Cours de Procédure Pénale 2021-1
Cours de Procédure Pénale 2021-1
Cours de Procédure Pénale 2021-1
Professeur Y. Bodian
FSJP – UCAD
À L’USAGE DE LA LICENCE 2
2021
Sommaire
Introduction
1ère PARTIE : LE CADRE GÉNÉRAL DE LA PROCÉDURE PÉNALE
CHAPITRE 2 : LE JUGEMENT
Dans son sens juridique la procédure renvoie à la « branche du droit qui a pour
objet de déterminer les règles d’organisation judiciaire, de compétence,
d’instruction des procès et d’exécution des décisions de justice ». Le droit de
la procédure pénale est dès lors constitué des règles de forme qui gouvernent
la constatation des infractions pénales, l’identification, l’appréhension et le
jugement de leurs auteurs1.
Elle doit garantir les droits et libertés de la personne poursuivie, quelle que
soit la gravité du comportement et la nécessité d’en assurer la répression. La
1
Dans ce sens, la procédure pénale peut être considérée comme synonyme de procès
pénal.
2
Ces principes seront présentés dans la seconde partie du cours.
procédure pénale détermine largement le modèle de vie collective adopté par
une société. Ainsi dans les systèmes protecteurs des droits et libertés, la
poursuite et le jugement des infractions, quelle que soit leur gravité,
s’exercent dans les conditions prévues par la réglementation et dont le non
respect peut conduire à la nullité ; ce que soit celle de l’acte accompli
irrégulièrement ou de l’ensemble de la procédure (si la formalité omise ou
accomplie de manière irrégulière est considérée comme substantielle pour le
déroulement de la procédure).
La procédure pénale est ainsi conçue pour permettre la mise en œuvre des
règles de droit pénal général. Elle intéresse à ce titre tous les citoyens3, en ce
qu’elle s’évertue, dans la répression des comportements déviants, de veiller à
la garantie de droits et libertés des citoyens. La conciliation des intérêts en
jeux (intérêt social et intérêt individuel) justifie la variété des modèles de
procédure pénale4.
3
L’on a ainsi l’habitude de dire que « la procédure pénale est faite pour tous, le droit pénal
général, pour le seul délinquant ».
4
C’est ce qui explique que le niveau de démocratie dans une société se mesure,
notamment, à la lumière de ses règles de procédure pénale.
5
La personne poursuivie se contente simplement de riposter.
6
Ce type de procédure est jugée trop autoritaire et attentatoire aux droits et libertés.
Relativement au déroulement de la procédure, le caractère mixte apparaît dans
la phase de jugement et dans la phase de l’instruction préparatoire. Le
jugement est ainsi marqué par le débat oral, public et contradictoire alors que,
dans l’instruction préparatoire, toute la procédure est secrète. Aux termes de
l’article 11 du code de procédure pénale, « Sauf dans les cas où la loi en
dispose autrement et sans préjudice des droits de la défense, la procédure au
cours de l’enquête et de l’instruction est secrète »7.
En tout état de cause, les règles qui gouvernent la procédure pénale relève
essentiellement de la souveraineté de l’État. Celui-ci sera ainsi amené à
organiser la procédure applicable selon le modèle qui convient à la sauvegarde
de l’ordre social et à la protection des droits et libertés. C’est ainsi que les
règles mises en place dans le système sénégalais comportent plusieurs phases
qui prennent en charge les différents actes accomplis en vue de la constatation
des infractions, l’identification, l’arrestation et au jugement des auteurs. Ces
actes sont accomplis dans un cadre déterminé, avec les acteurs ou organes
auxquels la loi confie les pouvoirs nécessaires à cet effet.
7
La loi n°2016-30 du 8 novembre 2016 modifiant le Code de procédure pénale (JO 6976
du samedi 26 novembre 2016 introduit, dans cet article 11, la possibilité pour le Procureur
de la république de tenir des points de presse pour communiquer ses des affaires en cours
d’enquête ou d’instruction.
8
La loi de 1965 a effet été successivement modifiée par les lois suivantes :
- loi n°66-18 du 1er février 1968 ;
- loi n°69-71 du 30 octobre 1969 ;
- loi n°75-114 du 20 décembre 1975 ;
- loi n° 77-32 du 22 février 1977 ;
- loi n°77-86 du 10 aout 1977 ;
- loi n°79-39 du 11 avril 1979 ;
- loi n°81-71 du 10 décembre 1981 ;
- loi n°81-77 du 10 décembre 1981 ;
- loi n°85-25 du 27 février 1985 ;
- loi n°92-32 du 04 juin 1992 ;
- loi n°99-88 du 3 septembre 1999 ;
- loi n°2000-39 du 29 décembre 2000 ;
- loi n°2007-04 du 12 février 2007 ;
- loi n°2007-05 du 12 février 2007 ;
- loi n°2008-23 du 25 juillet 2008 ;
- loi n°2008-50 du 23 septembre 2008 ;
- loi n°2014-28 du 27 octobre 2014 ;
- loi n°2016-30 du 08 novembre 2016.
Le code de procédure pénale adopté en 1965 et encore en vigueur comprend
deux grandes parties consacrées à l’exercice de l’action publique (livre 1) et
aux juridictions de jugement (Livre 2). Il comporte un titre préliminaire
consacré à l’action publique et à l’action civile dont les conditions d’existence
ont été réglementées. Cependant, l’étude de la procédure pénale conduit à
cerner ses différentes phases certes, mais aussi à une présentation de son
objet.
9
Cf. art. 1er CPP.
10
Cette condition relative à l’infraction est étudiée dans le cadre du cours de droit pénal
général.
11
Lorsque les faits ne constituent pas une infraction, l’Officier de police judiciaire ou le
procureur de la République doit classer le dossier sans suite. Le juge d’instruction saisi doit
rendre une ordonnance de non informer et la juridiction de jugement doit rendre une
décision de relaxe pure et simple.
- Conditions négatives : absence d’obstacles à l’existence de l’action
publique.
- Quels sont les mécanismes par lesquels l’action publique est mise
en mouvement par le ministère public ?
