Droit Des Procedures Collectives

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Moussa Gueye Agrégé de Droit privé

DROIT DES PROCEDURES COLLECTIVES

INTRODUCTION
I. l’objet du droit des procédures collectives
Les entreprises sont des espèces commerciales, des individus du monde des affaires qui, à
l’instar des hommes, naissent, vivent et meurent. Dynamiques, elles s’épanouissent sans grand
encombre. Fébriles, elles sont souvent victimes de pathologies internes et externes dont le
traitement, à titre préventif ou curatif, a de tout temps appelé l’intervention constante du
législateur.
Cette démarche s’explique en raison des intérêts qui gravitent au sein autour de l’entreprise.
Elle est unité de vie économique et sociale, garante de la paix en créant des emplois, actrice de
prospérité en produisant des biens et services, en générant de la plus-value que l’Etat s’occupe
de redistribuer1. Elle est cadre de vie simplement et, en tant que tel, réceptacle et espace
d’expression et d’affrontement des intérêts d’ordre public et privé. Il y a, certes, une personne
ou un groupe de personnes, physique ou morale, publique ou privée à la base de la création
d’une entreprise. Mais dès qu’elle naît, l’entreprise n’appartient plus dans l’absolue à son
initiateur. Les associés ou actionnaires initiaux ou postérieurs, l’Etat à travers ses
administrations déconcentrées ou décentralisées, le fisc, les salariés, les banques, les sociétés
d’assurances, les fournisseurs etc. ont des intérêts bien fixés dans la vie de l’entreprise et, par
suite, dans le sort auquel la conduit sa gestion. C’est pourquoi, il a été établi un cadre juridique
pour l’expression de ces intérêts et un mécanisme d’arbitrage de leur affrontement.
Des matières particulières fixent, sur des fondements précis, le cadre juridique d’expression des
intérêts de tous ordres au sein de l’entreprise. Aussi, le droit du travail et celui de la sécurité

1
Sur l’importance économique et sociale de l’entreprise, voy. Yves GUYON, Droit des affaires Tome 2,
Entreprises en difficulté, redressement judiciaire et faillite, Economica, 9ème éd. 2003 ; du même auteur Droit des
affaires, tome 1, Droit commercial général et société, Economica, 12ème éd ; G. RIPERT, R.ROBLOT ; Traité de
droit commercial, Tome 1-Volume 2, les sociétés commerciales ; L.G.D.J., 18ème éd. Paris 2002 ; même auteur,
Traité de droit commercial, Tome 2, Effets de commerce, Banque et bourse, contrats commerciaux, procédures
collectives ; L.G.D.J., 16ème éd. Paris 2000 ; F. ANOUKAHA, A. CISSE, J. NGUEBOU TOUKAM, P-G
POUGOUE, M. SAMB ; OHADA : Sociétés commerciales et G.I.E, coll. Droit uniforme africain, Juriscope,
Bruxelles,2002. Aussi F. M. SAWADOGO, OHADA : Droit des entreprises en difficulté, coll. Droit uniforme
africain, Juriscope, Bruxelles, 2002.

1
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sociale règlent-ils les rapports sociaux. La création des sociétés commerciales, leur
fonctionnement, leur transformation, fusion ou disparition ainsi que les relations des différents
acteurs au sein de la société sont réglés par l’Acte uniforme relatif au droit des sociétés
commerciales et du groupement d’intérêts économique2 ; les relations commerciales étant
soutenues par l’acte uniforme relatif au droit commercial général.3
Ainsi, lorsque l’entreprise réalise des bénéfices, elle rencontre des difficultés avec ses salariés qui
réclament leur part du profit collectif ainsi réalisé ; cela donne lieu le plus souvent à des grèves.
Ce genre de difficultés relève du droit du travail. Mais parfois l’entreprise rencontre des difficultés
parce que l’état de sa trésorerie est tel qu’elle ne peut faire face à ses échéances. Il ne fait pas de
doute que si certaines de ces difficultés peuvent être réglées aisément, d’autres se révèlent très
sérieuses soit parce que l’environnement n’est pas favorable, soit parce que le chef d’entreprise ne
bénéficie plus de la confiance de ses créanciers. Face à une telle situation que faut-il faire ? Il y a
la solution qui consiste à laisser le débiteur seul face à ses créanciers. Il y a aussi celle qui conduit
à imposer à tous les créanciers les mêmes sacrifices. C’est à cette dernière solution que se sont
ralliés les rédacteurs de l’Acte uniforme portant organisation des procédures collectives
d’apurement du passif. On peut déceler, à la lecture des dispositions de cet Acte uniforme une
volonté de soumettre tous les créanciers à une discipline collective afin d’éviter l’anarchie des
poursuites individuelles. Il ne suffit pas cependant d’opter pour une procédure collective pour
régler tous les problèmes ; il faut aussi prendre parti sur la manière d’organiser la procédure. Faut-
il organiser une procédure orientée vers le paiement des créanciers quel que soit le prix à payer
pour l’entreprise ? Ou faut-il organiser la procédure en ayant seulement en vue le redressement de
l’entreprise ? Les rédacteurs de l’Acte ont fait un choix mais ce choix n’est pas aussi tranché. Ils
ont opté pour une solution qui consiste à permettre le redressement toutes les fois que cela est
possible tout en recherchant l’apurement du passif. L’institution des mesures préventives à côté
des mesures de traitement classiques que sont le redressement judiciaire et la liquidation des biens
illustre parfaitement cette volonté de concilier redressement de l’entreprise et paiement des
créanciers.

2
J.O. OHADA n° spécial du 4 février 2014.
3
J.O. OHADA n° 23, 15 février 2011, p. 1 et s. On citera également le droit de l’arbitrage, le droit comptable, le
droit des instruments de paiement, le code général des impôts en ce qui concerne les relations avec l’administration
fiscale, etc.

2
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Donc les procédures collectives écartent les initiatives individuelles et poursuivent des objectifs
multiformes vis-à-vis des trois (3) acteurs intéressés et concernent soit le redressement, soit la
liquidation.
Si l’objectif prioritaire est le paiement des créanciers ce sera alors une procédure collective
d’exécution. Dans ce type de procédure, on permet au créancier hypothécaire de saisir et faire
vendre l’immeuble même s’il est nécessaire à la survie de l’entreprise. Si l’on autorise la
continuation de l’activité ou de l’exploitation c’est principalement pour trouver le meilleur
moyen d’assurer le paiement des créanciers à travers un concordat.
Si l’objectif prioritaire est le redressement de l’entreprise dans ce cas, il n’y a pas de saisie ;
les biens de productions nécessaires à l’exercice de l’activité de l’entreprise sont conservés. La
continuation de l’activité est autorisée pour permettre la survie de l’entreprise et la résolution
de plein droit des contrats est exclue, même pour les contrats conclus intuitu personae dès lors
que de tels les contrats sont nécessaires à la poursuite de l’exploitation.
Les procédures collectives constituent donc le traitement prescrit aux entreprises en difficulté.
Ce sont l’ensemble des mécanismes juridiques permettant de réunir les créanciers en vue de
régler les difficultés financières et économiques de leur débiteur. Ces procédures sont dites
collectives en ce qu’elles conduisent à réunir les créanciers en une masse d’une part et en ce
qu’elles visent à satisfaire collectivement les intérêts mis en péril par les difficultés de
l’entreprise débitrice d’autre part. Aux termes de la législation en vigueur, il existe quatre types
de procédures collectives4: la conciliation, le règlement préventif, le redressement judiciaire et
la liquidation des biens. La conciliation est une procédure « ouverte aux personnes qui
connaissent des difficultés avérées ou prévisibles mais qui ne sont pas encore en état de
cessation des paiements. Elle a pour objectif de trouver un accord amiable avec les principaux
créanciers et cocontractants du débiteur, en vue de mettre fin à ses difficultés ». Le règlement
préventif est « une procédure destinée à éviter la cessation des paiements ou la cessation
d’activité de l’entreprise et à permettre l’apurement de son passif au moyen d’un concordat
préventif ». Le redressement judiciaire serait, quant à lui « une procédure destinée à la
sauvegarde de l’entreprise et à l’apurement de son passif au moyen d’un concordat de
redressement ». Enfin, la liquidation des biens est « une procédure qui a pour objet la réalisation
de l’actif du débiteur pour apurer son passif ».

4
V. AUPC, Art. 1-1, al. 2.

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Les procédures collectives d’apurement du passif ne sont pas à confondre avec les sanctions
qu’elles peuvent générer.5 Elles concernent les personnes physiques exerçant une activité
professionnelle indépendante civile, commerçante, artisanale ou agricole, sur les personnes
morales de droit privé commerçantes ou non, les entreprises publiques ayant la forme d’une
personne morale de droit privé6.
Il s’y ajoute que l’internationalisation des activités exercées par certaines entreprises a par
ailleurs obligé le législateur à tenir compte de cet aspect dans la réglementation.
La globalisation du droit des affaires ayant rendu inévitable la confrontation du droit des
entreprises en difficultés avec la scène internationale et à la faveur de l’émergence de larges
multinationales disposant de filiales implantées dans plusieurs pays, l’ouverture d’une
procédure collective d’apurement du passif est de nature à créer pour le juge des situations de
liquidation complexes pour lesquelles le droit n’apporte aucun éclaircissement. Ainsi que
l’exprime Paul Didier « La législation de la faillite est un carrefour où se croisent et se
rencontrent toutes les composantes du système juridique considérés. La faillite touche à la
condition des personnes, puisque le failli est empêché d'agir et se voit mis comme en tutelle.
Elle touche au statut des biens qui sont placés en quelque sorte sous séquestre. Elle touche à
la loi des contrats dans la mesure où les droits des créanciers sont suspendus, réduits et parfois
même supprimés. Elle touche au droit des sûretés, même si les créanciers privilégiés demeurent
en principe à l'abri de ses atteintes. Elle a des incidences sur le jeu des règles matrimoniales
ou successorales. Elle s'appuie sur les règles de la responsabilité civile et pénale. Elle est
indissociable de l'organisation judiciaire et des règles de procédure »7.
En effet, dans un contexte international le corps de règles procédurales et substantielles du for
en matière de procédure collective s’avère insuffisant et inefficace pour répondre aux problèmes
posés par l’internationalité d’une liquidation. Outre la reconnaissance du jugement étranger se
posent les problèmes de la protection des créanciers, des biens situés à l’étranger et de
l’exécution d’une décision sur la saisie d’un bien localisé sur un territoire autre que celui du
for. A cela s’ajoute, dans l’espace OHADA, le fait que tout en étant dans un système juridique
intégré, la dimension internationale est très présente en cas d’ouverture de procédure collective
dans un Etat-partie.

5
Celles-ci peuvent être civiles : c’est le cas de la faillite personnelle (art. 194 et s. AUPC) ; ou pénales : c’est le
cas de la banqueroute et des infractions assimilées (art. 226 et suivants AUPC).
6
V. AUPC, Art. 1-1, al. 1.
7
Paul Didier, «La problématique du droit de la faillite internationale », 1989, R.D.A.I., n° 3, 203.

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Traditionnellement considéré comme un « îlot de résistance à l'internationalisation »8, le droit


des procédures collectives ne peut rester totalement indifférent au vaste mouvement de
« mondialisation » et de multiplication des échanges transfrontières. Les sociétés ayant de plus
en plus d'activités en dehors des frontières de leur Etat d'origine, leurs défaillances ont des effets
à l'étranger. Les faillites internationales voient donc leur nombre grandir.
Dans l’espace OHADA, le terme de « faillite » n'est plus employé depuis l’entrée en vigueur
de l’AUPC/AP9: l'expression officielle est celle de « procédures collectives d’apurement du
passif ».
II. L’évolution de la législation
Le Code de commerce de 1807 en France est la première étape, la faillite seule sanctionnait la
cessation des paiements et entraînait la liquidation de l’entreprise et le failli finissait en prison.
A cette époque, il y avait une confusion entre le sort du débiteur et de l’entreprise. Cette
méthode rigide sera assouplie au fil des années grâce à des législations plus réalistes et
opportunes qui distinguent nettement les règles applicables à l’entreprise individuelle ou
sociétaire en difficulté et celles qui concernent spécifiquement les personnes physiques ayant
commis certaines fautes ayant contribué à ces difficultés.
Les Etats Africains seront influencés, avant l’entrée en vigueur de l’AUPC/AP, par ces
différentes législations. Ainsi, dès l’indépendance, on aura trois (3) grandes familles :
- La famille des pays qui appliquent le Code de commerce tel qu’il a été reçu pendant la
période coloniale et modifié par la loi du 4 mars 1889. Ici coexistent deux (2) types de
procédures : la faillite et la liquidation judiciaire (Congo, Cameroun, Bénin).
- La famille des pays qui ont adopté un texte postérieurement à l’indépendance en
s’inspirant de la loi française du 13 juillet 1967 ici, le règlement judicaire coexiste avec la
liquidation des biens (Sénégal, mali).
- La famille des pays qui ont adopté un texte après l’indépendance en s’inspirant des lois
françaises du 1er mars 1984 et du 25 janvier 1985. Ces lois prévoient les mesures préventives
tel que le règlement amiable des difficultés des entreprises et des mesures curatives que sont le
redressement judiciaire et la liquidation judiciaire (Guinée, Gabon).
- Après la signature du traité de l’OHADA, et l’adoption de l’AUPC/AP le 10 avril 1998, le
législateur OHADA, en modifiant récemment sa législation sur les procédures collectives

8
Jacques Béguin, mélange en l'honneur d'Yvon Loussouarn 1994 p. 31.
9
ou uniquement dans un sens très étroit visant des sanctions professionnelles prononcées contre les dirigeants
d'une entreprise en difficultés.

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d’apurement du passif10 n’a pas manqué de moderniser les règles applicables en la matière. Cela
s’est traduit par le renforcement des mesures préventives et une meilleure organisation des
mesures curatives. Car le diagnostic posé laissait apparaître que les objectifs fixés à savoir le
sauvetage des entreprises viables, la liquidation des entreprises non viables, le paiement
substantiel des créances, le tout de manière rapide et transparente, n’étaient pas atteints dans
des proportions significatives.
Ainsi, dans le cadre des procédures de liquidation des biens, il apparaît que, dans les États
de l’espace OHADA, les dividendes reçus par les créanciers sont de faibles montants, les coûts
d’administration excessifs du fait des honoraires exorbitants des syndics et de la durée des
procédures trop longue.
Pour y remédier le législateur OHADA a procédé à une révision des textes en s’inspirant des
bonnes pratiques juridiques internationales en la matière et en s’appuyant sur l’analyse
économique du droit. Il en résulte qu’une législation efficace en matière de procédures
collectives doit satisfaire à trois exigences principales, conformément à l’analyse économique
du droit :
- 1°/ Réhabiliter les entreprises viables et liquider rapidement les entités non viables;
- 2°/ Maximiser les montants recouvrés par les créanciers, sur la base de la valeur du
marché du patrimoine de l’entreprise débitrice;
- 3°/ Établir un ordre précis de paiement des créances garanties et non garanties.
Ce sont ces préoccupations qui sont prises en charge à travers la nouvelle législation dont
l’étude à travers ce cours s’articulera autour de ces idées avec le plan suivant :

Première partie : La prévention de la cessation des paiements

Chap 1 : La procédure d’alerte


Chap 2 : La conciliation
Chap 3 : Le règlement préventif

Seconde partie : Le traitement des difficultés constitutives d’une cessation des paiements

10
L’AUPC a été révisé à Grand Bassam, le 10 septembre 2015. Il est entré en vigueur le 24 décembre 2015.

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Titre 1 : Condition d’ouverture du R.J et de L.B


Titre 2 : Les effets du jugement déclaratif
Titre 3 : La période préparatoire à la solution du R.J ou L.B
Titre 4 : Les solutions du R.J et de la L.B.
Titre 5 : Les mesures extrapatrimoniales.

REFERENCES DE LECTURE
1. ASSI ESSO (Anne-Marie), ISSA SAYEGH (Joseph), LOHOUES-OBLE
(Jacqueline) ; CIMA : droit des assurances ; Juriscope, Bruyllant, Bruxelles, 2002, 506
pages.
2. DJOGBENOU (Joseph) ; La compétence du juge des référés en matière de résiliation
du bail commercial ; Revue Droit et Lois ; n° 3, pages 22 à 28.
3. GUYON (Yves), droit des affaires, tome 1, droit commercial général et sociétés ;
Economica, 12ème éd., 2003, 1059 pages.
4. GUYON (Yves), droit des affaires Tome 2, Entreprises en difficultés, redressement
judiciaire – faillite ; Economica, 9ème éd., 2003, 484 pages.
5. MERLE (Phillipe) ; Droit commercial, sociétés commerciales ; Dalloz, 6ème éd. Paris,
1998, 843 pages.
6. NZOUABETH (Dieunedort), La responsabilité des tiers en cas d’ouverture d’une
procédure collective d’apurement du passif dans l’espace OHADA, Revue des
procédures collectives, n° 4, pages 192 et s.
7. PEROCHON (Françoise), BONHOMME (Régine) ; Entreprises en difficulté,
instruments de crédit et de paiement ; L.G.D.J., 6ème éd., Paris, 884 pages.

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8. PEYRAMAURE (Philipe), SARDET (Pierre) ; L’entreprise en difficulté : prévention,


restructuration, redressement, 3ème éd. Delmas, Toulouse, 2002, 294 pages.
9. POUGOUE (Paul-Gérard) (sous la direction de), Ohada : Sociétés Commerciales et
GIE ; Juriscope, Bruyllant, Bruxelles 2002, 589 pages.
10. RIPERT (Georges), ROBLOT (René), sous la direction de DELEBECQUE (Philipe),
GERMAIN (Michel) ; Traité de droit commercial, Tome 2, L.G.D.J., 16ème éd. 2000
Paris, 1256 pages.
11. RIPERT (Georges), ROBLOT (René), sous la direction de GERMAIN (Michel) ;
Traité de droit commercial, Tome 1 volume 2, L.G.D.J., 16ème éd. Paris 2002, 760 pages.
12. SAINT-ALARY-HOUIN (Corinne), Droit des entreprises en difficulté, 9ème éd.,
L.G.D.J, Domat, paris, 2014, 1006 pages.
13. SANTOS (Akuété Pedro), YADO TOE (Jean) ; Ohada : Droit commercial général,
Juriscope, Bruyllant, Bruxelles, 2002, 478 pages.
14. SAWADOGO (Filiga Michel) ; Ohada : Droit des entreprises en difficulté ; Juriscope,
Bruyllant, Bruxelles, 2002, 444 pages.

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DROIT DES PROCEDURES COLLECTIVES

Première partie : LA PREVENTION DE LA CESSATION DES PAIEMENTS


Sauf cas exceptionnel, les difficultés de l’entreprise procèdent de signaux dont l’examen et le
traitement permettent de prévenir les pathologies plus graves. C’est la comptabilité qui n’est
peut-être pas tenue ou qui l’est insuffisamment. Les échéances méconnues pourront ne pas être
alors honorées. Le personnel est pléthorique et inadapté parce que recruté avec complaisance.
Les rémunérations et les avantages salariaux sont excessifs. Le patrimoine de la société est
confondu avec ceux des dirigeants sociaux ; l’incapacité ou l’incompétence des dirigeants
sociaux, l’insuffisance de fonds propres, le mauvais fonctionnement des organes sociaux voire
leur inexistence de fait, etc sont autant de causes des difficultés des entreprises.
La plupart de ces dérèglements peuvent être traités au plan interne. Ainsi, les associés ou les
actionnaires ont un rôle important mais limité dans la prévention des difficultés de l’entreprise.
Les mesures préventives sont destinées à détecter très rapidement les signes annonciateurs des
difficultés afin d’éviter l’évolution vers une situation irrémédiablement compromise. Elles sont de
plusieurs ordres et ne se trouvent pas toutes dans l’Acte uniforme portant organisation des
procédures collectives ; certaines de ces mesures ont leur siège dans l’Acte uniforme relatif au
droit des sociétés commerciales et du groupement d’intérêt économique ainsi que dans l’Acte
uniforme portant sur le droit comptable et l’information financière.
En effet, les associés versent fréquemment des sommes en compte-courant afin d’améliorer la
trésorerie de l’entreprise ou souscrivent à une augmentation du capital pour accroître ses fonds
propres ou ont recours à des techniques financières comme la défaisance11. A titre individuel, les
associés peuvent renoncer à certains de leurs droits au sein de l’entreprise tels que l’abandon d’une
créance12, d’un dividende ou du solde d’un compte courant13.

11
V. M. ROUGER, « La défaisance, mode d’emploi », Jurissimo, été 1996, p. 7.
12
V. CE, 26 juin 1992, JCP, E 1992, pan. 1038 sur la validité d’un abandon de créance fait par une société-mère
à sa filiale.
13
V. G. RIPERT et R. ROBLOT, par M. GERMAIN et Ph. G. DELEBECQUE, Traité de droit commercial, t. 1,
18ème éd., n° 708, sur les comptes courants d’associés.

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Les salariés ne sont pas du reste dans la mesure où ils renoncent parfois à une partie de leurs
revenus afin d’alléger les charges salariales et sauver leur emploi.
Le passage de la logique de sanction à celle de protection de l’entreprise a permis au législateur
d’agir sur le plan comptable en perfectionnant l’information comptable. En effet, la comptabilité
a pour fonction de faire apparaître la situation financière et patrimoniale de l’entreprise d’où le
renforcement de l’information rétrospective à travers l’extension du domaine des entreprises
assujetties à la comptabilité et l’exigence d’information complémentaire afin d’apprécier le crédit
de l’entreprise14. Au surplus, le recours à l’information prévisionnelle permet d’anticiper
l’évolution de la situation de l’entreprise et éviter au besoin toute difficulté à l’entreprise15.
Ces mécanismes, qu’ils soient externes ou internes à l’entreprise relèvent, en principe du droit
commun des sociétés ou du crédit.
Dans la réforme de septembre 2015 le législateur OHADA a élargi les mesures préventives de la
cessation des paiements en prévoyant une possibilité pour les entreprises en difficulté de recourir
aux procédures de conciliation, de règlement préventif ou même de médiation16.
Toutefois, les mesures préventives de la cessation des paiements ne soient pas toutes consacrées
par l’AUPC/AP. On les retrouve également dans l’acte uniforme relatif au droit des sociétés
commerciales et dans celui relatif au droit des sociétés coopératives. Il s’agit des procédures
d’alerte.

14
V. AUOHCE, Art. 74.
15
V. AUOHCE, Art. 71.
16
Cette procédure de médiation n’est toutefois pas règlement dans l’AUPC/AP
10
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Chapitre I : LES PROCEDURES D’ALERTE


Elles sont prévues par l’AUDSC-GIE17 et par l’AUDSCOO18 et ne concernent que les entreprises
constituées sous forme de société commerciale ou coopérative. Il faut examiner les différentes
procédures prévues avant d’étudier leurs régimes.
Section 1 : Les différentes procédures prévues
Il y a deux types d’alerte :
- l'alerte déclenchée par le Commissaire aux comptes, le conseil de surveillance ou la
commission de surveillance, selon le type de société coopérative concernée (article 119
AUDSCOO) ;
- l’alerte déclenchée par les associés.
En France, d'autres personnes peuvent déclencher l’alerte, par exemple les comités d'entreprises,
les institutions représentatives du personnel.
Le Président du Tribunal peut lui aussi se saisir lui-même pour convoquer le dirigeant de
l'entreprise.
Section 2 : Le déroulement des procédures d'alerte
Paragraphe 1 : L'alerte déclenchée par le Commissaire aux comptes
L’Acte uniforme relatif au droit des sociétés commerciales distingue selon qu'il s'agit d'une Société
par actions ou d’une société d’un autre type. Cela s’explique probablement parce que dans les
sociétés par actions, tout au moins celles qui comportent un conseil d’administration, il y a trois
niveaux de prise de décision : organe de direction ou de représentation (Président Directeur
Général ou Président du conseil d’administration, Président et Directeur Général), organe
d’administration (conseil d’administration) et assemblées d’actionnaires, alors que dans les autres
types de société il n’y a que deux niveaux : gérant et assemblée d’associés ; pour cette raison

17
V. AUDSC-GIE, Art. 150 à 158-1.
18
V. AUDSCOO, Art. 119.

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d’ailleurs, nous estimons que la société anonyme avec administrateur général ainsi que la société
par actions simplifiée devrait être soumise au même régime que les sociétés d’un autre type.
A. Dans les sociétés par actions : sociétés anonymes (S.A.) et les sociétés par actions
simplifiées (S.A.S)
Si le Commissaire découvre, lors de l’examen des documents qui lui sont communiqués ou à
l’occasion de l’exercice de sa mission, l’existence d’un fait qui est de nature à compromettre la
continuation des activités de l’exploitation, il demande des explications, selon le cas, soit au
Président du Conseil d’administration ou au Président Directeur Général ou encore au Président,
soit à l'Administrateur général. Le dirigeant qui reçoit cette demande doit répondre dans un délai
de quinze (15) jours. Deux situations peuvent alors être envisagées :
• Soit le dirigeant destinataire répond ; dans ce cas il donne une analyse de la situation et
indique, le cas échéant, les mesures qui sont envisagées ;
• Soit il ne répond pas dans le délai ou s’il donne une réponse non satisfaisante, le problème
est déplacé vers un autre organe ; en effet le Commissaire aux comptes invite, selon le cas, le
Président, le Président Directeur Général ou le Président du conseil d’administration à faire
délibérer le conseil ; s’il s’agit d’une société anonyme avec administrateur général, il invite
l’administrateur à se prononcer.
Là aussi deux cas de figure peuvent se présenter :
1. soit le dirigeant convoque le Conseil d’administration dans les quinze jours ; dans ce cas, le
Commissaire aux comptes est convoqué à la délibération ; s'il s'agit d'un Administrateur Général
qui décide de se prononcer, le Commissaire aux comptes est convoqué pour assister à la séance au
cours de laquelle l'Administrateur va se prononcer sur les faits relevés ;
2. soit le dirigeant ne convoque pas le conseil ou l'Administrateur Général ne se prononce pas ;
le Commissaire aux comptes établit un rapport qui va être présenté à la prochaine assemblée ou
en cas d’urgence à une assemblée qu’il convoque ; la même solution est retenue lorsque, malgré
les décisions prises le commissaire aux comptes constate que la continuité de l’exploitation reste
compromise.
B. Dans les sociétés d'un autre type (SARL, SNC, SCS, SCOO)
Si, dans les sociétés d’un autre type, le Commissaire aux comptes découvre l’existence des faits
de nature à compromettre la continuité de l’exploitation, il demande les explications au gérant qui
est tenu de répondre dans un délai de quinze (15) jours. Deux situations peuvent se présenter:
Ø soit le gérant décide de répondre ; dans ce cas il donne une analyse de la situation et précise,
le cas échéant, les mesures envisagées ; si la réponse est satisfaisante, la procédure s'arrête ;

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Ø soit il ne répond pas ; dans ce cas, le Commissaire aux comptes établit un rapport ; il peut
demander la présentation de ce rapport à la prochaine assemblée ou sa communication aux
associés ; il en est de même lorsque, malgré les mesures prises, le commissaire aux comptes
constate que la continuité de l’exploitation reste compromise.
Dans les sociétés coopératives, l’article 119 AUDSCOO reconnaît au conseil de surveillance (pour
les sociétés coopératives avec conseil d’administration) ou à la commission de surveillance (pour
les sociétés coopératives simplifiées) la possibilité de demander par écrit ou oralement des
explications au comité de gestion (pour les sociétés coopératives simplifiées) ou au conseil
d’administration (pour les sociétés coopératives avec conseil d’administration) sur des faits de
nature à compromettre la continuité de la société coopérative qu’il a relevé à l’occasion de
l’exercice de sa mission. L’organe interpellé doit, au cours d’une réunion spéciale, répondre dans
le mois qui suit la réception de la demande d’explication. Il doit donner une analyse de la situation
et préciser, le cas échéant, les mesures envisagées. En l’absence de réponse ou en cas de
propositions peu satisfaisantes le conseil ou la commission de surveillance établit un rapport
spécial qu’il soumet à la plus proche assemblée générale ou en cas d’urgence une réunion spéciale
est convoquée à cet effet.
Paragraphe 2 : L'alerte déclenchée par les associés
Là aussi, on distingue les sociétés par actions et les sociétés d’un autre type.
A. Dans les sociétés par actions
Chaque actionnaire ou associé a la possibilité de poser des questions sur tout fait de nature à
compromettre la continuité de l'exploitation. L'actionnaire ou l’associé ne peut poser les questions
que deux fois par exercice. Le destinataire de la question est, selon le cas, soit le Président
Directeur Général, soit le Président du conseil d’administration, soit l’Administrateur Général ou
le Président.
Lorsque le dirigeant reçoit la question, il a quinze (15) jours pour répondre par écrit, et dans le
même délai il transmet une copie de la question et de la réponse au Commissaire aux comptes.
Aucune sanction spécifique n’est prévue lorsque le dirigeant ne répond pas.
B. Dans les autres sociétés
Dans ces sociétés aussi le législateur OHADA a consacré le droit, pour chaque associé, de poser
au gérant des questions sur tout fait de nature à compromettre la continuité de l’exploitation. La
périodicité est là aussi de deux fois par exercice. Le gérant est tenu, lorsque la question lui est
adressée, de répondre dans le délai de quinze (15) jours et de communiquer une copie de la question
et de la réponse au commissaire aux comptes.

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Il convient d’observer qu’il n’y a pas toujours de commissaire aux comptes dans ce type de
société ; c’est ce qui explique que ce type de mesures préventives est d’une efficacité douteuse ;
ceci est d’autant plus vrai que l’on ne peut pas les envisager lorsqu’il s’agit de commerçant
personne physique. On comprend dans ces conditions, l’importance des mesures préventives
prévues par l’Acte uniforme portant organisation des procédures collectives d’apurement du passif
qui peuvent être mises en œuvre aussi bien lorsqu’il s’agit de personne physique que de personne
morale.

