IMC Emc
IMC Emc
IMC Emc
L’infirmité motrice cérébrale (IMC) est un regroupement protéiforme au sein du vaste ensemble de la
paralysie cérébrale, il met en avant la possible indépendance entre le physique et le mental. Cet état de
fait provient de la topographie des lésions cérébrales précoces, distinctes selon la nature de la cause. La
prématurité, la souffrance néonatale à terme, les perturbations cérébrales de la période anténatale sont
des circonstances à haut risque de séquelles motrices chroniques. Les syndromes classiques sont la
maladie de Little (ou diplégie spastique), les syndromes dystoniques et athétosiques, l’hémiplégie
congénitale. En revanche, le tableau clinique, au cours des premiers mois, est monotone car le bébé IMC
est globalement incapable de s’adapter aux changements de position, car trop raide et trop mou à la fois.
Le diagnostic précoce est recommandé et faisable en interrogeant l’organisation motrice globale innée.
Les troubles associés, somatiques et cognitifs, le plus souvent très hétérogènes, doivent être recherchés
progressivement. La prise en charge comprend, vis-à-vis de l’enfant, la rééducation motrice et la
prévention des complications orthopédiques. Vis-à-vis des parents un accompagnement psychologique et
social est nécessaire, ainsi qu’une aide de proximité pour faciliter le nursing de ce bébé si désorientant.
© 2006 Elsevier SAS. Tous droits réservés.
Mots clés : Infirmité motrice cérébrale versus paralysie cérébrale ; Capacités mentales ; Hémiplégie ;
Diplégie de Little ; Athétose ; Motricité innée
Kinésithérapie-Médecine physique-Réadaptation 1
26-480-A-05 ¶ Infirmité motrice cérébrale
“ Point fort
Ce n’est pas une maladie que l’on traite mais un enfant
avec son histoire personnelle et familiale, et qui va garder
des séquelles à long terme.
Avant 1 an, s’agit-il d’un retard corps ne s’adapte pas aux gestes naturels de l’adulte. Et pour-
tant, la communication passe et les messages que l’enfant
psychomoteur ou d’un déficit transmet à sa façon indiquent que son trouble n’est pas d’ordre
posturomoteur ? psychique.
L’enfant IMC se présente avec un déficit des acquisitions Le diagnostic précoce d’une atteinte motrice d’origine
motrices accompagné plus ou moins d’un retard général de cérébrale ne se fait pas sur l’étude des réflexes archaïques, sur la
développement. Il est facile de parler d’un retard psychomoteur lecture rétrospective d’un indice d’Apgar bas, [5] sur des réflexes
avec une appréciation d’ordre quantitatif, mais cette attitude est ostéotendineux vifs. Le recueil de ces données n’apporte que des
à proscrire, puisque les anomalies motrices de l’IMC sont arguments complémentaires au dossier.
qualitatives et durables. L’utilisation des tests de développement La nouvelle approche est de nettement distinguer la part qui
général comme le Brunet-Lézine demande une lecture critique revient à la motricité parmi les aptitudes du bébé ; elle étudie
des résultats. Un quotient de développement peut être abaissé les organisations globales précâblées, décrites par Grenier [6] et
pour diverses raisons, posturomotrices en particulier, quelle Le Métayer [7] depuis 1980 (Fig. 1–4). Elles ont l’intérêt d’être
qu’en soit l’étiologie. affranchies d’une quelconque participation mentale puisqu’elles
En fait, le futur IMC a ses propres caractéristiques, c’est un sont l’expression de la motricité automatique inconsciente qui
nourrisson aux conduites motrices monotones, sans richesse et assure les réactions antigravitaires et gèrera l’équilibre de l’axe
peu variables selon les phases de son état d’éveil. L’axe corporel dans les activités de soutien. Les indices de normalité de la
est mou et les membres raides ou parfois les redressements de motricité en devenir (Grenier) sont tirés de leur présence et de
la tête sont excessifs, avec une sorte d’opisthotonos, pouvant leur qualité.
faire croire, à tort, à une capacité rassurante et précoce. Ce bébé Cependant, cette circuiterie innée est la première victime du drame
désorientant est difficile à prendre dans les bras car son petit cérébral qui entraîne des ruptures, totales ou partielles, dans
2 Kinésithérapie-Médecine physique-Réadaptation
Infirmité motrice cérébrale ¶ 26-480-A-05
Moderniser l’examen !
