé la problématique de l’impact des
caractéristiques des Sukuk sur leur valeur d’émission. Dans le but de cerner ledit sujet, nous
avons présenté le cadre conceptuel relatif aux Sukuk, notamment leurs définitions et leurs
caractéristiques quantitatives et qualitatives.
Selon la revue de littérature réalisée, la majorité des études antérieures se sont
focalisées sur les facteurs qui incitent les émetteurs à choisir les Sukuk comme mode de
financement et l’impact des conditions économiques sur leur valeur d’émission.

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Dans ce cadre, nous avons abordé une nouvelle voie de recherche concernant les Sukuk
et nous avons soulevé la problématique selon laquelle : Quels sont les caractéristiques
quantitatives et qualitatives des Sukuk qui influencent significativement leur valeur
d’émission?
Pour vérifier la véracité des hypothèses de la recherche, nous avons effectué des tests
pour échantillons indépendants, sur un échantillon de 925 émissions et sur l’émission globale
des Sukuk durant la période allant de janvier 2001 à décembre 2020.
Les résultats de l’analyse économétrique montrent que l’échéance, le taux de profit, la
structure des Sukuk, le type d’émetteur et le marché d’émission exercent une influence
significative sur la valeur d’émission des Sukuk.
Suite aux résultats obtenus, nous avons analysé et comparé la première émission
marocaine des Sukuk Ijara avec les émissions de notre échantillon. Ainsi, le Maroc a émis le
vendredi 5 octobre 2018 au sein de la bourse de Casablanca des Sukuk Ijara, d’un montant
d’émission de 1 milliard de dirhams (100 millions de dollars), d’une échéance de 5 ans et un
taux de profit de 2,66%.
Certes, la valeur de ladite émission est en-dessous de la moyenne des 925 émissions des
Sukuk de notre échantillon et le rendement annuel procuré est moins attractif, mais la forte
demande des investisseurs incitera le Maroc à opter pour des valeurs d’émissions plus élevées,
des maturités plus longues, des taux de profit plus attractifs, à encourager les émissions
potentielles des Sukuk corporate et les autres structures telles que Mudaraba, Musharaka et
Salam. En effet, les Sukuk de type Mudaraba et Musharaka présentent une opportunité de
financement des projets robustes, avec des perspectives de croissance. En outre, les Sukuk
Salam constituent une opportunité de gestion des liquidités des banques participatives.
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