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CHAPITRE 2 : LA PROCEDURE DE CONCILIATION


C’est une des innovations du législateur OHADA de 2015 dont la finalité est de permettre un
sauvetage de l’entreprise en difficulté en dehors de toute décision de justice, de manière rapide et
confidentielle. Autrement dit, elle vise à trouver un accord amiable avec les principaux créanciers
du débiteur, en vue de mettre fin à ses difficultés19.
Cette procédure20 consiste pour le chef d’entreprise à saisir le président de la juridiction
compétente en matière de procédure collective aux fins de désignation d’un conciliateur dont la
mission sera de rapprocher le débiteur de ses créanciers et de parvenir à un accord selon lequel en
contrepartie des sacrifices financiers consentis par ces derniers, le débiteur s’oblige à prendre des
mesures de redressement. Le traitement des difficultés est donc contractuel21, discret, facultatif et
simple. L’accord amiable qui en résulte est une convention de droit privé, à titre onéreux, un acte
collectif, marqué par l’intuitu personae22.
L’accord amiable résultant de la conciliation est donc une technique privée de traitement préventif
des difficultés de l’entreprise.
La procédure de conciliation est organisée par les articles 5-1 à 5-14 AUPC/ AP qui décrivent la
procédure devant le président de la juridiction compétente en matière de procédure collective.
Cette procédure se veut souple et attractive aussi bien pour le débiteur que pour les créanciers.
Le législateur OHADA précise les conditions d’ouverture de la conciliation (section 1) et organise
ses effets (section 2).
Section 1 : L’ouverture de la conciliation
Aux termes des articles 5-1 et 1-1 AUPC, la conciliation est ouverte à toute personne physique
exerçant une activité professionnelle indépendante, civile, commerciale, artisanale ou agricole, à
toute personne morale de droit privé ainsi qu’à toute entreprise publique ayant la forme d’une
personne morale de droit privé qui connaît des difficultés avérées ou prévisibles mais qui ne sont
pas encore en état de cessation des paiements.
C’est une procédure au domaine très large (Parag. 1) et au mécanisme d’élaboration bien précis
(Parag. 2).

19
V. AUPC, Art. 5-1, al. 2.
20
La conciliation est certainement une procédure mais qu’il est difficile de qualifier de collective.
21
V. F. MACORIG-VENIER, « Du règlement amiable à la conciliation », Rev. Proc. Coll. 2006, p. 352 ; Th.
MONTERAN, « Présentation de la prévention et de la procédure de conciliation », Gaz. Pal. Sept. 2005, p. 8 ; C.
SCHMITT, « la conciliation, aspects pratiques », Rev. Proc. Coll. 2006, p. 178 ; C. SAINT-ALARY-HOUIN, « La
procédure de conciliation », Rev. Proc. Coll. 2006, p. 169.
22
V. C. SAINT-ALARY-HOUIN, Droit des entreprises en difficultés, 8ème éd., LGDJ, Domat, n° 314 et s.

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Parag. 1 : Le domaine de la procédure de conciliation


Il s’agit des conditions de fond d’ouverture de la conciliation. Elles tiennent à la personne et à la
situation économique et financière. Pour définir le domaine d’application de la conciliation,
l’article 5-1 fait référence à l’article 1-1 AUPC qui précise les bénéficiaires (A) qui doivent
éprouver une difficulté avérée ou prévisible mais sans être en état de cessation des paiements (B)
et implicitement doivent être susceptibles d’être sauvés (C).
A. Les personnes bénéficiaires de la conciliation
A la lecture des textes, on note une diversité des personnes susceptibles de bénéficier d’un accord
amiable. En effet, l’article 5-1 AUPC renvoyant à l’article 1-1 AUPC donne accès à la procédure
de conciliation devant le président de la juridiction compétente en matière de procédure collective
à tout débiteur « personne physique exerçant une activité professionnelle indépendante, civile,
commerciale, artisanale ou agricole, à toute personne morale de droit privé ainsi qu’à toute
entreprise publique ayant la forme d’une personne morale de droit privé ». La formule est donc
très large et elle présente même une certaine redondance. Une fois visé l’exercice d’une activité
professionnelle indépendante, il n’était a priori pas nécessaire d’ajouter « civile, commerciale,
artisanale, ou agricole». Cette précision présente toutefois l’avantage de lever toute ambiguïté sur
le champ d’application de l’AUPC révisé et s’inscrit dans la vocation pédagogique du texte; c’est
particulièrement vrai pour les professions civiles dont l’entrée dans le champ de la commercialité
a toujours été discutée.
Conformément à l’article 1-1 de l’AUPC, il s’agit des personnes exerçant une activité
professionnelle indépendante civile, commerciale, artisanale ou agricole. Il n’est pas tenu compte
de la taille des entreprises. L’essentiel est qu’elles soient structurées ou qu’elles puissent justifier
de la réalité de leur activité. Étant une mesure de faveur mise à la disposition des professionnels
pour leur permettre de redresser leurs entreprises en difficulté, on doit considérer que seuls les
professionnels exerçant régulièrement leur activité en ayant respecté toutes les règles inhérentes à
leur statut, peuvent recourir à cette procédure préventive.

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Relevons que le législateur ne vise pas les commerçants mais les personnes exerçant une activité
commerciale, ce dont il résulte que ce n’est plus la qualité qui prévaut mais l’exercice de l’activité.
Par ailleurs, le champ d’application de l’AUPC n’est donc plus limité aux commerçants puisque
sont désormais concernées les activités civiles, artisanales et agricoles. Le droit des procédures
collectives dans l’espace OHADA s’applique désormais à tout le secteur « économique »23. Les
avocats, médecins, architectes, etc., mais aussi les artisans et les agriculteurs sont concernés.
En évoquant une activité indépendante, le texte exclut bien sûr tous les salariés et plus
généralement toute personne qui exercerait une activité dans le cadre de laquelle elle est soumise
à un lien de subordination24. Il reviendra aux juges du fond de vérifier qu’il s’agit bien d’une
activité exercée à titre « professionnel», et non d’un acte isolé. A titre d’exemple, le simple statut
d’entreprenant ne saurait suffire, il est nécessaire de démontrer une activité effective s’inscrivant
dans la durée. Cette démonstration doit être très rigoureuse puisque le droit des procédures
collectives est désormais favorable au débiteur, quelle que soit la procédure appliquée, y compris
la liquidation des biens.
Par conséquent, peu importe la forme de l’entreprise concernée, entreprises individuelles25,
sociétés commerciales ou civiles, associations, groupement d’intérêt économique et sociétés
coopératives.
Peu importe la taille des entreprises dans la mesure où la loi n’a pas prévu de seuil particulier pour
accéder à la procédure de conciliation.
B. Les difficultés rencontrées
La procédure de conciliation suppose que la personne qui en demande le bénéfice « connaisse des
difficultés avérées ou prévisibles », mais ne se trouve « pas encore en état de cessation des
paiements »26.
La conciliation est ouverte à des personnes qui rencontrent des difficultés avérées ou prévisibles.
Ces difficultés peuvent être d’ordre économique, financier ou même juridique. Les difficultés
financières peuvent être liées aux retards de paiement, à l’absence de trésorerie. Sur le plan

23
Le terme étant entendu dans un sens large.
24
La question ne devrait toutefois pas soulever de difficulté.
25
L’article 5-2-1° AUPC exige que le demandeur qui exerce une profession libérale réglementée précise l’ordre
professionnel dont il relève.
26
V. AUPC, Art. 5-1.

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économique, ces difficultés peuvent tenir, notamment, à la nature des marchandises achetées ou
livrées ou aux délais de livraison. Elles peuvent aussi être d’ordre juridique et résulter, par
exemple, des modalités d’exécution ou de modification de certains contrats.
C. Les mesures de redressement
La conciliation n’est envisageable que si la personne qui en demande le bénéfice entend prendre
des mesures de redressement, ce qui suppose qu’elle ne se trouve pas dans une situation de
cessation des paiements. La mission du conciliateur étant de favoriser la conclusion d’un accord
amiable « destiné à mettre fin aux difficultés de l’entreprise »27, le débiteur doit pouvoir persuader
le président qu’avec un financement adapté, l’entreprise pourra être remise sur pieds et pourra
surmonter des difficultés qui demeureront simplement passagères. C’est pourquoi certains
documents sont exigés à l’appui de la demande28 afin d’obtenir la désignation d’un conciliateur. Il
est indispensable que le débiteur présente lui-même les moyens de faire face aux difficultés
rencontrées29 par son entreprise, afin d’effectuer, en tout ou partie, sa restructuration financière ou
opérationnelle pour la sauvegarder. Cette restructuration s’effectue par le biais de négociations
privées et de la conclusion d’un accord de conciliation négocié entre le débiteur et ses créanciers
ou, au moins, ses principaux créanciers, grâce à l’appui d’un tiers neutre, impartial et indépendant,
dit « conciliateur»
Le conciliateur désigné par le tribunal aura pour mission de favoriser la conclusion d’un accord
amiable entre le débiteur et ses principaux créanciers, destiné à mettre fin aux difficultés de
l’entreprise30.
Parag. 2 : La mise en œuvre de la procédure de conciliation
L’AUPC prévoit des règles de forme assez libérales pour la procédure de conciliation qui doit
intervenir avant la cessation des paiements. La désignation du conciliateur est subordonnée à la
communication de certains documents au président du tribunal (A) devant favoriser la conclusion
d’un accord (B).
A. La saisine du président du tribunal
L’ouverture de la procédure de conciliation exige une initiative du débiteur seul ou conjointement
avec un ou plusieurs créanciers31. Ce qui veut dire que le débiteur n’a pas le monopole de

27
V. AUPC, Art. 5-5, al. 1.
28
V. AUPC, Art. 5-2, al. 2.
29
V. AUPC, Art. 5-2, al. 1 in fine.
30
V. AUPC, Art. 5-5, al. 1.
31
V. AUPC, Art., 5-2, al. 1.

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l’initiative. La demande doit être formulée par voie de requête, donc par écrit32. Elle doit être
accompagnée d’un certain nombre de documents signés et certifiés conformes et sincères par le
requérant et datant de moins de trente (30) jours. Dans le cas où l'un des documents ci-dessus
exigés ne peut être fourni, ou ne peut l'être qu'incomplètement, la requête doit contenir l'indication
des motifs de cet empêchement.
Il s’agit des documents suivants :
1°) une attestation d'immatriculation, d'inscription ou de déclaration d'activité à un registre ou à
un ordre professionnel ou, à défaut, tout autre document de nature à prouver la réalité de l'activité
exercée par le débiteur ;
2°) le cas échéant, les états financiers de synthèse comprenant le bilan, le compte de résultat, un
tableau financier des ressources et des emplois, l'état annexé et, en tout état de cause, le montant
du chiffre d'affaires et des bénéfices ou des pertes des trois derniers exercices ;
3°) un état de la trésorerie et un état chiffré des créances et des dettes avec indication des dates
d'échéance ;
4°) un document indiquant le nombre de travailleurs déclarés et immatriculés, à la date de la
demande ;
5°) une attestation émanant du débiteur par laquelle il déclare sur l'honneur ne pas être en état de
cessation de paiements et précise, en outre, qu'il n'est pas soumis à une procédure de règlement
préventif, de redressement judiciaire ou de liquidation des biens qui ne serait pas clôturée ;
6°) si le débiteur propose un conciliateur, un document indiquant les noms, prénoms, qualités et
domicile de la personne proposée et une attestation de cette dernière indiquant ses compétences
professionnelles ;
7°) le cas échéant, un document indiquant les noms, prénoms et domicile des créanciers qui se
joignent à la demande du débiteur et le montant de leurs créances et des éventuelles sûretés dont
elles sont assorties.
La requête est adressée au président du tribunal compétent en matière de procédure collective du
lieu du siège social ou du principal établissement du débiteur.
Dès sa réception, le président instruit la demande et fait convoquer, par le greffier, le débiteur pour
une audience à huis clos au cours de laquelle il prend la décision de désigner ou non un
conciliateur.

32
Certainement que cette demande sera assortie du paiement d’une somme d’argent au titre de frais de procédure.

19
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Avant de prendre sa décision, le président du tribunal, pour apprécier la situation du débiteur, ne


peut se renseigner sur la situation économique du débiteur qu’à travers les éléments figurant dans
la requête.
B. La désignation du conciliateur
Aux termes de l’article 5-3 AUPC, le président de la juridiction compétente peut désigner un
conciliateur pour une durée n’excédant pas trois (03) mois, mais qu’il peut par décision motivée,
proroger d’un mois au plus à la demande du débiteur, après avis écrit du conciliateur. A l’expiration
de ces délais, la conciliation prend fin de plein droit et il ne peut être ouvert une nouvelle procédure
de conciliation avant expiration d’un délai de trois (03) mois.
La décision ouvrant ou rejetant la conciliation n’est pas publiée afin de préserver le caractère
confidentiel qui constitue un sérieux avantage pour le débiteur.
La décision du président intervenant en l’absence de litige, la démarche est gracieuse par
conséquent, le président qui est saisi par une requête ouvre la procédure de conciliation par une
ordonnance sur requête à travers laquelle le conciliateur est désigné.
Cependant, le président de la juridiction n’est pas totalement libre du choix de la personne du
conciliateur, car le débiteur peut lui en proposer un33/34.
Le profil du conciliateur n’est pas défini avec précision. Néanmoins, il résulte de l’article 5-4
AUPC que le conciliateur doit avoir le plein exercice de ses droits civils, justifier de sa compétence
professionnelle et demeurer indépendant et impartial vis-à-vis des parties concernées par la
conciliation.
Le conciliateur qui accepte sa mission doit porter cette acceptation à la connaissance du président
de la juridiction compétente, sans délai. S’il suppose en sa personne une cause de récusation, il
doit en informer le président de la juridiction et ne peut accepter sa mission qu’avec l’accord
unanime et écrit des parties concernées par la conciliation. Aucun parent ou allié du débiteur
jusqu’au quatrième degré inclus ne peut être désigné. Il en va de même pour tout magistrat en
fonction ou ayant quitté ses fonctions depuis moins de cinq ans.
Les modalités de rémunération du conciliateur sont déterminées par le président de la juridiction
compétente avec l’accord du débiteur au jour de l’ouverture de la conciliation. Les critères sur la
base desquels elle est arrêtée, son montant maximal et le montant des provisions sont précisés dans

33
V. AUPC, Art., 5-2- 6ème.
34
Cette possibilité offerte au débiteur de proposer un conciliateur est un facteur de réussite de cette procédure. V.
M.-H. MONSERIE-BON, Rép. Com. Dalloz, Entreprises en difficulté, V° Mandat ad hoc et conciliation, 2012, n°
66.

20
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un document signé par le débiteur et le conciliateur et annexé à la décision d’ouverture. Si, au


cours de sa mission, le conciliateur estime que le montant initialement déterminé est dépassé, il
doit en informer sans délai le président de la juridiction qui fixe de nouvelles conditions avec
l’accord du débiteur. À défaut d’accord, il est mis fin à la mission du conciliateur. La rémunération
du conciliateur est à la charge du débiteur et fait l’objet d’une ordonnance de taxe35. Cette
réglementation de la rémunération du conciliateur, sauf son caractère contractuel, paraît assez
confuse et de mise en œuvre difficile. Si l’on ne peut pas être plus précis, il serait peut-être
préférable de se limiter à indiquer qu’elle est convenue entre les parties tant dans son montant que
dans ses modalités de paiement.
Le conciliateur peut obtenir du débiteur tous renseignements utiles à la réalisation de sa mission36.
Il n’est pas une partie à la procédure. Il n’exerce aucune fonction d’assistance ou de représentation
du débiteur, mais sa mission est importante et consiste à « favoriser la conclusion, entre le débiteur
et ses principaux créanciers ainsi que, le cas échéant, ses contractants habituels, d’un accord
amiable destiné à mettre fin aux difficultés de l’entreprise »37.
Le conciliateur rend compte de sa mission au président de la juridiction compétente. Il informe
celui-ci immédiatement de l’éventuelle survenance de la cessation des paiements afin qu’il mette
fin à la conciliation sans délai. Le président doit y mettre fin dès qu’il apprend que le débiteur est
en cessation des paiements, quelles que soient ses sources d’information : ministère public,
créancier, débiteur, etc. Il est également mis fin à la conciliation et à la mission du conciliateur sur
rapport écrit de ce dernier adressé, sans délai, au président en cas d’impossibilité de parvenir à un
accord38.
En principe, la participation à la conciliation n’emporte pas de restriction aux droits des créanciers.
Toutefois, si le débiteur est mis en demeure ou poursuivi par un créancier appelé à la conciliation
pendant la période de recherche de l’accord, le président du tribunal peut, à la demande du débiteur,
et après avis du conciliateur, reporter le paiement des sommes dues et ordonner la suspension des
poursuites engagées par ce créancier qui négocierait de mauvaise foi39.
Section 2 : L’élaboration de l’accord et ses conséquences

35
V. AUPC, Art., 5-4, al. 4.
36
V. AUPC, Art., 5-5, al. 2.
37
V. AUPC, Art., 5-5, al. 1.
38
V. AUPC, Art., 5-8.
39
V. AUPC, Art., 5-7.

21
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L’ouverture d’une procédure de conciliation, tant qu’elle est en cours, fait obstacle à l’ouverture
d’une procédure judiciaire40.
L’ouverture d’une conciliation tend à obtenir un accord amiable entre le débiteur et ses créanciers.
Cet accord s’analyse en un accord collectif entre le débiteur et ses créanciers.
Le débiteur ne parviendra à la conclusion d’un accord de conciliation que s’il présente un plan
solide pour mettre fin à ses difficultés.
L’accord amiable ne concerne pas nécessairement tous les créanciers ; l’accord peut simplement
réunir les principaux créanciers ainsi que si le conciliateur l’estime utile ses contractants
habituels41. La détermination de ceux-ci dépendra, à l’évidence, de l’activité et du secteur
économique dans lequel évolue le débiteur. Rien n’empêcherait aussi des salariés de participer à
l’accord en renonçant, par exemple, à une partie de leur rémunération ou à des avantages acquis.
L’accord de conciliation oblige les parties à l’accord et ne produit pas d’effet à l’égard des tiers
(parag. 1). Son inexécution produit également des effets (parag. 2)

P1 La formalisation de l’accord
L’accord de conciliation peut être simplement passé par écrit. Il produit alors simplement les effets
d’un contrat42. La constatation dans un écrit permet de s’en ménager une preuve.
La forme et la force de l’accord sont traitées par l’article 5-10 AUPC qui prévoit la possibilité que
l’accord signé puisse, à la requête de la partie la plus diligente, être déposé au rang des minutes
d’un notaire ou être homologué ou exequaturé par la juridiction compétente statuant à huis clos.
L’homologation ou l’exequatur est de droit et ne peut être refusée que si l’accord est contraire à
l’ordre public. Le président fait apposer la formule exécutoire par le greffe. Des copies valant titre
exécutoire peuvent être délivrées aux parties à l’accord. La décision d’homologation ne fait l’objet
d’aucune publicité et ne reprend pas le contenu de l’accord qui reste confidentiel. Mais pour ne
pas avoir des privilèges occultes préjudiciables aux créanciers, la publicité est prévue si le privilège
de « l’argent frais » ou «new money» institué à l’article 5-11 AUPC a été accordé aux personnes
qui ont consenti dans l’accord un nouvel apport en trésorerie ou un nouveau bien ou service au
débiteur en vue d’assurer la poursuite de l’activité de l’entreprise débitrice et sa pérennité. Les
articles 166 et 167 AUPC leur accordent le premier rang en matière de paiement.

40
V. AUPC, Art., 5-12.
41
V. AUPC, Art. 5-5.
42
V. Cass. 2ème civ., 27 sept. 2012, n° 11-23285 : il y a été jugé qu’un procès-verbal de règlement amiable qui « ne
constate aucune obligation ni ne prononce aucune condamnation » n’est pas un titre exécutoire.

22
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La décision homologuant l’accord n’est pas susceptible de recours. Elle met fin à la conciliation.
Le cas échéant, la conciliation prend fin par la signature de l’accord et, en tout état de cause, à
l’expiration des délais prévus par l’alinéa 1er de l’article 5-3 AUPC.

Parag. 2 : L’effet relatif et obligatoire de l’accord de conciliation


L’accord amiable ne produit ses effets qu’à l’égard de ses seuls signataires.
La conclusion de l’accord de conciliation engage les parties signataires dans les termes de ce qui
a été conclu. Les créanciers renoncent à exercer des poursuites en recouvrement des créances
portées dans l’accord. L’article 5-12 AUPC énonce en effet, que « Pendant la durée de son
exécution, l'accord interrompt ou interdit toute action en justice et arrête ou interdit toute
poursuite individuelle, tant sur les meubles que les immeubles du débiteur, dans le but d'obtenir
le paiement des créances qui en font l'objet ».
En d’autres termes, la situation des créanciers, parties à l’accord, est gelée : ils s’interdisent de
poursuivre le débiteur en paiement. En contrepartie, l’article 5-12 AUPC prévoit que « les délais
impartis aux créanciers parties à l'accord à peine de déchéance ou de résolution des droits
afférents aux créances mentionnées par l'accord » sont interrompus, pour la même durée
d’exécution de l’accord.
Peu importe l’objet des poursuites envisagées et, notamment, qu’elles portent sur les meubles ou
sur les immeubles du débiteur. Mais l’article 5-12 AUPC n’arrête expressément que les actions en
paiement des créances qui font l’objet de l’accord. Cette réserve exclut, tout d’abord, les actions
qui poursuivent un but autre que le paiement d’une somme d’argent, actions en résolution, en
nullité, en rescision, en revendication, en garantie de vices cachées. Elle écarte ensuite les créances
qui ne rentrent pas dans l’accord, soit que le créancier n’y soit pas partie, soit que tout en ayant
signé l’accord de conciliation, il ait limité son sacrifice à certaines créances43.Pour celles qui
demeurent en dehors, le créancier conserve son droit de poursuite individuelle. Enfin, le législateur
ne semble pas interdire au créancier dont la créance est incertaine d’agir en justice pour connaître
l’existence ou en fixer le montant.
En contrepartie du répit que lui donnent ses créanciers, le débiteur doit exécuter tous les
engagements qu’il a souscrits dans l’accord de conciliation.
Comme tout contrat, l’accord de conciliation doit être exécuté de bonne foi et les parties à l’accord
engageront leur responsabilité en cas d’inexécution ou de mauvaise exécution.

43
Cette faculté de limiter son effort à certaines créances est consacrée par la Cour de cassation française ; Cass.
com., 13 oct. 1988, Bull. civ, n° 235.

23
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L’accord de conciliation ne produit aucun effet à l’égard des tiers qui n’y sont pas parties. Les
créanciers qui ne l’ont pas signé peuvent donc exercer des poursuites individuelles ou des voies
d’exécution et constituer ou réaliser des sûretés.
Ils ont également la faculté de déclencher la procédure de redressement judiciaire ou de liquidation
des biens en cas de cessation des paiements.
L’accord amiable a nécessairement une incidence sur la situation des garants. En effet, Les
personnes ayant consenti une sûreté personnelle ou ayant affecté ou cédé un bien en garantie et les
coobligés peuvent se prévaloir des clauses de l’accord44. La règle est générale et s’applique aux
personnes, physiques ou morales, aux codébiteurs solidaires, ou aux personnes ayant fourni une
sûreté personnelle (cautionnement simple ou solidaire, garantie autonome, lettre d’intention) ou
affecté ou cédé un bien en garantie (cautionnement réel, fiducie). Elle concerne tous les coobligés,
les cautions et les garants autonomes, personnes physiques ou morales.
Section. 3 : L’inexécution de la conciliation
Aux termes de l’article 5-8 AUPC, le débiteur peut « à tout moment, en l'absence de cessation des
paiements, demander à ce qu'il soit mis fin à la mission du conciliateur et à la conciliation, auquel
cas le président de la juridiction compétente y met fin sans délai. » Pareillement, le conciliateur
peut saisir par écrit le président du tribunal s’il est persuadé de ne pas parvenir à la conclusion de
l’accord et le président met fin à sa mission et à la conciliation après avoir entendu le débiteur.
La décision mettant fin à la conciliation et à la mission du conciliateur en l'absence d'accord est
notifiée, sans délai, au débiteur, au conciliateur ainsi qu'aux créanciers et cocontractants appelés
à la conciliation, sans délai. Elle ne fait l'objet d'aucune publicité45.
Le législateur envisage deux situations pour mettre fin à un accord de conciliation non exécuté : la
résolution pour inexécution des engagements pris et la cessation de celui-ci en cas d’ouverture
d’une procédure collective.
La juridiction ou l'autorité compétente ayant connu de la conciliation est seule compétente pour
connaître de toute inexécution de l'accord et pour en prononcer la résolution. Elle est saisie par
l'une des parties à l'accord.
Si la résolution est prononcée, les créanciers recouvrent l'intégralité de leurs créances, déduction
faite des sommes perçues46. Il en est de même en cas d'ouverture d'une procédure de règlement

44
V. AUPC, Art., 5-12, al. 2.
45
V. AUPC, Art., 5-9.
46
V. AUPC, Art., 5-13.

24
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préventif, de redressement judiciaire ou de liquidation des biens qui met fin de plein droit à la
conciliation et, le cas échéant, à l'accord47.

47
V. AUPC, Art. 5-14.

25
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Chapitre 3 : LE REGLEMENT PREVENTIF

Il est défini par l'article 2, al. 2 AU/PC comme la « procédure collective préventive destinée à
éviter la cessation des paiements de l'entreprise débitrice et à permettre l'apurement de son passif
au moyen d'un concordat préventif ».
Cette mesure préventive est destinée à toutes les entreprises, quelle que soit leur forme juridique,
qui traversent une situation financière difficile mais non irrémédiablement compromise.
Selon la taille de l’entreprise, la procédure de règlement préventif peut être simplifiée. Ainsi, aux
termes des articles 1-3 et 24 AU/PC, toute entreprise individuelle, société ou autre personne morale
de droit privé dont le nombre de travailleurs est inférieur ou égal à vingt (20), et dont le chiffre
d’affaires n’excède pas cinquante millions (50 000 000) de francs CFA, hors taxes, au cours des
douze (12) mois précédant la saisine de la juridiction compétente peut bénéficier d’un règlement
préventif simplifié.
Le règlement préventif ne doit pas être confondu avec les procédures d’alerte interne. Il y a lieu
de dire qu’une procédure de règlement préventif peut être déclenchée sans au préalable déclencher
les procédures d’alerte et de conciliation et inversement. Et toute procédure d’alerte ou de
conciliation ne débouche pas nécessairement sur un règlement préventif.
Il existe dans l’espace OHADA, deux (02) sortes de règlement préventif, l’un dit complet ou
classique et l’autre dit simplifié. Cette dualité de règlement préventif apparaît aussi bien dans les
conditions de leur déclenchement que dans leur déroulement.
Section 1 : Les conditions d’accès au règlement préventif
Il y a des règles de fond et des règles de forme.
Paragraphe 1 : Les conditions de fond
Elles sont de deux ordres.
- Il y a en premier lieu les conditions liées à la qualité de l'intéressé ou les conditions liées aux
personnes qui peuvent demander le règlement préventif. L’article 1- 1 AU/PC vise :
Ø les personnes physiques exerçant une activité professionnelle indépendante, civile,
commerciale, artisanale ou agricole,
Ø les personnes morales de droit privé commerçantes ou non,
Ø les entreprises publiques ayant la forme d'une personne morale de droit privé.
Avec l’extension du champ d’application ratione personae des procédures collectives, on se rend
compte que ces dernières ont perdu leur caractère d’institution professionnelle, car elles
s’appliquent aussi bien aux civils qu’aux commerçants.

26
Animateur Pr. Moussa Gueye Agrégé de Droit privé

En ce qui concerne les commerçants, est-il nécessaire que leur immatriculation soit effectuée ? A
notre avis une réponse positive s’impose compte tenu des dispositions de l’article 60 AUDCG; il
résulte de ce texte que la personne qui exerce une activité commerciale et qui n’est pas
immatriculée est privée des droits des commerçants sans pouvoir invoquer le défaut
d’immatriculation pour échapper à leurs obligations ; or le bénéfice des mesures préventives doit
être analysé comme un droit des commerçants.
- Il y a en outre la condition liée à la situation économique de l'entreprise ; il faut que cette
situation soit sérieusement difficile mais sans être irrémédiablement compromise.

Ø Si la situation est saine, toute demande tendant à obtenir un règlement préventif devra être
considérée comme prématurée. La demande pourra ainsi être rejetée par le président de la
juridiction qui estime que le débiteur ne remplit pas toutes les conditions d’accès au règlement
préventif. Si malgré tout, la procédure a été ouverte, le Tribunal devra dans ce cas s’il est saisi par
le Président, considérer que la situation de l’intéressé ne relève d’aucune procédure collective et
annuler l’ordonnance de suspension des poursuites individuelles ;
Ø Si en revanche le débiteur est déjà en état de cessation des paiements, la demande devra
être considérée comme tardive. Le président du tribunal peut alors la rejeter. Le Tribunal sera tenu
de prononcer le redressement judiciaire ou la liquidation des biens en application de l’article 25
AU/PC.
Paragraphe 2 : Les conditions de forme
Pour bénéficier du règlement préventif, l’intéressé doit, seul ou conjointement avec un ou plusieurs
créanciers, prendre trois initiatives :
Il doit, aux termes de l’article 6, al. 2 AU/PC, introduire une requête adressée à la juridiction
compétente et déposée au greffe. Il doit aussi soumettre des offres concordataires. Les règles de
compétence sont fixées par les articles 3 et 3-1 à 3-2 AU/PC.
A. L’introduction de la requête
C’est l’article 3 qui est consacré à la compétence d’attribution ; il vise la juridiction compétente
en matière de procédures collectives. Ce texte doit nécessairement être combiné avec la loi
interne de chaque Etat-partie pour une détermination précise de la juridiction compétente
rationae materiae. Ceci est d’autant plus nécessaire que le législateur ne parle plus de
juridiction compétente en matière commerciale48.
L’article 3-1 consacré à la compétence territoriale invite à faire une distinction :

48
V. AUPC, Art. 3, al. 3.

27
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Si celui qui demande le redressement judiciaire est une personne physique, la juridiction sera la
juridiction du lieu où se trouve son principal établissement.
S'il s'agit d'une personne morale, ce sera la juridiction dans le ressort de laquelle celle-ci a son
siège social; si le siège social ou le principal établissement se trouve à l'étranger, la procédure se
déroulera devant la juridiction dans le ressort de laquelle se trouve le principal centre d'exploitation
du débiteur sur le territoire national.
La requête doit être adressée au tribunal lui-même et non au Président du tribunal. Cette requête
doit contenir une analyse de la situation financière ou économique de l'entreprise et une
présentation des perspectives de redressement ainsi d’apurement du passif.
S’il s’agit d’un règlement préventif simplifié, conjointement à la requête, le débiteur doit produire
une déclaration sur l’honneur attestant de ce qu’il remplit les conditions d’une petite entreprise.
Il est interdit de présenter une requête en ouverture d’un règlement préventif49 :
►si un concordat préventif ou de redressement est encore en cours d’exécution ;
►avant l’expiration d’un délai de trois (03) ans à compter de l’homologation d’un précédent
concordat préventif, ceci pour éviter le dilatoire ;
►avant l’expiration d’un délai de dix-huit (18) mois à compter de la fin d’un règlement préventif
n’ayant pas abouti à un concordat préventif.
B. Le dépôt d’un dossier
Il faut aussi le dépôt d'un dossier en même temps que la requête ; ce dossier doit comporter les
éléments visés par l’article 6-1 AU/PC. Ces documents doivent dater de moins de trente (30)
jours. Il s’agit en fait de documents permettant d’identifier le requérant et de se faire une idée de
la situation économique. Tous les documents doivent être datés, signés et certifiés conformes et
sincères par le requérant. Le défaut de production de certains documents jugés impératifs par le
législateur, rend la requête irrecevable de plein droit. Il s’agit des documents visés à l’article 6-
1, al. 3 AUPC aux numéros 1° à 5° et 7°, 8°, 10° et 13°. Et en cas d’impossibilité de production
totale d’autres documents, le requérant doit indiquer les motifs de l’empêchement.
Si la requête est introduite par une petite entreprise, les éléments du dossier sont simplifiés, car le
législateur exige dans ce cas tout document de nature à établir la situation financière et économique
ou à établir sa capacité à faire face à son passif exigible avec son actif disponible ou encore tout
autre document de nature à permettre d’identifier et de dénombrer les travailleurs et d’estimer le
montant des salaires et des charges salariales.
C. La soumission d’un projet de concordat préventif

49
V. AUPC, Art. 6, al. 4.

28
Animateur Pr. Moussa Gueye Agrégé de Droit privé

Le débiteur doit enfin, en même temps que le dépôt du dossier soumettre une offre ou projet de
concordat ; à défaut, la requête est irrecevable de plein droit. Mais dans le cadre d’une procédure
de règlement préventif simplifié, la procédure peut être ouverte même si aucun projet de concordat
préventif n’a été fourni50. Dans le projet de concordat51, le débiteur doit préciser les modalités de
continuation de l'entreprise, les garanties d'exécution du concordat, les identités des créanciers
tenus d’exécuter le concordat préventif ainsi que l’ensemble des engagements souscrits par eux et
nécessaires au redressement de l’entreprise et éventuellement les licenciements pour motif
économique des salariés ainsi que les remplacements des dirigeants envisagés.