Le jargon médical est un moyen interactif bien pauvre. Dans
la médecine d’évaluation qui caractérise le domaine rééducatif
et de réhabilitation, Tardieu avait proposé de procéder à un
examen factoriel. Cette proposition est encore d’actualité et
devrait connaître un regain d’intérêt avec les traitements
modernes protocolaires où il faut préciser le paramètre visé.
Figure 3. Réaction d’un jeune nourrisson valide à l’inclinaison latérale Le principe est d’examiner le sujet de la posture la plus
lente. Bonne réponse automatique de l’axe du corps et écartement simple à la plus compliquée afin d’apprécier le retentissement
simultané des cuisses. du ou des troubles élémentaires sur l’état fonctionnel.
Examen du muscle
L’examen du muscle s’effectue d’abord à vitesse lente jugeant
de l’élasticité musculaire dans la fenêtre articulaire, puis à
vitesse rapide jugeant de la qualité du réflexe d’étirement
(myotatique). La spasticité se définit précisément par une
Figure 4. Réaction du nourrisson pathologique. Insuffisance de réponse exagération de ce réflexe : la traction (composante cinétique)
de l’axe du corps contrastant avec l’excès de contraction des muscles des bloque l’étirement après une latence de 400 ms, induisant une
membres inférieurs et la posture anormale de ceux-ci. résistance statique dont la vitesse de décroissance est variable.
En électromyogramme (EMG) de surface, le phénomène est
.
évident et se distingue des myogrammes de l’activité musculaire
spontanée. En clinique, ce type de mécanisme pathologique est
l’organisation globale déjà agencée avant toute expérience
souvent incriminé pour expliquer l’équin [10] du pied à la
sensorimotrice.
marche. Certaines pathologies s’accompagnent au contraire
.
Au début, le dénominateur commun de l’IMC/IMOC est donc
d’insuffisance de réponse à la traction rapide, c’est le cas de la
bien la perte relative ou massive des réglages de base sur
symptomatologie cérébelleuse où le manque de freinage du
lesquels devraient s’appuyer les perfectionnements de la
geste est une donnée classique.
motricité.
Ce moyen original d’arriver au diagnostic a l’avantage d’éviter Testing
le délai qu’implique la référence aux âges-clés du développe-
ment, ce qui faisait attendre le diagnostic parfois jusqu’à C’est un examen intéressant dans les affections périphériques,
9 mois. il perd de sa valeur dans la PC où il s’agit de paralysie de
Les médecins doivent apprendre à déclencher la réactivité du fonction. En effet, un testing rassurant en décubitus ne permet
nourrisson par des manœuvres qui testent son comportement pas d’anticiper sur le fonctionnement global d’un segment
sous l’effet de la pesanteur. C’est l’approche la plus pertinente corporel.
de l’examen pour aller au diagnostic précoce et avoir une
certaine connaissance sur ce que l’on peut envisager en réédu- Examen vertical
cation. On sait depuis que l’on consacre une large attention à Certains sujets n’ont guère de troubles à l’examen « horizon-
ces réactions que, si elles sont très altérées, les patients ne tal », mais mis en position assise ou debout, l’organisation
peuvent reconstruire, par la commande volontaire, les montages motrice est défaillante, et toute stimulation rapide, bien
largement automatisés et fournis normalement sans qu’adaptée à l’âge et à l’évolution du sujet, autour du point
apprentissage. d’équilibre, accentue la défaillance.
Geste finalisé
Signes neurologiques à la fin Les contractions excessives des muscles lors d’un geste finalisé
de la première année peuvent s’expliquer par les troubles neuromoteurs déjà signalés
ou révéler un manque de sélectivité de la commande nerveuse
La paralysie cérébrale (PC) offre plus une impression de centrale ou ils peuvent s’imposer comme une compensation
raideurs que de paralysie. bénéfique contre une grande faiblesse posturale. Les anomalies
La liste des raideurs musculaires [8] comprend la spasticité, la de coordination ne sont pas toujours liées à un défaut d’expé-
rigidité, la dystonie, la dyskinésie et les mouvements involon- rience mais annoncent une dyspraxie durable. [11]
taires. L’examen doit apprécier la part d’hypotonie axiale dans La règle est de faire l’analyse de ce qui paraît être trop raide
les postures de station-locomotion. et d’éviter de tout ramener à la spasticité avec son cortège de
Kinésithérapie-Médecine physique-Réadaptation 3
26-480-A-05 ¶ Infirmité motrice cérébrale
4 Kinésithérapie-Médecine physique-Réadaptation
Infirmité motrice cérébrale ¶ 26-480-A-05
Formes mixtes
Elles dénoncent la variété des tableaux cliniques qui ne
peuvent recevoir d’étiquettes précises. Il est clair qu’il est
préférable d’en analyser les multiples facettes plutôt que d’en
rester à des appellations vagues, comme tétraplégies pyramidales
ou spastiques ou dystoniques, etc.