- La loi prévoit ainsi la citation directe, la comparution immédiate et la
réquisition introductive d’instance.
a) La citation directe
b) Le réquisitoire introductif
12
Le procès-verbal d’enquête, ou tout autre document pouvant justifier l’ouverture de
l’information, est généralement annexé au réquisitoire introductif.
13
Réquisitoire introductif d’instance.
14
MICHAUD, « La portée du réquisitoire nominatif », RSC, 1972, p. 180.
- doit obligatoirement qualifier les faits et viser les textes de loi
applicables ce d’autant qu’il fixe la saisine du juge d’instruction.
15
D’ailleurs dans cette hypothèse, il ne s’agit pas d’une extension de la saisine du juge
d’instruction.
16
DE NAUW, « La décision de poursuivre ; instruments et mesures », RSC, 1976-1977,
p. 449. 44 R. LEVY, « Recherche sur le flagrant délit », RSC, 1985, p. 410.
17
Article 384, al. 3 du Code de procédure pénale. Il résulte de l’alinéa 2 du même texte
que lorsque le prévenu use de cette faculté, le délai qui lui est accordé ne pourra être
inférieur à trois jours.
- La plainte avec constitution de partie civile est un mode spécifique à la
victime. Elle a été admise, pour la première, par la jurisprudence dans
l’affaire Placet18.
L’abandon des poursuites peut intervenir soit dans le cadre d’un classement
sans suite soit après une médiation pénale.
18
Crim., 8 décembre 1906 Placet, dit Laurent-Atthalin, du nom du conseiller rapporteur de
la Cour de cassation dans cette affaire. Voir également : A. DONNIER, Les effets d’une
constitution de partie civile jugée irrecevable », note sous Cass. Crim. 18 juin 2014, (deux
arrêts) JCP 2014, Actualités, n°783, p.1337.
19
Aandré VITU, « Le classement sans suite », RSC, 1947, p. 505 et s. GLESENER, « Le
classement sans suite et l’opportunité des poursuites », RSC, 1972-1973, p. 353.
20
Jean-Jacques THOUROUDE, « Vers un déclin du principe de l’opportunité des poursuites
», Gaz. Pal, 1981, 2, doctr. 495.
- Enfin, dans certains cas exceptionnels, la décision de poursuivre peut se
trouver paralysée par l’existence d’une question préjudicielle à l’action.
Il s’agit de questions de nature essentiellement civile, qui ne peuvent
être tranchées que par une juridiction civile ou commerciale. La doctrine
reconnait une question préjudicielle à l’action dans l’article 348 du Code
pénal. Selon ce texte lorsqu'une mineure enlevée ou détournée aura
épousé son ravisseur, celui-ci ne pourra être poursuivi que sur la plainte
des personnes qui ont qualité pour demander l'annulation du mariage
et ne pourra être condamné qu'après que cette annulation aura été
prononcée.
- Justification : elle se justifie d’une part par le fait qu’au bout d’un
certain temps il est préférable d’oublier l’infraction dans un intérêt de
paix et de tranquillité publique. D’autre part, avec le temps les preuves
s’effacent et l’œuvre de justice se fait moins sûre.
21
André VARINARD, La prescription de l’action publique (sa nature juridique, droit matériel,
droit formel), Thèse, Lyon, 1973.
22
Il s’agit des cas de détournements, de soustractions et d’escroqueries portant sur les
deniers publics.
2018 relative à la répression du faux monnayage et des autres
atteintes aux signes monétaires23 ;
o 1 an dans le cas d’une contravention.
Dans la procédure pénale, l’action civile est celle ouverte aux particuliers
victimes d’infractions. L’existence de cette action (A) doit être bien comprise
pour mieux en appréhender les modalités d’exercice (B).
23
JO n° 7095 du 14 mai 2018 ; voir article 25 de cette loi.
A- L’existence de l’action civile
L’action civile a ainsi pour objet exclusif la réparation du dommage causé par
l’infraction24.
24
Fenand BOULAN, « Le double visage de l’action civile exercée devant la juridiction
répressive », JCP, 1973, I, 2563 ; Joseph GRANIER, « Quelques réflexions sur l’action civile
», JCP 1957, I, 1386 ; J. VIDAL, « Observations sur la nature juridique de l’action civile »,
RSC, 1963, p. 481 et s.
25
Crim. 25 février 1897, S. 1898.1. 201, J.-A. ROUX, 11 décembre 1969, D. 1970, 156.
26
La nature du préjudice peut cependant susciter des discussions.
27
En vertu de l’article 407 du Code de la famille, les héritiers légitimes naturels et le
conjoint survivant sont saisis de plein droit des actions du défunt sous l’obligation
d’acquitter toutes les charges de la succession. La Cour de cassation française, Assemblée
plénière, arrêt n° 566 du 9 mai 2008 a ainsi décidé que « toute personne victime d’un
dommage, quelle qu’en soit la nature, a droit d’en obtenir réparation de celui qui l’a causé
par sa faute ; que le droit à réparation du préjudice éprouvé par la victime avant son décès,
étant né dans son patrimoine, se transmet à ses héritiers ».
Dans cette hypothèse, la question s’est posée de savoir si les héritiers peuvent,
en cette qualité, mettre en mouvement l’action publique. Les solutions
admises conduisent à faire les distinctions suivantes :
- La victime décédée a déjà exercé l’action civile avant son décès en cours
d’instance ; dans ce cas, les héritiers peuvent continuer l’action déjà
entamée pour obtenir réparation du préjudice causé à la victime.
- La victime est décédée sans avoir exercé l’action civile et l’action
publique n’a pas été mise en mouvement par le parquet, la jurisprudence
décide que « l’action publique n’ayant été mise en mouvement ni par le
ministère public ni par la victime, seule la voie civile est ouverte à
l’hériter »28. Cependant, si l’action publique a été déclenchée par le
ministère public29 ; l’action civile des héritiers est recevable à la
condition que la victime n’ait pas renoncé à l’action civile.
28
Cass. Ass. Plén. 9 mai 2008, n°06-85.751, D. 2008, AJ. 1415,note Léna ; AJ pénal 2008,
366, Obs. Claire Saas.