Section 2 Le déroulement de la procédure


C'est une procédure qui comporte deux phases : la première phase se déroule devant le Président
du Tribunal, et la seconde devant le Tribunal lui-même.

Paragraphe 1 : L'intervention du Président du Tribunal


Dès que la requête lui est présentée et que le projet de concordat préventif lui paraît sérieux, le
Président ouvre la procédure et prend, aussitôt, deux mesures : la suspension ou l’interdiction des
poursuites individuelles et la désignation d'un expert. On ne peut pas subordonner cette décision à
des investigations préalables, ce qui ferait perdre du temps et surtout que l’expert donne son
rapport dans les plus brefs délais52.

A. La suspension ou l’interdiction des poursuites individuelles


Dès qu'il ouvre la procédure, le Président rend une ordonnance de suspension ou d’interdiction des
poursuites individuelles pour une durée maximale de trois (03) mois, exceptionnellement
prorogeable d’un (01) mois sur décision motivée du Président de la juridiction. Cette suspension
est de deux (02) mois en cas de règlement préventif simplifié et la prorogation est de quinze (15)
jours53. Une telle mesure produit des effets considérables sur la situation des créanciers et celle du
débiteur.
1. Les effets à l'égard des créanciers

50
V. AUPC, Art. 24-2, al. 2.
51
V. AUPC, Art. 7.
52
V. AUPC, Art., 9.
53
V. AUPC, Art. 24-4.

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C'est l'interdiction ou la suspension des actions individuelles contre le débiteur. Sont concernées:
- les poursuites qui tendent à obtenir le paiement des créances et nées avant l'ordonnance ;
- les voies d'exécution (les saisies) et les mesures conservatoires, y compris les mesures
d’exécution extrajudiciaire.
Certaines actions échappent cependant à l'interdiction ou à la suspension. Ce sont d'abord les
actions tendant à faire reconnaître un droit contesté. Ce sont ensuite les actions cambiaires dirigées
contre les signataires d'effets de commerce autres que le bénéficiaire de la suspension. Elle entraîne
parallèlement la suspension des délais de prescription.
Pratiquement tous les créanciers subissent les effets de la suspension: créanciers chirographaires,
créanciers munis d’un privilège et créanciers titulaires d’une sûreté réelle spéciale. Une seule
catégorie de créanciers échappe à la règle ; ce sont les créanciers de salaires et d’aliments.
Au demeurant, les personnes physiques coobligées ou ayant consenti une sûreté personnelle ou
ayant affecté ou cédé un bien en garantie peuvent se prévaloir de cette suspension ou interdiction
des poursuites.
Cependant, si après l’homologation du concordat préventif le débiteur est en cessation des
paiements et est déclaré en liquidation des biens, les personnes qui avaient consenti dans ce
concordat un nouvel apport en trésorerie au débiteur en vue d’assurer la poursuite de l’activité de
l’entreprise débitrice et sa pérennité bénéficient du privilège de l’argent frais et seront payées en
priorité. Il en sera autrement s’il s’agit des apports consentis dans le cadre d’une augmentation du
capital social du débiteur ou des créances nées antérieurement à l’ouverture du règlement
préventif54.
2. Les effets à l'égard du débiteur
Le débiteur ne peut accomplir certains actes qu’avec l’autorisation du président de la juridiction ;
ainsi il ne doit pas profiter du « temps mort » qui lui est accordé pour organiser son insolvabilité
ou aggraver sa situation.
En effet, selon l’article 11 AU/PC, le débiteur ne peut sans autorisation motivée :
- payer, en tout ou en partie, les créances nées avant l'ordonnance ;
- accomplir des actes de dispositions étrangers à l'exploitation normale de l'entreprise ;
- consentir des sûretés ;
- désintéresser les cautions, ou les créanciers munis de sûretés réelles ou coobligés qui ont acquitté
des dettes nées avant la décision.

54
V. AUPC, Art. 11-1.

30
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Les actes accomplis en violation de ces règles sont susceptibles d’aggraver le passif, c’est pourquoi
ils sont frappés de nullité de droit et le débiteur encourt des sanctions personnelles.

B. La désignation d'un expert


En même temps qu’il rend la décision de suspension, le Président désigne un expert. L’expert est
choisi sur la liste des mandataires judiciaires et doit remplir les exigences et critères de l’article 4-
2 AU/PC. Celui-ci a pour mission :
- d'éclairer le Président du Tribunal en lui faisant un rapport sur la situation économique et
financière de l'entreprise, les perspectives de redressement et les mesures proposées dans le projet
de concordat (article 8, al. 1 AU/PC) ;
- de favoriser un accord entre le débiteur et ses créanciers (article 12 AUPC) ;
- de signaler à la juridiction compétente les manquements à l’article 11 AU/PC ;
- d’apprécier la situation du débiteur.
Lorsqu’il s’agit d’un règlement préventif simplifié et qu’au moment de son ouverture un projet de
concordat n’avait pas été déposé, l’expert désigné apporte son concours au débiteur pour son
établissement55.
L'expert peut, nonobstant toute disposition législative ou réglementaire, obtenir communication
des renseignements de nature à lui donner une exacte information sur la situation du débiteur ; ces
renseignements peuvent être demandés aux commissaires aux comptes, aux comptables,
administrateurs, aux organismes de sécurité sociale et aux établissements bancaires56. Il peut aussi,
s’il le souhaite, entendre le débiteur et ses créanciers.
Dans son rapport, l’expert doit indiquer pour chaque créancier, s’il a été effectivement contacté et
à quelle date, s’il a consenti une remise ou un délai de paiement, le cas échéant le montant et la
durée et s’il a refusé tout délai et toute remise, la raison de son refus57.
Le président de la juridiction peut, à tout moment, mettre fin au règlement préventif et à la mission
de l’expert, après l’avoir entendu ou dûment appelé ainsi que le débiteur, s’il est informé de la
survenance d’un état de cessation des paiements ou si l’expert lui fait savoir que l’adoption d’un
concordat préventif est impossible.

55
V. AUPC, Art. 24-5, al. 1.
56
V. AUPC, Art. 12, al. 1.
57
V. AUPC, Art. 12, al. 4.

31
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L’expert doit rendre compte régulièrement au Président de l’état d’avancement de sa mission et


s’il a connaissance de la survenance d’un état de cessation des paiements il l’en informe sans
délai. Cette obligation d’information pèse aussi sur le débiteur ; à défaut tout intéressé peut le
faire58.
Dans tous les cas, l'expert doit, dans les trois (03) mois de sa désignation, remettre un exemplaire
de son rapport au débiteur et en déposer un double exemplaire au greffe du Tribunal ; un des deux
exemplaires déposés est transmis au ministère public par le greffe. Sauf autorisation motivée du
Président du tribunal autorisant la prorogation de délai d’un (01) mois l’expert est tenu de respecter
le délai qui lui est imparti; à défaut sa responsabilité civile pourra être engagée à l’égard du débiteur
ou des créanciers59.
Le point de départ de ce délai est le jour où il a été informé par le président de la juridiction par
tout moyen laissant trace écrite de sa mission.

Paragraphe 2 : La procédure devant le tribunal


La procédure commencée devant le Président du tribunal se termine devant le tribunal lui-même.
C'est le Président qui va convoquer sans délai, mais trois (03) jours au moins avant la tenue de
l’audience et par lettre recommandée avec accusé de réception ou par tout moyen laissant trace
écrite, le débiteur et le ou les créanciers. A l'audience vont comparaître le débiteur et l'expert.
Les créanciers ne seront convoqués que si le Président l'estime nécessaire. Le débiteur peut saisir
lui-même le tribunal60.
L'audience n'est pas publique ; il s’agit de préserver le secret des affaires.
Le Tribunal rend une décision qui comporte deux dispositions : l’une sur l’option et l’autre sur la
nomination des organes de la procédure.
A. L’option du tribunal
Aux termes de l’article 14 AUPC, le tribunal doit se prononcer immédiatement ou au plus tard
dans un délai de trente (30) jours à compter de sa saisine. Il a, selon l’article 15 AU/PC, le choix
entre trois (3) possibilités :
Ø ouverture d'une procédure collective de redressement judiciaire ou de liquidation des biens ; il
adopte cette solution lorsqu’il estime que le débiteur est d’ores et déjà en état de cessation des
paiements; cela résulte clairement de l’article 15-1° aux termes duquel « si elle (c’est à dire la

58
V. AUPC, Art. 9-1.
59
V. AUPC, Art. 13, al. 3.
60
V. AUPC, Art. 14.

32
Animateur Pr. Moussa Gueye Agrégé de Droit privé

juridiction compétente) constate la cessation des paiements, elle statue, d’office, sur le
redressement judiciaire ou la liquidation des biens… » ;
Ø annulation de l'ordonnance de suspension des poursuites individuelles ; il adopte une telle
solution lorsqu’il estime que la situation du débiteur ne relève d'aucune procédure collective ou
s’il rejette le concordat préventif proposé (article 15-3° AU/PC) ;
Ø adoption d’un jugement de règlement préventif et homologation du concordat ; il opte pour
cette solution lorsqu’il estime que la situation du débiteur est difficile mais qu’un redressement est
possible ; le concordat ne peut cependant être homologué que si :
- les conditions de validité sont réunies ;
- aucun motif tiré de l’intérêt collectif ou de l’ordre public ne paraît de nature à empêcher le
concordat ;
- les délais consentis n’excèdent pas trois (03) ans pour l’ensemble des créanciers et un (01) an
pour les créanciers de salaires.
B. La désignation des organes de la procédure
En principe la décision du tribunal homologuant le concordat met fin aux fonctions de l’expert et
à la procédure de règlement préventif. D’autres organes vont alors prendre le relais. En effet, le
tribunal désigne obligatoirement un juge-commissaire qui doit veiller au bon déroulement du
concordat en contrôlant les activités du syndic ou des contrôleurs chargés de surveiller l’exécution
du concordat préventif homologué. Le juge-commissaire est tenu de faire à l’intention du tribunal
un rapport trimestriel et à tout moment à la demande de celui-ci61.
La juridiction compétente peut aussi désigner un syndic et des contrôleurs chargés de suivre
l'exécution du concordat. Aux termes de l’article 16, al. 1 AU/PC, l’expert au règlement préventif
peut être désigné en qualité de syndic, chargé de surveiller l’exécution du concordat préventif.
Paragraphe 3 : Les effets du concordat préventif
La décision d’ouverture du règlement préventif ainsi que celle y mettant fin sont notifiées, par le
greffe, au ministère public et aux créanciers concernés; ces décisions doivent être publiées par le
greffe au RCCM, pour les commerçants sous le contrôle de l’expert62. S’il s’agit d’une personne
physique ou morale non commerçante soumise à un statut règlementé, le greffe doit notifier la
décision au représentant légal de son ordre ou de son autorité compétente63.

61
V. AUPC, Art. 16.
62
V. AUPC, Art. 17.
63
V. AUPC, Art. 36.

33
Animateur Pr. Moussa Gueye Agrégé de Droit privé

Le vice de constitution peut faire annuler un concordat, tout comme une inexécution du concordat
peut entraîner sa résolution.
Lorsque le concordat a été homologué, ses effets doivent être vus à l’égard du débiteur, des
créanciers et des organes.

A. A l’égard du débiteur
Dès que le règlement préventif est passé en force de chose jugée, c’est-à-dire à partir du moment
où le jugement d’homologation ne pourra plus faire l’objet de recours suspensif, le débiteur
retrouve la libre administration et la libre disposition de ses biens. Mais il ne peut recouvrer sa
libre disposition qu’en respectant les termes du concordat préventif, mais uniquement pour le
passif qui était né avant le concordat préventif, c’est-à-dire que le passif qui n’a pas fait l’objet du
concordat préventif doit obéir aux dispositions contractuelles.
B. A l’égard des créanciers
La procédure de règlement préventif suit son cours normal s’il y a cette homologation. A partir de
ce moment des effets considérables se produisent : le concordat devient obligatoire pour tous les
créanciers antérieurs à la décision de règlement préventif64 ; il convient d’observer ici que si le
concordat comporte une demande de délai n’excédant pas deux ans, le tribunal peut rendre ce délai
opposable aux créanciers qui avaient opposé un refus (sauf s’il s’agit des salariés) et que les
créanciers de salaires ne peuvent consentir aucune remise, tout comme les créanciers d’aliments65.
Les coobligés ou les personnes qui ont consenti une sûreté personnelle ou affecté ou cédé un bien
en garantie lorsqu’elles ont acquitté des dettes du débiteur nées antérieurement à la décision
d’homologation sont elles aussi obligatoirement soumises aux clauses concordataires.
Les créanciers munis de sûretés réelles spéciales, d’un gage, d’une hypothèque, d’un nantissement
ou d’un privilège conservent leurs garanties, mais ils ne pourront les réaliser qu’en cas
d’annulation ou de résolution du concordat préventif auquel ils ont consenti ou qui leur a été
imposé66.
La prescription est suspendue pour les créanciers qui, par l’effet du concordat, ne peuvent exercer
leurs actions y compris toute mesure extrajudiciaire67.

64
V. AUPC, Art. 18, al. 1.
65
V. AUPC, Art. 15.
66
V. AUPC, Art. 18, al. 2.
67
V. AUPC, Art. 18, al. 4.

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A l’exception des personnes physiques les cautions, les coobligés les garants et les personnes
ayant affecté ou cédé un bien en garantie, ne peuvent se prévaloir des délais et remises consentis
au débiteur ( voir art. 18 al 3 AUPC).
C. A l’égard des organes
La mission de l’expert ayant pris fin, il doit rendre compte de sa mission par écrit au président de
la juridiction compétente dans un délai d’un (01) mois à compter de la décision statuant sur
l’homologation du concordat préventif ou de la décision mettant fin au règlement préventif. Il doit
se retirer tout en rendant au débiteur tous les documents qui lui avaient été donnés. Faute par le
débiteur de retirer ces documents, l’expert en est dépositaire pendant deux (02) ans à compter de
son compte rendu68.
Le syndic désigné doit surveiller l’exécution du concordat et signaler, sans délai, de tout
manquement du débiteur au juge-commissaire. Il fait à ce dernier un rapport tous les trois (3) mois
du déroulement du concordat et en informe le débiteur qui dispose d’un délai de quinze (15) jours
pour formuler, s’il y a lieu, ses observations et contestations69.
Lorsque le syndic informe le juge-commissaire du dysfonctionnement du concordat préventif, il
peut prendre toutes les mesures qu’il juge nécessaires par voie d’ordonnance. Mais le débiteur peut
y faire opposition.
Paragraphe 4 : Les voies de recours
Le débiteur dispose d’un délai de quinze (15) jours à compter du prononcé de la décision rejetant
la demande d’ouverture du règlement préventif ou mettant fin au règlement préventif ou rejetant
l’homologation du concordat préventif pour former appel devant la cour d’appel70.
En cas d’ouverture du règlement préventif, les créanciers et le ministère public peuvent former
appel dans un délai de quinze (15) jours à compter de la première publicité dans un journal
d’annonces légales s’ils estiment que l’entreprise est en cessation des paiements71.
Dans les quinze (15) jours suivants le prononcé de la décision d’homologation du concordat
préventif, le ministère public ou les créanciers peuvent former appel devant la cour d’appel Le
point de départ du délai d’appel fait par le ministère public c’est à compter du jour du prononcé de
la décision d’homologation et si l’appel est formé par les créanciers, le point de départ du délai de
quinze (15) jours c’est à compter de la première publicité dans un journal d’annonces légales72.

68
V. AUPC, Art. 19.
69
V. AUPC, Art. 20.
70
V. AUPC, Art. 23.
71
V. AUPC, Art. 23, al. 2.
72
V. AUPC, Art. 23, al.3.
35
Animateur Pr. Moussa Gueye Agrégé de Droit privé

En cas d’appel, la juridiction d’appel a un délai de trente (30) jours à compter de sa saisine pour
statuer. Et si elle constate la cessation des paiements, elle fixe provisoirement la date de celle-ci et
prononce soit le redressement judiciaire, soit la liquidation des biens et renvoie impérativement la
procédure devant le tribunal compétent en matière de procédure collective pour être statué,
notamment sur la désignation du juge commissaire.
Quant aux décisions du président de la juridiction compétente, elles ne sont susceptibles que
d’opposition devant ladite juridiction dans un délai de huit (08) jours à compter de leur prononcé,
et cette juridiction doit statuer dans un délai de huit (08) jours à compter du jour où l’opposition
est formée. Ces décisions doivent être notifiées sans délai au débiteur par lettre au porteur ou par
tout moyen laissant trace écrite73.
Les décisions relatives à l’opposition ne sont susceptibles d’aucune voie de recours autre que le
pourvoi en cassation. Tout comme n’est susceptible d’aucun recours la décision du tribunal de
faire application du règlement préventif simplifié74.

73
V. AUPC, Art. 23-1.
74
V. AUPC, Art. 24-3.

36
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SECONDE PARTIE : LE TRAITEMENT DES DIFFICULTES CONSTITUTIVES D’UNE


CESSATION DES PAIEMENTS : LE REDRESSEMENT JUDICIAIRE ET LA
LIQUIDATION DES BIENS

Il peut arriver que les mesures préventives ne donnent pas les résultats escomptés. Il n’est pas par
exemple exclu que le règlement préventif ne débouche pas sur le redressement de l’entreprise ; il
n’est pas exclu non plus qu’il y ait résolution du concordat ou que, malgré l’alerte déclenchée, l’on
ne puisse pas empêcher l’évolution vers la cessation des paiements, ou encore que la procédure de
conciliation ne produise pas les effets souhaités.

Il faut aussi prendre en compte l’hypothèse où le débiteur néglige de mettre en œuvre les mesures
préventives jusqu’au jour où il se trouve en état de cessation des paiements.

Dans tous ces cas, il faut songer à un traitement. En adoptant les mesures de traitement de la
cessation des paiements, le législateur OHADA a montré son attachement à la distinction de
l’homme et de l’entreprise en dissociant clairement les mesures patrimoniales qui intéressent
l’entreprise et les mesures extrapatrimoniales destinées à sanctionner les fautes du débiteur ou des
dirigeants de la personne morale.
Quelle que soit la mesure qui doit être adoptée, il faut toujours un jugement constatant la cessation
des paiements et appelée jugement d’ouverture; ce jugement produit des effets considérables et
ouvre, dès que les préalables sont réunis, une nouvelle phase qui débouche soit sur le redressement,
soit sur la disparition de l’entreprise.

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Animateur Pr. Moussa Gueye Agrégé de Droit privé

Titre 1 : LES CONDITIONS D'OUVERTURE DE LA PROCEDURE DE RJ OU DE LB


Le redressement judiciaire (RJ) est destiné à remettre le débiteur à la tête de son patrimoine ; il
s’agit de sauvegarder l’entreprise et d’apurer le passif (article 2, al. 3 AUPC). La liquidation
des biens (LB) qui aboutit à l’élimination des entreprises économiquement condamnées se
réalise par la vente des biens du débiteur pour apurer le passif (article 2, al. 4 AUPC). Ces
procédures sont ouvertes par une décision de justice qui constate la cessation des paiements du
débiteur.
L’ouverture d’une procédure collective de RJ ou de LB obéit néanmoins au respect de certaines
conditions de fond et de forme.

Chapitre 1 : LES CONDITIONS DE FOND


Il y a deux types de règles de cette nature : les règles liées à la qualité du débiteur et celles qui sont
liées à sa situation économique et financière.
Section 1 : Les conditions liées à la qualité du débiteur
On distingue selon qu'il s'agit de personnes physiques ou de personnes morales.

Paragraphe 1 : Les personnes physiques


Tout débiteur « personne physique exerçant une activité professionnelle indépendante, civile,
commerciale, artisanale ou agricole…» peut être soumise aux procédures collectives.
Relevons que le législateur ne vise pas les commerçants mais les personnes exerçant une activité
professionnelle, ce dont il résulte que ce n’est plus la qualité qui prévaut mais l’exercice de
l’activité. En d’autres termes, toute personne qui exerce une activité professionnelle peut
désormais être soumise aux dispositions de l’AUPC, qu’elle ait ou non souscrit aux formalités
imposées pour avoir la qualité de commerçant et s’en prévaloir. Ainsi, l’entreprenant, mais
également un professionnel exerçant dans le secteur informel, est visé.
A. Les débiteurs en activité
La personne physique doit être en activité au moment de la cessation des paiements. La question
qui se pose est de savoir si une personne qui exerce une activité commerciale sans se faire
immatriculer peut être déclarée en liquidation des biens ou en redressement judiciaire. La réponse
ne peut faire l’objet de doute compte tenu des dispositions claires de l’article 60 AUDCG ; ce
texte prévoit en effet qu’une personne assujettie à l’immatriculation et qui n’a pas requis celle-ci
ne peut invoquer le défaut d’inscription pour se soustraire aux responsabilités et obligations
38
Animateur Pr. Moussa Gueye Agrégé de Droit privé

inhérentes à la qualité de commerçant. Mais il convient de relativiser cette perception car la


formulation de l’AUPC laisse la possibilité de prouver, par tout autre document, la régularité de
l’activité exercée par le débiteur (Art. 26-1°) in fine AUPC). En réalité, même si cette possibilité
est affirmée, force est de reconnaître qu’il sera difficile à celui-là qui n’est pas immatriculé ou qui
n’est pas déclaré de bénéficier du redressement judiciaire eu égard aux documents exigés à l’article
26 AUPC.
Une personne physique incapable ne peut pas se voir appliquer les procédures collectives. Il en est
autrement pour les personnes physiques écartées de la profession commerciale par interdiction,
incompatibilités ou par déchéance. Si malgré cette interdiction, déchéance ou incompatibilité ces
personnes exercent le commerce et cessent leurs paiements, elles peuvent se voir appliquer les
procédures collectives.
Lorsqu’une personne prête son nom pour faire le commerce, elle est le commerçant apparent ; en
cas de cessation des paiements du commerçant apparent, le commerçant réel est aussi frappé en
vertu de la règle de la solidarité.
B. Les débiteurs ayant cessé leur activité
Même si le débiteur a cessé son activité, il peut être déclaré en liquidation des biens ou en
redressement judiciaire. Il en est ainsi en cas de cessation volontaire ou de décès.

1. Le débiteur retiré
C’est l’article 31, al. 1 AU/PC qui consacre la possibilité d’ouvrir une procédure collective contre
un commerçant qui a cessé ses activités. Il résulte de ce texte que l’ouverture d’une procédure
collective peut être demandée dans le délai d’un an à compter de la radiation du RCCM ou de la
cessation d’activité ; il faut cependant que la cessation des paiements soit antérieure à la radiation
ou à la cessation d’activité ou résulter en tout ou en partie de l’activité antérieurement exercée.
2. Le débiteur décédé
Le débiteur décédé peut faire l’objet d’une procédure collective dans le délai d'un an à compter du
décès ; il faut pour cela que la cessation des paiements soit antérieure au décès. L’article 30
AU/PC qui consacre cette règle prévoit que la juridiction compétente est saisie soit sur déclaration
d’un héritier, soit sur l’assignation d’un créancier ou encore à la requête du ministère public. Le
tribunal compétent peut aussi se saisir d’office dans le même délai, notamment sur la base des
informations fournies par toute personne. Dans ce cas, les héritiers connus du débiteur seront
entendus ou dûment appelés.

39
Animateur Pr. Moussa Gueye Agrégé de Droit privé

Les héritiers ne sont pas concernés par la procédure ouverte contre leur auteur, même s’ils ont
accepté purement et simplement la succession, à moins qu’ils n’aient continué personnellement
l’exploitation.
Paragraphe 2 : Les personnes morales
Lorsqu’elles s’appliquent aux personnes morales, les procédures collectives présentent une
particularité: elles peuvent atteindre d’autres personnes, par exemple les membres et les dirigeants
de la personne morale.
A. Les personnes morales visées
Il résulte de l’article 1-1 AU/PC que le redressement judiciaire et la liquidation des biens peuvent
être prononcés contre toutes les personnes morales de droit privé, qu’elles soient
commerçantes ou non-commerçantes. Ce sont d’abord toutes les sociétés commerciales, les GIE,
les sociétés coopératives, les associations les syndicats, les sociétés civiles, bref toutes les sociétés
qui ne sont pas de droit public.
Signalons aussi que l’alinéa 2 de l’article 1-1 AUPC prend soin de préciser que les établissements
de crédit, notamment, sont soumis aux procédures collectives, sous réserve toutefois qu’il n’en
soit pas disposé autrement par une réglementation spécifique. La règle est classique mais permet
à tout le moins de poser le principe de l’articulation des dispositions spécifiques avec celles du «
droit commun» que constitue en ce domaine l’AUPC.
Même les entreprises publiques sont concernées dès lors qu’elles ont la forme d’une personne
morale de droit privé. De façon générale, ce sont les entreprises publiques à participation publique
majoritaire, les sociétés d’Etat, les sociétés d’économie mixte …
En principe la procédure collective est incompatible avec le principe de l’insaisissabilité des biens
d’une personne publique ainsi que celui de l’immunité d’exécution, mais avec l’AUPC, si la forme
de cette personne morale de droit public est de droit privé, la procédure collective lui sera
appliquée.
Le groupement auquel on peut appliquer le R.J ou la L.B doit avoir la personnalité morale. L’article
97 AUDSC exige que les sociétés commerciales soient immatriculées au RCCM et l’article 74
AUDSCOO exige que toute société coopérative soit immatriculée au Registre des Sociétés
Coopératives. Dès lors, la personnalité morale existe du jour de l’immatriculation75; avant
l’immatriculation, seuls les fondateurs ou les initiateurs peuvent être mis en R.J ou en L.B s’ils
remplissent les conditions.

75
V. AUDSC-GIE, Art. 98 et AUDSCOO, Art. 78.

40
Animateur Pr. Moussa Gueye Agrégé de Droit privé

La personnalité morale disparaît le jour de la clôture des opérations de liquidation après le


prononcé du jugement déclaratif, la personnalité morale subsiste jusqu’à la liquidation totale.
Lorsque la société est dissoute soit par un acte de justice ou par une Assemblée générale, soit selon
les statuts, la personnalité morale survit jusqu'à la fin des opérations de liquidation et dans ce cas,
la société dissoute peut se voir appliquer la L.B si elle est en cessation des paiements.
Le groupement dépourvu de personnalité juridique ne peut faire l’objet d’une procédure collective:
tel est le cas de la société en participation, de la société créée de fait, de la société de fait, du
groupe de sociétés, de la société en formation avant la constitution ou de la société constituée mais
non encore immatriculée.
B. Les incidences possibles sur d'autres personnes
Cela peut être les membres ; il peut s’agir aussi des dirigeants.
1. Incidence sur les membres
Le redressement judiciaire ou la liquidation des biens d’une personne morale produit les effets sur
les membres indéfiniment ou solidairement responsables du passif. C’est ce qui résulte de l’article
33, al. 4 AUPC aux termes duquel « La décision d’ouverture d’un redressement judiciaire ou d’une
liquidation des biens d’une personne morale produit ses effets à l’égard de tous les membres
indéfiniment et solidairement responsables du passif de celle-ci et prononce, contre chacun d’eux,
soit le redressement judiciaire, soit la liquidation des biens en fonction de leur situation. » C’est
ce que l’on appelle l’extension des procédures collectives aux membres de certaines personnes
morales en raison de leur solidarité aux dettes sociales.
Ce texte peut s’appliquer aux associés d’une société en nom collectif, d’une société coopérative
ou aux commandités d’une société en commandite simple ou encore aux membres d’un GIE ou
d’une association.
2. Incidence sur les dirigeants
Les dirigeants peuvent subir les effets de la procédure ouverte contre la personne morale. C’est ce
qu’on peut déduire des dispositions de l’article 180 AU/PC. Ce texte prévoit en substance que les
mesures prévues par les articles 183 et suivants AU/PC sont applicables, en cas de cessation des
paiements d’une personne morale, à tous ses dirigeants personnes physiques ou morales, de droit
et de fait, apparents ou occultes, rémunérés ou non. Lorsqu'il s'agit de dirigeants personne morale,
son représentant permanent est aussi visé.
Ces mesures sont de deux ordres.
Il y a d’une part la condamnation au comblement du passif ; c’est la mesure prévue par l’article
183 AU/PC ; selon ce texte, lorsque le redressement judiciaire ou la liquidation des biens laisse
apparaître une insuffisance d’actif, le tribunal peut, en cas de faute de gestion ayant contribué à
41
Animateur Pr. Moussa Gueye Agrégé de Droit privé

cette insuffisance d’actif décider à la requête du syndic, du ministère public ou de deux contrôleurs
ou même d’office, que les dettes seront supportées en tout ou en partie, avec ou sans solidarité par
tous les dirigeants ou certains d’entre eux.
Il y a par ailleurs l’extension au dirigeant de la procédure ouverte contre la personne morale. En
effet selon l’article 189 AU/PC, en cas de redressement judiciaire ou de liquidation des biens
d’une personne morale, le tribunal peut déclarer certains dirigeants en redressement judiciaire
même s’ils ne sont pas en état de cessation des paiements. C'est là un des rares cas où une personne
est déclarée en redressement judiciaire ou liquidation des biens alors qu'elle n'est pas en cessation
de paiement. Sont visés les dirigeants qui ont :
- exercé une activité professionnelle indépendante, civile, commerciale, artisanale ou agricole
soit par personne interposée, soit sous le couvert de la personne morale masquant ses agissements
;
- disposé du crédit ou des biens de la personne morale comme des leurs propres ;
- poursuivi abusivement, dans leur intérêt personnel, une exploitation déficitaire qui ne pouvait
conduire qu'à la cessation des paiements de la personne morale.
Sont également concernés les dirigeants qui ont été condamnés à payer tout ou partie du passif
mais qui n'ont pas acquitté la dette mise à leur charge76.
Il y a lieu de souligner la sévérité du législateur OHADA qui semble vouloir étendre le champ
d’application de ces mesures à tous les dirigeants alors que dans certaines législations auxquelles
l’Acte uniforme s’est substitué de telles mesures ne s’appliquaient pas aux dirigeants des personnes
morales qui n’ont pas d’objet économique et ne poursuivent ni en droit, ni en fait, un but lucratif77.
Les droits sociaux peuvent être immobilisés. Cela concerne les procédures collectives ouvertes
contre une personne morale plus exactement des dirigeants de droit ou de fait des personnes
morales. Quels que soient les droits sociaux que ces dirigeants possèdent dans la personne morale
déclarée en L.B ou e RJ, ils ne peuvent plus en disposer librement78. Ils doivent remettre leur titre
au syndic79, car leur responsabilité pénale peut être engagée80. S’il s’agit des droits sociaux non
matérialisés le syndic doit les inscrire sur un registre spécial ouvert à cet effet.

