La Jurisprudence, Une Chance Du Droit Administratif?
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La jurisprudence,
une chance du droit administratif?
par BernardPacteau,
à l'Université
Professeur IV.
Montesquieu-Bordeaux
23. Nous empruntons cette formuleau grand juristeet magistrat par le recours en cassation et l'obligationpour les tribunaux,à cer-
Dupin aîné ( 1787- 1855), plus précisémentà son étude intituléeDe la taines conditions,de se conformeraux arrêts de la cour suprême . y
jurisprudence et des arrêts à l'usage de ceux qui la font et de ceux qui ajoutant « deux grands motifs de bon sens ... : le principe du moindre
la citent Dans le manuscritde sa Ire édition,en 18 12, il avait décrit effortjoint à l'esprit d'imitation,et de l'autre le besoin humain de contrô-
les juristescompilateurs comme arrestographes, ce qui n'étaitcertes ler, par l'avis d'autrui, les conclusions de son propre sentiment » (cf.
pas un compliment ; le typographe avait transforméle terme en ... notamm.T I , p. 18 et s.).
arrestophage,et Dupin de noter,non moins ironiquement dans les 25. Source délicieuse... (Remarques en cascades sur les sources du
éditions suivantes : « j'avoue que j'ai été tenté de ne pas considérer de dr.civ.,1993. p.73-85. Comme l'écritaussi le Doyen
droit),Rev.trim,
cette méprise comme une faute ; car la plupart de ces compilateurs sont Vedel (dans son étude citée note 4) : : « là où le professeurde droit
en effetmoins des descripteurs que des croqueurs d'arrêt » civil commence par citer un ou plusieurs articles du code, le professeur
24. Un échange de points de vue a été consacré récemmentà ce de droit administratifcite des arrêts ... »
thème au sein de la Revue trimestrielle de droitcivil: « La jurispru- 26. « Le droitadministratif peut-ilêtre indéfiniment junsprudentiel ?»
dence, aujourd'hui,libres propos sur une institutioncontroversée », E.D.C.E.,1979-80, n° 31, p. 3 1-46.
Rev. trim,de dr civ., 1992, p.337-361, et 1993, p. 87-95. Dans son
27. Droitadministratif,5e éd., 1840, t. I . « Introduction». p. XXVII.
ouvrage de 1932, Technique de la jurisprudence en droit privé,
E.-H. Perreau voyait trois grandes causes de l'essor de la jurispru- 28. Traitéélémentaire,lœ éd., 1953, p. 29
dence en droit privé : la motivationdes décisions, l'extension prise
70 spécial6 - 1999
Numéro
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Lajurisprudence,
29. B. jeanneau. Les principesgénéraux du droitdans la jurisprudence 34. Cette phrase souvent citée futprononcée en 1790 lors des
administrative.Editionsdu recueil Sirey,1954, préfaceJ.Rivero. débats sur la création du tribunalde cassation,et elle futappuyée du
JU.Kj. Uupeyroux,« La jurisprudence,source abusive du droit », motifque : « Dans un État qui a une constitution, une législation,
la juris-
Mélanges Maury,I960. t. 2. pp. 349-377. Il a aussi parlé d'une source prudence des tribunauxn'est autre chose que la loi » (séance du 18
re
nov. 1790, Arch,pari., I série, t. XX, p. 5 16, cf.Ph. Raynaud,La loi et
« honteuse parce qu'officiellement inavouable et inavouée », « La doc-
trine françaiseet le problème de la jurisprudence,source de droit », la jurisprudencedes Lumièresà la Révolutionfrançaise, Arch,de philo-
Mélanges Marty,1978, pp. 463-475. sophie du droit,tome 30, La jurisprudence,Sirey,1985, pp. 6 1-72).
