Leadbeater CW Clairvoyance
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LIVRE
CHAPITRE PREMIER
—
CE QU'EST LA CLAIRVOYANCE
1
Note du traducteur : De through, à travers. On pourrait peut-être rendre throughth par
"traversabilité" ?
constamment observés de la vision astrale. J'ose donc suggérer
respectueusement que, lorsque Mme Blavatsky écrivit comme elle l'a fait,
elle parlait de la vision éthérique et non astrale et qu'elle ne songea pas à
quel point sa phrase s'appliquait à cette seconde et plus haute faculté qu'elle
n'envisageait pas à ce moment-là.
Dans tout ce qui suit, il ne faut jamais perdre de vue la possession de ce
pouvoir extraordinaire et à peine définissable. Il livre entièrement aux
regards du voyant chaque parcelle de l'intérieur de quelque corps solide que
ce soit, absolument de même que chaque endroit dans l'intérêt d'un cercle
est visible pour l'individu qui le regarde d'en haut.
Mais ce n'est même pas là tout ce qu'il procure à celui qui en jouit.
Celui-là ne voit pas seulement l'intérieur aussi bien que l'extérieur d'un objet
quelconque, mais il voit également sa contrepartie astrale. Tout atome et
toute molécule de matière physique a ses atomes et ses molécules astrales
correspondants, et notre clairvoyant voit nettement le corps que ceux-ci
composent. Habituellement, l'astral d'un objet quelconque se projette, en
quelque sorte, au-delà de la partie physique de cet objet, et c'est ainsi qu'on
voit des métaux, des pierres et d'autres corps entourés d'une aura astrale.
On comprendra tout de suite que, même dans l'étude de la matière
inorganique, un homme gagne beaucoup à posséder cette vision. Non
seulement il voit la partie astrale d'un objet qu'il regarde, partie qui lui était
complètement cachée jusqu'alors ; non seulement il voit beaucoup plus de
sa constitution physique qu'auparavant, mais il voit encore bien plus
clairement et exactement ce qui lui était déjà précédemment visible. Un
instant de réflexion montrera que sa vision nouvelle se rapproche bien
davantage de la perception vraie que la vue physique. Si, par exemple, il
regarde astralement un cube de verre, les côtés lui en paraitront égaux,
comme nous savons qu'ils le sont en réalité, tandis que sur le plan physique
il verra le côté le plus éloigné de lui, en perspective, plus petit par
conséquent que le côté le plus proche, et cette différence n'est qu'une illusion
due à la limitation de ses facultés physiques.
Lorsque nous en venons à considérer les facilités nouvelles que la vision
astrale apporte dans l'examen des objets animés, nous voyons plus nettement
encore ses avantages. Elle montre au clairvoyant l'aura des plantes et des
animaux, et par suite, en ce qui concerne ces derniers, leurs désirs, leurs
émotions et leurs pensées, quels qu'ils soient, sont clairement mis devant ses
yeux.
Mais c'est surtout à l'endroit des êtres humains qu'il goutera le plus le
prix de cette faculté, car il lui sera souvent permis de leur venir en aide plus
efficacement lorsqu'il pourra se guider d'après les indications qu'elle lui
fournira.
Il pourra voir l'aura jusqu'à la limite du corps astral, et quoique cette
limite cache encore à ses regards tout le domaine supérieur de l'homme, il
lui sera cependant possible, s'il observe attentivement, d'apprendre, grâce à
ce qui est à sa portée, beaucoup de ce qui concerne ce domaine supérieur.
La faculté d'examiner le double éthérique lui sera extrêmement utile pour
déterminer et pour classer les faiblesses ou les maladies du système nerveux,
quelles qu'elles soient, tandis que l'aspect du corps astral lui fera connaitre
aussitôt toutes les émotions, les passions, les désirs et les tendances de
l'homme qu'il aura en face de lui, ainsi qu'un grand nombre de ses pensées.
À mesure qu'il regardera une personne, il la verra environnée de la
brume lumineuse de l'aura astrale, brillant de toutes sortes de couleurs
étincelantes, et changeant constamment de ton et d'éclat selon chaque
variation dans les pensées et les sentiments de cette personne. Il verra cette
aura inondée de la superbe couleur rose de la pure affection, du beau bleu
du dévouement, du brun dur et sombre de l'égoïsme, du rouge foncé de la
colère, de l'horrible rouge blafard de la sensualité, du gris livide de la crainte,
des nuages noirs de la haine et de la malice, ou de l'un quelconque des
innombrables sentiments qu'y peut si facilement lire un œil exercé ; et ainsi,
il sera impossible à n'importe qui de lui cacher l'état véritable de ses pensées
sur quelque sujet que ce soit.
Ces indications variées que donne l'aura constituent en elles-mêmes une
étude du plus grand intérêt, mais je manque de place pour les examiner en
détail ici. On en trouvera dans mon ouvrage sur ce sujet, L'Homme visible
et invisible, un exposé beaucoup plus complet ainsi qu'un grand nombre de
planches en couleurs.
L'aura astrale ne montre pas seulement au clairvoyant le résultat
temporaire de l'émotion qui la traverse en un moment déterminé, mais elle
lui permet encore, grâce à l'arrangement et au rapport de ses couleurs lorsque
l'aura se trouve dans un état de repos relatif, de déterminer les tendances
générales et le caractère de celui qui la possède. Car le corps astral est
l'expression de tout ce qui peut se manifester du tempérament de l'homme
sur ce plan, en sorte que ce qu'on y voit permet d'imaginer, avec une grande
certitude, beaucoup plus de ce qui appartient aux plans supérieurs.
Dans ce jugement du caractère des individus, notre clairvoyant sera
grandement aidé par tout ce qui s'exprime de leur pensée sur le plan astral
et se trouve, en conséquence, à sa portée. Le véritable asile de la pensée se
rencontre sur le plan mental, et c'est là que toute pensée se manifeste d'abord
sous forme de vibration du corps mental. Mais si cette pensée est le moins
du monde égoïste, ou si elle a un rapport quelconque avec une émotion ou
un désir, elle descend immédiatement dans le plan astral et adopte une forme
visible de matière astrale.
Chez la majorité des hommes, toute pensée, pour ainsi dire, ressortirait
à l'un ou l'autre de ces deux chefs ; ce qui fait que, pratiquement, leur
personnalité tout entière apparait nettement à la vision astrale de notre
clairvoyant, puisque leurs corps astraux et les formes-pensées qui en
rayonnent constamment lui seraient aussi intelligibles qu'un livre ouvert où
leurs traits caractéristiques seraient écrits en lettres assez grosses pour qu'il
fût possible de lire même en courant. Ceux qui chercheraient à se faire une
idée de la manière dont les formes-pensées se présentent à la vision
clairvoyante pourront se satisfaire dans une certaine mesure en examinant
les dessins qui illustrent notre ouvrage sur ce sujet particulier 2.
Nous avons dit quelques mots des changements qui se produisent dans
l'apparence des objets animés et inanimés, lorsque ceux-ci sont vus par
quelqu'un qui possède une vision clairvoyante complète, en ce qui concerne
le plan astral ; considérons maintenant les objets entièrement nouveaux que
ce quelqu'un verra. Il aura conscience d'une bien plus grande richesse dans
la nature, sous beaucoup de rapports, mais son attention sera
particulièrement attirée par les citoyens vivants de ce monde nouveau. Il ne
nous est pas permis de parler d'eux en détail dans l'espace dont nous
disposons à ce sujet, nous renvoyons le lecteur à l'ouvrage Le Plan astral 3
Nous ne pouvons rien faire de plus ici que d'énumérer brièvement quelques-
unes des classes seulement de la grande multitude des habitants de l'astral.
Le clairvoyant sera frappé des formes protéennes de la marée incessante
d'essence élémentale, tourbillonnant toujours autour de lui, menaçante
souvent, mais se retirant toujours cependant en présence d'un effort
déterminé de la volonté ; il sera émerveillé par la gigantesque armée d'entités
soustraites à cet océan et temporairement appelées à une existence séparée,
2
Note de l'éditeur : Les Formes-pensées, par A. Besant et C.-W. Leadbeater ; nombreuses planches
coloriées.
3
Le Plan astral, par C.-W. Leadbeater.
par les pensées et les désirs, bons ou mauvais, de l'homme. Il verra travailler
ou s'amuser les nombreuses catégories d'esprits de la nature, il pourra parfois
étudier avec un enchantement toujours croissant révolution magnifique de
certaines des classes les plus inférieures du glorieux royaume des dévas, qui
correspond approximativement à l'armée des anges de la terminologie
chrétienne.
Mais peut-être que les habitants humains du monde astral lui seront d'un
intérêt plus palpitant encore, et il verra qu'ils se divisent en deux grandes
classes : ceux que nous nommons, les vivants, et les autres – dont la plupart
sont infiniment plus vivants – que nous nommons si stupidement, à tort : les
morts. Il en trouvera un, çà et là, parmi les premiers, parfaitement éveillé et
pleinement conscient, envoyé peut-être pour lui porter quelque message, ou
qui l'examinera de près pour voir quels progrès il accomplit ; tandis que la
majorité de ses voisins, alors qu'éloignés de leurs corps physiques durant
leur sommeil, se traineront paresseusement drapés dans leurs propres
pensées au point de ne pas se rendre compte, pour ainsi dire, de ce qui se
passe autour d'eux.
Parmi la grande multitude de ceux qui sont récemment morts, il
trouvera tous les degrés d'états de conscience et d'intelligence et des
caractères de toutes espèces ; car la mort qui semble être, pour notre vision
limitée, un changement si absolu, ne modifie en réalité rien de l'homme lui-
même. Le lendemain de sa mort il est exactement le même homme que le
jour qui la précéda, avec les mêmes tendances, les mêmes qualités, les
mêmes vertus et les mêmes vices, – avec cette différence, cependant, qu'il a
dépouillé son corps physique ; mais cette perte-là ne fait pas davantage de
lui un autre homme que ne le saurait faire le fait d'enlever son pardessus.
Ainsi, parmi les morts, notre étudiant trouvera des hommes intelligents et
stupides, au cœur bon, et moroses, sérieux et frivoles, à l'esprit tourné vers
les choses spirituelles ou vers les sensuelles, tout comme parmi les vivants.
Étant donné qu'il a la faculté, non seulement de voir les morts, mais
encore de leur parler, il peut leur être souvent très utile en leur donnant des
indications et des conseils qui leur sont du plus grand prix. Beaucoup d'entre
eux sont dans un état de grande perplexité et parfois même de détresse aigue,
parce qu'ils trouvent que les évènements de ce monde nouveau ressemblent
si peu aux légendes enfantines qui constituent tout ce que la religion
populaire de l'Occident a pu leur offrir sur ce sujet d'une importance
transcendante ; et c'est pourquoi l'homme qui comprend ce monde nouveau
et peut expliquer les choses est comme un véritable ami pour qui se trouve
dans le besoin.
De bien d'autres façons, l'homme qui possède pleinement cette faculté
peut être utile aux vivants aussi bien qu'aux morts ; mais j'ai déjà parlé de
ce côté-ci de la question dans mon petit livre Les Aides invisibles. En plus
des entités astrales, il verra des corps astraux – ombres ou coques à tous les
états de décomposition ; mais il nous suffit simplement de les mentionner
ici, puisque le lecteur désireux d'en savoir davantage trouvera ce qu'il
cherche dans nos autres ouvrages.
Un autre résultat surprenant que la faculté parfaite de la clairvoyance
astrale apporte à l'homme consiste en ce qu'il n'a plus aucune discontinuité
de conscience. Quand il se couche le soir il donne à son corps physique le
repos dont il a besoin, cependant qu'il va à ses affaires dans le beaucoup plus
confortable véhicule astral. Au matin, il regagne son corps physique, le
réintègre, mais sans aucune perte de conscience ou de mémoire entre ces
deux états, et il peut vivre, pour ainsi dire, une vie double qui est unique
pourtant, et s'employer utilement pendant sa durée entière, au lieu de perdre
un tiers de son existence dans une morne inconscience.
Un autre pouvoir curieux que le clairvoyant peut se trouver posséder
(bien que la maitrise absolue de ce pouvoir appartienne plutôt à l'encore plus
haute faculté dévachanique) est celui qui lui permettra d'agrandir à volonté,
en leur donnant la dimension qu'il lui plaira, les molécules physiques ou
astrales les plus menues, quoiqu'on n'ait jamais fait et qu'on ne fera
probablement jamais de microscope qui possède même la millième partie de
ce pouvoir grossissant psychique. Grâce à lui, la molécule et l'atome
hypothétiques recherchés par la science se présentent à celui qui étudie la
science occulte sous forme de réalités visibles et vivantes, et cet examen
plus proche les lui fait trouver beaucoup plus complexes dans leur structure
que l'homme de science n'a encore pu les concevoir. Il pourra suivre aussi
avec l'attention la plus soutenue et le plus vif intérêt toutes sortes d'actions
électriques, magnétiques ou éthériques ; et quand quelques-uns de ceux qui
se spécialisent dans ces diverses branches de la science seront à même
d'acquérir la faculté de voir ces choses au sujet desquelles ils écrivent si
facilement, on pourra s'attendre à des révélations très extraordinaires et
merveilleuses.
Et voici maintenant un des siddhis ou pouvoirs que les livres orientaux
disent échoir à l'homme qui s'adonne au développement spirituel, bien que
le nom sous lequel on les mentionne puisse ne pas être reconnaissable dès
l'abord. On en parle comme de la "faculté de se faire grand ou petit à
volonté", et la raison d'une explication qui semble contredire si
complètement ce fait est que, en réalité, la méthode grâce à laquelle on
accomplit cette action est précisément celle qui est indiquée dans ces anciens
livres.
C'est par le moyen d'appareils d'une inconcevable délicatesse que l'on
voit si clairement le monde des infiniment petits ; et de même (ou plutôt par
contre) c'est en augmentant temporairement d'une manière considérable la
dimension des appareils ainsi employés, qu'il devient possible d'accroitre le
champ de sa vision – au sens physique aussi bien, espérons-le, qu'au sens
moral – bien au-delà de tout ce que la science a jamais pu rêver de possible
pour l'homme. De sorte que le changement des dimensions réside
véritablement dans le véhicule de l'état de conscience de celui qui étudie, et
non dans quoi que ce soit en dehors de lui ; et le vieux livre oriental a, en
somme, précisé le cas beaucoup plus exactement que nous.
La psychométrie et la seconde vue in excelsis seraient aussi au nombre
des facultés dont notre ami serait en possession ; mais nous en parlerons plus
convenablement dans un prochain chapitre, puisque, dans presque toutes
leurs manifestations, ces facultés impliquent la clairvoyance, soit dans
l'espace, soit dans le temps.
J'ai maintenant indiqué, quoique dans les plus grandes lignes seulement,
ce qu'un étudiant exercé, en possession de la vision astrale complète, verrait
dans le monde immensément plus vaste que cette vision lui aurait ouvert ;
mais je n'ai rien dit du changement prodigieux survenu dans ses dispositions
mentales, changement qui provient de sa certitude expérimentale touchant
l'existence de l'âme, sa survie après la mort, le fonctionnement de la loi de
Karma, et d'autres points encore, d'une importance également primordiale.
Il faut sentir, afin de pouvoir l'apprécier, la différence qui existe entre la
conviction intellectuelle même la plus profonde et le savoir précis acquis
grâce à l'expérience personnelle directe.
CHAPITRE III
—
CLAIRVOYANCE SIMPLE : PARTIELLE
4
Note : Test and business clairvoyants.
Ceux qui n'ont joui qu'exceptionnellement d'une certaine dose de
pouvoir clairvoyant, et sans que leur volonté y ait contribué en rien, ont
souvent été des gens hystériques ou extrêmement nerveux, chez qui la
faculté en question constituait dans une grande mesure un des symptômes
de leur mal. L'apparence de cette faculté montrait que le véhicule physique
était affaibli à un tel point qu'il ne présentait plus aucun obstacle à un certain
degré de vision éthérique ou astrale. Un exemple caractéristique de cette
catégorie d'individus nous est fourni par l'ivrogne atteint du délirium
trémens et qui, à l'état de ruine physique absolue et d'excitation psychique
impure, – conséquence des ravages de ce vice cruel, – peut voir
momentanément quelques-uns des repoussants élémentals, ainsi que
d'autres entités qu'il a attirées auprès de lui par sa longue faiblesse
dégradante et bestiale. Il y a néanmoins d'autres cas où le pouvoir de la
vision est apparu et a disparu sans aucun rapport manifeste avec l'état de la
santé physique ; mais il semble probable que, même dans ce cas-là, on aurait
remarqué, si on avait pu les observer d'assez près, certaines modifications
dans l'état du double éthérique.
Il est difficile, à cause de la grande variété des circonstances qui y ont
contribué, de classer d'une façon qui soit complète les individus qui, au
cours de leur existence tout entière, n'ont à rapporter qu'un seul cas où ils
ont possédé la clairvoyance.
Il y en a beaucoup parmi eux, pour qui le fait s'est produit à une heure
suprême de leur vie, et l'on comprend qu'il ait pu y avoir une exaltation
momentanée de cette faculté, suffisant à justifier le phénomène.
Une subdivision nouvelle intéresserait un cas unique : celui de la vue
d'une apparition – le plus communément, celle d'un ami ou d'un parent – au
moment de sa mort. Nous pouvons choisir entre deux explications, et, dans
chacune, le désir impérieux du mourant est la force qui agit. Cette force peut
lui avoir permis de se matérialiser un instant, auquel cas, bien entendu, nulle
clairvoyance n'était nécessaire ; ou bien, plus probablement, cette force aura
pu agir sur celui qui a éprouvé le pressentiment en question, et aura diminué
sa sensibilité plus haute. Dans l'un ou l'autre cas, la vision est le résultat
d'une circonstance critique, et elle ne se renouvèle pas, simplement parce
que les conditions nécessaires ne se répètent pas non plus.
Il reste, toutefois, une catégorie inexplicable de cas où apparait un
exemple unique de l'inexplicable clairvoyance indubitable, alors même que
les circonstances qui la produisent nous paraissent triviales et sans
importance. À leur sujet, nous ne pouvons que formuler des hypothèses ; les
conditions déterminantes ne se trouvent évidemment pas sur le plan
physique, et il serait nécessaire d'étudier séparément chaque cas avant de
pouvoir parler avec quelque certitude de ses causes. Il a semblé, parfois,
qu'une entité astrale cherchait à faire quelque communication, mais n'était
capable de transmettre à son sujet que des détails sans importance, tandis
que toute la partie utile ou significative de ce qu'elle avait à dire ne parvenait
pas à frapper la conscience de l'individu.