76
V. AUPC, Art. 189, al. 2.
77
V. par ex. C .Com. malien 282.
78
V. AUPC, Art. 57.
79
V. AUPC, Art. 58.
80
V. AUPC, Art. 233-7°).

42
Animateur Pr. Moussa Gueye Agrégé de Droit privé

Par ailleurs il résulte de l’art.185 AUPC, que la juridiction compétente peut enjoindre aux
dirigeants à la charge desquels a été mis tout ou partie du passif de la personne morale de céder
leurs parts sociales, titres de capital ou valeurs mobilières donnant accès au capital de celle-ci ou
ordonner leur cession forcée par les soins du syndic, au besoin après expertise. Et ainsi, le produit
de la vente est affecté au paiement de la part des dettes mise à la charge de ces dirigeants
.
Section 2 : Les conditions liées à la situation économique et financière
La situation économique et financière est prise en compte à deux points de vue : d’abord pour
savoir si l'intéressé, le débiteur, est ou non en cessation de paiement ; ensuite pour choisir entre le
redressement judiciaire et la liquidation des biens.
Paragraphe 1 : La référence à la situation économique et financière pour la détermination
de la cessation des paiements
La procédure ne peut être ouverte que lorsque le débiteur est état de cessation des paiements. Le
législateur donne, à l’article 25 AUPC, une définition plutôt dynamique de la notion. En effet, la
cessation des paiements est considérée comme « l’état où le débiteur se trouve dans l’impossibilité
de faire face à son passif exigible avec son actif disponible, à l’exclusion des situations où les
réserves de crédit ou les délais de paiement dont le débiteur bénéficie de la part de ses créanciers
lui permettent de faire face à son passif exigible ». Dans l’analyse de l’actif disponible, on constate
donc que la notion de liquidité est complétée ou suppléée par la référence faite au critère de la
réserve de crédit et moratoires. Cette réserve dont peut immédiatement bénéficier le débiteur
devient alors un élément décisif de son actif disponible exclusif de toute cessation des paiements81.
Le premier terme de la cessation des paiements est donc le passif exigible. La doctrine semble
unanime pour admettre que le passif exigible est synonyme de passif échu. Cette interprétation est
conforme aux précisions apportées. Le passif échu doit être distingué de la notion comptable de
passif à court terme. À cet égard, la définition consacrée renoue avec les solutions traditionnelles
de la jurisprudence, en ce sens que le passif non exigé, bien qu’exigible, peut ne pas être pris en
considération en raison de la « tolérance » manifestée par tel ou tel créancier. Cette interprétation
suppose quelques tempéraments. La « tolérance » affichée par le ou les créanciers doit être
appréciée diversement. En effet, si ceux-ci ont la claire intention de procurer un certain crédit à
l’entreprise, la cessation des paiements peut ne pas être constituée. Tel est le cas lorsque le

81
Sur la nécessité de prouver les réserves de crédit, Cass. com., 15 févr. 2011, n° 10-13625, D. 2011, p. 591.

43
Animateur Pr. Moussa Gueye Agrégé de Droit privé

créancier consent explicitement82 ou implicitement des délais83. En revanche, s’il y a simplement


un « laxisme » de la part des créanciers, il convient de retenir une solution inverse, eu égard à
l’appréciation de la situation financière de l’entreprise. Ainsi ne peuvent, par exemple, être
considérés comme des créances exigibles les soldes créditeurs des comptes courants d’associés
alors que leurs titulaires n’ont à aucun moment manifesté l’intention de clôturer les comptes ; ce
crédit dont bénéficie l’entreprise doit être intégré dans la notion d’actif84.
Le deuxième terme de la cessation des paiements est l’actif disponible. Il comprend l’ensemble
des liquidités en caisse et en compte en banque, ainsi que le réalisable susceptible d’une conversion
immédiate en disponible.
Le critère de liquidité consacré par la jurisprudence, comme la composante principale de l’actif
disponible, a, en effet, une signification plus juridique que comptable. Il intègre, tout d’abord, la
trésorerie85 mais aussi les liquidités de « nature bancaire ». La prise en compte de ces liquidités
s’effectue dans le contexte de la situation d’ensemble de l’entreprise.
Avec quelques réserves, on peut même considérer que les effets de commerce peuvent entrer dans
la composition ou dans l’évaluation de l’actif disponible. En plus, des effets de commerce peuvent
être escomptés sans pour autant être forcément honorés. En la matière, l’appréciation des juges du
fond peut être délicate.
Il est également possible d’inclure dans l’actif disponible les créances dont la mobilisation a été
acceptée. En ce domaine, le rôle des banquiers de l’entreprise apparaît essentiel, sans compter les
risques de responsabilité éventuels. Leur attitude ne sera pas sans être suspectée : s’ils refusent la
mobilisation des créances, l’entreprise peut être déclarée en cessation des paiements ; s’ils
l’acceptent, la solution inverse pourra être retenue. Ainsi, des créances « mobilisables » même à
court terme ne peuvent être prises en compte dans l’actif disponible.
Le troisième terme de la cessation des paiements est contenu dans l’expression « impossibilité
pour l’entreprise de faire face (…) ». C’est, semble-t-il, le critère le plus significatif, car il invite
le juge du fond à se livrer à une analyse dynamique de la situation de l’entreprise en introduisant
le facteur temps. Il en résulte que la cessation des paiements ne saurait se réduire à un déséquilibre
momentané entre actif disponible et passif exigible, envisagé de manière statique, mais doit plutôt

82
V. Cass. com., 20 janv. 1990, Gaz. Pal. 1990.
83
V. Cass. com., 22 févr. 1994, JCP E 1995, II, 699, note L. Lévy.
84
V. CA Aix-en-Provence, 16 avr. 1985, D. 1987, somm., p. 389, obs. J.-C. Bousquet – CA Caen, 23 mars 1995,
Piolet, Bedel c/ Robin, inédit.
85
V. J. Stoufflet, La trésorerie : existe-t-il une notion juridique ?, RJ com. 1989, p. 26, La trésorerie et le
financement des entreprises, n° spécial. V. Cass. com., 30 janv. 1990, RJ com. 1990, p. 373, n° 94, obs. Gallet.

44
Animateur Pr. Moussa Gueye Agrégé de Droit privé

exprimer l’idée que le débiteur est dans l’impossibilité, dans un avenir immédiat ou très proche,
de retrouver un équilibre durable.
En définitive, la volonté du législateur est de ne pas privilégier une optique exclusivement
comptable dans l’approche de la définition de l’état de cessation des paiements. Implicitement, on
mesure combien le critère tiré de la réserve de crédit qui mesure la capacité du débiteur de faire
face à son passif exigible est appelé à jouer un rôle décisif.
Cette notion de cessation des paiements ne doit pas, alors, être confondue avec l’insolvabilité qui
est la situation d’une personne dont le passif est supérieur à l’actif. Une personne insolvable, parce
qu’ayant un actif inférieur au passif, peut ne pas être en cessation de paiements si elle bénéficie
encore de la confiance de ses créanciers ; inversement une personne solvable peut être en état de
cessation des paiements parce que son actif est constitué de biens difficilement réalisables alors
que son passif est immédiatement exigible. La dette doit alors être liquide, exigible et certaine.
Il convient de signaler que les tribunaux interprètent de manière large cette notion de cessation des
paiements puisqu’ils considèrent comme se trouvant dans cet état la personne qui a recours à des
moyens ruineux ou frauduleux pour se procurer des fonds. C’est ce que l’on appelle la cessation
des paiements déguisée qui est une institution utilisée pour la mise en œuvre des inopposabilités
de la période suspecte.
On ne distingue plus entre dettes civiles et dettes commerciales, car aujourd’hui, quelle que soit la
nature des dettes impayées, on peut être déclaré en cessation de paiement.
La preuve de la cessation des paiements peut résulter de l’aveu du débiteur lui-même ou de ses
héritiers en cas de décès ; elle peut aussi provenir des créanciers du ministère public ou du tribunal.
La cessation des paiements est une situation de fait et comme tout fait elle se prouve par tous
moyens. Or la cessation des paiements est le fait du non-paiement, donc elle peut se prouver par
les écritures comptables.
La cessation des paiements doit être datée car lorsque le juge est saisi, il faut prouver que le
débiteur n’a pas payé ses dettes depuis telle date. La date permet de déterminer la période suspecte,
car entre la date la plus lointaine de dette impayée et le moment où le tribunal a été saisi des choses
peuvent s’être passés.
Paragraphe 2 : La référence à la situation économique et financière pour le choix entre le
redressement judiciaire et la liquidation des biens
Le choix entre le redressement judiciaire et la liquidation des biens repose sur un critère
essentiellement économique puisque si l'entreprise est viable, c'est le redressement judiciaire,
sinon la liquidation des biens. Dans ce choix, on ne prend pas en compte le comportement de
l'intéressé. Cela résulte clairement de l’article 33, al. 2 AU/PC aux termes duquel « Elle (la
45
Animateur Pr. Moussa Gueye Agrégé de Droit privé

juridiction compétente) prononce le redressement judiciaire s’il lui apparaît que le débiteur a
proposé un concordat sérieux ou qu’un tel concordat a des chances sérieuses d’être obtenu ; ou, si
une cession globale est envisageable. » Dans le cas contraire elle prononce la liquidation des
biens».
Cette technique semble offrir un critère de choix réaliste à la juridiction compétente pour
l’ouverture de la procédure collective idoine. Le premier rôle revient au débiteur pour faire une
proposition de concordat sérieux, mais s’il n’inspire plus confiance alors que la situation de
l’entreprise n’est pas désespérée, une cession globale peut être prononcée.
On peut à notre avis parler de concordat sérieux lorsque le débiteur a fait des propositions
réalisables et de nature à permettre le redressement de l’entreprise ainsi que le paiement des
créanciers.
Il peut être difficile, dans certains cas, pour le Tribunal de choisir parce qu'il n'a pas suffisamment
d'éléments ; il faudra alors prononcer le redressement judiciaire quitte ensuite à le convertir en
liquidation des biens s’il s’avère que le débiteur n’est pas ou n’est plus en mesure de proposer un
concordat sérieux.

46
Animateur Pr. Moussa Gueye Agrégé de Droit privé

Chapitre 2 : LES CONDITIONS DE FORME


L’ouverture d’une procédure collective ne peut résulter que d’une décision de la juridiction
compétente. En formulant cette règle, l’article 32, al. 1 AU/PC semble condamner l’institution de
la faillite de fait qui permettait d’obtenir les effets de la faillite sans un jugement constatant
préalablement la cessation de paiements. Il convient de déterminer la juridiction compétente pour
rendre ce jugement avant d’examiner les modes de saisine et le sens de la décision.
Section 1 : La saisine du tribunal
Paragraphe 1 : La détermination de la juridiction compétente
Les règles de compétence sont les mêmes que pour le règlement préventif. En effet l’article 3-1
AU/PC qui fixe les règles de détermination de la catégorie de juridiction compétente et de la
juridiction territorialement compétente se trouvent dans les dispositions applicables à toutes les
procédures. Il est donc possible de se référer aux développements consacrés aux règles de
compétence dans le règlement préventif.
Cette juridiction compétente va connaître non seulement de la procédure collective mais de toutes
les actions qui auront une influence sur la procédure collective, c’est-à-dire toutes les actions
connexes par exemple l’action en revendication d’un bien, en contestation d’une créance, en
reconnaissance d’avantage matrimonial, sauf pour les compétences exclusivement attribuées aux
juridictions administratives, sociales et pénales.
Il se peut que plusieurs personnes soient en cessation des paiements pour des dettes communes.
S’il s’agit d’une société de personnes, en participation, de fait, c’est le siège social ou le domicile
du gérant ou celui du prête-nom. Si d’autres personnes sont appelées c’est le même tribunal et seul
ce tribunal qui sera compétent. Mais il y aura autant de procédures collectives que des personnes
déclarées en cessation des paiements.
Il y a lieu de signaler que toutes les contestations sur la compétence doivent être tranchées dans
les 15 jours de la saisine du tribunal et, en cas d’appel, dans le délai de trente (30) jours de la
saisine de la juridiction d’appel86.
Il faut noter aussi que s’il y a exception d’incompétence rationae loci, la juridiction qui s’estime
compétente doit statuer sur la compétence et sur le fond par une et même décision ; cette décision
ne pourra alors être attaquée sur la compétence et sur le fond que par la voie de l’appel.
Paragraphe 2 : Les modes de saisine du tribunal
IL y a quatre modes de saisine : la requête du débiteur, la demande des créanciers, la saisine
d’office du tribunal et celle effectuée par le ministère public

86
V. AUPC, Art., 3-2.

47
Animateur Pr. Moussa Gueye Agrégé de Droit privé

A. La saisine par le débiteur


Le Tribunal peut être saisi par le débiteur ; c'est ce qu'on appelle le dépôt de bilan. Il saisit le
tribunal dans le délai de 30 jours à compter de la cessation de paiement87. L'inobservation de ce
délai entraîne un certain nombre de sanctions.
La saisine se fait au moyen d’une déclaration déposée au greffe et accompagnée des pièces
énumérées à l’article 26 AU/PC. Dans cette déclaration, il doit y préciser s’il demande l’ouverture
d’un redressement judiciaire ou d’une liquidation des biens88.
Des pièces devant accompagner la déclaration de cessation des paiements sont au nombre de onze ;
on y note une innovation principale : le débiteur doit produire une attestation précisant s’il
bénéficie d’un accord de conciliation et, en tout état de cause, qu’il n’est pas soumis à une
procédure de règlement préventif, de redressement judiciaire ou de liquidation des biens qui ne
serait pas encore clôturée ; le cas échéant, si le débiteur a bénéficié d’un concordat préventif, le
montant des créances restant dues aux créanciers bénéficiant du privilège de l’article 11-1 de
l’AUPC, ainsi que leur nom et domicile89.
Il faut noter également que le privilège de l’article 33-1 est une véritable innovation. Celui-ci
prévoit, en effet, qu’ « en cas de conversion d’une procédure de redressement judiciaire en
liquidation des biens, les personnes qui avaient consenti dans le concordat de redressement un
nouvel apport en trésorerie au débiteur en vue d’assurer la poursuite de l’activité de l’entreprise
et sa pérennité sont payées au titre du privilège selon les rangs prévus par les articles 166 et 167
ci-dessous ». « Les personnes qui fournissent un nouveau bien ou service en vue d’assurer la
poursuite de l’activité de l’entreprise et sa pérennité bénéficient du même privilège pour le prix
de ce bien ou de ce service ». C’est ce que l’on qualifie de privilège de « l’argent frais » ou de «
new money »90, qui est destiné à faciliter le fonctionnement de l’entreprise et la relance de ses
activités. Le même privilège est d’ailleurs mis en place dans l’article 33-1, pour les nouveaux
apports consentis dans les mêmes conditions dans le concordat de redressement judiciaire.
En même temps que la déclaration de cessation des paiements, ou au plus tard, dans les soixante
(60) jours qui suivent la décision d’ouverture du redressement judiciaire, le débiteur doit déposer

87
V. AUPC, Art. 25, al. 3 et 4.
88
V. AUPC, Art. 25, al. 5.
89
V. AUPC, Art. 26, al. 1-8°).
90
Ce privilège concerne les entreprises qui négocient une conciliation, les personnes qui soutiennent l’entreprise
par un nouvel apport de trésorerie. Ce dispositif vise à convaincre les créanciers de prêter aux entreprises en
difficulté.

48
Animateur Pr. Moussa Gueye Agrégé de Droit privé

un projet de concordat91. Concernant le redressement judiciaire simplifié, selon l’article 145-3


AUPC, le débiteur, avec le concours du syndic, doit déposer un projet de concordat de
redressement judiciaire, au plus tard dans les quarante-cinq jours qui suivent sa déclaration. Ainsi,
le délai de soixante jours pour présenter le projet de concordat de redressement judiciaire est réduit
à quarante-cinq (45). Mais il est prévu que le syndic participe activement à la réalisation du projet
de concordat de redressement judiciaire, parce que bien souvent dans ces petites entreprises, il n’y
a pas de conseils pouvant les aider.
Il n’a pas été jugé utile d’exiger que soit dressé un bilan économique et social dans ce cadre. De
surcroît, le projet peut se limiter à des délais de paiement, des remises de dettes ainsi qu’aux
garanties éventuelles que le chef d’entreprise doit souscrire pour en assurer l’exécution92.
Concernant les délais de paiement et les remises de dettes, l’accord de chaque créancier concerné
est nécessaire93.
Les héritiers du débiteur peuvent aussi saisir le tribunal dans le délai d’un an après le décès de leur
auteur.
Lorsque les conditions cumulatives des seuils sont réunies, le débiteur a la faculté de demander
l’application de la procédure de redressement judiciaire simplifié où la production de documents
tels que, par exemple, les états financiers de synthèse ou encore l’inventaire formellement requis
pour le régime normal n’est pas nécessaire si lesdits documents ou l’information sollicitée
n’existent pas ou sont difficiles à obtenir. Le débiteur devra alors fournir un document de nature à
établir sa condition financière et économique ou un inventaire provisoire. Il devra en outre fournir
une attestation sur l’honneur à l’appui de sa demande attestant qu’il remplit les conditions d’une
procédure collective simplifiée.
Dans le cadre d’une procédure de redressement judiciaire, le demandeur a d’ailleurs toujours la
faculté de faire la demande d’application du redressement judiciaire simplifié, même après la
décision d’ouverture de la procédure, au plus tard dans un délai de trente (30) jours s’il arrive à
établir que les conditions d’application de cette procédure existent toujours. La juridiction
compétente doit alors statuer après avoir entendu le syndic94, et sa décision de faire application du
redressement judiciaire simplifié n’est susceptible d’aucun recours95.

91
V. AUPC, Art. 27, al. 1.
92
V. AUPC, Art. 145-4.
93
V. AUPC, Art. 145-8, al. 2.
94
V. AUPC, Art. 145-5.
95
V. AUPC, Art. 145-6.

49
Animateur Pr. Moussa Gueye Agrégé de Droit privé

B. La saisine par le créancier


Tout créancier a la possibilité de saisir le tribunal en vue d’obtenir une décision de R.J ou de L.B.
La demande qui prend la forme d’une assignation doit préciser la nature et le montant de la créance
ainsi que le titre sur lequel elle est fondée96. Le législateur n'exige pas du créancier un titre
exécutoire ; celui-ci doit cependant justifier d’une créance certaine, liquide et exigible.
C. La saisine d’office
Le Tribunal peut enfin se saisir d’office, notamment sur la base des informations fournies par le
Ministère public, les commissaires aux comptes ou les associés ou le représentant du personnel.
Dans ce cas, le Président fait convoquer le débiteur par acte extrajudiciaire par les soins du greffier,
par voie de signification d’huissier ou notification par tout moyen permettant d’établir la réception
effective par le destinataire, à comparaître à une audience non publique97. La convocation dans ce
cas, doit à peine de nullité, reproduire intégralement les dispositions de l’article 29 AUPC.

Au cours de cette audience, il est informé des faits qui lui sont reprochés et ses observations sont
recueillies. S’il reconnaît être en cessation des paiements ou si le président en a l’intime conviction,
il lui fixe un délai qui ne peut excéder trente (30) jours pour produire les documents exigés à
l’article 26 AUPC. Ce même délai est accordé aux associés des sociétés de personnes en cessation
des paiements. Passé le délai de trente (30) jours, le tribunal statue en audience publique.
Cette possibilité de saisine d’office qui est une dérogation à la règle de procédure civile selon
laquelle l’activité juridictionnelle ne peut être déclenchée que par un acte émanant des parties
présentant un intérêt certain, permet de rattraper une procédure mal engagée. En effet le tribunal
qui est saisi d’une exception de nullité et qui constate que l’assignation est nulle pourra néanmoins
prononcer l’ouverture de la procédure. On tire de la possibilité de se saisir d’office le droit de
prononcer la liquidation des biens à la place du redressement judiciaire demandée par le débiteur
ou le redressement judiciaire à la place de la liquidation des biens réclamée par le créancier.
D. La saisine par le ministère public
L’acte uniforme de 2015 renforce les pouvoirs du ministère public en matière économique en lui
permettant de prendre l’initiative de l’ouverture d’une procédure contre tout débiteur qu’il estime
être en cessation des paiements. En plus des informations qu’il peut fournir au tribunal pour
provoquer sa saisine d’office l’article 29 al. 2 AUPC prévoit que la juridiction compétente peut
également être saisie par le ministère public. Dans ce cas, comme tout plaideur il fournit les

96
V. AUPC, Art. 28.
97
V. AUPC, Art. 29.

50
Animateur Pr. Moussa Gueye Agrégé de Droit privé

éléments motivant sa demande notamment par rapport l’effectivité de la cessation des paiements
de l’entreprise débitrice. Pour le respect du principe du contradictoire le débiteur est convoqué et
la procédure est conduite dans les mêmes conditions qu’une saisine d’office.

Section 2 : La décision du tribunal


Il s’agit de déterminer le contenu de cette décision, son exécution ainsi que les voies de recours
possibles.
Paragraphe 1 : Le contenu de la décision
A. La constatation des conditions de fond
Le tribunal ne peut pas ouvrir une procédure collective si les conditions de fond ne sont pas réunies.
Il statue à la première audience utile pour rendre, s’il constate la cessation des paiements, un
jugement soit de redressement judiciaire, s’il parvient à démontrer que l’adoption d’un concordat
de redressement a des chances d’être obtenue ou qu’une cession globale est envisageable, soit de
liquidation des biens s’il n’y parvient pas98.
Le législateur OHADA n’a pas hésité à limiter strictement la durée des procédures collectives.
Ainsi, à l’expiration d’un délai de six mois à compter du jugement d’ouverture, délai qui ne peut
être prorogé qu’une seule fois pour une durée de trois mois, le redressement judiciaire est converti
en liquidation des biens. Cette période sera utilisée notamment pour élaborer « un bilan
économique et social qui précise l’origine, l’importance, et la nature des difficultés de l’entreprise
débitrice »99.
Une procédure de redressement judiciaire ne peut durer plus de neuf mois sans être
automatiquement convertie en liquidation des biens par la juridiction compétente, et ce d’office
ou à la demande de tout intéressé100.
De même, également, la durée de la liquidation des biens est fixée à dix-huit mois, prorogeable de
six mois une seule fois101. Il en résulte que la procédure peut prendre fin même si tous les actifs
n’ont pu être réalisés. Mais que l’on se rassure, si tel est le cas, les créanciers recouvrent leurs
droits de poursuites individuelles sur les actifs non réalisés102.

98
V. AUPC, Art. 33.
99
V. AUPC, Art. 119-1.
100
V. AUPC, Art. 33, al. 6.
101
V. AUPC, Art. 33, al. 3.
102
V. AUPC, Art. 170.

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S’il s’agit d’une liquidation des biens simplifiée, au plus tard cent vingt (120) jours après
l’ouverture ou la décision la prononçant, le tribunal doit prononcer la clôture de la liquidation des
biens du débiteur entendu ou dûment appelé. Cependant, par décision spécialement motivée, le
tribunal peut proroger cette durée pour une période qui ne peut excéder soixante (60) jours. La
durée maximale de la liquidation des biens simplifiée est donc de cent quatre-vingt jours, soit six
mois103.
La juridiction compétente fixe, dans la décision, la date de la cessation des paiements; mais, en cas
de silence, la cessation de paiements est réputée avoir lieu à la date du jugement qui la constate104.
La fixation de cette date est très importante puisque la période comprise entre cette date et le
jugement d’ouverture est considérée comme la période suspecte et les actes accomplis pendant
cette période peuvent ou doivent être déclarés inopposables à la masse des créanciers.
La partie du jugement dans laquelle le Tribunal fixe la date de cessation de paiements n'est pas
dotée de l'autorité de la chose jugée. Aussi le tribunal peut-il la modifier jusqu’à l’expiration du
délai de quinze (15) jours prévu par l’article 88 AU/PC ; il s’agit du délai pour faire opposition
contre l’ordonnance par laquelle le juge-commissaire arrête l’état des créances.
Pour éviter les inconvénients qui résultent pour les tiers de bonne foi des inopposabilités de la
période suspecte, le législateur a prévu à l’article 34, al. 2 AU/PC, que la date de la cessation des
paiements ne peut être antérieure de plus de 18 mois au prononcé de la décision d’ouverture. Sauf
cas de fraude, elle ne peut être reportée à une date antérieure à la décision définitive ayant
homologué le concordat préventif.
B. La désignation des organes de la procédure (article 35 AUPC)
Le tribunal nomme aussi les organes de la procédure.
1. Le juge-commissaire
Le juge-commissaire est choisi parmi les juges du siège de la juridiction, à l’exception du président
sauf s’il n’y a qu’un juge. Le juge-commissaire a plusieurs types d’attribution ; il a notamment
pour mission105:
- de veiller au déroulement rapide de la procédure et aux intérêts en présence ;
- de statuer sur les demandes et contestations de sa compétence
- d’accorder certaines autorisations ;
- de statuer sur les propositions d’admission et de rejet des créances faites par le syndic ;

103
V. AUPC, Art. 179-9.
104
V. AUPC, Art. 34, al. 1.
105
V. AUPC, Art. 39 et 40.

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- de nommer les contrôleurs (qu’il ne peut au demeurant révoquer) chargés de l’assister et de


formuler des avis sur les décisions relatives à la continuation de l’exploitation, à la vérification des
créances ou la cession de l’actif du débiteur.
Le juge-commissaire a des moyens d’action très puissants ; il peut :
- entendre le débiteur, les dirigeants, s’il s’agit d’une personne morale ainsi que les préposés, les
proches et les créanciers ;
- demander, nonobstant toutes dispositions contraires, des renseignements aux commissaires aux
comptes, aux comptables, aux membres et représentants du personnel, aux administrations et
organismes publics, aux organismes de prévoyance et de sécurité sociale, aux établissements de
crédit etc.
Le juge-commissaire rend des ordonnances qui sont déposées au greffe et notifiées par les soins
du greffier à toutes personnes auxquelles elles sont susceptibles de faire grief.
Les ordonnances du juge-commissaire peuvent faire l’objet d’opposition ; elles peuvent aussi être
annulées ou réformées par le tribunal agissant d’office.
2. Le syndic
Le Tribunal nomme en effet un à trois syndics et l’expert désigné pour le règlement préventif d’un
débiteur ne peut être désigné comme syndic.
La mission du syndic se rattache à trois idées106 :
- d’abord la gestion de la procédure ; à ce titre, il fait le travail préparatoire dans le cadre de
la vérification des créances ; il avertit les créanciers en vue de la production des créances ; il veille
à la situation de l’entreprise en cas de continuation de l'exploitation ; il procède à la réalisation des
biens du débiteur etc. ;
- ensuite la représentation de la masse des créanciers ;
- enfin la représentation (en cas de liquidation des biens) ou l’assistance (en cas de
redressement judiciaire) du débiteur.
Paragraphe 2 : L’exécution du jugement
La décision du R.J ou de L.B doit être portée à la connaissance du public au rang duquel les
créanciers et les tiers qui vont ou veulent traiter avec le débiteur. C’est le greffier qui fait cette
publicité d’abord par une insertion dans le R.C.C.M, ensuite une insertion dans un Journal
d’Annonces Légales (JAL) ou dans le Journal Officiel (J.O). Si le débiteur exerce une profession

106
V. AUPC, Art. 41 à 46.

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libérale soumise à un statut règlementé, le greffier doit également notifier la décision au


représentant légal de son ordre professionnel ou de son autorité compétente107.
Dans la teneur de ce jugement, le syndic est tenu de vérifier si le greffier a bien fait son travail. Le
syndic a l’obligation de publier la décision à la conservation foncière afin d’inscrire le jugement à
la publicité foncière s’il existe des immeubles108.
En droit commun, les délais d'exercice des voies de recours ordinaires ainsi que l’exercice de ces
voies de recours dans les délais sont suspensifs. Cela signifie que la décision ne peut être exécutée
avant l’expiration des délais d’exercice des voies de recours ordinaires et lorsque les voies de
recours ordinaires sont exercées dans les délais il ne pourra pas y avoir d’exécution avant la
décision de la juridiction qui en est saisie.
En matière de procédures collectives, cette règle de l’effet suspensif des voies de recours ordinaires
est écartée, puisque la décision est exécutoire par provision. Il est donc possible de l’exécuter avant
l’expiration des délais et malgré l’exercice des voies de recours.
Il y a deux voies ouvertes : l’appel et l’opposition.
L’appel permet de saisir une juridiction supérieure, alors que l’opposition permet de faire revenir
l'affaire dans la même juridiction.

107
V. AUPC, Art. 36.
108
V. AUPC, Art. 36, 37 et 38.

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Titre 2 : LES EFFETS DU JUGEMENT DECLARATIF


Lorsque le jugement est rendu, il va produire des effets sur la situation du débiteur, celle des
créanciers, celle des personnes qui se prétendent titulaires d’un droit réel sur des biens détenus par
le débiteur et même sur celle du conjoint.