3 1.Art précité,note 3. 35. Discours préliminairedu Projet de code civil,pages xv,xvi et
xvii,citées notamment par Locré, Espritdu code Napoléon tiréde la
32. De l'espritdes lois, livre 6, chapitre 3 ; Montesquieu pensait discussion, 1805, tome I . p. 2 14-2 15:«// faut disait plus longuement
certes avant tout aux poursuites pénales. Beccaria défendra lui- Portalis,que le législateurveillesur la jurisprudence; il peut être éclairé
même dans son traité Des délits et des peines de 1764 (§ 4) qu'en
par elle,et il peut de son côté,la corriger; mais il fautqu'ily en ait une.
pareil domaine « rienn'est plus dangereuxque l'axiomecommunqu'il Dans cette immensitéd'objets diversqui composentles matièresciviles,
faut consulterl'espritde la loi.Adoptercet axiome,c'est rompretoutes et dont le jugementdans le plus grandnombredes cas est moinsl'appli-
les digues,et abandonnerles lois au torrent des opinions». cation d'un texte précis,que la combinaisonde plusieurstextes qui
33. De l'espritdes lois,livre I I, chapitreVI où Montesquieu reven- conduisentà la décisionbien plus qu'ils le renferment on ne peut pas
dique aussi que « si les tribunauxne doiventpas être fixes,les juge- plus se passer de jurisprudenceque de lois.» Et de conclure que :
ments doiventl'êtreà tel pointqu'ils ne soientjamais qu'un texte précis « c'est à l'expériencede comblersuccessivementles vides que le Code
de la loi.S'ils étaient une opinionparticulièredu juge, on vivraitdans la civillaisse. Les codes des peuples se fontavec le temps ; mais à propre-
société sans savoirles engagementsque l'on y contracte». Gérard Tim- ment parler on ne les faitpas » (les passages soulignés sont en ita-
srten a faitle point de départ et le coeur de sa réflexionsur la fonc- liques dans le texte d'origine).
tion du juge (Les figuresdu jugement,puf,Les voies du droit. 1993).
Numérospécial 6 - 1999 71
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Bernard Pacteaii
36. C'est le chemin judiciaire analysé par G.Timsit dans son pas été donnée au juge, on n'auraità signaleraucune variationdans la
ouvrage Les figuresdu jugement,(préc. note I I) de la « transcription » jurisprudence; chaque jugement deviendraitune loi ; le juge aurait ce
à la « transaction» et à la « transgression» (« //n'est dans ces condi- pouvoirréglementairequi ne lui appartientpas en vertude ce principe
tionsd'autreschoixpourle juge que déjuger surle fil » (p. 199). de droitpublicd'après lequel il doit y avoir séparationabsolue entre le
37. L'article12 du titreII de la grande loi des 16-24 août 1790 sur pouvoirchargéde fairela loi et le pouvoirchargé de l'appliquer, principe
par l'article135 1
rappelé dans l'article5 du code civil.Ce qui est interdit
l'organisationjudiciaire- celle de la séparation des autorités admi- du code civil,c'est la d'admettre un nouveau débat sur un litige
nistrativeset judiciaires- édictait déjà que les juges « ne pourront faculté
pointfairede règlements», en même temps que son article 10 leur déjà tranché....»
faitprohibitionde « prendredirectementou indirectement aucune part 39. R ex. Cass.Cnm. 18 juill.! 99 1, Bull,ehm.,n° 30 1, p.758, avec les
à l'exercicedu pouvoirlégislatif». renvois.
38. CE. 7 dec. 1883, Comp. des cheminsde ferde Paris à Orléans, 40. R ex. CE. 6 avril 1850, Messine. Ree, p.840. Cf.à ce sujet : H. Le
Ree, p. 904, avec les conclusions du commissairedu gouvernement Berre, Les revirementsde jurisprudenceen droitadministratif, l.g.d.j.
Margueriesoutenant que : « //n'est pas interdit à un tribunalde faireà 1999, notamm.p.78 et s.
une même questiondes réponsescontradictoires ; si cette facultén'avait
72 spécial6 - 1999
Numéro
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Lajurisprudence,
4 1. ce., 14 janvier 1998. Communede Blanc-Mesml,req. 165.26 1. même à la coutume.Mais elle est une autorité,et une autoritéconsidé-
42. Aux Études en l'honneurde Georges Scelle, 1930, t. 2, p. 613- car la thèse qu'elle appuie a, par
rable ...; e//eest une autoritéprivilégiée,
632. définition, dans le Hugepour la solutionduquel on chercheà se faireune
opinion,plus de chances d'être accueillie par le tribunalsaisi,donc plus
43. Droitcivil,puf,Introduction,
où il expose comment « la jurispru- de chances de devenirdu droiteffectif» (éd. 1988, p. 232 et s.)
dence n'estpos une véritablesource du droitcivil,
comparableà la loi ou 44. CE., sect.,8 nov. 1968, Entr.Poroli,Ree, p. 56 1.