On rencontrera, dans l'étude des phénomènes de clairvoyance, tous ces
types variés, ainsi que bien d'autres encore ; un certain nombre de cas
d'hallucination pure se présenteront à coup sûr aussi, et il faudra les rayer
soigneusement de la liste des exemples. Celui qui étudie un sujet comme le
nôtre doit s'armer d'une dose inépuisable de patience et de ferme
persévérance, mais s'il va suffisamment loin dans cette étude, il commencera
à distinguer faiblement l'ordre en place du chaos et se fera, peu à peu, une
idée des grandes lois qui président à la marche de l'évolution tout entière.
Il sera grandement aidé dans ses efforts s'il veut adopter l'ordre que nous
venons de suivre ; il prendra d'abord la peine de se familiariser aussi
complètement que possible avec les faits réels concernant les plans dont
s'occupe la clairvoyance ordinaire. S'il veut ainsi apprendre ce que l'on peut
véritablement voir grâce à la vue astrale et éthérique, et quelles sont leurs
limites respectives, il aura alors, en quelque sorte, un terme de comparaison
pour juger les cas qu'il observera. Puisque tous les cas de vision partielle
doivent de toute nécessité trouver place dans ce tout, s'il a en tête les lignes
principales de ce plan entier, il trouvera relativement aisé, avec un peu
d'habitude, de classer les cas dont il aura à s'occuper.
Nous n'avons encore rien dit des possibilités encore plus étonnantes de
clairvoyance sur le plan mental, et il n'est vraiment pas nécessaire d'en parler
longuement, étant donné qu'il est infiniment improbable que l'investigateur
n'en ait jamais rencontré d'exemples, si ce n'est chez des élèves très exercés
dans certaines des plus grandes écoles d'occultisme. Cette clairvoyance sur
le plan mental leur ouvre encore un monde nouveau, bien plus vaste que
tous ceux qui se trouvent au-dessous de lui – un monde où tout ce que nous
pouvons imaginer de gloire et de splendeur extrêmes constitue le lieu
commun de l'existence. L'un de nos ouvrages théosophiques 5, auquel nous
renvoyons l'étudiant, donne quelques détails sur sa faculté merveilleuse, son
5
Le plan mental, par C. W. Leadbeater.
ineffable félicité, et les facilités inouïes que l'on y a pour apprendre et
travailler.
Tout ce que ce monde nouveau peut donner est à la portée de l'élève
exercé – dans la mesure, toutefois, où il peut se l'assimiler –, mais, pour le
clairvoyant inexpérimenté, y atteindre n'est guère davantage qu'une simple
possibilité. On y est parvenu au cours de la transe mesmérique, mais c'est
un phénomène d'une extrême rareté, car il nécessite des aptitudes presque
surhumaines sous la forme d'aspirations spirituelles élevées, et d'une absolue
pureté de pensée et d'intention, à la fois de la part du sujet et de l'opérateur.
On peut raisonnablement donner le nom de vision spirituelle à un genre
de clairvoyance comme celui-là et mieux encore à celle qui appartient au
plan qui est juste au-dessus de ce dernier ; et, puisque le monde céleste
auquel elle ouvre nos yeux s'étend tout autour de nous ici même et à présent,
il convient que ce que nous en disons en passant trouve sa place dans le
chapitre sur la clairvoyance simple, quoiqu'il puisse être nécessaire d'y
revenir quand nous parlerons de la clairvoyance dans l'espace, à laquelle
nous allons passer maintenant.
CHAPITRE IV
—
CLAIRVOYANCE DANS L'ESPACE : VOLONTAIRE
6
Le Côté caché de la Nature.
telle raison, lui écrire, mais qu'il se trouvait à cet instant même dans un café,
à Londres, et qu'il serait dans peu de temps de retour chez lui.
Le mari revint en effet et quand sa femme apprit par lui que les causes
de son silence inaccoutumé avaient été précisément celles que l'individu lui
avait indiquées, elle fut très désireuse de vérifier ses autres assertions. Là
encore, elle reçut satisfaction, car son mari n'eut pas plutôt aperçu le
magicien qu'il déclara à ce dernier l'avoir rencontré déjà, un certain jour,
dans un café à Londres ; qu'il lui avait dit que sa femme était extrêmement
inquiète à son sujet et que sur ce, lui, le capitaine, avait expliqué comment
il avait été empêché d'écrire, et ajouté qu'il était à la veille de s'embarquer
pour l'Amérique. Après quoi il avait perdu l'étranger de vue dans la foule, et
ne savait rien de plus sur son compte.
Nous n'avons, bien entendu, aucun moyen de savoir quelle preuve Jung
Stilling a eue de l'authenticité de cette histoire, bien qu'il se déclare
entièrement satisfait de l'autorité sur laquelle il s'appuie pour la raconter ;
mais tant de phénomènes similaires se sont produits qu'il n'y a aucun motif
pour douter de son exactitude. Quoi qu'il en soit, le voyant aura dû, ou bien
développer lui-même sa faculté, ou bien apprendre à la développer à quelque
autre école que celle où la majeure partie de notre enseignement
théosophique est puisé ; car dans nos écoles, il existe une règle très
judicieuse, qui défend expressément aux élèves de ne donner aucune
manifestation d'une pareille faculté qui puisse être vérifiée de part et d'autre
d'une façon déterminée et constituer ainsi ce que l'on appelle un
"phénomène". Les résultats désastreux qui suivirent un relâchement
temporaire insignifiant de cette règle prouvent à tous ceux qui savent
quelque chose de l'histoire de notre Société que c'est là une mesure
éminemment raisonnable.
J'ai, dans mon petit livre sur Les Aides invisibles, indiqué des cas tout à
fait récents presque exactement semblables à celui qui précède. M. Stead,
dans ses Real ghost stories 7 (p. 7), raconte celui d'une dame, bien connue
de moi, qui apparaissait ainsi fréquemment à ses amis, au loin, et dans ses
Dreams and ghosts 8 (p. 89), M. Andrew Lang rapporte comment M. Cleave,
qui était alors à Portsmouth, apparut volontairement eu deux circonstances
à une jeune fille de Londres, et l'alarma considérablement. Celui qui désire
7
Histoires vraies de fantômes.
8
Rêves et fantômes.
étudier sérieusement cette question pourra recueillir d'innombrables
témoignages.
Ces visites astrales volontaires semblent très souvent devenir possibles
quand les principes se relâchent à l'approche de la mort, chez des gens qui
étaient incapables à tout autre moment d'accomplir un acte pareil. Il existe
même plus d'exemples de cas de cette espèce que de l'autre ; j'en abrège un
excellent, donné par M. Andrew Lang à la page 100 de son volume cité plus
haut, cas dont il dit lui-même qu'il n'y a pas beaucoup d'histoires qui
possèdent d'aussi fortes preuves en leur faveur.
Mary, femme de John Gaffe, de Rochester, terrassée par une longue
maladie, se transporta chez ses parents, à West-Malling, à environ neuf
milles de chez elle.
La veille de sa mort, elle se montra très impatiemment désireuse de voir
ses deux enfants, qu'elle avait laissés à Rochester, à la garde d'une
domestique. Elle était trop malade pour qu'on pût la transporter, et entre une
et deux heures du matin elle tomba en état de transe. Une certaine veuve
Turner, qui veillait cette nuit-là, dit que ses yeux étaient ouverts, son regard
fixe et sa mâchoire pendante. Mme Turner mit sa main sur sa bouche, mais
ne put pas sentir le souffle. Elle crut à une attaque et se demanda si elle était
morte ou vive.
Le lendemain matin, la moribonde déclara à sa mère qu'elle était allée
voir ses enfants, chez elle, et dit : "J'étais avec eux cette nuit pendant mon
sommeil."
La bonne, à Rochester, veuve Alexander de son nom, affirme qu'un peu
avant deux heures ce matin-là, elle vit l'image de cette même Mary Gaffe,
sortir de la chambre voisine (où l'ainé des enfants était couché seul) la porte
étant ouverte, et qu'elle se tint à côté de son lit pendant environ un quart
d'heure ; le plus jeune des enfants était couché près d'elle. Ses yeux
remuèrent et sa bouche s'agita, mais elle ne parla point. De plus, la bonne
ajoute qu'elle était, elle, parfaitement éveillée ; il faisait clair, car c'était un
des jours les plus longs de l'année. Elle s'assit sur son lit et fixa l'apparition.
À ce moment elle entendit l'horloge du pont sonner deux heures, et, un
instant après elle dit : "Au nom du Père, du Fils et du Saint-Esprit, qui es-
tu ?" Là-dessus l'apparition bougea et s'en fût ; la bonne enfla ses vêtements
et la suivit, mais ce qu'elle devint, elle ne peut le dire.
Il semble que la bonne ait été plus effrayée par la disparition du fantôme
que par sa présence, car elle eut peur, après, de rester dans la maison et passa
son temps, jusqu'à six heures, à faire les cent pas dehors. Quand les Voisins
s'éveillèrent, elle leur raconta son histoire, et, bien entendu, ils répondirent
qu'elle avait rêvé tout cela ; elle s'éleva naturellement là contre, mais ne put
obtenir créance jusqu'au moment où fut connu le récit de ce qui s'était passé
à West-Malling ; après quoi, les gens durent admettre qu'il se pouvait bien
qu'il y eût quelque chose de vrai là-dedans !
Un détail remarquable de cette histoire est que la mère trouva nécessaire
de passer de son sommeil à un état de transe plus profonde, avant de pouvoir
sciemment aller voir ses enfants ; mais l'on peut toutefois relever çà et là des
circonstances comparables à celle-ci dans le grand nombre d'histoires
semblables écrites sur ce sujet.
Le docteur F. G. Lee en raconte deux autres du même genre, où l'on voit
une mère mourante, ardemment désireuse de voir ses enfants, tomber dans
un sommeil profond, aller leur rendre visite, et revenir là d'où elle était partie
pour dire ce qu'elle avait fait. Dans l'un de ces cas, la mère mourant en
Égypte, apparait à ses enfants à Torquay, et ses cinq enfants ainsi que leur
bonne, peuvent la voir distinctement en plein jour (Glimpses of the
supernatural 9 vol. II, p. 64). Dans l'autre cas, une dame Quaker, mourant à
Cockermouth, est vue nettement et reconnue en plein jour par ses trois
enfants, à Settle ; l'histoire se terminant à peu près identiquement à celle qui
est racontée ci-dessus (Glimpses in the Twilight 10 (p. 94). Bien que ces cas
semblent être moins généralement connus que celui de Mary Gaffe, leur
authenticité parait être aussi certaine, comme le montreront les témoignages
obtenus par le vénérable auteur des ouvrages d'où ils sont tirés.
L'homme qui possède complètement ce quatrième type de clairvoyance
dispose encore de nombreux et grands avantages, en plus de ceux dont nous
avons déjà parlé. Il peut non seulement visiter sans peine et sans dépense les
beaux et célèbres pays de la terre, mais s'il se trouve être un étudiant, songez
donc ce que cela représente pour lui, que d'avoir un accès à toutes les
bibliothèques du monde ! Quelle joie ce doit être pour l'homme de science
de voir se dérouler devant ses yeux tant de phénomènes de la secrète chimie
de la nature, ou pour le philosophe, de se voir révéler tellement mieux
qu'auparavant le fonctionnement des grands mystères de la vie et de la mort !
9
Échappées dans le surnaturel.
10
Échappées dans le crépuscule.
Pour lui, ceux qui ont quitté ce plan cessent d'être morts ; ils vivent et font
partie de son domaine, pour de longues années à venir ; pour lui, beaucoup
de conceptions de la religion ne relèvent plus de la foi, mais bien du savoir.
Par-dessus tout, il peut se joindre à l'armée des aides invisibles et se rendre
vraiment utile dans une grande mesure. Il est hors de doute que la
clairvoyance, même limitée au plan astral, est un grand bienfait pour le
disciple.
Assurément, elle présente aussi ses dangers, particulièrement pour ceux
qui ne sont pas exercés ; danger provenant d'entités malfaisantes de diverses
espèces, qui peuvent terrifier ou faire du mal à ceux qui se laissent aller à
perdre le courage de leur tenir énergiquement tête ; danger de déceptions de
toutes sortes, danger de concevoir et d'interpréter mal ce qui est vu ; et
surtout, danger de devenir orgueilleux en ces matières et de se croire
incapable de commettre une erreur. Mais un peu de bon sens et un peu
d'expérience devraient aisément suffire à préserver un homme de ces
dangers-là.
5° En voyageant dans le corps mental. – Ce n'est là qu'une forme plus
élevée et en quelque sorte, exaltée, du précédent type de clairvoyance. Le
véhicule employé n'est plus le corps astral, mais le corps mental – véhicule,
par conséquent, appartenant au plan mental et possédant en soi les pouvoirs
du sens merveilleux de ce plan, si transcendant dans son action et pourtant
si impossible à décrire. Un homme qui fonctionne sur ce plan, laisse derrière
lui son corps astral avec son corps physique, et si, pour une raison
quelconque, il lui plaît de se montrer sur le plan astral, il n'envoie pas
chercher son propre véhicule astral, mais par une simple action de sa
volonté, en matérialise un pour son besoin momentané.
Une semblable matérialisation astrale porte quelquefois le nom de
mayavirupa, et pour l'effectuer une première fois, on a généralement besoin
de l'aide d'un Maitre qualifié.
Les avantages énormes que donne la possession de cette faculté sont la
capacité de pénétrer dans toute la gloire et la beauté des régions plus élevées
de la félicité, et de posséder, même quand on travaille sur un plan astral, le
sens mental infiniment plus compréhensif, qui procure à l'étudiant de si
merveilleuses perspectives de savoir, et rend l'erreur pour ainsi dire
impossible. Cette plus haute envolée, toutefois, n'est permise qu'à l'homme
exercé, puisque ce n'est que par un entrainement déterminé que l'homme
peut, à ce degré d'évolution, apprendre à se servir de son corps mental
comme d'un véhicule.
Avant de quitter le sujet de la clairvoyance complète et volontaire, peut-
être convient-il de répondre en quelques mots à une ou deux questions
touchant ses limitations, que les étudiants se posent constamment. Est-il
possible pour le voyant, nous demande-t-on souvent, de trouver toute
personne avec qui il désire communiquer, où qu'elle soit dans le monde, et
qu'elle soit vivante ou morte ?
La réponse à cette question est affirmative conditionnellement. Oui, il
est possible de trouver une personne quelconque, si l'expérimentateur peut,
d'une manière ou d'une autre, se mettre en rapport avec cette personne. Il
serait tout à fait superflu de plonger vaguement dans l'espace pour trouver,
sans aucune espèce d'indication, quelqu'un de totalement étranger parmi les
millions d'individus qui nous entourent ; mais, en revanche, une indication
très vague suffirait en général.
Si le clairvoyant sait quoi que ce soit de l'homme qu'il recherche, il le
trouvera sans difficulté, car chaque individu possède ce que l'on peut appeler
une espèce de note musicale qui lui est propre, une note qui est l'expression
de sa personnalité, prise dans son ensemble, et qui est produite peut-être par
une sorte de moyenne des taux de vibrations de tous ses différents véhicules
sur leurs plans respectifs. Si l'opérateur sait distinguer cette note et sait la
faire vibrer, elle attirera instantanément, par vibration sympathique,
l'attention de l'individu, où qu'il soit, et appellera de lui une réponse
immédiate.
Que l'homme soit vivant ou mort depuis peu ne changerait rien à
l'affaire, et la clairvoyance de la cinquième classe pourrait le trouver
immédiatement, même parmi les innombrables millions du monde céleste,
quoique dans ce cas, l'homme en question n'aurait pas conscience qu'on le
recherche. Il va de soi qu'un voyant dont l'état de conscience n'irait pas ait
delà du plan astral et qui emploierait par conséquent une des méthodes
primitives de voir, serait incapable de trouver une personne qui serait sur le
plan mental ; mais il lui serait au moins possible d'affirmer que l'individu
recherché se trouve sur ce plan, par le seul fait que la corde pincée à niveau
du plan astral resterait sans réponse.
Si la personne à découvrir n'est pas connue du chercheur, ce dernier
aura besoin de connaitre, en manière d'indication, quelque chose qui ait
rapport à elle, une photographie de la personne en question, une lettre écrite
par elle, un objet qui lui ait appartenu et qui soit imprégné de son
magnétisme propre ; l'une ou l'autre de ces indications suffiraient à un
voyant exercé.
Mais je répète qu'il ne faut pas en conclure que les élèves auxquels on
a appris à se servir de cet art soient à même d'ouvrir un bureau de
renseignements où l'on puisse se faire mettre en communication avec les
parents absents ou morts. Une communication qui serait faite d'ici à
quelqu'un d'eux, pourrait lui être ou pourrait ne pas lui être transmise, selon
les circonstances ; mais même si elle l'était, on pourrait ne pas obtenir de
réponse, à moins que cette opération ne pût tenir de la nature d'un vrai
phénomène, phénomène que l'on pourrait prouver sur le plan physique, avoir
été un acte de magie.
Une autre question que l'on soulève souvent, consiste à demander si,
dans le fait de la vision psychique, il y a une limitation quelconque, pour ce
qui est de la distance. La réponse semblerait être qu'il ne devrait pas y avoir
d'autre limite que celle des plans respectifs. Il faut se rappeler que le plan
astral et le plan mental appartiennent à notre terre d'une façon aussi définie
que sa propre atmosphère, quoiqu'ils s'étendent considérablement plus loin
que l'air physique, même dans notre espace à trois dimensions. C'est
pourquoi le passage à d'autres planètes, ou la vue détaillée d'autres planètes
ne seraient possibles pour aucun système de clairvoyance en rapport avec
ces plans. Pour l'homme qui peut élever son état de conscience jusqu'au plan
bouddhique, il est tout à fait possible et facile de passer dans tout autre globe
appartenant à notre chaine de mondes, mais cette question est en dehors du
sujet que nous traitons ici.
Pourtant, on peut, par l'emploi des facultés de clairvoyance que nous
avons décrites, obtenir beaucoup de renseignements sur les autres planètes.
Il est possible de rendre la vision considérablement plus nette, en se tenant
en dehors des troubles perpétuels de l'atmosphère terrestre et il n'est pas non
plus difficile d'apprendre à acquérir une puissance extrêmement forte de
grossissement ; en sorte que, même par la clairvoyance ordinaire, on peut
acquérir de vastes connaissances astronomiques du plus haut intérêt. Mais
en ce qui concerne cette terre et son entourage immédiat, il n'y a pour ainsi
dire pas de limitation.