Chapitre 1 : LES EFFETS A L’EGARD DU DEBITEUR


Le jugement va produire des effets dans le passé, puisque certains actes déjà accomplis par le
débiteur peuvent être remis en cause ; c'est ce qu'on appelle les inopposabilités de la période
suspecte. Il va produire également des effets pour l'avenir, dans la mesure où, à compter de sa date,
il va y avoir des restrictions aux pouvoirs du débiteur.
Section 1 : Les effets dans le passé
Il y a une suspicion de fraude qui pèse sur le débiteur qui est en état de cessation des paiements.
C’est la raison pour laquelle, la période comprise entre la date de la cessation des paiements et le
jour du jugement, est considérée comme une période suspecte et certains actes accomplis pendant
cette période peuvent ou doivent être déclarés inopposables à la masse des créanciers.
En droit commun, lorsque le débiteur a commis une fraude ou un préjudice à ses créanciers, ces
derniers disposent d’une action paulienne (action par laquelle le créancier demande en justice
la révocation des actes d’appauvrissement accomplis en fraude de ses droits par le débiteur
insolvable), mais cette action est inefficace en droit des procédures collectives.
Il convient alors d’envisager les cas d’inopposabilité avant d’examiner leur mise en œuvre.
Paragraphe 1 : Les cas d'inopposabilité
Ces inopposabilités n’agissent pas de la même manière. Il y a les inopposabilités de droit et les
inopposabilités facultatives109.
A. Inopposabilités de droit (article 68 AUPC)
Il convient de faire ici une observation préliminaire. Il ne s’agit pas d'inopposabilité de plein droit.
En effet dans ce cas, une décision du tribunal ne serait pas nécessaire, l’inopposabilité opérant
d'elle-même. Or ici il faut une décision, mais le juge n’aura aucun pouvoir d ‘appréciation, car il
est tenu de déclarer l’acte inopposable dès qu'il constate qu’il fait partie de ceux qui sont visés par
la loi et qu’il a été accompli pendant la période suspecte.
Sous le bénéfice de cette observation, on peut relever que les actes frappés d’inopposabilité de
droit sont au nombre de six. Sont visés :

109
V. AUPC, Art. 67 et 68.

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1° les actes à titre gratuit translatifs de propriété mobilière ou immobilière, accomplis pendant la
période suspecte. Il s’agit notamment des constitutions de dot, des donations, des remises de dettes
ou de la renonciation à un droit sans contrepartie ;
2° les contrats commutatifs dans lesquels les obligations du débiteur excédent notablement celles
de l'autre partie, le déséquilibre s’appréciant au moment de la conclusion du contrat ;
3° les paiements pour dettes non échues quel que soit le mode de paiement utilisé, sauf s’il s’agit
du paiement d’un effet de commerce ;
4° les paiements des dettes échues par un procédé anormal. Un paiement normal c’est l’exécution
d’une obligation dans les termes prévus par le contrat. Payer c’est exécuter son obligation telle que
contenue dans le contrat. L’Acte uniforme a prévu des exemples de procédés normaux tels que
les paiements en espèces, par virement, par prélèvement, par carte de paiement ou de crédit, par la
remise d’un effet de commerce, par compensation de dettes ayant un lien de connexité entre elles
ou tout autre procédé de paiement normal ou communément admis dans les relations d’affaires du
secteur d’activité du débiteur ; la liste n’est pas limitative, mais tout autre procédé, par exemple
une dation en paiement, risquerait d’être déclaré inopposable ;

5° les constitutions de sûretés réelles conventionnelles pour dettes antérieurement contractées,


( à moins qu’elles ne remplacent une sûreté antérieure d’une nature et d’une étendue équivalente
ou qu’elle soit consentie en exécution d’une convention antérieure à la cessation des paiement)
puisqu’il n’y a pas contemporanéité ni concomitance entre la sûreté et la dette, il y a suspicion;
6° les inscriptions provisoires d'hypothèque judiciaire conservatoires ou de nantissement judiciaire
conservatoire.
B. Inopposabilités facultatives
Pour certains actes, le juge dispose d’un pouvoir d’appréciation car il n’est pas tenu de les déclarer
inopposables. Il ne les déclare inopposables que s’ils ont causé un préjudice à la masse des
créanciers. L’appréciation du tribunal portera donc sur les conséquences de l’acte ; s’il estime que
l’acte a causé un préjudice à la masse, il va le déclarer inopposable et dans le cas contraire il va
rejeter la demande tendant à cette fin.
Les types d’actes que le juge peut déclarer inopposables sont au nombre de trois110 :
1° les actes à titre gratuit translatifs de propriété mobilière ou immobilière, accomplis dans les six
(06) mois qui précèdent la période suspecte;
2° les actes à titre onéreux, si le cocontractant a eu connaissance de l'état de la cessation de
paiements ;

110
V. AUPC, Art. 69.

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3° les paiements volontaires de dettes échues si ceux qui ont reçu le paiement ont eu connaissance
de l'état des cessations des paiements ; ne sont pas cependant concernés les paiements faits au
profit du porteur diligent d'une lettre de change, d'un chèque ou d'un billet à ordre, sauf si l’on se
trouve en face de l’un des cas où l’action en rapport est ouverte (V. pour les cas, l’article 69, al. 2
AUPC).
Paragraphe 2 : La mise en œuvre des inopposabilités
A. Le titulaire de l’action
Même s'il s'agit d'inopposabilité de droit, il faut une décision du tribunal rendue à la demande du
syndic qui peut agir jusqu'au jour de l'arrêté de l'état de créances. Selon l’article 70 AUPC seul
le syndic peut agir en déclaration d’inopposabilité des actes accomplis pendant la période suspecte.
Il porte son action devant le tribunal qui a prononcé l’ouverture de la procédure. Mais cette action
ne peut être exercée après l’homologation du concordat de redressement judiciaire ni après la
clôture de la liquidation des biens.
B. Les effets de l’inopposabilité
Pour ce qui est des effets des inopposabilités, ceux-ci sont les mêmes qu’il s’agisse
d’inopposabilité de droit ou facultative. Mais ces effets diffèrent selon la nature de l’acte ; ainsi,
l’article 71 AUPC distingue 5 cas de figure.
a. Constitution de sûreté déclarée inopposable : soit pour dettes antérieurement contractées, soit
une inscription de sûreté pour dettes contractées pendant la période suspecte ; dans ce cas, c'est la
masse des créanciers qui est colloquée à la place du créancier.
b. Acte à titre gratuit déclaré inopposable : Dans ce cas, deux possibilités peuvent se présenter.
• Il se peut que l'acte n'ait pas été exécuté ; il ne sera pas alors exécuté.
• Il se peut aussi que l’acte ait déjà été exécuté ; dans ce cas le bénéficiaire de l'acte doit
restituer le bien dont la propriété a été transférée gratuitement. Mais que se passe-t-il en cas de
sous-aliénation ? Tout dépend du type sous-aliénation :
- s'il s'agit de sous aliénation à titre gratuit, le sous-acquéreur, même s'il est de bonne foi, doit
rapporter le bien ou payer sa valeur, sauf si le bien a disparu par un cas de force majeure ;
- s'il s'agit de sous aliénation à titre onéreux, le sous-acquéreur n'est tenu de restituer le bien ou de
payer sa valeur que si au moment de l’acquisition du bien, il avait connaissance que le débiteur
était en cessation de paiements.
Dans tous les cas où le sous-acquéreur ne peut ou ne veut restituer, le bénéficiaire de l’acte
principal, c'est-à-dire l’acte accompli par le débiteur et déclaré inopposable, sera tenu du paiement
de la valeur.

57
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c. Paiement déclaré inopposable : c’est ce qui se passe en cas de paiement de dettes non échues,
paiement de dettes échues, paiement par un procédé anormal (cas d’inopposabilité de droit) ou de
paiement de dettes échues par un procédé normal si le bénéficiaire a eu connaissance de l’état de
cessation des paiements (cas d’inopposabilité facultative). Dans ce cas, le créancier restitue les
sommes reçues et va alors produire sa créance au passif du débiteur.
d. Contrat commutatif déséquilibré, déclaré inopposable : Dans ce cas, il faut distinguer.
• Si le contrat n'a pas été exécuté, il ne le sera pas.

• Si le contrat est déjà exécuté, le cocontractant pourra produire au passif du débiteur pour la

juste valeur de la prestation.


e. Acte à titre onéreux déclaré inopposable : une telle situation peut se présenter lorsque l’acte à
titre onéreux a été conclu avec un cocontractant qui a eu connaissance de l’état de cessation des
paiements. Dans un tel cas, il faut faire une distinction car deux possibilités peuvent se présenter.
• Il se peut que l’acte n’ait pas encore été exécuté ; alors, il ne le sera pas ;

• Il se peut aussi que l’acte ait déjà été exécuté ; dans ce cas, le cocontractant doit rapporter le

bien et produire au passif du débiteur. Là également il est possible que l'acquéreur ait lui-même
aliéné le bien. Tout dépendra alors du caractère de la sous aliénation :
- s’il s’agit de sous aliénation à titre gratuit, le sous-acquéreur est tenu de restituer le bien sans
recours contre la masse ;
- s’il s’agit de sous aliénation à titre onéreux : le sous-acquéreur est tenu de restituer si, au
moment de l’acquisition, il a eu connaissance de l'état de cessation de paiements ; il devra, dans
ce cas, produire au passif du débiteur.
Section 2: Les effets pour l’avenir : les atteintes aux prérogatives du débiteur
A partir du jugement, il va y avoir automatiquement dessaisissement ou assistance du débiteur,
selon que celui-ci est en L.B ou en R.J.
Paragraphe 1 : Le domaine du dessaisissement et de l'assistance
Selon l’article 53, al. 2 AU/PC, le jugement qui prononce la liquidation des biens emporte, de
plein droit, à partir de sa date et jusqu’à la clôture de la procédure, dessaisissement pour le débiteur
de l’administration de ses biens. A partir de cette date c'est le syndic qui va représenter le débiteur
pour l’accomplissement de tous les actes d’administration et de disposition.
L’article 52 AU/PC consacré au débiteur en redressement judiciaire, prévoit une mesure moins
contraignante : l’assistance. Il résulte de l’alinéa 1er de ce texte que le jugement qui prononce le
redressement judiciaire emporte, de plein droit, à compter de sa date, jusqu’à l’homologation du
concordat ou la conversion du redressement judiciaire en liquidation des biens, assistance
obligatoire du débiteur pour les actes concernant l’administration ou la disposition de ses biens.
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Le débiteur ne peut donc plus, à compter de cette date accomplir seul les actes d’administration et
de disposition ; il doit désormais être assisté par le syndic. Il faut une collaboration entre le débiteur
et le syndic, aucun d'eux ne pouvant agir seul. Cette nécessaire collaboration peut être source de
paralysie ; il suffit de songer à l’hypothèse où l’un veut accomplir un acte auquel l’autre refuse de
s’associer. C'est pourquoi l'Acte Uniforme a prévu en cas de blocage des solutions de sortie de
crise :
- si c'est le débiteur qui refuse de s'associer à certains actes envisagés par le syndic, celui-ci peut
obtenir du juge-commissaire, l'autorisation d'agir seul ; il en est ainsi lorsqu’il s’agit de prendre
des mesures conservatoires, de procéder au recouvrement des effets et des créances exigibles, de
vendre des objets dispendieux à conserver ou soumis à dépérissement prochain ou à dépréciation
imminente ;
- si c'est le syndic qui refuse son assistance, le débiteur ou les dirigeants sociaux (si la procédure
est ouverte contre une personne morale) ne pourraient pas agir seul ; ils ont cependant la possibilité
de demander au juge-commissaire de contraindre le syndic à apporter cette assistance ; le juge-
commissaire peut aussi être saisi par les contrôleurs.
Paragraphe 2 : L’étendue du dessaisissement ou de l'assistance
Il convient d’étudier les actes soumis au dessaisissement ou à l’assistance ainsi que les biens
concernés.
A. Biens concernés
Les biens sont non seulement les biens présents mais aussi les biens à venir, c’est à dire ceux que
le débiteur pourrait acquérir. La question s’est posée de savoir si les biens insaisissables sont
concernés. L’Acte Uniforme n'a rien prévu à ce sujet, mais on admet généralement que les actions
données au débiteur pour la défense des droits attachés à la personne ne sont pas concernées ; il en
est ainsi de manière générale des actions du débiteur tendant à mettre en œuvre les droits
extrapatrimoniaux : droit à l’honneur, droit au respect de la vie privée, etc. Pour ce type d’action
le débiteur n'a besoin ni d'assistance ni de représentation.
B. Actes concernés
Ce qui est interdit au débiteur agissant seul (en cas de redressement judiciaire) ou lui-même (en
cas de liquidation des biens) ce sont les actes d’administration et de disposition.
Rien ne s’oppose donc à ce que le débiteur accomplisse seul ou lui-même les actes conservatoires.
Cela résulte clairement de l’article 52, al. 2 AU/PC consacré au débiteur en redressement
judiciaire ; selon ce texte le débiteur peut accomplir valablement seul les actes de gestion courante
et les actes conservatoires. L'article 53, al. 2 AU/PC qui fixe le sort du débiteur en liquidation des
biens va dans le même sens ; après avoir indiqué que le débiteur en liquidation des biens est
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représenté par le syndic pour certains actes, ce texte a réservé expressément les actes
conservatoires.

Chapitre 2 : LES EFFETS A L'EGARD DES CREANCIERS ET DES REVENDIQUANTS

Dès que le jugement est rendu, les créanciers sont constitués en une masse; il va y avoir une
modification leurs droits individuels.
Section 1 : Constitution des créanciers en une masse
Le jugement d'ouverture constitue automatiquement les créanciers en une masse dotée de la
personnalité morale et représentée par le syndic qui seul agit en son nom et peut l’engager.
Paragraphe 1 : La composition de la masse
Tous les créanciers ne sont pas dans la masse. Seuls sont dans la masse les créanciers dont le droit
est né avant le jugement déclaratif à la condition que ce droit ne soit pas déclaré inopposable.
Ne sont donc pas des créanciers dans la masse les créanciers dont le droit est né avant le jugement
mais d'une activité irrégulière ; ne sont pas non plus créanciers dans la masse ceux dont le droit est
né après le jugement d’une activité irrégulière. Ces créanciers appelés créanciers hors de la masse
sont les sacrifiés de la procédure.
60
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Il y a, à côté des créanciers dans la masse et des créanciers hors de la masse, les créanciers de la
masse que l’Acte uniforme appelle parfois « créanciers contre la masse » ; ce sont les créanciers
dont le droit est né après le jugement mais d'une activité régulière du débiteur ou du syndic. Ils ne
sont pas affectés à la discipline collective imposée aux créanciers dans la masse. Ce traitement de
faveur est lié au fait que c’est eux qui ont permis la continuation de l’activité du débiteur.
Paragraphe 2 : La personnalité morale de la masse
L’article 72, al. 1 AUPC prévoit que la masse est « représentée par le syndic qui, seul, agit en
son nom et dans l’intérêt collectif et peut l’engager ». De cette disposition on peut déduire la
reconnaissance de la personnalité de la masse, car « …elle appartient à tout groupement doté d’un
organe d’expression collective et constitué pour la défense d’intérêts licites, dignes, par suite d’être
juridiquement reconnus et protégés »111.
Cependant, en cas de carence du syndic, tout créancier contrôleur peut agir dans l’intérêt collectif,
après une mise en demeure du syndic restée infructueuse pendant une période de vingt et un (21)
jours112. Les créanciers contrôleurs deviennent en quelque sorte des organes non institués mais
subsidiaires, puisqu’ils peuvent agir en lieu et place en cas de carence du syndic pour suppléer ce
dernier.
La masse des créanciers a une prérogative essentielle, c’est l’hypothèque légale de la masse ; c’est
ce que prévoit l’article 74 AU/PC selon lequel le jugement d’ouverture emporte de plein droit une
hypothèque que le greffier est tenu de faire inscrire immédiatement sur les biens immeubles du
débiteur et sur ceux qu’il va acquérir au fur et à mesure de leur acquisition. En effet, aux termes
de l’article 210 AUS « L’hypothèque légale de la masse des créanciers prévue par l’Acte uniforme
portant organisation des procédures collectives d’apurement du passif est inscrite dans le délai
de dix jours à compter de la décision judiciaire d’ouverture de la procédure collective à la requête
du greffier ou du syndic ».
Section 2 : La modification des droits individuels des créanciers
Il y a des règles applicables à tous les créanciers ; il en existe d’autres qui ne sont applicables qu’à
certains types de créanciers : salariés, bailleurs d'immeuble, etc.
Paragraphe 1 : Le sort commun de tous les créanciers
C’est la suspension des poursuites individuelles, la déchéance du terme et l’arrêt du cours des
intérêts.

111
V. Ch. Réunies C.cass. 28 janvier 1954, D. 1954, 217, note Levasseur.
112
V. AUPC, Art. 72, al. 2.

61
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A. La suspension des poursuites individuelles


A partir du jugement qui prononce le redressement judiciaire ou la liquidation des biens, aucun
créancier dans la masse ne peut exercer une action visant à faire condamner le débiteur au paiement
d’une somme d’argent ou pour obtenir la résolution d’un contrat pour défaut de paiement d’une
somme d’argent.
Dans l’Acte uniforme, cette règle de la suspension des poursuites n’est pas réservée aux créanciers
chirographaires et aux créanciers munis d’un privilège général ; elle s’applique aussi, en cas de
redressement judiciaire, aux créanciers pour toute action contre les personnes physiques
coobligées, ou ayant consenti une sûreté personnelle ou affecté ou cédé un bien en garantie ( c’est
à dire des sûretés réelles spéciales) à compter du jugement d’ouverture et durant l’exécution du
concordat de redressement. Ces créanciers pourront, toutefois prendre des mesures
conservatoires113.
Aussi, il y a une extension du domaine d’application de la suspension des voies d’exécution. L’art.
75 AUPC/AP prévoit également que la décision d’ouverture arrête ou interdit toute procédure
d’exécution de la part des créanciers dans la masse tant sur les biens meubles que sur les biens
immeubles ainsi qu’ à « toute procédure de distribution n’ayant pas produit un effet attributif
avant la décision d’ouverture ».114 Une telle règle implique non seulement que la suspension
s’applique dans le cas d’un séquestre conventionnel investi avant l’ouverture de la procédure
collective d’une mission de distribution de fonds provenant de la vente d’un bien appartenant au
débiteur, mais aussi que l’élément de référence pour savoir si une procédure de saisie est ou non
suspendue soit désormais la date de répartition du prix de vente entre les créanciers et non plus la
date à laquelle le bien saisi est sorti du patrimoine du débiteur115.
L’ouverture de la procédure collective interrompt les instances en cours jusqu’à ce que le créancier
poursuivant ait produit sa créance. Ces instances sont alors reprises de plein droit mais uniquement
en vue de constater les créances et fixer leur montant.
Échappent à la suspension deux catégories d’actions :
- d’une part les actions en nullité;

113
V. AUPC, Art. 75-1.
114
V. AUPC, Art. 75, al. 2.
115
Une telle sortie ne pouvant cependant plus être remise en question par la suspension des poursuites si elle a eu
lieu avant l’ouverture de la procédure collective. C’est ainsi que la saisie attribution échappe à la règle de
l’interdiction des poursuites individuelles et des paiements lorsque la signification de l’acte de saisie au tiers avant
l’ouverture de la procédure collective de redressement judiciaire ou de liquidation des biens. ( pour l’effet attributif
de la saisie-attribution des créances de sommes d’argent voir art.154 AUPSRVE)

62
Animateur Pr. Moussa Gueye Agrégé de Droit privé

- d’autre part les actions tendant à faire reconnaître les droits définitivement rejetés, ou admis
provisoirement ou partiellement par le juge-commissaire lorsqu'elles sont intentées après la
production des créances. Mais dans ce cas, ces actions ne sont possibles que lorsque le débiteur
est assisté du syndic en cas de redressement judiciaire ou représenté par le syndic en cas de
liquidation des biens116.
B. La déchéance du terme
Le jugement qui prononce la liquidation des biens rend exigibles, à l’égard du débiteur, les dettes
non échues. L’objectif de cette procédure étant de réaliser l’intégralité de l’actif du débiteur pour
apurer le passif, il est nécessaire que toutes les dettes soient immédiatement exigibles. La
déchéance du terme ne se produit pas en cas de redressement judiciaire, dès lors qu’il peut y avoir
des délais qui dépassent les termes117.
Lorsque la dette est exprimée dans une monnaie autre que celle du lieu où la liquidation des biens
est prononcée, cette dette sera convertie en monnaie du lieu du prononcé de la décision et cette
conversion se fera au cours du change à la date de ce prononcé118.
C. L’arrêt du cours des intérêts
Le jugement d’ouverture arrête, à l’égard de la masse, le cours des intérêts, de toutes les créances,
qu’elles soient ou non garanties par une sûreté. Cette règle appelle deux observations. D’une part
les créances cessent de produire des intérêts, mais seulement à l'égard de la masse, ce qui veut dire
que le débiteur n'est pas déchargé de l'obligation de payer des intérêts, même s’il ne doit en
effectuer le paiement qu’à la fin des opérations. D’autre part l’arrêt du cours des intérêts ne
concerne pas seulement, contrairement à ce qui se passait sous l’empire du code des obligations
civiles et commerciales du Sénégal, les créances non garanties par une sûreté réelle spéciale ; il
concerne toutes les créances.
Après avoir formulé la règle, le législateur a apporté, dans l’article 77, al. 1 AU/PC in fine, une
atténuation. Il a prévu dans ce texte que relativement aux contrats de prêt conclu pour une durée
égale ou supérieure à un an ou aux contrats assortis d’un paiement différé d’un an ou plus, le cours
des intérêts se poursuit si la décision a prononcé le redressement judiciaire.
Cette règle profite aussi aux personnes physiques coobligées ou ayant consenti une sûreté
personnelle ou ayant affecté ou cédé un bien en garantie.
Paragraphe 2 : Le sort particulier de certains créanciers

116
V. AUPC, Art. 75, al. 5.
117
V. AUPC, Art. 76.
118
V. AUPC, Art. 76-1.

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Certains créanciers sont soumis à des règles particulières: il s’agit des créanciers qui ont plusieurs
coobligés et des créanciers munis de sûreté réelle spéciale.

A. Situation des créanciers qui ont plusieurs coobligés


L'Acte Uniforme a réglé, dans les articles 91 à 94, la situation des coobligés (codébiteurs solidaires
ou débiteur garanti par une caution) ayant tous cessé leurs paiements. Il résulte de ces textes que
lorsqu’un créancier a plusieurs coobligés qui sont tous en état de cessation des paiements, il peut
produire dans toutes les masses pour le montant total de sa créance.
Si un des coobligés, avant la cessation des paiements, avait payé un acompte, dans ce cas, le
créancier produira sous déduction de cet acompte ; dans ce cas, le codébiteur qui a payé cet
acompte et qui est devenu créancier des autres pour ce montant sera compris dans la même masse
pour le paiement effectué. Si un recours est possible pour les paiements faits avant la cessation de
paiements, aucun recours n’est ouvert aux coobligés en redressement judiciaire ou en liquidation
des biens pour paiement de dividendes pendant la procédure. Il n’en serait autrement que si le
cumul des dividendes dépassait le montant total des créances en principal et accessoires. Dans un
tel cas de figure, l’excédent est dévolu, suivant l’ordre des engagements à ceux des coobligés qui
auraient les autres pour garants ; à défaut d’ordre, l’excédent est dévolu au marc le franc.
B. Créanciers munis de sûreté réelle
Certains créanciers munis de sûreté réelle sont soumis à des règles contenues pour l’essentiel dans
les articles 73 et suivants AU/PC.
1. Arrêt du cours des inscriptions
Cette règle signifie qu'à partir du jugement, il ne sera plus possible de procéder à des inscriptions
pour les sûretés soumises à cette formalité. Cette règle qui poursuit l’institution d’un traitement
égalitaire des créanciers est cependant assez sévère puisqu’elle concerne des sûretés régulièrement
obtenues, mais qui n’ont pas simplement fait l’objet d’une publicité à la date du jugement
d’ouverture.
En matière immobilière sont soumises à publicité les hypothèques, même s’il s’agit d’une
inscription provisoire ou définitive. En matière mobilière, sont soumis à publicité le nantissement
de fonds de commerce, du matériel, de l’outillage, le warrant, mais aussi certains privilèges
généraux de la douane, du trésor et de la sécurité sociale lorsqu’ils atteignent une certaine somme.
2. La situation des salariés
Les créances résultant du contrat de travail et du contrat d’apprentissage sont garanties par deux
privilèges en cas de redressement judiciaire ou de liquidation des biens. Ces privilèges sont réglés

64
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par le Code du travail (article L 119 CT du Sénégal), l’AUPC (article 96) et par l’AUS (article
180).
Il y a en premier lieu un privilège général qui garantit les sommes dues aux salariés pour exécution
ou résiliation de leur contrat durant la dernière année précédant l'ouverture de la procédure (article
180 AUS).
Il y a par ailleurs le privilège qui garantit la fraction incessible et insaisissable du salaire. Ce
privilège donne une priorité absolue au salarié ; c’est pourquoi on l’appelle le super privilège.
Il ne suffit pas de donner aux salariés un droit de préférence. Il faut aussi leur assurer un paiement
rapide ; c'est la raison pour laquelle l'Acte Uniforme prévoit que les sommes qui correspondent à
ce super privilège doivent être payées dans les 10 jours. S'il n’y a pas de fonds nécessaires pour le
paiement, le syndic va l'effectuer dès les premières rentrées de fonds.
Il se peut que ces rentrées de fonds soient le fruit d’un prêt, alors ce prêteur va subroger les salariés
et doit être remboursé dès la rentrée des fonds nécessaires sans qu’aucune autre créance ne puisse
y faire obstacle119.
3. Le bailleur d'immeuble
L’article 97 AUPC pose le principe selon lequel l’ouverture de la procédure collective n’entraîne
pas de plein droit la résiliation du bail des immeubles affectés à l’activité professionnelle du
débiteur, y compris les locaux qui, dépendant de ces immeubles servent à l’habitation du débiteur
ou de sa famille. Toute stipulation contraire est réputée non écrite.
L’ouverture d’une procédure collective ne peut donc constituer en soi et à elle seule, une cause de
résiliation du bail, ni de résiliation judiciaire ni conventionnelle contenue dans le contrat de bail.
Cependant, le bailleur peut demander la résiliation du bail pour inexécution par le débiteur de ses
obligations.
Si la demande de résiliation a été introduite avant la cessation des paiements, le bailleur peut
poursuivre la procédure après le jugement déclaratif, sans être frappé de la suspension des
poursuites individuelles.
S’il n’avait pas encore introduit sa demande en résiliation pour une cause antérieure au jugement
déclaratif, il peut le faire dans le délai de trente (30) jours suivant la publicité du jugement dans un
JAL120.

119
V. AUPC, Art. 96.
120
V. AUPC, Art. 97, al. 5.

65
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Si la cause de résiliation survient après le jugement, le bailleur a un délai de 15 jours pour former
sa demande, à compter du jour de la connaissance de la cause de résiliation (article 97, al. 6
AUPC).
Cependant, il existe pour le syndic en cas de liquidation des biens ou le débiteur assisté du syndic
en cas de redressement judiciaire, une faculté de résilier ou de renouveler le bail ou même de le
céder. Lorsque le syndic ou le débiteur assisté décide de poursuivre le contrat, il a l’obligation de
respecter les stipulations du contrat de bail.
Selon l’article 98 AUPC, le bailleur a un privilège qui garantit les 12 derniers mois de loyers échus
avant le jugement et les 12 mois de loyers échus après le jugement ou à échoir après le jugement.
S'il y a résiliation du contrat de bail, ce privilège garantit également les dommages et intérêts qui
pourront lui être alloués.
4. Les créanciers gagistes, nantis ou hypothécaires
Il s’agit de tous créanciers munis de sûretés réelles spéciales.
a. Créancier gagiste ou nanti
Lorsqu'il s’agit d’un créancier gagiste, il peut conserver le bien et rester passif, ce qui donne une
position très forte notamment lorsque la valeur du bien est supérieure au montant de la créance.
C’est pourquoi, l’acte uniforme a donné au syndic, le pouvoir de demander la restitution du bien
par le créancier mais c’est à une double condition ; autorisation du juge-commissaire et le
remboursement préalable de la dette due au créancier.
En cas de liquidation des biens, si dans les trois mois le syndic n’a pas procédé au retrait du gage
ou du nantissement ou introduit une procédure de réalisation du gage ou du nantissement, le
créancier a la possibilité de reprendre ou d’exercer son droit de poursuite individuelle et poursuivre
ainsi la réalisation de sa garantie (voir art149 AUPC/AP).
b. Créancier hypothécaire
En cas de liquidation des biens, le syndic a trois (3) mois pour réaliser l'immeuble hypothéqué
(vente sur saisie ou vente par adjudication amiable ou de gré à gré). Si dans le délai de trois mois
il n’entreprend pas une procédure de réalisation forcée, le créancier a la possibilité d’exercer ses
poursuites individuelles ( art.150 AUPC/AP).

Section 3 : La situation des revendiquants


Il s’agit de personnes qui se prétendent titulaires de droits réels sur des biens détenus par le
débiteur.