Numérospécial 6 - 1999 73
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74 Numérospécial6 - 1999
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Lajurisprudence,
47. Le droitadministratif
peut-il...?..art.précité note 4. 49. « Su/toutpas de doctrine,vous auriez l'espritfaussé », prête-t-on
48. Aussi Haunou a-t-ilvu dans la juridictionadministrativeelle- au Président Romieu dans son propos d'accueil aux nouveaux audi-
même une chance pour ... la jurisprudencecar « La Franceestjuste- teurs du Conseil d'État (L Sfez,Essai sur la contribution
du doyenHau-
ment un pays où les tribunauxordinairesn'ontpas de juridiction nou au droitadministratiffrançais,
p.484).
préto-
rienne» (Précisde droitadministratif
, 2e éd., 1893, p.684)
Numérospécial 6 - 1999 75
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BernardPacteau
jurisprudence, maisaussi d'une« chambrede ré- lui-même un foyer de réflexion doctrinale, etque la
» la
flexion 50, doctrine, dont les réactions, approba- doctrine a été influencée la
par jurisprudence, sans
tionsou réprobations (qui n'ontpas manquéau oublierque la doctrine est rarement unanime ...
coursde l'histoire) seraientpourle juge autantde Ce qui apparaîten toutcas historiquement incon-
signaux. testableet incontestablement positif,c'estl'attrait de
Danssa dièserécente consacrée à la responsabilité l'élaboration jurisprudentielle pourla recherche etle
publique,Madame Deguerguea aussi parlé de débat.
F« imprimatur - que la doctrine assureà Farrêt de
«pourexister Certainement aussi,l'approche doctrinale en a été
principe en tantque tel»51.
stimulée. Etc'estsansdoutel'unedes raisons de Fat-
Au fond,l'indépendance dontdisposele juge Fa tirance le droitadministratif exerce sur de nom-
que
aussiexposéaux influences. breux étudiants et comme on
jeuneschercheurs, dit,
Cela se voitcertesdans de nombreuses conclu- qui ontle sentiment d'unediscipline en chantier où
sionsde commissaires du gouvernement qui s'en lesbrasneufsontencoreà œuvrer.
fontl'écho,au pointqu'on a parfoisvu dans cette
Duguitvoulaitque le théoricien fût« le directeur
institution le - chevalde Troie» de la doctrine, et
de consciencedu juge 54,disantencoreque « le
»
quand MadameDeguerguea elle-mêmedécritle à sa missions'il n'indiquepas au
commissaire du gouvernement commeun « messa- juristemanque *55.
législateur quel ledroit
est
gerde la doctrine universitaire- 52.
L'insertiondoctrinale s'opèreenfinpluscommo-
Sansallerjusqu'àcetteprétention qui n'estpas à la
démentdans une élaboration jurisprudentielle
de
pro- portée tous,
la doctrine ne doit jamaisoublier que
donc dans un normatif défi- si elle le veut et si ellele peut, la jurisprudence, c'est
gressive, processus par
nition plusouvert.
aussielle.Età travers elle,c'estla sociétéquis'estfina-
lementtrouvéeassociéeà la miseen placede notre
Peut-être mêmele laconisme classiquedes arrêts a
droitadministratif, bienau-delàdoncde l'imaged'un
servila doctrine qui y trouvait matière à réflexion et
sérailjuridictionnel refermé surlui-même.
pas seulement à description.
l'a d'ailleurs Il n'estpas interdit nonplus de penserque cette
Hauriou, grandarrêtiste, parfaitementmanièrede - et fort
vu et décritdans un article de la finde sa vie où il fabriquer le droita contribué
heureusement - à la dépolitisation du droitadmi-
exposaitque « lesjuristes, ayantplusd'actionsurla
ontsentique de nistratif.