CHAPITRE V
—
CLAIRVOYANCE DANS L'ESPACE : SEMI-VOLONTAIRE
Sous ce titre plutôt singulier, je groupe les cas de tous ces gens qui se
mettent volontairement en état de voir quelque chose, mais qui n'ont aucune
idée de ce que ce quelque chose sera, et aucune maitrise de la vue quand les
visions ont commencé à se produire : les "Micawbers" psychiques, qui se
mettent dans un état de réceptivité et puis attendent simplement que quelque
vision se présente à eux. Beaucoup de médiums à transe seraient à ranger
dans cette catégorie ; ou bien ils s'hypnotisent eux-mêmes d'une façon
quelconque, ou bien ils sont hypnotisés par quelque "esprit-guide" et ils
décrivent alors les personnes ou les scènes qui se trouvent flotter devant leur
vision. Parfois cependant, lorsqu'ils sont dans cet état, ils voient ce qui se
passe à une certaine distance et ils prennent alors place parmi nos
"clairvoyants dans l'espace".
Mais l'espèce la plus importante et la plus répandue de ces clairvoyants
semi-volontaires est celle des diverses sortes de voyants au cristal ceux qui,
comme le dit M. Andrew Lang, regardent dans une boule de cristal, une
tasse, un miroir, une tache d'encre (Égypte et Inde), une goutte de sang (les
Maories de la Nouvelle-Zélande), un bol d'eau (Peaux Rouges), une mare
(Romains et Africains), une coupe de verre remplie d'eau (comme à Fez),
ou en somme une surface brillante quelconque (Dreams and ghosts 11
(p. 57)).
Deux pages plus loin M. Lang nous donne un excellent exemple de
l'espèce de vision la plus fréquemment obtenue de cette façon : "J'avais
donné une boule de verre, dit-il, à une jeune dame, Mlle Baillie, qui s'en servit
presque sans succès. Elle la prêta à Mlle Leslie qui vit un grand sofa rouge,
carré, démodé, recouvert de mousseline, qu'elle reconnut dans la première
maison de campagne où elle se rendit en visite. Le frère de M lle Baillie, un
jeune athlète, se moqua de ses expériences, emporta la boule dans la salle
d'étude et revint l'air tout bouleversé. Il admit qu'il avait eu une vision, la
vision de quelqu'un qu'il connaissait, sous une lampe. Il dit qu'il découvrirait
au cours de la semaine s'il avait vu vrai ou faux." Ceci se passait à 5 h 30 le
samedi après-midi.
11
Rêves et fantômes.
Le mardi, M. Baillie se trouvait au bal, dans une ville éloignée de chez
lui d'environ quarante milles, et il rencontra une demoiselle Preston.
"Dimanche, dit-il vers 5 heures et demie, vous étiez assise sous une lampe,
vêtue d'une robe que je ne vous avais jamais vu porter, et d'un corsage bleu
avec de la dentelle sur les épaules ; vous versiez du thé à un monsieur habillé
de bleu, qui me tournait le dos, en sorte que je ne vis que la pointe de sa
moustache."
- "Tiens ! les stores devaient être levés", dit Mlle Preston.
- "J'étais à Dulby", répondit M. Baillie, et il y était positivement.
C'est là un cas tout à fait typique de vision par le cristal. Vous voyez
que la scène décrite se trouve vraie dans tous ses détails ; elle est cependant
sans la moindre importance et n'a aucune espèce de signification apparente
pour l'un ou l'autre des deux individus en question, si ce n'est qu'elle a servi
à prouver à M. Baillie qu'il y a quelque chose de vrai dans la vision par le
cristal. Et fréquemment, peut-être, ces visions ont une tendance à être d'un
caractère romantique, – individus vêtus d'habits étrangers, ou paysages
admirables, quoique, en général, inconnus.
Eh bien, quelle est l'analyse raisonnée de ce genre de clairvoyance ?
Comme je l'ai indiqué plus haut, elle appartient habituellement au type du
"courant astral", et le cristal ou tout autre objet ne sert que de foyer où se
concentre la force de volonté du voyant, et de point de départ commode pour
son tube astral. Il y a des gens qui peuvent, grâce à leur volonté, avoir une
influence sur ce qu'ils voient ; autrement dit, ils ont le pouvoir de diriger leur
télescope à leur gré ; mais la grande majorité ne peut constituer qu'un tube
d'occasion et voir tout ce qui se présente à l'autre bout.
Il peut s'agir, parfois, d'un évènement qui se passe relativement près du
voyant, comme dans l'exemple que je viens de donner ; et parfois, au
contraire, d'un paysage oriental très éloigné ; parfois encore ce pourra être
une reproduction d'un fragment de cliché akashique, et alors le tableau
représentera des gens vêtus à l'antique ; ce phénomène appartient alors à
notre troisième grande catégorie de la "clairvoyance dans le temps". On dit
que l'on découvre aussi dans le cristal des visions de l'avenir ; c'est là un
nouveau développement dont nous aurons à parler plus loin.
J'ai vu un clairvoyant se servir, au lieu de la surface brillante usuelle,
d'une surface mate noire, obtenue par une poignée de poudre de charbon de
bois étendue au fond d'une soucoupe. En vérité, peu importe, semble-t-il, ce
dont on se sert comme foyer, si ce n'est que le cristal pur a sur les autres
substances l'incontestable avantage que sa composition particulière
d'essence élémentale fait qu'il stimule tout spécialement les facultés
psychiques.
Il semble probable, quoi qu'il en soit, que dans les cas où l'on emploie
un tout petit objet brillant comme un point lumineux, ou la goutte de sang
dont se servent les Maories, il ne s'agit pas, en réalité, d'autre chose que d'un
simple phénomène d'auto-hypnotisme. Chez les nations extra-européennes,
cette expérience est très souvent précédée ou accompagnée de cérémonies
d'invocations magiques, en sorte qu'il est tout à fait probable que la vision
obtenue peut parfois vraiment être celle d'une entité étrangère, et le
phénomène n'être, en somme, qu'un cas de possession temporaire et pas le
moins du monde un cas de clairvoyance.
CHAPITRE VI
—
CLAIRVOYANCE DANS L'ESPACE : INVOLONTAIRE
Sous ce titre nous pouvons grouper tous les cas où l'on a, tout à fait à
l'improviste et sans avoir rien fait pour les préparer, des visions de quelque
évènement se passant à distance. Certaines personnes sont sujettes à des
visions de ce genre, tandis que beaucoup d'autres n'en auront jamais qu'une
seule au cours de leur existence. Ces visions sont de toutes espèces et de
tous les degrés de perfection, et peuvent, apparemment, être produites par
plusieurs causes différentes. Parfois la cause de la vision est évidente et le
sujet en est de la plus grave importance ; parfois aussi on n'y peut découvrir
aucune raison et les évènements perçus sont de la nature la plus triviale.
Il est des cas où ces lueurs de la faculté supraphysique se manifestent
quand on est éveillé et d'autres fois pendant le sommeil, sous forme de rêves
vivants et souvent répétés. Dans ce dernier cas, le genre de vue employée
doit généralement être de l'espèce qui constitue notre quatrième catégorie,
de la clairvoyance dans l'espace, car l'homme endormi se transporte souvent
par le moyen de son corps astral dans tel endroit où ses affections ou ses
intérêts sont vivaces, et regarde simplement ce qui s'y passe ; dans le premier
cas, en revanche, il parait probable que c'est le second type de clairvoyance
– par le courant astral – qui est appelé à se manifester. Mais dans ce cas, le
courant ou tube est formé tout à fait inconsciemment et est souvent le
résultat automatique d'une forte pensée ou d'une forte émotion projetée de
l'un ou de l'autre bout, soit par le voyant, soit par la personne qui est vue.
La meilleure manière de traiter ce sujet sera de donner quelques
exemples de diverses natures, et d'intercaler entre ces exemples les
explications qui sembleront nécessaires. Dans son livre Real ghost Stories 12,
M. Stead a réuni un très grand nombre de cas variés récents et bien
authentiques ; j'y puiserai quelques-uns de mes exemples, en les résumant
parfois pour gagner de la place.
Il y a des cas où n'importe quel étudiant en théosophie voit
instantanément d'une façon très nette que le phénomène exceptionnel de
clairvoyance a été spécialement amené par un de ceux qui composent la
troupe des "aides invisibles", dans le but de porter secours à quelqu'un qui
en avait grandement besoin. C'est à cette classe qu'appartient, sans aucun
12
Histoires vraies de fantômes.
doute, l'histoire que raconta le capitaine Yonnt, de la vallée de Napa, en
Californie, au docteur Bushnell, qui la répète dans son livre Nature and the
Supernatural 13 (p. 14).
Environ six ou sept années auparavant, une nuit de plein hiver, il fit un
rêve où il vit ce qui lui sembla être une troupe d'émigrants arrêtés par les
neiges de la montagne, et qui mouraient rapidement de faim. Il nota
exactement l'endroit précis où la chose se passait ; il y avait là une énorme
falaise perpendiculaire de roches blanches ; il vit les hommes couper ce qui
lui sembla être, des cimes d'arbres qui émergeaient de profondes crevasses
de neige ; il distingua même les traits des personnes qui étaient là et leur
aspect de détresse particulière.
Il s'éveilla, profondément impressionné par la netteté de son rêve et par
son apparence de réalité. Il se rendormit à la longue et refit exactement le
même rêve. Au matin, il ne put le bannir de son esprit. Il rencontra un
moment après un de ses vieux camarades de chasse, lui raconta son histoire,
et ne fut que plus profondément ému encore par ce fait que le camarade en
question reconnut sans hésiter le lieu de la scène. Ce camarade était venu de
la Sierra par le passage de la vallée de Carson et il déclara qu'un coin de ce
passage répondait exactement à la description qui lui était faite.
Cela décida le capitaine. Il réunit aussitôt un groupe d'individus, avec
des mules, des couvertures de laine et toutes les provisions nécessaires.
Cependant, les voisins se moquaient de sa crédulité. "Peu importe, dit-il ; je
puis faire cela et je le ferai, car je crois en vérité que la réalité est conforme
à mon rêve." Il envoya les hommes dans la montagne à cent cinquante milles
de distance, droit au passage de la vallée de Carson. Et là ils trouvèrent la
bande d'émigrants tout à fait comme l'avait montré le rêve, et ils ramenèrent
les survivants.
Puisque l'on ne dit pas que le capitaine Yonnt avait habituellement des
visions, il apparait clairement que quelque aide, remarquant l'état de détresse
des émigrants, conduisit la première personne venue, qui fût
impressionnable et en mesure de faire ce qu'il y avait à faire (cette personne
se trouva être le capitaine), la conduisit, dis-je, dans son corps astral, à
l'endroit voulu, et la frappa suffisamment pour fixer nettement ce spectacle
dans sa mémoire. Il est possible qu'au lieu de faire cela, l'aide ait établi un
courant astral à l'usage du capitaine, mais la première hypothèse est plus
13
La Nature et le Surnaturel.
vraisemblable. Quoi qu'il en soit, dans ce cas-ci, la cause et la méthode
générale de cette clairvoyance sont suffisamment apparentes.
Parfois le "courant astral" peut être amené à fonctionner par suite d'une
pensée très émouvante, s'exprimant à l'autre extrémité de la ligne, et ceci
peut même se produire sans que celui qui pense n'ait aucune intention de
cette nature. Dans l'histoire assez frappante que je vais raconter il est évident
que le lien fut formé par le fait que la pensée du docteur allait fréquemment
vers Mme Broughton, et pourtant, il est bien certain qu'il n'avait aucun désir
spécial qu'elle vît ce qu'il faisait à ce moment-là. Que la clairvoyance ait
bien été de cette nature, voilà qui est démontré par la fixité de son point de
vue, lequel n'est pas, observez-le, le point de vue du docteur transmis
sympathiquement (comme cela aurait pu se produire), attendu qu'elle voit
son dos sans le connaitre. Cette histoire se trouve racontée dans les
Proceedings of the Psychical Research Society 14 (vol. I, p. 160).
Mme Broughton s'éveilla une nuit, en 1844, et réveilla son mari, lui
disant que quelque chose d'épouvantable s'était passé en France. Celui-ci la
pria de se rendormir et de ne pas le déranger. Elle lui affirma qu'elle ne
dormait pas lorsqu'elle avait vu ce qu'elle s'entêtait à lui raconter, ce qu'elle
avait vu en réalité.
D'abord, un accident de voiture, dont elle n'avait pas été témoin, mais
dont elle vit les conséquences : une voiture brisée, un rassemblement, un
corps doucement soulevé et transporté dans la maison la plus proche ; puis
une personne étendue dans un lit, personne qu'elle reconnut être le duc
d'Orléans. Petit à petit, les amis se groupaient autour du lit ; il y avait parmi
eux plusieurs membres de la famille royale de France – la reine, et puis le
roi, tous silencieux, en larmes, veillant le duc évidemment mourant. Il y
avait là un homme qui était le médecin. (Elle voyait son dos, mais ne savait
pas qui il était.) Il se tenait penché sur le duc, d'une main tâtant son pouls,
sa montre dans l'autre main. Après, la vision s'évanouit et elle ne vit plus
rien.
"Dès qu'il fit jour, elle écrivit dans son journal tout ce qu'elle avait vu.
Ceci se passait avant l'invention du télégraphe et deux jours ou plus
s'écoulèrent avant que le Times annonçât la mort du duc d'Orléans. Se
trouvant à Paris peu de temps après, cette dame vit et reconnut le lieu de
l'accident et elle eut l'explication de l'impression qu'elle avait ressentie. Le
14
Comptes rendus de la Société de Recherches Psychiques.
médecin qui assistait le duc mourant était un de ses vieux amis et pendant
qu'il veillait auprès du lit, sa pensée avait été constamment occupée d'elle et
de sa famille."
Un cas plus fréquent est celui où une affection solide fait naitre le
courant nécessaire ; il est alors probable qu'un courant assez continu de
pensée mutuelle coule constamment entre les deux personnes en question,
et qu'un impérieux besoin de secours ou qu'une cruelle extrémité chez l'une
d'elles, donne momentanément à ce courant la force polarisatrice nécessaire
à la création du télescope astral. Un exemple explicatif nous est fourni dans
ces mêmes Proceedings (vol. I, p. 30).
"Le 9 septembre 1848, au siège de Mooltan, le major
général RCB, alors colonel de son régiment, fut très
gravement et dangereusement blessé, et, se croyant sur le
point de mourir, demanda à un de ses officiers de prendre
l'anneau qui était à son doigt et de l'envoyer à sa femme,
qui se trouvait alors à plus de cent cinquante milles de là,
à Ferozepore.
Pendant la nuit du 9 septembre 1848, écrit sa femme,
j'étais couchée sur mon lit, endormie à moitié, lorsque je
vis nettement que l'on emportait du champ de bataille mon
mari, gravement blessé, et j'entendis sa voix dire : "Ôtez
cet anneau de mon doigt et faites-le parvenir à ma femme."
Le jour qui suivit je ne pus débarrasser mes yeux de cette
vision, ni mes oreilles de cette voix.
En temps voulu, je sus que le général R… avait été
sérieusement blessé à l'assaut de Mooltan. Il survécut
pourtant, et il vit encore. Ce ne fut que quelque temps
après le siège que j'appris par le général L…, l'officier qui
aida à transporter mon mari hors du champ de bataille, que
sa prière au sujet de l'anneau avait vraiment été faite,
exactement comme je l'entendis à Ferozepore à ce même
moment."
Il y a encore une catégorie importante de visions clairvoyantes
occasionnelles, qui n'ont pas de cause visible, qui sont, en apparence, tout à
fait sans signification et n'ont aucun rapport apparent avec quelque
évènement que ce soit, connu du voyant. Les visions de paysages qu'ont
certaines personnes, juste avant de s'endormir, entrent dans cette catégorie.
Je cite un cas remarquable et très réaliste de ce genre, que je trouve dans
Real ghost stories (p. 65) de M. W. Stead.
"Je me mis au lit, mais ne pus m'endormir. Je fermai les
yeux et attendis que le sommeil voulût bien venir ; mais
au lieu de sommeil, il me vint une série de tableaux
clairvoyants, étrangement vivants. Il n'y avait pas de
lumière dans la pièce, et il y faisait même parfaitement
noir ; de plus, mes yeux étaient fermés. Mais en dépit de
l'obscurité, j'eus soudain conscience que je voyais une
scène d'une singulière beauté. C'était comme si j'avais vu
une miniature vivante à peu près de la dimension d'un
verre de lanterne magique. Je me rappelle en cet instant la
scène, tout comme si je la voyais. C'était un paysage
marin. La lune brillait dans l'eau, qui se brisait doucement
sur la grève. Juste en face de moi, une longue jetée
avançait dans la mer.
De chaque côté de cette jetée, des rochers tourmentés
émergeaient de l'eau. Il y avait sur la côte plusieurs
maisons carrées et d'apparence grossière, qui ne
ressemblaient à rien de ce que j'avais vu en fait
d'architecture de maisons. Rien ne bougeait, mais je
voyais la lune et la mer et l'éclat de la lune sur les eaux qui
se brisaient doucement, tout à fait comme si j'avais
regardé véritablement ce spectacle.
Il était tellement beau que je me souviens avoir pensé que,
la vision continuerait-elle, je serais si occupé à la regarder
que je ne m'endormirais jamais. J'étais parfaitement
éveillé et, tandis que je contemplais ce spectacle,
j'entendis distinctement la pluie tomber au-dehors. Alors
brusquement, sans aucun motif apparent, la vision
changea.
La mer éclairée par la lune s'évanouit, et je me trouvai
regarder, non plus elle, mais l'intérieur d'une salle de
lecture. Il semblait qu'on se fût servi de cette pièce comme
de salle de classe dans la journée et qu'on la transformât le
soir en salle de lecture. Je me souviens avoir vu un lecteur
qui ressemblait d'une façon curieuse à Time Harrington,
bien que ce ne fût pas lui, prendre dans sa main une revue
ou un livre et rire. Ce n'était pas un tableau ; cela existait
en vérité.
On eût dit qu'on observait la scène avec une lorgnette de
théâtre ; on voyait le jeu des muscles, l'éclat des yeux, et
chaque mouvement des gens inconnus qui occupaient la
pièce inconnue où l'on regardait. Je vis tout cela sans
ouvrir les yeux, et mes yeux étaient tout à fait étrangers à
ma vision. C'est avec un autre sens, dont le siège est plutôt
dans la tête que dans les yeux, que l'on voit des scènes de
ce genre.
Ce ne fut là qu'un incident sans grande valeur et sans
beaucoup d'intérêt, mais cela me permit, plus que toutes
les explications du monde, de comprendre mieux
comment voient les clairvoyants.
Cette vision qui se présentait à moi m'était apparue à
propos de rien ; elle n'avait été suggérée par rien que
j'eusse lu ou dont j'eusse parlé, elle me vint comme si
j'avais regardé avec une lorgnette ce qui se passait ailleurs
dans le monde. Je l'entrevis de nouveau et puis elle
disparut et depuis il ne m'est pas de nouveau arrivé
semblable aventure."