29
Directement ou au vu de la constitution de partie civile.
30
Jean Larguier, L’action publique menacée (à propos de l’action civile des associations
devant les juridictions répressives), D. 1958, Chron. p. 29.
31
Mais, les groupements ne se prévalent pas toujours d’un intérêt personnel.
32
L’existence de la personnalité juridique dépend de la nature du groupement. S’il s’agit
par exemple d’une société, elle doit être immatriculée au Registre du commerce et du
crédit mobilier. S’il s’agit d’une association ou d’une fondation, les procédures sont
différentes.
À défaut de justifier d’un préjudice direct découlant de la commission de
l’infraction (intérêt collectif) le syndicat doit justifier d’un titre juridique qui est
délivré par le législateur. Pour les syndicats, il y a un texte de portée générale
qui habilite le syndicat à agir en justice pour défendre les intérêts collectifs de
ses membres. Aux termes de l’article L. 15 du code de travail du Sénégal, les
syndicats peuvent saisir les juridictions répressives pour exercer les droits de
la partie civile.
S’il s’agit de syndicat de salariés, il est habilité à exercer l’action civile chaque
fois que l’infraction a eu pour objet la violation de la réglementation
protectrice des intérêts matériels et moraux des travailleurs. Par exemple, une
infraction d’entrave à la liberté du travail.
Pour les syndicats patronaux, ils peuvent exercer l’action civile pour défendre
le respect des conditions d’accès à la profession. Par exemple un ordre de
médecins peut exercer l’action civile en cas de commission d’une infraction
d’exercice illégale de la médecine.
33
V. Jean CALAIS AULOY, « Les actions en justice des associations de consommateurs »,
D. 1988, Chr. p. 193 ; voir également René VASSAS, « L’action civile des associations de
consommateurs », Gaz. Pal, 20 avril 1983.
a) L’exercice de l’action civile devant la juridiction pénale
La victime peut également choisir de porter son action civile devant le tribunal
civil. Mais ce choix emporte un certain nombre d’incidences sur le déroulement
de la procédure.
34
Maurice PATIN « L’action civile devant les tribunaux répressifs », Rec. Gén. Lois, 1957,
p. 8.
35
Il est ainsi fréquent de voir des victimes d’infractions pénales réclamer plus de sévérité
et chercher à exercer une influence sur le déroulement du procès.
36
Le changement laisserait penser que la victime brusquement prise d’un sentiment de
défiance à l’égard de la juridiction qu’elle-même avait saisie, défiance qui lui viendrait de
ce qu’elle paraît craindre que cette juridiction ne lui donne pas une suffisante satisfaction ;
or il ne faut pas que son adversaire ait à pâtir des erreurs d’orientation qu’elle a faites.
L’on justifie également l’interdiction de renoncer à la voie civile pour la voie pénale par une
sorte d’humanisme manifestée à l’égard de la personne poursuivie. V. Ch. FREYRIA, «
L’application en jurisprudence de la règle electa una via », RSC, 1951, p. 213.
choix de la voie civile est irrévocable ; ce qui veut dire que celle de la voie
pénale est révocable. Cette règle est une faveur faite au prévenu puisque l’on
considère que la voie répressive est une voie plus ardue, exposant ce dernier
à des sanctions pénales.
La mise en œuvre de l’action civile est par ailleurs dominée par la prééminence
de l’action publique sur l’action civile. Cette prééminence s’exprime à travers
deux règles : la règle selon laquelle le criminel tient le civil en l’état et l’autorité
de la chose jugée au pénal sur le civil.
37
Sauf dans certains cas particuliers.
38
Notamment par le Vocabulaire juridique d’Henri Capitant de 1930.
Les droits de la défense comportent plusieurs dimensions.39 Il est cependant
possible d’y voir deux volets complémentaires : le principe du contradictoire40
(A) et le droit à l’assistance d’un avocat (B).
A- Le principe du contradictoire
Il implique que les parties soient mises en mesure de discuter les différents
éléments du dossier. Autrement dit, il consiste à imposer un débat entre les
parties avant la décision du juge.
Le droit à l’assistance d’un avocat est une dimension fondamentale des droits
de la défense. Il est ainsi consacré par la Charte africaine des droits de
l’homme et des peuples qui stipule en son article 7, 1. « Toute personne a
droit à ce que sa cause soit entendue. Ce droit comprend: (…) c) le droit à la
défense, y compris celui de se faire assister par un défenseur de son choix ».
L’article 9 de la Constitution y renvoie lorsqu’il dispose que la défense est un
droit absolu.
39
V. G. TAUPICA-NOUVEL et A. BOTTON, « La réforme du droit à l’information en procédure
pénale », JCP 2014, doctr. p.1351 et s.
40
Il faut cependant remarquer que l’appartenance du principe du contradictoire aux droits
de la défense admise de manière unanime. Pour autant, cette incertitude n’a pas de
véritable incidence sur le contenu du principe du contradictoire et il est possible de le
présenter comme faisant partie des droits de la défense à l’image de beaucoup de décisions
de la Cour européenne des droits de l’homme.
41
L’on retrouve ce principe dans les presque toutes les procédures : civile, sociale,
administrative.
assistent leurs clients dès leur interpellation, durant l’enquête préliminaire,
dans les locaux de la police, de la gendarmerie ou devant le parquet (…). Les
avocats assistent et défendent leurs clients dès leur première comparution
devant e juge d’instruction ».
Dans la mise en œuvre des règles de procédure pénale, il est requis que la
personne poursuivie bénéficie du principe de la présomption d’innocence. Ce
principe fondamental n’est pourtant pas expressément consacré par le Code
de procédure pénale45.
42
Nous avons émis un avis plus relativisé, dans un article cosigné avec le Professeur Papa
T. FALL, notamment au sujet de l’applicabilité de l’article 5 du Règlement UEMOA.
43
JO n°6976 du 26 novembre 2016.