jurisprudence que surla législation,
ce côtéilsparticipaient davantage pouvoircréa-
au Assurément, l'esprit et la tradition de notredroit
teurdu droit»5Ò . public ont foncièrement tendu vers la nettesépara-
On n'oublierapas non plusl'inspiration que les tiondes mondes politique et administratif. Maisl'au-
jugesontpu puiserdanslesenseignements univer- tonomiemêmede sa formation parrapport au poli-
sitairesqui leuront été dispensésou les contro- tiquen'a pu que favoriser la coloration de neutralité
versesdontilsontétéles témoins ou les lecteurs au qui en esttoujours l'undestitres de gloire.
tempsde leursétudes. Probablement encore,et c'estdans le prolonge-
Forcément, il estdifficilede mesurer globalement ment de la dépolitisation, la jurisprudence a étégage
cetteinfluence des auteurset théoriciens, et cela de continuité et de doncde stabilité du droitadmi-
d'autantplusque le mondejuridictionnel a constitué nistratif.
76 spécial6 - 1999
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La jurisprudence,
56. Le droitadministratif
peut-il...? préciténote 4. commissaires du gouvernement. On citera encore (certainement
57. Notes. CE. 23 juill. 1909 et 22 juill. 1910, Fabrègues, S., parmi beaucoup d'autres) M. Latournerie qui, s'agissantde savoir si
191 1,3,121. une requête devait être nécessairement rédigée en françaisdisait
« regretter que l'étatactuel de notredroitpositifvous contraigne à tracer
58. CE., ass.. 7 juiil. 1950, Dehaene, Ree, 426, Rev. du dr. pubi.. vous-mêmesdes règlesqui auraientpu l'êtredans d'autresenceintes»
1950.69 ! .conci. A. Gazier. Ree. p.333,in fine).
(conci, s. CE., section,22 nov. 1985, Quillevère,
On retrouvel'écho de cette appréhension et de cet appel à la loi 59. Y. Gaudemet. « Crise du juge et contentieux administratif en
dans ses conclusions de 1957 sur l'affaireSoc/éténationalede vente droit français», dans La crise du juge, dir J.Lenoble, Bruylant- l.G.D.j.,
des surplus,où s'agissantde l'accès des établissementspublics indus- 1996, p. 87- 103. L'auteur y voit le signe d'une crise la légitimitédu
triels et commerciauxà l'arbitrage,il en soutenait l'impossibilitéjuri- juge administratif. Après avoir puisé sa justificationet son autorité
dique, sauf à renvoyerla question à trancher « sur un plan beaucoup auprès de l'opinionet des justiciablesdans cette créationjuridique,le
plus élevé » (CE., ass.. I 3 dec. 1957, Ree. p. 678, a, 1958,5 17, conci.A. juge administratif devraitainsi « cherchersa légitimité dans sa capacité
Gazier). Ce regret et cet appel sont d'ailleurs récurrentschez les à réglerexactementet efficacement les litigesde sa compétence».
Numérospécial 6 - 1999 77
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60. J.Rivero, « Sur la rétroactivitéde la règlejurisprudentielle», a.j.d.a., 1980, p. 63 1) et Stéphane Riais(Surune distinction
administratif,
A.J.D.A..1968. p. 15-18. contestable et un tropréel déclin ; à propos d'un récentarticle sur le
pouvoirnormatif du juge,ibid.,198 1, p. I 15.
peut-ildemeurer....? , préciténote 4.
6 1. Dans Le droitadministratif
63. Cf. Guy Braibant,« Le rôle du Conseild'État dans l'élaboration
62. Cf. notamment la controverse entre Didier Linotte(Déclin du
en droit du droit», Mélanges René Chapus, Montchrestien,1992, p. 9 1- 102.
pouvoirjurisprudentielet ascension du pouvoirjuridictionnel
78 spécial6 - 1999
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La jurisprudence,
unechancedu droitadministratif?
parfois aiderde nouveauxprogrès juridiques déjàen - voirel'undes mérites qu'onluia attribués - était
gestationau seul plan interne, ne serait-cequ'en de procéderpar touchessuccessivesplutôtque
apprenant au jugeà s'affranchir de la loiqui mécon- par bonds soudains,ce qui fournit l'occasionde
naîtlesnormes supérieures ! réflexions,de débatset de dialogues(une jurispru-
Mais dence,dit-onparfois, « ne se décrète pas, elles'éla-
Toujoursde la jurisprudence, assurément.
toujours la même? bore»^).