M. Stead considère que c'est là "une histoire de peu d'intérêt et de peu
d'importance", et il est peut-être permis de la juger telle si on la compare aux
possibilités de visions plus curieuses ; et pourtant, je connais beaucoup
d'étudiants qui seraient enchantés de pouvoir raconter qu'une telle
expérience leur soit personnellement et directement arrivée.
Bien que de peu d'importance en soi, une aventure de cette espèce donne
au voyant la clé du phénomène tout entier, et la clairvoyance serait pour
quiconque en aurait seulement vu autant, une actualité vivante, ce qu'elle
n'aurait jamais pu être sans ce bref contact avec le monde inconnu.
Les scènes dont il s'agit étaient beaucoup trop nettes pour avoir été de
simples réflexions de la pensée d'autrui, et d'ailleurs le récit montre à ne pas
s'y tromper, que des visions ont été vues par le moyen du télescope astral ;
ce qui fait que M. Stead aura, à son insu, mis lui-même un courant en
activité, ou bien (et cela est beaucoup plus probable) quelque bienveillante
entité astrale aura mis pour lui ce courant en action, et lui aura offert, pour
lui éviter toute attente ennuyeuse, la vision de toutes les scènes qui se seront
trouvées à la portée de l'extrémité du tube.
CHAPITRE VII
—
CLAIRVOYANCE DANS LE TEMPS : LE PASSÉ
15
Les mots souvenirs, archives ou clichés akashiques sont synonymes et employés indifféremment
par nous au cours de cet ouvrage, pour traduire le terme anglais âkâshic records.
à tort, car bien que ces souvenirs soient sans nul doute lus dans l'Akasha, ou
matière du plan mental, ce n'est cependant pas à cet akasha que ces souvenirs
appartiennent. L'autre appellation, "souvenirs de la lumière astrale", que l'on
a parfois donnée à cette vision, est pire encore, car ces souvenirs siègent très
au-delà du plan astral et tout ce que l'on peut obtenir sur ce plan n'est que
lueurs momentanées et partielles d'une espèce de double réflexion de ces
souvenirs, ainsi que je vais l'expliquer.
Comme tant d'autres de nos termes théosophiques, le mot akasha a été
très librement employé. Dans certains de nos livres plus anciens, on le
considérait comme synonyme de lumière astrale, et dans d'autres, on s'en
servait pour désigner toute espèce de matière invisible, depuis le
mulaprakriti, jusqu'à l'éther physique. Dans des livres plus récents, son
emploi a été limité à la matière du plan mental et c'est dans ce sens que l'on
peut parler des souvenirs akashiques ; car, bien qu'ils n'aient pas davantage
leur origine dans ce plan que dans le plan astral, c'est cependant là que nous
les rencontrons pour la première fois d'une façon déterminée et qu'il nous
est possible de faire de la bonne besogne grâce à eux.
Cette question des souvenirs n'est assurément pas facile à traiter, car
elle fait partie d'une de ces nombreuses catégories de sujets qui demandent,
pour être parfaitement saisis, des facultés de compréhension d'un ordre
beaucoup plus élevé qu'aucune de celles qui ont été développées jusqu'à
présent dans l'humanité. La vraie solution de ces problèmes se trouve sur
des plans bien supérieurs à aucun de ceux qu'il nous soit possible de
connaitre à l'heure actuelle ; et, quelle que soit celle que nous puissions
envisager, elle doit nécessairement être du caractère le plus imparfait,
puisque nous ne pouvons examiner le problème que d'en bas, et non d'en
haut. L'idée que nous nous en faisons ne peut donc être que partielle ;
cependant, elle ne nous trompe pas forcément, à moins que nous ne nous
permettions de considérer cette petite parcelle, qui est tout ce que nous
pouvons voir, comme constituant le tout parfait. Si nous nous appliquons à
ce que de telles conceptions que nous pouvons nous faire soient exactes,
nous n'aurons rien à désapprendre, mais beaucoup à ajouter à nos
connaissances, quand, au cours de nos progrès futurs, nous acquerrons petit
à petit la sagesse supérieure. Comprenons donc, dès le début, que nous
pénétrer d'une façon parfaite du sujet que nous traitons est, au degré actuel
de notre évolution, une impossibilité, et que beaucoup de questions seront
soulevées auxquelles nous ne pourrons encore fournir aucune explication
précise, bien qu'il nous puisse être souvent possible de suggérer des
analogies et d'indiquer le sens dans lequel l'explication doive être
recherchée.
Essayons donc de reporter nos pensées à l'origine de ce système solaire
auquel nous appartenons. Nous connaissons bien tous la théorie
astronomique courante de cette origine, théorie dénommée habituellement
"l'hypothèse des nébuleuses" et suivant laquelle le soleil apparut d'abord
sous la forme d'une gigantesque nébuleuse embrasée, d'un diamètre de
beaucoup supérieur à celui de l'orbite ou même des limites les plus extrêmes
des planètes ; après quoi, au cours innombrable des temps, cette sphère
énorme se refroidit petit à petit et se contracta, formant ainsi le système
solaire.
La science occulte accepte cette théorie dans ses grandes lignes, comme
représentant fidèlement le côté purement physique de l'évolution de notre
système ; mais elle ajoute que si nous bornons notre attention à ce seul aspect
physique de la question, nous n'aurons qu'une idée très incomplète et
incohérente de ce qui se passa réellement. Cette science occulte prétend,
pour commencer, que l'Être élevé qui entreprend la formation d'un système
(être que nous appelons parfois le Logos du système) forme tout d'abord
dans Son esprit une conception complète de l'ensemble de ce système, avec
ses enchainements successifs de mondes. Par l'action même qui consiste à
former cette conception, il fait naitre simultanément et objectivement
l'ensemble sur le plan de Sa pensée, plan naturellement très supérieur à tous
ceux dont nous savons quelque chose et d'où descendent, quand il convient,
les divers globes, dans n'importe quel état d'objectivité plus ample qui soit
respectivement destinée à chacun d'eux. À moins que nous ne nous
rappelions constamment ce fait de l'existence réelle, dès l'origine, du
système tout entier sur un plan supérieur, nous nous méprendrons
perpétuellement sur le sens de l'évolution physique que nous voyons se
produire sur terre.
Mais ce n'est pas là tout ce que l'occultisme a à nous apprendre à ce
sujet. Il ne nous dit pas seulement que tout ce merveilleux système auquel
nous appartenons est créé par le Logos, à la fois sur des plans inférieurs et
supérieurs, mais que ses rapports avec lui sont plus proches encore, car le
système en question est absolument partie de Lui-même, une expression
partielle de Lui, sur le plan physique ; que le mouvement et l'énergie du
système entier sont Son énergie propre et que tout le phénomène se passe
dans les limites de Son aura. Aussi surprenante que soit cette conception elle
ne sera pas tout à fait incompréhensible pour ceux d'entre nous qui ont
quelque peu étudié la question de l'aura.
Nous sommes familiers avec ce principe qu'à mesure qu'une personne
progresse sur le Sentier, son corps causal, qui est la limite déterminante de
l'aura, augmente nettement de volume aussi bien que d'éclat et de pureté de
couleur. Beaucoup d'entre nous savent par expérience que l'aura d'un élève
qui a déjà beaucoup avancé sur le Sentier est beaucoup plus grande que celle
de celui qui n'y a fait que ses premiers pas, tandis que chez un Adepte,
l'accroissement proportionnel est encore bien plus considérable. Les
écritures orientales tout à fait exotériques parlent de l'immense extension de
l'aura du Bouddha ; je crois me rappeler que la limite mentionnée en une
circonstance est de trois milles, mais, quelle que puisse être sa dimension
exacte, il est clair que nous trouvons là un autre exemple de cet
accroissement extrêmement rapide du corps causal, à mesure que l'homme
avance sur le Sentier. Il est peu douteux que le taux de cet accroissement
augmenterait lui-même selon une progression géométrique, de sorte que
nous pouvons entendre parler sans étonnement d'un Adepte qui se trouve sur
un niveau encore supérieur et dont l'aura est capable de comprendre le
monde entier à la fois ; et de là nous pouvons graduellement amener nos
esprits à la conception qu'il existe un Être Supérieur au point de comprendre
en lui-même l'ensemble de notre système solaire. Et nous devons nous
rappeler que, aussi énorme qu'il nous paraisse, il n'est que comme la plus
petite des gouttes dans le vaste océan de l'espace.
De même, il est vrai à la lettre de dire du Logos (qui possède en Lui
toutes les capacités et toutes les qualités qu'il nous soit possible de prêter au
Dieu le plus grand imaginable) de dire, comme on le disait autrefois, que
toutes choses viennent de Lui, par Lui, et vont à Lui et que nous vivons,
nous nous mouvons et nous avons notre existence en Lui.
Donc, s'il en est ainsi, il est clair que le Logos de notre système solaire
a conscience de tout ce qui s'y passe, et nous voyons aussitôt que le vrai
souvenir, c'est sa mémoire ; de plus, il saute aux yeux que sur quelque plan
qu'existe cette étonnante mémoire, ce ne peut être que très au-dessus de ce
que nous savons, et par conséquent, quels que soient les souvenirs que nous
nous trouvions capables de lire, ceux-ci ne peuvent être qu'une réflexion de
ce grand fait dominant, réfléchi dans les milieux plus denses des plans
inférieurs.
Sur le plan astral, il est tout de suite évident qu'il en est ainsi, que ce
que nous constatons n'est qu'une réflexion d'une réflexion, réflexion
extrêmement imparfaite, puisque les souvenirs que l'on peut y trouver sont
partiels à l'excès et sont souvent gravement déformés ! Nous connaissons
l'emploi universel de l'eau comme symbole de la lumière astrale et, dans ce
cas particulier, c'est là un symbole qui convient remarquablement. La
surface d'une eau tranquille réfléchit nettement les choses, comme le ferait
un miroir ; mais, à tout prendre, ce n'est qu'une réflexion, une représentation
en deux dimensions d'objets qui en ont trois, et qui diffère par conséquent
de l'original dans toutes ses qualités, à l'exception de la couleur ; de plus,
c'est toujours renversée que nous la voyons.
Mais que le vent ride la surface de l'eau, que trouverez-vous alors ? Une
réflexion encore, assurément, mais si brisée et déformée qu'elle ne répond
plus à rien et ne peut que tromper sur la forme et la véritable apparence des
objets ainsi réfléchis. De-ci, de-là, pendant un instant, parviendrons-nous
peut-être à voir une réflexion nette d'une petite partie de la scène réfléchie,
d'une seule feuille d'arbre, par exemple ; mais il faudrait se donner beaucoup
de peine et posséder une grande connaissance des lois naturelles, pour
construire quoique ce fût qui ressemblât à la conception véritable de l'objet
reflété, en juxtaposant même un grand nombre de pareils fragments isolés
de son image.
Dans le plan astral, nous ne pouvons rien trouver qui se rapproche d'une
surface tranquille, mais nous avons toujours affaire, au contraire, à une
surface qui est en mouvement rapide et désordonné ; jugez par conséquent,
combien peu nous pouvons espérer avoir une image claire et précise ! C'est
ainsi qu'un clairvoyant qui ne possède que la faculté de la vision astrale, ne
peut jamais considérer comme exacte et parfaite, aucune image du passé qui
se présente à lui ; çà et là, telle partie de cette image peut avoir ces qualités
d'exactitude ; mais il n'a pas les moyens de savoir quelle est cette partie. S'il
est entre les mains d'un maitre compétent, il pourra apprendre, par un long
et soigneux enseignement, à distinguer les impressions sur lesquelles on
peut compter, et à construire avec ces reflets brisés, une espèce d'image de
l'objet réfléchi ; mais en général, bien avant qu'il ait vaincu ces difficultés,
il aura développé sa vision mentale, ce qui rend ce travail inutile.
Sur le plan suivant, que nous appelons mental, les conditions sont très
différentes. Les souvenirs akashiques y sont complets et précis et il serait
impossible de faire la moindre erreur en les lisant. Si par exemple trois
clairvoyants possédant les pouvoirs du plan mental s'entendaient pour en
observer un même souvenir déterminé ce serait, dans chaque cas,
absolument la même réflexion qui serait présentée à leur vision, et chacun
de ces trois individus en éprouverait en la lisant, une impression exacte. Il
ne s'ensuit pas, toutefois, que s'ils venaient plus tard à comparer sur le plan
physique les impressions qu'ils auraient reçues, celles-ci seraient
exactement d'accord. Il est bien connu que si trois personnes assistent à un
évènement ici-bas dans le monde physique, et en font ensuite le récit, leurs
versions diffèreront considérablement, car chacune d'entre-elles aura
particulièrement remarqué tels détails qui l'intéressent davantage, et en aura
insensiblement fait le trait principal de l'évènement, tandis qu'elle négligera
parfois d'autres circonstances beaucoup plus importantes en réalité.
Dans le cas d'une observation faite sur le plan mental, ce facteur,
personnel aux témoins, n'affecterait pas d'une manière appréciable
l'impression reçue, car puisque chacun d'eux percevrait parfaitement le sujet
tout entier, il lui serait impossible d'en voir certaines parties autrement que
dans leur proportion véritable ; mais, excepté dans le cas où il s'agit de
personnes bien instruites et exercées, ce facteur entre vraiment en jeu et
transmet les impressions aux plans inférieurs. Il est impossible dans la
nature des choses que tout récit fait ici-bas d'une vision ou d'un phénomène
qui s'est produit sur le plan mental puisse être complet, puisqu'on ne peut
absolument pas exprimer par des mots physiques les neuf dixièmes de ce
qu'on voit et de ce qu'on sent dans ce plan ; et, puisque toute expression doit,
en conséquence, être partielle, il est nettement possible de faire un choix sur
la partie qui sera exprimée. C'est pour cette raison que dans toutes nos
recherches théosophiques des dernières années, nous nous sommes tant
efforcé de contrôler et de vérifier constamment les témoignages des
clairvoyants, ne laissant paraitre dans nos livres plus récents, rien qui fût
basé sur la vision d'un individu seulement.
Mais, même alors que la possibilité d'une erreur provenant de ce facteur
du jugement personnel a été réduite au minimum grâce à un procédé de
rigoureux contrôle, il reste encore la très sérieuse difficulté inhérente à
l'opération qui consiste à amener des impressions d'un plan supérieur à un
plan inférieur. C'est là quelque chose d'analogue à la difficulté que rencontre
un peintre quand il cherche à reproduire sur une surface plane un paysage à
trois dimensions – à le reproduire en deux dimensions, par conséquent. De
même que l'artiste a besoin de longtemps et soigneusement éduquer son œil
et sa main avant de pouvoir donner une représentation satisfaisante de la
nature, de même le clairvoyant ne peut se passer d'une éducation longue et
minutieuse avant qu'il puisse décrire exactement sur un plan inférieur, ce
qu'il voit sur un plan plus élevé ; et les chances que l'on a d'obtenir d'une
personne inexercée une description précise sont à peu près égales à celles
que l'on a de voir exécuter un paysage d'un fini parfait par quelqu'un qui
n'aurait pas appris à dessiner.
On doit se rappeler, en outre, que le tableau le meilleur est, en réalité,
extrêmement loin d'être une reproduction de la scène qu'il représente, car il
n'est guère un seul trait ou un seul angle qui puisse être semblable à ceux de
l'objet copié. Ce n'est là simplement qu'une tentative très ingénieuse de
produire, en n'utilisant qu'un seul de nos cinq sens, et par le moyen de lignes
et de couleurs sur une surface plane, une impression semblable à celle que
nous aurions éprouvée si nous avions vraiment eu devant nous la scène
représentée. Celle-ci ne peut, en effet, rien nous reproduire des grondements
de la mer, du parfum des fleurs, du gout des fruits, de la douceur ou de la
rudesse d'une surface dessinée, si ce n'est par une suggestion qui dépend
entièrement de nos connaissances antérieures.
Exactement de même nature, quoiqu'infiniment plus grandes, sont les
difficultés qu'éprouve un clairvoyant quand il essaie de décrire sur le plan
physique ce qu'il a vu sur le plan astral ; et ces difficultés sont, en outre,
grandement accrues par ce fait, qu'au lieu d'avoir simplement à rappeler à
l'esprit de ses auditeurs des conceptions avec lesquelles ceux-ci sont
familiers – comme le fait l'artiste lorsqu'il peint des hommes ou des
animaux, des prés ou des arbres – il lui faut chercher, par les moyens très
imparfaits dont il dispose, à leur suggérer des conceptions qui, dans la
plupart des cas, leur sont absolument nouvelles.
Il n'est donc guère surprenant que, quelque vivantes et frappantes que
ces descriptions puissent paraitre à ceux qui l'écoutent, le clairvoyant soit
lui-même constamment impressionné par leur totale insuffisance, et qu'il
sente que ses efforts ne sont pas parvenus à donner la moindre idée de ce
qu'il voit véritablement. Nous devons nous rappeler aussi que dans le cas
d'un récit fait ici-bas d'un cliché lu sur le plan mental, cette difficile
opération de transmission du plan plus élevé à celui qui l'est moins, n'a pas
eu lieu qu'une seule fois, mais bien deux, puisque la mémoire a été transmise
par le plan astral intermédiaire. Et même dans le cas où le clairvoyant a
l'avantage d'avoir développé ses facultés mentales de manière à pouvoir s'en
servir alors qu'il est éveillé dans son corps physique, il est encore entravé
par l'incapacité absolue du langage physique à exprimer ce qu'il voit.
Essayez un moment de concevoir pleinement ce que l'on appelle la
quatrième dimension, dont nous avons dit quelques mots dans un précédent
chapitre. Il est assez facile de penser à nos trois dimensions, d'imaginer dans
notre esprit, la longueur, la largeur et la hauteur d'un objet quelconque ; et
nous voyons que chacune de ces trois dimensions est exprimée par une ligne
qui forme un angle droit avec les deux autres. L'idée d'une quatrième
dimension est qu'il pourrait être possible de tracer une quatrième ligne qui
formerait un angle droit avec les trois autres existant déjà.
Or, l'esprit ordinaire ne peut pas le moins du monde concevoir cette
idée-là, bien que quelques rares personnes qui se sont particulièrement
adonnées à l'étude de cette question soient petit à petit devenues capables
d'imaginer une ou deux figures fort simples de quatre dimensions.
Pourtant, il n'est pas de mots dont elles puissent se servir sur ce plan-ci
qui soient capables de présenter à l'esprit des autres aucune image de ces
figures, et si quelque lecteur qui ne s'est pas spécialement entrainé à cet
exercice veut tenter de rendre visible une forme semblable, il trouvera la
chose tout à fait impossible. Exprimer nettement une figure pareille en
employant des mots physiques serait, en réalité, décrire exactement un seul
objet sur le plan astral ; mais en examinant les archives akashiques sur le
plan mental, nous aurions à faire face aux difficultés nouvelles d'une
cinquième dimension ! Ce qui fait que l'impossibilité où l'on se trouve
d'expliquer complètement ces souvenirs sautera aux yeux de l'observateur
même le plus superficiel.