Formes graves
Figure 6. Imagerie par résonance magnétique (IRM) montrant une
fente schizencéphalique chez un enfant porteur d’hémiplégie cérébrale Les formes graves touchant l’axe corporel et les membres
infantile. supérieurs requièrent une tierce personne à vie.
Diagnostic différentiel
Les maladies périphériques ne posent pas de vrais problèmes ;
les atteintes du plexus brachial font parfois évoquer une
hémiparésie mais un examen correct rectifie la première
orientation.
Les atteintes médullaires hautes par malformations de la
charnière peuvent faire hésiter mais l’anamnèse a des spécifici-
tés et les radiographies du rachis cervical sont évocatrices.
Plus difficile est le diagnostic de maladies qui ont des signes
neuromoteurs en commun avec la pathologie congénitale de
l’IMC/IMOC et qui n’auront que secondairement des signes
caractéristiques. Parmi les maladies génétiques, on distingue la
maladie de Lesch-Nyhan dont les signes n’apparaissent pas
avant la fin de la première année. L’acidurie glutarique provo-
que une athétose après les épisodes convulsifs qui ouvrent
l’enquête du diagnostic, l’ataxie-téléangiectasie donne un
syndrome cérébelleux. La liste n’est pas close, il existe des
maladies neurodégénératives pas toujours étiquetées, à évolu-
tion lente, qui, au début, peuvent en imposer pour une paraly-
sie cérébrale.
Les malformations du cerveau ou du cervelet peuvent déter-
miner une souffrance néonatale car le nouveau-né n’est pas apte
à suivre la progression de l’accouchement, seuls les examens
radiologiques feront la certitude de la cause.
Il existe des cas douteux où la diplégie qui ressemble à la
maladie de Little est en fait une paraplégie génétique liée à l’X
chez un enfant né en avance et qui fait évoquer les séquelles
d’une « vraie » prématurité.
Les pièges existent, il est important de bien mener l’entretien
Figure 7. Imagerie par résonance magnétique (IRM) montrant une avec les familles et de recourir si nécessaire à des examens
nécrose bilatérale des noyaux gris centraux chez un enfant ayant souffert complémentaires pour être sûr du diagnostic et mener des
d’une anoxie néonatale à terme et porteur d’une athétose. actions de prévention si besoin.
assez rapide de la marche, l’évolution psychique et/ou mentale ■ Recherche des potentiels
des hémiplégiques n’est pas simple, [13] ainsi que leur intégra-
tion dans le tissu social.
de l’enfant infirme
C’est l’autre versant de l’évaluation, après le diagnostic des
Athétose déficits. Les lésions cérébrales ne touchent pas de la même
L’athétose est liée à une atteinte de la substance grise centrale manière tous les domaines des fonctions supérieures. C’est leur
(Fig. 7) qui se manifeste par des mouvements involontaires des extension cérébrale qui détermine les troubles associés et non
extrémités accompagnés de mouvements de torsion de la tête et pas l’intensité du déficit moteur. L’athétose postictère nucléaire,
du cou. Leur répartition est variable, diffuse le plus souvent, leur avant qu’on en connaisse le traitement préventif et curatif, en
intensité augmente avec les facteurs de stress et la complexité était l’exemple type.
Kinésithérapie-Médecine physique-Réadaptation 5
26-480-A-05 ¶ Infirmité motrice cérébrale
6 Kinésithérapie-Médecine physique-Réadaptation
Infirmité motrice cérébrale ¶ 26-480-A-05
Kinésithérapie-Médecine physique-Réadaptation 7
26-480-A-05 ¶ Infirmité motrice cérébrale
8 Kinésithérapie-Médecine physique-Réadaptation
Infirmité motrice cérébrale ¶ 26-480-A-05
Kinésithérapie-Médecine physique-Réadaptation 9
26-480-A-05 ¶ Infirmité motrice cérébrale
Figure 16. Le moulage est utilisé comme siège. Il permet une correc-
tion de la posture, assure l’équilibre et le centrage des hanches.
