Karl Popper Et Les Critères de La Scientificité
Karl Popper Et Les Critères de La Scientificité
Karl Popper Et Les Critères de La Scientificité
Plan de l'article :
La théorie d'Einstein lui paraît bien différente. Il est frappé par le fait
que, selon Einstein lui-même, sa théorie serait intenable si elle ne
parvenait pas à passer certains tests. Il écrit : "Si le décalage vers le
rouge des lignes spectrales dû au potentiel de gravitation devait ne
pas exister, la théorie générale de la relativité sera insoutenable"
(Einstein Albert, 1917, cité et traduit par Popper, La quête inachevée,
p.49). Selon Popper, cette attitude critique qui admet que l'on puisse
infirmer sa théorie est caractéristique de la science. La théorie de la
relativité a fait l'objet d'une expérience menée par Eddington en 1919.
Il a effectué des mesures sur une éventuelle courbure des rayons
lumineux prévue par la théorie de la relativité lors d'une éclipse de
soleil [1].
C'est ce dernier point que nous allons voir, car c'est l'apport
spécifique à Karl Popper.
"Si ce sont des confirmations que l'on recherche, il n'est pas difficile de trouver, pour
la grande majorité des théories, des confirmations ou des vérifications" et donc
"une théorie qui n'est réfutable par aucun événement qui se puisse concevoir est
dépourvue de caractère scientifique". Mettre à l'épreuve une théorie est "une
tentative pour en démontrer la fausseté (to falsify) ou pour la réfuter". On doit
constater que "certaines théories se prêtent plus aux tests, s'exposent davantage à
la réfutation que les autres, elles prennent, en quelque sorte, de plus grands
risques". Au total, le critère de la scientificité d'une théorie "réside dans la
possibilité de l'invalider, de la réfuter ou encore de la tester" (Conjectures et
réfutations, La croissance du savoir scientifique, pp. 64-65).
Tant qu'une théorie réfutable n'est pas réfutée, elle est dite
"corroborée". Pour Popper, la corroboration remplace la vérification.
Le but est de s'approcher de connaissances aussi vraies que
possible. Cette approche du vrai ou "vérisimilitude" remplace la Vérité
absolue. Il s'agit "d'une approximation de la vérité" (La quête
inachevée, p.110), d'une proposition la plus vraisemblable possible au
vu de l'état actuel de la connaissance. De fait, l'histoire des sciences
montre que, au fil du temps, de meilleures théories apparaissent et
qu'elles englobent ou détrônent les précédentes. La science
progresse en remplaçant les connaissances existantes par des
connaissances un peu plus vraies, c'est-à-dire un peu plus complètes
et un peu plus universelles. Mais, une théorie scientifique corroborée
n'est jamais définitive, puisqu'une réfutation peut un jour arriver.
3. Quelques facettes du travail de Karl
Popper
Relativisme et vérisimilitude
L'intérêt de Karl Popper est triple quant à la différenciation et la
qualification de la connaissance scientifique par opposition aux
dogmes idéologiques. Il a mis en avant la question de la démarcation
qui reste plus que jamais d'actualité ! Il a indiqué que c'est la méthode
et non le résultat qui permet de juger de la scientificité. Il a démontré
que la vérification est insuffisante en tant que critère de démarcation
et, par là, il a accru les exigences pour déclarer scientifique une
connaissance. À ce titre, il va contre le relativisme en montrant que
tous les savoirs ne se valent pas et ne peuvent être assimilés ou
confondus.
"notre objectif en tant que savant est de découvrir la vérité" et les théories ont pour
but de proposer "d'authentiques suppositions quant à la structure du monde".
"Nous pouvons par conséquent affirmer que les théories ne peuvent jamais être
inférées des énoncés d'observation, ni recevoir de ceux-ci une justification
rationnelle" (Conjectures et réfutations, p. 73).
« 1) Si ce sont des confirmations que l'on recherche, il n'est pas difficile de trouver,
pour la grande majorité des théories, des confirmations ou des vérifications.
2) Il convient de ne tenir réellement compte de ces confirmations que si elles sont
le résultat de prédictions qui assument un certain risque ; autrement dit, si, en
l'absence de la théorie en question, nous avions dû escompter un événement qui
n'aurait pas été compatible avec celle-ci — un événement qui l'eût réfutée.
3) Toute « bonne » théorie scientifique consiste à proscrire : à interdire à certains
faits de se produire. Sa valeur est proportionnelle à l'envergure de l'interdiction.
4) Une théorie qui n'est réfutable par aucun événement qui se puisse concevoir est
dépourvue de caractère scientifique. Pour les théories, l'irréfutabilité n'est pas
(comme on l'imagine souvent) vertu mais défaut.
5) Toute mise à l'épreuve véritable d'une théorie par des tests constitue une
tentative pour en démontrer la fausseté (to falsify) ou pour la réfuter. Pouvoir être
testée c'est pouvoir être réfutée ; mais cette propriété comporte des degrés :
certaines théories se prêtent plus aux tests, s'exposent davantage à la réfutation
que les autres, elles prennent, en quelque sorte, de plus grands risques.
6) On ne devrait prendre en considération les preuves qui apportent confirmation
que dans les cas où elles procèdent de tests authentiques subis par la théorie en
question ; on peut donc définir celles-ci comme des tentatives sérieuses, quoique
infructueuses, pour invalider telle théorie [...].
7) Certaines théories, qui se prêtent véritablement à être testées, continuent, après
qu'elles se sont révélées fausses, d'être soutenues par leurs partisans — ceux-ci
leur adjoignent une quelconque hypothèse auxiliaire, à caractère ad hoc, ou bien en
donnent une nouvelle interprétation ad hoc permettant de soustraire la théorie à la
réfutation. Une telle démarche demeure toujours possible, mais cette opération de
sauvetage a pour contrepartie de miner ou, dans le meilleur des cas, d'oblitérer
partiellement la scientificité de la théorie [...].
On pourrait résumer ces considérations ainsi : le critère de la scientificité d'une
théorie réside dans la possibilité de l'invalider, de la réfuter ou encore de la tester. »
p
1. On sait depuis, paradoxe de l'histoire, que cette expérience a été faussée. Elle
aurait dû réfuter la théorie.
2. En français, falsifier, c'est faire un faux, c'est modifier en vue de tromper. Ce n'est
pas le sens voulu par Popper qui est mieux rendu par les termes réfuter et
réfutable.
Bibliographie :
Popper K., Logic der Forschung, Springer, Wien, 1934. Traduction française : Popper
K., Logique de la découverte scientifique, Payot, Paris, 1973.
Popper K., Conjectures and refutations, 1963. Traduction française : Popper K.,
Conjectures et réfutations, La Croissances du savoir scientifique, Paris, Payot, 1985.
Postface de 1982 à Logic der Forschung. Traduction française : Popper K., L'univers
irrésolu, Paris, Hermann, 1984.
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