Nous avons dit des clichés akashiques qu'ils étaient la mémoire du
Logos ; ils sont pourtant bien davantage qu'une mémoire au sens ordinaire
du mot. Aussi vain qu'il soit d'imaginer comment ces images apparaissent à
son point de vue, nous savons cependant qu'à mesure que nous nous élevons
de plus en plus haut, nous nous rapprochons de la mémoire véritable, et que
nous voyons d'une manière qui se rapproche davantage de Sa manière de
voir ; ce qui fait qu'un grand intérêt s'attache aux expériences du clairvoyant
en ce qui touche à ces clichés, lorsque ce dernier se trouve sur le plan
bouddhique, le plus élevé dont il puisse avoir conscience, même quand il est
absent du corps physique, avant qu'il n'atteigne le niveau des Arhats.
À ce point-là, le temps et l'espace ne le limitent plus ; il n'a plus besoin,
comme sur le plan mental, de passer en revue une série d'évènements, car le
passé, le présent et l'avenir lui sont également et simultanément connus,
quelque vide de sens que cette proposition puisse sembler être ici-bas. Oui,
aussi infiniment au-dessous de l'état de conscience du Logos que soit même
ce plan élevé, il apparait en toute clarté, d'après ce que nous voyons là, que
le souvenir doit Lui être bien davantage que ce que nous appelons une
mémoire, car tout ce qui est arrivé dans le passé et tout ce qui arrivera dans
l'avenir se passe actuellement devant Ses yeux, comme les évènements de
ce que nous appelons le temps présent. Cela est, bien entendu, totalement
incroyable, terriblement incompréhensible pour notre entendement limité :
ça n'en est pas moine rigoureusement vrai.
Nous ne pourrions naturellement pas espérer comprendre, à notre degré
actuel de savoir, comment est produit un aussi merveilleux résultat, et tenter
d'en donner une explication ne serait que nous perdre dans un brouillard de
mots qui ne nous vaudrait aucune indication réelle. Pourtant il me vient à
l'esprit un ordre de pensée qui suggère peut-être la direction dans laquelle il
se pourrait que l'on rencontrât cette explication : et tout ce qui nous aidera à
croire que des déclarations aussi surprenantes que celles-ci puissent, après
tout, ne pas être tout à fait impossibles, nous sera utile en élargissant nos
esprits.
Je me souviens avoir lu, voici quelque trente ans, un très curieux petit
livre appelé, je crois, The Stars and the Earth 16, et qui cherchait à démontrer
comment il était scientifiquement possible que le passé et le présent fussent
absolument simultanés dans l'esprit de Dieu. Les arguments fournis en
faveur de cette thèse me frappèrent à cette époque car particulièrement
ingénieux ; et je vais essayer de les résumer, car je pense qu'on les trouvera
quelque peu suggestifs, en rapport avec le sujet que nous venons d'étudier.
Lorsque nous voyons quelque chose, que ce soit le livre que nous tenons
dans nos mains ou que ce soit une étoile dont des millions de milles nous
séparent, notre perception s'exerce par le moyen d'une vibration dans l'éther
(que l'on a coutume d'appeler un rayon de lumière), vibration qui passe de
l'objet vu à nos yeux. Or, la rapidité avec laquelle cette vibration se transmet
est si grande – environ 186 000 milles à la seconde – que lorsque nous
regardons un objet quelconque dans notre monde, nous pouvons considérer
notre perception comme pour ainsi dire instantanée. Mais quand nous avons
affaire aux distances interplanétaires, nous devons tenir compte de la
rapidité de la transmission de la lumière, car le temps qu'elle met à traverser
ces vastes espaces est appréciable. C'est ainsi que la lumière met huit
minutes et quart pour se transmettre du soleil à nous, de sorte que lorsque
16
Les Etoiles et la Terre.
nous regardons le disque solaire nous le voyons par le rayon de lumière qui
l'a quitté depuis plus de huit minutes.
De ce fait découle un résultat très curieux. Il est clair que le rayon de
lumière, grâce auquel nous voyons le soleil, ne peut nous communiquer que
l'état de choses qui existait dans cet astre au moment où il le quitta, et qu'il
ne pourrait être affecté le moins du monde par quoi que ce soit qui se fût
passé dans le soleil après son départ ; de sorte qu'à vrai dire, nous ne voyons
pas le soleil tel qu'il est, mais tel qu'il était huit minutes auparavant.
Autrement dit, si quelque évènement important venait à se produire dans le
soleil, comme, par exemple, la formation d'une nouvelle tâche solaire,
l'astronome qui, au même instant, examinerait cet astre au télescope,
ignorerait totalement cet évènement au moment précis où il se produirait,
puisque le rayon de lumière qui le porterait à sa connaissance ne lui
parviendrait que plus de huit minutes après.
Cet écart est plus frappant encore lorsque nous considérons les étoiles
fixes, parce que, dans leur cas, les distances qui nous en séparent sont
colossalement plus grandes. L'étoile Polaire, par exemple, est si éloignée,
que la lumière, voyageant avec la rapidité inconcevable dont nous avons
parlé plus haut, met plus de cinquante ans à nous atteindre ; d'où la
conclusion étrange, mais inéluctable, que nous voyons l'étoile Polaire non
pas comme elle est et là où elle se trouve au moment où nous la regardons,
mais comme et où elle était il y a cinquante ans. Bien plus : si demain
quelque catastrophe cosmique venait à la faire voler en éclats, nous
continuerions à la voir paisiblement briller dans le ciel pendant toute notre
vie ; nos fils atteindraient l'âge adulte et verraient à leur tour leurs propres
enfants grandir autour d'eux avant que la nouvelle de ce formidable
cataclysme ne fût connue d'aucun œil terrestre. De même, il y a d'autres
étoiles si lointaines que leur lumière met des milliers d'années pour voyager
d'elles jusqu'à nous, de sorte que ce que nous savons de leur état est déjà
vieux de plusieurs milliers d'années.
Poussons ce raisonnement encore un peu plus loin. Supposez que nous
puissions placer un homme à une distance de 186 000 milles de la terre, et
le doter en même temps de la merveilleuse faculté de voir là-bas ce qui se
passe ici, aussi distinctement que s'il était encore auprès de nous. Il est
évident qu'un homme dans cette situation verrait toutes choses une seconde
après qu'elles auraient réellement eu lieu, en sorte qu'en cet instant précis il
verrait ce qui s'est passé il y a une seconde. Doublez la distance, il serait en
retard de deux secondes, et ainsi de suite ; éloignez-le d'une distance égale
à celle qui nous sépare du soleil (tout en lui conservant ce même mystérieux
pouvoir de la vue) et il vous regarderait faire non pas ce que vous faites,
mais ce que vous faisiez il y a huit minutes un quart ; transportez ce même
individu jusqu'à l'étoile Polaire, et il verrait se dérouler à ses yeux des
évènements vieux de cinquante ans ; il assisterait aux gambades enfantines
de gens qui, à ce moment-là, seraient d'un certain âge. Aussi surprenant que
ce fait puisse paraitre, il n'en est pas moins littéralement et scientifiquement
vrai et ne peut être contesté.
Le petit livre en question poursuivait son raisonnement d'une manière
assez logique, disant que Dieu étant tout-puissant, devait posséder cette
extraordinaire puissance de vision que nous venons de prêter à notre
observateur ; et, de plus, qu'étant omniprésent, il devait se trouver à la fois
en chacun des points extrêmes dont nous venons de parler, ainsi qu'en
chacun des points intermédiaires, et cela, non pas successivement, mais
simultanément. Ceci étant admis, il s'ensuit inévitablement que tout ce qui
s'est produit depuis le commencement du monde doit, en cet instant précis,
prendre place sous les yeux du Seigneur, et ce qu'il observe ainsi n'est pas
une simple mémoire des évènements passés, mais bien ces évènements eux-
mêmes.
Tout cela est suffisamment matérialiste et se trouve sur le plan de la
science purement physique ; nous pouvons donc être assurés que ce n'est pas
ainsi que s'exerce la mémoire du Logos ; pourtant, son action est bien
déterminée et tout à fait incontestable, et, ainsi que je l'ai dit déjà, cela n'est
pas inutile, puisque cela nous permet d'entrevoir des possibilités qui,
autrement, ne s'offriraient pas à nous.
Mais, peut-on demander, comment est-il possible, parmi l'effarante
confusion de ces souvenirs du passé, de découvrir une image déterminée,
lorsqu'on en a besoin ? En fait, le clairvoyant inexpérimenté ne peut en
général pas y parvenir, sans quelque lien spécial qui le mette en rapport avec
le sujet qu'il veut voir. La psychométrie est précisément un de ces liens, et
il est très probable que notre mémoire ordinaire n'est réellement qu'une autre
représentation de la même idée. Il semble qu'il y ait une espèce
d'enchainement ou d'affinité magnétique entre toute particule de matière et
le cliché qui embrasse son histoire – affinité qui lui permet d'agir comme
une sorte de conducteur entre ce cliché et les facultés de quiconque peut le
lire.
Voici un exemple : je rapportai, un jour, de Stonehenge, un tout petit
fragment de pierre, pas plus gros que la tête d'une épingle et, lorsque je le
confiai, renfermé dans une enveloppe, aux mains d'une psychomètre qui
n'avait aucune idée de ce que ce pouvait bien être, elle se mit aussitôt à
décrire cette ruine étonnante et le pays désolé qui l'environne ; puis elle se
mit à dépeindre d'une manière vivante, ce qui était évidemment des scènes
de sa prime histoire, montrant ainsi que cet infime grain de pierre avait suffi
à la mettre en communication avec les souvenirs qui se rattachaient aux lieux
d'où il venait. Les évènements auxquels nous sommes mêlés au cours de
notre vie semblent agir sur les cellules de notre cerveau, comme le fit
l'histoire de Stonehenge sur ce tout petit morceau de pierre ; ils créent un
lien avec ces cellules grâce auxquelles notre esprit est mis en rapport avec
cette partie déterminée des clichés akashiques et c'est ainsi que nous nous
"souvenons" de ce que nous avons vu.
Un clairvoyant exercé a lui-même besoin d'un lien pour qu'il puisse
trouver le cliché d'un évènement dont il n'a pas déjà connaissance. Si, par
exemple, il lui plaît d'assister au débarquement de Jules César sur les côtes
d'Angleterre, il a plusieurs moyens de s'approcher de ce sujet. S'il se trouve
avoir visité l'endroit où le débarquement eut lieu, ce qu'il aurait de plus
simple à faire serait probablement de se rappeler l'image de cet endroit, pour
remonter ensuite, à travers les clichés de ce dernier, jusqu'à l'époque qu'il
désire connaitre. S'il ne connait pas le rivage en question, il pourrait
remonter dans le temps jusqu'à la date de cet évènement et se mettre ensuite
à rechercher dans la Manche une flottille de galères romaines ; il pourrait
encore examiner les archives akashiques de la vie romaine de cette période,
et il n'éprouverait aucune difficulté à identifier un personnage aussi en vue
que César, ou, l'ayant rencontré, à le suivre à travers toutes ses guerres des
Gaules jusqu'au moment où il posa le pied sur le sol britannique.
Les gens s'informent souvent au sujet de l'aspect de ces clichés,
demandent s'ils apparaissent près ou loin de l'œil, si les objets que l'on y voit
sont grands ou petits, si les scènes se suivent comme dans un panorama, ou
se fondent l'une dans l'autre comme des vues qui s'effacent, et ainsi de suite.
On ne petit que répondre que leur apparence varie jusqu'à un certain point
avec les conditions dans lesquelles on les voit. Sur le plan astral, la réflexion
est, le plus souvent, un simple tableau, quoique de temps à autre les
personnages soient pourvus de mouvement ; dans ce dernier cas, c'est, au
lieu d'un simple instantané, une réflexion plus longue et plus parfaite qui a
lieu.
Sur le plan mental, les clichés ont deux aspects très différents. Lorsque
la personne qui se trouve dans ce plan ne pense à eux d'aucune façon
spéciale, ils forment comme une toile de fond à tout ce qui se passe, tout
comme les réflexions d'un miroir à l'extrémité d'une pièce, pourraient
constituer un arrière-plan à la vie des gens qui s'y tiendraient.
Il faut toujours se souvenir que, dans ces conditions, ce ne sont en réalité
que de simples réflexions de l'incessante activité d'un grand état de
conscience et sur un plan très supérieur, et qu'ils ont beaucoup d'analogie
avec une interminable suite d'images de cinématographie. Ils ne se fondent
pas l'un dans l'autre comme des vues qui s'effacent, et ce ne sont pas non
plus des séries de tableaux se suivant les uns les autres ; mais l'action des
personnages ou des objets réfléchis s'exerce constamment, comme si l'on
regardait des acteurs sur une scène éloignée.
Mais si le chercheur expérimenté dirige spécialement son attention sur
telle scène donnée, ou désire la faire revivre devant lui, il se produit alors
aussitôt un changement extraordinaire, car il s'agit maintenant du plan de la
pensée et, penser à une chose, c'est l'amener instantanément devant soi. Si,
par exemple, quelqu'un veut voir la représentation de cet évènement dont
nous avons parlé plus haut – le débarquement de Jules César – il ne se trouve
pas, tout aussitôt, regarder un tableau, mais bien être en réalité sur la plage
parmi les légionnaires, l'action tout entière se passant autour de lui,
exactement semblable sous tous les rapports, à ce qu'il aurait vu s'il avait été
là en chair et en os ce matin d'automne de l'an 55 avant JC. Puisque ce qu'il
voit n'est qu'une réflexion, les acteurs de cet évènement n'ont absolument
pas conscience de sa présence parmi eux, pas plus qu'aucun effort de sa part
ne peut changer le moins du monde le cours de leur action, si ce n'est,
toutefois, qu'il est maitre de la rapidité avec laquelle ce draine se passera
sous ses yeux, – qu'il peut faire revivre devant lui en une heure, les
évènements de toute une année ou qu'il peut, à un moment donné, faire
cesser complètement l'action et en considérer telle phase précise, telle scène
particulière, aussi longtemps qu'il lui plaît de le faire, comme on examine
un tableau.
En vérité, il n'observe pas seulement ce qu'il aurait vu s'il avait été là
alors, en chair et en os, mais bien davantage. Il entend et comprend tout ce
que les gens disent, et il est conscient de toutes leurs pensées et de tous leurs
mobiles ; et l'une des plus intéressantes des nombreuses possibilités qui
s'offrent à celui qui a appris à lire les clichés akashiques, est l'étude de la
pensée des âges anciens, la pensée de l'homme des cavernes et des cités
lacustres, ainsi que celle qui présida aux puissantes civilisations de
l'Atlantide, de l'Égypte ou de la Chaldée. On imagine facilement quelles
admirables possibilités s'offrent à celui qui est en pleine possession de cette
faculté. Un champ de recherches historiques du plus passionnant intérêt
s'ouvre devant lui. Non seulement il peut revivre à loisir tout ce que nous
connaissons de l'histoire, redressant au fur et à mesure les nombreuses
erreurs et les méprises qui se sont glissées dans les récits qu'on nous a
légués ; mais il peut encore parcourir à volonté l'histoire entière du monde
depuis son tout commencement, observant le lent développement de
l'intelligence chez l'homme, la descente des Seigneurs de la Flamme, et les
progrès des puissantes civilisations qu'ils fondèrent.
Son étude n'est pas limitée non plus à l'évolution de l'humanité seule ;
il se trouve en présence, ainsi qu'en un musée, de toute la faune et de toute
la flore étranges qui florissaient aux jours de jeunesse du monde ; il peut
suivre tous les étonnants changements géologiques qui se sont produits,
ainsi que le cours des grands cataclysmes qui ont modifié à tant de reprises
toute la surface de la Terre.
Il y a même un cas spécial où celui qui peut lire les archives akashiques
se trouve en sympathie plus proche encore avec le passé. Si, au cours de ses
recherches, il en vient à considérer une scène à laquelle il ait lui-même pris
part dans une existence antérieure, il peut se comporter de deux façons ou
bien assister à cet évènement comme de coutume, en tant que spectateur
(quoique toujours, souvenons-nous en, en spectateur dont la pénétration
visuelle et la sympathie sont parfaites) ; ou bien s'identifier une fois de plus
avec cette sienne personnalité morte depuis longtemps, se rejeter à nouveau
pour un moment dans cette vie d'autrefois, et éprouver absolument une fois
de plus les pensées et les émotions, les plaisirs et les peines d'un passé
préhistorique. On ne saurait concevoir d'aventures plus violentes et plus
extraordinaires que certaines de celles qu'il pourrait revivre ainsi ;
cependant, au cours de toutes ces expériences, il ne doit jamais perdre
conscience de sa propre individualité, et doit conserver le pouvoir de
regagner à volonté sa personnalité actuelle.
On demande souvent comment il est possible à un clairvoyant de
déterminer exactement la date d'un évènement quelconque de ce très lointain
passé qu'il évoque par les clichés. Le fait est que c'est parfois une besogne
ardue que de trouver une date exacte, mais on peut généralement y parvenir
lorsque cela vaut la peine d'y consacrer du temps et des efforts. Si nous
avons affaire aux époques grecque ou romaine, la méthode la plus simple
consiste en général à examiner l'esprit de la personne la plus intelligente qui
soit présente dans le tableau, et à s'informer de la date qu'elle suppose être
la bonne ; le chercheur pourrait encore la regarder écrire une lettre ou tout
autre document et remarquer quelle date – s'il y en avait une – serait indiquée
dans ce qu'elle aurait écrit. Une fois que l'on a acquis ainsi cette date grecque
ou romaine, ce n'est plus qu'une question de calcul que de la rapporter à
notre propre système de chronologie.
Un autre procédé fréquemment adopté est celui qui consiste à se
détourner de la scène que l'on examine pour observer une autre scène
contemporaine dans quelque ville grande et bien connue, comme Rome, et
à noter quel monarque y règne, ou quels sont les consuls de l'année ; et quand
on possède ces données, un coup d'œil jeté sur n'importe quel bon livre
d'histoire fera le reste.
Parfois on peut connaitre une date en examinant quelque proclamation
publique ou quelque document légal ; en somme, pour les temps dont nous
parlons, la difficulté est aisément vaincue.
Toutefois, le problème n'est certes pas aussi simple, lorsque nous avons
affaire à des périodes bien antérieures à celles-là, comme les périodes
égyptiennes, à ses débuts, chaldéenne ou chinoise, ou pour remonter plus
haut encore, les périodes de l'Atlantide elle-même ou de quelqu'une de ses
nombreuses colonies. Là encore, on peut assez facilement obtenir une date
de l'esprit de n'importe quel homme instruit, mais il n'y a plus moyen de la
relier à notre propre système chronologique, puisque l'homme comptera par
ères dont nous ne savons rien, ou par les règnes de rois dont l'histoire se perd
dans la nuit des temps.