Figure 19. Enfant infirme moteur cérébral (IMC) assise sur le sol.
10 Kinésithérapie-Médecine physique-Réadaptation
Infirmité motrice cérébrale ¶ 26-480-A-05
Figure 23. Les hanches et les genoux sont protégés dans la station
assise et durant les déplacements en quadrupédie.
“ Conduite à tenir
La prévention des troubles orthopédiques des hanches et
des genoux consiste à :
• interdire la position à genoux et assise entre les talons ;
• favoriser la position assise en tailleur ;
• favoriser la position assise sur un rouleau ou sur une
selle, les hanches fléchies à 60° avec l’usage de siège
moulé, à maintenir les deux cuisses écartées d’au moins
25° et plus selon les nécessités.
Kinésithérapie-Médecine physique-Réadaptation 11
26-480-A-05 ¶ Infirmité motrice cérébrale
12 Kinésithérapie-Médecine physique-Réadaptation
Infirmité motrice cérébrale ¶ 26-480-A-05
Figure 26. Mauvaise position de la tête et introduction d’une trop Figure 28. Technique manuelle incorrecte.
grande cuillère.
Kinésithérapie-Médecine physique-Réadaptation 13
26-480-A-05 ¶ Infirmité motrice cérébrale
14 Kinésithérapie-Médecine physique-Réadaptation
Infirmité motrice cérébrale ¶ 26-480-A-05
Tableau 1. Tableau 4.
Causes de phénomène douloureux chez l’infirme moteur cérébral. Causes de fausses routes chez l’infirme moteur cérébral.
Contractions prolongées – Positionnement de la nuque en hyperextension
Neuropathie par compression nerveuse liée à l’immobilisation – Absence de fermeture labiale (cocontractions buccofaciales, tonus trop
Reflux gastro-œsophagien faible du sphincter labial, trouble de l’articulation temporomandibu-
laire, rétraction de la lèvre supérieure)
Constipation
– Cocontractions avec protraction linguale
Gingivite, stomatite, otite, sinusite d’allure chronique
– Fatigue ou trouble de la vigilance (en particulier si médication asso-
Dysfonctionnement temporomandibulaire
ciée)
Luxation de hanche, déformation osseuse
– Absence de phase de préparation quand l’enfant est nourri par un tiers
Blessure liée à l’appareillage mal adapté
avec introduction à l’improviste de la cuillère
Escarre
– Prise alimentaire à un rythme trop rapide
Infection urinaire
– Alimentation insipide ou trop lisse, ne permettant pas une imprégna-
Colique néphrétique tion sensorielle donc un contrôle moteur suffisants
Rétention urinaire aiguë – RGO ou infection pulmonaire associée
RGO : reflux gastro-œsophagien.
Tableau 2.
Tableau 5.
Complications d’un trouble de l’alimentation.
Contre-indications à l’alimentation per os.
Malaise
Trouble sensitif pharyngé
Retard staturopondéral
Absence de réflexe de toux
Bronchites à répétition
Insuffisance de réflexe de toux
Fibrose pulmonaire interstitielle
Trouble de la vigilance
Oblitération bronchique
Déglutitions rares (moins de 3 par minute)
Atélectasie persistante
Pneumonie récurrente
Toux chronique
(Tableau 4) (toux, nasonnement, tachycardie brutale, dyspnée
brutale), des difficultés à déglutir (augmentation du temps
Infections ORL à répétition
buccal, plusieurs tentatives de déglutition avant d’avaler,
Problème auditif augmentation de la durée des repas, résidus alimentaires dans
Troubles de l’articulé dentaire les culs-de-sac), mouvements de facilitation visant à déclencher
Trouble du sommeil le réflexe pharyngien (projection antérieure du cou, mouvement
Troubles de la relation de flexion/extension du cou avec risques majeurs de provoquer
Comportement particulier vis-à-vis de la nourriture ces fausses routes).