44
Le droit à l’égalité des armes n’est pas expressément invoqué en jurisprudence dans nos
juridictions. Mais il peut être envisagé dans l’exigence du procès équitable ou le respect
des droits de la défense. C’est en ce sens qu’en France, la chambre criminelle de la cour
de cassation a pu se fonder sur la violation du principe de l’égalité des armes en matière
de détention provisoire, pour censurer une chambre d’accusation qui avait entendu une
partie sans ordonner la comparution de toutes les parties : Crim. 18 décembre 1996 : Bull.
n° 476. Mais, dans cette situation, l’on peut s’appuyer sur le principe du contradictoire
pour arriver au même résultat.
45
Le principe est néanmoins suffisamment consacré dans des instruments de droit
international ayant une valeur constitutionnelle au Sénégal. Il en est ainsi de la Déclaration
des droits de l'homme et du citoyen (art. 9) ; de la Déclaration universelle des droits de
l'homme (art. 11) ou de Charte africaine des droits de l'homme de l’Homme et des Peuples
(art. 6, § 2).
La présomption d'innocence est un principe en vertu duquel, en matière
pénale, toute personne poursuivie est considérée comme innocente des faits
qui lui sont reprochés tant qu'elle n'a pas été déclarée coupable par la
juridiction compétente. Inscrite dans la Déclaration des droits de l'homme et
du citoyen46 et ayant à ce titre valeur constitutionnelle, cette présomption a
notamment pour effet de faire bénéficier à la personne concernée, le doute qui
existerait sur sa culpabilité. Ainsi, à défaut de charges suffisantes, le juge doit
prononcer la relaxe. C’est tout le sens de l'adage in dubio pro reo, qui trouve
une application dans la phase de jugement.
La preuve revêt dans le procès pénal une importance qu'elle n'a dans aucune
autre matière. D'abord, parce qu'elle touche aux garanties des personnes,
notamment à la présomption d'innocence à laquelle elle peut porter atteinte,
comme elle concerne directement l'ordre public. Ensuite, parce que toutes les
règles de procédure pénale n'ont, en définitive, d'autre finalité que la recherche
et l'administration de la preuve.
46
L’article 9 de la Déclaration des Droits de l’Homme et du Citoyen affirme que « Tout
homme étant présumé innocent jusqu’à ce qu’il ait été déclaré coupable, s’il est jugé
indispensable de l’arrêter, toute rigueur qui ne serait pas nécessaire pour s’assurer de sa
personne doit être sévèrement réprimée par la loi ».
47
D’autres exceptions peuvent être recherchées notamment dans le code des douanes.
48
Sophie Diagne NDIR, « La loyauté de la preuve en matière pénale », Annales Africaines,
Nouvelle Série, Vol. 1-avril 2019, pp. 1-36.
L’admissibilité de la preuve en matière pénale obéit également à une logique
différente des règles admises en droit civil.
La liberté de la preuve comporte deux dimensions. Elle signifie que les preuves
pénales peuvent être apportées par tous moyens. Il s’agit d’une liberté dans
l’admissibilité des modes de preuve. C’est ainsi que les autorités de poursuite
sont habilitées à procéder à des enquêtes, à des constats, à des perquisitions
et saisies, aux écoutes téléphoniques ou interrogatoires, dans les limites
fixées par la loi.
49
L’on peut ainsi considérer que c’est corrélativement et logiquement, que la liberté́ admise
dans la phase préparatoire à la poursuite et la poursuite elle-même se retrouve en aval de
ces deux phases.
50
Il peut également s’appuyer sur des « SMS » ou des courriers électroniques.
CHAPITRE 2 : LES ORGANES DE LA PROCÉDURE PÉNALE
En matière pénale, l’auteur de l’infraction n’est pas toujours connu. Or, s’il est
possible de déclencher des poursuites contre une personne non dénommée
(c’est-à-dire contre X), le jugement ne peut être rendu que contre une
personne identifiée.
Dès lors, le rôle confié aux organes de police est déterminant. Ces organes
sont souvent chargés, avant l’ouverture du procès pénal, de constater les
infractions, de rechercher les auteurs et de les déférer devant la justice. Le
travail ainsi effectué permet aux organes de justice (juge d’instruction, juge
de jugement) d’ instruire les affaires et de trancher les litiges.
Pour une bonne appréhension du rôle des autorités de police judiciaire dans
la procédure pénale, il est utile de connaître la composition (A) et les
attributions des officiers de police judiciaire (B).
La liste des OPJ est fixée par l’article 15 du code de procédure pénale. Ce texte
confère la qualité d’officier de police judiciaire :
- aux officiers de gendarmerie (les officiers généraux à savoir les
généraux de brigade, de division et de corps d’armée, les officiers
supérieurs, à savoir les commandants, lieutenants-colonels et colonels
et les officiers subalternes que sont les sous-lieutenants, les lieutenants
et les capitaines ;
- aux sous-officiers de gendarmerie exerçant les fonctions de
commandant de brigade, les commissaires de police, les officiers de
police, les élèves officiers et les sous-officiers de gendarmerie
nominativement désignés par arrêté conjoint du ministre de la Justice et
du ministre des Forces armées après avis conforme d’une commission ;
- aux fonctionnaires des cadres de police nominativement désignés par
arrêté du ministre de la Justice sur proposition des autorités dont ils
relèvent, après avis conforme d’une commission.
51
J. CATHELINEAU, « La gendarmerie », D. 1964, chr. 109 ; CHAUMEIL, La police judiciaire,
Paris, Sirey, 1953 ; BESSON, « La police judiciaire et le Code de procédure pénale »,
D.1958, chr. 159.
B- Les attributions des OPJ
L’exercice des fonctions de police judiciaire implique des atteintes aux libertés
individuelles. C’est la raison pour laquelle le législateur a organisé des
mécanismes de contrôle de la police judiciaire par les autorités judiciaires.
Ils peuvent aussi engager leur responsabilité pénale. Selon l’article 216 du
Code de procédure pénale, si la chambre d’accusation estime que l’officier de
police judiciaire a commis une infraction à la loi pénale (séquestration
arbitraire, torture, corruption, etc…) , elle ordonne en outre la transmission du
dossier au Procureur général.
La procédure à suivre est réglée par les articles 661 et suivants du code de
procédure pénale.