Nous n'avons pas, quoi qu'il en soit, encore épuisé nos méthodes.
Rappelons-nous que le clairvoyant peut faire passer les clichés akashiques
devant lui à la vitesse qu'il désire, une année à la minute, s'il lui plaît, ou
même plus rapidement encore. Or, il y a dans l'histoire ancienne un ou deux
évènements dont les dates ont été établies avec certitude, comme, par
exemple, la chute de Poséidon en l'année 9564 avant Jésus-Christ. Donc,
tout naturellement, si par l'aspect général de ce qui l'accompagne il semble
probable que telle image vue soit à une distance appréciable de l'un de ces
évènements, elle peut être rattachée à ce dernier par le simple moyen qui
consiste à parcourir rapidement ce cliché et à compter le nombre d'années
qui séparent les deux évènements à mesure que ceux-ci défilent devant nous.
Pourtant, s'il s'agissait là de repasser des milliers d'années en revue,
comme cela pourrait arriver parfois, ce procédé serait insupportablement
fastidieux. Dans ce cas, il faut nous reporter à la méthode astronomique. Par
suite du mouvement qui est couramment appelé la précession des équinoxes
– bien que ce phénomène pourrait être plus exactement défini comme une
sorte de seconde rotation de la Terre – l'angle formé par l'équateur et
l'écliptique varie incessamment, mais très lentement. C'est ainsi qu'après de
longs intervalles de temps nous trouvons que le pôle terrestre n'est plus
orienté vers le même point dans l'apparente sphère céleste, ou, en d'autres
termes, notre étoile polaire n'est pas, comme à présent, l'alpha de la Petite
Ourse, mais bien quelque autre corps céleste ; et, par cette position du pôle
de la terre, position dont on peut s'assurer en examinant attentivement la
nuit, le ciel de l'image que l'on considère, on peut sans difficulté déterminer
par le calcul une date approximative.
Pour estimer la date d'évènements qui se sont passés il y a des millions
d'années chez les races primitives, on se sert fréquemment comme unité, de
la période d'une rotation secondaire (ou la précession des équinoxes), mais
il va de soi que dans des cas de cette nature la parfaite exactitude n'est pas
nécessaire ; des chiffres ronds suffisent à tout ce que l'on peut pratiquement
se proposer d'établir, lorsqu'il s'agit d'époques reculées.
Il ne faut cependant pas croire que la lecture précise des archives
akashiques – qu'il s'agisse de celles de sa propre vie passée, ou de celles des
autres – soit à la portée de quiconque n'y aurait pas soigneusement été
préparé d'avance. Ainsi que nous l'avons déjà remarqué, bien qu'on puisse
de temps à autre avoir des visions sur le plan astral, il faut posséder la faculté
de se servir du sens mental avant de pouvoir se livrer à aucune lecture digne
de foi. Bien plus, afin de réduire les causes d'erreur au minimum, le
clairvoyant devrait jouir de la maitrise parfaite de ce sens, à l'état de veille
dans son corps physique ; et c'est au prix d'années d'incessant labeur et de
rigoureuse discipline de soi-même que l'on acquiert cette faculté.
Beaucoup de gens paraissent s'attendre à ce que, dès l'instant où ils
auront signé leur demande d'admission à la Société Théosophique et où ils
en feront partie, ils se rappelleront aussitôt trois ou quatre de leurs
naissances antérieures ; bien mieux, il en est qui se mettent bien vite à
imaginer des souvenirs et déclarent que dans leur dernière incarnation ils
étaient, qui Marie, reine d'Écosse, qui Cléopâtre, qui Jules César ! Il va de
soi que d'aussi extravagantes prétentions ne font que semer le discrédit sur
ceux qui sont assez fous pour les émettre ; mais, malheureusement, un peu
de ce discrédit est susceptible de retomber, quelque injustement que ce soit,
sur la Société à laquelle ils appartiennent, de sorte que l'homme qui sent
gronder au fond de lui-même la conviction qu'il fut Homère ou Shakespeare
ferait bien de s'en tenir là et de commencer par faire preuve de sens commun
sur le plan physique, avant de faire part de la nouvelle au monde entier.
Il est parfaitement vrai que des gens ont entrevu en rêve des scènes de
leurs existences passées, mais naturellement ces visions sont en général
partielles et peu dignes de créance. J'ai eu moi-même, au début de ma vie,
une vision de ce genre. Je remarquai qu'au nombre de mes rêves, il en était
un qui se reproduisait constamment ; je voyais une maison, flanquée d'un
portique qui avait vue sur une magnifique baie, non loin d'une colline au
sommet de laquelle s'élevait un monument gracieux. Je connaissais
admirablement cette maison et j'étais aussi familier avec la distribution des
pièces qui la composaient et la vue que l'on avait de sa porte, que je l'étais
avec les pièces et la vue de ma propre demeure, en cette vie-ci. À cette
époque-là, je ne savais rien de la réincarnation, de sorte que je ne vis qu'une
curieuse coïncidence dans le retour si fréquent de ce rêve ; et ce ne fut que
quelque temps après mon entrée dans la Société, un jour où quelqu'un qui
savait me montrait les images de ma dernière incarnation, que je découvris
que mon rêve persistant avait été en réalité un souvenir partiel, et que la
maison que je connaissais si bien était celle où j'étais né il y a plus de deux
mille ans.
Mais bien qu'on cite plusieurs cas où telle scène dont on a nettement
gardé le souvenir s'est ainsi transmise d'une vie à l'autre, il faut qu'un
clairvoyant arrive à un développement considérable de la faculté occulte
avant de pouvoir retrouver, d'une manière déterminée, une série
d'incarnations, fussent-elles les siennes propres ou celles d'un tiers. Ceci
apparaitra clairement si nous nous rappelons les données du problème à
résoudre. Pour suivre un individu, de cette vie-ci dans celle qui l'a précédée,
il faut commencer tout d'abord par remonter dans sa vie présente, à sa
naissance, et puis il faut parcourir à rebours les étapes par lesquelles l'Égo
descendit en incarnation.
Il est clair que nous en arriverons éventuellement ainsi à retrouver l'Égo
tel qu'il était dans les niveaux supérieurs du plan mental ; on verra donc que,
pour faire effectivement cette opération, le chercheur doit être en état de se
servir, à l'état de veille ou tout éveillé, du sens correspondant à ce niveau
élevé ; en d'autres termes, son état de conscience doit se concentrer dans
l'Égo réincarnant lui-même, et non plus dans la personnalité inférieure. Dans
ce cas, la mémoire de l'Égo étant éveillée, ses propres incarnations
antérieures s'offriront à ses regards, ainsi qu'un livre ouvert, et il pourrait
même, s'il le désirait, examiner les conditions d'un autre Égo sur ce niveau,
et le suivre à travers les vies inférieures mentales et astrales antérieures,
jusqu'à ce qu'il en arrivât à la dernière mort physique de cet Égo, et, par elle,
à la vie précédente.
Il n'y a pas d'autre procédé que celui-là pour passer en revue la chaine
des vies avec une absolue certitude ; et par conséquent, nous pouvons
aussitôt repousser comme imposteurs conscients ou inconscients, les gens
qui annoncent pouvoir retrouver les incarnations passées du premier venu à
raison de tant de shillings par tête. Il est superflu de dire que l'occultiste
véritable ne fait pas de réclame et que ce n'est jamais, sous aucun prétexte,
pour de l'argent qu'il exerce ses facultés.
Assurément, l'étudiant qui veut acquérir le pouvoir de retrouver une
série d'incarnations peut y parvenir, simplement grâce aux leçons d'un
maitre qualifié. Certains individus ont affirmé avec obstination qu'il suffisait
qu'un homme fût bon, religieux et "fraternel" pour que toute la sagesse des
siècles lui fût octroyée ; mais un peu de bon sens montrera tout de suite
l'absurdité de cette allégation. Quelque sage que soit un enfant, s'il veut
savoir sa table de multiplication, il faut qu'il travaille pour l'apprendre ; il en
est de même de la capacité de se servir des facultés spirituelles. Ces facultés
elles-mêmes se manifesteront sans doute à mesure que l'homme évoluera,
mais c'est seulement par un travail régulier et assidu ainsi que par un effort
persévérant qu'il peut apprendre à les utiliser en toute confiance et le plus
profitablement.
Prenez le cas de ceux qui veulent aider autrui alors que, pendant leur
sommeil, ils se trouvent sur le plan astral ; il est hors de doute que plus ils
seront instruits ici-bas, et plus leur secours sera efficace sur ce plan
supérieur. C'est ainsi que la connaissance des langues étrangères leur serait
utile, car, bien que sur le plan mental, les individus puissent communiquer
entre eux directement par transmission de pensée, quelle que soit leur langue
maternelle, il n'en est pas de même sur le plan astral, où une pensée a besoin
d'être formulée d'une façon précise par des mots pour qu'elle soit
compréhensible. Si donc vous voulez aider une personne sur ce plan, il vous
faut savoir quelque langage connu d'elle et de vous, qui vous permette de
communiquer, et il s'ensuit que plus vous connaitrez de langues et plus vous
pourrez vous rendre utile. En fait, il n'y a peut-être pas d'ordre de savoir dont
l'occultiste ne trouve pas à tirer profit.
Il conviendrait que les étudiants ne perdissent pas de vue que
l'occultisme est l'apothéose du sens commun, et que toute vision qui leur
arrive n'est pas nécessairement une représentation des clichés akashiques, ni
toute expérience une révélation d'en haut. Il vaut bien mieux errer dans le
champ d'un honnête scepticisme que de s'égarer dans celui d'une trop grande
crédulité ; et c'est là une règle admirable, qui consiste à ne rechercher jamais
une application occulte d'un évènement quelconque lorsqu'il s'en présente
une physique, simple et évidente. Notre devoir est de nous efforcer toujours
de conserver notre équilibre, de ne jamais cesser d'être maitres de nous-
mêmes et d'envisager avec raison et bons sens tout ce qui peut nous arriver ;
nous serons ainsi de meilleurs théosophes, des occultistes plus avisés et des
aides plus utiles qu'auparavant.
Nous rencontrons, comme d'habitude, des exemples à tous les degrés de
la faculté de voir dans la mémoire de la nature, depuis l'homme expérimenté
qui peut consulter les archives akashiques pour soi-même, à sa guise, jusqu'à
celui qui ne fait qu'entrevoir vaguement de temps en temps, ou bien, peut-
être, à qui la chose n'est arrivée qu'une seule fois. Mais celui même qui ne
possède que partiellement et rarement cette faculté y trouve le plus vif
intérêt. Le psychomètre qui a besoin d'un objet physiquement en rapport
avec le passé afin de pouvoir faire revivre ce passé autour de lui, et le voyant
au cristal qui peut parfois braquer son télescope astral, moins sûr, sur tel
évènement historique fort lointain, peuvent tous deux éprouver le plus grand
plaisir à exercer leurs dons respectifs, bien qu'ils puissent ne pas toujours
comprendre exactement comment ils obtiennent leurs résultats et qu'ils
puissent n'en pas être parfaitement maitres en toutes circonstances.
Dans de nombreux cas de manifestations inférieures de ces pouvoirs,
nous constatons qu'ils s'exercent inconsciemment ; plus d'un voyant au
cristal observe des scènes du passé sans être capable de les distinguer des
visions du présent, et plus d'un individu vaguement psychique voit
constamment des tableaux se présenter à ses yeux sans se rendre compte
jamais qu'il psychométrise, en réalité, les divers objets qui l'entourent, à
mesure qu'il lui arrive de les toucher ou de s'approcher d'eux.
Une variété intéressante de cette catégorie de psychique est représentée
par l'homme qui ne peut psychométriser que des personnes, et non, comme
cela est plus fréquent, des objets inanimés. Dans la plupart des cas, cette
faculté se manifeste par intermittence, de sorte qu'un psychique de cette
espèce peut souvent – si on le présente à une personne étrangère – voir en
un clin d'œil quelque évènement important de la vie antérieure de cette
personne, tandis qu'en d'autres circonstances semblables, il ne recevra
aucune impression. Il nous arrive plus rarement de trouver quelqu'un qui a
des visions détaillées de la vie passée de tous ceux qu'il rencontre. Un des
meilleurs exemples, peut-être, de celle catégorie de clairvoyance, nous est
fourni en la personne de l'écrivain allemand Zschokke, qui décrit dans son
autobiographie cette faculté extraordinaire qu'il se trouva posséder. Voici ce
qu'il dit :
"Il m'est arrivé parfois, lors d'une première rencontre avec
un individu qui m'était totalement inconnu, qu'après avoir
écouté sa conversation en silence, sa vie passée, jusqu'au
moment présent, m'est apparue avec quantité de petites
circonstances se rapportant à tel ou tel évènement
particulier, comme en un rêve, mais distinctement, tout à
fait involontairement, et sans l'avoir cherché, le
phénomène ne durant que quelques minutes.
Pendant longtemps je fus porté à considérer ces visions
fugitives comme un jeu du hasard – et cela d'autant plus,
que mon rêve-vision me représentait l'habillement et les
mouvements des acteurs, l'aspect de la pièce, le mobilier,
et divers autres détails de la scène ; jusqu'à ce qu'un beau
jour, étant d'humeur enjouée, je racontai à ma famille
l'histoire secrète d'une couturière qui venait juste de sortir
de la pièce. Je n'avais jamais vu cette personne auparavant.
Néanmoins, les auditeurs en furent étonnés, ils rirent et ne
voulurent pas croire que je n'avais pas préalablement eu
connaissance de la vie antérieure de la personne en
question, étant donné que ce que j'avais dit était
parfaitement vrai.
Je n'en fus pas moins surpris, pour ma part, de voir que
mon rêve-vision était conforme à la réalité. Dès lors, je
prêtai plus d'attention à ces phénomènes et me mis, chaque
fois que les convenances m'y autorisaient, à raconter à
ceux dont les vies avaient ainsi passé sous mes yeux, la
substance de mon rêve-vision, afin de le leur faire
contester ou confirmer. En toutes circonstances, j'en reçus
la confirmation, non sans ébahissement de la part de ceux
qui me la donnaient.
Un certain jour de foire, je me rendis à la ville de
Waldshut, accompagné de deux jeunes forestiers qui sont
encore en vie. C'était le soir, et, fatigués de notre marche,
nous entrâmes dans une auberge appelée la "Vigne". Nous
soupâmes en nombreuse compagnie à la table commune,
lorsqu'il advint que l'on se mît à plaisanter sur la
singularité et sur la simplicité des Suisses, touchant leur
croyance au mesmérisme, au système physiognomonique
de Lavater, etc. Un de mes compagnons dont l'amour-
propre national souffrait de ces railleries me pria de
répondre quelque chose, et de m'adresser particulièrement
à un jeune homme de mine plus relevée, qui nous faisait
face et qui s'était laissé aller à une moquerie sans réserve.
Il arriva que les évènements, de la vie dudit jeune homme,
venaient justement de passer devant mon esprit. Je lui
demandai s'il me répondrait avec vérité et avec franchise
si je lui racontais les incidents les plus secrets de son
histoire, à lui qui m'était aussi peu connu que je l'étais de
lui. Ce serait là, dis-je, surpasser quelque peu l'habileté
physiognomonique de Lavater. Il me promit, si je disais la
vérité, d'en convenir ouvertement. Je racontai donc les
évènements que m'avait fait connaitre mon rêve-vision et
la tablée apprit l'histoire de la vie du jeune commerçant,
de ses années d'école, de ses peccadilles, et, finalement,
d'un léger acte de fourberie, qu'il avait commis sur la
caisse de son patron. Je fis la description de la pièce
inhabitée, avec ses murs blancs, dans laquelle, à droite de
la porte peinte en brun, s'était trouvé sur la table le petit
coffre noir, etc. L'individu, très frappé, convint de
l'exactitude de chaque incident rapporté par moi, et même
– ce à quoi je ne pouvais guère m'attendre, – du dernier."
Et après avoir narré cette aventure, le digne Zschokke continue à se
demander calmement si petit-être, après tout, cette remarquable faculté, qu'il
avait si souvent exercée, ne pourrait pas vraiment avoir toujours été le
résultat d'une simple coïncidence duc au hasard !
On ne trouve mention, dans les livres qui ont été écrits sur ce sujet, que
relativement très peu de gens qui aient possédé cette faculté de voir dans le
passé, et on pourrait par conséquent supposer que le fait est beaucoup moins
fréquent qu'on ne l'imagine. Je soupçonne, quoi qu'il en soit, que la vérité
est plutôt que cette faculté est bien moins fréquemment reconnue. Comme
je l'ai déjà dit, il peut arriver très bien qu'une personne voie une image du
passé sans la reconnaitre pour telle, à moins qu'il ne s'y trouve quelque chose
qui attire spécialement son attention, comme un individu en armes ou vêtu
à l'antique. Une prévision a pu ne pas toujours être reconnue pour telle, au
moment où elle a lieu ; mais la venue d'un évènement prévu le rappelle d'une
manière vivante à l'instant où se produit en fait, de sorte qu'il est peu
probable qu'elle passe inaperçue. Il est donc à croire que les lueurs
occasionnelles de ces réflexions astrales de clichés akashiques sont plus
fréquentes que ne nous le feraient croire les récits qu'on en publie.
CHAPITRE VIII
—
CLAIRVOYANCE DANS LE TEMPS : L'AVENIR
17
Signes avant la mort.
l'approche d'une calamité, soit afin qu'il puisse l'écarter, soit, si cela n'est pas
possible, pour qu'en se préparant à la recevoir, il en ressente moins le choc.
L'évènement qui est ainsi le plus fréquemment entrevu à l'avance est –
assez naturellement, peut-être – la mort ; parfois la mort du voyant lui-
même, parfois celle de quelque être qui lui est cher. Ce type de prévision se
rencontre d'une façon si courante dans ce que l'on écrit sur ce sujet, et son
but est si apparent, qu'il est à peine besoin d'en citer des exemples ; mais une
ou deux circonstances dans lesquelles la vue prophétique, quoique
franchement utile, était cependant d'un caractère moins sombre seront
susceptibles d'intéresser le lecteur. Celle que voici est empruntée à ce recueil
précieux pour celui qui étudie ces choses dangereuses, Night side of
Nature 18 de Mme Crowe (p. 72).
"Il y a quelques années, le docteur Watson, qui habite
maintenant Glasgow, rêva qu'on le mandait au chevet d'un
malade, en un endroit éloigné de quelques milles de chez
lui ; qu'il partait à cheval et, comme il traversait une lande,
il vit foncer furieusement sur lui un taureau aux cornes
duquel il n'échappa qu'en se réfugiant en un endroit que
l'animal ne pouvait atteindre et où il attendit fort
longtemps, jusqu'à ce que des gens, s'étant aperçu de la
position où il était, vinrent à son secours et le délivrèrent.