Posture particulière La plupart des fausses routes de l’IMC peuvent être imputées
à un mauvais positionnement du cou qui est en hyperextension
ORL : oto-rhino-laryngologique. (mauvaise installation, cocontractions d’origine neurologique,
insuffisance du maintien postural). Le maintien correct de la
posture assise et la présentation adéquate des aliments permet-
Tableau 3.
tent alors d’éviter les fausses routes : il s’agit de garder la nuque
Symptomatologies du temps buccal et du temps pharyngé.
en légère flexion antérieure pour que le larynx remonte dans le
Symptomatologie du temps buccal pharynx, protégeant ainsi les voies aériennes inférieures.
Difficultés à mastiquer, à mordre ; succion faible L’organisation d’une déglutition efficiente et régulière peut
Refus d’alimentation ; exclusion de certains aliments être entravée par des troubles des gnosies (reconnaissance des
textures, par exemple) ou des troubles des praxies (mauvaise
Reflux nasal ; vomissements
automatisation de l’enchaînement moteur). Typiquement, l’IMC
Incontinence salivaire ; encombrement rhinopharyngé
souffre d’une atteinte limitée à la sphère buccale (mouvements
Guidage du mouvement (présentation particulière des aliments, utilisa- de protraction de langue, réflexe de fermeture de la bouche
tion du doigt pour pousser les aliments) exacerbé, fuites de salive par hypomobilité labiale etc.). Des
Symptomatologie du temps pharyngé manœuvres de guidage manuel vont aider à provoquer une
Mutisme brutal ; perturbation du faciès organisation motrice plus probante pour l’alimentation. On
Augmentation du temps buccal ; enchaînement de plusieurs tentatives peut être amené à contre-indiquer l’alimentation per os s’il y a
de déglutition un risque vital (Tableau 5).
Augmentation de la durée des repas Bavage. Le bavage abondant est inesthétique ; il limite la
Présence de résidus alimentaires dans les récessus constitution du bol alimentaire et sa bonne assimilation. Il peut
être secondaire à un trouble gnosique buccofacial, à une
Réflexe de toux exacerbé ; bronchites à répétition ; malaises ; troubles
du sommeil
occlusion labiale incomplète ou à une augmentation du délai
entre phase de succion et phase de déglutition, enfin à une
Mouvements de facilitation :
déglutition trop peu fréquente. [22] La rééducation, lorsqu’elle
projection antérieure du cou est possible, demande des capacités de rétrocontrôle importan-
hyperextension de nuque ; fermeture des lèvres ; appui sur les joues tes. Aucun médicament n’est réellement efficace, car l’origine
du problème n’est pas une hypersécrétion de salive, mais une
mauvaise mécanique de son écoulement. Des interventions
Conséquences de l’atteinte motrice sur les appareils autres chirurgicales sont proposées, en cas d’échec de la rééducation et
que l’appareil locomoteur sous réserve d’une absence de trouble de la déglutition, mais
Troubles de la déglutition. Chez l’IMC, ceux-ci peuvent dans un nombre de situations très limité. L’intervention
passer inaperçus. Leur mode de révélation (Tableau 2) peut être consiste en une ligature du canal d’une parotide avec implan-
accidentel (malaise, troubles respiratoires), ou liés au retentisse- tation postérieure des canaux des sous-maxillaires ou en la
ment sur l’organisme (retard pondéral). La symptomatologie section de la corde du tympan. Si les résultats sur la sécrétion
(Tableau 3) peut être centrée sur des troubles de la prise salivaire sont probants, ils restent souvent transitoires et créent
alimentaire (refus d’alimentation, exclusion des solides, un désagrément notable au cours de l’alimentation du fait de
mutisme brutal, perturbation du faciès) ou des fausses routes l’épaississement de la salive.