Les organes de justice sont chargés de trancher les litiges qui s’élèvent au
cours du procès pénal. Il existe deux types d’organes de justice chargés de
fonctions juridictionnelles. Il s’agit d’une part des organes représentant le
ministère public (Paragraphe I) et d’autre part de ceux qui sont chargés de
l’instruction des affaires (Paragraphe II). Les organes de jugement étant
consacrés par ailleurs dans la phase de jugement des infractions.
52
J. P. NADAL, « Le ministère public face à certains impératifs », RSC, 1973, p. 492.
délégué du Procureur de la République près le tribunal D’INSTANCE, l’article
24 du code de procédure pénale prévoit en son alinéa 2 que les fonctions du
ministère public sont assurées par le Président de cette juridiction, sous le
contrôle direct du Procureur de la République.
Les magistrats du ministère public sont régis par des règles statutaires qui
présentent des spécificités par rapport à la condition des magistrats du siège.
Le ministère public est ainsi caractérisé par la hiérarchie (1), l’indivisibilité (2)
l’irresponsabilité (3) et le caractère irrécusable (4).
1. La hiérarchie
53
J.O. N° 6986 du mercredi 18 janvier 2017.
54
Article 28 du code de procédure pénale.
55
M. DELMAS-MARTY, « La politique pénale est-elle une politique publique comme les
autres ? », RSC, janvier-mars 1994, p. 151 ; V. également, Y. AGUILA, « La politique
pénale est-elle une politique publique comme les autres ? », Rev. Adm., 1993, p. 7.
56
Article 38 du code de procédure pénale.
Il y a lieu cependant de souligner que le législateur ne confère pas au Procureur
général près la cour Suprême cette autorité sur les parquets.
2. L’indivisibilité
3. L’irresponsabilité
Mais, cette irresponsabilité n’est pas totale. S’il commet une faute personnelle,
sa responsabilité civile peut être mise en jeu, comme pour les magistrats du
siège, par la procédure de prise à partie.
S’il commet une infraction, il pourra être poursuivi, mais il bénéficie d’un
privilège de juridiction.
4. Le caractère irrécusable
En effet, alors qu’un magistrat du siège peut être récusé aussi ben en matière
civile que pénale, le magistrat du parquet ne peut être récusé. Le plaideur ne
peut récuser son adversaire58.
57
V. Vocabulaire juridique H CAPITANT. Il n’empêche qu’un magistrat du parquet puisse
décider de lui-même de s’abstenir de participer au jugement d’une affaire.
58
VIALA, « Le Ministère Public peut-il être récusé ? », Gaz. Pal 1980, I, doc. 163.
59
Patrick Maistre du Chambon, Le juge d’instruction, 3e édition, Dalloz, 1985 ; Bernard
BOULOC, « Le rôle du juge d’instruction dans la recherche de la vérité », Petites affiches,
n° 130, du 29 octobre 1986 ; M. GARREL, « La juridiction d’instruction est-elle
indispensable ? », JCP, 1986, I, 3266.
Lorsqu’il, dans un tribunal d’instance il n’y a qu’un seul juge ; celui-ci exerce
les fonctions de juge d’instruction qu’il cumule avec les fonctions de juge de
jugement et éventuellement de délégué du procureur de la République60.
D’autre part pour certaines infractions jugées graves, le juge d’instruction est
lié par les réquisitions du ministère public.
60
On a pu qualifier le président du tribunal d’instance investi des pouvoirs de juge
d’instruction, de juge de jugement et de délégué du procureur de « monstre juridique ».
61
Sur l’ensemble de la question, V. M. DIOP, « Les limites au pouvoir d’appréciation du
juge pénal », in « Actes du séminaire liberté d’appréciation du juge », RSD, n° 28, janvier,
février mars 1983, p. 13 et ss. ; M. NDIAYE, « Les atteintes à la liberté d’appréciation du
juge relativement à l’article 140 du Code de procédure pénale », in « Actes du séminaire
liberté d’appréciation du juge », RSD, n° 28, janvier, février mars 1983, p. 59 et s.
chambre d’accusation qui s’assure du bon fonctionnement des cabinets
d’instruction. A cet égard, chaque cabinet d’instruction établit à son intention
un état des affaires en cours portant mention pour chacune d’elles de la date
du dernier acte accompli. Par ailleurs, lorsque l’instruction d’une affaire dure
plus de 6 mois, le juge d’instruction fait un rapport circonstancié adressé au
président de la Chambre d’accusation.
62
Wilfrid JEANDIDIER, La juridiction d’instruction du second degré, Thèse Nancy, 1975,
édition Cujas, 1975 ; P. CHAMBON, La chambre d’accusation, Dalloz, 1978.
Par ailleurs la chambre d’accusation est l’organe disciplinaire des Officiers de
police judiciaire et peut infliger des sanctions à l’encontre de ceux d’entre eux
qui ne respecteraient pas les règles liées à la délicatesse de leurs fonctions.
Elle est juge du règlement des conflits de compétence entre deux juges
d’instruction, deux tribunaux de simple police, deux tribunaux correctionnels
se trouvant dans le ressort d’une même Cour d’Appel.
63
L’extradition est une procédure par laquelle un État peut être amené à remettre un
individu, sous le coup de poursuites ou d’une condamnation pénales et se trouvant sur son
territoire, à un autre Etat qui le réclame pour y être jugé ou subir sa peine.
Section 1 : La phase de l’enquête préliminaire
L’enquête préliminaire peut être ouverte d’office par les officiers de police
judiciaire pour donner suite aux plaintes et dénonciations dont ils sont saisis (art
16) ou au vu des comptes rendus des agents de police judiciaire relativement aux
informations dont ils ont connaissance (article 20 du CPP).
Elle peut également être ouverte sur instruction du procureur de la République qui
reçoit les plaintes et dénonciations des particuliers et les informations des
autorités constituées, des officiers publics ou des fonctionnaires qui, dans
l’exercice de leurs fonctions, peuvent avoir connaissance d’une infraction (art 32
du CPP).
64
G. DENIS, « De quelques aspects de l’enquête préliminaire », Rev. pol. nat.1969, juin-
juillet, p. 5 ; BLONDET, « L’enquête préliminaire dans le nouveau code de procédure pénale
», JCP, 1959, I, 1513.