Le lendemain matin, comme il déjeunait, on le manda
effectivement, et souriant de la coïncidence (il croyait que
c'en était une), il partit à cheval. Il ignorait tout à fait quelle
route il devait prendre, mais il arriva bientôt après à la
lande et le taureau apparut aussitôt, fonçant sur lui à toute
allure. Mais son rêve lui avait montré l'endroit où se
réfugier ; il le gagna incontinent et il y passa trois ou
quatre heures, assiégé par l'animal, jusqu'à ce que les gens
du pays vinssent le délivrer. Le docteur Watson déclare
que, n'eut-il fait son rêve, il n'aurait pas su en quel endroit
aller se réfugier."
18
Le Côté caché de la Nature.
Un autre exemple, dans lequel beaucoup plus de temps s'écoula entre
l'avertissement et la réalisation, nous est fourni par le docteur F. G. Lee,
dans les Glimpses of the supernatural 19 (vol. I, p. 240).
"Mme Hannah Green, gouvernante chez une famille
d'Oxfordshire, habitant la campagne, rêva une nuit qu'elle
avait été laissée seule à la maison un dimanche soir et
qu'entendant frapper à la porte d'entrée principale elle y
était allée et s'était trouvée en présence d'un vagabond de
mauvaise mine, armé d'un gourdin et qui insistait pour
forcer l'entrée de la maison. Elle eut l'impression d'avoir
lutté quelque temps avec lui pour l'en empêcher, mais sans
le moindre succès, et que, ayant été frappée par lui et
s'étant évanouie, il avait pénétré dans la demeure. Là-
dessus, elle s'éveilla.
Comme rien n'advint pendant fort longtemps, elle ne
pensa bientôt plus à son rêve et, à ce qu'elle raconte,
l'oublia même tout à fait. Quoi qu'il en soit, sept ans après,
on confia à cette même personne et à deux autres
domestiques, la garde d'une maison isolée à Kensington
(l'habitation de ville de la même famille) et un certain
dimanche soir, ses deux camarades étant sortis et la
laissant seule, elle tressaillit soudain en entendant frapper
à la grande porte.
Tout d'un coup le souvenir de son ancien rêve lui revint
avec une vivacité singulière et une intensité étonnante et
elle ressentit profondément son isolement. Ayant donc
aussitôt allumé une lampe sur la table du vestibule –
pendant ce temps le coup bruyant à la porte fut répété avec
vigueur, – elle prit la précaution de monter jusqu'à un
palier qui donnait sur l'escalier et elle ouvrit la fenêtre ;
alors, à sa profonde terreur, elle vit en chair et en os
l'homme même que, de nombreuses années auparavant,
elle avait vu dans son rêve, elle le vit, armé d'un gourdin
et demandant à entrer.
19
Échappées dans le surnaturel.
Avec une grande présence d'esprit, elle descendit jusqu'à
la porte principale, la ferma plus surement, ainsi que
d'autres portes et des croisées, et puis se mit à agiter
violemment les diverses sonnettes de la maison, puis elle
éclaira les chambres du haut. On constata que, grâce aux
dispositions qu'elle avait prises, elle avait fait fuir l'intrus."
Il est certain que, dans ce cas encore, le rêve fut d'une utilité pratique,
car, sans lui, la brave gouvernante aurait sans aucun doute et par la force de
l'habitude, ouvert la porte comme de coutume en réponse au coup frappé.
Ce n'est, toutefois, pas uniquement en rêve que l'Égo fait connaitre à
son moi inférieur ce qu'il croit utile pour lui de savoir. On trouverait dans
les livres bien des exemples de ce fait, mais au lieu de les emprunter, je vais
vous raconter un cas qui me fut narré il y a quelques semaines seulement,
par une dame de mes amies, et qui, s'il n'offre aucun détail romanesque, a
au moins le mérite d'être neuf.
Mon amie, donc, a deux enfants en bas âge et il y a quelque temps,
l'ainée attrapa ce que l'on crut un gros rhume ; quelques jours durant, elle
eut le nez complètement bouché. La mère n'y fit guère attention, pensant que
cela se passerait, jusqu'à ce qu'un jour, elle vit soudain devant elle, dans l'air,
ce qu'elle décrit comme étant l'image d'une chambre, avec, au milieu, une
table, sur laquelle son enfant était étendue, évanouie ou morte, tandis que
des gens se penchaient sur elle… Elle voyait distinctement les plus intimes
détails de cette scène et elle remarqua particulièrement que l'enfant portait
une chemise de nuit blanche, alors qu'elle savait que tout le linge de ce genre
qui appartenait à sa petite fille était rose.
Cette vision l'impressionna vivement et lui suggéra, pour la première
fois, que l'enfant pourrait bien souffrir de quelque chose de plus sérieux
qu'un rhume ; elle la mena donc à l'hôpital et la fit examiner. Le chirurgien
découvrit dans le nez la présence de végétations dangereuses, et déclara
nécessaire de les enlever. Quelques jours plus tard, l'enfant fut conduite à
l'hôpital pour y être opérée et mise au lit. Quand la mère y arriva à son tour,
elle s'aperçut qu'elle avait oublié d'apporter une des chemises de nuit de
l'enfant et les infirmières en prêtèrent une qui était blanche. Et c'est, vêtue
de cette chemise blanche, que la petite fille subit l'opération le lendemain,
dans la salle même que la mère avait vue dans sa vision, tout se passant
exactement comme elle l'avait prévu.
Dans tous ces cas, la prévision eut son résultat, mais les livres sont
pleins d'histoires d'avertissements négligés ou tournés en dérision et des
désastres qui s'ensuivirent. Il y a des cas où la personne avertie n'a
absolument aucun pouvoir d'intervenir dans la question ; telle cette aventure
historique où John Williams, directeur de mines en Cornouailles, prévit dans
ses moindres détails, huit ou neuf jours avant qu'il ne fût connu, l'assassinat,
dans les couloirs de la Chambre des Communes, de M. Spencer Perceval,
alors Chancelier de l'Échiquier. Mais, même dans ce cas, il est bien possible
que quelque chose aurait pu être fait pour l'éviter, car nous lisons que
M. Williams fut impressionné à ce point par sa vision qu'il consulta ses amis
pour savoir s'il ne ferait pas bien d'aller à Londres pour prévenir M. Perceval.
Malheureusement, ils l'en dissuadèrent et l'assassinat eut lieu.
Il ne parait d'ailleurs pas bien probable, fût-il même allé à Londres et y
eût-il raconté son histoire, qu'on lui eût prêté grande attention ; il n'en
demeure pas moins vrai qu'on aurait eu la possibilité de prendre des
précautions qui auraient évité ce meurtre.
Rien de précis ne nous montre quelle action particulière sur les plans
supérieurs amena cette curieuse vision prophétique. Les deux individus
étaient tout à fait inconnus l'un de l'autre, en sorte qu'elle n'eut pas pour
cause quelque étroite sympathie entre eux. S'il s'agit là d'une tentative faite
par un aide, pour détourner l'arrêt menaçant, il parait étrange qu'on n'ait pas
pu trouver plus près de Londres qu'en Cornouailles quelqu'un de
suffisamment impressionnable pour recevoir cet avertissement. Il est
possible que M. Williams, alors que pendant son sommeil il était sur le plan
astral, ait d'une manière quelconque eu connaissance de cette réflexion de
l'avenir, et qu'en étant naturellement terrifié, il l'ait transmise à son esprit
inférieur, dans l'espoir que, d'une façon ou d'une autre, quelque chose pût
être fait pour l'éviter ; mais il est impossible de diagnostiquer le cas avec
certitude sans examiner les archives akashiques, afin de voir ce qui se passa
réellement.
M. Stead nous présente, dans ses Real Ghost Stories (p. 83), un exemple
tout à fait typique de prévision absolument inutile.
Il s'agit de son amie Mlle Freer, plus connue sous le nom de Mlle X.
Étant à la campagne, cette dame vit, une fois, alors qu'elle était bien
éveillée et parfaitement consciente, une charrette anglaise attelée d'un
cheval blanc, qui attendait à la porte du hall, et dans laquelle se trouvaient
deux étrangers dont l'un descendit de voiture et se mit à jouer avec un chien
terrier.
Elle remarqua qu'il était vêtu d'un ulster et remarqua aussi
particulièrement les traces fraiches que les roues avaient laissées sur le
gravier. Il n'y avait pourtant pas de voiture devant la porte à ce moment-là ;
mais, une demi-heure après, deux étrangers arrivèrent en effet dans
l'équipage annoncé et chacun des détails de la vision fut confirmé. Plus loin,
M. Stead cite le cas d'une autre prévision également stérile, et où sept années
s'écoulèrent entre le rêve (car, cette fois-ci, c'était un rêve) et sa réalisation.
Tous ces exemples (et je les ai choisis au hasard parmi des centaines
d'autres) montrent que l'Égo a, à n'en pas douter, dans une certaine mesure,
la faculté de prévoir, et les manifestations en seraient évidemment beaucoup
plus fréquentes, n'étaient-ce l'épaisseur et le manque de réponse chez les
véhicules inférieurs de la majorité de ceux qui composent ce que nous
appelons l'humanité civilisée, – tendances dues surtout au grossier
matérialisme pratique de notre époque. Et je ne veux pas dire que l'on
professe une croyance matérialiste en général, mais seulement que, dans
toutes les questions pratiques de la vie de chaque jour, tout le monde, pour
ainsi dire, est uniquement guidé d'une manière ou d'une autre, par des
considérations et des intérêts matériels.
Dans bien des cas, l'Égo lui-même peut ne pas être développé, ses
prévisions étant, en conséquence, très vagues ; dans d'autres, il est possible
qu'il voie clairement lui-même, mais que ses véhicules inférieurs soient si
peu impressionnables que tout ce qu'il puisse parvenir à communiquer à son
cerveau physique ne soit que le présage indéterminé d'un désastre à venir. Il
y a aussi des cas où l'avertissement n'est en aucune façon le fait de l'Égo,
mais de quelque entité étrangère, qui pour une raison quelconque, s'intéresse
à la personne avertie. Dans l'ouvrage que j'ai cité plus haut, M. Stead nous
parle de la certitude où il fut bien des mois à l'avance, que la Pall Mall
Gazette lui serait confiée, bien que normalement, rien ne parût moins
probable. Cette prévision, fût-elle le résultat d'une impression faite par son
propre Égo ou bien d'un avertissement amical de quelque autre personne, il
n'est pas possible de le dire sans recherches précises, mais la confiance que
M. Stead eut en elle fut pleinement justifiée.
Il y a enfin une dernière variété de la clairvoyance dans le temps qu'on
ne peut pas passer sous silence. Elle est assez rare, en somme, mais on en a
relevé assez d'exemples pour qu'elle appelle notre attention, bien que, par
malheur, les détails qu'on nous en donne laissent dans l'ombre ceux qui nous
seraient utiles pour la diagnostiquer avec certitude. Je veux parler des cas où
l'on a vu des armées spectrales ou bien des troupeaux fantomatiques
d'animaux. Dans The Night Side of Nature (pp. 463 et suiv.), nous lisons le
récit de plusieurs de ces visions. Nous y voyons comment à Havarah Park,
près de Riplay, des gens dignes de foi virent manœuvrer et puis s'évanouir
une troupe de plusieurs centaines de soldats, vêtus de blanc ; et comment,
quelques années plus tôt, un respectable fermier et son fils eurent aussi la
vision d'une armée semblable, dans le voisinage d'Inverness.
Dans ce dernier cas aussi, la troupe était fort nombreuse et les
spectateurs ne doutèrent pas un instant tout d'abord que ce ne fussent là des
individus en chair et en os. Ils comptèrent pour le moins seize doubles
colonnes de soldats et eurent largement le temps de remarquer tous les
détails. Les hommes marchaient en colonne par sept et ils étaient
accompagnés d'un bon nombre de femmes et d'enfants qui portaient des pots
en fer-blanc et autres ustensiles de cuisine. Les hommes étaient vêtus de
rouge et leurs armes brillaient avec éclat au soleil. Au milieu d'eux se
trouvait un animal, cerf ou cheval – ils ne purent distinguer quoi – qu'ils
poussaient furieusement devant eux à coups de baïonnettes.
Le plus jeune des deux hommes fit remarquer à l'autre qu'à chaque
instant les rangs de la queue étaient obligés de courir pour rattraper le front ;
l'ainé, qui avait été soldat, fit observer qu'il en était toujours ainsi, et il
recommanda à l'autre, s'il avait à servir jamais, de tâcher de marcher en tête
de la colonne. Il n'y avait qu'un seul officier monté ; il avait un cheval de
dragon gris, et il portait un chapeau à galons d'or et un manteau bleu de
hussard, à larges manches ouvertes doublées de rouge. Les deux spectateurs
le regardèrent si attentivement qu'ils dirent après qu'ils pourraient le
reconnaitre n'importe où.
Ils eurent toutefois peur d'être maltraités ou obligés de suivre la troupe
qu'ils jugèrent être venue d'Irlande, et avoir débarqué à Kyntyre ; et tandis
qu'ils grimpaient sur une digue pour se mettre hors de sa portée, la vision
tout entière s'évanouit.
Au commencement de ce siècle, on observa à Paderborn, en
Westphalie, un phénomène de la même nature qui eut au bas mot trente
personnes pour témoins ; mais comme, quelques années plus tard, une revue
de vingt mille hommes eut lieu au même endroit, on conclut que cette vision
avait dû être une espèce de seconde vue, faculté assez répandue dans la
région.
De pareilles armées spectrales sont cependant vues, parfois, là où une
troupe d'hommes ordinaires n'aurait absolument pas pu marcher, ni avant,
ni après. Un des exemples les plus remarquables d'apparitions de ce genre
nous est raconté par Mlle Harriet Martineau, dans des descriptions de The
English lakes 20. Voici ce qu'elle écrit :
"Ce Souter ou Soutra Fell est la montagne sur laquelle des
fantômes apparurent avec des intervalles par myriades,
pendant dix années, au cours du siècle dernier ; au dire de
vingt-six témoins choisis, et au dire de tous les habitants
de tous les cottages en vue de la montagne, ils apparurent
sous le même aspect et pendant une durée de deux heures
et demie à la fois – l'obscurité venant mettre fin à ce
spectacle spectral ! La montagne, qu'on se le rappelle, est
labourée de précipices, défiant ainsi toute marche de corps
de troupes, et les versants nord et ouest offrent un
escarpement perpendiculaire de 900 pieds.
À la Saint-Jean d'été, en 1735, un domestique de ferme de
M. Lancaster, qui se trouvait à un demi-mille de la
montagne, vit le versant est de son sommet couvert de
troupes qui poursuivirent pendant une heure leur marche
en avant. Elles arrivaient, en détachements distincts, d'une
éminence située au nord et disparaissaient dans une niche,
au sommet. Quand le pauvre garçon raconta son histoire,
on l'injuria de tous côtés, comme on injurie en général tous
ceux auxquels il arrive de voir quelque chose
d'extraordinaire. Deux ans après, encore à la Saint-Jean
d'été, M. Lancaster vit au même endroit des hommes qui
avaient l'air de suivre leurs chevaux, comme s'ils
revenaient de la chasse à courre. Il n'y prit pas garde, mais,
dix minutes plus tard, il regarda encore par hasard dans la
même direction et il vit les hommes, à cheval cette fois-ci,
suivis d'une interminable colonne de troupes, marchant
par cinq et se dirigeant de l'éminence par-dessus la
crevasse, comme auparavant. Toute sa famille vit ce
20
Les Lacs anglais.
spectacle ; elle vit manœuvrer les forces, chaque
compagnie étant surveillée par un officier monté qui
galopait de-ci de-là. Les ombres du crépuscule
s'épaississant, la discipline eut l'air de se relâcher ; les
troupes s'entremêlèrent et marchèrent à des allures
diverses jusqu'à ce que tout se perdit dans l'obscurité.
Naturellement, tous les Lancaster furent insultés, comme
leur domestique l'avait été ; mais la justification de leurs
dires ne se fit pas longtemps attendre.
À la Saint-Jean d'été de la terrible année 1745, vingt-six
personnes, que la famille Lancaster avait convoquées tout
exprès, virent tout ce qu'on avait vu avant et virent même
davantage. Il y avait cette fois des voitures parmi les
troupes ; et tout le monde savait que jamais voitures
n'étaient allées ni n'auraient pu aller sur le sommet du
Souter Fell. La multitude dépassait l'imagination ; car les
troupes s'étendaient sur une longueur d'un demi-mille et
elles marchèrent rapidement jusqu'à ce que, marchant
encore, la nuit les cachât. L'aspect de ces spectres n'avait
rien de vaporeux ni d'indistinct. Ils semblaient si véritables
que quelques-uns des spectateurs allèrent, le lendemain
matin, sur la montagne, pour rechercher les traces des
sabots des chevaux ; ce fut avec épouvante qu'ils
constatèrent l'absence de toutes traces dans la bruyère et
sur l'herbe. Les témoins de cette aventure la racontèrent
devant un magistrat, sous le sceau du serment ; et le pays
tout entier fit des prévisions effroyables au sujet de la
révolte écossaise qui allait éclater.
On sait maintenant que deux autres personnes avaient eu
quelque vision du même genre dans l'intervalle qui sépara
ces deux évènements – ce fut en 1743 –, mais elles
l'avaient cachée afin de se soustraire aux injures dont leurs
voisins avaient été l'objet. M. Wren, de Wilton Hall, et son
garçon de ferme virent, un soir d'été, un homme et un
chien sur la montagne, qui poursuivaient des chevaux le
long d'une pente si escarpée qu'un cheval n'y pouvait pour
ainsi dire pas mettre le pied. Ils allaient à une prodigieuse
allure et ils disparurent si rapidement sur le versant sud de
la colline que M. Wren et son domestique s'y rendirent le
lendemain matin pour rechercher le corps de l'homme qui
avait certainement dû se tuer. D'homme, de cheval, de
chien, ils ne trouvèrent pas la moindre trace ; ils
redescendirent et se tinrent cois.
Lorsqu'enfin, ils parlèrent, ce leur fut une maigre
consolation que de partager avec les vingt-six camarades,
qui avaient juré, le ridicule où on les tint.
Quant à l'explication de ce phénomène, l'éditeur du
Lonsdale Magazine déclara (vol. II, p. 313) que l'on
découvrit que le jour de la Saint-Jean d'été de 1745, les
rebelles "manœuvraient sur la côte ouest d'Écosse et que
leurs mouvements avaient été réfléchis par quelque vapeur
transparente, semblable à la Fata Morgana". Ce n'est là
qu'une bien pauvre explication ; mais c'est, à notre
connaissance, la seule qu'on ait pu donner jusqu'à ce jour.