Paragraphe 1 : Les revendications visées par les articles 102 et 103 AU/PC
66
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Il y a, d’abord, celle qui est prévue par l'article 102 AU/PC ; c’est la revendication des effets de
commerce. Selon cet article 102, peuvent être revendiqués, les effets de commerce remis à
l’encaissement ou autres titres non payés qui ont été remis par leur propriétaire au débiteur pour r
pour être spécialement affectés à des paiements déterminés. Ces revendications ne sont possibles
que si ces effets ou titres se trouvent encore en nature dans le patrimoine du débiteur.
Il y a ensuite les revendications prévues par l’article 103 ; ce texte prévoit deux cas :
Il s’agit d’abord de la revendication des marchandises et objets mobiliers remis au débiteur soit
pour être revendus pour le compte du propriétaire, soit à titre de dépôt, de mandat, de prêt ou de
location ou de tout autre contrat à charge de restitution. La revendication n’est possible que si les
biens se retrouvent en nature.
Il s’agit ensuite de la revendication des marchandises et objets mobiliers vendus avec une clause
de réserve de propriété. Là aussi il faut que les biens se retrouvent en nature dans le patrimoine du
débiteur. Si les biens ont été vendus, le vendeur ne pourra revendiquer que le prix ou la partie du
prix non encore payée.
Pour exercer ces différentes actions en revendication, certaines conditions assez simplifiées et
prévues par les articles 101 et s. AU/PC doivent être respectées. Le revendiquant doit adresser
une demande amiable au syndic dans un délai de quatre-vingt-dix (90) jours suivant la deuxième
insertion de la décision d’ouverture de la procédure de redressement judiciaire ou de liquidation
des biens dans un journal d’annonces légales de l’État partie concerné. Le syndic a la possibilité
d’acquiescer à la demande amiable qui lui est faite121. Cela traduit, pour le législateur OHADA,
la volonté de simplification de la procédure de revendication.
Aux termes de l’article 101-3 AUPC, le revendiquant est dispensé du respect de ces délais si le
contrat ayant pour objet le bien revendiqué a été publié, mais on peut ici noter que cette dispense
s’appliquera systématiquement dans le cas de la réserve de propriété puisque celle-ci doit
nécessairement être publiée pour être opposable aux tiers122. Dans ce cas de figure, la revendication
se fait par lettre au porteur contre récépissé ou par lettre recommandée avec demande d’avis de
réception ou par tout moyen laissant trace écrite adressé au syndic qui peut acquiescer cette
demande. Même en l’absence de demande préalable en restitution, le juge-commissaire peut
également être saisi à cette même fin par le syndic.
Si le syndic refuse ou s’il ne répond pas à cette demande amiable dans un délai de trente jours
courant à compter de la réception de la demande, le revendiquant peut alors saisir le juge-

121
V. AUPC, Art. 101-1, al. 2.
122
V. AUS, Art. 74.

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commissaire d’une action en revendication dans un délai de trente jours qui court, lui, « à compter
de l’expiration du premier délai ou de ce refus »123. Si le syndic refuse avant l’expiration du délai
de trente jours qui lui est imparti pour répondre, le délai de trente jours imparti alors au
revendiquant pour agir court à compter de ce refus et non, comme c’est le cas en droit français, à
compter de l’expiration du premier délai de trente jours.
Le juge-commissaire saisi statue par voie d’ordonnance dans un délai de huit (08) jours à compter
de sa saisine et son ordonnance est déposée au greffe qui la communique au syndic et la notifie
aux parties. Et sans délai, le juge-commissaire doit faire communiquer son ordonnance au
ministère public.
L’ordonnance du juge commissaire peut, dans un délai de huit (08) jours à compter de sa
notification ou sa communication, faire l’objet d’un recours devant le tribunal compétent qui doit
statuer (l’examiner) à la première audience utile, les intéressés et le syndic étant avisés124.
Si le juge-commissaire ne statue pas dans le délai qui lui est imparti, le tribunal compétent peut
être saisi dans les mêmes conditions, à la demande d’une partie ou du ministère public.
Paragraphe 2 : Les droits du vendeur de meuble
En droit commun, le vendeur de meubles a plusieurs garanties à son actif : le droit de rétention, de
revendication et de préférence Mais la situation est différente lorsque son cocontractant est déclaré
en cessation de paiements. Ainsi, pour déterminer les droits du vendeur de meuble, il faut
distinguer trois cas de figure.
► Le vendeur n'a ni livré, ni expédié au débiteur ou à un tiers agissant pour son compte : dans ce
cas, il exerce son droit de rétention. Cette rétention peut être exercée même si le prix est stipulé
payable à crédit et même si le transfert de propriété est déjà opéré (article 104 AUPC).
► Le vendeur a expédié les marchandises ; dans ce cas il peut les revendiquer tant que la tradition
n’en a pas été faite dans les magasins du débiteur ou dans ceux d’un commissionnaire chargé de
les vendre pour son compte ou d’un mandataire chargé de les recevoir. Il faut cependant réserver
le cas où les marchandises ont été revendues sans fraude sur facture ou sur titre de transport
régulier ; dans ce cas il ne peut y avoir d’action en revendication (article 105 AUPC).
► Le vendeur a livré et le débiteur a reçu les marchandises. Dans ce cas le vendeur ne peut pas
en principe exercer l'action en revendication. Il ne peut réclamer que le prix de vente ; il est en
quelque sorte réduit à la situation d’un créancier chirographaire.
L'action en revendication serait cependant possible dans deux cas :

123
V. AUPC, Art. 101-1, al. 3.
124
V. AUPC, Art. 101-2.

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- S'il y avait une clause de réserve de propriété, à la condition que les marchandises que les
marchandises se retrouvent en nature dans le patrimoine du débiteur (hypothèse déjà envisagée)
- S’il y avait résolution de la vente avant le jugement déclaratif (par l’effet d’une clause
résolutoire ou d’une décision judiciaire) ou résolution de la vente après le jugement déclaratif mais
pour une action qui a été introduite avant (article 106, al. 2 AUPC).
Section 4 : Les droits du conjoint du débiteur
La situation du conjoint est soigneusement réglementée car il faut éviter les fraudes entre époux.
C’est pourquoi le législateur a consacré des dispositions aux reprises et avantages matrimoniaux.
Paragraphe 1 : Reprises
Le conjoint peut revendiquer contre la masse ses biens personnels en en établissant la consistance,
conformément à son régime matrimonial (article 99, al. 1 AUPC). Quant à la masse elle pourra
demander que les acquisitions faites par le conjoint du débiteur soient remises à l’actif si elle
prouve que les biens acquis l’ont été au moyen des valeurs fournies par ce dernier. Cette preuve
se fait par tous moyens (article 99, al. 2 AUPC).
Le conjoint qui reprend ses biens personnels le fait à charge des dettes et sûretés dont les biens
sont légalement grevés (article 99, al. 3 AUPC).
Paragraphe 2 : Avantages matrimoniaux
Selon l’article 100 AUPC l'époux dont le conjoint exerçait une activité professionnelle
indépendante, civile, commerciale, artisanale ou agricole au moment de la célébration du mariage
ou l’a fait dans l'année qui a suivi la célébration du mariage ne peut exercer aucune action en raison
des avantages qui lui sont consentis dans le contrat de mariage ou pendant le mariage.
Les créanciers quant à eux, ne peuvent se prévaloir des avantages faits par l’un des époux à
l’autre.
Un avantage matrimonial est un profit pour un époux qui résulte du fonctionnement du régime
matrimonial. Ce sont des libéralités faites entre époux au moment du mariage. Ces libéralités sont
constatées par un acte notarié ; les créanciers dans la masse ne peuvent les ignorer d’où leur
opposabilité à leur égard.
En cas de vente des biens appartenant à la communauté, le conjoint du débiteur en redressement
judiciaire ou en liquidation des biens est entendu ou dûment convoqué par lettre au porteur contre
récépissé ou par tout autre moyen laissant trace écrite avant toute décision autorisant une telle
vente125. Cette exigence vise à informer le conjoint et aussi à lui donner la possibilité d’exercer

125
V. AUPC, Art. 100-1.

69
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son droit à l’opposition. C’est pourquoi nous supposons que le non-respect de cette formalité
entraînera la nullité de la vente à la demande du conjoint dont le droit n’a pas été respecté.

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Titre 3 : LA PHASE PREPARATOIRE A LA SOLUTION FINALE


Il s’agit de la phase de la gestion de la procédure. C’est la période située entre le jugement
déclaratif et la solution finale. Cette phase intermédiaire est animée par un certain nombre
d’organes. Ainsi, on distingue les organes judiciaires et les organes extra judiciaires.
Parmi les organes judiciaires, on a le tribunal, le juge-commissaire, chargé d’assurer le
déroulement régulier la procédure et enfin le ministère public qui veille à la préservation de
l’intérêt général ou collectif.
Les organes extrajudiciaires sont les syndics qui ne peuvent dépasser le nombre de 3. Ce sont les
mandataires salariés126 de justice qui engagent leur responsabilité en cas de faute127. Ils ont pour
rôle de représenter ou d’assister le débiteur et les contrôleurs choisis parmi les créanciers.
Tous ces organes ont pour rôle d’entreprendre certaines opérations, susceptibles de voies de
recours.
Ici il y a deux types d'opérations : les opérations relatives au passif et des opérations relatives à
l'actif.
Chapitre 1 : LES OPERATIONS RELATIVES AU PASSIF
Il s’agit de connaître l'étendue des dettes du débiteur. Il y a deux types d'opérations de cette nature
: la production et la vérification des créances.
Section 1 : La production des créances
Paragraphe 1 : L’obligation de produire (articles 78 et 79 AUPC)
Tout créancier est obligé de produire sa créance auprès du syndic et le délai est de 60 jours après
la 2ème insertion dans un journal d’annonces légales (J.A.L). Ce délai étant porté à 90 jours pour
les créanciers domiciliés hors du territoire national du lieu d’ouverture de la procédure.
Cette obligation de production pèse aussi bien sur les créanciers chirographaires que sur ceux
munis de sûretés et même le créancier qui a introduit, avant la décision d’ouverture, une procédure
en condamnation en vertu d’un titre ou, à défaut de titre, pour faire reconnaître son droit. Échappent
à cette obligation de production les créanciers d’aliments.

126
Leur rémunération est fixée au Sénégal, par l’arrêté ministériel n° 7934 en date du 31 mai 2016, relatif au
barème de rémunération des mandataires judicaires, J.O.R.S n° 6937, numéro spécial du 02 juin 2016, pp. 735 et
s.
127
Le statut des mandataires judicaires est organisé, au Sénégal, par le Décret n° 2016- 570 du 27 avril 2016,
J.O.R.S n° 6931, numéro spécial du 28 avril 2016, pp. 599 et s.

71
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Cette obligation ne pèse plus sur les titulaires d’un droit de revendication qui, dans l’ancienne
législation, devaient dire s’ils entendaient exercer leur droit de revendication faute de quoi, ils
étaient considérés comme créanciers chirographaires. Cette suppression est heureuse s’agissant
des actions en revendication en général, mais dans le cas particulier de la propriété-sûreté, elle
laisse à la jurisprudence le soin de décider si, dans le silence des textes, le caractère accessoire de
la sûreté impose une production de la créance pour que la propriété-sûreté qui la garantit puisse
être opposée à la procédure collective ou si, au contraire, cette modification doit être interprétée
comme l’expression d’une volonté législative de totalement supprimer l’obligation faite aux
revendiquants de produire, y compris dans le cas des propriétés-sûretés.
Le report du point de départ du délai de production d’une créance à la date de réception d’un
avertissement personnel d’avoir à produire donné par le syndic, qui ne concernait antérieurement
que les créanciers titulaires d’une sûreté publiée, s’applique désormais également à tous les
cocontractants ayant publié leur contrat conclu avec le débiteur en difficulté128, ce qui correspond
là à une volonté législative plus générale de diminution des restrictions apportées aux droits des
créanciers et des cocontractants du débiteur.
La production de la créance interrompt la prescription extinctive de la créance. Le syndic a
obligation d’avertir les créanciers munis de sûretés publiées et inscrits au bilan, par lettre
recommandée avec accusé de réception.
Paragraphe 2 : Les formes de la production (article 80 AUPC)
Les créanciers remettent au syndic une déclaration de créances indiquant le montant de la créance
due au moment de la procédure, ainsi que les délais d’échéance. Ils doivent aussi indiquer les
sûretés. Ils doivent y ajouter tous les éléments de nature à prouver l’existence ou le montant de la
créance si elle ne résulte pas d’un titre.
A cette déclaration, on doit y joindre sous bordereau, les documents justificatifs qui peuvent être
produits en copie et le syndic donne aux créanciers récépissé de leur dossier.
La production de la créance peut être faite par le créancier ou par tout préposé ou mandataire de
son choix.
Paragraphe 3 : La sanction
Si un créancier ne produit pas dans ces délais, il est forclos et de fait exclu des dividendes et des
répartitions. Sous l’empire du texte de 1998, s’il s’agissait de redressement judiciaire, à défaut de
production jusqu’à l’échéance concordataire, la forclusion entraînait l’extinction de la créance.
Cette excessive sanction a été abandonnée par le législateur OHADA au profit d’une simple

128
V. AUPC, Art. 79, al. 1.

72
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inopposabilité à la masse et au débiteur pendant la procédure de redressement judiciaire ou de


liquidation des biens, ainsi que pendant la période d’exécution d’un éventuel concordat de
redressement judiciaire129. Un tel changement est important et a, par exemple, pour conséquence
qu’en cas de liquidation des biens le créancier négligent pourra agir en paiement contre la caution,
à la condition du moins que les juridictions des pays membres de
l’OHADA n’admettent pas, comme l’a fait la Cour de cassation française, que la caution puisse
alors opposer au créancier le bénéfice de subrogation130.
Mais un créancier peut être relevé de la forclusion par le juge-commissaire saisi par voie de
requête. Dans ce cas, il faudra démontrer que sa défaillance n’est pas due à sa faute (article 83, al.
2 et 3 AUPC).
Les frais de l’instance en relevé de forclusion sont à la charge du créancier défaillant. Et mention
est portée par le greffier sur l’état des créances qu’il a été relevé de la forclusion (article 83, al. 4
AUPC)
Lorsqu’un créancier est relevé de la forclusion, il ne pourra pas prétendre aux dividendes déjà
distribués ; il ne participera qu’aux dividendes et répartitions postérieures (article 83, al. 5
AUPC).
Section 2 : La vérification des créances
Paragraphe 1 : Obligation de vérifier et avis du syndic (articles 84 et 85 AUPC)
Quelle que soit l’importance de l’actif et du passif, la vérification est obligatoire. Cette mission
incombe au syndic. Elle se fait au fur et à mesure et en présence du débiteur ou du contrôleur. Elle
a lieu dans les quatre (04) mois suivant la deuxième insertion de la décision d’ouverture dans un
JAL.
Cependant, cette vérification n’est pas possible en cas de créances chirographaires, s’il apparaît
que le produit de la réalisation de l’actif sera entièrement absorbé par les créances privilégiées de
l’argent frais, ainsi que les frais de justice et les créances super privilégiées, à moins que, s’agissant
d’une personne morale, il y ait lieu de mettre à la charge des dirigeants sociaux de droit ou de fait
tout ou partie du passif dans le cadre d’une action en comblement du passif131. C’est aussi le cas,

129
V. AUPC, Art. 83.
130
V. Cass. com., 19 févr. 2013, n° 11-28.423, RTD civ. 2013, p. 416, obs. P. Crocq, Gaz. Pal. 20-21 mars 2013,
p. 20, obs. M.-P. Dumont-Lefrand, D. 2013, p. 565, obs. A. Lienhard, RLDC 2013/103, p. 34, obs. G. Marraud
des Grottes, Banque et droit 2013, n° 149, p. 44, obs. E. Netter, JCP E 2013, 1216, n° 7, obs. Ph. Pétel, Dr. et
procéd. 2013, Cahier Droit des entreprises en difficulté, p. 6, obs. Ph. Roussel Galle.
131
V. AUPC, Art. 146-1.

73
Animateur Pr. Moussa Gueye Agrégé de Droit privé

lorsque les fonds manquent pour entreprendre ou terminer les opérations de la liquidation des
biens132.
Le syndic vérifie si la créance est acceptée dans sa totalité : si la créance ou la sûreté est contestée,
le syndic doit en aviser le juge-commissaire et le créancier ou le revendiquant par lettre au porteur
contre récépissé ou par lettre recommandée avec demande d’avis de réception ou par tout moyen
laissant trace écrite, en précisant dans cet avis l’objet et la nature de sa contestation.
Dans le cadre des procédures collectives simplifiées, la procédure de vérification des créances est
allégée, car la vérification des créances est limitée aux seules créances susceptibles de venir en
rang utile, sauf les créances salariales qui devront être vérifiées. En théorie, il peut paraître difficile
pour le syndic de déterminer, a priori, les créances qui viendront en rang utile. Mais en réalité,
s’agissant de « petites entreprises» disposant d’un actif assez faible, il devrait être aisé de
déterminer les créances qui ont une chance d’être payées133.
Le créancier ainsi avisé a un délai de trente (30) jours, à compter de la réception de cet avis, pour
fournir ses explications écrites ou verbales au juge-commissaire. Ce délai court à partir de la
réception de l’avis. Passé ce délai, il ne peut plus contester la proposition du syndic. Ce délai est
porté à soixante (60) jours pour les créanciers vivant hors du lieu d’ouverture de la procédure.
Paragraphe 2 : L’arrêté de l’état des créances
Dès que les délais prévus sont expirés, le syndic dresse un état des créances contenant ses
propositions d’admission avec indication de la nature chirographaire ou de sûreté ainsi admise.
Le créancier dont seule la sûreté est contestée est admis comme créancier chirographaire de façon
provisoire.
L’état des créances est signé et vérifié par le juge-commissaire qui mentionne face à chaque
créancier la nature chirographaire ou garantie de la créance. Il indique aussi si une instance est en
cours ou si la contestation ne relève pas de sa compétence.
Le juge-commissaire ne peut rejeter en tout ou partie une créance ou se déclarer incompétent
qu’après avoir appelé et entendu le créancier (article 86 AUPC).
L’arrêté des créances est déposé au greffe et le greffier avertit aussitôt les créanciers du dépôt de
l’arrêté des créances par une insertion au journal d’annonces légales (JAL) et par courrier. Il doit
aviser les créanciers dont la créance a été rejetée qu’ils peuvent faire des réclamations (article 87
AUPC).
Paragraphe 3 : La réclamation des créanciers

132
V. AUPC, Art. 173.
133
V. AUPC, Art. 179-7.

74
Animateur Pr. Moussa Gueye Agrégé de Droit privé

Les créanciers dont les prétentions ont été repoussées peuvent formuler des réclamations par voie
d’opposition contre la décision du juge-commissaire. Cette opposition, si elle n’est pas faite dans
le délai de quinze (15) jours, la décision du juge-commissaire est irrévocable. Par contre si
l’opposition a été faite dans les délais, le greffier, renvoie l’affaire devant le tribunal pour qu’elle
soit jugée. Si ce tribunal s’estime incompétent, le créancier devra être admis de façon provisoire
jusqu’au vidé du contentieux par la juridiction compétente. C’est au créancier de saisir le tribunal
compétent (art 88, 89 et 90 AUPC).

Chapitre 2 : LES OPERATIONS RELATIVES A L'ACTIF


Il y a des mesures conservatoires et des mesures d'administration de l'actif.
Section 1 : Les mesures conservatoires
Selon l’article 54, al. 1 AU/PC, le syndic est tenu dès sa rentrée en fonction d’accomplir tous les
actes nécessaires pour la conservation des droits du débiteur contre ses débiteurs (droits
personnels).
Des secours doivent être accordés au débiteur (article 64 AUPC) il y aura immobilisation des
droits sociaux des dirigeants ou de ceux qui se sont immiscés dans la gestion (article 57 AUPC).
Les mesures destinées à fixer la consistance de l’actif sont au nombre de trois (3). Elles sont
destinées à éviter la disparition des biens.
Paragraphe 1 : La remise des livres et de la correspondance
75
Animateur Pr. Moussa Gueye Agrégé de Droit privé

L’article 55 AUPC prévoit que dans les trois (03) jours du jugement déclaratif, le débiteur doit
présenter au syndic ses livres comptables en vue de leur examen et de leur clôture, car il ne faut
plus qu’il y ait inscription. Si les livres sont entre les mains d’un tiers, celui-ci doit les remettre au
syndic sur sa demande ; donc le tiers détenteur ne peut pas exercer son droit de rétention sur ces
livres.
Même les lettres adressées au débiteur sont remises au syndic. Ce dernier ouvre ces lettres en
présence du débiteur et celles qui ont un caractère personnel lui sont restituées (article 56 AUPC).
Paragraphe 2 : L’apposition des scellés (article 59 AUPC)
Elle n’est pas obligatoire pour le syndic, il appartient au tribunal statuant sur le jugement déclaratif
de prescrire l’apposition de scellés sur tout meuble ou caisse susceptible de contenir des valeurs
ou des informations précieuses sur l’étendue de l’actif.
Il pourra également demander l’apposition des scellés sur les biens des dirigeants ou des associés
indéfiniment et solidairement responsables, car le débiteur peut organiser la distraction de ces
biens.
Les objets susceptibles de faire l’objet d’apposition de scellés sont énumérés par la loi (caisses,
coffres, porte feuilles, livres, papiers, meubles, effets, magasins et comptoirs).
Il y a des objets qui sont soustraits de l’opération ; il s’agit des objets mobiliers indispensables au
débiteur et à sa famille, des objets soumis à dépérissement prochain ou à dépréciation imminente,
des objets nécessaires au débiteur pour l’exploitation de l’entreprise lorsque la continuation de son
activité est autorisée (article 60 AUPC).
De la même manière, sont extraits des scellées et remis au syndic par le juge-commissaire, des
livres de commerce et documents comptables et les effets en portefeuilles à courte échéance ou
susceptibles d’acceptation ou pour lesquels il faut faire des actes conservatoires (article 61
AUPC). Au bout de trois (03) jours, le syndic requiert la levée des scellés en vue de l’inventaire
(article 62 AUPC).
Paragraphe 3 : L’inventaire et le bilan (article 63 AUPC)
Le syndic doit procéder à l’inventaire en présence du débiteur ou celui-ci dûment appelé. Il se peut
que l’inventaire ait lieu après le décès du débiteur, dans ce cas, il se fera en présence des héritiers
ou ceux-ci dûment appelés et si le débiteur avait commencé l’inventaire, il se poursuivra avec les
héritiers connus.
En même temps qu’il est fait inventaire, il est procédé au récolement des objets mobiliers
échappant à l’apposition des scellés.

76
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Lorsque le débiteur exerce une profession libérale soumise à un statut règlementé, l’inventaire est
dressé en présence d’un représentant de l’ordre professionnel ou l’autorité compétente dont il
relève.
Pour la rédaction de l’inventaire, le syndic peut se faire assister par toute personne qu’il juge
convenable. Le ministère public a la possibilité d’assister à l’inventaire.
L’inventaire est rédigé en double minute, l’une est déposée au greffe du tribunal, l’autre entre les
mains du syndic.
Lorsque le jugement déclaratif est la liquidation des biens (L.B), un certain nombre de biens sont
remis au syndic qui en prend charge au bas de l’inventaire. Il s’agit des marchandises, espèces,
valeurs effets de commerce et les titres de créance, livres et papiers, meubles et effets du débiteur.
Le syndic dispose les pouvoirs d’investigation les plus étendus et les plus rigoureux ; il peut
demander toutes les informations au débiteur, à ses créanciers, aux banques mais si le débiteur est
soumis au secret professionnel, l’inventaire ne peut en aucun cas, y porter atteinte.
Section 2 : L’administration de l'actif
Comment gérer l'actif ? Il faut régler le sort des contrats en cours et le problème de la continuation
de l’activité.
Paragraphe 1 : Le sort des contrats en cours avant le jugement d’ouverture
La vie de l’entreprise ne s’arrête pas le jour où le jugement d’ouverture est rendu, or avant ce
jugement, beaucoup de contrats ont été conclus avec le débiteur qui était un boni et ces contrats
n’ont pas été complètement exécutés lorsque survient le RJ ou L.B.
A. Le principe de la non résolution pour cause de cessation des paiements
Afin de favoriser la continuation de l’activité de l’entreprise débitrice, l'Acte Uniforme énonce
un principe général de continuation des contrats en cours d’exécution. Cette règle a son siège
dans l’article 107 aux termes duquel « nonobstant toute disposition légale ou toute clause
contractuelle ou indivisibilité, aucune résiliation ou résolution d’un contrat en cours ne peut
résulter du seul fait de l’ouverture du redressement judiciaire ou la liquidation des biens ». Il ne
peut plus y a pas de résolution ou résiliation d’un contrat du fait de la procédure collective. S’il y
a dans le contrat passé une clause résolutoire de plein droit, cette clause est réputée non écrite.
Si le débiteur n’avait pas préalablement, respecté ses obligations contractuelles, la résolution du
contrat ne peut plus être demandée par le cocontractant tenu d’exécuter ses obligations. Donc
même si on ne peut pas invoquer la faillite du débiteur pour demander la résolution du contrat, le
créancier peut, en revanche, reprocher au syndic le non-paiement ou l’inexécution de ses
obligations.

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Il n’y a plus d’exception pour les contrats conclus intuitu personae et les contrats prévus par la
loi de chaque Etat contrairement à ce qui était prévu par l’acte uniforme de 1998. Tous les contrats
nécessaires à l’activité de l’entreprise sont concernés par la continuation.
Toutefois, il faut tenir compte de certaines situations particulières. Ainsi, selon l’article 291
AUDSC, la société en nom collectif (SNC) prend fin en cas de L.B ou de faillite de l’un des
associés. Il n’en serait autrement que s’il y avait une clause de continuation insérée dans les statuts
ou si les autres associés ne le décident à l’unanimité. De même l’article 189 AUDCG prévoit que
le contrat de mandat prend fin par la faillite ou la liquidation des biens de l’une des parties.
B. L’option du syndic
Tirant les conséquences de cette règle, le législateur donne au syndic la faculté d’exiger l’exécution
des contrats en cours en fournissant la prestation promise.
Quelle que soit la procédure, le syndic conserve seul l’option soit de résilier le contrat, soit de
poursuivre l’exécution du contrat en cours. S’il opte la seconde solution il est tenu de fournir la
prestation promise à l’autre partie. Cela ne veut pas dire que le syndic va payer les arriérés du
débiteur (article 108, al. 3 AUPC).
Il est possible que le cocontractant accepte la continuation en accordant des facilités de
paiement au syndic. Et dans ce cas, le cocontractant devient créancier contre la masse.
Le syndic doit manifester son intention le plus vite possible et le créancier peut le mettre en
demeure par lettre recommandée ou par tout moyen laissant trace écrite, d’exercer son option
dans un délai de 30 jours, sous peine de résolution de plein droit du contrat qui doit néanmoins
être constatée par le juge commissaire à la demande du cocontractant (article 108, al. 2 AUPC).
Si le syndic ne s’exécute pas dans le délai de 30 jours ou s’il ne fournit pas la prestation promise,
en plus de la résolution ou résiliation du contrat, il peut aussi être condamné au paiement des
dommages-intérêts, dont le montant sera plutôt produit au passif de la procédure au profit de
l’autre partie qui dispose d’un délai de trente (30) jours à compter de la résiliation pour procéder
à leur production. Ces dommages-intérêts peuvent se compenser avec les créances résultant de
l’inexécution du contrat, antérieures à la décision d’ouverture de la procédure (article 109, al.
3 AUPC).

C. Les règles propres à certains contrats


Certains contrats tels que le contrat d’assurance et le contrat de travail sont soumis à un régime
particulier.
1. Le contrat d’assurance
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a. Jugement déclaratif de l’assuré


Dans ce cas selon l’article 17 CIMA, le contrat d’assurance subsiste au profit de la masse des
créanciers. S’il y a subsistance du contrat, il est normal que la masse devienne débitrice envers
l’assureur du montant des primes à échoir à compter du jugement déclaratif. Mais la masse et
l’assureur conserve le droit de demander la résiliation et celui qui veut demander la résiliation doit
le faire dans un délai de trois (3) mois à compter du jugement déclaratif.
Il se peut que l’assureur ait déjà perçu une prime pour la période postérieure à la résiliation dans
ce cas, l’assureur doit restituer la portion de la prime qui ne correspond plus au risque couru.
b. Jugement déclaratif de l’assureur
Dans ce cas, le contrat prend fin quarante (40) jour après le jugement déclaratif et l’assuré a la
possibilité de demander la restitution de la prime correspondant à la période pendant laquelle il
n’est plus couvert. Si l’assuré n’avait pas encore payé, il est dispensé du versement de la prime.
2. Le contrat de travail
Le redressement judiciaire (R.J) ou la liquidation des biens (L.B) ne constitue pas un obstacle
à la continuation du contrat de travail (article L 66, al. 3 CT). Cette continuation se fait pour
le compte de la masse par le syndic. Lorsque des licenciements pour motifs économiques
s’avèrent nécessaires, le syndic demande l’autorisation de licencier au juge-commissaire, étant
entendu qu’il aura au préalable dressé l’ordre de licenciement.
Le syndic doit informer les délégués du personnel et les contrôleurs de la décision qu’il veut
prendre en précisant les critères de sélection des travailleurs à licencier afin de recueillir leurs
avis et suggestions. Les délégués du personnel doivent répondre dans un délai de huit (8) jours.
Enfin, le syndic doit informer l’inspecteur du travail en lui donnant la liste des travailleurs à
licencier (article 110 et 111 AUPC et article L 60 à L 63 C.T).
Le juge-commissaire rend sa décision en autorisant les licenciements envisagés ou certains
d’entre eux s’ils s’avèrent indispensables au redressement de l’entreprise débitrice. Cette
décision autorisant ou refusant les licenciements est susceptible d’opposition dans le délai de
quinze (15) jours devant le tribunal qui a ouvert la procédure. Le tribunal saisi répond dans les
quinze (15) jours et sa décision est sans appel (article 111, al. 3 et 4 AUPC).
Paragraphe 2 : Continuation de l'activité
La question qui se pose est de savoir si l’activité doit cesser avec la liquidation des biens ou
le redressement judiciaire, ou si elle doit se poursuivre. La continuation présente des avantages
surtout en cas de redressement judiciaire ; en effet, cette mesure est destinée à remettre le débiteur
à la tête de son entreprise ; il faut donc éviter toute interruption.

79
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Mais il y a un risque : c'est que le passif s'alourdisse ; c'est pour cela que le législateur, à travers
les articles 112 et suivants AUPC, a minutieusement réglementé la continuation de l'activité du
débiteur.
A. Les conditions de la continuation de l’activité
Pour les conditions, on distingue selon qu'il s'agit de liquidation des biens ou redressement
judiciaire.
1. En cas de redressement judiciaire (art. 112 AUPC)
L’activité est continuée avec l’assistance du syndic pour une durée indéterminée, sauf décision
contraire du juge-commissaire. Et chaque deux (02) mois, le syndic devra rendre compte de cette
continuation au juge-commissaire134 et au Ministère public.
Ce qui caractérise cette continuation, c’est sa précarité car sur rapport du juge-commissaire, le
tribunal compétent peut à tout moment mettre fin à cette continuation, non sans avoir d’abord
entendu le syndic et le débiteur (al. 3 article 112 AUPC).
Le tribunal doit statuer, au plus tard, dans les huit (08) jours de l’audition du syndic (al. 4 article
112 AUPC).
2. En cas de liquidation des biens (article 113 AUPC)
En principe en cas de liquidation des biens, il faut craindre la continuation de l’exploitation car il
faut éviter que la situation du débiteur se détériore d’avantage à travers une aggravation du passif.
Alors la continuation doit être exceptionnelle, car l’objectif de la liquidation des biens est de
réaliser l’actif pour payer le passif.
Si cette continuation doit avoir lieu, elle doit être autorisée par le tribunal et seulement pour les
besoins de la liquidation et à condition de ne pas mettre en péril l’intérêt public ou celui des
créanciers (par exemple la main d’œuvre qui est sérieusement menacée de chômage ou pour
maintenir en bon état une unité de production dont le transfert est envisagé).
Le tribunal donne son autorisation pour une durée maximale de soixante (60) jours, à moins qu’il
y ait un renouvellement pour la même durée, à la demande du syndic et après avis du ministère
public.
En cas de poursuite provisoire de l’activité, le syndic doit alors remettre son rapport chaque mois
au juge-commissaire et au ministère public.

