Guérin 1997
Guérin 1997
Guérin 1997
Depuis la révolution industrielle, la façon par Galambaud 1) mais il est rassurant rendement moyen peut être garanti grâce
de gérer les employés s’est modifiée sous d’avoir un bon salaire, une sécurité à toute une armée de cadres, de contre-
l’emprise du taylorisme avec l’apparition d’emploi blindée et des avantages maîtres et de spécialistes qui planifient et
de nouvelles techniques de gestion accordés selon l’ancienneté. Quant aux contrôlent la production. Les organi-
(sélection, rémunération, etc.) tout en employeurs, plusieurs n’aiment pas trop sations du XXI e siècle peuvent-elles se
s’adaptant aux nouvelles données de les syndicats et les rigidités qui limitent permettre un tel gaspillage de talents?
l’environnement (apparition des syn- leur sphère d’influence, mais il est rassu- Bien sûr que non parce que l’envi-
dicats, arrivée de lois du travail, etc.). rant pour eux d’avoir des interlocuteurs ronnement d’aujourd’hui est différent.
Avec le temps, ces différentes forces ont bien identifiés, de savoir que ces derniers Depuis quelques années, l’environne-
contribué à forger un modèle de gestion ont du pouvoir sur les employés et qu’ils ment se déstabilise, le travail s’intellec-
«traditionnel» qui, dans l’ensemble, a jouent selon les mêmes règles. Bref, il est tualise, les risques se multiplient et les
relativement bien fonctionné. Certes, rassurant d’opérer à l’intérieur d’un ressources se raréfient. La question est
plusieurs employés n’aiment pas se faire système stable et prévisible où la loyauté donc de savoir si le modèle traditionnel
traiter comme des enfants (par le biais de des employés se mesure en fonction de est capable de se réformer en ayant, en
relations hiérarchiques «infantilisantes» leur obéissance et de leur respect de ligne de mire, l’objectif d’inciter les
pour reprendre une expression utilisée l’autorité. Finalement, tout le monde y employés à mettre toutes leurs énergies
trouve son compte! et tout leur potentiel au service de l’orga-
LES AUTEURS En filigrane du modèle traditionnel se nisation pour réussir à survivre dans cet
dégage une constante, à savoir le recours environnement plus hostile.
à l’autorité pour contrôler les employés.
La quête de contrôle est tellement un
trait dominant du modèle traditionnel L’essoufflement du modèle
que plusieurs auteurs n’hésitent pas à traditionnel
parler de modèle axé sur le contrôle 2.
Gilles Guérin est pro- Ainsi, pour se mettre en symbiose avec ce Le modèle traditionnel a commencé à
fesseur à l’École des mode de gestion traditionnel, les montrer des signes de dysfonctionne-
relations industrielles employés ont appris à être passifs... dans ment quand l’environnement a changé.
de l’Université de l’attente des ordres : ils se limitent à faire Sont alors apparues des difficultés
Montréal.
ce qu’on leur demande. Une expression d’adaptation tant pour les employés que
imagée décrit bien cette situation : les pour les employeurs. Par exemple, des
employés se sont mis en mode de «pilo- employés plus qualifiés supportent de
tage automatique», ce qui leur permet de moins en moins d’être traités comme des
se désengager émotivement et de limiter enfants et sont suffisamment instruits
leurs énergies à faire le minimum exigé, pour porter un jugement sur les actes
Thierry Wils est
sans plus. Tant que l’environnement est posés par la haute direction et les ges-
professeur au dépar- stable, que la concurrence n’est pas trop tionnaires. Quant aux employeurs, ils
tement de relations vive et que les ressources sont abon- subissent l’assaut d’une concurrence de
industrielles de dantes, un rendement moyen de la part plus en plus féroce qui les amène à être
l’Université du des employés est suffisant. De plus, tant moins généreux, voire à se départir
Québec à Hull.
que le travail n’est pas intellectuel, ce d’employés en surplus. Qui plus est, les