10 - Ongle
10 - Ongle
10 - Ongle
Introduction
Annexe cutanée kératinisée, l’appareil unguéal repose directement sur le périoste de la phalange distale et comprend
- La tablette unguéale ou ongle proprement dit, totalement kératinisée dont la croissance est ininterrompue tout
au long de la vie
- 4 structures épithéliales : le repli proximal, la matrice unguéale, le lit unguéal et l’hyponychium
Assure différentes fonctions
- Protection des phalanges distales
- Plan fixe de contrepression dans la sensibilité pulpaire tactile (le boutonnage, la préhension de petits objets, le
grattage)
- Prise fine des petits objets
- Rôle agressif et rôle esthétique
Intérêts : l’ongle a ses propres pathologies mais peut être le siège de presque toutes les maladies dermatologiques
La connaissance de l’anatomie de l’ongle permet de bien l’anesthésier ou le biopsier
Physiologie unguéale
- Rappel embryologique
L’ongle prend naissance dans une invagination de l’épiderme de la face dorsale de la dernière phalange, apparue au cours
de la 9ème semaine d’aménorrhée et acquiert sa structure définitive à la 2ème semaine
- 9ème semaine : apparaît l’aire unguéale primitive = invagination épidermique quadrangulaire qui va envahir le
derme en bas et en arrière, traçant les limites du champ unguéal primaire (sillon proximal, sillon distal et 2 sillons
latéraux)
- 11ème – 12ème semaine : débute la kératinisation de l’ongle
o A la partie distale de l’aire unguéale : formation d’une crête
épidermique hyponychium
o En arrière du sillon proximal : formation d’une 2ème crête
Eponychium. La travée de cellules épithéliales du sillon proximal
s’enfonce obliquement en arrière et en profondeur pour donner la
matrice primordiale qui se différencie en
Couche superficielle : face inférieure du repli sus-unguéal
Couche profonde : Epithélium matriciel proprement dit
- 13ème semaine : La matrice devient fonctionnelle et produit la plaque par phénomène de kératinisation
- A partir de la 16ème semaine : l’ongle pousse d’arrière en avant
- A partir de la 20ème semaine : La tablette dépasse la crête distale
- Anatomie unguéale
1- La tablette unguéale : limbe
- Anatomie macroscopique : l’ongle est une plaque rectangulaire à convexité dorsale, à grand axe longitudinal au
niveau des doigts et transversal au niveau des orteils. Sa face dorsale est lisse, brillante et translucide
contrairement à sa face profonde qui est rugueuse et striée longitudinalement de sillons permettant l’adhérence
entre l’ongle et son lit. Chez l’adulte la longueur est > à 14,5mm, et l’épaisseur est comprise entre 0,5 et
0,75mm ; elle augmente vers le bord libre de l’ongle et plus chez l’homme
que chez la femme. L’ongle comprend d’arrière en avant
o La racine : amincie sous forme de biseau, s’insère dans la peau
cachée par le repli sus-unguéal (1/4 de la longueur totale)
o La lunule : surtout visible aux pouces, croissant blanchâtre à la base
de l’ongle, recouvre la matrice vue par transparence
o La zone rosée : semi-translucide, constitue la plus grande partie de
l’ongle ; correspond au lit unguéal
o Le bord libre : normalement lisse et régulier et non adhérent aux
tissus sous-jacents
- Anatomie microscopique : possède 3 couches suivant la rigidité de la
kératine
o La couche superficielle : kératine semi dure, noirâtre en microscopie
optique après coloration par les sels d’argent
o La couche moyenne : kératine dure, jaune-brune
o La couche profonde : kératine molle, rouge-brune
2- Les rainures unguéales : sillons unguéaux
- Limitant l’ongle en avant, en arrière et latéralement, l’ongle
s’encastre entre elles comme un verre de montre.