Quoi qu'il en soit, ces faits en amenèrent beaucoup
d'autres ; comme, par exemple, la marche spectrale du
même genre, qui fut vue dans le Leicestershire en 1707, et
comme la tradition de la marche des armées sur Helvellyn,
à la veille de la bataille de Marston Moor."
On cite d'autres exemples dans lesquels des troupeaux de moutons
spectraux ont été vus sur certaines routes, et il y a naturellement diverses
histoires allemandes de cavalcades fantomatiques de chasseurs et de
voleurs.
À ces derniers cas – comme cela arrive si souvent dans la recherche des
phénomènes occultes – il y a plusieurs causes possibles, dont chacune
pourrait expliquer les évènements observés, mais en l'absence de plus
amples informations, il n'est guère permis de faire plus que de deviner
laquelle de ces causes possibles est entrée en jeu dans tel ou tel cas
déterminé.
L'explication que l'on propose d'habitude (chaque fois que l'aventure
tout entière n'est pas tournée en ridicule et traitée de mensonge) est que ce
que l'on voit est une réflexion par mirage des mouvements d'un vrai corps
de troupes, évoluant à une distance considérable. J'ai vu, moi-même, à
plusieurs reprises, le mirage ordinaire et sais par conséquent quelque chose
de son extraordinaire pouvoir d'illusion ; mais il me semble que nous aurions
besoin de découvrir une variété de mirages entièrement nouvelle, tout à fait
différente de celle que connait actuellement la science, pour expliquer ces
histoires d'armées fantômes, dont certaines défilent à quelques mètres
seulement du spectateur.
Il se pourrait que ce fussent là tout d'abord, – comme cela semble être
le cas pour la vision de Westphalie que je viens de rapporter – de simples
phénomènes de prévisions sur une gigantesque échelle, mais organisés par
qui, et dans quel but ? Voilà qui est malaisé à deviner.
Ils peuvent souvent encore appartenir au passé et non pas à l'avenir et
être, en somme, la réflexion de scènes empruntées aux clichés akashiques –
bien qu'ici encore, la raison et la méthode d'une réflexion semblable ne
soient pas bien claires.
Il y a de nombreuses tribus d'esprits de la nature qui seraient
parfaitement capables, si pour quelque raison ils le voulaient, de produire de
pareilles apparences grâce à leur merveilleux pouvoir de magie (voyez Le
Plan astral), et de tels phénomènes répondraient admirablement à ce plaisir
qu'ils éprouvent à mystifier et à confondre les êtres humains. Parfois peut-
être aussi leur intention est bonne, et par un avertissement affectueux ils
préviennent leurs amis des évènements qu'ils savent devoir bientôt se
produire. Il semble qu'une explication de ce genre constituerait la méthode
la plus raisonnable d'expliquer la série de phénomènes extraordinaires
décrits par Mlle Martineau – étant admis toutefois que l'on peut avoir foi dans
les histoires qu'on lui a racontées.
Une autre explication possible serait que, dans certains cas, ce qui a été
pris pour des soldats était simplement les esprits de la nature eux-mêmes, au
cours de certaines de ces évolutions ordonnées qu'ils aiment tant, encore que
l'on doive reconnaitre que ces évolutions se produisent rarement sous un
aspect qui pourrait les faire prendre – si ce n'est par les plus ignorants – pour
des manœuvres militaires.
Il est probable que, dans la plupart des circonstances, les troupeaux
d'animaux ne sont pas autre chose que des clichés akashiques, mais il y a
des cas où, comme pour les chasseurs maudits de l'histoire allemande, ces
souvenirs appartiennent à une catégorie tout à fait différente de phénomènes,
complètement en dehors de notre sujet. Ceux qui s'occupent d'occultisme
savent bien que les circonstances qui entourent une scène de terreur ou de
passion intense – telle qu'un meurtre exceptionnellement horrible – peuvent
être à l'occasion reproduites sous une forme dont un très superficiel
développement de la faculté psychique permet de se rendre compte, et il est
arrivé quelquefois que divers animaux faisaient partie de l'entourage du
drame, et qu'ils ont été aussi, en conséquence, reproduits périodiquement
par l'action de la conscience coupable du meurtrier (Voyez Le Plan astral,
p. 130).
Il est probable que l'on peut en général ranger dans cette catégorie tout
fondement ou tout fait qui se trouve à la base de ces diverses histoires de
cavaliers et de chasseurs fantômes. C'est encore là, évidemment,
l'explication de certaines de ces armées de spectres, comme par exemple
cette reproduction de la bataille de Edgehill qui semble avoir eu lieu à
diverses reprises pendant quelques mois après le combat véritable, ainsi que
l'affirmèrent un juge de paix, un prêtre et divers autres témoins oculaires,
dans une curieuse brochure contemporaine intitulée : Prodigious Noises of
War and Battle, at Edggehill, near Keinton, in Northamptonshire 21.
D'après cet écrit, un certain nombre d'officiers étudièrent ce cas à
l'époque, et ils reconnurent nettement beaucoup des personnages fantômes
qu'ils virent. C'est là très certainement un exemple du pouvoir terrible qu'ont
de se reproduire les passions indomptées de l'homme, et de provoquer, de
quelque manière étrange, une sorte de matérialisation de leur souvenir.
Il est clair, dans certains cas, que les troupeaux que l'on a vus ont
simplement été des hordes d'élémentals artificiels malpropres, prenant cette
forme afin de pouvoir se repaitre des émanations nauséabondes de lieux
particulièrement épouvantables, tels que l'emplacement de potences. Nous
trouvons un exemple d'un cas de cette espèce dans les célèbres gyb ghosts
ou fantômes du gibet, et qui est raconté dans More glimpses of the World
unseen 22 (p. 109) ; ces fantômes, dit-on, sont vus maintes et maintes fois
sous l'aspect de troupeaux, de créatures difformes et ressemblant à des porcs,
qui s'agitent, fouillent la terre et se battent chaque nuit, sur l'emplacement
de cet odieux appareil de crime. Mais ces visions appartiennent plutôt au
domaine des apparitions qu'à celui de la clairvoyance.
21
Bruits prodigieux de guerre et de bataille à Edgehill, près de Keinton, en Northamptonshire.
22
Éditeur : Nouvelles échappées dans le Monde invisible.
CHAPITRE IX
—
MÉTHODES DE DÉVELOPPEMENT
23
Traduction française de l'ouvrage : Invisible Helpers.
tous les points de vue, et, à mesure qu'il deviendra de plus en plus capable
d'élever et de concentrer sa pensée, il trouvera peut-être que de nouveaux
mondes s'ouvriront à sa vue.
Comme exercice préliminaire à la pratique parfaite de cette méditation,
il trouvera utile de faire acte de concentration dans ses affaires de tous les
jours, voire dans les plus petites. S'il écrit une lettre, qu'il ne pense
uniquement qu'à cette lettre jusqu'à ce qu'il l'ait finie ; s'il lit un livre, qu'il
veille à ne jamais permettre à sa pensée de s'éloigner de celle de l'auteur. Il
lui faut apprendre à tenir son esprit en bride et à en être maitre, ainsi que de
ses passions inférieures ; il lui faudra travailler patiemment pour acquérir la
maitrise absolue de ses pensées, de manière à savoir toujours exactement à
quoi il pense et pourquoi il pense à telle ou telle chose, afin qu'il puisse se
servir de son esprit, le faire agir ou le reposer, tel un tireur habile qui fait de
son épée ce qu'il veut.
Et malgré tout, si ceux-là qui désirent si sincèrement acquérir la faculté
de clairvoyance pouvaient l'avoir temporairement pour un jour ou pour
même une heure, il est loin d'être sûr qu'il leur plairait de conserver ce don.
Il est certain qu'elle leur ouvre des domaines nouveaux d'étude, de nouveaux
moyens d'être utiles et, pour cette raison, la plupart d'entre nous trouvent
qu'elle vaut bien la peine qu'on la possède ; mais il faut se rappeler que pour
celui que son devoir appelle à vivre encore en ce bas monde, ce n'est
nullement une joie sans mélange. Sur celui qui acquiert cette vision, le
chagrin et la misère, le mal et l'avidité du monde pèsent comme un fardeau
toujours présent, au point que dès les premiers jours de son savoir, il se sent
souvent enclin à répéter l'adjuration passionnée contenue dans ces vers
sonores de Schiller :
Dein Orakel zu verkünden, warum warfest du mich hin
In die Stadt der ewig Blinden, mit dem aufgeschloss'nen Sinn ?
Frommt's den Schleier aufzuheben, wo das nahe Schreckniss droht ?
Nur der Irrthum ist das Leben ; dieses Wissen ist der Tod.
Nimm, o nimm die traur'ge Klarheit mir vom Aug'den blut'gen
Schein !
Schrecklich ist es deiner Wahrheit sterbliches Gefüss zu sein !
Que l'on pourrait peut-être traduire :
"Pourquoi m'as-tu jeté ainsi dans la cité de ceux qui sont aveugles à
jamais, pour proclamer ton oracle en m'ouvrant un sens nouveau !
Quel profit y a-t-il à lever le voile, quand nous menace l'obscurité
proche ?
La vie n'est qu'erreur ; ce savoir est la mort.
Reprends cette triste clairvoyance ;
enlève cette cruelle lumière de mes yeux !
Il est horrible d'être le canal mortel de la vérité."
Et, plus loin encore, il s'écrie : "Rends-moi ma cécité, l'heureuse
obscurité de mes sens : reprends ton horrible présent !"
Mais c'est là, assurément, un sentiment qui ne dure pas, car la vision la
plus élevée montre bientôt à l'élève quelque chose de plus que le chagrin, et
donne bientôt à son âme l'absolue certitude que, quoi que puissent indiquer
ici-bas les apparences, toutes choses travaillent, sans l'ombre d'un doute,
d'accord en vue du bien éventuel de tous. Il réfléchit que le péché et la
souffrance sont parmi nous, qu'il les puisse distinguer ou non, et que,
lorsqu'il peut les voir, il est en fin de compte plus apte à porter une aide
efficace qu'il ne saurait l'être, s'il travaillait dans l'obscurité ; ainsi, petit à
petit, il apprend à porter sa part du lourd karma du monde.
Il y a des mortels égarés qui, ayant la bonne fortune de posséder quelque
peu de ce pouvoir supérieur, sont cependant si parfaitement ignorants du
vrai sentiment qui l'accompagne, qu'ils l'emploient en vue des résultats les
plus sordides, et vont même jusqu'à faire de la réclame sous le titre de test
and business clairvoyants 24 ! Il est superflu de dire que faire un tel usage de
cette faculté, c'est simplement la prostituer et l'avilir ; et c'est montrer que
son infortuné possesseur s'en est, en quelque sorte, emparé avant que le côté
moral de sa nature ait été suffisamment développé pour supporter l'épreuve
que la clairvoyance impose. Et lorsqu'on se rend compte de la quantité de
karma malfaisant qu'une action de ce genre peut engendrer en fort peu de
temps, le dégout se change en pitié pour le malheureux auteur de cette folie
sacrilège.
On reproche parfois à la clairvoyance de détruire tout le côté privé de
la vie en ce qu'elle confère la possibilité illimitée de pénétrer les secrets des
autres. Il n'est pas douteux qu'elle donne, en effet, ce pouvoir, mais
l'objection n'en est pas moins amusante pour quiconque connait si peu que
ce soit ce dont il est question. Cette objection est peut-être fondée en ce qui
concerne les pouvoirs très limités des test and business clairvoyants ; mais
24
Note du traducteur : Pourrait se traduire librement par "clairvoyants professionnels".
celui qui la formule à l'endroit de ceux qui ont acquis cette faculté au cours
de l'instruction spéciale reçue, et qui, en conséquence, la possèdent
complètement, celui-là oublie trois faits fondamentaux, à savoir
premièrement, qu'il est tout à fait inconcevable que quiconque verrait
s'ouvrir les merveilleux champs de recherches que livre la clairvoyance
véritable, pourrait jamais avoir le moindre désir de chercher à pénétrer dans
tous les petits secrets sans importance de telle ou telle personne déterminée ;
ensuite, en admettant que, par impossible, notre clairvoyant eût une pareille
curiosité indélicate des choses d'insignifiant commérage, malgré tout,
l'honneur d'un gentleman, sur ce plan là comme sur le nôtre, interdirait
naturellement d'envisager, fût-ce pour un instant, la pensée d'en tirer parti ;
et troisièmement, dans le cas où, par un hasard inouï, on viendrait à
rencontrer quelque espèce de pitre de bas étage, pour lequel les
considérations ci-dessus n'auraient pas de poids, qu'on enseigne toujours à
chaque élève, dès qu'il commence à acquérir la faculté, les limites dans
lesquelles il lui est permis d'en faire usage.
En résumé, on peut admettre qu'il n'y aura ni espionnage, ni emploi
égoïste de la faculté de clairvoyance, ni étalage de ces phénomènes.
Autrement dit, les mêmes considérations qui inspireraient, sur le plan
physique, la conduite d'un homme d'honneur, doivent également jouer sur
les plans astral et mental ; l'élève ne doit jamais, en aucun cas, faire emploi
du pouvoir que lui confère son savoir spécial, en vue d'accroitre ses
avantages en ce monde, ou en vue d'en tirer profit, de quelque façon que ce
soit ; enfin, il ne doit jamais – comme nous disons dans les milieux spirites
– "donner une preuve", action qui consiste à faire quelque chose qui prouve
incontestablement aux sceptiques sur le plan physique qu'il possède ce qui
peut leur paraitre un pouvoir anormal.
Pour ce qui est de cette dernière prescription, on dit souvent : "Mais
pourquoi n'agirait-il pas ainsi ? Il serait si aisé de confondre et de convaincre
votre sceptique, et ça lui ferait du bien !" Ceux qui formulent cette
prescription perdent de vue le fait que, d'abord, il n'y a personne parmi ceux
qui savent, qui désire confondre et convaincre les sceptiques, ou qui se
soucie le moins du monde de l'attitude du sceptique, quelle qu'elle soit ; et,
en second lieu, ils ne comprennent pas combien il est préférable pour le
sceptique d'arriver peu à peu à apprécier intellectuellement les faits de la
nature, plutôt que de les découvrir brusquement, comme on reçoit un coup
qui vous assomme. Mais c'est là un sujet qui a été traité à fond dans Occult
world 25 de M. Sinnett, et il est inutile de répéter ici les arguments qu'il y fait
valoir.
Certains de nos amis ont beaucoup de peine à se rendre compte que les
sots commérages et la vaine curiosité qui remplissent si entièrement la vie
de la majorité des sans-cervelle sur cette terre ne peuvent tenir aucune place
dans la vie plus réelle du disciple ; et alors, parfois, ils demandent si – même
sans qu'il ait le désir spécial de voir – il ne se pourrait pas qu'un clairvoyant
pénétrât, à l'occasion, le secret qu'un tiers chercherait à tenir caché, comme
il arrive au regard de tomber involontairement sur telle phrase d'une lettre
appartenant à un autre, et qui serait là, ouverte, sur la table. Sans doute, cela
peut arriver. Et encore ? L'homme d'honneur détournerait aussitôt ses yeux,
dans l'un ou dans l'autre cas, et il en serait tout comme s'il n'avait pas vu. Si
ceux qui soulèvent des objections pouvaient seulement saisir cette idée qu'il
n'y a pas d'élève qui se soucie des affaires des autres, excepté lorsqu'il est à
sa portée de leur venir en aide, et qu'il a toujours à s'occuper d'une somme
énorme de travail personnel, ils ne seraient pas si désespérément loin de
comprendre les faits de la vie plus vaste du clair voyant expérimenté.
Même le peu que j'ai dit touchant les restrictions que l'on impose à
l'élève montrera clairement que, dans bien des cas, il en saura beaucoup plus
long qu'il ne lui sera permis d'en dire. Et, bien entendu, ceci, dans une bien
plus large mesure est vrai des grands Maitres de la Sagesse eux-mêmes, et
c'est pourquoi ceux qui ont le privilège d'être de temps en temps admis en
leur présence, écoutent avec respect le moindre des mots qu'ils prononcent,
même sur des sujets qui n'ont rien à voir avec leur enseignement. Car
l'opinion d'un Maitre, ou même d'un de ses meilleurs élèves, sur quelque
sujet que ce soit, est celle d'un homme dont l'aptitude à juger avec justesse
est tout à fait hors de proportion avec les nôtres.
Sa situation et ses facultés accrues, sont, en réalité, l'héritage de
l'humanité tout entière, et, quelque loin que nous puissions maintenant être
de posséder ces grands pouvoirs, ils n'en seront pas moins certainement les
nôtres un jour. Mais comme ce vieux monde sera différent de ce qu'il est
aujourd'hui quand l'humanité entière possèdera la clairvoyance supérieure !
Songez à ce que deviendra l'histoire, quand tous pourront lire les
évènements ; la science, quand on pourra suivre dans leur développement
complet les processus au sujet desquels les hommes se perdent en théories ;
la médecine, quand le docteur et le malade pourront voir également tout ce
25
Le Monde occulte, par A.-P. Sinnett.
qui se passe dans le corps humain ; la philosophie, quand il n'y aura plus
moyen de discuter sa base même, parce que tous pourront voir la vérité sous
un plus vaste aspect ; le travail, quand tout travail sera joie, parce que chaque
homme n'aura à faire que ce qu'il saura faire le mieux ; l'éducation, quand
l'esprit et le cœur des élèves seront à nu devant le maitre qui tâche à les
former ; la religion, quand il ne sera plus possible de se disputer sur ses
dogmes généraux, puisque nous possèderons la vérité sur les états par
lesquels on passe après la mort, et sur la grande Loi qui gouverne le monde !
Et, par-dessus tout, comme il sera plus facile aux hommes évolués de
s'aider les uns les autres, dans ces conditions nouvelles de bien plus grande
liberté ! Les possibilités qui s'offrent à l'esprit sont comme d'admirables vues
qui se dérouleraient dans toutes les directions en sorte que notre septième
ronde serait véritablement un âge d'or. Heureux sommes-nous que ces
grandes facultés ne seront pas aux mains de l'humanité tout entière avant
qu'elle ait évolué jusqu'à un niveau bien supérieur de moralité ainsi que de
sagesse, sans quoi nous ne ferions que répéter une fois de plus dans de bien
pires conditions, le terrible effondrement de la grande civilisation d'Atlantis,
dont les contemporains ne surent pas comprendre que plus de pouvoir
signifiait aussi plus de responsabilités. Et, cependant, la plupart d'entre nous
étaient au nombre de ces mêmes hommes ; espérons que leur chute nous a
appris la sagesse, et que, lorsque les possibilités de la vie plus vaste nous
seront offertes à nouveau, nous subirons cette fois-là l'épreuve avec plus de
succès.
FIN DU LIVRE