En ce qui concerne le placement en garde à vue, il résulte de l’article 69 du
Code de procédure pénale que l’officier de police judiciaire peut retenir une
ou plusieurs personnes contre lesquelles existent des indices de culpabilité.
Cependant, il ne peut le faire que pour les nécessités de l’enquête et ne peut
les retenir plus de quarante-huit heures.
Les délais de garde à vue sont doublés en ce qui concerne les crimes et délits
contre la sûreté de l’État, les crimes et délits en période d’état de siège, d’état
d’urgence ou d’application de l’article 47 de la Constitution, sans que ces deux
causes de doublement puissent se cumuler.
Dans l’exécution de ces opérations les OPJ doivent en outre se conformer aux
garanties prévues par les articles 49 à 51 du Code de procédure pénale dans
le cadre de l’enquête de flagrance. Il s’agit de la présence de la personne
soupçonnée ou de celle au domicile de laquelle les opérations ont lieu et de
l’interdiction de la perquisition de nuit.
65
V. A. FAYE, « Le suspect dans les enquêtes de police », Rev.Ass.sén.dr.pén, 2010, n° 9,
p. 22.
Parag.1 : La notion d’infraction flagrante
Est aussi considéré comme flagrant, le crime ou le délit qui vient de se commettre.
Dans cette hypothèse, les éléments constitutifs de l’infraction sont réunis, la
personne soupçonnée tentant généralement de se retirer une fois son forfait
commis.
L’article 45, alinéa 2 du Code procédure pénale assimile aux infractions flagrantes
les crimes ou délits qui, même non commis dans les circonstances de flagrance,
ont été perpétrés dans une maison dont le chef requiert le Procureur de la
République ou un officier de police judiciaire de le constater.
Les autorités chargées de procéder à une enquête de flagrance (ou sur infraction
flagrante) sont celles de la police judiciaire (qui agissent sous la direction du
Procureur de la République), le Procureur de la République et le juge d’instruction.
Au demeurant, l’article 65 du Code de procédure pénale dispose que dans les cas
de crime ou délit flagrant puni d’une peine d’emprisonnement, toute personne a
qualité pour en appréhender l’auteur et le conduire devant l’officier de police
judiciaire le plus proche. Il s’agit cependant d’une situation exceptionnelle où l’on
confère aux citoyens les pouvoirs de police judiciaire.
La garde à vue peut être définie comme le fait pour l’OPJ de garder à sa
disposition une personne susceptible de fournir des renseignements sur les
faits ou les documents saisis, pour les nécessités de l’enquête.
La garde à vue est encadrée par l’article 55 du Code de procédure pénale. Selon
ce texte, l’OPJ peut être amené à garder à sa disposition une ou plusieurs
personnes pour lesquelles il apparaît nécessaire d’établir ou de vérifier
l’identité ou qui sont susceptibles de fournir des renseignements sur des faits
constitutifs d’un crime ou d’un délit. Dans ce cas, ces personnes ne peuvent
être gardée à vue plus de 24 heures.
Par contre, s’il existe contre une personne des indices graves et concordants
de nature à motiver son inculpation, l’OPJ doit la conduire devant le procureur
de la République sans pouvoir garder à vue la personne plus de 48h. mais ce
délai peut être prorogé d’un nouveau délai de 48h (article 55, alinéa 7, du Code
de procédure pénale).
En tout état de cause, tous les délais prévus par l’article 55 du Code de
procédure pénale sont doublés en période d’état d’urgence notamment.
Chapitre 2 : L’instruction préparatoire
Les actes ainsi visés ont pour objet de réunir les éléments de preuve
nécessaires au jugement de l’affaire. Ils constituent dès lors les principaux
actes d’information qui sont accomplis par le magistrat instructeur.
66
Ces mandats sont exécutoires sur tout le territoire de la République (Article 110 CPP).
67
Ce mandat n’est pas, en soi, très coercitif. C’est ce qui explique qu’il puisse être notifié
par voie d’huissier de justice (art. 115, al. 4 CPP). Si l’inculpé ne comparaît pas, le juge
d’instruction lui décernera alors un mandat plus coercitif, le mandat d’amener.
68
L’inculpé est la personne qui, au cours d’une instruction, a fait l’objet d’une inculpation.
Lorsqu’à l’issue de cette information cette personne est renvoyée devant le tribunal de
police ou devant le juge correctionnel, elle devient un « prévenu ». Par contre, dans le cas
où elle fait l’objet d’une ordonnance de mise en accusation qui saisit les chambres
criminelles, la personne prend l’appellation d’ « accusé ».
Le mandat de dépôt est un ordre donné par le juge d’instruction au directeur
de l’établissement pénitentiaire de recevoir et de retenir l’inculpé. Ce mandat
doit être motivé. Le juge d’instruction ne peut décerner un mandat de dépôt
qu’après interrogatoire de la personne poursuivie et si l’infraction comporte
une peine d’emprisonnement au moins correctionnelle.
Dans tous les cas, le juge d’instruction peut placer l’inculpé sous contrôle
judiciaire. Celui-ci consiste pour l’inculpé à se présenter aux dates fixées par
le juge, soit à lui-même, soit à l’officier de police judiciaire qu’il désigne
(article 127 ter Code de procédure pénale).
La détention provisoire est cependant obligatoire dans les cas prévus par la
loi. C’est ainsi qu’aux termes de l’article 139 Code de procédure pénale, « sur
réquisitions motivées du ministère public, le juge d’instruction est tenu de
décerner mandat de dépôt contre toute personne inculpée de l’un des crimes
ou délits prévus par les articles 56 à 10069 et 22570 du Code pénal ».
69
Il s’agit des crimes et délits contre la sûreté de l’État.
70
Il s’agit des dégradations de biens appartenant à l’État ou intéressant la chose publique.
Parag.2 : Les ordonnances du juge d’instruction
Le magistrat instructeur est un, habilité à prendre des décisions
juridictionnelles appelées « ordonnances ». A cet égard, il tranche les
contestations qui s’élèvent au cours de l’instruction (recevabilité de la
constitution de partie civile, compétence, restitution d’objets saisis, charges
qui pèsent sur l’inculpé, etc…).
