Article 410213
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Le 13 mars 1493, Colomb revient à Palos de son premier voyage et apporte au monde la nouvelle
de sa découverte d’octobre 1492. Le 4 mai 1493, le pape Alexandre VI publie la deuxième bulle Inter
Coetera II, qui partage les terres à découvrir entre les deux royaumes de Castille et du Portugal selon
une ligne faussement appelée méridienne, à 100 lieues marines à l’Ouest de celle qui joint les Açores
aux îles du Cap-Vert. À l’Est de cette ligne, les découvertes appartiendront aux Portugais, à l’Ouest
aux Espagnols. Les Portugais demandent et obtiennent que cette ligne de partage soit repoussée
à l’Ouest selon un méridien situé à 370 lieues marines des îles du Cap-Vert1. Sur ces bases,
treize mois plus tard, le 7 juin 1494, le traité de partage est signé à Tordesillas, ville de Castille
proche de Valladolid capitale de l’Espagne, et de Medina del Campo, résidence de la cour.
P
our notre époque contempo- évoquer le traité du Droit de la Mer,
raine, submergée d’informations signé sous l’égide des Nations-Unies à maritimes et commerciales de la
détaillées sur tout événement et Montego Bay en 1982 après dix ans de Castille et du Portugal. En 1493-94, cet
nourrie de connaissances et de don- négociations, encore en cours de ratifi- antagonisme trouve une issue passa-
nées géographiques, historiques et juri- cation pour quelques pays, la France gère, où chacun des protagonistes
diques quasi-exhaustives, la rapidité l’ayant ratifié en 1995. pense en retirer avantage. Depuis 1415
d’élaboration de signature du traité de En fait, la rapidité de conclusion du et poursuivant les initiatives portu-
Tordesillas a de quoi surprendre. Pour
ne prendre qu’un seul exemple, on peut
traité de Tordesillas ne reflète que la
partie émergée d’un antagonisme
gaises du XIVe siècle, l’infant dom
Henrique2 avait conduit jusqu’à sa mort ...
Si l’histoire des latitudes brille de simplicité, Les voyages sur terre et sur mer sont nettement différents
celle des longitudes est longue, complexe lorsqu’il s’agit de déterminer où l’on se trouve à un instant
donné. Cette différence, de manière tout à fait triviale, vient du
et tortueuse. Elle est liée à l’histoire économique
fait que les routes continentales sont jalonnées de repères
et politique de nos civilisations; elle marquera facilement identifiables (moyennant l’expérience du voya-
l’histoire des sciences. La première phase geur) et surtout immobiles et pérennes. Ce n’est plus le cas
de cette histoire commence avec les travaux lors des navigations hauturières où l’horizon se vide déses-
de Ptolémée et s’étend jusqu’au début pérément à mesure que l’on s’éloigne des côtes, ne laissant
du XVIIe siècle. Si l’observation des éclipses au navigateur au mieux qu’une ligne d’horizon, quand la
brume ne couvre pas cette mince démarcation entre ciel et
de Lune permet dans certains cas de calculer
mer. Sur un océan hostile, comment déterminer sa position ?
une longitude, les navigateurs ne peuvent Comment éviter une côte dangereuse, comment, tout sim-
qu’estimer leur position principalement plement, être certain de l’endroit où l’on va arriver après plu-
à cause des mouvements de leur navire sieurs semaines de navigation ?
ainsi que de la rareté de ces phénomènes célestes. Ce problème, dont la clé tourne aujourd’hui autour des trois
On découvre au cours des siècles des méthodes lettres GPS, consistant à se repérer sur une grille de lignes
et des instruments permettant d’observer imaginaires (les méridiens et les parallèles), provoqua, dans
les astres, qui mèneront à la détermination ses conséquences les plus dramatiques, un nombre de nau-
des latitudes. Le secret des longitudes frages exceptionnel, prix qu’il fallut sans doute payer pour
assister à l’écriture d’une des plus belles pages de l’histoire de
reste cependant bien gardé, mais seulement
la mécanique.
pour un temps.
Si les premières longitudes furent données au premier siècle
de notre ère, il faudra attendre une quinzaine de siècles pour
que l’homme se penche à nouveau sur cette question, sans
doute pressé par la menace politique et économique des
siècles Renaissants. Le navigateur, lui, commence à s’éloigner
D
ans cet univers qui l’entoure, l’Homme, soucieux de
des côtes, il finit par s’y perdre et succombe souvent aux
maîtriser et de posséder la nature, fait de l’art de s’y
assauts de son ignorance. C’est en levant les yeux au ciel que
repérer une évidence. Son univers, c’est d’abord
l’homme trouvera son salut. Le monde supra lunaire, incor-
notre terre, et nos mers. Comment trouver sa route à travers
ruptible, parfait, sera bientôt le fil d’Ariane du pilote.
cet océan d’inconnus, une route, autre que celle du hasard ?
Si l’Homme bâtit des villes, il construit et développe les
réseaux qui les font vivre. Ce sont d’abord les routes, ter-
restres et maritimes, qu’il faudra découvrir puis perpétuer.
L’enfance de l’art
La constitution de ce patrimoine géographique commence Si l’histoire de la navigation n’est pas la plus vielle histoire du
par la connaissance la plus précise (la position) et par la monde, elle s’en approche. Cette épopée, qui d’ailleurs ne
mémoire (la carte) de ces routes commerciales et souvent
aventureuses.
cesse d’en finir, est l’histoire de notre relation à l’espace et au
temps. C’est Ptolémée qui posa les jalons d’une cartographie ...
Revue XYZ • N°102 – 1er trimestre 2005 65
Histoire