- Plus visibles après avulsion de l’ongle
o Le sillon distal est recouvert par la tablette unguéale
o Le sillon proximal et les sillons latéraux limitent
nettement l’ongle
3- La matrice unguéale
- Anatomie macroscopique : correspond à l’épiderme sous la racine de
l’ongle, elle est plus épaisse que le lit de l’ongle et donne naissance à
l’ongle proprement dit. Elle est divisée en :
o Matrice proximale : 1/3 supérieur de l’ongle
o Matrice distale : 2/3 inférieurs
Une atteinte matricielle se traduit par une dystrophie touchant
la tablette unguéale elle-même
- Anatomie microscopique : Elle est épaisse et de même structure que
l’épiderme et comprend une couche germinative, 6 à 10 assises de
cellules épineuses mais pas de couche granuleuse. Elle contient des
mélanocytes quiescents sans pigments mélanocytaires ongles
blancs mais peuvent synthétiser de la mélanine sous l’action d’un
stimulus (radiothérapie bandes mélanonychiques noires,
longitudinales). Elle contient aussi des cellules de Langerhans et des
cellules de Merkel
4- Le lit de l’ongle
- Anatomie macroscopique : En avant de la matrice, il est rose car très richement vascularisé. C’est
l’extension sous unguéale de l’épiderme de l’extrémité du doigt. La tablette unguéale au cours de sa croissance
adhère et glisse sur le lit unguéal
- Anatomie microscopique : Constitué d’épiderme et de derme sans hypoderme, il est appelé
zone stérile car l’index mitotique de l’assise basale est nul. L’épiderme est dépourvu de couche
granuleuse. Le derme est en contact direct avec le périoste de la phalange avec lequel il est
fixé par un tissu conjonctif
5- L’hyponychium
- Situé entre l’extrémité distale du lit et le bourrelet délimité par le sillon antérieur,
l’hyponychium est pourvu de couche granuleuse
6- L’eponychium ou cuticule
- C’est un repli de peau recouvrant la partie postérieure de la tablette, kératinisé sans poils et
pourvu qu’une couche granuleuse
- Vascularisation et innervation
1- Vascularisation
- Les 2 artères digitales propres issues des artères palmaires médiale et latérale convergent vers
la pulpe digitale et donnent naissance à la face dorsale à 3 arcades
o L’arcade superficielle (SA) : en regard de la base de la
troisième phalange, riche en glomi de Masson expliquant la
fréquence des tumeurs glomiques à ce niveau
o L’arcade sous-unguéale proximale (PSA) : au sein du sillon
unguéal proximal
o L’arcade sous-unguéale distale (DSA) : à la hauteur de la
lunule
- Intérêt
o Le glomus neuromyovasculaire de Masson : anastomose artério-veineuse au niveau
cutané jouant un rôle dans la régulation circulatoire, thermique et la régulation de la
pression artérielle
o Au niveau du repli sus-unguéal, les anses capillaires sont orientées horizontalement :
permettant leur observation en capillaroscopie (Mégacapillaires
et paysage sclérodermique sclérodermie, dermatomyosite…)
2- Innervation
- Chaque doigt reçoit 4 rameaux nerveux collatéraux : 2 palmaires et 2
dorsaux. La région péri-unguéale est innervée
o Au niveau du pouce et de l’annulaire : par les branches dorsales
o Au niveau des autres doigts : par les branches ventrales
- Composition chimique : L’ongle est une plaque de kératine dure entourée de kératine molle
1- Kératines : différents types de kératines sont exprimées au niveau de l’ongle
- La tablette et la matrice unguéale : kératines dures +++ (ex : K31-K34/K81-K84) + kératines
molles + ponts disulfures rugosité de la tablette et sa résistance aux agressions chimiques
- Pathologie : paronychie congénitale : génodermatose autosomique dominante par mutation
du gène codant pour les K6a ou 16 et les K6b ou 17
2- Autres constituants
- Eau : 7-16%, la diffusion de l’eau à travers la tablette unguéale est 100 fois supérieure à celle
de l’épiderme
- Lipides : Enfant 1,4% - Adulte 0,15-0,76%
o Cholestérol : maintient l’élasticité du complexe unguéal et la cohésion interlamellaire
o Acides gras saturés et insaturés : Acide oléique+++
o Phospholipides : liés au calcium et au sodium
- Ions :
o Calcium : 0,1-0,2% (+ par rapport à la peau) sous 2 formes
Ionisée : liée aux phospholipides à la partie supérieure de la tablette
Cristallisée (hydroxyapatite) : aux deux étages inférieurs de la tablette + la
kératine du lit unguéal
o Fer : Enfant 1mg/g – Adulte 200μg/g
- Croissance unguéale
- La matrice produit de l’ongle en permanence ; sa croissance est continue et uniforme de
l’ordre de 0,1mm/jr chez l’adulte. Les ongles des mains croissant de 3à4mm par mois, ceux
des pieds de 1à2mm par mois.