Le juge d’instruction peut rendre des ordonnances dès l’ouverture de
l’information (A), au cours ou à la clôture de celle-ci (B).
Il peut, s’il s’agit d’une plainte avec constitution de partie civile, refuser
d’informer en rendant une ordonnance d’irrecevabilité de la constitution de
partie civile au motif que les conditions de fond et de forme ne sont pas
réunies. Il en est ainsi notamment lorsque le plaignant n’a pas respecté son
obligation de consignation, ou n’a pas justifié de sa qualité de partie civile.
71
L’ordonnance de soit-communiqué n’est pas une ordonnance juridictionnelle. Elle
constitue une mesure administrative qui ne peut faire l’objet de voies de recours ouvertes
contre les décisions juridictionnelles.
72
Le magistrat instructeur peut aussi dès le début de l’instruction rendre une ordonnance
de dessaisissement lorsque notamment il constate qu’un juge d’instruction d’un autre
ressort également compétent, en raison de la pluralité des principes de compétence
territoriale, a été saisi ; ce qui entraine le transfert du dossier à son collègue.
appelée « détention préventive ». Cette mesure peut également résulter des
effets attachés au mandat de dépôt.
S’il s’agit d’un délit, le juge prononce le renvoi devant le tribunal régional ou
devant le tribunal départemental statuant en matière correctionnelle pour les
délits de la compétence de cette juridiction (article 173 du Code de procédure
pénale).
Si le juge d’instruction estime que les faits constituent une infraction qualifiée
crime par la loi, il rend une ordonnance de mise en accusation devant la
chambre criminelle73 qui procède au jugement de l’affaire.
TITRE II : Le jugement
73
Article 175 CPP.
l’étude de l’étape du jugement, il s’avère nécessaire d’envisager la
présentation des juridictions de jugement(chapitre 1), avant de voir la
décision qu’elles sont susceptibles de rendre (chapitre 2)
D’une manière générale, les juridictions répressives sont les mêmes que celles
qui sont chargées de juger les affaires civiles ou administratives. Cependant
les décisions qu’elles peuvent rendre prennent une connotation particulière en
raison des enjeux qui s’y attachent. Il s’agira dès lors d’étudier la physionomie
des juridictions répressives (Section 1) avant de voir les décisions qu’elles
rendent (Section 2).
Les juridictions ordinaires sont celles qui ont vocation à juger toutes les
infractions sauf celles pour lesquelles un texte spécial a attribué compétence
à une autre juridiction74. Il faut distinguer à ce niveau les juridictions de
premier degré des autres juridictions.
A. Le tribunal d’instance
74
C’est la définition que l’on donne habituellement aux juridictions de droit commun.
75
J.O. N° 6862 du mercredi 22 juillet 2015.
76
Il s’avère plus prudent d’éviter d’établir le lien nécessaire entre le ressort territorial des
juridiction et les circonscriptions administratives, même si, pour l’instant, la plupart de ces
juridictions ont leur compétence territoriale définie en considération de ces circonscription.
Il est institué dans les différents départements77 et se compose d’un président,
d’un ou de plusieurs juges dont l’un est nommé juge d’instruction. Les
fonctions de ministère public sont exercées par le délégué du procureur. S’il
n’y a pas de délégué c’est le président du tribunal qui exerce ces attributions.
77
Tribunal d’instance HC de Dakar, pour le département de Dakar ; tribunal d’instance de
Pikine pour le département de Pikine, tribunal d’instance de Guédiawaye pour le
département de Guédiawaye, tribunal d’instance de Rufisque pour le Département de
Rufisque….
78
Article premier, alinéa 1 du Code pénal. Selon l’article premier du code des
contraventions, les peines de police sont l’emprisonnement d’un jour à un mois, l’amende
et la confiscation d’objets saisis.
79
Le tribunal régional connait du vol en réunion, du vol avec usage de fausses clés, de
l’escroquerie, du viol, du détournement de deniers publics, du détournement de mineur
avec fraude ou violence, notamment.
Le TGI est composé d’un président, d’un ou de plusieurs juges dont l’un est
nommé juge d’instruction. Les fonctions de ministère public sont exercées par
le procureur de la République assisté de substituts80.
En outre, le tribunal régional est le juge d’appel des décisions rendues par les
tribunaux d’instance en matière de contravention.
Les cours d’appel sont des juridictions du second degré. Elles sont composées
d’un premier président, de présidents de chambres (chambre correctionnelle,
chambre civile et commerciale, chambre sociale, chambre criminelle et
chambre d’accusation) et de conseillers. Les fonctions de ministère public sont
assurées par le procureur général assisté de substitut généraux et d’avocats
généraux.
La Cour d’appel est la juridiction compétente pour statuer en appel sur les
décisions rendues par les tribunaux de grande instance, et sur les délits de la
compétence du tribunal d’instance.
La cour d’appel est également la juridiction compétente pour juger les crimes
et délits commis par les Officiers de police judicaire dans l’exercice de leurs
fonctions. Il en est de même lorsque la personne poursuivie est un greffier, un
greffier en chef ou un administrateur des greffes.
B- La Cour suprême
80
Aux termes de l’article 17 du décret n° 2015-1145 du 03 août 2015 fixant la composition
et la compétence des cours d’appel, des tribunaux de grande instance et des tribunaux
d’instance, « Il y a, auprès de chaque tribunal de grande instance, un procureur de la
République chargé d’exercer les fonctions de ministère public telles qu’elles sont définies
par la loi ».
81
Ces dispositions s’appliquent également au personnel des greffes.
La Cour suprême comprend quatre chambres à savoir la chambre criminelle,
la chambre civile et commerciale, la chambre sociale et la chambre
administrative82.
En matière pénale, la Cour Suprême est compétente pour statuer sur les
pourvois en cassation dirigés contre les décisions rendues en derniers ressort
en matière pénale.