Kinésithérapie-Médecine physique-Réadaptation 15
26-480-A-05 ¶ Infirmité motrice cérébrale
Troubles sphinctériens. L’atteinte neurologique ne touche Défense tactile. Cette difficulté à intégrer des informations
pas l’appareil vésicosphinctérien, le système nerveux autonome tactiles peut nuire à la construction psychoaffective du bébé et
étant intègre. L’apprentissage de la propreté peut donc débuter provoque des réactions motrices parfois inadaptées. Elle est
dans des délais normaux. Cependant, du fait des difficultés évoquée devant un enfant qui ne supporte pas l’habillage ou
motrices (station assise, tenue du tronc), il faut que l’enfant soit qui ne supporte pas le contact nécessaire lors de la rééducation
bien installé. Il faut surtout prendre en compte la dépendance motrice, qui reste dans son coin alors que les sollicitations
affective entraînée par le handicap, parler à l’enfant de sa motrices tendant à prouver qu’il est parfaitement capable
sexualité et entretenir l’écoute et le respect du corps. Chez d’organiser une motricité efficiente. Cela peut entraver pendant
l’enfant plus grand, des fuites urinaires peuvent être secondaires de longs mois l’accès à la rééducation motrice active et nécessite
aux difficultés de déplacement et de déshabillage. Lorsque un travail patient en psychomotricité. [24]
celles-ci sont trop importantes et qu’il faut envisager une aide Devant ces troubles « associés » ou isolés, en eux-mêmes
humaine, il est capital de réfléchir à la dépendance que cela générateurs de perturbations dans les apprentissages moteurs, le
symbolise pour chercher à préserver l’intimité du jeune. rééducateur cherche à évaluer les capacités de compensation
Certains dysfonctionnements peuvent avoir une origine neuro- pour les développer par des prises en charge en ergothérapie et
logique : contractions du périnée et du sphincter strié ou en psychomotricité. L’enjeu majeur de cette rééducation réside
difficultés de détente. [23] Un traitement médicamenteux peut dans la possibilité de restaurer des compétences d’analyse
alors être proposé. sensorielle pour permettre à l’enfant d’approcher le monde
d’une façon cohérente.
Extension de la lésion au-delà des zones dévolues à
Troubles spécifiques inhérents aux apprentissages scolai-
la motricité res. Lors du suivi d’un enfant IMC, on sait que le risque de
Troubles spécifiques intervenant dans la motricité. Dans handicap cognitif associé existe. À l’heure actuelle, seul un suivi
l’infirmité motrice cérébrale, l’atteinte plus ou moins étendue régulier permet de le suspecter, sur des arguments cliniques :
des structures du système nerveux central impliquées dans la retard de mise en place des acquisitions attendues pour l’âge qui
programmation motrice va nuire au développement d’une s’accentue avec le temps (évoquant un retard global), difficultés
motricité harmonieuse, ajustée et rapide. Un trouble des dans un domaine bien ciblé de la cognition repérable après l’âge
fonctions d’intégration sensorielle, souvent caché par l’atteinte de 3 ans (évoquant une dyspraxie, un trouble spécifique des
des fonctions motrices, peut modifier ou empêcher le contrôle conduites linguistiques), difficultés ressenties par l’enfant malgré
moteur, que celui-ci soit d’origine visuelle ou vestibulaire, tactile un examen cognitif normal en situation duelle (évoquant un
ou kinesthésique. L’enfant se retrouve alors dépendant non trouble des fonctions exécutives). Les essais d’analogie entre la
seulement des contraintes de son corps difficile à commander lésion visible sur les imageries traditionnelles (scanner ou
mais aussi de l’environnement qu’il va avoir du mal à appré- imagerie par résonance magnétique nucléaire) et le trouble
hender. Ces troubles sont fréquents chez l’ancien prématuré. attendu ne sont concluants ni pour juger du type d’atteinte, ni
Chez certains sujets, porteurs d’athétose en particulier, ils pour estimer la gravité du retentissement scolaire ou quotidien.
peuvent être totalement absents : on est alors surpris de Des progrès sont à attendre dans ce domaine lorsqu’on utilisera
constater la dextérité et l’engagement corporel de ces enfants, l’IRM fonctionnelle ou l’IRM avec analyse morphométrique. [25]
parfaitement habiles à construire des séquences motrices En pratique, une consultation auprès de ces enfants doit
complexes et contrôlées allant jusqu’à prendre en compte leurs comporter systématiquement, pour chaque année de scolarité
mouvements parasites. entamée, une évaluation du niveau de lecture, de calcul,
Trouble visuoperceptif. Il s’agit d’une difficulté pour le patient d’écriture et de raisonnement. Cela nécessite des liens obligatoi-
à reconnaître ou à interpréter ce qu’il voit. L’appréhension du res avec l’école et peut conduire à une demande d’évaluation
monde par le canal visuel sera alors erronée ; le développement psychométrique en cas de difficulté scolaire.