Le taux de croissance est déterminé par le turnover des cellules matricielles
Le temps de migration de la lunule vers le bord libre est de 130 jours
Le temps de régénération de l’ongle est de 6mois aux mains et de 12mois aux pieds
Facteurs d’accélération Facteurs de ralentissement
Jour Nuit
Eté Hiver
Main active (droitier, gaucher) Main passive (immobilisée)
Doigts Orteils
Enfant, adolescent, adulte Vieillards
Ongles micro-traumatisés, décollés Dénervation
Maladies générales (psoriasis) Lésions matricielles
Infection péri-unguéale Maladies infectieuses sévères
Onychophagie Malnutrition
Un jour d’été, les doigts d’un enfant droitier Par une nuit d’hiver, les orteils dénervés
ont été mangés par une infection générale immobilisés d’un vieillard malnutri ont été
sévèrement infectés par une matrice
Ostéochondrome
Tumeurs synoviales Tumeurs à cellules géantes
Tumeurs lipomateuses Lipome
Tumeurs dégénératives Pseudo-kyste mucoïde
Calcification
Tumeurs histiocytaires Réticulohistiocytose multicentrique
ii. Malignes : avec le plus souvent destruction de la tablette
unguéale. Elles sont volontiers suintantes et
bourgeonnantes. Il peut s’agir de tumeurs épithéliales
(maladie de Bowen, carcinome spinocellulaire, carcinome
basocellulaire) ou de tumeurs mélanocytaires (mélanome)
c. Pustules : leur localisation détermine la symptomatologie
i. Au niveau du repli dorsal bouquet de vésiculo-pustules
ii. Sur le lit décollement de la tablette onychoptose
totale
-Onycholyse Maladie de -Traumatismes -Traumatisme
-Onychomycose Darier -Intoxications aux -Idiopathique pendant
-Congénitale métaux lourds l’enfance
-Ongle de Terry -Lignes de -Mycose superficielle
-Ongle Muehrcke -Psoriasis
équisegmenté -Chimiothérapie -Granulations de kératine
hyperazotémiqu
e
-Chimiothérapie
Symptômes et tics
1- Onychalgies ou onychodynies : douleur de l’appareil unguéal dont les causes sont multiples,
traumatiques, inflammatoires, tumorales ou encore vasculaires
2- Onychophagie : habitude de se ronger les ongles
3- Onychotillomanie : manipulation intempestive de l’ongle et de son pourtour. Elle peut être
attribuée à toutes les manipulations auto agressives de l’appareil unguéal incluant
l’onychophagie
Méthodes d’exploration et méthodes thérapeutiques
1- Explorations :
a. Biologie : carence martiale (koïlonychie de l’enfant), AAN (acrosclérose)
b. Dermoscopie : Pour diminuer le nombre de biopsies unguéales douloureuses avec
risque de dystrophie en cas d’aspect en faveur de mélanonychie bénignes plutôt que
due à un mélanome
c. Capillaroscopie : aide au diagnostic des connectivites
d. Prélèvement mycologique : confirmer ou infirmer l’origine mycosique d’une
dystrophie unguéale
e. Echo-doppler : étudier la qualité du flux sanguin dans les extrémités
f. Imagerie
i. Radiographie standard : étude de la phalange distale en cas de pathologie
osseuse
ii. Echographie et TDM : peu d’intérêt
iii. IRM+++ : kystes mucoïdes et tumeurs glomiques
g. Biopsie unguéale :
i. Apport : ne fournit un diagnostic que si
l’échantillon est prélevé au niveau du site
pathologique
ii. Techniques : relativement simples, sous anesthésie
locales
iii. Risque : dystrophique pour biopsie au niveau de la
matrice
iv. Différents types :
1. Biopsie du lit unguéal : si onycholyse, hyperkératose sous-unguéale ou
tumeur bourgeonnante du lit
2. Biopsie matricielle : Si mélanonychies longitudinales, risque de
dystrophie unguéale en cas de biopsie matricielle proximale
3. Biopsie latéro-longitudinale : Technique qui fournit le plus de matériel
biopsique permettant d’étudier l’appareil unguéal dans son ensemble :
repli dorsal, cul-de-sac unguéal, matrice, lit, tablette, hyponychium.
Explore tout particulièrement les dystrophies totales de l’appareil
unguéal, avec atteinte matricielle et des tissus sous-unguéaux, lit de de
l’ongle et hyponychium
4. Biopsie du repli sus-unguéal : Etude des collagénoses
2- Thérapeutiques
a. Systémiques : antibiotiques, antiviraux, antimycosiques, corticoïdes, rétinoïdes,
immunosuppresseurs, vitamine H, fer
b. Locaux : topiques (antiseptiques, antimycosiques, corticoïdes, kératolytiques,
verrucides) ou par infiltrations intra-lésionnelles (acétonide de triamcinolone)
c. Laser :
i. Ablation et destruction tissulaire (CO2+ Erbium-Yag) : verrues, matricectomie,
fibrokératome, granulome pyogénique
ii. Photothermolyse des lésions vasculaires (Laser à colorant pulsé, KTP-Yag,
Vapeur de cuivre, ND-Yag) : angiomes, verrues périunguéales peu kératinisées
iii. Destruction des lésions pigmentées (Laser Q-Switch, alexandrite, rubis) :
lentigines, tatouages
iv. Traitement des mycoses des orteils (Laser Yag multipulse)
d. Chirurgie :
i. Exérèse d’une tache pigmentée matricielle à l’origine d’une mélanonychie
longitudinale
ii. Avulsions unguéales : indiquées dans les onychomycoses récalcitrantes
(moisissures, épaisseur importante)
iii. Traitement chirurgical de l’ongle incarné
iv. Traitement de la désaxation congénitale de l’ongle du gros orteil
v. Exérèse chirurgicale des tumeurs de l’appareil unguéal : fibrokératomes,
onychomatricomes, exostose sous-unguéales, onychopapillome, pseudokystes
mucoöides, maladie de Bowen, carcinomes épidermoïdes et mélanomes
Conclusion
L’ongle est une annexe cutanée faite de kératine produite par l’épiderme ayant une anatomie complexe
Il joue un rôle dans la protection des extrémités digitales. Peut être atteint de diverses pathologies, et
peut être biopsié.