Il n'estpas interdit à ce sujetde rêverd'une nou- Mais le contexte de la sociétéd'aujourd'hui l'im-
vellejurisprudence. Sans nuldoute,il y a ici une pose, etsans doute ils'y prête eu égard aux change-
unappel,unerecherche. mentségalementplusbrusqueset instantanés du
demande,
décortantinterne qu'international. La multiplication
Cettenouvellejurisprudence devrait d'abordêtre des textes,la brièvetéde leur vie autant
que la
formulée toujours plus nettement et plusfermement dégradation de leurqualitérédactionnelle justifient
Évidemment, l'élaboration jurisprudentiellerisque assurément que le rodagecontentieux des loissoit
de perdreainsiun de ses atouts, celuide la fluidité accéléré.
qui faciliteles mouvements, et dont Hauriouse Cetteaccélération estégalementrenduenéces-
réjouissait en exaltant Y imperatoria brevitasde la sairepar la complexité acquisepar l'ordrejuridic-
jurisprudence. Jèzeégalement pensaitque : « peut- tionneladministratif, avecses tribunaux de premier
êtrecettehardiesse(jurispmdentielle) n'estpossible ressortet ses cours
d'appel. Il ne faut pas oublier
que parce que le Conseild'État,en s 'abstenant de que la jurisprudence estdestinéenon seulement à
donnerà ses solutionsla based'une théorie géné- améliorer l'ordrejuridique maisaussià rationaliser
rale,se réserve de changersa jurisprudence, de la l'ordrejuridictionnel en y introduisant de l'unité, et
retoucher si l'expérience faitapparaître desdangers pour toutdire,de la discipline.Le droitpublic,
ou desinconvénients^. » moinsencoreque le droit privé,ne saurait supporter
Elle gagneraitcependanten accessibilitéet en de vivre pendant des années surdes jurispaidences
communicabilité ; c'est là un vœu qui futcherà différentes
territoriales etdivergentes.
Andréde Laubadère 6' Ainsil'aménaged'ailleurs l'article12 de la loi du
C'estaussiune nécessitédevenuepluspressante 31 décembre 1987qui permet aux tribunaux et aux
encoreà raisondes exigences de la jurispaidence de cours administratives d'appel, confrontées à une
la Coureuropéennedes droitsde l'hommequi est question de droit à la foisnouvelle et se posantdans
en effetsoucieuse avanttoutde clarté,de cohé- de nombreuxlitiges,d'en référerdirectement et
rence,de certitude etd'accessibilité du droit, -
y com- immédiatement en quelque sortepréjudicielle-
prisd'origine jurispmdentielle, commeil ressort en ment- au Conseild'État.
particulierde sonarrêtrenduen 1992dansl'arrêt de Celui-cistamesansdouteiciparvoied'avisqui ne
Geouffre de la Pradelle qui a fait au
reproche régime s'imposerani à la juridiction qui l'a saisieni à lui-
français des délais contentieux administratifs non mêmesi la questionrevient plustarddevantlui au
pas tantd'être exagérément restrictif
que d'êtreimpar- titred'un arrêt,maisd'avis inévitablement doté
faitement formulé etdiffusé, doncpeuconnaissable. d'unegrandeautorité de fait.
Cela s'intègre dans le soucicontemporain accen- Unmécanisme analoguea d'ailleurs étéinstitué en
tuéde sécurité juridique. 1990 devant la Cour de cassation où il sertla même
Certainement, il lui fautaussise former plusvite, volonté de rationalisation.
ce qui estune manièrede fermeté. Ce n'estpas for- On peutregretter le tempsdes lentesmaturations
cémentdanssa nature, ni nonplusdanssa logique jurisprudentielles, maisilestpassé.A proposde l'ar-
même.Le proprede la progression jurisprudentielleticle12 de la loi de 1987,on a mêmeparléde juris-
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