du bébé et de l’enfant peut être perturbé dans le domaine La caractérisation des troubles neuropsychologiques gênant
sensorimoteur et cognitif. Chez le bébé, une attitude particulière les apprentissages de l’enfant repose sur un bilan pluridiscipli-
avec perte de contact intermittent, regard errant peut suggérer naire. Un test d’intelligence permet d’avoir une idée sur un
un trouble de ce type ; le bébé, perdu dans un univers vide de fonctionnement cognitif global : certains enfants procèdent par
sens pour lui, ne pourra pas organiser sa motricité vers un but analogie, d’autres par déduction ; certains fonctionnent à partir
et aura tendance à rester au sol, peu mobile ou apeuré par de matériel visuel, d’autres à partir de matériel verbal. Des
chaque mouvement déclenché. Si l’atteinte visuoperceptive n’est examens complémentaires complètent cette approche : bilan
pas reconnue comme telle et n’est pas prise en compte, elle orthophonique pour les troubles des conduites linguistiques,
peut conduire à un trouble de connaissance de l’environnement bilan ergothérapeutique pour des troubles du graphisme et de la
et des réactions phobiques, voire à un trouble de la relation à construction, bilan orthoptique pour des troubles dans la prise
l’autre, d’allure psychotique. [11] d’informations visuelles, bilan neuropsychologique pour des
Trouble de l’attention visuelle. Il s’agit d’une difficulté à agencer troubles du raisonnement ou de l’attention, par exemple.
l’espace de façon cohérente. Chez le tout-petit, il se traduit par On distingue les troubles des fonctions verbales et les troubles
un trouble posturomoteur ; l’attitude en cyphose passive se de fonctions non verbales.
corrige si l’on attire l’attention visuelle de l’enfant ou que l’on Les troubles des fonctions verbales touchent la parole, c’est-
délimite le champ de vision périphérique – on guide alors à-dire la capacité à articuler, la phonologie, c’est-à-dire la
l’analyse visuelle et la construction de l’espace – ou si l’on capacité à isoler des sons, le lexique, c’est-à-dire l’étendue du
renforce les afférences proprioceptives – on renforce alors des vocabulaire, la syntaxe, c’est-à-dire la capacité à assembler les
informations provenant d’un canal autre que la vision afin qu’il différents constituants significatifs du langage.
devienne porteur de sens. Les troubles des fonctions non verbales concernent les
Apraxie gestuelle. Il s’agit d’une difficulté à réaliser une activités gestuelles (préhension, regard, graphisme) et les
séquence d’actions incorporées à une fonction. On observe activités logicomathématiques (signification du nombre,
l’enfant lorsqu’il verse de l’eau dans un verre, lorsqu’il s’habille, activités de raisonnement).
lorsqu’il écrit, lorsqu’il fait une construction. Ce trouble peut se Ces atteintes ne sont pas l’apanage des handicaps moteurs
révéler par une maladresse gestuelle plus importante que ne le graves et visibles mais touchent aussi des sujets « à risque » dont
voudrait la paralysie motrice, un refus ou des difficultés à le handicap moteur est à peine détectable. Elles doivent être
réaliser des exercices moteurs finalisés, une stagnation des évaluées au travers du handicap moteur – élément qui, en lui-
apprentissages moteurs (en particulier, ceux qui mettent en jeu même, peut entraver l’expression d’une fonction – et en tenant
la coordination bimanuelle ou la coordination oculomanuelle). compte de l’état psychique du patient.
Elle peut apparaître sur ordre verbal ou sur imitation, lors de Ces troubles associés motivent une prise en charge multidis-
gestes habituels ou non habituels et concerne l’espace corporel ciplinaire, souvent de longue durée. Une bonne coordination
ou extracorporel. entre les professionnels et surtout avec l’école est indispensable.
16 Kinésithérapie-Médecine physique-Réadaptation
Infirmité motrice cérébrale ¶ 26-480-A-05
Cette coordination peut être facilitée lorsque l’enfant est pris en [13] de Barbot F. L’hémiplégie: handicap léger? Motr Cérébr 1993;14:37-
charge par des équipes de service de soins et d’éducation 43.
spécialisée à domicile (SESSAD), de service d’éducation et des [14] Campos da Paz AC, Burnett SM, Braga LW. Walking prognosis in
soins spécialisés à domicile (SESSD), de centre d’action médico- cerebral palsy: a 22-year retrospective analysis. Dev Med Child Neurol
sociale précoce (CAMPS). Ces équipes peuvent défendre les 1994;36:130-4.
aménagements scolaires nécessaires et préparer l’avenir scolaire [15] Le Métayer M. Rééducation cérébromotrice du jeune enfant. Paris:
de l’enfant. Masson; 1999.