B. Les modes d’exploitation

134
V. AUPC, Art. 43, al. 5.

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S'il y a continuation dans le cas d'une liquidation des biens parce qu'il y a autorisation ou, en cas
de redressement judiciaire, l'exploitation peut se faire de manière directe ; elle peut se faire aussi
sous forme de location-gérance.
1. La gestion directe
En cas de redressement judiciaire l’activité est continuée avec l’assistance du syndic
Selon l’article 114, al. 1 AUPC, en cas de redressement judiciaire le débiteur ou les dirigeants
sociaux participent à la continuation de l’exploitation. Cependant sur requête du syndic et après
avis du ministère public, la juridiction compétente peut sur décision spécialement motivée les
écarter de la continuation. S’ils participent à la continuation de l’exploitation, c’est au juge-
commissaire de fixer les conditions des lesquelles ils seront rémunérés.
En cas de liquidation des biens, il faut se méfier du débiteur ou des dirigeants de la personne morale
d’où l’autorisation du tribunal pour la continuation. Autrement dit, c’est le syndic qui exploite lui-
même le fonds avec l’aide des préposés de la masse. Mais on peut exceptionnellement permettre
au débiteur d’intervenir pour dit l’alinéa 2 de l’article 114 AUPC « faciliter la gestion ».
2. La gestion indirecte (article 115 AUPC)
Le tribunal peut autoriser la conclusion d’un contrat de location-gérance afin d’éviter la vacance
de l’exploitation. Cette autorisation est demandée par le syndic, le ministère ou le cas échéant un
contrôleur. Elle est accordée lorsque la disparition ou la cessation d’activité même provisoire de
l’entreprise est de nature à compromettre son redressement ou causer un trouble grave à
l’économie nationale, régionale ou locale dans la production de biens et de services. Cette
autorisation peut intervenir, même en présence d’une clause contraire dans le bail d’immeuble.
Le tribunal peut aussi refuser de donner l’autorisation s’il estime que les garanties offertes par le
preneur ne sont pas suffisantes. De la même manière qu’il peut refuser si ce preneur ne présente
pas une indépendance suffisante à l’égard du débiteur, parce que ce dernier peut être tenté de
continuer l’exploitation sous le couvert d’un prête-nom.
Le contrat de location-gérance ne doit pas excéder deux (2) ans et est renouvelable une seule fois
pour la même durée au maximum.
L’alinéa 4 de l’article 115 AUPC prévoit que l’exigence relative à la durée minimale pour
l’exploitation du fonds nécessaire pour la conclusion d’un contrat location-gérance est écartée.
En effet, selon l’article 141 AUDCG, « la personne physique ou morale qui concède une location-
gérant doit avoir exploité, pendant deux (2) ans au moins en qualité de commerçant, le fonds mis
en location gérance ».
Toutefois ne peuvent consentir une location gérance les personnes interdites ou déchues de
l’exercice d’une profession commerciale (article 141, al. 2 AUDCG).
81
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Le syndic veille au respect des engagements du locataire-gérant. De ce fait, il peut se faire


communiquer, par ce dernier, tous les documents et informations utiles à sa mission. Le syndic
doit rendre compte au juge-commissaire de l’exécution de ses obligations par le locataire-gérant,
au moins tous les trois (03) mois, en précisant le montant des sommes reçues et déposées au compte
de la procédure de redressement judiciaire.
A toute époque, le contrat de location-gérance peut être résilié par la juridiction compétente, soit
d’office, soit à la demande du syndic ou du ministère public ou d’un contrôleur et sur rapport du
juge-commissaire (article 116 AUPC).
C. Les effets de la continuation (article 117 AUPC)
En cas de gestion directe, la continuation génère des créances et celles-ci sont contre la masse et
sont payées par préférence.
En cas de location-gérance, le locataire poursuit l’exploitation à ses risques et périls et à cet égard
est écartée la règle de la responsabilité solidaire du propriétaire du fonds.

82
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Titre 4 : LE DENOUEMENT DES PROCEDURES COLLECTIVES


Il s’agit des solutions finales. Celles-ci concernent l’entreprise et les dirigeants et sont relatives
soit au redressement de l’entreprise, soit à sa disparition.

Chapitre 1 : LE REDRESSEMENT DE L'ENTREPRISE


Le législateur OHADA dorénavant, limite strictement la durée des procédures collectives. Ainsi,
à l’expiration d’un délai de six mois à compter du jugement d’ouverture, délai qui ne peut être
prorogé qu’une seule fois pour une durée de trois mois, le redressement judiciaire est converti en
liquidation des biens. Cette période sera utilisée notamment pour élaborer « un bilan économique
et social qui précise l’origine, l’importance, et la nature des difficultés de l’entreprise débitrice
»135.
Quoi qu’il en soit, à tout moment durant cette phase de recherche d’un concordat de redressement
judiciaire et au plus tard à l’expiration des délais précités, la juridiction compétente convertit le
redressement en liquidation. L’objectif est d’éviter que les contraintes imposées aux créanciers
restent limitées à un délai raisonnable. Une procédure de redressement judiciaire ne peut durer
plus de neuf mois sans être automatiquement convertie en liquidation des biens par la juridiction
compétente, et ce d’office ou à la demande de tout intéressé136.
Il y a redressement de l'entreprise dans deux cas : s'il y a le vote du concordat (redressement
judiciaire) et s'il y a clôture pour extinction du passif (redressement judiciaire et liquidation des
biens).
Section 1 : La clôture pour extinction du passif
La procédure collective ne s’ouvrant que du fait de la cessation des paiements il est logique qu’elle
soit close s’il n’y a plus de passif exigible. On dit qu’il y a redressement par le défaut d’intérêt de
la masse.
Paragraphe 1 : Les conditions
Cette clôture est possible aussi bien en cas de redressement judiciaire qu’en cas de liquidation des
biens. En ce qui concerne le redressement judiciaire, la clôture peut se faire tant qu’il n’y a pas eu
clôture par homologation du concordat. Il faut qu’il y ait eu paiement complet de tous les
créanciers. Il faut que le paiement intervienne avant la fin des opérations.
Le tribunal ne peut prononcer la clôture pour extinction du passif que s’il n’existe plus de passif
exigible ou lorsque le syndic dispose des deniers suffisants ou lorsque les sommes dues en capital,

135
V. AUPC, Art. 119-1.
136
V. AUPC, Art. 33, al. 6.

83
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intérêts et frais sont consignées. Le tribunal est saisi par le débiteur ou le syndic ; il peut aussi se
saisir d’office. Le jugement de clôture ne peut intervenir qu'après l'arrêté de l'état des créances, à
la suite du rapport du juge-commissaire (article 178 AUPC).
Pour que le poids des intérêts ne pèse lourdement, les créanciers ne peuvent réclamer les intérêts
au-delà de trois (03) ans à compter de la décision d’ouverture.
Paragraphe 2 : Les effets
Après règlement de l’intégralité du passif exigible, le syndic rend ses comptes dans les trois (03)
mois de la clôture et le greffier avertit immédiatement le débiteur qui reprend la libre
administration de son entreprise (article 178-1 AUPC). En reprenant la libre administration le
débiteur se retrouve face à face avec les créanciers hors de la masse et s’il n’arrive pas à les
satisfaire, il fera l’objet d’une cessation des paiements.
Selon l’article 204 AUPC, l’extinction du passif entraîne la réhabilitation du débiteur. Le débiteur
qui avait été déclaré en faillite personnelle va être réhabilité, c’est à dire rétabli dans ses droits et
déchargé de ses déchéances.
Il doit y avoir aussi dissolution de la masse, fin du dessaisissement ou de l’assistance et fin des
opérations de redressement judiciaire ou de liquidation des biens.

Section 2 : Le redressement par le vote du concordat


Le concordat est la convention passée par le débiteur avec ses créanciers sous le contrôle de la
justice. Par cette convention, le débiteur s’engage à payer à ses créanciers en tout ou partie ce qui
leur est dû, la contrepartie pour ce débiteur c’est qu’il sera libéré et la conséquence sera la clôture
de la poursuite. Ce concordat est la solution normale du redressement judiciaire.
Paragraphe 1 : la formation du concordat
Le but recherché est l’obtention d’un accord entre le débiteur et les créanciers par l’entremise du
syndic.
A. Les conditions de fond
1. Le projet concordataire
En même temps que la déclaration de cessation des paiements ou au plus tard dans les soixante
(60) jours qui suivent l’ouverture de la procédure collective mettant le débiteur en redressement
judiciaire, il doit déposer ses offres concordataires. Il doit dire comment il compte payer ses
dettes, dans quels délais et selon quelle remise (article 27 AUPC).
84
Animateur Pr. Moussa Gueye Agrégé de Droit privé

Pendant les délais de production et de vérification des créances, le syndic en profite pour
rapprocher les positions du débiteur et des créanciers sur l’élaboration du projet de concordat
et du bilan économique et social dans lequel il précise l’origine, l’importance, et la nature des
difficultés de son entreprise. A cet effet, il reçoit du juge-commissaire tous les renseignements
et documents utiles et peut entendre toute personne susceptible de lui apporter des informations
utiles137.
Si le débiteur exerce une activité régie par un statut règlementé, le syndic consultera alors
l’ordre professionnel ou l’autorité compétente sous laquelle est placé le débiteur138.
Concernant le redressement judiciaire simplifié, selon l’article 145-3 AUPC, le débiteur, avec
le concours du syndic, doit déposer un projet de concordat de redressement judiciaire, au plus
tard dans les quarante-cinq jours qui suivent sa déclaration. Ainsi, le délai de soixante jours
pour présenter le projet de concordat de redressement judiciaire est réduit à quarante-cinq (45).
Mais il est prévu que le syndic participe activement à la réalisation du projet de concordat de
redressement judiciaire, là encore parce que bien souvent dans ces petites entreprises, il n’y a
pas de conseils pouvant les aider. Il n’a pas été jugé utile d’exiger que soit dressé un bilan
économique et social dans ce cadre (art. 145-4 AUPC).
Ces offres sont inévitables, faute de quoi, le débiteur sera déclaré en liquidation des biens,
surtout s’il n’est pas envisagé une cession globale (article 33, al. 2 AUPC).
Les créanciers munis d’une sûreté réelle spéciale sont avertis par le greffier qui leur demande
de répondre dans les quinze (15) jours à compter de la réception de cet avertissement. Ils doivent
être avertis personnellement par lettre recommandée avec accusé de réception ou par tout
moyen laissant trace écrite contenant un exemplaire des propositions concordataires (article
119, al. 3 et 4 AUPC). Ces créanciers doivent donner leur réponse en étant informés qu’ils ne
perdront pas leurs sûretés (article 121 AUPC).
Les créanciers peuvent donner leur réponse par écrit ou attendre l’assemblée concordataire ; ils
peuvent aussi faire des contre-propositions.
2. L’objet du concordat
Il est de plusieurs ordres :
- Le concordat d’atermoiement : le débiteur sollicite un délai ou une remise pour
pouvoir régler des dettes : le concordat de remise.

137
V. AUPC, Art. 119-1.
138
V. AUPC, Art. 119-1, al. 2.

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- La réorganisation de l’entreprise : le débiteur peut demander la recapitalisation, un


changement d’activité, une rénovation du matériel, une réorganisation technique ou juridique
(fusion, scission).
- La cession totale ou partielle des actifs : il arrive bien souvent que pour se libérer,
l’entreprise soit obligée de céder en tout ou partie son actif, dans ce cas, le syndic doit faire un
état descriptif détaillé et précis des biens meubles et immeubles, ainsi que la liste des emplois
qui y sont rattachés, la liste des sûreté réelles et la quote part de chaque bien dans la cession.
Le syndic doit ensuite faire connaître les offres de cession ainsi que les offres d’acquisition et
il reviendra à l’assemblée concordataire de dire si la cession devra se faire ou non : C’est le
concordat par abandon d’actif.
Le prix de la cession devra se faire immédiatement et entièrement et si un crédit est accordé,
le délai ne doit pas dépasser deux (2) ans et il faudra une caution solidaire d’un établissement
financier ou bancaire139.
Les sûretés portant sur les biens cédés devront être désintéressées et dans la mesure de leur
désintéressement, ils ne participeront plus à la masse.
Le projet de concordat peut aussi comporter des propositions de conversions de créances en
titres donnant ou pouvant donner accès au capital social de l’entreprise débitrice. Mais ces
conversions ne peuvent pas être imposées aux créanciers et le syndic recueille par écrit l’accord
individuel de chaque créancier dont la créance est admise et qui accepte une telle conversion140.
S’il s’agit d’une personne morale en cessation de paiements et que le projet de concordat prévoit
une modification de capital social, le syndic demande au conseil d’administration (S.A.), au
président (S.A.S.) ou aux gérants (les autres sociétés), de convoquer, dans un délai de quinze
(15) jours suivant la demande, l’assemblée générale extraordinaire ou l’assemblée des associés,
à défaut le syndic y procède lui-même141.
Dans le redressement judiciaire simplifié, le projet peut se limiter à des délais de paiement, des
remises de dettes ainsi qu’aux garanties éventuelles que le chef d’entreprise doit souscrire pour
en assurer l’exécution (article 145-4 AUPC). Concernant les délais de paiement et les remises
de dettes, l’accord de chaque créancier concerné est nécessaire
B. Les conditions de forme
1. Convocation et tenue de l’assemblée (article 122 AUPC)

139
V. AUPC, Art. 132.
140
V. AUPC, Art. 119-3.
141
V. AUPC, Art. 119-2, al. 1.

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Dans les quinze (15) jours qui suivent l’expiration du délai de 15 jours prévus par la loi pour
faire réclamation142, le juge-commissaire saisit le président du tribunal qui fait convoquer
individuellement, par avis inséré dans un JAL et par lettre au porteur contre récépissé ou par
tout moyen laissant trace écrite, les créanciers dont les créances sont admises à titre
chirographaire, à une assemblée concordataire.
Ce délai est porté à un (01) mois lorsque le concordat de redressement judiciaire comporte des
offres de cession totale ou partielle d’actif143.
Il est joint à cette convocation individuelle, un état dressé par le syndic et indiquant le passif et
l’actif du débiteur, des propositions concordataires, des garanties, l’avis des contrôleurs s’il y
en a et enfin la réponse des créanciers munis de sûretés réelles aux propositions concordataires.
Au jour prévu pour l’assemblée concordataire, y participent tous les créanciers admis ou leurs
mandataires144. Après l’audition du syndic au cours de cette assemblée, on entend le ministère
public qui est tenu de donner son avis en faveur ou en défaveur du débiteur.
Dans le cadre du redressement judiciaire simplifié, aux termes de l’article 145-8 AUPC, « au
moins quinze jours avant que la juridiction compétente statue sur l’homologation du projet de
concordat, le syndic communique ledit projet aux créanciers, par lettre au porteur contre
récépissé ou par lettre recommandée avec demande d’avis de réception ou par tout moyen
laissant trace écrite ». Ainsi, à défaut de convoquer obligatoirement les créanciers, il est tout
de même nécessaire de les consulter. Cette consultation qui est faite par le syndic se traduit par
l’envoi du projet de concordat. S’il prévoit des remises de dettes ou des délais de paiement
supérieurs à deux ans, chaque créancier doit donner son accord. A noter que le défaut de réponse
dans un délai de quinze jours vaut refus.
2. Le vote du concordat (article 125 AUPC)
Le vote se fait par les créanciers présents, mais le vote par correspondance ou par procuration
est admis. Tous les créanciers peuvent voter même ceux qui ne s’étaient pas prononcés sur les
propositions.
Les créanciers chirographaires et ceux munis de sûreté réelle qui ne se sont pas prononcés sur
les propositions concordataires sont présumés accepter le concordat, si dûment appelés, ils ne
participent pas au vote de l’assemblée concordataire.

142
V. AUPC, Art. 88.
143
V. AUPC, Art. 131, al. 1.
144
V. AUPC, Art. 123.

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Le vote est acquis si on a réuni la majorité en nombre des créanciers représentant la moitié, au
moins, du montant total des créances. Sinon le vote est renvoyé à huitaine et les créanciers qui
ont participé à la première assemblée ne sont pas tenus d’être présents, leur premier vote étant
conservé.
Quel que soit le type de concordat, il peut comporter toujours une clause de retour à meilleure
fortune : c'est l'engagement pris par le débiteur de payer toutes ses dettes s'il retrouve une
situation financière meilleure.
3. L’homologation du concordat
Le tribunal dresse procès-verbal de ce qui a été décidé au cours de l’assemblée et constate que
le concordat est régulièrement voté. Cette constatation vaut homologation du concordat (article
126 AUPC).
Le tribunal peut refuser le concordat si (article 127 AUPC) :
- les conditions de validité du concordat ne sont pas réunies ;
- l’intérêt collectif des créanciers ou l’ordre public paraît de nature à empêcher le
concordat ;
- le concordat n’offre pas de possibilités sérieuses de redressement de l’entreprise ;
- s’agissant d’une personne morale, sa direction continue à être assurée par des dirigeants
qui ne devaient plus y être ;
- s’aperçoit que le concordat contient des avantages particuliers consentis à tel ou tel
créancier.
Le tribunal peut prononcer l’homologation si le concordat ne comporte aucune remise.
Au demeurant, lorsque la survie de l’entreprise débitrice l’exige, le tribunal peut, sur demande
du syndic ou d’office, subordonner l’adoption du concordat de redressement au remplacement
de certains dirigeants sociaux qu’ils soient de droit ou de fait, rémunérés ou non. Il n’en sera
autrement que si le débiteur exerce une activité professionnelle libérale soumise à un statut
réglementé145.
A la différence de ce qui est prévu dans la procédure de droit commun, l’homologation du
concordat dans le cadre du redressement judiciaire simplifié se fait sans vote des créanciers146.
Deux raisons peuvent justifier cette particularité. D’une part, dans le cas des entreprises
éligibles au redressement judiciaire simplifié, le vote des créanciers apparaît souvent inadapté.

145
V. AUPC, Art. 127-1.
146
V. AUPC, Art. 145-9.

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Certains créanciers importants ont quasiment à eux seuls la majorité, ou ceux-ci sont trop peu
nombreux pour que le vote soit véritablement pertinent. D’autre part, en pratique, le concordat
est en quelque sorte réduit à son strict minimum puisqu’il se traduit essentiellement par des
remises de dettes et des délais de paiement. Or les remises de dettes ne peuvent en aucun cas
être imposées aux créanciers tandis que les délais de paiement doivent être acceptés par les
créanciers. En revanche, les créanciers qui n’accepteraient aucun délai de paiement pourraient
se voir imposer par la juridiction compétente de tels délais pour une durée qui ne peut excéder
deux ans, comme le prévoyait d’ailleurs l’AUPC dans le régime normal avant révision.
Cette possibilité, désormais réservée à la procédure simplifiée, suppose toutefois que la
juridiction qui homologue le concordat vérifie que celui-ci est sérieux et que ces délais imposés
concernent seulement quelques créanciers récalcitrants. On comprend mieux dès lors pourquoi
le recours à cette procédure simplifiée est laissé au libre arbitre du débiteur qui en remplit les
conditions. Il peut en effet préférer recourir à la procédure de droit commun dans laquelle il
peut espérer obtenir, selon le cas, plus d’efforts de la part de ses créanciers147. A défaut, il
bénéficie d’une procédure simple et efficace.
4. Désignation de contrôleurs (article 128 AUPC)
Le tribunal peut désigner les contrôleurs pour surveiller l’exécution du concordat ou maintenir
ceux qui avaient été nommés précédemment. S’il nommait les contrôleurs, leur fonction sera
gratuite. Il peut encore désigner le syndic comme surveillant de l’exécution du concordat et
rémunéré comme tel.
5. Publication et voies de recours (article 129 AUPC)
Le jugement d’homologation est publié dans les mêmes conditions que le jugement déclaratif.
La publicité doit être faite au RCCM, dans un JAL, au JO. Cependant, l’appel est possible
contre ce jugement, rien que l’appel et non l’opposition. Cet appel doit être formé dans les
quinze (15) jours à compter de sa publication et ce jugement d’homologation peut être critiqué
par le syndic, un représentant mandaté par la majorité du personnel, un créancier contrôleur ou
par le ministère public.
S’agissant du jugement qui rejette le concordat, il ne peut faire que l’objet d’un appel formé
dans les quinze (15) jours de son prononcé par le ministère public ou par le débiteur.
Paragraphe 2 : Les effets du concordat de redressement
A. Les effets à l’égard du débiteur

147
V. B. DIALLO, Des procédures adaptées aux «petites» entreprises : les procédures simplifiées, Droit et
Patrimoine, n° 253, décembre 2015, pp. 44 et s.

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Le concordat met fin à l’assistance du débiteur, c’est-à-dire que dès lors que l’homologation est
passée en force de chose jugée, le débiteur retrouve la libre administration et disposition de ses
biens à l’exception de ceux qu’il a cédés. Cela ne veut pas dire que les actes déclarés inopposables
deviennent opposables : pas question de payer les créanciers dont la créance était déclarée
inopposable à la masse des créanciers. Après l’homologation du concordat, nait une nouvelle
catégorie de créanciers qui sont des créanciers post concordataires (article 136 AUPC).
Le concordat ne profite pas aux coobligés du débiteur, c’est-à-dire que le concordat accordé au
débiteur principal ne profite pas à sa caution ni à ses coobligés qui demeurent tenus dans les
conditions initiales de leur engagement, ce qui place les créanciers titulaires de sûretés
personnelles dans une bonne position (article 134, al. 5 AUPC). Les coobligés ne profitent ni des
délais, ni des remises.
Lorsqu’il s’agit d’une société en nom collectif (SNC) qui obtient un concordat, celui-ci ne profite
pas automatiquement aux associés solidairement et indéfiniment responsables, car les créanciers
ont la faculté de ne consentir le concordat qu’en faveur d’un ou plusieurs membres (article 130
AUPC).
B. Les effets à l’égard des créanciers
Il va y avoir dissolution de la masse des créanciers. Pour les créanciers concordataires il y a :
1. L’opposabilité du concordat aux créanciers (article 134 AUPC)
L’homologation rend le concordat obligatoire pour tous les créanciers antérieurs au jugement
d’ouverture sauf disposition légale interdisant l’opposabilité du concordat à telle ou telle
administration. Le concordat n'est donc pas opposable malgré l'homologation aux créanciers
postérieurs.
Est-ce que tous les créanciers antérieurs sont concernés ? La réponse doit être nuancée. Tous les
créanciers chirographaires sont concernés. Quant aux créanciers munis d'une sûreté réelle spéciale,
ils ne sont pas concernés à la condition d'avoir fait la déclaration ou d'avoir assisté à l'assemblée
concordataire.
Les créanciers ne sont tenus que des termes et délais qu’ils ont consentis. Toutefois s’ils n’ont
consenti aucun délai ils peuvent se voir imposer un délai de deux (2) ans par le tribunal. Les
travailleurs ne peuvent se voir imposer aucune remise ni se voir imposer un délai excédent deux
(2) ans.
Les créanciers munis de sûretés ne perdent pas leurs sûretés, mais ils ne peuvent les réaliser qu’en
cas d’annulation ou de résolution du concordat.
2. La protection des créanciers (article 135 AUPC)

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Ils bénéficient d’une hypothèque légale dès le prononcé du jugement déclaratif. Dès l’intervention
du concordat, le syndic doit procéder à une nouvelle inscription hypothécaire, en précisant la
somme pour laquelle il y a garantie.
La protection des créanciers peut aussi être assurée par d’autres sûretés telles que le nantissement,
le cautionnement.
C. Les effets à l’égard du syndic (article 137 AUPC)
Le jugement d’homologation met fin à la mission d’assistance du syndic qui doit rendre ses
comptes au juge-commissaire ainsi que restituer tous les documents qui lui ont été remis par le
débiteur et les créanciers. Il est responsable pendant deux (2) ans à compter de cette reddition des
comptes.
De même, les fonctions du juge-commissaire cessent à ce moment148, sauf en cas de maintien de
la cession d’actif consécutif à l’absence d’offres d’acquisition exprimée avant l’assemblée
concordataire ou reconnue satisfaisante par celle-ci149.
D. Le contrôle de l’exécution du concordat (article 138 AUPC)
Il se fait à travers la désignation d’un contrôleur. Celui-ci fait le rapport au Président du tribunal
de tout retard ou manquement à l’exécution du concordat. Il peut aussi avoir à payer des
dividendes ; dans ce cas, il doit ouvrir un compte en banque en son nom et en sa qualité. Il devra
aussi communiquer au Président la situation des soldes créditeurs qu’il détient, chaque fin de
semestre civil. Il doit avoir une police d’assurance pour garantir sa responsabilité.
En vue de favoriser son exécution, le juge-commissaire sur rapport du syndic ou les créanciers
représentant plus de la moitié de la valeur des créances totales peuvent demander au président du
tribunal la modification du concordat.
A cet effet, le syndic ainsi que le débiteur et les créanciers seront entendus par le président avant
toute décision. Celle-ci ne pouvant faire l’objet d’un appel devant le tribunal compétent dans un
délai de quinze (15) jours suivant le prononcé de la décision. La décision de modification du
concordat valant homologation, elle doit être publiée conformément aux dispositions des articles
36 et 37 AUPC (article 138-1 AUPC).
Paragraphe 3 : La disparition du concordat préventif et du concordat de redressement
Les deux (2) concordats subissent le même sort en cas de disparition.
A. Les Causes de disparition
Les concordats disparaissent en principe par son exécution.

148
V. AUPC, Art.137, al. 2.
149
V. AUPC, Art. 132, al. 4.

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1. L’annulation pour dol (article 140 AUPC)


Le concordat ne peut être annulé que pour une seule cause : le dol. Mais un dol résultant d’une
dissimulation de l’actif ou d’une exagération du passif. Ce dol n’est sanctionné que s’il a été
découvert après l’homologation du concordat. Le Tribunal apprécie souverainement l'opportunité
de prononcer ou non la nullité. C'est le ministère public ou le contrôleur qui le saisit dans le délai
d’un (01) an suivant la découverte du dol.
A compter de son prononcé, la décision d’annulation du concordat peut faire l’objet d’appel
interjeté par le débiteur, le ministère public ou des contrôleurs.
2. La résolution pour inexécution (article 139 AUPC)
L’inexécution de ses engagements concordataires entraîne la résolution du concordat. Mais le
tribunal doit vérifier si l’inexécution n’est pas qu’un petit retard, c’est-à-dire si le non-respect des
engagements compromet durablement l’exécution du concordat et si tel était le cas, le tribunal peut
accorder des délais de paiement nouveaux qui ne pourraient excéder de plus de six (6) mois ceux
déjà consentis par les créanciers.
Le débiteur frappé de l’interdiction d’exercer une activité commerciale pour quelle que cause que
ce soit, s’il le fait, le concordat peut être résolu, sauf si la durée de cette interdiction est compatible
avec l’activité de l’entreprise de location-gérance.
Les dirigeants d’une personne morale frappés de faillite personnelle, d’interdiction d’avoir une
activité commerciale, s’ils dirigent encore la personne morale, le concordat est résolu. Si ces
dirigeants cessent d’exercer leurs fonctions avant que le tribunal soit saisi ou s’ils la cessent dans
un délai raisonnable qui ne peut excéder trois (3) mois il n’y aura pas résolution.
Le tribunal est saisi pour résolution par les créanciers ou par les contrôleurs. Il peut aussi se saisir
d’office, le débiteur entendu ou dûment appelé.
B. Les effets de la disparition du concordat
Il y a un effet commun à la résolution et à l’annulation, c'est la conversion du redressement
judiciaire en liquidation des biens. Et s’il s’agit d’un concordat préventif, le tribunal compétent
prononce, s’il la constate, la cessation des paiements. Il y a un effet propre à l'annulation, c'est
la libération des cautions qui n'ont pas eu connaissance du dol, car aux termes de l’article 140, al.
2 AUPC, en cas d’annulation, les personnes ayant consenti un cautionnement ou affecté ou cédé
un bien en garantie sont libres de plein droit à moins qu’elles n’aient eu connaissance du dol lors
de leur engagement.
Il y a un effet propre à la résolution : les cautions restent tenues dans la mesure où aux termes de
l’article 139, al. 3 AUPC, les cautions qui sont intervenues pour garantir l’exécution totale ou
partielle du concordat ne sont pas libérées à la suite de la résolution.
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1. A l’ égard du débiteur
Si le concordat est annulé ou résolu cela entraîne deux situations. Si c’est un concordat préventif
qui est annulé ou résolu, le débiteur est déclaré en cessation des paiements et une procédure de
redressement judiciaire est ouverte contre lui.
En revanche, si c’est un concordat de redressement judiciaire qui est annulé, le débiteur est déclaré
en liquidation des biens et il est constitué une seule masse de créanciers antérieurs et postérieurs
au concordat150. Le syndic procède, sans délai, sur la base de l’ancien inventaire et avec
l’assistance du juge-commissaire, si y avait eu des scellés, au récolement des valeurs, actions et
documents. S’il y a lieu, il procède à l’inventaire et dresse un bilan supplémentaire151.
2. A l’égard dans créanciers
S’il y a eu annulation ou résolution, les créanciers nouveaux, s’il en existe, sont invités par le
greffier à produire leurs créances entre les mains du syndic dans les conditions prévues aux articles
78 et suivants AUPC. Le greffier, aussi, fait immédiatement publier un extrait de la décision dans
un JAL et il est procédé, sans délai, à la vérification des nouveaux titres de créance produits152.
Les créances antérieurement admises sont reportées d’office au nouvel état des créances, sous
déduction des sommes qui auraient été perçues par les créanciers au titre des dividendes.
Les créanciers concordataires retrouvent l’intégralité de leur droit de poursuite et d’exécution et
puisque le débiteur n’a payé aucun dividende avant l’anéantissement du concordat, les remises
concordataires sont anéanties153. Ainsi les créanciers concordataires munis de sûretés réelles seront
privilégiés, ensuite viendront les créanciers de la masse qui seront préférés aux créanciers
concordataires. Mais si ces créanciers chirographaires concordataires avaient bénéficié de
l’hypothèque légale ou s’ils avaient pris une sûreté réelle en second lieu, ils seront préférés aux
créanciers post concordataires.
Les actes accomplis par le débiteur entre l’homologation du concordat et sa résolution ou son
annulation ne peuvent être déclarés inopposables qu’en cas de fraude aux droits des créanciers154.