Elle est par ailleurs compétente pour les poursuites et le jugement des
infractions commises par des magistrats ou certains fonctionnaires, elle est
juge du fond. En effet, la cour suprême est la juridiction compétente pour se
prononcer sur les délits ou crimes commis les inspecteurs généraux d’État83.
Les co-auteurs et les complices sont déférés devant les mêmes formations de
jugement.
Les décisions ainsi rendues par la première Chambre ou par les Chambres
réunies de la Cour suprême tant en matière criminelle qu’en matière
correctionnelle, ne peuvent faire l’objet d’aucun recours.
82
Article 8 de la loi organique n°2017-09 du 17 janvier 2017.
83
Il en est de même des greffiers, greffiers en chef et administrateurs des greffes.
Parag. II : Les juridictions d’exception
Le tribunal pour enfants est compétent pour juger les crimes et délits commis
par les mineurs de 18 ans. Lorsque seule l’année de naissance du mineur est
connue, il est présumé né le 31 décembre de ladite année (article 566 CPP).
La chambre spéciale de la Cour d’Appel chargée des affaires des mineurs est
présidée par un conseiller délégué à la protection de l’enfance choisi par le
premier président de la Cour d’appel parmi les magistrats désignés pour
composer la chambre d’accusation.
Ce sont des juridictions ordinaires, mais qui ont une composition spéciale. En
effet, lorsqu’un délit ou une contravention est commise par un militaire dont
le grade ne dépasse celui de capitaine, la juridiction compétente est le Tribunal
de grande instance hors classe de Dakar. Mais lorsque les mêmes faits sont
commis par un officier supérieur, c’est la Cour d’Appel de Dakar qui est
compétente. Elle statuent en premier et en dernier ressort.
Les fonctions de ministère public sont assurées par le procureur de la
République de Dakar ou par le Procureur général près la Cour d’Appel de
Dakar lorsque l’infraction est commise par un officier supérieur.
S’agissant des crimes, c’est la Cour d’assises de Dakar qui est compétente,
mais le jury sera alors composée de quatre jurés militaires.
La Haute Cour de Justice est instituée par les articles 99 à 101 la Constitution.
Elle est composée de députés élus par l’Assemblée nationale au début de
chaque législature.
C’est le procureur spécial qui informé par des rapports de police, des rapports
administratives, des plaintes et dénonciations qui fait procéder à une enquête
préliminaire. A l’issue de cette enquête, s’il y a des indices d’enrichissement
illicite, les pièces du dossier sont tenues à la disposition de la personne
poursuivie. Le procureur spécial entend ensuite cette personne assistée de
son conseil.
L’intéressé est mis en demeure de justifier dans le délai d’un mois de l’origine
licite de ces éléments. S’il ne se présente pas ou s’il ne fournit pas les éléments
de justification nécessaires le procureur spécial saisit la commission
d’instruction. Celle-ci peut à la suite de l’instruction qui ne peut excéder 6
mois rendre son arrêt de non-lieu soit un arrêt de renvoi. C’est justement
l’arrêt de renvoi qui saisit la cour de répression de l’enrichissement illicite.
Selon l’article 163 bis du Code pénal inséré dans le code pénal par la loi n°
81-53 du 10 juillet 1981 relative à la répression de l'enrichissement illicite «
le délit d'enrichissement illicite est constitué lorsque, sur simple mise en
demeure, une des personnes désignées ci-dessus, se trouve dans
l'impossibilité de justifier de l'origine licite des ressources qui lui permettent
d'être en possession d'un patrimoine ou de mener un train de vie sans rapport
avec ses revenus égaux».
L'origine licite des éléments du patrimoine peut être prouvée par tout moyen.
Toutefois la seule preuve d'une libéralité ne suffit pas à justifier de cette
origine licite.
Dans le cas où l'enrichissement illicite est réalisé par l'intermédiaire d'un tiers
ou d'une personne physique dirigeant la personne morale seront poursuivis
comme complices de l'auteur principal.
Section 2 : La décision rendue à l’issue du jugement
D’abord, les débats ont lieu publiquement. Il s’agit de l’une des plus solides
garanties des droits de la défense et d’’une bonne justice. Le principe de la
publicité des débats est posé par l’article 388 CPP. Selon ce texte : « les
audiences sont publiques ».
Les débats sont dominés par les échanges et interrogatoires qui se font
oralement. L’article 446 du Code de procédure pénale prévoit cependant que
le prévenu, les autres parties et leurs conseils, peuvent déposer des
conclusions.
Enfin les débats sont marqués par le principe du contradictoire. Les parties
devant le tribunal sont placées sur un pied d’égalité. Le ministère public, la
partie civile et le prévenu ont les mêmes droits et notamment celui de poser
des questions aux témoins.
Les débats dans le procès pénal commencent par l’appel des parties à savoir
le prévenu, la partie civile, éventuellement le civilement responsable, les
témoins et les experts. Il est ensuite procédé à la vérification de l’identité du
prévenu à qui le tribunal donne lecture de l’acte de saisine.
Le délibéré peut être très bref ; il en est ainsi dans les cas où la décision est
rendue sur le siège. Ainsi, le président du tribunal au terme des débats se
tourne successivement vers ses deux assesseurs avant de prononcer le
jugement. Il prononce à cet égard la formule « le tribunal après en avoir
délibéré (…)».
Mais, pour les affaires délicates qui nécessitent des recherches, le tribunal se
retire pour délibérer en chambre du conseil ou annonce souvent qu’il « met
l’affaire en délibéré » à une date précisée.
Les voies de recours ordinaires sont ouvertes pour n’importe quel motif ; ce
sont des voies de droit commun largement ouvertes. Il s’agit de l’appel et
l’opposition.
L’appel peut être défini comme une voie de réformation par laquelle une partie
à un procès demande le réexamen de son affaire par une juridiction
supérieure, en application de la règle du double degré de juridiction.
84
G. LEVASSEUR, «De quelques singularités des voies de recours en matière répressive »,
Mélanges Vinvent, 1981, p. 218 et s.
L’opposition est une voie de recours ordinaire ouverte de plein droit au
justiciable défaillant et une voie de rétractation tendant à faire revenir l’affaire
devant la même juridiction que celle qui avait déjà statué en l’absence du
prévenu.