.
[16] Le Métayer M. Bilan neuromoteur (cérébromoteur) du jeune enfant.
Encycl Méd Chir (Elseier SAS, Paris), Kinésithérapie, 26-028-B-20,
■ Références 1989: 26p.
[17] Le Métayer M. Le Trotte-lapin amélioré. Motr Cérébr 2004;25:102-8.
[1] Cans C. Why do we need a network of CP, on behalf of the SECP group [18] Le Métayer M. Analyse des troubles moteurs bucco-faciaux. Évalua-
DMCN 2000. Abstracts 2000;42(suppl 84):3. tion et propositions rééducatives. Motr Cérébr 2003;24:7-13.
[2] Evrard P. Pathophysiology of the perinatal brain damage. Dev Neurosci [19] Rofidal T, Essner C. Traitement préventif par la famotidine des com-
2001;23:171-4. plications respiratoires du reflux gastro-œsophagien chez les sujets
[3] Espace éthique, missions handicaps: L’annonce du handicap AP-HP. polyhandicapés. Motr Cérébr 1995;16:69-75.
Paris: DION; 1999. [20] Samson-Fang L, Stevenson RD. Linear growth velocity in children
[4] Amiel-Tison C. Neurologie périnatale. Paris: Masson; 1999. with cerebral palsy. Dev Med Child Neurol 1998;40:689-92.
[5] Nelson KB, Ellenberg J. Children who outgrow CP. Pediatrics 1982; [21] Combe JC, Porsmoguer E, Collignon P. Échelle d’hétéro-évaluation de
69:529-36. la douleur chez le sujet polyhandicapé. Motr Cérébr 2000;21:12-21.
[6] Grenier A. La motricité libérée du nouveau-né. Paris: édition Médecine [22] Lespargot A. Neuf questions à poser aux parents d’un IMC qui bave.
et Enfance; 2000. Motr Cérébr 1994;15:113-8.
[7] Le Métayer M. Rééducation cérébro-motrice du jeune enfant. Paris: [23] Blond R,Arhan P, Weber J, Robain G, Perrigot M. Troubles ano-rectaux
Masson; 1993. chez l’infirme moteur cérébral. Approche clinique et instrumentale.
[8] Graciès JM. Évaluation de la spasticité. Apport de l’échelle de Tardieu. Ann Readapt Med Phys 1990;33:223-34.
Motr Cérébr 2001;22(n°1). [24] Bullinger A. Habiter son organisme ou la recherche de l’équilibre
[9] Landrieu P, Tardieu M. Neurologie pédiatrique. Paris: Masson; 1996. sensoritonique. Thér Psychomotr 1999;117:62-9.
[10] Lespargot A, Quentin V, Pillard D, Taussig G. Le pied de l’infirme [25] Leroy-Malherbe V. Dyspraxies et séquelles de lésions pariéto-
moteur d’origine cérébrale (IMOC). Encycl Méd Chir (Elsevier SAS, occipitales chez l’enfant né prématurément. In: Gérard CL, Brun V,
Paris), Podologie, 27-120-A-25, 2000. editors. Les dyspraxies de l’enfant. Paris: Masson; 2005.
[11] Mazeau M. Les dyspraxies visuospatiales. Paris: Masson; 1996.
[12] Lespargot A, Renaudin E, Robert M, Khouri N. Les muscles et les Pour en savoir plus
tendons de l’IMOC: examen clinique et données expérimentales. Mot
Cérébr 1999;20:69-90. Revue Motricité Cérébrale, Masson, Paris.
Toute référence à cet article doit porter la mention : Truscelli D., Le Metayer M., Leroy-Malherbe V. Infirmité motrice cérébrale. EMC (Elsevier SAS, Paris), Traité
de Médecine Akos, 8-0781, Kinésithérapie-Médecine physique-Réadaptation, 26-480-A-05, 2006.
Kinésithérapie-Médecine physique-Réadaptation 17