150
V. AUPC, Art. 141, al. 2 in fine.
151
V. AUPC, Art. 141, al. 3.
152
V. AUPC, Art. 141, al. 4 et 5.
153
V. AUPC, Art. 142, al. 1.
154
V. AUPC, Art. 143.

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Chapitre 2 : LA DISPARITION DE L'ENTREPRISE


La durée de la liquidation des biens est fixée à dix-huit mois, prorogeable de six mois une seule
fois155. S’il s’agit d’une liquidation des biens simplifiée, au plus tard cent vingt (120) jours après
l’ouverture ou la décision la prononçant, le tribunal doit prononcer la clôture de la liquidation des
biens du débiteur entendu ou dûment appelé. Cependant, par décision spécialement motivée, le
tribunal peut proroger cette durée pour une période qui ne peut excéder soixante (60) jours. La
durée maximale de la liquidation des biens simplifiée est donc de cent quatre-vingt jours, soit six
mois156. Par ailleurs, s’il s’avère que la procédure ne pourra pas être clôturée dans les délais,
l’article 179-10 AUPC offre toujours la possibilité de la passerelle à la procédure normale de droit
commun.
Il en résulte que la procédure peut prendre fin même si tous les actifs n’ont pu être réalisés. Mais
que l’on se rassure, si tel est le cas, les créanciers recouvrent leurs droits de poursuites individuelles
sur les actifs non réalisés157.
La règle est assez catégorique puisque, en définitive, la liquidation des biens de droit commun ne
peut plus excéder une durée de deux ans, ce qui pourrait de prime abord être critiqué. En effet,
cette innovation aboutit d’une certaine manière à rétablir le prix de la course alors que la procédure
de liquidation des biens a précisément pour objet de l’éviter. Mais c’est sans compter sur le fait
qu’en pratique, de nombreuses liquidations s’éternisaient jusqu’à présent, pour diverses raisons,
bonnes ou moins bonnes, mais qui aboutissaient dans tous les cas à une situation préjudiciable au
débiteur et aux créanciers.
La durée excessive de la liquidation se traduisait en effet généralement par le non-paiement de ces
derniers. Désormais, à l’expiration d’un délai de deux ans, si tous les actifs n’ont pas été réalisés,
la procédure est clôturée et les créanciers peuvent provoquer cette réalisation par les voies du droit
commun. Si le débiteur est une personne physique, tout en bénéficiant lui aussi de cette clôture qui
le rétablit dans ses droits, il devra gérer cette situation. S’il s’agit d’une personne morale, sans
doute faudra-t-il désigner un mandataire ad hoc aux fins de la représenter.

155
V. AUPC, Art. 33, al. 3.
156
V. AUPC, Art. 179-9.
157
V. AUPC, Art. 170.

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L’entreprise peut donc disparaître à la suite de la conversion du redressement judiciaire en


liquidation des biens. Plusieurs hypothèses sont envisageables. La première hypothèque est celle
dans laquelle il n’y a pas de proposition de concordat sérieux (article 33 AUPC). Encore que ce
défaut de concordat sérieux peut se manifester à tout moment de la procédure. Aussi si les
créanciers ont rejeté le concordat ou si le tribunal a refusé d’homologuer le concordat, il y a
conversion du RJ en LB.
La deuxième hypothèse : la résolution ou d’annulation du concordat entraînant la conversion du
RJ en LB (article 141 AUPC).
La troisième hypothèse : la survenance d’une seconde procédure collective entraînant la
conversion du RJ en LB (article 144 AUPC). Il est cependant important de vérifier si le précédent
concordat a été exécuté.
Outre cela, il y a deux solutions qui peuvent conduire à la disparition : la clôture pour insuffisance
d'actif et l’union.
Section 1 : La clôture pour insuffisance d'actif (article 173 et s AUPC)
Paragraphe 1 : Les conditions
Lorsque les fonds manquent à tel point qu'il n'est pas possible de commencer ou de continuer la
procédure, il y a clôture pour insuffisance d’actif ; cette solution provisoire et hybride traduit une
hésitation entre la disparition de l’entreprise et le maintien de la procédure.
Pour que ce jugement puisse être rendu, il faut que les fonds manquent à un point tel qu’il soit
impossible d’entreprendre ou de terminer les opérations.
La décision de clôture ne peut être prise qu’après vérification de toutes les créances par le juge-
commissaires et après que le syndic a dressé l’état des créances.
Paragraphe 2 : Les effets
Avec ce jugement les créanciers ne retrouvent pas leur droit de poursuites individuelles, à moins
que la créance ne résulte d’une condamnation pénale du débiteur ou de droits attachés à la personne
du créancier158. Le jugement qui prononce la clôture pour insuffisance d’actif peut toujours être
rapporté à la demande du débiteur ou de tout intéressé, s’il y a retour à meilleure fortune. Le
demandeur doit justifier que les fonds nécessaires pour les opérations sont consignés entre les
mains du syndic159.

158
V. AUPC, Art. 174, al. 1.
159
V. AUPC, Art. 175.

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L’Acte uniforme n’a pas prévu les effets de la décision qui rapporte le jugement, mais on peut
penser que la procédure va reprendre son cours au point où elle s’était arrêtée et les créanciers vont
être à nouveau privés de leurs poursuites individuelles.
Le syndic peut exercer toutes les actions en responsabilité. Il doit de ce fait demander le bénéfice
de l’assistance judiciaire par décision du juge commissaire160.
Les créanciers reprennent leur liberté d’action car ils sont munis d’un titre exécutoire qu’est
l’arrêté des créances.
Le renforcement du traitement égalitaire profite aux créanciers ou aux cocontractants. Ainsi, le
nouvel AUPC étend à tous les garants de la dette d’autrui la possibilité, antérieurement uniquement
prévue dans le cas des cautions, de reprendre des poursuites après la clôture d’une liquidation des
biens pour insuffisance d’actif161.
Le syndic après le prononcé du jugement de clôture dépose ses comptes dans les trois (3) mois
pour insuffisance d’actif. Mais le débiteur peut toujours contester la reddition des comptes du
syndic, alors il a huit (08) jours pour le faire devant la juridiction compétente162.
Section 2 : L'union
C’est la situation dans laquelle se trouvent les créanciers dès lors que la L.B a été prononcée. Ils
doivent normalement rester dans cette situation jusqu'à la clôture définitive des opérations de L.B.
Le syndic doit établir immédiatement l’état des actifs disponibles et réalisables ainsi qu’un état de
passif garanti par une sûreté et chirographaires. Il doit aussi indiquer lorsqu’il s’agit d’une
personne morale, les personnes physiques dont la responsabilité pécuniaire pourra être engagée.
Le syndic doit procéder à l’arrêté de l’état des créances même s’il apparaît que l’actif sera absorbé
par le passif.
Selon l’article 146 AU/PC, dès que la liquidation des biens est prononcée, les créanciers sont
constitués en état d'union ; il s’agit là d’une solution propre à la liquidation des biens.
Lorsque la liquidation des biens résulte de la conversion du redressement judiciaire, le syndic
procède aux opérations de liquidation en même temps qu’il achève, le cas échéant, la vérification
des créances et qu’il établit l’ordre des créanciers. Et les actions ouvertes avant la procédure de
liquidation des biens sont poursuivies par le syndic.
Paragraphe 1 : Les opérations de l’union
Il y a deux types d'opérations : la réalisation de l'actif et le paiement du passif.

160
V. AUPC, Art. 176.
161
V. AUPC, Art. 174.
162
V. AUPC, Art. 177.

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A. La réalisation de l'actif
Elle prend la forme d’un recouvrement des créances et la vente des biens du débiteur.
Le syndic poursuit seul la vente des marchandises et des meubles du débiteur, ainsi que le
recouvrement des créances. Les deniers provenant des ventes et recouvrements sont déposés dans
un compte ouvert dans un établissement bancaire, postal ou au Trésor, mais après déduction d’une
somme arbitrée par le juge-commissaire pour les dépenses et frais163.
Pour la vente des immeubles, le syndic va suivre les formes prescrites en matière de saisie
immobilière ; il s’agira donc de vente à la barre du Tribunal en la forme des criées. Le juge-
commissaire peut cependant autoriser la vente par adjudication amiable sur la mise à prix qu’il
fixe ou la vente de gré à gré. La réalisation des biens peut prendre la forme d’une cession globale
conformément aux articles 160 et suivants AU/PC. La décision est prise par le syndic qui suscite
les offres et fixe un délai pour leur dépôt. Ceux qui sont intéressés par la vente déposent leurs
offres au greffe du Tribunal. Le syndic consulte le débiteur et les contrôleurs s’il y en a pour
recueillir leur avis. Il choisit l'offre qui lui paraît la plus sérieuse et la soumet au juge-commissaire
seul habilité à autoriser la cession. Lorsqu'il y a cession globale, il faut permettre aux créanciers
titulaires de sûreté réelle de faire valoir leurs droits. C’est la raison pour laquelle le juge-
commissaire est tenu d’une quote-part du prix à chacun des biens pour permettre la répartition du
prix et l’exercice des droits de préférence. C’est le syndic qui accomplit les actes nécessaires
(article 162 AU/PC).
B. Le règlement du passif
1. Le principe
Après réalisation de l’actif, il faut procéder au règlement du passif. C’est le juge-commissaire qui
ordonne la répartition et fixe la part venant à chacun en veillant à ce que tous soient informés164.
Il faut commencer par distraire de l’actif les frais et dépens de la liquidation des biens ainsi que
les secours alloués au débiteur. Ces frais et dépens sont prélevés en proportion de la valeur de
chaque élément d’actif par rapport à l’ensemble.
Le reliquat va être réparti entre les créanciers dont la créance est vérifiée et admise.
La part correspondant aux créances sur l'admission desquelles il n'a pas encore été définitivement
statué, est mise en réserve165.

163
V. AUPC, Art. 147.
164
V. AUPC, Art. 164.
165
V. AUPC, Art. 165.

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Lorsqu’il s’agit d’une liquidation des biens simplifiée, le syndic établit, après la procédure de
vérification et d’admission des créances et de la réalisation de l’actif, un projet de répartition qu’il
dépose au greffe de la juridiction compétente. Le dépôt de ce projet fait l’objet d’une mesure de
publicité dans les conditions prévues aux deux premiers alinéas de l’article 37 de l’Acte uniforme,
réalisée par le greffe. Tout intéressé peut prendre connaissance du projet de répartition et, à
l’exclusion du syndic, le contester devant le juge-commissaire, dans un délai de dix jours à compter
de la publicité prévue dans l’alinéa précédent. Le juge-commissaire statue sur les contestations par
une décision qui fait l’objet d’une notification par tout moyen permettant d’établir la réception
effective par le destinataire aux créanciers intéressés. Sa décision est insusceptible de recours166.
La faiblesse des actifs et donc des sommes à répartir laisse à penser que les contentieux seront
quasi inexistants.
Le syndic procède à la répartition conformément au projet ou, si ce dernier a été contesté, à la
décision rendue. Là encore, la réduction stricte des voies de recours pourrait surprendre mais la
modicité des sommes à répartir dans la plupart des cas limite considérablement les enjeux.
2. La distribution en matière immobilière
Les deniers provenant de la vente d’un immeuble est distribués, selon l’article 166 AUPC, comme
suit :
- Les créanciers bénéficiaires du privilège de l’argent frais.
- Les créanciers de frais de justice, ainsi que les honoraires du syndic.
- Le super privilège des salariés en proportion de la valeur de l’immeuble par rapport à
l’ensemble de l’actif.
- Les créanciers hypothécaires, chacun en fonction de son inscription au livre foncier.
- Les créanciers contre la masse.
- Les créanciers munis d’une sûreté générale.
- Les créanciers chirographaires munis d’un titre exécutoire et
- Les créanciers chirographaires non munis d’un titre exécutoire.
3. La distribution en matière mobilière
Lorsque l’on a vendu un bien meuble, la distribution se fait, selon l’article 167 AU/PC, comme
suit :
- Les créanciers bénéficiaires du privilège de l’argent frais.
- Les créanciers des frais de justice, y compris les honoraires du syndic.
- Les créanciers de frais engagés pour la conservation du bien.

166
V. AUPC, Art. 179-8.

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- Les créances de salaires super privilégiés servis en proportion de la valeur du meuble par
rapport à l’ensemble de l’actif.
- Les créanciers garantis par un privilège général soumis à publicité, les gagistes ou les nantis
selon la date de constitution du gage ou du nantissement.
- Les créanciers nantis ou ayant un privilège général soumis à publicité et chacun venant
selon le rang de son inscription au R.C.C.M.
- Les créanciers munis d’un privilège mobilier spécial chacun portant sur le bien sur lequel
est inscrit son privilège.
- Les créanciers contre la masse.
- Les créanciers munis d’un privilège général non soumis à publicité.
- Les créanciers chirographaires.
4. Les créanciers titulaires de sûretés spéciales colloqués partiellement
C’est le cas d’un créancier hypothécaire dont la créance ne peut pas être payée totalement par
le prix de l’ensemble. Pour le reliquat de leur créance qui n’a pas pu être payé par leurs sûretés,
ce reliquat devient une créance chirographaire et occupera le rang qui y sied.
5. Le rapport du syndic
Chaque semestre le syndic a l’obligation de dresser un rapport sur l’état de la L.B. Ce rapport est
notifié au débiteur, aux créanciers et aux contrôleurs. En ce qui concerne le débiteur, il doit être
informé au fur et à mesure.
Paragraphe 2 : La clôture de l'union
A la fin des opérations, le syndic rend ses comptes au juge-commissaire qui dresse un procès-
verbal constatant la fin des opérations.
Le procès-verbal est transmis au Tribunal qui prononce la clôture de la liquidation des biens. Avec
cette décision, les créanciers vont retrouver leur droit de poursuite individuelle. Ils vont pouvoir
demander au débiteur le paiement des sommes qui leur sont dues et qui n'ont pas pu être payées
pendant la procédure. Pour obtenir le paiement, les créanciers vont être obligés de pratiquer des
voies d'exécution (poursuites individuelles) ; pour cela, ils doivent obtenir un titre exécutoire
délivré par le Président du Tribunal dans les conditions prévues par l’article 171 AU/PC.

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Titre 5 : LES MESURES EXTRAPATRIMONIALES

Compte tenu de la distinction entre l’homme et l’entreprise, aucune sanction personnelle n’est,
en principe, attachée au jugement d’ouverture.

Mais si le débiteur a commis une faute, le tribunal peut ou doit prononcer contre lui des
sanctions civiles et/ou pénales.

CHAPITRE 1 : LA FAILLITE PERSONNELLE


Peuvent être déclarés en faillite personnelle :
- les commerçants personnes physiques ;
- les personnes physiques qui dirigent des personnes morales soumises aux
procédures collectives ;
- les personnes physiques qui ont la qualité de représentant permanent de
personnes morales qui dirigent des personnes assujetties aux procédures collectives.

Ceci dit, il faut voir les cas et les effets de la faillite personnelle, avant d’étudier la réhabilitation.

SECTION 1 : Les cas de faillite personnelle


Il y a les cas de faillite personnelle obligatoire et les cas de faillite personnelle facultative.
100
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Paragraphe 1 : Faillite personnelle obligatoire


Le tribunal doit prononcer la faillite personnelle de toute personne qui aurait accompli l’un des
actes visés à l’article 196 AU/PC :
- soustraction de la comptabilité de l’entreprise, détournement ou dissimulation de
l’actif, reconnaissance frauduleuse de dettes qui n’existent pas ;
- exercice d’une activité commerciale dans son intérêt personnel, soit par personne
interposée, soit sous le couvert d’une personne morale ;
- usage du crédit ou des biens d’une personne morale comme de ses biens propres.
- obtention par dol pour soi-même ou pour son entreprise, d’un concordat par suite
annulé ;
- fait de commettre des actes de mauvaise foi ou des imprudences inexcusables ou
d’enfreindre gravement les règles et usages du commerce ; l’article 197 AU/PC donne une liste
d’actes présumés actes de mauvaise foi, imprudences inexcusables ou infractions graves aux
règles et usages du commerce.

Le tribunal doit également prononcer la faillite personnelle des dirigeants d’une personne
morale condamnés pour banqueroute.

Paragraphe 2 : Faillite personnelle facultative


Elle est réservée aux dirigeants sociaux. Lorsque les dirigeants se trouvent dans l’un des cas
visés par l’article 198 AU/PC, ils peuvent être déclarés en faillite personnelle.

Quels sont ces cas ?


- Avoir commis des fautes graves autres que celles visées à l’article 197 ou avoir
fait preuve d’incompétence manifeste.
- Avoir omis de déclarer dans les 30 jours, la cessation des paiements de la
personne morale.
- Avoir omis d’acquitter le passif social mis à sa charge.

SECTION 2 : Les effets


Paragraphe 1 : Effets communs à toutes les faillites personnelles
Selon l’article 203 AU/PC, la faillite personnelle entraîne :
- l’interdiction d’exercer une fonction publique élective et d’être électeur ;
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- l’interdiction générale de faire le commerce et notamment, de diriger, gérer ou


contrôler une entreprise individuelle ou une personne morale ayant une activité économique ;
- l’interdiction d’exercer une fonction administrative, judiciaire ou de
représentation professionnelle.

Ces interdictions ne sont pas définitives. En effet, le tribunal qui prononce la faillite personnelle
doit en préciser la durée. Celle-ci ne peut être inférieure à trois (3) ans ni supérieure à dix (10)
ans. Au terme fixé, les interdictions cessent de plein droit.

Paragraphe 2 : Effets attachés à la faillite prononcée contre les dirigeants


En plus des interdictions visées à l’article 203 AU/PC, le dirigeant contre lequel est prononcée
la faillite personnelle, est privé du droit de vote dans les assemblées de la personne morale. Son
droit est exercé par un mandataire qui est désigné par le juge-commissaire sur requête du syndic.

SECTION 3 : La réhabilitation
Le débiteur ou le dirigeant qui se conduit bien peut ou même doit, dans certains cas, être rétabli
dans ses droits et déchargé de toutes les déchéances. C’est ce qu’on appelle la réhabilitation.

Ne peut cependant être réhabilitée la personne condamnée pour crime ou délit tant que cette
condamnation a pour effet de lui interdire l’exercice d’une profession commerciale, industrielle
ou artisanale.

Ceci dit, il y a deux (2) cas de réhabilitation : réhabilitation de plein droit et réhabilitation
facultative.

Paragraphe 1 : Réhabilitation de plein droit (article 204 AU/PC)


La réhabilitation opère d’elle-même dans les cas prévus à l’article 204 AU/PC. Le tribunal n’a
pas à la prononcer.
Le débiteur est réhabilité de plein droit lorsqu’il y a clôture pour extinction du passif. De même,
l’associé solidairement responsable est réhabilité de plein droit s’il justifie avoir acquitté toutes
les dettes de la personne morale.

Paragraphe 2 : Réhabilitation facultative (article 205 AU/PC)


Il faut une décision du tribunal.
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Il y a deux cas où le tribunal peut prononcer la réhabilitation, s’il constate que le débiteur est
d’une probité reconnue :
- la personne qui a obtenu un concordat particulier et a intégralement payé les dividendes
promis ;
- la personne justifie de la remise entière de sa dette par ses créanciers ou de leur
consentement unanime à sa réhabilitation.

Il existe deux autres cas de réhabilitation, mais les rédacteurs de l’Acte uniforme ne semblent
pas exiger une probité reconnue. Ainsi, le dirigeant de la personne morale contre lequel a été
prononcé le règlement judiciaire ou la liquidation des biens peut être réhabilité s’il se trouve
dans le cas prévu à l’article 204, al. 1 AU/PC (clôture pour extinction du passif). De même, le
dirigeant de la personne morale contre qui a été seulement prononcée la faillite personnelle peut
être réhabilité si la personne morale se trouve dans le cas prévu à l’article 204, al. 1 AU/PC
(clôture pour extinction du passif).

CHAPITRE 2 : LES SANCTIONS PENALES


Les infractions sont très nombreuses. On peut cependant les classer en tenant compte de la
qualité de leur auteur. On se rend compte alors qu’il y a les infractions commises par le débiteur
et les dirigeants sociaux : ce sont les banqueroutes et délits assimilés. Il y a aussi les
infractions commises par d’autres personnes.

N.B. : Il y a un particularisme ici. Les rédacteurs de l’Acte Uniforme portant Organisation des
procédures collectives ne fixent pas les peines applicables ; ils se contentent de donner les
qualifications et de renvoyer, pour les sanctions applicables, aux peines que la loi nationale de
chaque Etat-partie attache à des infractions qui existent déjà ou qui sont censées exister.

SECTION 1 : Les différentes infractions


Paragraphe 1 : Les banqueroutes et délits assimilés
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A. Les banqueroutes
Elles sont visées dans les articles 228 et 229 AU/PC. Elles concernent les débiteurs
commerçants, personnes physiques et les associés des sociétés commerciales qui ont la qualité
de commerçant. Il existe deux types de banqueroute : la banqueroute simple et la banqueroute
frauduleuse.
1. La banqueroute simple (article 228 AU/PC)
L’Acte Uniforme portant Organisation des Procédures collectives ne fait pas de distinction entre
banqueroute simple à caractère obligatoire et banqueroute simple à caractère facultatif.

Les actes visés par l’article 228 AU/PC sont les suivants :
- le fait de contracter, sans recevoir des valeurs en échange, des engagements jugés
trop importants eu égard à la situation de l’entreprise ;
- l’achat pour revendre en dessous du cours normal ou l’emploi de moyens ruineux
pour se procurer des fonds lorsque l’acte a été accompli en vue de retarder la cessation des
paiements ;

- le défaut de déclaration de la cessation des paiements dans le délai sans excuse


légitime ;
- la tenue d’une comptabilité incomplète ou irrégulière ou l’absence de
comptabilité tenue conformément aux usages eu égard à la taille de l’entreprise ;
- le fait d’être déclaré deux fois en cessation de paiement dans un délai de 5 ans si
les procédures ont été clôturées pour insuffisance d’actif.

Les peines applicables sont prévues par le Code pénal.

2. La banqueroute frauduleuse
Les actes constitutifs de banqueroute sont visés par l’article 229 AU/PC :
- soustraction de comptabilité ;
- détournement ou dissipation de l’actif ;
- reconnaissance frauduleuse de sommes non dues ;
- exercice d’une profession contrairement à une interdiction ;
- paiement d’un créancier au préjudice de la masse après cessation des paiements ;
- stipulation d’avantages particuliers en faveur d’un créancier en raison de son
vote ;
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- présentation de mauvaise foi de documents inexacts ou incomplets pendant la


procédure ;
- accomplissement sans autorisation du Président du tribunal des actes interdits
par l’article 11 AU/PC.

Les peines applicables sont contenues dans le Code pénal. Il y a également une peine
complémentaire facultative : l’interdiction des droits civiques et/ou de fonction ou emploi
public pour une durée qui ne peut excéder cinq (5) ans.

B. Les délits assimilés aux banqueroutes


1. Les personnes visées
L’article 230 AU/PC prévoit que les dispositions de la Section II du Chapitre I du Titre V
s’appliquent aux dirigeants des personnes morales.

Les dirigeants visés sont :


- les personnes physiques qui dirigent des personnes morales assujetties aux
procédures collectives ;
- les personnes physiques qui ont la qualité de représentant permanent de
personnes morales qui dirigent des personnes morales assujetties aux procédures collectives.

2. Les actes visés


a. Les actes assimilés à la banqueroute simple
Il y a ceux qui sont énumérés à l’article 231 AU/PC :
1. La consommation de sommes élevées appartenant à la personne morale dans des
opérations de pur hasard ou des opérations fictives.
2. L’achat en vue d’une revente en dessous du cours normal ou l’emploi de moyens
ruineux pour se procurer des fonds lorsque de tels actes sont faits dans l’intention de retarder la
constatation de la cessation de paiement de la personne morale.
3. Le paiement, après la cessation de paiement, d’un créancier au préjudice de la
masse.
4. Les engagements jugés trop importants pris pour le compte de la personne
morale alors que celle-ci ne reçoit aucune valeur en échange.
5. La tenue d’une comptabilité irrégulière ou incomplète.

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6. L’omission de faire, dans le délai requis, la déclaration de cessation de paiement


de la personne morale.
7. Le détournement ou la dissimulation d’une partie de ses biens ou la
reconnaissance frauduleuse de dettes non dues lorsque l’acte est destiné à soustraire tout ou
partie de son patrimoine aux poursuites de la personne morale, des associés ou des créanciers
de ladite personne morale.

La tentative est aussi punissable.

Il y a ceux qui sont visés à l’article 232 AU/PC:


1. Le fait pour le dirigeant d’une personne morale comportant des associés
indéfiniment responsables, de ne pas faire la déclaration de cessation de paiement de ceux-ci
alors qu’il n’y a aucune excuse légitime.
2. Le fait d’avoir effectué une déclaration incomplète dans les mêmes conditions.

b. Les actes assimilés à la banqueroute frauduleuse


Ils sont énumérés dans l’article 233 AU/PC. On peut les classer en deux catégories.
Il y a ceux qui intéressent tous les dirigeants :
- la soustraction de livres de la personne morale ;
- le détournement ou dissipation d’une partie de l’actif de la personne morale ;
- la reconnaissance de dettes non dues par la personne morale ;
- l’exercice de la profession de dirigeant en violation d’une interdiction ;
- la stipulation d’un avantage particulier au profit d’un créancier en raison de son
vote dans les délibérations de la masse ou la conclusion d’un traité qui aurait pour conséquence
de créer au profit d’un créancier un avantage supporté par la personne morale.

Il y a ceux qui intéressent les dirigeants d’une personne morale en règlement préventif :
- la présentation de mauvaise foi de documents comptables inexacts ;
- la violation de l’interdiction éditée par l’article 11 AU/PC.

Paragraphe 2 : Les infractions imputables aux personnes autres que le débiteur ou les
dirigeants

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Il y a quatre infractions de cette nature : les infractions de recel ou de dissimulation ; les


infractions commises par les proches ; les infractions commises par le personnel de la procédure
et les infractions commises par les créanciers.

A. Les infractions de recel et de dissimulation (article 240 AU/PC)


Sont punies des peines de la banqueroute frauduleuse :
1. les personnes convaincues d’avoir, dans l’intérêt du débiteur, soustrait, recelé ou
dissimulé tout ou partie de ses biens. On peut leur appliquer les règles de la complicité si les
conditions sont réunies ;
2. les personnes convaincues d’avoir frauduleusement produit dans la procédure,
des créances supposées ;
3. les personnes qui, faisant le commerce sous le nom d’autrui ou sous un nom
supposé, ont, de mauvaise foi, détourné ou dissimulé, tenté de détourner ou de dissimuler une
partie de leurs biens.

B. Les infractions commises par les proches (article 241 AU/PC)


Ce texte renvoie aux peines prévues par le Droit pénal en vigueur dans chaque Etat pour les
infractions commises au préjudice d’un incapable.

On peut remarquer ici qu’il y a plusieurs infractions susceptibles d’être commises au préjudice
d’un incapable ; ce qui crée un risque sérieux d’atteinte au principe de la légalité.

Ceci dit, l’article 241 AU/PC vise le conjoint, les descendants, les ascendants, les collatéraux
et les alliés du débiteur qui auraient détourné, diverti ou recelé des effets dépendant de l’actif
du débiteur en état de cessation des paiements.

C. Les infractions commises par le personnel


Il y a un renvoi aux peines prévues pour les infractions commises par une personne faisant appel
au public au préjudice d’un loueur, dépositaire, mandataire…
On peut faire la même observation que pour les infractions prévues par l’article 241 AU/PC.

Ceci dit, l’article 243 AU/PC vise le syndic qui :


- exerce une activité commerciale personnelle sous le couvert de l’entreprise du
débiteur ;
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- dispose du crédit ou des biens du débiteur comme de ses biens propres ;


- dissipe les biens du débiteur ;
- poursuit abusivement et de mauvaise foi, dans son intérêt personnel, une
exploitation déficitaire de l’entreprise du débiteur ;
- se rend acquéreur pour son compte, directement ou non, des biens du débiteur

D. Les infractions commises par les créanciers


L’article 244 AU/PC consacré à ce type d’infractions renvoie aux peines applicables aux
infractions commises au préjudice d’un incapable.
Ce texte vise :
1. le créancier qui a stipulé, avec le débiteur ou avec toute personne, des avantages
particuliers en raison de son vote dans les délibérations de la masse ;
2. le créancier qui a fait un traité particulier duquel résulterait en sa faveur un
avantage à la charge de l’actif du débiteur.

A côté des peines pénales prévues, il y a une sanction civile prévue par l’article 245 AU/PC :
c’est la nullité de la convention à l’égard de tous, y compris le débiteur. La nullité est prononcée
par la juridiction répressive. Il convient de relever le caractère inhabituel de cette règle qui
confère au juge répressif le pouvoir de se prononcer sur la nullité d’un acte juridique.

SECTION 2 : Les règles de procédure


L’Acte Uniforme ne réglemente de manière détaillée que la procédure à suivre en matière de
banqueroute et délits assimilés (articles 234 à 239 AU/PC). Un seul article est consacré aux
infractions commises par les autres : il s’agit de l’article 242 AU/PC consacré aux infractions
de recel et de dissimulation et aux infractions commises par les proches. Ce texte prévoit que,
même en cas de relaxe, la juridiction répressive statue sur les dommages et intérêts et sur la
réintégration dans le patrimoine du débiteur des actions ou biens soustraits. Pour les infractions
de banqueroute et pour les délits assimilés, les poursuites sont déclenchées à l’initiative du
ministère public, du syndic ou d’un créancier.
- Le syndic n’agit au nom de la masse qu’avec l’autorisation du juge-commissaire.
- Le créancier peut agir en son nom propre ou au nom de la masse ; il peut aussi
intervenir à titre individuel dans une poursuite initiée par le syndic au nom de la masse.

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En ce qui concerne les frais de poursuite, il faut distinguer selon qu’il s’agit de poursuites
initiées par le ministère public, le syndic ou un créancier.
- Poursuite initiée par le ministère public : en cas de condamnation, c’est le
débiteur qui supporte les frais, mais le Trésor ne peut exercer un recours en recouvrement
qu’après l’exécution du concordat en cas de redressement judiciaire ou la clôture des opérations
en cas de liquidation des biens.
- Poursuite intentée par le syndic : en cas de relaxe, les frais sont supportés par la
masse ; en cas de condamnation, par le Trésor qui pourra se retourner contre le débiteur.

Poursuite intentée par un créancier : en cas de relaxe, c’est lui-même qui supporte les frais ; en
cas de condamnation, les frais sont supportés par le Trésor qui pourra exercer un recours contre
le débiteur. Une condamnation pour banqueroute ou délit assimilé peut être prononcée même
si la cessation des paiements n’a pas été constatée par le tribunal.

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